Le Deal du moment : -39%
Ordinateur portable ASUS Chromebook Vibe CX34 Flip
Voir le deal
399 €

 

 Lors d'une chasse à l'oisel

Aller en bas 
2 participants
AuteurMessage
Aetius d'Ivrey
Ancien
Ancien
Aetius d'Ivrey


Nombre de messages : 1466
Âge : 33
Date d'inscription : 07/02/2010

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  La vingtaine (25+)
Taille
:
Niveau Magique : Arcaniste.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeMer 14 Mar 2012 - 11:23

Malgré quelques demandes d’audience auprès du régent, l’administration royale n’avait pas l’air d’être plus zélée que ça, et Cléophas d’Angleroy attendait donc une réponse à ses requêtes, qui ne venaient pas ou se montraient des plus évasives. Il semblait que le petit manège auquel avait joué le nouveau baron de Merval n’avait guère plus. Quitter la cour en pleine cérémonie de vassalité avait joué un certain rôle sur l’atmosphère qui y régnait, et certains châtelains devaient se demander pourquoi l’un des grands princes du royaume avait traité cette affaire avec autant de nonchalance.

Nul besoin de préciser que l’Ivrey lui faisait payer cet affront en faisant poireauter son délectable voisin. Comble de la vengeance protocolaire, Cléophas avait appris quelques jours après que le régent et une partie de sa suite s’étaient retirés au sud de Diantra, non loin du château d’Edelis, la résidence particulière du comte de Scylla dans les environs diantrais. Ce dernier, ému sûrement par des semaines fort éprouvantes soyons en assurés, était parti chassé au faucon pendant quelques jours dans l’un des pavillons royaux. Le clerc qui apprit la nouvelle au baron de Merval, un Scylléen importé avec son seigneur dans les domaines royaux, ne devait guère porter dans son cœur le Mervalois, aussi, avec un accent et un jargon scylléen particulièrement hachés pour l’occasion, précisa également que si Cléophas voulait s’entretenir avec l’Ivrey, il devait partir sur le champ vers le pavillon, laissant le lourd apparat à Diantra, se sauter sur un cheval et de courir à bride abattue le plat pays qui séparait la capitale du régent.

Sur les lieux, il découvrit une vaste troupe de plusieurs douzaines de personnes. Une vaste suite de baudriers d’argent, mais également de damoiselles, d’aristocrates, d’écuyers, de valets, de maîtres-chiens et d’oiseliers accompagnait le comte Aetius dans ses menus plaisirs. Le vaste équipage, emmitouflé dans de chaudes fourrures d’hermine, de lapin blanc et d’autres races aussi sauvages qu’à la mode, était donc suivi par des dizaines de braques et de bouviers aspremontais, de faucons et d’autours agrippés au poing des oiseliers et des seigneurs. Quand Cléophas put apercevoir le visage du régent, celui-ci courrait sus à son énorme faucon ydrilote, qui avait enserré un lièvre particulièrement vif. Autour de cet immense oiseau de proie becquetant cette bouillie de poils, de muscles et de sang, une ronde de nobles montés observaient la scène, commentant la performance ou parlant de l’intrépidité du lièvre.

Aetius, quant à lui, discutait avec l’oiselier, qui bientôt lui tendit le faucon. L’Ivrey flatta ses ailes et dit « Ah ! Œil-de-Feu, tu fondrais sur les lions si le cœur t’en disait ! »
Revenir en haut Aller en bas
Cléophas d'Angleroy
Ancien
Ancien
Cléophas d'Angleroy


Nombre de messages : 314
Âge : 38
Date d'inscription : 22/12/2011

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 42 ans
Taille
:
Niveau Magique : Non-Initié.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeSam 17 Mar 2012 - 1:26

    De l’attente naît l’angoisse
    Cela faisait plusieurs heures que Cléophas était sur les murailles, sans nouvelles aucunes du Palais et si tant que le Soleil était dans le ciel cela ne le dérangeait outre mesure, il s’inquiéta lorsque la Lune vint montante. Les affaires de la Cour retiennent souvent les princes mais cette cour n’en était pas une et les nobliaux qui y étaient n’avaient rien à plaider et sur le parvis aucun enfant du peuple ne venait aux doléances. Sans conseillers, sans ministres ni secrétaires le régent n’avait aucune affaire à régler pour ce qu’aucun homme ne venait demander son approbation pour quelque projet. Lorsque toutes les torches de la cité s’allumèrent, le Baron aperçut du Palais un jeune page de la Maison du Roy qui s’approchait de lui comme pour lui annoncer une pressante nouvelle. Le régent extenué s’était apparemment retourné dans ses appartements. Le page eut à peine le temps de finir sa phrase que le Baron descendait les marches qui séparaient le chemin de ronde du parvis. D’un pas nerveux, il fit apprêter son carrosse et s’y hissa précipitamment. Le cortège quitta le Palais dans la discrétion que leur offrait la nuit et les étoiles seules sauraient témoigner de leur fuite. Le Baron avait prévu de rester plusieurs jours en terre diantraise et devant la froideur palatine, il préféra rejoindre un ami qui lui était cher et qui avait élu résidence par delà les murs de la Cité. C’était dans la demeure d’un riche marchand qu’allait dormir le prince mervalois et son carrosse sut trouver bonne place dans la cour. Derrière de hautes grilles d’airain s’élevait la bâtisse, manoir massif dont la structure de pierre était allégée par les quelques flèches de plomb qui couronnait ses pignons et par les croisillons qui décoraient chacune de ses fenêtres. Sur la lourde porte, taillée dans le bois d’un hêtre robuste, on distinguait les blasons de différentes corporations, unis sous l’égide d’un griffon. L’on disait de cet insigne qu’il était celui des marchands qui vendaient mille provisions aux autres Royaumes mais tous ceux qui l’arboraient préféraient garder le silence lorsque l’on leur demandait ce qu’il représentait. A peine descendu de sa voiture et sous le couvert d’une nuit opaque, le Baron fit venir un de ses « oiseaux » et le chargea d’aller au Palais afin de rapporter des nouvelles du régent. Ci-fait, il put s’engouffrer sereinement dans la demeure, plongée dans une pénombre inquiétante.

