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 [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]

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MessageSujet: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 14:55

Qu’est-ce que je fais ici ?

C’est la seule question qui me vient à l’esprit quand je regarde autour de moi. Plus de mers, plus de marins, plus de ponton, plus de taverne. Adieu, fière et inimitable Meca. C’est l’inconnu qui se brouille autour de moi et m’étouffe presque. Oui, cet endroit est étouffant. Et le Monde continue de tourner et de vivre, lui, m’abandonnant comme une pauvre loque sur le bas-côté. Echouée dans le fossé des perdants, je me demande si je n’ai pas agi comme une idiote complète et finie. J’ai tout abandonné pour une chose qui, au fond de moi… M’obsède et me répugne. Qui l’eut cru ? J’appréhende de passer le perron de cet endroit. Mes premiers pas sur le continent ont été éprouvants. Mais ceux qui vont me mener jusque là le seront davantage ; je sais que c’est trop tard pour faire demi-tour, et je sais aussi que beaucoup n’aimeraient pas me voir aussi hésitante et perdue que je peux l‘être, en mon for intérieur – car je cache si bien les choses, comme tant de talentueux imbéciles qui chérissent trop leur dignité pour se laisser aller à l’expansivité de leurs malheurs -.

Les dés sont jetés ; revenir sur ses pas ne servirait à rien. Et depuis quand Kassandra est-elle lâche ? Je relève le regard, quittant des yeux le ciel que j’ai fixé au loin, étendard constellé d’un bleu tendre nuancé de cotonneux nuages. Le printemps m’accueille, et le clopinement des équidés me rappelle à l’ordre douloureux.

Le moment est venu. Terminus, tout le monde descend …

    « C’est ici que vous descendez Mam’zelle. »

    La rouquine adresse à peine un signe de tête à ce brave paysan sur sa charrette qui a bien accepté de la conduire jusqu’aux portes de la demeure Noblegriffon, se laissant glisser péniblement hors du véhicule de fortune d’où elle en ressort avec quelques brins de paille sur sa jupe. Elle s’époussète, lance quelques écus d’une main distraite au vieillard qui lui adresse un grand sourire compatissant. Il ne sait sûrement pas pourquoi, mais il a au moins compris que l’inconnue n’avait pas eu envie de bavarder, et il avait eu le tact de la laisser tranquille. Seule pour digérer l’affrontement prochain.

    Face au portail ouvragé et finement travaillé qui s’ouvre sur une allée large et proprette menant au manoir imposant du dit Noah Noblegriffon, Kassandra s’avance. Intimidée ? Mais qu’est-ce qui lui prenait ? Que lui arrivait-il pour soudainement être muette, anxieuse au plus profond d’elle-même d’un homme qu’elle ne connaissait que de son nom et de son statut ? Etait-ce donc ca, la « peur » ? Kassandra ne l’avait jamais réellement éprouvée, mais elle saisissait pleinement en cet instant tout le sens de l’angoisse qu’un être humain pouvait ressentir, la terreur vibrant jusque dans vos doigts, tordant vos tripes.

    Un pas après l’autre, la jeune orpheline reprend du poil de la bête. Les yeux violines ne quittent pas un seul instant du regard l’ombre fière et saillante des murs du petit château, et rien d’autre ne compte : le néant total autour d’elle, elle occulte l’existence des autres, la colère probable de ce qui fut son capitaine, les recommandations alcoolisées de Rhamyr, les boucles d’oreilles dansant sous les doigts délicats du Gardien, les joutes et les spectacles fantastiques de la capitale, et Gabriel …

    Mue par une soudaine rage, la rouquine s’emporte et se met à animer ses pas de violence. Une digne colère, élégante et impériale, ses talons s’enfonçant dans les graviers et crissant. Sous la vivacité de sa démarche, ses boucles rousses s’agitent comme un carillon, la mélodie du vent soufflant par delà les fenêtres des Noblegriffon l’oiseau de mauvais augure qui s’approche, vite, si vite …

    Que va-t-elle dire ? Que va-t-elle faire ? Rentrer en fracas dans l’endroit, hurler ? Demander patiemment et attendre l’audience ? Et une fois qu’elle pourra être face à lui, en admettant qu’elle y arrive ? Ses jambes la lâcheront-elle ? C’est une crainte qu’elle ne veut pas voir se confirmer. Ses ongles s’enfoncent dans la chair de ses paumes rougies, et la douleur lui rappelle à quel point elle est tellement hors de cette époque, de ce temps, de ce paysage. Qu’en était-il de son oncle ? Lui non plus ne devait pas se sentir Noblegriffon. La preuve en était qu’il avait préféré vouer sa vie à Eris, risquant son existence pour les flots, une raison bien incompréhensible pour la majeure partie des hommes de Miradelphia.

    Au fil de sa progression, et alors qu’elle atteint la large étendue graveleuse prête à accueillir les suprêmes carrosses des autres bourgeois de leur envergure, Kassandra s’arrête et reprend son souffle, avide d’air et de réponses. Seule l’atmosphère l’oxygène et lui insuffle un peu de courage, cette force qui lui manque et a tendance à lui filer entre les doigts. La demoiselle sait bien qu’elle n’est pas en territoire conquis, et imagine déjà que l’homme qui est son père ne voudra pas entendre parler d’elle. Mais ses désirs sont contraires.

    Parce qu’il a laissé sa mère prendre les voiles et perdre la vie. Parce qu’il a tué la seule femme que Kassandra aurait voulu apprendre à connaître. Tout le monde avait une mère ; et elle n’en avait pas. La jalousie peut vous offrir ce dont vous rêvez en secret, mais qui peut remplacer la présence d’une mère dans le cœur d’une femme déjà trop rongée par l’acide des péchés ? Personne ne fera le poids. Et c’est de sa faute. Il ignore même qu’elle existe, il vit dans le luxe, se pavane sûrement dans de grandes festivités et s’affale dans l’oisiveté de l’âge sans aucun remords. A-t-il déjà effacé de sa mémoire l’existence d’Anya ? Kassandra a du longtemps se forcer à une réponse positive, mais à nouveau, entre ce que la raison et le cœur vous murmure au creux de l’oreille, la tentation de s’abandonner aux bras des passions et des souhaits sincères est grande.

    La jeune femme grimpe les quelques marches la séparant des grandes portes, mais au moment de les pousser, c’est un garde qui l’interpelle. La voix grave et impassible l’interpelle alors que la silhouette fond droit sur elle, la cotte de maille se balançant au rythme de l’allure saccadée. Inutile d’ouvrir les portes comme une voleuse et de s’engouffrer dans l’intérieur étranger, songe Kassandra avec amertume. Ce serait le meilleur moyen d’être expulsé. Et de toute manière, ses jambes refusent d’avancer, vissées au sol pour une raison inconnue – ou qu’elle veut ignorer -.

    Sa fougue reprend les devants tandis que ses lèvres s’ouvrent d’elle-même et laissent échapper le discours auquel elle pense si fortement depuis des jours, sa voix ressemblant au ton monocorde et blanc de celle qui annonce le décès inattendu d’un proche.

    « Dites à Noah Noblegriffon que sa fille est là. »

    A-t-il d’autres enfants ? Fort possible ; à la vue de l’expression intriguée et méfiante du garde, Kassandra devine que ce n’est pas elle qui aurait été attendue. Devant le refus qu’elle voyait arriver à toute allure, la rouquine s’empresse de rajouter, sa voix reprenant un peu des couleurs de l’ironie polie.

    « Si vous y tenez tant que ça, vous n’avez qu’à me fouiller. Je n’ai aucune arme, je n’attenterai pas à la vie de Messire Noblegriffon. »

    Le sardonisme perça par delà l’appellation beaucoup trop ampoulée. La rouquine fit face au garde, levant ses bras sur l’instant, puis elle croisa ces derniers. Parler l’avait libéré du poids étrange qui flottait sur elle. Doucement la jeune femme reprenait confiance. C’était déjà ça de gagné.


Dernière édition par Kassandra le Jeu 15 Avr 2010 - 11:22, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 16:58

Liens de Sang
Serramire, neuvième semaine du printemps

PNJ : Théodore, Intendant des Noblegriffon

Théodore n’en pouvait plus. Voilà plus d’un an qu’il vivait seul en compagnie du patriarche Noblegriffon… Noah était un maître des plus détestables, imbu de lui-même et intraitable quant aux erreurs que pouvaient commettre ses serviteurs. Colérique, il en devenait même pathétique, tant ses paroles dépassaient de loin ses véritables possibilités. Privé de tout pouvoir par une fille trop indépendante pour supporter ses caprices, il n’avait pourtant rien changé de ses habitudes. Le pauvre vieillard devait avoir, au moins en partie, perdu la tête. Et si l’Intendant de la famille adorait la jeune Katalina, il ne pouvait pas supporter son père.

« Imbécile, la dame est en Erac avec le Roi.
- Je sais bien… Moi je dis juste ce que m’a répété la rouquine. »

La… rouquine ? Haussant un sourcil grisonnant, le domestique se leva péniblement.

« Une parfaite inconnue t’affirme qu’elle est la fille de Noah, et tu cours ?
- C’est que… » Le pauvre garde marqua une courte pause, avant de reprendre, évitant de regarder l’homme qui lui faisait face. « Elle porte des boucles d’oreille… frappé du blason du griffon. »

Le regard de Théodore se fit dur, alors qu’il s’approchait de sa « victime ». Boitant légèrement, il s’appuyait sur sa canne, qui prenait des allures menaçantes dès qu’on savait comment le vieil homme avait pu s’en servir pour corriger certains chenapans un peu trop perturbateurs à son goût. Posant une main ferme sur son épaule, il le força à le regarder.

« Les bijoux… Sont-ils en or ? Grands comme ça ? » le pressa-t-il, écartant légèrement les doigts. « Réponds !
- Ou… oui ! »

C’était impossible, irréel. Si les yeux de l’Intendant avaient été des dagues, le pauvre garçon qui lui avait annoncé la mauvaise nouvelle ne serait déjà plus de ce monde. Car il voyait très bien, bien trop bien, de quoi il s’agissait. Il avait déjà vu les boucles en question, aux oreilles de Miravia. Elles avaient été le cadeau de mariage de Noah à son amie d’enfance… Car s’il avait rejoint le service des Noblegriffon, ce n’était pas pour Noah, non, mais bien pour son épouse, avec qui il avait grandi à Versmillia. Et la seule chose qui expliquait encore sa présence entre ces quatre murs qu’il détestait désormais était la possibilité que la jeune Katalina puisse un jour y revenir.

« Tu n’as rien vu, rien entendu, et personne n’est venu voir Noah. C’est clair ?
- Euh… Très clair. »

* * *

« Dis-moi, petite… Où as-tu eu ça ? »

La canne froidement pointée vers la pauvre Kassandra, Théodore l’observait du haut des marches. Il avait à peine ouvert la porte qu’il avait repérée les bouches d’oreille… Mais il ne pouvait toujours pas croire à leur présence. C’était impossible. Il ne se rappelait que trop bien la culpabilité de Miravia quand elle avait remarqué leur disparition, et voilà qu’elle réapparaissait sur une jeune rouquine qui affirmait être la fille de Noah. Reposant sa canne au sol, il ne lui laissa pas le temps de répondre et se retourna, ouvrant en grand la lourde et porte.

« Suis-moi. Nous discuterons mieux de tout cela à l’intérieur. »

Pauvre Kassandra, qui ne comprenait sans doute pas de quoi il en retournait. L’homme qui venait de l’alpaguer était-il son « père » ? Théodore n’était pas cruel par nature, et s’il l’était un peu avec la jeune femme, ce n’était pas intentionnel. Mais il n’aimait pas du tout ce qui se profilait, et voulait voir les choses au clair avant de laisser le vieux Noah s’y intéresser.

« Et ne traîne pas ! » rajouta-t-il sans même prendre la peine de se retourner.

Il la conduisit au travers des couloirs richement décorés, boitant et marmonnant, alors que sa canne frappait tel un métronome le sol recouvert de tapis. Finalement, ils débouchèrent dans une petite pièce, bien plus sobre mais peut-être plus familiale, aussi. S’approchant de la fenêtre, il ouvrit les rideaux avant de désigner la table trônant fièrement au milieu de la pièce et les chaises qui l’entouraient du bout de sa canne.

« Assieds-toi, je t’en prie. Je m’appelle Théodore. »


Dernière édition par Katalina le Dim 18 Avr 2010 - 21:07, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 18:05

    A peine eut-elle parlé que le garde s'éclipsa, son regard trahissant le choc qui l'avait frappé, léger mais vif. Qu'avait-elle donc pu dire pour qu'il ne prenne même pas en compte l'éventualité que la rouquine mente et soit réellement armée ? La jeune femme fronça un sourcil mais haussa les épaules, se contentant de suivre d'un regard intrigué le garde qui s'éclipsait à pas précipités, faisant signe à la jeune étrangère qu'elle était d"attendre ici.

    Les premières secondes parurent courtes, jusqu'à ce que le temps s'étire, mollement. Qu'était-il parti faire ? Prévenait-il une faction quelconque ou des collègues plus forcenés afin d'expédier l'intruse mythomane hors des murs de la propriété Serramiroise des Noblegriffon ? La rouquine n'aurait su le dire. Peut-être était-il vraiment parti avertir Noah. Peut-être qu'il était en train de discuter avec son véritable père, lui annonçant une nouvelle qui lui décrocherait la mâchoire et le ferait écarquiller les yeux sous le choc. Les réactions étaient multiples et se tenaient toutes plus ou moins dans l'esprit tumultueux de la jeune femme, qui finit par s'adosser à l'un des pans de la porte fermé. Un soupir plus tard, ses ongles s'entrechoquaient dans un bruit léger rythmant l'air d'une inquiétude dissimulée par un tic malhabile. Si ça continuait, le temps que le garde revienne, elle serait déjà partie et renoncerait à toutes ces sottises, car l'envie de prendre ses jambes à son cou ne s'était que partiellement envolée.

    C'est au moment où la flamboyante créature se redressa dans un souffle las que la voix chevrotante la rattrapa. Pivotant sur ses talons, Kassandra, surprise, recula d'un pas, interloquée par la présence du vieillard face à elle : on était loin du garde de tout à l'heure au visage bonhomme et aux manières un peu rudes mais au moins dénuées de ce sentiment d'inspection et de jugement que dégageait l'inconnu face à elle. Fronçant e nez devant l'objet pointé vers elle comme une épée menaçante, Kassandra n'eut pas bien à chercher longtemps avant de deviner que la canne meurtrière désignait ses jolies petites babioles frappées du griffon.

    « Je ... »

    Mais déjà elle fut interrompue, l'homme à la canne lu intimant de le suivre sans faire d'histoires et en se pressant, s'il vous plait, il n'avait pas que ça à faire. Que diable, cette situation l'avait transformée en une petite fille intimidée par la moindre silhouette un tant soi peu confiante en elle-même. Il fallait qu'elle se ressaisisse !

