Fais moi goûter ton herbe. [PV Castielle][Terminé]

Ses yeux de pluie se fixaient sur Deloth intensément, le sondant entièrement, de la tête aux pieds, mais particulièrement plongeaient dans ses yeux sanglants. Elle le regardait pour le comprendre, pour le croire, pour déceler la vérité et le mensonge afin de porter son jugement qu’elle prévoyait être fatale. Si elle aurait su pour les nombreux meurtres et assassinats qu’il avait à sa traîne, elle aurait probablement prise ses jambes à son cou et peut-être même interpeller la garde.

Elle l’écouta attentivement. Il se définissait comme étant un artiste. Quel genre d’artiste? Castielle avait la drôle impression d’être placée devant une métaphore malsaine, mais elle n’y pensa plus. La demi-elfe voyait bien trop de sincérité dans les yeux de Deloth pour pousser de mauvaises conclusions à ce sujet. Ses mots étaient recherchés avec élégances et elle en conclut aussi qu’il était un homme éduqué. Bien qu’elle eu du mal à l’avouer, elle souhaitait un homme de bonne vie sachant lire et écrire et non un malotru vivant dans les ruelles. Peut-être était-elle prétentieuse finalement.

-Un artiste, répéta-t-elle pour elle-même d’une voix plutôt basse.

Elle réfléchit un moment. Avant qu’elle ne puisse dire autre chose, il l’embrassa à nouveau. Toutefois, cette fois-ci, elle ne broncha pas sous la passion de l’elfe. Jamais elle n’aurait cru être la proie à autant d’ardeur venant d’un homme. Particulièrement pour un elfe. N’était-elle pas une honte pour sa race?

Castielle posa timidement ses mains sur le torse de l’elfe et y pressa ensuite sa tête emplit d’une panoplie de nouvelles idées et d’appréhensions. Oserait-elle lui offrir l’opportunité de la fréquenter? Et quand saurait-elle si elle est bel et bien tombée amoureuse de cet homme? Comment se sentait-on lorsqu’on était amoureux? Tant de nouvelles questions pour cette jeune demi-elfe encore jouvencelle dans son esprit. Ses joues rosirent légèrement.

Elle sentit sa prise de raffermir doucement autour de sa taille. Dans ses bras, elle avait un doux sentiment de sécurité.

Plus tard, après cette simple étreinte, il se pencha pour récupérer ses armes, qu’il sangla habilement à sa ceinture. Elle fronça des sourcils à sa demande et regarda la ville à nouveau. Celle-ci s’était lentement plongée dans l’obscurité et les seules lumières existante étaient les faibles lueurs offerte pas les lanternes dans les rues. Jamais elle n’aurait osée s’aventurer seule ainsi dans les ténèbres d’une si grande cité.

-Oui, il serait préférable pour moi de rentrer, j’ai du travail demain et je n’aimerais pas que mon maître trouve la maison vide à son retour, déclara-t-elle après un moment de réflexion.

Plutôt que de lui offrir son bras comme le désirait les convenances, Castielle lui offrit ouvertement sa main avec un air complice dans les yeux. Elle sourit.

-Peut-être en chemin me raconteriez-vous à quoi vous sert toute ses armes? Remarqua-t-elle avec une expression suspicieuse.

Tandis que la tête de la demie était appuyée contre son torse, oreille contre poitrine, Deloth scinda ses mains. La gauche restant enlacée contre sa taille, la droite caressant doucement ses cheveux, balayant de gestes doux, lents et attentionnés, remplis d'amour et de tendresse, les petites mèches de Castielle tombant sur ses yeux. Pouvait-ils se qualifier d'amants ? Deloth ne le savait pas : des amants se vouaient un amour réciproque, et même si tout portait à le croire, rien ne prouvait à Deloth que la demie était amoureuse de lui, contrairement à l'assassin qui lui était amoureux d'elle, cela ne faisait aucun doute pour lui. Il sentait la fine odeur de citron de ses mains, la fragilité de son corps, et savourait sa main entourant la taille de la demie.

Elle acquiesça lorsque Deloth lui proposa de rentrer et de la raccompagner, lui laissant doucement sa main afin qu'il la prenne. Lentement mais avidement, l'assassin élança ses doigts vers ceux de la vendeuse, les entremêlant, nouant leurs mains dans une étreinte intime. Ils descendirent les escaliers, Deloth soutenant l'Elfe par sa mai entremêlée. Lorsqu'ils sortirent dehors, ils furent surpris par un léger froid qui s'était levé par faute du vent. Voyant la chétive frissonner, Deloth ôta son propre manteau noir à capuchon, le plaçant sur les épaules de la jeune demie-Elfe. Elle avait une étrange allure, vêtue de ce sombre manteau bien trop grand pour elle, dont la capuche, rabattue, laissait voir de la fourrure de loup. Il déposa un baiser sur l'extrémité des lèvres de Castielle, et reprit son droit sur sa main.