    Celui qui traverse une ville pour s’informer d’un fait ignore de fait ceux qui se dérouleront dans son sillage
    Le Baron déléguait souvent. Si les hautes affaires requéraient son attention, il ne daignait se déplacer pour quelques maigres entrevues ou autres affaires insignifiantes. Le monde politique est un verger immense dont les arbres regorgent de fruits mûrs ou murissant et le Baron se contentait d’aller cueillir de sa main les plus beaux. Quant aux fruits qui étaient hors de sa portée, ils étaient cueillis par une nuée d’oiseaux qui s’empressait de les lui rapporter. Cela lui laissait le temps de s’occuper de ce qui l’intéressait réellement. Or, le choix de cet hôte n’était pas anodin. Attablés autour du foyer, ils discutèrent longtemps des affaires de l’un et de l’autre et si le Baron restait vague quant à ses projets, son ami lui confiait ses inquiétudes quant aux siens. Ce marchand avait réussi à s’enrichir sur les marches du Royaume. Les commerçants et seigneurs des royaumes voisins virent en lui un interlocuteur privilégié pour ce qu’il avait en lui le sang des immortels. Il s’était chargé de convoyer les marchandises entre les royaumes et de protéger les caravanes importantes. S’il était inquiet en ce jour, c’était car les royaumes elfiques et naniques se retiraient peu à peu tandis que le commerce dans le Royaume des Hommes était périclitant. De son aveu, le Baron apprit que certaines corporations s’éteignirent et que d’autres durent s’unir sous une commune bannière afin de pouvoir peser. Les routes se faisaient vides de convois, les ports étaient envahis par les équipages des navires à quais qui, faute de marchandises, n’allaient en grande mer. Sans compter la révolte en Diantra et le pillage perpétré par les nouveaux arrivants. La cité avait grand peine à se relever d’un tel coup et les échoppes encore couvertes de suie étaient vidées de leurs biens tandis que sur les étals brisés gisaient quelques poteries ou autres denrées monnayables. Nul ne savait véritablement que faire et les marchands hésitaient à revenir en la capitale. C’est ce qu’apprit Cléophas et s’il n’avait pas été au cœur de la ville vérifier la véracité de ces propos, il faisait confiance à son interlocuteur pour ce que ses pères avaient été de fidèles amis de Philémon et de ses fils. Tandis qu’ils parlaient de commerce et de denrées, le Palais de Diantra demeurait mort. Nul n’entrait ni ne sortait et la salle du trône paraissait vacante. Ce ne fut qu’au prix de mille questions et d’une journée de recherche que les oiseaux prirent connaissance du fait que le régent avait quitté les lieux pour se retirer dans sa demeure de campagne. Ils hésitèrent alors et ne savaient s’il était bon d’aller en informer le Baron ou s’il fallait le laisser en paix quelques temps et attendre qu’il revînt à Diantra.

    Les princes ne s’amusent guère des paysages.
    Après trois jours passés en compagne de son camarade, Cléophas venait à se poser quelques questions au sujet de la loyauté de ses hommes. Il fut bien vite rassuré lorsque son envoyé le retrouva mais demeura suspicieux quant à l’homme qui l’accompagnait. Rien de ce personnage n’importait sinon qu’il portait les armes de Scylla et non celles du Roy. Voilà à quoi ressemblaient les messagers du Comte. L’homme était d’une froideur arrogante et passées les formalités protocolaires, il délivra son message et n’eut qu’un hochement de tête comme réponse. Le scylléen sèchement s’inclina et reprit la route vers la capitale. Le Baron était resté silencieux et stoïque tandis que l’assemblée était plongée dans une tension fébrile. L’on attendait sa réponse et l’on craignait son humeur mais Cléophas restait de marbre. Au bout de quelques secondes, il dirigea son regard noir et réprobateur vers son laquais. Lentement il lui reprocha son échec et lui donna pour mission d’aller surveiller les caravanes marchandes en Serramire. Déglutissant bruyamment, le jeune homme acquiesça et quitta la cour sur-le-champ. A son ami, le Baron adressa une simple phrase avant que de s’apprêter à nouveau.