    Alors que la pirate allait passer le pas de l'entrée en marmonnant qu'elle en avait déjà marre d'être ici sans même y être restée plus de cinq secondes, une pensée lui dénoua le ventre et la rendit plus livide que jamais. Et si c'était LUI, son père ? Son regard myosotis observa longuement le dos penché par les années de son guide improvisé, ses manières, sa démarche, son allure. Il était assez sec, semblait aux aguets et attentif malgré l'âge qu'il devait avoir et qui devait aller de paire avec son apparence ... Mais bizarrement, Kassandra avait du mal à visualiser en lui son géniteur. Qui plus est, il n'avait pas l'allure qu'elle s'était imaginée. Oui, c'était un peu naïf de se baser sur les idées préconçues que notre imaginaire pouvait développer. Mais ne dit-on pas que les premières impressions forgées étaient souvent confirmées ?

    Quoiqu'il en soit, le regard de Kassandra vaqua de l'homme qui la menait dans divers couloirs aux décorations, aux murs tapissés de manière raffinée, la recherche et le goût allant jusqu'à assortir les meubles, les grandes fenêtres éclairant par intermittence de larges espaces de murs et de sol parqueté, finement astiqué. La rouquine se risqua à un coup d'oeil vers ses pieds, croyant presque avoir aperçu son propre reflet au travers du bois ciré. Tout semblait trop beau, trop surfait, trop excessif, comme si on avait voulu montrer à qui voulait le voir une richesse incommodante.

    L'inconnu sans âge stoppa leur course au travers du labyrinthe et fit rentrer la demoiselle dans une pièce qui ne servait apparemment pas à accueillir le roi au vu de la décoration plus sobre et un poil plus personnelle, lui désignant une chaise. La jeune femme jeta un long regard circulaire, lente, prenant son temps pour distinguer les choses et admirer l'endroit sous sa carapace d'aisance fausse, et s'y assit prudemment, avant d'entendre les présentations qui confirmèrent son idée : cet homme n'était pas celui qu'elle était venue trouver. Son regard se reposa sur l'homme, à la fois à l'écoute mais braquée, laissant à penser qu'au moindre mot de travers, elle aurait sauté par la fenêtre.

    Petit félin effarouché.

    « Ecoutez ... Théodore. Je ne sais pas vraiment qui vous êtes, et pour être sincère je m'en fiche, ce n'est pas pour vous que je suis venue ... Je viens voir Noah Noblegriffon. Il me doit des explications sur ma mère. Ces boucles, comme vous l'avez vu, sont la preuve vivante qu'il est mon père. Il faut que je le voie, s'il vous plait. »

    Ces derniers mots parurent comme une pointe de supplication si timide et si cachée derrière un masque épais de méfiance qu'ils sonnaient comme un caprice attendrissant. Mais Théodore, d'après ce qu'il lui inspirait, semblait être un "obstacle" à passer.

    « Qu'est-ce que vous voulez savoir ? »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 18:32

S’il avait été seul, s’il n’avait pas du supporter le regard interrogateur et légèrement irrité de la rouquine, alors surement Théodore se serait laissé aller à la colère qui irradiait de son regard. Son poing était crispé sur le manche de sa canne, à tel point que ses doigts blanchissaient sous l’effort. Noah avait osé ! Il avait osé tromper Miravia, il l’avait humiliée sans que personne ne le sache. Et le pire était qu’il avait offert les boucles d’oreille de sa femme à la catin qu’il avait engrossé… ces mêmes boucles qui avaient été son cadeau de mariage ! En cet instant, l’amoureux qu’il avait été rugissait sous le coup de l’injustice. Il avait renoncé à la femme qu’il aimait, parce qu’elle était noble et qu’il ne l’était pas, l’avait vu se marier à un homme qu’il avait appris à haïr pour ce qu’il était : un homme arrogant et imbu de lui-même.

« Tu viens voir Noah… »

Et il avait presque craché le nom honni. Il souleva et rabaissa violement sa canne sur le sol, laissant le choc lui engourdir le bras alors que le bruit sec résonnait dans la pièce. « Le chien ! » fut la seule insulte qu'il se permit, murmurée mais encore bien trop audible. Il soupira bruyamment, gardant le silence le temps de reprendre son calme. Pauvre enfant, simplement à la recherche de son père et de réponses, voilà qu’elle ne trouvait que l’ire sincère de son serviteur.

« Soit. »

Se redressant péniblement, il s’approcha d’elle, plongeant son regard noisette dans celui si particulier de son interlocutrice. Cela, elle ne le tenait pas des Noblegriffon. Qui était la mère ? Théodore l’avait elle rencontrée ? L’Intendant s’en serait souvenu, s’il avait déjà croisé de tels yeux…

« Juste ton nom et ton âge. » Il marqua une pause, le temps de reprendre une attitude totalement neutre. « Tu verras ton père, mais pas tout de suite. Tu vas d’abord manger quelque chose, le temps que je vois où il se cache. »

Noah n’était surement pas loin. Du moins, s’il n’était pas parti comme un voleur, mu par un quelconque projet dont il n’avait rien dit à son fidèle et « dévoué » Intendant. Le plus dur serait de l’amener dans une pièce adéquate à la rencontre qui se préparait sans éveiller ses soupçons. Car Théodore ne ferait aucun effort pour le ménager, oh non… Le patriarche allait devoir affronter le fruit de ses erreurs de jeunesse de visu, sans aucune préparation. Et qu’il essaie seulement de lever la main sur la jeune fille. Théodore avait déjà choisi son camp, et étrangement, il se porterait garant de la sécurité de celle qui incarnait la trahison d’un époux envers la femme qu’il avait tendrement et unilatéralement aimé.

« Tu es sûre de vouloir le rencontrer ? Tu seras déçue. »

La vérité, énoncée avec tristesse, sincérité et un brin de rancœur. Ah qu’il pouvait détester son « employeur » ! Il n’en pouvait déjà plus, mais alors là… Sa décision était prise, il irait rejoindre Katalina en Erac. Et surement lui raconterait-il cette surprenante et déplaisante rencontre. Surement, s’il osait, ce qui n’était pas certain. La jeune femme lui avait énormément manqué, et il ne voulait pas la revoir en tant qu’oiseau de mauvais augures.

Mais l’heure n’était pas encore aux retrouvailles… mais plutôt aux rencontres.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 20:11

    La rouquine esquissa faiblement un geste d'acquiescement à l'interrogation du vieillard. Les jambes croisées, ainsi sagement reposée et encline à répondre à ses questions, Kassandra s'attendait à ce que l'homme réagisse d'une toute autre manière : qu'il hausse les sourcils, qu'il lui éclate de rire au visage ou pire, qu'il hurle qu'elle était une menteuse et qu'elle ne méritait que la corde au cou ou la tête sous le billot pour mentir aussi effrontément et éhontément. Mais elle ne s'était guère attendue à entendre une insulte visant apparemment le dit mystérieux Noah, le coup de canne heurtant le sol la faisant sursauter malgré elle. Ce Théodore semblait être hargneux et n'avait pas perdu de son énergie, c'était bel et bien une certitude. Et étrangement, la perspective de rencontrer son père s'obscurcissait derrière un nouveau voile sombre chargé d'intrigues du passé. A la liste des personnes qui ne portaient pas son père dans leur cœur s'ajoutait même celle de cet homme qui était ... Sûrement une sorte de valet ? En tout cas, l'employé n'appréciait pas l'employeur. Kassandra commençait sérieusement à avoir des doutes sur le caractère et la personnalité ombrageuse de Noah.

    Silencieuse, la pirate maintint le regard face aux yeux, acérés et inquisiteurs de Théodore. Il la sondait, cherchant indubitablement d'où lui venaient certains traits de son visage, la couleur de ses yeux, cette chevelure éclatante, ces boucles ... Kassandra avait sûrement des points physiques communs à ceux de son père. A n'en pas douter. En espérant qu'elle n'ait pas un caractère qui vienne de lui : apparemment, il n'était guère présenté comme un homme admirable.

    « Kassandra, 24 ans. Si ça peut vous aider, ma mère s'appelait Anya ... Mais j'ai pas faim, ca ira. Je peux attendre ici. »

    Elle avait l'estomac trop noué pour pouvoir avaler ou déglutir quoi que ce soit : si c'était pour le recracher sur les pieds de son père dès la première rencontre à cause de l'angoisse, ca n'en valait franchement pas la peine. La seule chose que Kassandra aurait désiré qu'on lui propose, c'était de fumer, ou de boire un petite quelque-chose pour se détendre. Mais c'aurait été déplacé, sûrement mal venu et le moment n'était pas encore venu de choquer. Elle attendrait que les présentations soient faites pour se montrer sous son véritable jour. La jeune femme refusa donc l'invitation de Théodore, se contentant de poser son regard sur la fenêtre par instants, suivant du regard la progression et les faits et gestes de l'Intendant de la demeure.

    La question de ce dernier la fit à demi-sourire. Un rictus qui se dessinait, partiellement hésitant, mais à la fois cynique. Une de ses habituelles marques de fabrique.

    « Je n'ai pas fait tout ce chemin pour rien. Au moins je serais fixée. »

    Ses paroles, qui se voulaient légères et nonchalantes, sonnaient plus comme les propos d'une femme résignée, qui n'avait pas su tenir et voulait au plus vite se débarrasser des hantises qui ne cessaient de la tourmenter depuis ces derniers temps. La déroutante rencontre avec le Gardien d'Arcamenel avait fait partie de ces éléments déclencheurs qui vous pourrissaient la vie en même temps qu'elle l'éclairait d'une lumière nouvelle, pas forcément chaleureuse.

    Comme pour finalement se justifier sans revenir sur sa pensée, Kassandra finit par lâcher à demi-mot.

    « Vous n'êtes pas la seule personne à ne pas l'apprécier, je le sais. J'imagine que personne n'aurait envie de rencontrer un homme détestable, mais c'est mon père. Je ne peux pas éternellement faire comme si'l n'existait pas. »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 21:20

Vingt quatre ans… Deux ans après la naissance de Katalina, donc. Théodore avait beau fouiller dans les méandres de sa mémoire fatiguée, il n’arrivait pas à se souvenir de la jeune femme en question. Mais après tout, cela n’aurait pas changé grand-chose. La pauvre était morte, du moins c’était ce que le vieillard avait compris en entendant sa fille en parler au passé. L’espace de quelques secondes, son regard se voila de compassion alors qu’il tentait d’imaginer la vie de l’orpheline.

« Eh bien, reste le ventre vide si tu n’as pas faim… » Il tenta d’accrocher son regard. « C’est bien dommage pour toi, notre cuisinier peut faire des merveilles, quand on sait le motiver. »

Sans vraiment savoir pourquoi, il ressentait le besoin d’alléger un peu l’atmosphère. Il se rendait bien compte qu’il n’avait pas été très tendre avec Kassandra. Estomaqué par la nouvelle et par ce qu’elle impliquait, il avait voulu savoir, comprendre, et avait oublié qu’en face de lui se trouvait rien de plus qu’une orpheline à la recherche de sa famille. L’âge et la vieillesse rendent parfois aigri et maladroit, mais elle parvient rarement à gommer la curiosité si propre à la jeunesse. Et Théodore était curieux, indubitablement. Que savait la rouquine de son père ? Il préférait faire voler en éclats ses possibles illusions tant qu’il le pouvait encore, car connaissait Noah, il le ferait avec beaucoup plus de désinvolture que lui. Le sourire qu’il obtient comme récompense à sa mise en garde le fit se dire qu’il avait peut-être surestimé la naïveté de la rouquine.

Il y avait du cynisme, un brin de résignation, mais bien assez de motivation. C’était un trait de famille, apparemment. Théodore devait bien laisser ça à Noah, quand l’homme voulait quelque chose, il faisait tout pour l’obtenir. Tout. C’était bien ça le souci. Katalina elle aussi savait faire preuve d’une force de caractère louable, en témoignait son empire florissant. Et Kassandra… Eh bien, le simple fait qu’elle se trouve en face de l’Intendant en disait long aux yeux de ce dernier.

« Veux-tu que je te parle de son père ? » Elle ne s’était peut-être pas attendue à cela… Mais après tout, il pouvait bien le faire. « J’essaierai d’être objectif. » ajouta-t-il, esquissant le sourire si particulier du vieillard, doux et complice, timide dans son cas car il savait qu’il n’avait pas du faire une très bonne impression.

Oui, Théodore savait faire la part des choses. Aussi fort qu’il haïssait Noah, pour de nombreuses raisons pas toujours valables, il savait garder une vision globale de l’homme qu’il était. Certes, il voyait avec plus de facilité les défauts, et traiter avec désinvoltures les rares qualités, mais tout de même.

« Noah et moi… disons que nous avons des rapports difficiles. Si je suis encore à son service, c’est uniquement parce que sa fille m’apprécie. Mais je le connais depuis bientôt trente ans, et je pense bien le connaître. »

Katalina… La fille qu’il n’avait jamais eu, qu’il aurait adoré avoir. Une fille qu’il considérait un peu comme sa nièce, à défaut de mieux. Il l’avait vu grandir, de loin, et lui avait parfois donné quelques coups de pouce en toute discrétion. Après tout, elle était la fille de Miravia, et rien que pour cela, il n’avait jamais hésité.

« Mais si tu veux, tu peux toujours te faire une idée par toi-même directement. »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 22:41

    « Mon estomac n'arriverait pas à ingérer quoi que ce soit, même si c'est délicieux ... Mais c'est gentil. »

    Kassandra sentit l'homme se détendre un peu, tenter même une approche plus douce et moins brutale que la façon dont il avait pu la traiter jusqu'ici. Certes, c'avait été de son devoir de vérifier si la rouquine n'était pas une femme avilie aux intentions sournoises envers son "maître", mais comme une bonne partie de ces personnes dont le fond de l'âme était bonne, Théodore ne resta pas bien longtemps l'homme austère et méfiant qu'il avait été.

    Gentil, cet homme était gentil. Son père lui, n'avait pas l'air de l'être. Qu'y pouvait-elle ? Elle-même n'était guère un modèle de sagesse et de douceur. Elle avait ses défauts, et aussi nombreux soient-ils, elle n'avait pas la spontanéité, la fraîcheur et l'amabilité naturelle de ces personnes qui savaient être agréables et faciles à vivre. Non, au contraire, la pirate était caractérielle et n'en faisait la plupart du temps qu'à sa tête, ce qui en agaçait plus d'un. Si elle avait su comment sa mère réagissait dans le passé, peut-être se serait-elle sentie moins "dépourvue" d'une famille, ou d'un sentiment d'appartenance à quelque parenté ... Quoiqu'elle avait tout quitté pour s'éloigner, prendre des distances à cause de sa grossesse. Une femme qui fuyait les responsabilités et n'affrontait pas les problèmes : Kassandra tenait-elle finalement plus de sa mère que de son père ?