Marchant ainsi, lentement, comme deux amants main dans la main, Deloth ne faisait pas attention à ses armes largement visibles, ni à ses avant bras musclés qui frissonnaient sous le vent. Ses sabres maintenaient à distance d'éventuels manants, suivant de près ou de loin le couple. Si la vision des sabres ne suffisait pas, un regard noir les convainquaient de passer leur chemin vers d'autres destinées que celle de mourir ce soir même.

« Dans notre monde, nous devons tous apprendre à nous défendre. Je voyage seul et les routes sont dangereuses. J'ai été rompu à l'enseignement des armes, car mon métier d'artiste exige que j'en connaisse les secrets. »

Ils marchaient doucement, mais bientôt parvinrent au pavillon que Deloth reconnût sans grande peine, celui de la boutique. Ils s'arrêtèrent devant, leurs mains se rejoignant au niveau des lèvres de l'assassin qui baisa celle de la vendeuse. Puis il partit à la conquête de ses lèvres, qu'il savoura et baisa, sa main droite sur sa joue, sa gauche autour de sa taille. Le baiser dura de longues minutes, de durables secondes dans lesquelles Deloth tirait une source de bonheur jamais égalée. Puis il se retira du visage de Castielle, attendant ses adieux, ou peut-être, une invitation à rentrer.

Castielle sourit bêtement en sentant soudainement le poids de son manteau sur ses épaules, elle ne fit aucune remarque. Il était vrai que l’air s’était rafraîchie subitement, étrange pour une soirée au beau milieu de l’été. Au moins, les gens dormiraient bien ce soir. Pour ceux vivant dans les rues, cela allait être une toute autre histoire. Elle eut une brève pensée pour sa vie de mendiante par le passé. Peut-être raconterait-elle cette partie de sa vie à Deloth, un jour ou l’autre. Pour l’instant, son passé était bien peu pertinent. Sa vie attendrait qu’elle connaisse l’elfe un peu mieux.

-Nous défendre, dites-vous? Dit-elle tout bas.

Ses sourcils se froncèrent et son pas suivit le rythme de l’elfe. La violence, elle détestait. Elle avait déjà assistée au chaos de la rue, elle savait à quoi s’attendre. Combien de personnes se faisaient égorger la nuit durant? Combien de femmes humiliées et laissées sur le sol glacée, se vidant de leur sang et faisant leurs adieux à leur pudeur? Combien de veuves blessées et d’orphelins se disputaient un morceau de pain égaré sur la pierre lors du jour du marché?

-Votre métier d’artiste, encore, songea la demi-elfe à voix haute. Dites moi, Deloth, êtes-vous un mercenaire? S’enquit-elle en haussant un sourcil.

Car, pour Castielle, le métier de mercenaire était beaucoup plus acceptable que tueur et violeur en série. Heureusement, elle ne pouvait voir les discrètes taches de sang sur le bas de son manteau. Grâce à la complicité de l’obscurité de la nuit et d’un lavage récent.

-Je dois vous avouer que la barbarie me déplaît amplement, n’apporter pas la violence dans mon foyer, ajouta-t-elle avec une expression des plus sérieuses.

Elle marcha à ses côtés encore un moment. Une brise fraîche lui chatouilla le visage et s’amusa à mouvoir les mèches qui lui encadraient joliment le visage. Castielle se rapprocha timidement de Deloth lorsqu’ils passaient près d’un groupe d’ivrognes aux rires gras et déplaisants à entendre. La demi-elfe soupira d’aise lorsqu’ils furent hors de sa vue.

-Ce que le vin arrive à faire à ses pauvres hommes, déclara-t-elle avec une pointe de dégoût dans la voix.

Puis, elle fut à nouveau devant chez elle. Son sourire s’évapora durant un moment. Elle aurait voulu converser plus longuement avec son nouvel… ami, mais le temps n’y était pas et elle se devait d’être chez elle avant son maître. Celui-ci ferait une crise s’il ne le savait pas en sécurité entre ses quatre murs!

Deloth lui baisa les mains, puis la bouche. Elle se laissa embrasser et apprécia même. Cette preuve d’affection lui devenant plus normale. Castielle le regarda longuement, elle n’oserait jamais l’inviter chez elle à nouveau, pas sans l’accord de son maître. De plus, Adrian n’était pas encore rentré, il était donc hors de question qu’elle se retrouve seule et vulnérable avec l’elfe. Elle se contenta de lui sourire.

-Bonne nuit, Deloth, dit-elle doucement avant de se placer sur la pointe des pieds et déposer un baiser sur sa joue.

Castielle ouvrit la porte derrière elle.

-J’espère que nous nous reverrons bientôt.

Elle fit une brève référence pour le saluer et ferma la porte derrière elle. La demi-elfe avait passé un bon moment en sa compagnie, peut-être pourrait-elle espérer le début d’une fréquentation à long terme, peut-être pas. Peut-être lui écrirait-il? Peut-être devrait-elle débuter une correspondance avec lui?

La demi-elfe verrouilla la porte derrière elle. C’était un tout nouveau commencement…