    « S’il croit m’humilier avec ses fantaisies…qu’il méprise ainsi le reste de ses vassaux et il ne sera pas mieux loti que cet aveugle de Trystan. »

    Tandis que ceux de ses gens qui étaient inutiles allaient demeurer dans cette campagne et rester près du carrosse, Cléophas allait rendre visite au régent qui demeurait à quelques lieues de là. Il revêtit une longue pelisse de laine d’un bleu indigo, rehaussée de fourrure et, la rapière au poing il chevaucha en direction du domaine de chasse du régent, accompagné de deux hommes d’armes dont l’un servait de porte-étendard. Si la cavalcade allait être prompte, l’entretien risquait d’être long.

    Le bien de l’agneau passe par les crocs du loup.
    Le Baron était arrivé au milieu du jour dans le domaine du Comte. Là, il put apercevoir l’aspect qu’avait sa cour, celle du Comte de Scylla et au milieu d’une foule d’hommes en armures et de chasseurs vêtus de cuir dont les yeux étaient jaunes de médisance, il trouva Aetius en train de se réjouir des talents de son chasseur favori. Ce lièvre était dépecé alors qu’il s’agitait en tous sens et que son sang allait nourrir la terre asséchée. Devant la scène, le Baron s’approcha un peu plus du Comte et lui glissa doucement quelques mots, inaudibles pour l’audience qui avait tourné son attention vers d’autres proies et d’autres attractions.

    « Bien de vos vassaux sont plus mous que ce lièvre mais il en est qui sont des lions endormis et en ce cas, je puis croire que vous aurez grand besoin d’un œil aussi ardent que celui que possède votre compagnon. »
Revenir en haut Aller en bas
Aetius d'Ivrey
Ancien
Ancien
Aetius d'Ivrey


Nombre de messages : 1466
Âge : 33
Date d'inscription : 07/02/2010

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  La vingtaine (25+)
Taille
:
Niveau Magique : Arcaniste.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeJeu 22 Mar 2012 - 11:54

A l’arrivée du baron, on s’égailla quelque peu, et chacun s’occupa, ou feint de s’occuper, de ses affaires à soi, démasquant les faucons, flattant l’encolure des chevaux, ramassant les proies ou excitant de la voix la meute rassemblée. Dans cette cacophonie animale et humaine, le timbre mesuré et un peu secret de Cléophas détonait terriblement, et ce presqu’autant que ce qu’il confiait au prince du sang. Des lions endormis ? Des vassaux remuant ? Il avait vécu avec ses hommes toute sa vie de prince féodal, et la série de succès qui suivit ses premiers pas dans le grand jeu politique de la Péninsule l’avait rendu bien peu réceptif aux messes basses. Aussi, en guise de réponse, le régent parla d’une voix forte pour couvrir le bruit, et répondit ceci au Mervalois : « Le seul lion dont je puis avoir crainte, c’est ma bonne mie d’Hautval, les autres, en comparaison, sont des chatons ! »

Et plus il parlait, plus il criait, si bien que l’assemblée rit, certains parce qu’ils avaient entendu la boutade, d’autres parce que les premiers riaient. « Chevauchez un peu avec moi, Merval ; vous vouliez me parler, et je suis enclin à vous entendre. » Et sans attendre une quelconque réponse ou accord de sa part, l’Ivrey excita son cheval, qui commença à trotter dans la morne plaine, s’éloignant ainsi, faucon au poing, de la troupe rassemblée pour son bon plaisir.

[Pardonne le délai.]
Revenir en haut Aller en bas
Cléophas d'Angleroy
Ancien
Ancien
Cléophas d'Angleroy


Nombre de messages : 314
Âge : 38
Date d'inscription : 22/12/2011

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 42 ans
Taille
:
Niveau Magique : Non-Initié.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeLun 26 Mar 2012 - 2:36

    Le rire est un masque.
    Malgré son jeune âge, il semblait que le Comte de Scylla faisait preuve d’une certaine autorité. Qui en manquerait devant une assemblée de vénaux chasseurs qui n’avaient dans l’œil que l’appât du pouvoir et du gain. Cette cour d’opérette, formée des débris de celle de feu le Roi Aveugle et des courtisans d’un prince n’avait rien de respectable…sinon aux yeux du Comte lui-même. Cléophas avait apparemment vu en cet Aetius une personne qu’il n’était pas : un souverain. Pour le moment, il ne lui avait prouvé qu’il connaissait l’art de la chasse mais fort peu celui de la politique. Certes ses victoires militaires venaient dorer son blason écartelé de milles façons mais les armes ne suffisaient pas à un Roy et moins encore n’allaient l’aider ces hommes desquels ils s’entouraient, vils êtres qui avaient plus l’air de tapis que de béquilles. Mais après tout, tant qu’ils riaient, le jeune Prince était content. Le Baron n’était pas moins décontenancé par la remarque du Comte et stoïque, il se tourna vers cette assemblée chaotique qui devant son regard aussi froid et tranchant que l’acier, fit taire ses gloussements pour aller inspecter les bosquets alentours. Le Baron appréciait les mondanités de temps à autre, l’apparat était nécessaire…mais l’on n’avait ici aucun or. Seule l’odeur des carcasses, des chiens haletants, des cheveux épuisés et des gras en sueur était Reine.