    « Franchement, dites ce que vous pensez. L'objectivité est ennuyeuse. »

    Elle lui rendit son sourire, se sentant plus en confiance face à ce qui pourrait peut-être être un allié avant la confrontation qui l'attendait. Sans se départir du peu de sérénité qu'elle avait repris, la rouquine s'installa plus à son aise sur la chaise au dossier moelleux, respirant un peu mieux dans l'air un brin allégé par la discussion qui prenait un ton sûrement moins formel.

    « Sa fille ... Donc il a une fille. Comment est-elle ? »

    Kassandra apprenait qu'elle avait une soeur. Oh, cela ne la surprenait qu'à moitié. Aerandir avait évoqué l'histoire d'un Lys, et il ne pouvait s'agir de l'épouse de son père, si tant est qu'il en avait encore une. Mais la pirate ignorait tout de cette demi-soeur, jusqu'à son nom et son âge. Peut-être était-ce une enfant ? C'était une chose qu'elle n'espérait guère au fond d'elle : les marmots, Kassandra ne les appréciait pas réellement, préférant les voir gambader de loin. Une femme indépendante, libre et surtout adulte lui aurait davantage convenu. Mais on ne choisit pas sa famille, elle en était la démonstration.

    « Ca vaut mieux, oui... Ca vaut mieux. »

    Le silence retomba platement dans la pièce, les yeux de Kassandra se replantant avec moins de brutalité dans le regard de Théodore. Il semblait toujours aussi contrarié de ne pas savoir reconnaître les traits d'une autre en elle, et ce fait l'amusait, mais elle se tenait correctement, se contenant et se contentant d'avoir l'air la moins énervée possible. Alors qu'elle bouillait, et qu'il ne faudrait pas grand chose pour mettre le feu aux poudres.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 25 Fév 2010 - 23:30

L’objectivité, ennuyeuse ? Théodore esquissa un pauvre sourire, proche du désabusement. L’objectivité n’était pas seulement ennuyeuse, elle était aussi inexistante, impossible, idéale et illusoire. Mais cela, Kassandra l’apprendrait bien assez tôt. Il n’était pas son père, il ne lui revenait pas de l’éduquer et de lui enseigner les grandes vérités de la vie. Noah ne le ferait sans doute pas… aussi la rouquine devrait-elle se résoudre à découvrir par elle-même ce que d’autres avaient la chance d’apprendre avec l’aide d’un autre.

« Je ne te dirai qu’une chose, alors. Noah ne vit que pour sa famille. Noblegriffon, Noblegriffon, il n’a que ce mot à la bouche. L’âge l’a rendu aigri, et il n’a pas vu son pouvoir s’amoindrir avec le temps. Dans sa tête, il est toujours le Seigneur incontestable d’une famille qu’il tient d’une poigne de fer. Il a essayé de transmettre ce trait de caractère à Katalina, mais il n’a que partiellement réussi. Sa fille s’est libérée de son influence, et je dois avouer que je m’en suis réjouis plus que de raisonnable. »

Il secoua doucement de la tête, esquissant un sourire moqueur malgré lui.

« Le fou, un jour il ouvrira peut-être les yeux. » Son regard se planta dans celui de Kassandra. « Et ce jour est peut-être arrivé. »

Alors que le silence reprenait perfidement ses droits, l’Intendant se leva péniblement, s’appuyant sur sa fidèle canne usée par le temps et une utilisation forcenée. Tapotant le sol, il prit la direction de la porte, lui faisant signe de la suivre.

« Nous irons voir Noah plus tard. Mais tu dois te préparer un minimum. »

Théodore n’était pas très fier de ce qu’il allait faire… Mesquin, bas, cruel, et ainsi de suite. Les termes utilisables étaient nombreux, mais il repoussa au loin les remords qui déjà pointaient le bout de leur nez. Il guida la jeune bâtarde au travers des couloirs, une nouvelle fois, sans les regarder. Ouvrant une porte, il s’engouffra dans la pièce qui se révéla être une chambre.

« Assieds-toi sur le lit. »

S’approchant d’une penderie, il posa sa canne contre le meuble avant de l’ouvrir et de fouiller rapidement dedans. Il laissa échapper un « Aaah. » de satisfaction, avant d’en retirer une magnifique robe. Il esquissa un sourire attendri, nostalgique et légèrement triste alors qu’il caressait tendrement l’étoffe, puis soupira et se tourna vers la jeune femme, qu’il jaugea.

« C’est étrange, mais tu fais à peu près sa taille… Cette robe a appartenu à une femme que j’ai bien connue, elle devrait t’aller comme un gant. »

Noah verrait le fruit de sa trahison vêtu des étoffes de celle qu’il avait trompé. C’était cruel, mais ce serait là la seule vengeance d’un homme aigri et empli de rancœur. Kassandra lui en voudrait surement, si elle venait à découvrir la vérité… Mais il s’en remettrait.

« Je vais te laisser te changer, je t’attend dehors. »

Et il entreprit de quitter la pièce.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeVen 26 Fév 2010 - 18:24

    Kassandra écoutait plus qu’elle ne parlait, fait étrange et inhabituel. Ce que Théodore lui révélait lui en apprenait plus que ce qu’Aerandir avait formellement dévoilé. Le portait de son géniteur se dessinait avec de plus en plus de concision, mais ca n’était au fond peut-être pas si rassurant. Il y avait beaucoup plus d’ombre que de lumière dans tout ce qu’on lui confiait au sujet du Noblegriffon. Seule clarté apaisante apparemment pour son interlocuteur, la fille restait un mystère entier pour Kassandra. Elle devait être son aînée … L’avait-elle déjà croisée ? Etait-elle connue pour de quelconques talents ? Ou n’était-ce qu’une godiche peu intéressante ? Le doute subsistait alors que la rouquine hochait lentement la tête, gardant en mémoire ces informations qui fermentaient. Puis Théodore lança les mots magiques qui réveillèrent la demoiselle.

    Se préparer. La jeune femme redouta intérieurement cette expression. Elle allait déjà devoir mentir sur sa façon d’être et de paraître ? Ca ne lui plaisait pas. Elle aurait préféré que Noah la voit telle qu’elle était vraiment, et non pas se cacher. Que croirait-il ? Il penserait avoir en face de lui une jeune fille déboussolée et esseulée, et non pas la forte personnalité qu’elle avait toujours su être. Théodore ne le savait pas, évidemment, et il se devait d’ignorer la réalité au sujet de son identité et de son ancien métier. Par chance, sa rose était cachée. Mais pour combien de temps …

    Kassandra se redressa, abandonnant la chaise qui déjà lui manquait – elle aurait aimé rester là plutôt que de s’approcher du loup -, et suivit à nouveau l’intendant dans un dédale de couloirs et de marches qu’ils dévalèrent et parcoururent dans la rapidité. Il n’y avait pas de temps à perdre. Noah serait-il donc si furieux et ulcéré de rencontrer une « étrangère » à son insu ?

    Théodore la poussa à nouveau dans une chambre, la refermant et inspectant alors l’armoire de bonne facture qu’il venait d’ouvrir. Celle-ci était remplie de robes aux couleurs chatoyantes, certaines dégageant une nuée de poussière légère qui brilla à la lueur du soleil. Apparemment, cette chambre était peu fréquentée par la femme qui y vivait.
    Ou y avait vécu.

    Lui intimant de s’asseoir après avoir longuement hésité et évalué Kassandra d’un œil expert, le vieillard lui tendit présentement ce qui allait être son apparat éphémère. Et sans plus de cérémonie, le vieil homme reprit sa canne fétiche, s’en allant pour la laisser se changer en paix. La porte se referma sur elle-même, et ses yeux se posèrent sur la robe.

    C’était là le début d’une condition étrange. Elle allait faire comme peau neuve, prête à enfiler des tenues hors de prix que jamais elle n’aurait mis sur l’Onirique ou imaginer un jour porter. Cette robe représentait ce qu’elle haïssait et méprisait, mais c’était aussi la porte d’accès, la voie royale et toute tracée à ses espoirs cachés. Et quitte à se souiller par la richesse, autant le faire en toute arrogance.

    La jeune femme se saisit prestement de l’étoffe comme d’une arme, sa main rentrant en contact avec la soie sauvage si finement taillée. Reposant la toilette sur le lit, la rouquine entreprit de se débarrasser de sa jupe, dénouant le corset qu’elle envoya rejoindre auprès du bas, et se glissa dans le fourreau de tissu, ses jambes hâlées se dissimulant sous l’étoffe. Quelques froissements plus tard, Kassandra refermait les lacets qui fermaient le tout, serrant avec force, chaque cordelette tirée soigneusement pour comprimer le buste. Ce n’était pas, certes, aussi bien fait que ce qu’on aurait pu croire, mais la rouquine n’avait pas l’impression de s’être si mal arrangée que ça. Son regard, hésitant, se tourna vers le miroir, et elle avança prudemment, jusqu’à se trouver en face du reflet ondoyant.

    Ce qu’elle vit face à elle n’avait pas de qualificatif. Se tenait devant la pirate une jeune femme à la longue chevelure auburn, les boucles entremêlées jouant sur ses épaules et tombant le long de son dos dénudé. La femme aux yeux d’un mauve évoquant ces champs de violette printaniers semblait figée ; mais ce visage relevait avec une grâce étonnante la tenue, qui magnifiait la silhouette et la transformait, littéralement.
    Le bustier d’un vert amande était cousu sur les bords de broderies aux fils d’argent, quelques perles signant avec régularité la touche discrète. Les lacets verts de gris se croisaient le long du corps, jusqu’à tomber dans un pli soigné sur le bas de l’étoffe où l’on distinguait un léger froncement. Naissaient alors des pans de tulle douce et sobre aux teintes céladon qui recouvraient la principale traîne couleur de mélèze, les doux reflets bleutés contrastant avec élégance. Le tout retombait soigneusement aux pieds, cachant avec justesse les bottes qui n’étaient guère assorties. L’espace d’un instant, Kassandra eut envie d’ôter cette robe ; c’était presque dérangeant de se sentir aussi petite dans une tenue inconnue et qui pourtant, lui allait parfaitement. Le hasard poussait le vice à ce point.

    « C’est le moment … »

    Soufflant un bon coup, Kassandra tourna les talons, tentant d’ignorer au possible les questions qui lui venaient naturellement – à qui avait bien pu être cette robe ? – et prit la direction de la porte, l’ouvrant pour sortir de la chambre, hélant doucement l’intendant qu’elle n’apercevait pas dans son champ de vision.

    « Théodore ? »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeVen 26 Fév 2010 - 21:23

Théodore laissait ses doigts pianoter sur le bois poli mais ô combien usé de sa canne, assis sur une chaise à quelques mètres de la porte derrière laquelle Kassandra devait se préparer. Soupçonnerait-elle jamais à qui avait appartenu la robe qu’elle allait porter pour rencontrer son père ? Noah se ferait sans doute un plaisir de l’insulter en lui intimant l’ordre de retirer le vêtement de sa défunte épouse. Comment réagirait-elle, alors ? Mal, sans doute, l’Intendant avait du mal à la cerner mais il était au moins certain d’une chose : elle attendait beaucoup de cette rencontre. Elle n’avait aucune idée de ce « beaucoup », mais cela ne réfutait en rien son existence. Sinon, pourquoi aurait-elle rejoint le Manoir ? On n’entreprenait jamais un voyage vers le passé à la légère.

« Je n’aurais peut-être pas du… » marmonna-t-il pensivement.

Mais d’un autre côté, il n’avait pas réellement le choix. Kassandra était indubitablement plus grande que sa demi-sœur, et les robes de cette dernière ne lui auraient pas été. Les seules disponibles étaient celle de Miravia… qui, petit clin d’œil du destin, était du même gabarit qu’elle. Théodore connaissait assez Noah pour savoir qu’il n’aurait même pas daigné regarder sa fille illégitime si elle lui était apparue vêtue comme elle avait pu l’être à son arrivée.

Et puis, autant être honnête, cela lui ferait tellement plaisir de remettre le vieil homme à sa place, enfin.

« Théodore ?
- Hum ? »

Relevant la tête, il porta son regard sur la jeune femme et porta une main devant sa bouche, frappé par la vision qui s’offrait à lui. Sous ses yeux, c’était comme si Miravia était sorti de la chambre. Son image se superposa l’espace d’un instant à celle de Kassandra, et il laissa mollement retomber sa main. La magie ne dura qu’un instant, et quand il posa un regard troublé sur la chevelure flamboyante de la jeune femme, elle vola en éclats. Les deux femmes étaient bien différentes, bien trop pour qu’il puisse les confondre. Se relevant, il s’approcha, et posa sa main libre sur son épaule, son regard noisette planté dans le sien.

« Tu es prête ? » lui demanda-t-il doucement, serrant presque affectueusement la frêle épaule. « Tu peux encore faire demi-tour… mais tu es la fille de ton père, et tu n’en feras rien, n’est-ce pas ? »

Il n’avait pas dit « digne fille », cela aurait été à ses yeux une insulte injuste. N’esquissant aucun mouvement pendant quelques secondes, laissant se prolonger l’instant si particulier, il finit par sourire et se détourner.

« Alors, allons-y. »

Et, de nouveau, il s’improvisa guide de la demeure, redevenant par la même occasion l’homme distant et austère qu’il avait pu être à plusieurs reprises. A son grand soulagement, ils ne croisèrent personne, tout au long de leur périple, et ils parvinrent sans encombre à leur objectif. Ouvrant la porte de la salle de réception de la demeure, celle la même qui avait vu Noah offrir sa fille à Elyas afin de redorer le blason familiale, ou qui avait accueillit Merwyn quand il fréquentait encore la maîtresse des lieux, il invita Kassandra à entrer. Une nouvelle page de l’histoire des Noblegriffon allait s’y écrire.

« Installe toi, je reviens avec ton père. »

* * *

PNJ : Noah Noblegriffon

Noah bouillonnait. Sa rencontre avec Hanegard n’avait pas été aussi fructueuse qu’il l’avait espéré. Certes, le message était bien passé, mais le légionnaire avait préféré garder sa neutralité, alors même qu’il aurait pu offrir la stabilité au marquisat. Il était un meneur d’homme, un véritable héros sur le champ de bataille… mais aux yeux du patriarche déchu des Noblegriffon, il ne valait plus rien une fois l’épée retournée au fourreau. Le bruit familier d’une canne toquant contre la porte le tira de ses rêveries.

« Entres, Théodore. »

Il observa le vieil intendant s’introduire dans la salle, ne prenant pas la peine de se lever pour l’accueillir. Noah n’était pas stupide, il savait l’intimité que pouvait lui porter l’homme qui assurait le bon fonctionnement de son manoir, mais avait depuis longtemps décidé de ne pas s’en soucier. Après tout, tant qu’il faisait bien son travail…

« Que veux-tu ?
- Il y a ici une personne qui désire ardemment vous rencontrer, Monsieur. »

Un « Monsieur » hypocrite, mais répété tellement souvent qu’il en était devenu naturel. Car Théodore était un homme qui aimait le travail bien fait, et il se trouvait que, malheureusement, son travail était de servir Noah Noblegriffon.

« Il ne suffit pas de souhaiter ardemment quelque chose pour l’obtenir. » lança orgueilleusement Noah en se levant malgré tout. « Enfin, dis m’en plus… Je n’ai rien de bien intéressant à faire aujourd’hui, un peu de compagnie me fera le plus grand bien. »

La question était délicate. Egoïstement, Théodore voulait ménager la surprise, ne pas gâcher ce qui pouvait être une scène des plus cocasses… et des plus terribles pour ses protagonistes, il fallait l’avouer.

« Une jeune femme ravissante… Elle affirme avoir des choses à vous révéler, de la première importance. Je pense qu’elle vous comblera, à bien des égards. »

* * *

La porte s’ouvrit, et déjà la conversation entre les deux séniors s’accaparent la pièce silencieuse. Se taisant en même temps, ils entrèrent… Aux côtés de Théodore, Noah paraissait bien petit, rondouillard et surtout, bien vieux… alors qu’il avait cinq bonnes années de moins. La maladie pouvait parfois être cruelle.

« Mademoiselle, enchanté de faire votre… »

Le vieil homme se figea, observant Kassandra comme si elle l’avait frappé. Son regard se teinta de colère alors qu’il reconnaissait la robe de sa femme.

« Où avez-vous trouvé ça ? Théo… » Il lança un regard courroucé à son serviteur, reprenant aussi sec. « J’ose espérer que tu n’as rien à voir dans cette histoire.
- A vrai dire… » Il lança un regard à Kassandra, hésitant tout d’un coup. Etait-ce à lui de révéler le secret de la jeune femme ? Elle l’avait déjà fait au garde, après tout. « Au vu de son message, je me suis dit que cela ne te dérangerait pas. »

Le passage au tutoiement était audible, et nullement dissimulé. Une nouvelle fois, on aurait pu croire que Noah avait été frappé. Mais, peut-être parce que cela en faisait trop d’un coup, le noble ne réagit pas et tourna son regard vers « la cause de tous ses soucis ». Il attendait, mais il n’attendrait pas longtemps, avant d’exploser.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeVen 26 Fév 2010 - 22:13

    Le résultat semblait concluant à en juger l'expression de l'intendant qui, béat, la contempla pendant un instant avant de reprendre son habituelle austérité pour l'entraîner à sa suite. Bizarrement, cet homme semblait attaché à l'endroit et aux femmes qui y avaient vécu, mais il y méprisait sincèrement le seul habitant restant encore debout. Le personnage intriguait quelque peu la pirate, mais tout cela était bien secondaire : dans son esprit s'agitaient en frétillant les idées nouvelles d'une rencontre de choc. Et la rouquine ne savait guère si elle en ressortirait aussi fière et vainqueur qu'elle ne l'avait imaginé de nombreuses fois.

    « Eh bien, voilà que je me découvre une qualité des Noblegriffon. »

    Sa volonté cependant ne s'amenuisait pas, paradoxalement : elle accumulait en son sein suffisamment d'énergie et de froideur, d'ironie en elle pour pouvoir vomir à la figure de ce père infâme tout ce qu'elle aurait à lui reprocher. Tandis que ses pas à nouveau la guidaient vers la fameuse salle où tout se jouerait pour elle - et où elle briserait l'homme qui avait lui-même détruit sa mère sans le savoir -, la jeune femme laissait traîner ses yeux un peu partout. Son esprit de pirate émoussée avait détecté bien des babioles intéressantes et de jolies choses qui auraient valu un paquet d'or. Un beau butin qu'elle aurait pu ramener à Ajilah pour se faire pardonner. Ce n'était pas grand chose, mais pour sûr il aurait mieux digéré sa fuite. Que faisait-il ? Même cette pensée ne la divertissait pas : elle était trop perturbée, trop excitée et fascinée par l'aveir si proche, si proche d'elle à cet instant ...

    Théodore la fit s'arrêter, ouvrant solennellement les portes avant de lui désigner un siège. Kassandra s'y dirigea, jetant un long regard à l'intendant avant de lui souffler quelque chose comme un "Merci", qui résonnait bien plus profondément qu'une simple sympathie pour cette invitation à s'asseoir. L'inconnu, bien que justement très peu cerné par la pirate, avait été si prévenant avec elle que Kassandra ne pouvait pas faire autrement.

    Il s'en retourna "le" chercher. Et l'attente commença, longue et insoutenable, Kassandra imaginant à nouveau le pire ou le meilleur, son regard perdu dans l'océan du néant, jusqu'à ce que la clanche fasse du bruit, et signe la fin de la trève qui avait duré 24 ans.

    Ses yeux se relevèrent, incisifs, et son coeur rata un battement. Son souffle se retint.

    L'homme qui passa le pas de la porte ne ressemblait guère aux idées de la pirate. Il était petit, ratatiné par les ans qui pesaient sur lui, et force était de reconnaître que même Théodore semblait avoir plus de panache physique que cet homme au dos voûté et à l'air perpétuellement contrarié. Les traits de son faciès et l'éclat de son regard, le pincement de ses lèvres trahissaient bien des comportements anxieux et irrités. Il allait être bien difficile de l'affronter, mais après tout, impossible n'est pas Kassandra. Son rythme cardiaque pulsait encore dans ses tempes tandis que le Sieur Noblegriffon l'observait alors, avant de s'interrompre, interdit et choqué comme devant une profanation mortuaire.

    Le dialogue, court mais explicite entre les deux hommes, lui fit clairement comprendre que la robe n'était apparemment pas du meileur goût. Trop verte ? Pas assez belle ? Ou peut-être ... Peut-être que le fait de voir une inconnue porter une aussi belle toilette vexait profondément le maître des lieux. Déjà un point négatif à son actif, et Kassandra n'en avait pas fini.

    Théodore avait décidé d'ajouter un peu de piment à la situation. Et si sur le coup, la réaction de Noah avait donné envie à Kassandra de crier à Théodore "Mais vous l'avez fait exprès ou quoi ?!", la suite du dialogue ne put que la faire sourire intérieurement, partagée entre l'étrange élan de tendresse qu'elle ressentait envers ce vieillard rabougri mais capable de ruse pour atteindre un noble qu'il semblait cordialement détester de tout son être, et sardonique devant le comportement de son père. A peine arrivée, elle brûlait d'une envie féroce de hurler, de s'égosiller, de tout casser. Mais il fallait être sage, attendre qu'on daigne l'écouter et surtout, patienter pour que Noah se décide à la croire.

    Prenant donc son courage à deux mains et son mal en patience, Kassandra agit une fois de plus sur le coup de son instinct et de son impulsivité, se relevant de toute sa hauteur tandis qu'elle toussotait, signe qu'elle prenait la parole et achevait l'intermède des deux vieillards.

    « C'est donc vous Noah. »

    D'un timbre égal, sa voix ne faiblit pas, au contraire, elle avait repris ses inflexions faussement solennelles et ampoulées à souhait, ses yeux myosotis soutenaient l'acier bleuté de Noah, qui la fixait de cet air à la fois profondément froissé, agacé, mais attentif. On ne sait jamais, peut-être que cette jeune femme face à lui serait favorable ou utile à quelque objectif fixé au préalable ?

    « Le nom d'Anya vous dirait-il quelque chose, Messire ? Et est-ce que ceci vous rappelle des souvenirs ? »

    Elle ne perdait pas de temps, c'était certain. De l'index, elle dégagea une mèche de ses cheveux, dévoilant le griffon d'or qui s'agitait doucement, suspendu à son lobe, l'étincelant bijou narguant Noah. A peine eut-il le temps de bien distinguer et détailler l'objet qu'elle refaisait tomber sa chevelure, surveillant presque les réactions de Noah.

    Il semblait trop instable pour s'y fier.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeVen 26 Fév 2010 - 22:45

Etrangement, alors qu’il était chez lui, le regard de Noah pouvait être comparé à celui d’un animal aculé, piégé dans une cage. Qui donc était cette jeune femme qui, par sa seule présence, motivait Théodore a lui démontrer son animosité. L’intendant l’avait tutoyé ! Près de trente ans qu’ils se connaissaient, et jamais le vieillard n’avait osé une telle familiarité. Et voilà qu’une rouquine se montrait pour qu’il se permette n’importe quoi.

« En effet. Et vous êtes… ? »

La voix était méfiante, et incroyablement irritée. Le vieux noble était de ces personnages qui n’aimaient pas ne pas savoir. Tout contrôler était un véritable besoin chez lui, et voilà qu’on introduisait dans sa vie tranquille et bien rôdée un élément perturbateur… et quel élément ! Le nom qu’elle lui balança en pleine figure, comme un gant chargé de défi, le laissa de marbre. Anya était un nom qui ne lui disait absolument rien. Par contre, l’éclat d’or pur qui dansa devant ses yeux… C’était une toute autre affaire.

« Qu’est-ce que… »

Ces boucles d’oreille, il les connaissait, et même trop bien. Combien de fois s’était-il désolé pour leur perte ? Et pour cause, ce n’étaient rien de plus que de véritables antiquités ! Deux cents ans d’histoire, perdus simplement parce qu’il avait voulu faire plaisir - temporairement - à la fameuse Anya. Car oui, maintenant, il s’en souvenait. De la charmante créature qu’elle était, pleine de vie… Il était tombé sous le charme, réellement, mais s’il avait satisfait ses envies, il n’en avait pas perdu la raison. Elle avait été un merveilleux intermède à sa vie de couple, mais jamais il n’avait imaginé une seconde tout sacrifier pour vivre avec elle. Aussi n’avait-il pas pleuré quand il s’était rendu compte de son départ. Une pointe de regret, rien de plus. Et puis il avait hurlé.

« Ces boucles d’oreille appartiennent à ma famille, vous n’avez aucun droit sur elle. » Son regard se fit dur, déterminé… Le bleu-gris des Noblegriffon se fit difficile à soutenir, faisant oublier le physique peut-être parfois pathétique de son propriétaire. « Et vous allez me les rendre. »

Et cette simple affirmation le fit s’interroger sur un point fondamental de cette turbulente histoire. Mais qui donc était-elle ? Et comment avait-elle pu mettre la main sur ce trésor auprès duquel il avait tant couru, un temps, avant de se résigner ? Lançant un regard mauvais à l’Intendant, il reprit la parole.

« Théodore, ta présence n’est plus requise.
- Je suis ravi de l’apprendre. » Il tourna son regard vers Kassandra, et ses yeux demandaient pardon. « Cette robe que tu portes appartenait à Miravia… la femme de Noah.
- Théodore, il suffit ! Quitte cette pièce immédiatement.
- Tu n’as plus d’ordre à me donner, plus maintenant. »

Serrant le poing, le dit Noah retint le grognement rageur qui lui montait. Il aurait eu envie de se ruer sur l’impudent Intendant, mais il y avait plus important… les boucles d’oreille. En revenant à Kassandra, il reprit la parole, hargneux.

« Qui êtes-vous ? »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeSam 27 Fév 2010 - 10:46

    C'était à hurler. A hurler de rire ou d'horreur, de dépit ou de condescendance. Ce vieil homme grabataire, acide et grincheux, ce pâle reflet qui devait représenter les années les plus incroyables et les plus glorieuses de la famille Noblegriffon, cet homme qui se rendait tout bonnement inappréciable en seulement quelques secondes, était son géniteur. Son père. Comment sa mère, qu'elle avait toujours vue et placée sur un piédestal avait pu s'en amouracher d'un imbécile pareil, qui ne pensait alors qu'aux biens matériels quand il avait en face de lui une inconnue qui en savait bien plus que ce qu'il aurait fallu sur lui ?! Comment pouvait-il ignorer Anya, et surtout l'ignorer elle ? Le coeur de Kassandra fut aussitôt gobé par les flammes agitées et crépitantes d'une fureur naissante qui pouvait alors se lire sur ses traits froncés de dégoût.

    Elle n'aurait jamais du venir. Ni pour lui, ni pour elle-même. Mais il allait payer le prix. Elle s'en faisait le serment.

    « Hors de question que je vous les rende. Vous n'aurez qu'à venir les chercher vous même si c'est ce que vous voulez vraiment. »

    Campée sur ses positions, autant physiquement que moralement, la jeune femme en oubliait presque que les frusques élégantes qu'on lui avait fait mettre n'étaient guère appropriées et pratiques pour se battre face à un homme ... Et que son sabre reposait sagement près de ses affaires à l'auberge où elle avait pris ses quartiers pour la visite de courtoisie à ce cher petit papa Noah. Misère, elle allait devoir se battre avec ses poings si cet ... Homme, qui devait être son ... Père, venait à suivre sa provocation lancée sans peur ni aucune réflexion quant aux conséquences.

    Kassandra observa Théodore répliquer avec verve à son maître, jusqu'à ce que ce dernier fut interrompu par la question finale de toute cette mascarade. Une question à laquelle la jeune trublionne allait se faire un plaisir de répondre, oh que oui.

    « Votre fille, Noah. Votre seconde fille. »

    Un silence insupportable suivit la déclaration. Ca y est, elle s'était jetée à l'eau. Elle avait jeté la bombe et maintenant, elle se plaquait à terre pour éviter que les dégâts ne retombent sur elle et l'achèvent. Ses yeux brillaient d'une lueur de colère sournoise, ses lèvres étirées en un fameux sourire amer et écœuré à l'adresse du vieillard qui lui opposait une farouche résistance et un caractère démesurément haïssable. Théodore avait tout le pardon de Kassandra en cet instant, et elle saisissait pleinement les raisons qui avaient pu entraîner l'inimitié entre ces deux hommes.

    Rompant l'atmosphère lourde pour l'empirer un peu plus, la pirate articula à nouveau de manière hâchée et impitoyable.

    « Mais j'imagine que vous ne me croirez pas. Après tout, n'importe qui aurait pu entrer en possession de ces boucles, à part une petite écervelée venue pourrir votre vie en déclin, mh ? Mais voyez-vous, il semble qu'après votre liaison avec Anya, vous ne lui avez pas laissé que de jolis bijoux. Elle a fuit parce qu'elle était enceinte, prenant la mer pour s'éloigner de vous... On se demande pourquoi. »

    Froide, acide et tranchante, la voix continuait de débiter la vérité à une vitesse étonnamment mesurée, comme si à la surface le lac des sentiments demeurait plane, mais que les tréfonds s'agitaient dans des geysers bouillants.