    Les enfants sont souvent les pires tyrans.
    Si Cléophas avait compris quelque chose de son entrevue avec le Comte, c’est qu’il était en proie à une humeur capricieuse, sans doute reste de son enfance princière sinon conséquence directe de sa jeunesse. L’impétuosité est souhaitable mais elle a ses limites et le Baron en était conscient. Toutefois, lorsque l’Ivrey accéda à la requête de Cléophas, ce dernier fut assez surpris. La fuite instantanée du Comte ne le fut guère. Alors que ce dernier allait dans les prés à assez vive allure, Cléophas enfourcha sa monture et galopa à la rencontre du Comte. Une fois qu’il l’eût rejoint, ils ralentirent leur allure pour finir par trotter. C’était là le moment pour le Baron de faire comprendre au régent la situation du Royaume, qui n’échappait à personne sauf à lui-même. Etre précautionneux et déférent en abordant de tels sujets allait être assez délicat et ce n’est pas ce que comptait faire le Baron. Certes quelques paroles mielleuses devaient ponctuer son discours, quelques flatteries et autres compliments destinés à caresser l’aile métallique du régent allaient bien évidemment faire leur apparition. C’est après tout cela l’exercice du pouvoir. Alors qu’ils trottaient depuis quelques minutes, le Baron se mit à parler.

    « Monseigneur, mes mots sans doute furent un peu rude sans compter mon comportement ces derniers jours. Ne croyez pas que je n’en sois pas conscient et si mon départ mouvementé du Palais vous a froissé, sachez qu’il n’avait aucune finalité théâtrale et qu’il n’avait pas pour but de montrer ma prétendue arrogance. Comprenez que la Cour qui vous entourait et vous entoure encore voit d’un mauvais œil que vous soyez conseillé et ils croient tous autant qu’ils sont que j’ai eu un lien avec la mort brutale de feue la Baronne. Mon respect et ma loyauté n’en sont pas moins grands, soyez en certain. Vos triomphes récents vous ont accordé une forte popularité mais voyez que déjà en Erac l’on conteste votre autorité. Je ne doute point que ce Léandre sera vite écrasé pour ce qu’il n’a su rallier qu’une poignée d’hommes en armes. Mais bien d’autres contrées du Royaume sont instables, vous le savez sans doute. »

    Aveugle est celui dont le front est ceint d'une couronne.
    Le Baron se tut, laissant au régent le temps d’entendre ces quelques mots tandis qu’ils avançaient dans la plaine. La situation était sans doute pis que Cléophas ne l’exposait, mais comment réussir convaincre des machinations secrètes qui se trament derrière le dos d’une personne qui, assise sur un trône orain ne peut concevoir que l’on veuille, sinon que l’on puisse attenter à son intégrité ? La tâche allait être difficile, mais Cléophas n’allait aucunement y renoncer : le bien du Royaume en allait. Et c’est ainsi qu’il décida de reprendre son discours, dont le ton n’était empreint d’aucune gravité mais sonnait comme le tintement sec et glacé du tocsin.

    « Le Nord est la province la plus instable. Passée la frontière du Hautval, votre nom est prononcé avec méfiance et les marches voient votre position d’un œil mauvais. Le Sud s’il est plus stable n’en est pas moins à redouter. En Soltariel, la Duchesse n’a pas de véritable emprise, l’Ysari, sans seigneur est dirigée par ses châtelains, la Sybrondilie en revanche a pour maître un homme qui représenterait une menace certaine quant à l’Ydril, riche province, elle n’a de cesse de se battre pour ses intérêts et son profit. Grossir ses coffres voilà ce qu’elle ambitionne et je doute qu’elle suive vos directives si ces dernières venaient à l’amputer de quelques unes de ses cassettes. Du reste, le pays langecin est aussi calme qui l’a toujours été. Les Sephren ont toujours été fidèles à l’autorité royale et en tant que Comte de Scylla, vous savez que vos voisins sont peu enclins à la guerre. Le Médian semble ne prendre aucune position, si ce n’est l’Ancenois, qui vous est fidèle. Le sang est un lien indéfectible cela est connu. »

    Se taisant une fois encore, le Baron songeait à ce qu’il pourrait dire encore. Pour ce que les choses étaient si mouvementées qu’il aurait pu parler durant huit lunes sans que l’on ne l’interrompît. Mais il se ravisa et décida de conclure son discours d’une manière fort concrète.

    « Monseigneur, si je vous dis tout cela, vous le comprendrez, c’est car je crains que le Royaume ne se rebelle, ne se disloque et que votre autorité soit bafouée. Personne ne voudrait d’un Léandre sur le trône, bien moins d’un Eliam. Quel enfant dirigerait une péninsule ? Mais leur aveuglement bestial les force à faire élever leurs voix. L’instabilité dans laquelle est plongé le Royaume force les volontés d’indépendance. La révolte des Barons est encore dans l’esprit de tous et certains pensent qu’ils réussiraient à s’élever et à reprendre les rênes de Diantra, comme bien l’ont fait. Je puis vous assurer mon soutien en quelque affaire, votre Altesse, mais sachez que je serai bien plus utile au Royaume si je dépends de votre sceptre que si je ne reste que Baron de Merval. »

    Le monde ne s'arrête pas aussi loin que porte notre regard.
    Alors le Baron se tut en attendant quelque réponse. Il n’était pas anxieux, simplement curieux de connaître cette dernière. Il souhaitait simplement que le régent fît le bon choix et décidât de consolider sa position et ainsi de faire en sorte que le Royaume retrouve la paix. Car si les seigneurs sont prêts à se déchirer, d’autres pourraient venir et cela, Merval le redoutait.
Revenir en haut Aller en bas
Aetius d'Ivrey
Ancien
Ancien
Aetius d'Ivrey