    « Je ne suis pas venue pour vous embêter bien longtemps, j'ai compris quel genre d'hommes vous pouviez être. Je voulais simplement voir si ce que l'on disait de vous était vrai ... Et savoir si vous aviez si bien connu que ça ma mère. Mais ca vous a laissé un tel souvenir .. »

    Achevant sa tirade par un soupir, la rouquine décida de porter le coup ultime en soupirant d'une voix audible et sincèrement désolée.

    « Pauvre Miravia. »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeSam 27 Fév 2010 - 13:38

Noah devait retrouver son calme. La situation lui échappait, il s’en rendait bien compte. Théodore se rebellait, et la rouquine, eh bien… Elle se rebellait aussi. Tout le monde se rebellait, de toute façon. Fut un temps où son monde était parfaitement ordonné, où chaque ordre trouvait son exécution, sans la moindre contestation. Et puis sa fille avait épousé Elyas, sa femme était morte… Son univers avait perdu de sa superbe, et il ne l’avait jamais accepté. Jusqu’à fermer complètement les yeux quand Katalina avait pris officiellement sa succession.

« Soit. Vous voulez les garder, mais savez-vous seulement ce qu’elles représentent ? »

Garder son calme… Mission délicate pour un homme tel que Noah. Mais il y était partiellement parvenu, tâchant d’ignorer l’intendant et sa vaine rébellion. Viendrait le temps où il se ferait un plaisir de le foutre royalement à la porte, avec un rire vengeur et une bonne humeur palpable. Mais l’heure était plutôt au précieux héritage familial… C’était aux oreilles de sa fille que ces boucles devaient trôner, et non à celle de…

« Ma fille… ? »

C’était impossible, et pourtant, tellement probable. Après tout, les ébats qu’il avait pu partager avec la jolie Anya, à l’époque, avait été bien assez nombreux. Il était fort probable que… eh bien, la charmante, délicieuse et surtout colérique créature qui lui faisait face soit sa fille. Il la laissa déballer son sac, le choc de la nouvelle ayant été comme un sceau d’eau glacé bienvenu. Il avait eu du mal à se calmer, Kassandra l’avait aidé, de la plus incroyable des façons. Ecoutant à peine ce qu’elle avait à dire - le discours était prévisible, et témoignait en tout cas que la jeune femme avait longuement, très longuement réfléchis à la rencontre - il laissait son esprit s’emballer à la recherche de la marche à suivre.

« Ta mère et moi… » Il lança un regard à Théodore, légèrement coupable soudainement, alors qu’il comprenait l’attitude du vieillard. « Ne me juge pas.
- Trop tard. »

Ils s’affrontèrent quelques secondes du regard, puis Noah maugréa, avant de se retourner vers Kassandra. Il devait gagner du temps, découvrir ce qu’elle cherchait à obtenir en venant ici, faire en sorte de lui donner, et la faire disparaître, elle et Théodore, avant qu’il ne soit trop tard. Le mieux aurait été de garder les boucles, mais elles étaient considérées comme perdues depuis presque vingt-cinq ans.

« Jeune fille… Quel est ton nom, d’ailleurs ? Hum, que dirais-tu de poursuivre cette conversation avec un peu plus d’intimité ? »

Il devait éloigner l’Intendant, qui ne ferait que le pousser toujours un peu plus vers la colère, alors qu’il devait au contraire parfaitement se contrôler. Le caractère inattendu de la nouvelle avait douché son ire, mais elle pouvait très bien revenir… Et ça aurait été désastreux. Déjà que voir l’objet de son délit vêtu de la robe de sa femme était difficilement soutenable…
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeDim 28 Fév 2010 - 12:10

    « Pour vous ? Un tas d'or. Pour moi, c'est le seul souvenir que j'ai d'Anya. J'imagine que vous préféreriez en tirer des souverains, mais ca n'est pas mon cas. »

    Et pourtant, aussi pirate qu'elle était, la demoiselle n'aurait jamais refusé qu'on lui présente un bain d'or et de piécettes. Mais ces boucles n'étaient pas qu'une façon comme une autre de posséder une richesse extérieure reluisante et attirante ; c'était se rappeler qui elle était, afficher la culpabilité de Noah et le défier de lui ôter ses racines, d'acheter ses origines pour qu'elle les renie. Il ne pouvait pas faire marche arrière ou effacer ses erreurs, et le noble devait certainement être rongé par l'anxiété que cette petite rouquine sortie de nulle part se permette d'envoyer un coup de pied dans le somptueux château de cartes que le manipulateur avait pris soin d'établir au fil des ans. Mais Kassandra n'avait pas besoin de violence : un souffle suffisait pour faire valser l'univers de Noblegriffon. Il était déjà trop effrité, trop instable.

    Son souffle, la jeune impudente l'économisait. Et si ni Théodore ni Noah ne pouvaient le voir, ses jointures étaient si pâles qu'on devinait sans peine que ses poings étaient serrés, trop serrés, prêts à étrangler et à réduire en poussière la moindre marque d'intolérance. Sa colère remontait, les remous légers de l'esprit ne s'estompant guère ; le vent du nord, rageur, se déchaînait dans sa tête. Une tempête digne d'Eris. Eris ... Et si Noah savait que sa seconde fille était une pirate, il serait sûrement mort sur le champ, foudroyé par une crise cardiaque. Choqué et méprisant, dédaigneux envers Kassandra, qu'il n'aurait vu que comme un déchet, une voleuse et une renégat. Par "chance", Théodore avait vu juste et avait sauvé in extremis les objectifs de la pirate. Vraiment, Kassandra devrait le remercier une fois sortie d'ici ...

    Mais on était encore loin de la sortie. Et les myosotis contemplèrent Noah qui tentait de quémander l'indulgence du vieillard. Elle ne saisissait pas pleinement la raison de ce dialogue où quelques mystères subsistaient, mais apparemment l'intendant lui refusait toute forme de pardon ou de compréhension. Noah avait-il déjà trop abusé de la gentillesse de son entourage, lassé et usé de sa personnalité avide de pouvoir et calculatrice ? La pirate n'avait vu que la face noire de son père, et elle n'arrivait pas à trouver ses bons côtés. Non, ils étaient fichtrement bien cachés.

    « Kassandra. Mais je n'ai rien à cacher à Théodore, moi, vous savez. »

    Le faisait-elle exprès ? A n'en pas douter, oui. Une fois de plus son incroyable et involontaire faculté à provoquer ce qu'il ne fallait pas au mauvais moment se faisait remarquer. Mais c'était le strict minimum que Noah méritait selon elle ; si ca n'avait tenu qu'à l'ancienne mousse, son entrée et les présentations auraient été autrement plus ... fracassantes, c'était le mot.

    Là, elle se trouvait guindée, pire, piégée dans cette robe trop belle pour sa condition réelle, en face d'un homme qui savait qu'il était le maître du domaine. Un homme qui n'avait pas tant que ça à faire de tout le mal qu'il avait du semer pendant sa longue vie. Sa propre mère avait payé les conséquences de l'ignorance de cet homme : certes, on ne pouvait pas tout lui mettre sur le dos, mais Kassandra n'arrivait pas à ressentir autre chose que de la colère. Sûrement Gabriel et Théodore avaient-ils d'ores et déjà influencé le point de vue de la demoiselle. Ca n'était pas un modèle d'objectivité, mais peu lui importait.

    Kassandra ne voulait pas s'éloigner de Théodore. Etrangement, elle craignait la confrontation en seule à seul. Elle savait que Noah changerait d'attitude, deviendrait sûrement bien moins conciliant et tenterait de la faire retourner d'où elle venait en ayant la garantie que jamais, ô grand jamais, on ne sache que Messire Noblegriffon avait tout bonnement trahi Miravia.

    Kassandra était une gêneuse, et elle l'avait bien assimilé.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeDim 28 Fév 2010 - 12:44

Un tas d’or ? Les boucles d’oreille de sa famille, un tas d’or ? Noah se sentit vexé, incroyablement vexé qu’on ose sous entendre qu’il serait près à vendre le legs de sa famille. Qu’elle aille au diable, la sotte, elle ne savait rien de lui, rien de son histoire, et déjà elle le jugeait avare et sans cœur ? Il lança un regard mauvais, haineux même à Théodore. Tout était de sa faute ! Il avait monté sa fille contre lui avant même qu’ils se rencontrent. Sa fille… Par les Cinq, pourquoi avait-il fallu que son hymen éphémère et condamnable avec Anya soit fertile ? Mais il allait devoir mettre de côté sa fierté et son irritabilité naturelle pour tenter de faire au mieux. Il devait sauvegarder l’honneur des Noblegriffon, c’était un impératif contre lequel il ne pouvait rien. Katalina devait rester l’unique héritière, et il n’allait surement pas laisser cette… Kassandra venir entacher l’honneur d’une lignée séculaire. Ah, si seulement Anya ne lui avait pas caché sa grossesse, si seulement elle ne s’était pas enfuie telle une voleuse sournoise et perfide, là il aurait pu arranger les choses. Mais non, elle en avait décidé autrement, l’égoïste, et c’était son amant malheureux qui allait devoir payer le prix de sa folie.

« Très bien, très bien ! Que Théodore reste, après tout. Ce n’est pas comme si son avis allait changer quelque chose. »

Le principal concerné observait la jeune femme, légèrement surpris par sa réponse. Il ne s’était pas attendu à cela… Se pouvait-il qu’elle regrette son choix de venir ? Elle ne semblait pas lui en vouloir, et pourtant elle aurait pu, l’histoire de la robe lui paraissait-elle être un moindre mal ?

« Mais si vous me le permettez… » continua-t-il, et le ton était mordant, comme s’il défiait quiconque de l’empêcher de faire ce dont il avait envie. « Je vais m’assoir. »

Noah n’aimait pas montrer sa faiblesse ainsi, mais son dos était une plaie béante qui lui pourrissait la vie en permanence. Cruelle séquelle, qui le poursuivrait sans doute jusqu’à sa mort. Comment Kassandra allait-elle prendre ce geste ? Comme un défi, une manifestation de son déni ? Qu’elle fasse comme elle voulait, le vieil homme n’y pouvait rien, et il avait besoin de réfléchir, or la chose était plus simple à faire quand il pouvait compter sur l’appui bienvenu d’un dossier confortable. Se laissant tomber dans le fauteuil le plus proche, il lâcha un soupir de soulagement non feint, et releva son regard vers sa… eh bien, bâtarde.

« Tu es venue pour que je te parle de ta mère, c’est ça ? »

La belle et sulfureuse Anya, charmante, agréable, taquine… L’espace d’un instant, il se laissa envahir par la nostalgie, et ses lèvres frémirent, laissant apercevoir moins d’une seconde durant l’ombre d’un sourire.

« Tu lui ressembles beaucoup. Bien plus qu’à moi. Les mêmes cheveux, le même regard… Comment ai-je pu oublier ces yeux ? » Il secoua la tête, alors que ses doigts pianoter le bois poli des accoudoirs. « Je ne peux pas dire que je l’aimais, ce serait te mentir et… Tu ne me le pardonnerais pas, je crois. »

Le calme était revenu, même si la colère n’était pas vraiment loin. Son regard s’accrochait par moment aux boucles d’oreille… tentatrices devant l’eternel. Ah ! Qu’il aurait aimé les récupérer, après toutes ces années. Mais Kassandra ne semblait pas être du même avis, aussi fallait-il l’amadouer.

« Tu ne l’aimais pas, mais ça ne t’a pas empêché de cracher sur ta mère et ta fille.
- Je n’ai jamais… » Il laissa claquer sa langue, seule démonstration de son exaspération, puis en revint à Kassandra. Théodore n’était pas important, pas pour le moment. « Non, je ne l’aimais pas, mais ne te méprends pas, cela ne veut pas dire que je me suis contenté de remonter ses jupes tel le premier des marauds. Nous étions complices, semblables d’une certaine façon, mais bien trop différents devant l’absolu. Je savais que ce ne serait qu’une parenthèse, belle et heureuse, et je croyais qu’elle le savait aussi. »

Noah paraissait sincère, et surement l’était-il un peu. Oh, il embellissait un peu la vérité, certes, mais ce n’était pas pour tromper sa fille. Non, il avait décidé de lui donner ses réponses, voir comment elle réagirait… et s’il avait de la chance, elle partirait comme elle était venue.

La seule chose qui comptait, au fond, était qu’elle disparaisse sans avoir rencontré Katalina.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeDim 28 Fév 2010 - 14:18

    Au regard surpris de Théodore, Kassandra haussa les épaules. Ce qu'elle savait et dirait, ce vieil homme n'avait pas à l'ignorer : tous devaient savoir, ou du moins, un maximum de gens. Sa présence en Serramire et plus largement sur le continent était une manière de sa venger. Si Gabriel avait voulu tuer son père et faire payer l'homme de façon plus cruelle, la sournoiserie et la mesquinerie de sa nièce, elle, s'étendaient de manière plus perfide. Le seul objectif que Kassandra avait mûrement réfléchi était, non pas de le blesser physiquement, mais de salir autant que possible le nom de Noah Noblegriffon. Pour une raison obscure, elle ne tolérait pas que sa mère fut morte par la faute d'un homme qui n'avait jamais su clarifier à sa maîtresse qu'elle n'était justement qu'une maîtresse. Rien d'autre. La pauvre Anya, elle avait souffert, car contrairement à Miravia, aveugle de toute trahison, elle savait. Et il n'y a rien de pire que d'aimer sans l'être en retour.

    La rouquine observa son père s'asseoir sans un mot.

    Qu'il fut assis ou debout, rien n'aurait et n'allait changer : Noah recevrait quand même un sacré choc psychique. Kassandra n'objecta donc aucun refus à l'idée qu'il veuille s'asseoir, et pour elle, cela n'incarnait pas véritablement un acte de rébellion de Noah ou une affirmation de son pouvoir : simplement une preuve que la vieillesse et les crimes qu'il avait commis avaient raison de lui. Une batârde revenait, son dos le tiraillait, et les gens qu'il avait longtemps eu à sa botte puisaient le courage de se rebiffer dans ces petites choses de tous les jours. Au fond, Noah aurait pu invoquer la pitié de la pirate. Mais c'était là le souci : une pirate n'a jamais pitié. La commisération était le genre de sentiments que Kassandra méprisait et n'avait jamais éprouvé, et contrairement à la peur qu'elle explorait non sans un certain frisson d'adrénaline en ce moment même, elle n'était pas désireuse, sinon dégoûtée, à l'idée d'éprouver de la sympathie à cause des problèmes des autres. C'était une faiblesse, et on ne se vante jamais de ses faiblesses : on les élimine, on les tue, on les brûle.

    « Au point où vous en êtes, on ne sera plus à ça près. »

    La rouquine eut un rire léger et frais, mais amer. Terriblement amer. Elle ne regrettait rien. La situation était telle qu'au contraire, maintenant qu'elle savait, tout semblait apaisé. La seule chose qui provoquait encore sa colère était l'existence de ce paternel qui ne voulait pas d'elle, elle le sentait, et même s'il tendait à masquer ce rejet par de douces paroles et des confidences sincères sur sa mère, sa première réaction face à sa présence, elle ne l'avait pas oubliée.