Nombre de messages : 1466
Âge : 33
Date d'inscription : 07/02/2010

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  La vingtaine (25+)
Taille
:
Niveau Magique : Arcaniste.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeSam 31 Mar 2012 - 13:42

« Mais c'est qui ce drôle d'oiseau ? » demanda l'un des maîtres-chiens à l'adresse d'un camarade.
« Bah ! Rien qu'un sybarite du sud, Gontran, n'y fais point attention, tu sais bien comme ces déviants sont. »

Les deux hommes, le comte et le baron, trottaient déjà depuis quelques minutes, dans une silence gênant. Qu'attendait-il pour parler, celui-là ? Aetius, peu patient lorsqu'il s'agissait de parler de politique, ravalait sa colère au fond de sa gorge en se faisant violence. Lorsque Cléophas commença son discours, l'Ivrey fut rasséréné, soulagée, et presque flattée. Mais la diatribe, hélas ! prit vite un tour plus scabreux, et après avoir jeté quelques fleurs artificielles sur son régent, le sujet décida d'avoir de l'audace, audace qui fut bien mal reçue. A brûle pourpoint, l'homme s'en prit à la cour d'Aetius, à ses conseillers et ses gens, tous ces hommes qui le servaient depuis près d'une demi-douzaine d'années. Ce parvenu savait oser, mais osait mal !

Le régent, peu convaincu par l'analyse de sa Cour, n'y vit que les perfidies d'un nouveau riche tentant d'égratigner la réputation de ceux qu'il considérait comme ses ennemis, ne faisant ainsi que renforcer la probité qu'Aetius leur prêtait. S'ensuivit une analyse cette fois plus large, embrassant en quelques mots la situation de la Péninsule toute entière. Un sud instable, un nord instable, un Médian dans l'expectative, un Langecin fidèle et heureux de la férule du nouveau maître du royaume... Cléophas défendait sa contrée, et cela était normal, mais Aetius ne perçut qu'un peu plus de partialité dans les propos de cet homme nouveau, fraîchement arrivé et qui, déjà, proposait sa vision des choses avec un je ne sais quoi de péremptoire. Agacé, le régent finit par être tout à fait outragé quand Angleroy prononça des réserves quant au règne d'Eliam Ier, sur sa popularité et sa capacité à être roi... Cette accusation, frisant la lèse-majesté, décontenança tout simplement le comte, qui ne savait s'il devait le rosser sur le champ ou garder un peu de calme. Car s'il n'était pas plus attaché à son « bon neveu » le roi Eliam, Aetius savait que la royauté venait de traverser une crise, une remise en cause par la populace même de Diantra. Certes, ils n'étaient que des gueux, et des esprits tout bonnement démoniaques les avaient sans doute pousser à sortir du rang, à se prendre pour ce qu'il n'était pas, mais qu'un noble osa ce genre de propos devant le baillistre d'Eliam, cela était une tout autre affaire.

Courroucé un instant, Aetius tenta de se reprendre, mais quand Cléophas proposa son aide dans la gestion des affaires du pays, l'Ivrey redevint calme d'un coup. Son œil, d'un bleu brillant plus que pénétrant pour l'heure, se tourna Angleroy.

« Si vous comptez servir le bien commun comme le doit la noblesse des Hommes, alors je puis peut-être vous rattacher à quelques-uns des projets de la Couronne. Vous semblez au courant des choses qui se trament dans l'Eraçon, et comme vous vous en doutez, le vieillard du Lyron profite des réformes que je mène et qui paralyse les compagnies royales. J'ai besoin d'hommes de guerre, messire baron, et je crois trouver en vous un homme de bien, qui n'hésitera pas à soutenir le roi dans sa lutte contre l'usurpateur d'Erac. Renforcer mon ost avec des troupes mervaloises et vous à leur tête, vous prouverez ainsi au roi que vous êtes plus que le simple baron de Merval. »


[Petit crash d'ordi, navré. Encore.]
Revenir en haut Aller en bas
Cléophas d'Angleroy
Ancien
Ancien
Cléophas d'Angleroy


Nombre de messages : 314
Âge : 38
Date d'inscription : 22/12/2011

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 42 ans
Taille
:
Niveau Magique : Non-Initié.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeSam 31 Mar 2012 - 15:43

    Qu’importe le fond tant que l’on a la forme.
    Le Baron voyait dans l’œil de ce Comte de Scylla une gêne. Celle qu’il lui inspirait. Cléophas n’avait rien d’un flatteur et s’il savait que la politique ne se jouait qu’à coup de fleurs et de sourires jaunis il restait pragmatique. Un Royaume ne se bâtit pas de mensonges. Aussi, quand il vit que le régent se voyait outragé par ses mots, le Baron ne fit rien. Son discours, s’il n’était pas bref, était sec et en son for intérieur, le Baron se disait qu’il n’avait pas à souffrir les caprices d’un jeune enfant, aussi puissant soit-il. La prudence restait de mise, l’Ivrey n’avait guère un tempérament facile et le Mervalois n’avait que peu d’ornements pouvant mouiller son œil d’acier. Sinon la loyauté, si chère aux yeux du régent. Les hommes loyaux plaisent tant aux tyrans qu’aux rois et le Comte était de ces parties. A son discours, Cléophas resta de marbre mais son œil pétilla. Il paraissait logique de la part du Comte de vouloir grossir ses troupes…mais le Baron n’avait rien d’un guerrier et s’il savait maîtriser les intrigues, il haïssait le tumulte des batailles. Ne lui restait qu’à l’annoncer au Comte…