    « Anya ... Elle faisait quoi ici ? C'était une servante ? »

    L'idée que sa mère eut pu travailler pour l'homme dont elle devait sûrement être follement éprise lui hérissait le poil, mais cette fois-ci contre la défunte Anya. Elle avait été naïve. Ce que n'était pas sa fille : ce point là devait lui venir tout droit de Noah, songea t-elle non sans froideur.

    Relevant le menton pour se sortir de ses pensées familiales, la rouquine revint planter son regard inquisiteur dans les yeux métalliques de Noah, sa voix se faisant plus ... "suggestive".

    « Katalina ... Votre fille. Elle ne vit pas ici ? »

    Sa question, elle le savait, allait faire paniquer le père. Pourquoi Kassandra s'intéressait-elle à sa soeur ... Ou plutôt demi-soeur, même si la nuance était légère ? Voulait-elle la voir, elle aussi ? Noah l'accepterait-il ? Difficile à imaginer, mais qui sait ... Si elle l'exigeait ...
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeDim 28 Fév 2010 - 22:31

Ah… Sa fille ne l’aimait pas. Enfin, ce n’était guère surprenant, il avait déjà du mal à penser à la sulfureuse rouquine qui le faisait face comme à sa fille, et ce simple fait était déjà révélateur. Tous les séparaient. Il avait déjà connu l’opposition de sa progéniture, mais il n’avait pas à faire là à une crise d’adolescente mais bien à l’ire d’une femme blessée par l’absence d’une figure paternelle. Si seulement elle voulait bien accepter le fait que Noah n’y pouvait absolument rien, surement trouveraient-ils plus facilement un terrain d’entente. Mais non, aux yeux de l’enfant illégitime, le père adultère était l’unique coupable.

« Ne rejette pas l’entièreté de la faute sur mes vieilles épaules, Kassandra. C’est ta mère qui a disparu sans un mot, pas moi. »

Et il entreprit de raconter son histoire. Enfin, il ne fit que la résumer succinctement, très succinctement. Après tout, il n’y avait pas grand-chose à dire, la romance qu’il avait pu partager avec Anya était d’une banalité affligeante… Ce qui n’enlevait rien au plaisir qu’il avait pu en tirer.

Théodore quant à lui observait, écoutait, et quand il n’en pouvait plus, lâchait une petite pique… C’était peu, bien peu comparé à ce qu’il pouvait avoir envie de faire. Quand il entendait Noah parler de son aventure avec une autre que sa femme, il ne pensait qu’à une chose, sa canne s’abatant sur la figure tant haïe. L’amour était une merveille quand il était partagé, mais celui qui ne trouvait aucun répondant rongeait, pervertissait. En vérité, la rancœur de l’Intendant était en grande partie injuste, mais il ne parvenait pas à comprendre que l’homme qui avait eu Miravia ait pu aller voir ailleurs.

Noah secoua doucement la tête. Raconter son histoire ne semblait pas satisfaire Kassandra, qui n’aimait à priori pas ce qu’elle entendait. Elle posait de nouvelles questions, oubliant un instant le personnage peut flatteur de son père - avoir le mauvais rôle ne plaisait définitivement pas au patriarche des Noblegriffon, mais il arriverait bien à la convaincre - pour s’intéresser à sa naïve maman.

« Ta mère était originaire de Langehack. Une couturière de talent, que j’avais fait spécialement venir à Serramire pour confectionner les robes de Miravia. » Il esquissa un léger sourire, amusé malgré lui, peut-être un brin attendri. « Maintenant que j’y pense… C’est elle qui a fait celle que tu portes.
- Immonde ! »

C’en était trop pour le vieil homme. Noah avait donné à sa femme les robes confectionnées par sa maîtresse… Et à ses yeux, il s’agissait de rien de plus qu’un jeu pervers et malsain. La canne, mollement abattue sur la chaise, ne trouva qu’un dossier qui prit le coup sans plus protester que cela, alors que Noah s’était jeté au sol.

« Mais tu es fou !? »

La folie s’était emparé de la pièce de théâtre improvisée qui se jouait dans l’ancestrale manoir des Noblegriffon… pauvre Kassandra, elle qui ne voulait que rencontrer son passé, voilà qu’elle était confrontée à une animosité qui avait eu tout le temps de se fortifier au court des trois décennies précédentes.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeLun 1 Mar 2010 - 21:28

    « Vous ne l'avez pas recherchée. »

    C'était un constat qu'elle laissa s'échapper platement, refroidissant l'atmosphère tout juste réchauffée ; pas même une accusation, oh, elle aurait pu prendre cette forme, mais il était déjà bien suffisant de mettre en relief l'oisiveté du marchand à la renommée continentale. le mettre mal à l'aise était un des rares buts dans lequel la pirate excellait en cet instant, son valet se rebellant à chaque nouvelle information qu'elle récoltait de son père, qui, docile et amadoué, pensait bien faire et éloigner le malheur flamboyant de sa belle et propre famille, la vraie, l'officielle, pas celle qui se composait de deux batârds fermement rejetés.

    A l'évocation du métier de sa mère, Kassandra haussa les sourcils. Couturière ? Jamais elle ne l'avait imaginée ainsi. Jeune mousse extorquée par des marchands, passagère clandestine ou pauvre servante abandonnant son poste pour un monde dérisoire, la rouquine avait pour la plupart du temps accordé à sa mère décédée un rôle négligeable et peu gratifiant qui servait assez bien le caractère de victime que Kassandra avait prêtée à Anya dans cette histoire. Mais la vérité était tout autre : la belle amante avait été une passionnée qui n'avait vécu que pour l'art de coudre et de réaliser les tenues de l'épouse de son cher et tendre. Au fond, la situation était maline et bien ficelée ; Anya n'était peut-être d'ailleurs même pas si faible que cela. Oh, bien sûr, les souvenirs intimes de la relation entre Noah et Anya, elle ne voulait pas les entendre ; mais peut-être que ca pouvait ressembler à ce qu'elle et ... Non, n'importe quoi. Elle pensait à n'importe quoi.

    Un cri et un bong sonore la firent sursauter et froncer des sourcils, pour soupirer d'agacement.

    Etait-elle présente pour assister au règlement de compte d'un homme aigri par son incapacité à se déclarer à la femme qu'il avait aimé dans un silence idiot et masochiste, et d'un manipulateur de premier ordre qui n'avait fait que se servir dans le plateau des jolies créatures qu'on lui avait mis sous le nez ? La rouquine avait envie de leur rire au nez, de leur montrer qu'ils étaient bien pitoyables, et qu'elle ne donnait pas cher d'eux dans une autre vie où Eris était maîtresse de toute chose, humaine ou non.

    Mais ils ne valaient pas qu'elle se donne cette peine ; qu'ils crèvent, voilà ce qu'elle pensa froidement.

    « Ca suffit, Théodore arrêtez ! »

    Sa voix couvrit les cris de Noah et les bruits de la canne. Qu'ils se fussent arrêtés dans leur chamaillerie ou pas importa peu à la demoiselle. Son regard s'était figé sur la scène. Elle ne supporterait pas de vivre ici ; à peine avait-elle mis ses pieds dans le monde de la noblesse pour démêler son seul problème qu'une dizaine d'autres secrets irrévérencieux s'effondrait sur ses épaules qui n'étaient pas faites pour un monde si hypocrite. Elle n'était pas à sa place ; Noah allait sûrement être réjoui de la voir repartir aussi vite, sans même avoir réellement insisté sur Katalina et sur les dégâts qu'elle aurait pu provoquer sur la surface lisse qui commençait à s'abîmer de la réputation des Noblegriffon.

    « Je m'en vais. Il n'y a rien qui me retienne ici. J'en ai assez vu. »

    Lassée. Son visage n'inspirait plus aucune lueur d'intérêt, elle s'était refermée, et ce même pour l'Intendant ; ses talons se détournèrent, et prise d'une impolitesse rare, la rouquine s'éloigna à pas pressés et rapides en direction des larges portes : elle retrouverait bien son chemin au travers de ce labyrinthe de couloirs, elle n'avait jamais eu besoin de Noah ou de Théodore. Avoir un père n'avait plus de sens pour elle à son âge, et encore moins un paternel de ce calibre.

    Ses mains poussèrent la poignée, ouvrant en grand le pan de bois sur l'avenir incertain sous les glapissements des deux vieillards.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 4 Mar 2010 - 13:51

Kassandra pensait pouvoir partir sans que personne ne l’arrête, mais il semblait que le destin se voulait capricieux en cette extraordinaire journée de printemps, et alors qu’elle était sur le point de s’extraire de l’ambiance pesante qui s’était emparée de la pièce, une silhouette menue apparut dans l’encadrement de la porte, lui barrant par la même occasion le passage. Quoi que la rouquine aurait surement pu tenter sa chance et la bousculer sans trop de peine, si derrière elle ne veillait pas un demi-elfe doté de la taille des Aînés. Alertée par le claquement sec du bois s’entrechoquant, elle avait pressé le pas, et sous ses yeux se dessinaient une scène aussi étrange que dérangeante. Théodore avait la main crispé sur les vêtements couvrant son cœur, le regard empli de haine… et de remords. Son père gémissait au sol, une main plaquée sur son dos, le regard d’une chouette accroché à son visage. Et puis, il y avait cette femme qui lui faisait face. Passant son regard de l’un à l’autre, Katalina finit par prendre la parole, mettant fin au silence malsain qui avait conquis la pièce à son arrivée.

« Auriez-vous l’amabilité de m’expliquer quelle folie s’est abattu sur cet endroit ? » Elle marqua une pause, plongeant son regard bleu-gris dans celui si particulier de la rouquine. Particulier, et pourtant… familier. « Et par la même occasion, si je pouvais comprendre comment une parfaite inconnue s’est retrouvée vêtue d’une robe de ma mère, ce ne serait pas de refus. »

*****

Sa rencontre fracassante avec Astéride avait laissé derrière elle une Katalina épuisée et légèrement hagard. Elle était enceinte. Une vie, doucement, commençait à s’éveiller, petite flamme encore fragile, presque invisible, et pourtant déjà si vorace, assez en tout cas pour provoquer des bouffées de chaleur intempestive à sa future mère. « Mère », un mot merveilleux qui prenait un sens nouveau. Elle avait eu du mal à se faire à cette idée, les choses s’étant passées à une vitesse folle, mais une chose était certaine : elle élèverait son enfant, leur enfant, loin des manigances malsaines de son grand-père. Il était grand temps pour celui qui avait élevé l’une des femmes les plus riches et d’une certaine façon les plus influentes de la Péninsule de voir son dernier lien avec sa progéniture tranché.

Elle avait d’abord voulu annoncer la bonne nouvelle directement à Aerandir, mais quelque chose l’en avait dissuadé à la dernière minute. Il y avait un temps pour chaque chose, et celui des réjouissances n’était pas encore venu. Elle devait d’abord faire table rase du passé oppressant que représentait son géniteur avant de pouvoir accepter pleinement de se tourner vers le futur et sa propre descendance. Mais alors qu’elle savait, elle ne pouvait plus faire comme si de rien était, et elle avait plusieurs fois surpris sa propre main s’être posée, protectrice et émerveillée, sur son ventre encore vierge de tout changement. L’attitude un brin plus protectrice et taquine de son Gardien prenait elle aussi une nouvelle ampleur, et n’était plus d’un seul coup l’expression d’une complicité accrue mais bien la possibilité qu’il ait deviné avant elle son état. Comment, elle aurait été incapable de le dire, mais il ne semblait pas vouloir la forcer à en parler, aussi avait-elle décidé de rester sur son idée première : attendre d’avoir pu parler à Noah.

Le voyage s’était bien passé, quoi que bien trop lent au goût d’une femme qui n’aspirait qu’à la conclusion de la confrontation à laquelle il conduisait. Il leur avait fallut quatre jours pour atteindre les portes de la ville ducale, et elle ne fit cette fois-ci aucun effort pour dissimuler son arrivée. La nouvelle de son retour en terres humaines s’était déjà répandue aux quatre coins du Royaume, il ne servait plus à rien de se dissimuler.

*****

Katalina n’était pas réellement d’humeur à plaisanter. Elle était venue voir son père dans un but précis, et elle n’appréciait pas du tout la mascarade qui s’étalait sous son regard. Le pire était sans doute de voir une robe de sa mère sur les épaules d’une autre, alors qu’elle-même n’avait jamais pu les mettre. Elle jaugea un instant l’impudente, puis reporta son attention sur les deux vieillards qui l’avaient vu grandir et s’épanouir. Sur son père surtout, qui gisait à terre, misérable et pitoyable. Elle avait beau chercher au fond d’elle-même, elle n’arrivait pas à trouver l’envie d’aller l’aider à se relever. La chevalière toujours trop lourde de Gabriel pendait à son cou et lui rappelait en permanence quel était le poids de ses péchés. Il n’y avait plus de pardon en Katalina. Heureusement, elle pouvait compter sur la présence rassurante d’Aerandir, fidèle Gardien qui ne la quittait plus. Elle avait envie de se retourner, d’abandonner son père dans ce manoir qui comptait tant à ses yeux, de se blottir dans les bras de son Gardien et de lui annoncer enfin la merveilleuse nouvelle. Mais elle ne pouvait pas, elle devait faire face. Aussi attendait-elle qu’on lui réponde, pressée d’en finir. Elle avait un fardeau dont elle rêvait de se défaire qui pesait trop lourdement sur son cœur pour être encore ignoré.

Noah regardait sa fille, plus ahuri encore qu’après l’attaque impulsive de Théodore. Néera, quelle folie avait donc pris le fidèle et efficace intendant pour qu’il réagisse comme le premier des ivrognes ? La cane gisait à quelques mètres du patriarche, mais il ne fit aucun geste pour tenter de la ramasser. Peu importe la raison qui l’avait poussé à une telle démonstration de démence, elle semblait avoir été soufflée par l’arrivée de Katalina, et il l’observait… Noah grimaça quand il crut déceler un voile de pitié dans ses yeux noisette.

« Laisse moi deux petites secondes, le temps de me relever, et je t’expliquerai tout. »

Une seconde à peine s’était écoulée depuis l’entrée de Katalina, mais il avait l’impression qu’ils avaient passé une éternité à se jauger. Une éternité de trop, pendant laquelle quelqu’un aurait pu dire quelque chose et tout gâcher. Il n’était pas trop tard, il pouvait encore arranger les choses. Il suffisait qu’il parle assez vite, et qu’on l’écoute avec assez d’attention. Mais avant toute chose, il devait se lever, afin de faire oublier la scène grotesque que sa fille avait pu contempler à son arrivée. S’appuyant sur l’accoudoir de sa chaise, il laissa échapper un ahanement pitoyable et étouffé. Tyra ait pitié de lui, que son dos lui faisait mal.