    Les Rois se repaissent de miels et de douceurs.
    Toujours chevauchant et alors qu’ils échangeaient quelques paroles frivoles qui, si elles n’étaient d’un grave intérêt, réussissaient à enlever à cette chevauchée sa gravité. Cléophas sentit, lorsque l’ambiance était plus détendue, qu’il se devait de donner sa réponse. Quelques minutes lui avaient été suffisantes et son avis était tranché. Il n’irait point au devant de colonnes, il ne pouvait se le permettre. Les hommes d’armes, les hérauts, les capitaines et porte-étendards…tout cet apparat qui lui était inconnu le lassait. Et un Homme lassé ne sert aucunement devant des hommes en légions amassées. Ce qu’il fallait au Baron était le temps de décider de la tournure de ses phrases. Ce ne serait guère une mince affaire…doit un noble savoir user des armes autant que des mots ? Il semblait que oui.

    « Monseigneur, vos projets vous honorent et c’est heureux que je vois que vous travaillez au bien du Royaume. Je tâcherai de convaincre les esprits réticents du bien-fondé de votre venue. Certains esprits sont sans doute moins vantés que ceux qui vous sont fidèles ; la crainte dicte leur conduite…ou la bêtise, pour certains. Ce Léandre n’a rien d’un prince, fût-ce de robe, d’épée ou de sang. Sachez, Monseigneur, que votre offre me gêne pour ce que ma volonté et mon bras ne vont pas au même endroit. Si mon cœur tend à vous suivre dans cette guerrière entreprise, mon esprit m’ordonne de vous avertir de mes piètres qualités de chef militaire. Mon domaine est celui des sceaux plutôt que des piques. Je sais monter et tenir une pertuisane certes, mais je ne vous serai d’aucune utilité entre deux osts. Voyez, Monseigneur, que nous ne nous ressemblons en rien et voyez d’ailleurs que les lauriers qui ceignent votre front sont ceux des armes tandis que les miens sont ceux des cités. Ce Léandre, je le puis assommer par d’autres moyens que ma masse… »

    Laissons les forgerons aux forges et les fermiers aux champs
    C’était ainsi. Le Baron n’était pas soldat et la réaction du Comte semblait se faire attendre. Le régent était fier et impassible par moments, impétueux par d’autres. Impatient, sans doute, silencieux apparemment. Le Baron n’avait rien à ajouter qui n’aurait pu paraître intéressé. Sa place était à la Cour, cela ne faisait aucun doute et il l’avait suffisamment sous-entendu. Si pourtant cela était clair en son esprit, l’était-ce dans celui d’Aetius ? Qui savait ce qui se passait dans la tête de cet homme, grisé par la victoire ? Sonder une personne n’est pas sonder ses pensées et il est vrai qu’il aurait été bien plus rapide pour quiconque de pouvoir connaître les idées du Régent avant qu’il ne les concrétise. Pensez donc ! Si l’on avait su ce qui se tramait dans les méandres qui formaient sa pensée ! Par les Dieux, la face de Miradelphia aurait pu en être changée. Mais ce qui n’est pas n’est pas et il semblait vain que de fonder ses politiques et espoirs sur un passé révolu n’ayant pas même existé sinon dans les fantasmes de quelques uns. Car ils étaient légions, ceux là qui n’avaient comme rêve que de voir le régent détrôné –pour les plus chastes-, décapité –pour les plus vils.

    « Monseigneur, permettez-moi de vous affirmer que je n’ai rien d’un ardélion et je n’ai d’autre intérêt que le vôtre. Je ne cesserais de vous répéter que la vieille cour est pleine d’attrape-minons. Mon œil ne vise pas vos suivants, quoique la dévotion de certains me paraisse suspecte. Si vous me souhaitez utile, donnez-moi la seule arme que je manie avec habileté : le sceau. Je ne pourrais mieux vous aider qu’à la Cour et si jamais mes armes vous seraient utiles, alors j’irai m’entraîner dans les cours avec quelque maître. J’ai grand cas de votre survie et je crains que l’on ne veuille attenter à vos jours. Votre victoire sur Léandre me paraît inéluctable et plus votre ost ira au Nord, plus ce cagot enverra d’agents dans la capitale, si elle n’en est pas déjà emplie. Le tumulte de la guerre a bien tristement permis à une foule de vilains de forcer les murailles…et les éracins de Léandre en sont. Sans compter ses négociants qui arpentant les marchés et les entrepôts et ses savants qui sous les voûtes conspirent. Je ne tiens pas cet homme en mon cœur…comme si c’était peu de la guerre civile voilà que ce jactant roitelet compte ébranler les fondations fragiles de ce royaume renaissant. Un benêt voilà tout, d’autant plus dangereux que son nom résonne et que son bras risque d’aller plus loin que nous ne le pensions…Monseigneur, laissez moi guetter ses idées et ses pas tandis que vous chasserez le lièvre et lorsque viendra la bataille, vous pourrez triompher, seul sur le piédestal. Vous y serez sans ombre…après tout, le Soleil m’indispose. »

    Si le Soleil vous fuit, avalez les nuages.
    Fallait-il en dire plus ? Nullement. Tout ceci semblait largement suffisant et étouffer le prince du sang de discours et de politique aurait été maladroit, si cela ne l’avait pas déjà été. Les armes avaient le sang et l’Ivrey l’aimait. La cour avait le poison…bien plus insidieux, bien moins attrayant. Cléophas comprenait que le Comte préférât sa chasse et sa bataille à celles que menaient les courtisans. Pouvait-on lui en vouloir ?
Revenir en haut Aller en bas
Aetius d'Ivrey
Ancien
Ancien
Aetius d'Ivrey


Nombre de messages : 1466
Âge : 33
Date d'inscription : 07/02/2010

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  La vingtaine (25+)
Taille
:
Niveau Magique : Arcaniste.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeDim 1 Avr 2012 - 15:36

« Ma parole, vous craignez donc tout, Merval ! » s'écria le régent en riant. « Soit, si vous n'êtes point homme à combattre, vous aurez sûrement d'autres utilités. Je suis seigneur de tant de terres, et tuteur de tant de cités, il me faut bien des hommes pour les administrer. Vous êtes donc un homme de lettres et de lois, bien. Cela ne vous empêche pas d'être un baron, et un homme du roi, et si vous ne dirigerez pas vous-même vos hommes, je suis sûr qu'il est quelques capitaines de bonne vertu qui s'en chargeront volontiers à votre place. »

Le refus de Cléophas n'avait guère l'air d'excéder le seigneur, qui continuait à trotter sans jeter un regard à son interlocuteur. Il avait l'air, même, réjoui par son invitation déclinée.

« Vous n'avez pas l'air de tenir le seigneur Léandre en haute estime, et cela est bien. Tous devraient penser de même quand il s'agit de félons... Après tout, il trahit son suzerain, qui lui a apporté paix et protection. Et comme vous semblez être peu enclin au parti de ce rebelle, mais que vous n'y sachez goutte aux choses de la guerre, cela me fait penser à quelque chose. L'Eraçon a des lois, comme tout autre pays, et des hommes qui vivent sous ses lois. Il y a aussi la gueusaille, qu'il faut nourrir et protéger. Aussi, ce n'est pas en tant que capitaine que vous partirez à Erac, mais en tant que seigneur Justiciaire, vous serez alors chargé des choses de justice, de cité et d'intendance. Vous gouvernerez Erac et conseillerez les gens qui soutiennent Eliam, convaincrez les rebelles de revenir à la raison en mon nom. Ainsi nous pourrons juger de vos capacités. »

L'offre était un véritable cadeau empoisonné. Un justiciaire, une sorte de lieutenant royal ou princier, prenait, en quelque sorte, la place du seigneur du lieu. Une sorte de gouverneur, en quelque sorte. Aetius nourrissait-il quelques arrières pensées ou avait-il été convaincu par le baron sur la contingence de cette rébellion ? Etait-ce un moyen de perdre ce seigneur trop audacieux et trop franc, ou un moyen de lui laisser faire ses premières armes en tant que haut fonctionnaire, une sorte d'étape dans le cursus honorum royal?
Revenir en haut Aller en bas
Cléophas d'Angleroy
Ancien
Ancien
Cléophas d'Angleroy


Nombre de messages : 314
Âge : 38
Date d'inscription : 22/12/2011

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 42 ans
Taille
:
Niveau Magique : Non-Initié.
Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitimeDim 1 Avr 2012 - 17:56

    L’eau la plus pure est un poison.
    Quelle était cette offre si charmante ? Un homme tel que le Régent aurait-il eu assez d’esprit pour vouloir rétablir politiquement l’ordre en Erac ? Cette hypothèse paraissait peu probable, si bien que Cléophas se méfia aussitôt de ce cadeau. Le régent se trompait dans ses paroles et lorsque l’Ivrey parla de quelques capitaines vertueux, le Baron vit clair. Les armées mervaloises n’iraient en aucun lieu sans l’ordre clair de leur Baron qui ne serait donné qu’avec l’approbation de la Duchesse. Les vassaux ne sont pas nés soumis à quelconque autorité sinon la leur et Aetius n’était pas le Roi. Seigneur justiciaire ! Un nom pompeux pour une dignité sans valeur, reléguer à ses vassaux les tâches ingrates. C’était prévisible de la part d’un homme de si peu d’honneur…Cléophas pensait tant de choses de ce régent et de ses faits mais il n’en est aucun qui put savoir s’il l’approuvait ou le méprisait. Il se contentait tantôt d’acquiescer, tantôt de conseiller. Vouloir d’un Suderon qu’il régnât en Erac était une erreur, sans doute plus pour la couronne que pour son bras.