« Le temps de reprendre mon souffle et… »

Le pauvre ne put terminer sa phrase, pliant sous l'intensité du regard de Katalina, qui ne semblait être prête à supporter aucune tentative d'amadouement.
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeJeu 4 Mar 2010 - 17:51

    Le choc !

    Il n'avait pas été physique, non, elles ne s'étaient pas percutées. Mais se retrouver nez à nez devant elle, jamais Kassandra ne l'aurait imaginé. Tout comme elle n'avait pas cru probable de voir la fille de Noah dans cette demeure où tout avait l'odeur du passé. Les jeunes femmes étaient attirées par bien des choses, mais les effluves du renfermé ne faisaient pas partie de cette liste mystérieuse et secrète des choses qui faisaient plier la gente féminine.

    Ses yeux la détaillèrent, rapidement, les iris papillonnant d'un point à l'autre. Les yeux gris-bleutés s'apparentaient à ceux de Noah, à la différence que la dite Katalina - elle le devinait à l'appellation de père et de mère qu'elle avait donnés précédemment dans ses paroles incrédules - n'avait pas cette étrange lueur malsaine qui avait tantôt scintillé dans l'œil de leur père - car Noah ici était la charnière des deux femmes s'observant en chiens de faïence -. Oh, on ne pouvait jamais se fier rien qu'à l'apparence, et Kassandra en était tout autant la preuve : derrière cette jolie robe se cachait ni plus ni moins une hors-la-loi des mers -. Sa chevelure bouclait, moins que la sienne assurément, et elle était plus petite que sa cadette. Mais il y avait quelque chose - dans les traits, l'allure, ou l'attitude, allez savoir - qui lui rappelait son propre reflet. Oh, loin d'elle l'idée de supputer qu'elles pouvaient s'accorder une ressemblance frappante. De toute manière, Kassandra aurait été plus insultée de s'entendre trouver des points communs avec une noble, malgré la beauté un brin elfique que lui inspirait cette soeur venue d'on ne sait où.

    Se râclant la gorge, la rouquine jugea bon de se décaler d'un pas en arrière ... Sans quitter la femme du regard. Absorbée dans la contemplation froide et objective.

    « Laissez Noah. Je vais expliquer moi-même. »

    Elle tourna son visage vers le vieillard qui péniblement tentait de remettre de l'ordre dans sa tenue, lui adressant un regard et un sourire qui sonnaient faux, terriblement faux. Elle allait lui dérober sa chance, piétiner ce qu'il lui restait d'honneur, et allait par la même occasion briser le peu d'estime que Katalina accordait encore à son géniteur. Mais la rouquine incendiaire se moquait bien des conséquences de ses actes : elle était là pour jouer le rôle de la plaie qui s'infecte et qui vous pourrit le corps, la douleur qui fait mal et qu'aucun remède ne chasse sauf la mort.

    D'une voix plate et impassible, guettant la moindre évolution dans le regard de sa consœur, la plus petite réaction, Kassandra entama son récit.

    « Je venais ici dans l'espoir d'avoir une entrevue avec votre père. Théodore pensait bien faire en m'introduisant avec une robe à ma taille, étant donné l'allure ô combien pitoyable de mes guenilles. Que voulez-vous, n'importe quel père refuserait de voir arriver sa fille illégitime de 24 ans avec des loques. Ca ferait tellement tâche dans le paysage. »

    Infect. Ses mots venaient de jeter un froid glacial, elle en avait pertinemment conscience, et en était presque fière. Mais elle ravalait son orgueil, car ce n'était pas Katalina qu'elle aurait souhaité le plus blesser. Elle ne la connaissait pas - et ne savait d'ailleurs pas encore si l'envie de savoir quelle personnalité pouvait se cacher derrière sa demi-sœur la tentait tant que ça -. Ses yeux finirent par rompre le lien que les prunelles myosotis avaient noué avec celles polaires de Katalina, remarquant avec une surprise à demi-teinte le Gardien d'Arcamenel.

    Il était donc fortement lié à sa "soeur". Et cela expliquait pourquoi il avait donc ainsi su la renseigner. Un pâle, bien pâle sourire se peignit sur ses lèvres avant qu'elle ne continue, ignorant les remontrances de Noah, ignorant la moue de Théodore, ignorant tous ces gens qui ne pensaient qu'à eux-même.

    « Votre Intendant s'offusquait d'apprendre que votre père n'avait pas été fidèle à votre mère. Il semblerait que sa réaction ait été plus violente que ce à quoi l'on pouvait s'attendre ... Enfin. »

    Elle vouvoyait la seule femme qui avait directement un lien de parenté avec elle, mais cela ne l'affectait pas d'être aussi froide et distante. Le temps lui avait appris à mettre un mur entre elle et les autres, et puis ce n'était pas à elle de s'imposer. La pirate avait jeté la pierre dans le lac, brisant la belle surface plane et miroitante du calme apparent du domaine et de la famille, mais pour le reste, elle ne ferait plus rien. Parce qu'elle n'avait plus rien à faire ici. Gabriel avait eu raison, ce n'était pas sa place, et Eris lui manquerait trop.

    Ajoutant un dernier brin de sarcasme pernicieux dans sa tirade, la rouquine balaya une mèche derrière son oreille, la boucle droite au griffon éclatant sous l'œil de Katalina.

    « Je n'ai plus rien à dire. Je vais récupérer mes affaires, le chemin ne me semble pas infaisable, je sais que je suis sotte, mais je devrais m'en sortir. »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeVen 5 Mar 2010 - 0:29

Les détours du destin sont nombreux et insondables. Dés jetés sur l'horizon lointain de l'avenir terrestre, étoile qui se gausse des tours joués, orchestrés par plus grands qu'eux. Il a entendu l'oracle susurrer a son oreille. Le Sublime qu'il connait par coeur s'est émerveillé doucement sous ses doigts. Maitre de l'Harmonie, il a saisit a pleine mains la nouvelle partition, une autre note valsante dans l'ode qu'ils ont créés ensemble. Etincelle a peine éclose qui sommeille en attendant son heure. Lui échapper était illusoire lorsque ses paumes savent par coeur les déliés du corps qu'il étreint chaque nuit, la mélodie a changé, subtil frémissement, indicible murmure. Le secret est encore dissimulé, nullement éventé et les mots viendront d'eux même, il est patient.

La chaleur du soleil possède un nouvel éclat, comme sublimé, transcendé et il sourit le visage levé vers le ciel, l'or inerte de ses iris posé sur l'azur se mêlant a la pureté d'un blanc immaculé.

Le paysage défile avec la lenteur d'un tango endiablé, il ne le voit pas, ne le verra jamais plus qu'importe puisque l'or dort entre ses bras lorsque l'ombre envahit le monde. Les chemins du coeur sont tortueux, la colère s'écoule doucement dans l'air, arôme acide, parfum sulfureux. Une vibration qu'il connait, qu'il a effleuré, doucement, lentement. Le venin de l'étendar rougoyant explose, distillant goutte à goutte ses douleurs. Les secrets finissent toujours par se réveler, onctueux, acide, qu'importe, ils s'imissent suavement dans les consciences, pourrissent les âmes et détruisent les coeurs lors de leur naissance. Il n'a que faire du père, n'a que faire de l'indomptable qui se dresse et frappe tel un cobra blessé. Nul ne pourrait se permettre de la blesser sous son regard aveugle, sa main errera, apaisante, foulant le tissus de sa robe, ondulation courageuse qui effleure les reins. Apothéose du soutient affirmé, ce baiser déposé sur la tempe, caresse doucereuse, égide suave et muet qui possède pourtant l'impact d'un cri. Qu'importe l'outrage vibrant, l'insulte flagrante devant ce père qui n'est plus, il n'a que faire des bienpensants, il les foule au pied et joue sur leur fausses notes. Ses doigts fins glissent encore, redessinant la courbe d'une taille qu'il a sublimé et vénérée, explorateurs audacieux faisant fi des regards, ils s'étalent doucement sur le berceau de la vie, de sa vie.

-Je ne suis qu'un fil de soie étranger sur la toile qui se créer. Je t'attendrais a l'ombre de ton enfance.

Dernière caresse apaisante des lèvres tentatrices, relents sulfureux et sucré avant qu'il ne quitte la pièce, acteur marionnette il saura le dénouement bien assez vite....
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeSam 6 Mar 2010 - 12:24

Katalina observait, impériale et froide, son père tenter de l’amadouer. Ce numéro, elle l’avait vu un demi-million de fois au moins, et à chaque fois, elle avait cédé, tendant un bras charitable, murmurant une parole encourageante… Mais elle ne pouvait plus. Elle en savait trop désormais pour pouvoir à nouveau fermer les yeux. Etrangement, il ploya sous le regard, préférant détourner les yeux et terminer de se relever, alors que Théodore reculait d’un pas, mal à l’aise. Le vieil homme ne s’était pas attendu à une telle coïncidence, voir la fille de Miravia débouler alors qu’il apprenait l’existence de sa demi-sœur n’appartenait pas au domaine de l’improbable, mais presque de l’irréalisable. Et pourtant, force était de constater que la dernière héritière - légitime, du moins - des Noblegriffon se tenait bien droite dans l’encadrement de la porte, presque menaçante. La silhouette imposante du Gardien d’Arcamenel aidait peut-être, mais elle ne faisait pas tout, et le petit bout de femme qui dardait son regard métallique imposait, à sa façon.

Son attention fut de nouveau attirée par la jeune rouquine, alors qu’elle se raclait la gorge et… reculait d’un pas. Katalina était-elle si effrayante ? Cette simple réaction aurait en toutes autres circonstances ébranlée la jeune noble, mais l’état d’esprit dans lequel elle était plongée ne lui permettait aucun retour en arrière.

« Mais je vous en prie. » lui répondit-elle, modulant sa voix pour s’accorder au ton de la jeune « intruse » et haussant tout de même légèrement un sourcil devant le familier « Noah ».

La tension était palpable. Elle avait la dérangeante et dégradante impression d’être arrivée tel un cheveu indésirable sur une soupe infecte. L’image pouvait paraître amusante, mais le sourire faux et froid que Kassandra adressa à son père n’avait rien de comique, lui. Noah n’en menait pas large, son regard se fit suppliant, alors que ses lèvres esquissaient un « Pitié… » inarticulé. C’était inutile, et il le savait, il le comprenait. Il avait échoué, et sans doute allait-il perdre son joyau, sa princesse adorée. Son poing gauche se crispa, trembla sous l’effort, alors qu’il s’enfonçait des ongles impeccablement coupés dans sa paume.

La surprise dansa sur les traits de la jeune noble, sans qu’elle ne cherche à la dissimuler. Après tout, à quoi bon ? Kassandra n’avait pas parlé à la légère, elle ne possédait pas la spontanéité attendrissante et attachante d’Astéride. Là où la blonde gaffait, la rousse blessait, sciemment. Katalina savait depuis longtemps lire superficiellement en quelqu’un, un don indispensable dans ce qui avait été sa raison de vivre. On ne construisait pas un empire, fusse-t-il commercial, sur la chance et le hasard. Oui, sa sœur, car telle était l’incroyable vérité, n’avait pas mâché ses mots afin de servir un dessein bien précis, faire souffrir… Mais faire souffrir qui ? Noah, pour l’avoir apparemment abandonnée ? Ou bien elle-même, parce qu’elle avait pu vivre la « vie tranquille de l’enfant légitime » ? A cette question, la compagne du Gardien d’Arcamenel aurait été bien incapable de répondre. Mais, si elle avait été tout à fait honnête, elle aurait convenu que les états d’âme du fruit des erreurs de son père était bien le cadet de ses soucis.

Elle avait toujours cru que Noah et Miravia Noblegriffon s’aimaient. Dans son esprit d’enfant, puis d’adolescente, elle avait toujours eu un couple heureux et épanoui, uni autour de la progéniture qu’elle était. Quand elle avait compris que sa mère se mourrait à petit feu, elle avait cru comprendre certaines crispations inexplicables jusqu’alors. Mais la cadette de Versmillia avait-elle eu conscience de la trahison de son époux ? S’était-elle seulement doutée de l’insulte qu’il lui avait fait, en enfantant une bâtarde ? Le terme était dur, mais la colère naissante qui consumait lentement mais surement le calme de Katalina ne laissait aucune place à la compréhension. Seuls comptaient les faits, et ces derniers se tenaient devant elle sous la forme d’une sulfureuse rouquine. Elle ignora les sous-entendus mesquins de Kassandra à l’égard de Théodore, le tenant en haute estime et trop occupée à foudroyer celui qui l’avait enfanté du regard. Un regard qui hurlait « Je ne te pardonnerai jamais. ».

« Ainsi, il se trouve que mon père m’ait donné une… » La pause fut légère, et quand elle reprit, sa voix avait quitté en grande partie les apparats de la colère pour se parer d’une douceur trompeuse. « … petite sœur. »

Elle porta son regard sur la principale concernée et écarquilla malgré elle les yeux. Ces boucles d’oreille, elle les connaissait. Son père lui en avait parlé une ou deux fois, pleurant la relique perdue, mais c’était surtout sa mère qui s’était lamentée, amère et honteuse d’avoir égaré elle ne savait comment son cadeau de mariage. Elle les lui avait décrites tellement de fois que Katalina aurait presque pu les dessiner les yeux fermés. D’abord la robe, et puis ça… C’en était presque trop. Bien trop, en fait. Sa voix siffla, laissant entrevoir une partie de sa colère.

« Vous devez être une amie de Gabriel. » commença-t-elle, la voix blanche.

Ne l’avait-il pas prévenue ? « D’autres viendront » avait été ses derniers mots. Elle avait bien essayé de deviner, de supputer, mais jamais elle n’aurait imagine l’existence de Kassandra, dont elle ignorait d’ailleurs toujours le nom. Elle ne jeta pas un regard à son père, et pourtant, le visage livide qu’il offrit en spectacle valait le coup d’œil. Sa bouche entre-ouverte valait tous les discours.

« C’est… c’est… Impossible !
- Et si, père… Votre frère est vivant. » lâcha-t-elle. La situation aurait presque pu prêter à rire, car quand la fille apprenait l’existence de sa sœur, le père lui découvrait que son frère avait survécu à sa tentative de meurtre. « Lui aussi a eu beaucoup de mal à consentir à me donner son nom. » ajouta-t-elle à l’intention de sa demi-sœur.

Katalina n’en pouvait plus. Acerbe, elle l’était, et peut-être l’était-elle un peu trop, justement. Kassandra méritait-elle son attitude ? Certes, ses présentations avaient été abruptes, mais il n’existait de toute façon pas de bonne façon de l’apprendre. Elle n’était peut-être pas juste, mais le monde ne l’était pas, de toute façon. Depuis plus d’un an, elle oscillait entre malheur abyssale et joie merveilleuse, les épreuves s’étaient accumulées, et si elle avait pu grâce à elle se surmonter et lier des liens avec Trystan et Astéride par exemple, elle n’était pas sûre que l’échange soit réellement équivalent. Heureusement, il y avait Aerandir…

Une main apaisante vient effleurer le tissu de sa robe, et elle ravala les autres répliques cinglantes qui lui venaient. Abandonnant un instant les conflits oppressants et les échanges verbaux animés, elle leva le regard vers le visage chéri et elle l’observa, interrogative certes, mais visiblement amoureuse. Elle ferma les yeux sous son baiser, s’en abreuve, de lui et de son symbole, et esquissa un léger sourire, saisissait très bien où il voulait en venir. En d’autres temps, d’autres lieux, elle se serait peut-être offusquée de le voir ainsi étaler à la face du monde leur relation. Mais les choses avaient changé. Son sourire vacilla cependant légèrement alors qu’il lui annonçait qu’il l’attendrait dans la chambre de son enfance, ce qui ne l’empêcha pas d’acquiescer.

« Très bien. J’arrive très vite, Melethril » murmura-t-elle pour ses seules oreilles.

Et elle fut seule pour affronter les trois êtres qui lui faisaient face, à la différence que l’intervention subtile avait douché sa colère. Théodore hésitait entre incrédulité et attendrissement, et son sourire ravi jurait avec ses yeux surpris. Noah semblait s’être pris un coup supplémentaire, mais n’avait même plus la force de réagir, trop choqué par la « résurrection » de Gabriel. Mais les deux hommes ne l’intéressaient pas. Seule comptait sa sœur aigrie. Elle porta sur elle un regard nouveau, l’inflexibilité y avait été bannie et on pouvait presque y lire un soupçon de timidité.

« Père, Théodore… » La voix était douce, caressante presse, mais ils ne s’y tromperaient pas, elle ne souffrait aucune contradiction. « Je vais vous demander de sortir.
- Katalina, je…
- Non, Père, pas maintenant.
- Très bien, Dame. »

Théodore fut le premier à s’exécuter, habitué par sa vie d’Intendant. Noah lança un dernier regard brisé au trésor qui avait illuminé sa vie ces vingt cinq dernières années, déchiré, puis finit par sortir d’un pas lent et trainant. Katalina s’écarta à peine pour leur libérer le passage, puis ferma la porte derrière eux et s’approcha du centre de la pièce, avant de s’assoir dans le siège libéré par son père.

« Notre rencontre ne s’est pas déroulée dans les meilleures conditions. Vous avez du le comprendre, j’ai rencontré Gabriel, et nos premiers échanges ont été… désastreux. Je refuse de laisser les erreurs de mon père me séparer une nouvelle fois… Oserai-je dire "de ma famille" ? »

Elle l’observait, à l’affut de la moindre réaction, se préparant à une rebuffade. Après tout, Kassandra n’avait-elle pas parti de partir, déjà ?

« Comme nous sommes sœurs… » Une semaine plus tôt, elle apprenait l’existence de son oncle, et voilà que la plaisanterie recommençait avec une sœur. « Puis-je vous tutoyer ? »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeSam 6 Mar 2010 - 14:58

    Katalina avait de quoi être acide, mais sa corrosité verbale n'avait aucun effet sur sa "petite sœur", qu'elle puisse le voir ou pas n'y changerait rien. Kassandra semblait trop à vif, trop remontée contre Noah pour pouvoir se préoccuper de la froideur ou de la colère de Katalina, qui elle aussi avait des raisons datant d'avant sa visite pour réclamer la vérité à son père. Noah était décidément dans une bien piètre situation, et il semblait au regard impitoyable de ses deux filles qu'il avait deviné qu'un jour, les erreurs de son passé tumultueux si bien enfoui ressurgiraient et lui éclateraient à la figure.

    C'était chose faite.

    Aerandir quitta la pièce sur des mots toujours aussi alambiqués, laissant les quatre personnages plongés dans l'atmosphère lourde et tendue de la pièce rayonnante de soleil. Pauvres mortels qu'ils étaient comparés à ce demi-elfe qui devait sûrement bien rire d'une pareille comédie. C'était le seul à pouvoir rire d'un moment semblable, et la rouquine regrettât de ne pas être à sa place un court, très court instant.

    Elle fut sortie de ses songes tandis que Katalina évoquait des noms bien connus pour elle. Gabriel ? De quel droit parlait-elle de lui ? S'étaient-ils ... Déjà rencontrés ? La rouquine arqua les sourcils, proprement stupéfaite. Pourquoi avoir attaqué Katalina et non pas son frère, comme il le lui avait tantôt soufflé sur Meca le soir des révélations ? Kassandra ne comprenait guère ce qui avait bien pu se produire du côté du Second, et elle était loin d'imaginer les conséquences de l'acte téméraire parfumé de vengeance de l'hybride. Mais toute cette affaire l'intriguait, et elle ne put s'empêcher de corriger l'humaine sur un point.

    « C'est mon oncle, pas mon ami. »

    "Tout autant que vous", semblait crier ses yeux. Elle n'était certes pas vêtue de la meilleure manière qui soit pour revendiquer ce qu'elle aurait du avoir depuis sa naissance - une vie choyée, dans l'or ou au moins la considération de deux parents aimants, ce qu'avait du connaître sans problèmes la seule héritière de l'empire Noblegriffon -, mais cela n'empêchait pas sa fougue de s'exprimer, et la violine de ses prunelles ne perdait en rien de sa détermination. A ce petit jeu là, il semblait que la cadette dépasse son aînée.

    A nouveau, elle se tût, attendant que les deux vieillards quittent l'endroit, ce qu'ils firent avec plus ou moins de volonté - Théodore, respectueux de Katalina, cela se voyait sans difficulté, fut le premier à laisser les deux femmes seules, alors que Noah, lui, aurait bien donné tout son or et toutes ses possessions pour récupérer la confiance déjà bien entamée de sa chère enfant chérie -. Noah. Le regard de commisération et de tristesse qu'il accorda à une Katalina royalement indifférente lui creva le cœur, sans qu'elle-même le soupçonne. Rhamyr ne l'avait jamais regardé comme ça non ; elle avait été élevée durement, au beau milieu d'une réalité aux angles obtus, n'ayant pas d'autre choix que d'affronter les obstacles de face, se prenant la douleur sans devoir desserrer les dents. Oui, elle aurait pu regretter de ne pas être à la place de celle qui se tenait en face d'elle, incroyablement belle dans sa robe aux tissus délicats et ses cheveux soyeux, son parfum enivrant. Mais au moins jamais n'avait-elle connu les manipulations de cet homme infect qui avait été son père, jamais elle n'avait joué l'hypocrite. Toutes les valeurs qu'elle affectionnait n'avaient, ici bas, aucune sorte d'importance.

    Et elle se sentit encore plus mal alors que Katalina cherchait à entamer la conversation, assise dans son trône. Et elle, debout, attendait, animal qu'on questionnait, qu'on observait, riant à couvert. Oh non, elle n'allait pas rester une minute de plus ici. Elle avait envie de vomir. Pire qu'un premier voyage sur une mer déchaînée, pire que votre première gueule de bois ... L'aller sans retour au pays des nobles.

    « Peu importe le vous ou le tu, d'ici quelques minutes j'aurai déjà disparu de la surface de cette ville, alors fais comme il te plaît. Nous sommes sœurs, mais tu as su vivre 25 ans sans le savoir, et moi aussi. Alors reprendre notre routine chacune de notre côté ne sera pas trop difficile après ce petit incident, j'imagine, non ? »

    Son regard se voila à peine. Son ton n'était pas méchant, non, il sonnait au contraire malheureusement bien trop justement. Kassandra ne voyait pas l'utilité de s'attarder. Elle n'était et ne serait rien à Serramire, Meca lui était trop précieuse. Elle se prit à rêver un instant d'être sur le plancher de l'Onirique, les mains tendues sur le gouvernail, euphorique, alors que derrière elle s'approchait ...

    Elle tourna la tête, fixant un portrait au cadre surchargé de feuilles d'or suspendu à un mur. Comme irritée de ne pas être à sa place.

    « Cet endroit ... C'est invivable. Si j'avais su, je ne serais jamais venue. »
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MessageSujet: Re: [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE]   [Demeure des Noblegriffon] Liens du Sang.[TERMINE] I_icon_minitimeSam 6 Mar 2010 - 17:49

La réaction de Kassandra à l’évocation de Gabriel fut bien loin de celle qu’avait imaginée sa sœur aînée. Elle n’avait pas su - ou pu, le contrôle de ses émotions n’était après tout pas un acquis universel, et certains n’y arrivaient jamais peu importe les efforts qu’ils y mettaient - cacher sa surprise. Pourquoi l’était-elle ? Se pouvait-il que le sang-mêlé lui ait caché ses plans ? Au final, ce n’était-ce pas si surprenant, il n’était pas un saint homme et la tromperie ne devait pas être un péché capital à ses yeux. La correction apportée, brève et implacable, la conforta dans cette idée. Elle laissait supposer que les relations qui unissaient les deux bâtards Noblegriffon étaient tendues… La famille séculaire avait-elle déjà été aussi désunie, alors que ses derniers représentants vivants se retrouvaient séparés par des fossés qui semblaient réellement infranchissables ?

Katalina ne se laissa pas troubler par le regard de sa demi-sœur, du moins pas en apparence, mais il était tout de même douloureux. Il ne fallait pas être devin pour deviner que Kassandra entamait leur relation avec un fort apriori négatif. Elle semblait la jalousait d’avoir vécu acceptée et aimée par leur père alors qu’elle-même avait du se contenter de… de quoi ? L’héritière légitime ne savait rien de l’enfant reniée qui lui faisait face, pas même son nom, qu’elle refusait obstinément de lui donner, et ce même quand elle lui fit remarquer son ignorance. Le ton utilisé n’était certes pas vraiment encourageant, mais blessée qu’on la juge si vite sans même la connaître, Katalina se laissait en partie guider par la colère que lui inspirait cette situation quasiment grotesque. Et le pire fut de voir les reliques boucles d’oreille la narguer, fantômes du passé, à la symbolique si forte. Elle ne dit rien, se contentant d’encaisser, mais la colère grondait.

L’intervention d’Aerandir fut salutaire. Grâce à quelques marques d’affection et de soutien, il parvint à l’apaiser, et si elle regrettait qu’il parte, elle ne pouvait que le remerciait silencieusement pour ce qu’il venait de faire. Après l’avoir observé disparaître dans le couloir, elle reporta un regard de nouveau serein sur son père et Théodore, et les congédia sans autre forme de procès, mettant de côté sans l’oublier le problème des bijoux. Jamais elle n’avait parlé ainsi à son géniteur, mais elle ne pouvait oublier l’incroyable confession de Gabriel. Les mains qui l’avaient portée quand elle était enfant étaient souillées de sang… Elle n’était pas indifférente à ses gémissements muets, comme pouvait le penser Kassandra, bien au contraire. Le regard larmoyant, si semblable aussi, qu’il lui gratifiait lui donnait envie d’hurler, mais elle n’en fit rien. A son grand soulagement, il ne resta bientôt plus que sa sœur méconnue pour lui tenir compagnie.

Cette dernière avait déjà parlé de s’en aller, sauf que Katalina ne l’entendait pas du tout de cette oreille. Qu’elle le veuille ou non, la rouquine et elle allaient parler, elles le devaient. Pour bien marquer cette évidence, la jeune femme ferma la porte avant de partir s’assoir dignement sur le siège de son père. Une fois confortablement installée, elle déclara sans se perdre en fioriture inutile qu’elle ne souhaitait pas laisser les erreurs de son père décider pour elles. S’entendre lui demander si elle pouvait la tutoyer parce qu’elles étaient sœurs lui fit un effet étrange. Comment se faire à une telle idée en quelques minutes ? Il lui faudrait plusieurs heures - jours ? - pour l’accepter complètement. Imaginer son père batifoler avec une autre que sa mère lui donnait déjà envie de vomir… Réaction surement puérile mais contre laquelle elle ne voulait pas lutter. La réponse fut cinglante et sans appel, mais il allait en falloir plus pour que Katalina ne se laisse démonter. Car contrairement à ce qui avait pu être échangé avant, il n’y avait aucune méchanceté gratuite. L’aînée laissa la cadette promener son regard sur la pièce et sourit tristement au commentaire qu’elle entendit.

« Invivable… Aujourd’hui, oui. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. »

Les fantômes du passé dansèrent un instant devant ses yeux, et elle se souvint l’époque bénie où sa mère était encore en bonne santé. Dès lors qu’il avait commencer à se dégrader à vu d’œil, le bonheur familial s’était lentement effrité, et les Noblegriffon ne s’étaient jamais vraiment remis de sa mort.

« Nous nous tutoierons donc. » reprit-elle « Je t’en prie, assieds toi. Je me vois mal continuer cette conversation - car nous allons la continuer - en levant la tête sans arrêt pour pouvoir te regarder. »

Elle esquissa un léger sourire pour atténuer la dureté des paroles, et tendit une main vers l’une des quelques chaises de la pièce. D’instinct, la future mère savait que Kassandra ne supporterait pas qu’on tente de l’amadouer avec des paroles creuses, aussi avait-elle décidé de parler aussi directement que possible. Bien entendu, au vu des éducations antipodiques qu’elles avaient pu recevoir, le langage de Katalina ne serait jamais le même que celui de sa sœur, mais autant essayer d’arrondir les angles.

« Si je puis me permettre, j’ignore toujours ton nom. » glissa-t-elle, penchant imperceptiblement la tête. « J’imagine que tu dois connaître le mien, mais dans le cas contraire, je m’appelle Katalina. »

Les deux femmes étaient liées par le sang, mais elles avaient du attendre un quart de siècle pour apprendre leur existence respective, et l’une d’entre elle ne savait toujours pas comment appeler l’autre. Voilà qui résumait bien tout le pathétique de leur condition.

« Ecoute… Je ne suis pas sotte, je sais qu’une conversation n’effacera pas plus de vingt années de mensonges. Je ne m’attends pas à ce que nous nous comportions comme deux sœurs du jour au lendemain, et pour être honnête, je doute que nous n’y arrivions jamais un jour. Mais les liens du sang sont une chose étrange, que j’appréhende mal, et sans réellement savoir pourquoi, je n’ai pas envie de te voir passer cette porte pour ne plus jamais entendre parler de toi. »

Elle marqua une pause, laissant son regard parler pour elle. Doute, timidité, curiosité aussi pour cette sœur inconnue. Comme pour dédramatiser, elle tenta une approche plus légère, esquissant un fin sourire.

« Et puis, tu portes une robe et les boucles d’oreille de ma mère… N’espère pas me voir te laisser partir sans rien dire. »

Il y avait peut-être de meilleures façons de plaisanter. Rappeler à Kassandra qu’elle ne possédait rien de ce qu’elle pouvait porter n’était en effet pas très diplomatique.
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