    En Erac, le pragmatisme est roi.
    L’Ivrey souhaitait du Baron qu’il allât en Erac. Il irait en Erac. Après tout, le Baron de Merval avait été connu par ses fines analyses et il allait toucher à la pratique. Durant plusieurs années de pérégrinations le Mervalois avait pu se pencher sur les écrits de chaque terre ; leurs lois, leurs us et leurs coutumes de sorte qu’il appréhendait justement les caractères de certaines peuplades. Seul le grand Nord le laissait dubitatif...en Serramire les hommes sont étranges et encore plongés dans une folle nostalgie des temps anciens jusqu’à observer les rites de jadis. Si l’Erac était plus civilisé que le Nord, le Sud le devançait en maints points. Contrairement aux Suderons, le Médian et son peuple avaient une pensée plutôt martiale et métallique, une certaine forme de pragmatisme qui les menait aujourd’hui vers le tumulte. Les liens du sang ne peuvent être trompés et c’est ce qui avait mené Léandre le fol vers la rébellion. Grâce aux Dieux, le peuple avait une once d’esprit et savait qu’à le suivre il finirait sans doute ruiné.

    Tout jeu politique a l’aspect d’un escalier.
    Les dialogues pouvaient être si ennuyants. Ce duel presque infini, chacun devant rendre chaque coup à son adversaire jusqu’à ce que l’un des deux se décide à déclarer forfait…sans compter qu’à cheval, tout était plus lassant. Qu’avaient les princes à vouloir parler en chevauchant ? Sans doute pouvaient-ils mieux s’échapper ainsi, ceux-là qui appréciaient trancher plutôt que de penser. Cela importait peu en soi pour ce que le Baron avait bien du temps à accorder au régent.

    « Si c’est en Erac que vous me pensez utile, alors c’est en Erac que j’irai. La félonie n’a rien de bon et ceux qui les suivent doivent endurer le même sort. Ce Léandre me ferait plus sourire la tête plantée sur une pertuisane qu’engoncé dans une armure de plates. Je ne porterai jamais en estime ces imbéciles qui croient, par orgueil, pouvoir renverser un Royaume. Il les faudrait enfermer dans une forteresse d’airain et les y laisser croupir. Je les entends déjà geindre et conspirer pour s’échapper de leur enceinte. Parfois, je pense que la pitié n’a pas lieu d’être. La cruauté en politique est un mot inconnu et qui ne gagnerait pas à se faire connaître. Quoiqu’il en soit, l’Erac se ralliera promptement à l’étendard du Roi, j’en ai l’intime conviction. La loyauté prévaut. »

    L’horizon permet de retrouver la raison.
    Les deux seigneurs s’éloignaient de la demeure de chasse qui n’était plus qu’une tâche ocre se détachant du profond vert des bois environnant. On voyait la troupe dans la prairie lointaine qui ne cessait d’avancer, ne sachant où jusqu’à ce qu’ils décidèrent de s’arrêter. L’on vit l’Ivrey adresser quelques mots au Mervalois après que celui-ci ait accepté la proposition. Les deux princes se faisaient face puis lorsqu’il apparut que le régent avait fini de parler, le Baron inclina légèrement la tête et revint à vive allure vers la demeure. Lorsqu’il fut à quelques dizaines de mètres de la porte, il leva le bras et ses gardes le rejoignirent dans sa chevauchée. Le Baron allait retrouver son carrosse et ses biens, laissés au négociant pour la journée, avant que de rejoindre ses terres. S’il se devait de partir en Erac, il avait aussi des responsabilités de Baron qu’il ne comptait pas oublier. Merval était en train de renaître et il eut été grave de stopper aussi brutalement sa croissance.

    Les ambassadeurs ne reconnaissent aucun foyer.
    Par chance, la bâtisse marchande n’était qu’à quelques lieues de la demeure du régent. Lorsqu’on le retrouva, le Baron fit signe a ses pages de préparer toutes les malles pour le voyage de retour. Quant au marchand, assis sur un banc de pierre, entre la grande porte et un buis à peine taillé, il rejoignit son ami pour apprendre avec plus de précision ce qu’il s’était passé dans l’intimité de la plaine. D’Angleroy était aussi bref et laconique cependant, la nouvelle avait tout d’un choc.

    « Je ne m’attarderai pas ici. Un bain et une nouvelle toilette me suffiront et si tu pouvais charger quelques victuailles je t’avouerais que cela me plairait. Je n’ai plus le temps, mon ami, je dois retrouver mes cités et les administrer. Ce régent m’envoie gérer l’Erac rebelle…j’y serai gouverneur et porterai la parole du Roi Eliam. Comprends que je ne veuille m’entretenir trop longtemps. S’il te fallait me contacter à quelque sujet, fais dépêcher un de tes domestiques en Erac, il m’y trouvera ou hâte-toi en Merval où les hommes ont ma confiance. Point de courrier, point de plume, d’encre ou de papier. »

    Seigneur justiciaire de l’Erac en plus que d’être Baron de Merval. Quelle était cette lubie, nul ne le savait. Mais une chose paraissait certaine, l’on le saurait bientôt, au péril du Léandre espérait-on.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Lors d'une chasse à l'oisel Empty
MessageSujet: Re: Lors d'une chasse à l'oisel   Lors d'une chasse à l'oisel I_icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
Lors d'une chasse à l'oisel
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Rose-Mahaut Loisel[Aetius]
» Lors d'un printemps (PV Fenris)
» Chasse d'assassine
» Une chasse au drow
» La chasse au gobelin

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Miradelphia :: PÉNINSULE :: Diantra-
Sauter vers: