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 Un collier pour Misère | Milynéa

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Azza
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MessageSujet: Un collier pour Misère | Milynéa   Un collier pour Misère | Milynéa I_icon_minitimeDim 7 Oct 2018 - 18:03

La mort de Niss devait effacer l’affection qu’Azza avait pu porter à la gladiatrice. Il en avait été ainsi pour toutes celles et ceux qui l’avaient précédée. La prêtresse n’avait pas pleuré Jahrit, par exemple, quand sa vie avait été fauché par le nain Gilgamek ; et elle avait passé beaucoup plus de temps avec lui qu’avec la jeune éphémère.

« Niss était… différente, avoua-t-elle pourtant — un soir où elle avait bu un peu plus que de raison — à un Hashar qui s’agaçait de sa mélancolie. Je n’avais jamais rencontré quelqu’un qui voulait tant… vivre ? Je ne sais pas.

Tu aurais dû… commença l’eunuque.

L’acheter ? le coupa la prêtresse d’une voix plaintive. Tu crois que je ne le sais pas ?

La laisser mourir beaucoup plus tôt, » la corrigea-t-elle d’une voix dure. Elle lui lança un regard interloqué, mais il ne se laissa pas impressionner. Le guerrier n’en pouvait plus d’entendre la daedhelle geindre à longueur de journées depuis deux ennéades. « Ou l’acheter, oui. L’un ou l’autre.

Le Débonnaire ne voulait pas me prêter l’or nécessaire, protesta mollement Azza. Je pensais avoir assez de temps pour le convaincre, mais tu sais comment il peut être, parfois. »

Hashar soupira avant de hausser les épaules avec fatalisme. Quand elle était comme ça, il était inutile de parler à la prêtresse de Teiweon. L’alcool lui soufflait toutes les réponses, exacerbait sa mauvaise foi et brouillait son jugement. « Quelle épave tu seras quand ce sera moi qui mourrait, lâcha-t-il en espérant changer le sujet de leur conversation.

Elle aurait rendu Mère fière, » expliqua Azza en s’allongeant à même le sol froid. La dalle froide chassa temporairement les vapeurs d’alcool et elle poursuivit avec l’esprit si clair que c’en était étourdissant. « Niss essayait. Je n’ai jamais pu, moi. Elle aurait pu souffrir me voir échouer, mais ça, je le lui ai toujours refusé.

Il faut vraiment que tu arrêtes de boire autant, énonça fermement l’esclave qui se sentait toujours mal à l’aise quand sa maîtresse commençait à lui raconter ses vagues à l’âme.

Tu dois avoir raison, pouffa tristement la concernée en tournant sa tête dans sa direction. Demain, promis. Demain. Pas ce soir. Ce soir, il faut que je boive encore un peu, pour oublier cette conversation. »

Et Hashar d’opiner du chef, pas forcément contre l’idée de se raffraichir le gosier lui-même. Avec un peu de chance, cela rendrait sa soirée plus agréable.

Et de fait, ils burent. « Un peu », comme l’avait affirmé Azza… mais plusieurs fois. La prêtresse perdit bien vite le compte et ce n’était pas son dévoué garde du corps qui allait pouvoir la renseigner. Depuis qu’il était devenu l’esclave personnel de la doeben — et accessoirement, son supposé garde du corps — il n’avait plus souvent l’occasion de boire. Son abstinence forcée avait sérieusement réduit sa résistance à l’alcool, ainsi que le prouverait très vite son mal de crâne carabiné. Mais si la plupart de leurs péripéties nocturnes devaient être perdues à jamais, il en était une que la postérité saurait sauver.

Deux heures avant l’aube, Azza et Hashar erraient dans des ruelles un peu mal famées de Thaar quand ils tombèrent nez à nez avec une éphémère d’une dizaine d’années tout au plus. Le gladiateur était déjà parti pour la dépasser sans lui lancer le moindre regard, mais un détail attira celui d’Azza.

Ses yeux.

« Attends, souffla la prêtresse pour attirer l’attention de son esclave. Tu ne trouves pas que… » Elle hésita, cherchant ses mots ; cela laissa assez de temps à Hashar pour se retourner un darder des prunelles par trop vitreuses en direction de la gamine. « Elle est adorable ?

Pas vraiment, répondit sincèrement le guerrier avant de pouffer. Regarde ses épaules. Elle a tellement rien sur les os, chui sûr qu’on pourrait couper que’que chose avec ses épaules. »

Azza secoua la tête ; elle n’avait que faire de ces menus détails. Tout ce qui lui importait, c’était la rage qui brillait dans les iris verts de l’enfant. Si brillants, songea-t-elle avec fascination. Plus encore que Niss. Plus encore que tout le monde. Elle fit un pas dans la direction de la petite, qui se tendit instantanément. « Je la veux, » expia Azza dans un souffle chargé d’alcool. Hashar pouffa à nouveau et elle reporta son attention sur lui, courroucée désormais. « Je suis sérieuse ! » Par chance pour ses desseins, quand la daedhelle était ivre, elle parlait instinctivement dans sa langue natale, si bien que sa proie ignorait tout encore de ses projets. Hashar, lui, baragouinait dans un dialecte qui n’appartenait qu’à lui et qui mélangeait les trois langues qu’il connaissait. « Je suis sérieuse, répéta à nouveau Azza avant de se tourner vers l’enfant. Regar… Eh ! »

C’était peut-être le ton qui avait fini de convaincre la gamine de ne pas demander son reste ; la prêtresse ne prit même pas le temps de réfléchir à ce qu’elle devait faire et agit instinctivement. Elle saisit du bout de ses doigts une mèche de ses longs cheveux et marmonna quelque chose. La petite couina faiblement avant de s’effondrer face contre terre. La schène désoula complètement l’ancien gladiateur, qui lâcha un juron de son cru avant de se précipiter au chevet de la victime de la daedhelle. « Azza, protesta-t-il en la retournant délicatement sur le dos. Qu’est-ce que tu as foutu ?

Ce n’est pas ma faute, protesta-t-elle en les rejoignant. Elle était en train de s’échapper et tu ne faisais rien pour l’en empêcher. Il fallait bien que…

Elle n’a pas l’air morte, la coupa l’eunuque avec soulagement.

Bien sûr que non ! protesta la prêtresse. Je ne vais pas l’empailler, pour qui tu me prends ? » Elle aussi commençait à sentir les effets de l’alcool se dissiper. Elle n’était pas une magicienne très puissante, loin s’en fallait, et c’était la première fois qu’elle lançait le moindre sort dans un état comparable. Elle n’était pas forcément fière d’elle, mais son égo l’empêchait de le confesser à Hashar, à qui elle ordonna plutôt de ramasser sa trouvaille. Quand il protesta, arguant qu’ils ne pouvaient pas simplement l’enlever, elle haussa les épaules. « Tu l’as dit toi-même : elle n’a que la peau sur les os. Elle est sans doute orpheline et quand bien même elle ne le serait pas, sa famille ne parvient pas à la nourrir convenablement. » Il protesta encore un peu, mais la prêtresse ne voulait rien entendre et il finit par céder.

C’est ainsi qu’Azza adopta, sur un coup de tête, une petite éphémère par trop sauvage qu’elle nomma Nilah, un mot qui voulait dire misère dans la langue des siens.

Pendant trois jours, Azza fit son possible pour cacher la désormais nommée Nilah au reste de la maisonnée du Débonnaire. Son entreprise fut grandement facilitée par un petit détail qui lui avait échappé lors de leur rencontre : la gamine était muette. Une vilaine cicatrice barrait sa gorge, ce qui laissait entendre que c’était une blessure qui lui avait volé sa voix. Toujours était-il que Nilah pouvait au mieux grogner — ce qu’elle faisait souvent — mais crier ou demander de l’aide, ça elle en était bien incapable.

Le sort d’Azza avait apparemment effacé juste ce qu’il fallait de la mémoire de l’enfant, qui ne concevait dès lors aucune rancœur trop vive à son encontre. Il se trouvât qu’Azza sut très vite trouver les arguments pour la convaincre de ne pas trop regretter les ruelles dangereuses de Thaar : elle lui offrit des repas de reine.

Quand le Débonnaire découvrit la dernière frasque de son invitée préférée, il ne cacha pas sa réprobation. C’était que l’homme avait vécu dans la misère lui aussi. S’il n’avait pas l’âme d’un bon samaritain, il ne goûtait pas non plus les caprices des puissants, qui s’asseyaient bien volontiers sur la vie des petites gens.

« Laisse-moi la garder, s’il-te-plaît. Je te promets que je prendrai correctement soin d’elle. »

La façon dont Azza parlait de la petite — comme si elle n’était rien de plus qu’un chat errant, vraiment — lui laissait un goût de bile sur la langue. « Ce que je désire n’a pas beaucoup d’importance, expliqua-t-il avec une patience qu’il n’était pas certain d’avoir. Est-ce que tu t’es seulement rendue compte que la petite volait dans les cuisines depuis que tu la caches dans ta chambre ? Je suis prêt à parier tout ce que tu veux qu’elle fait des réserves pour le jour où elle voudra te fausser compagnie.

Elle fait vraiment ça ? demanda Azza sans parvenir à cacher sa surprise — ni le déplaisir que lui procurait cette idée. C’est parce qu’elle ne me fait pas encore totalement confiance. Ça lui passera. » Tout du moins, elle l’espérait. Elle n’était pas certaine qu’Hashar supporterait encore longtemps de jouer la nourrice.

« Et toi, alors ? continua Gerald. Tu es sûre de toi ? De vouloir la garder, je veux dire. Foutredieu, qu’est-ce que tu peux bien croire que tu vas faire d’elle ?

Je… » commença Azza avant de se rendre compte que sa vraie réponse n’était peut-être pas exactement ce que Gerald avait envie d’entendre. Elle prit donc quelques secondes pour réfléchir à une histoire plus vendeuse à servir à son hôte. « Je m’ennuie, Gerald. Élever Nilah me distraira pour les dix prochaines années — c’est à peu près le temps qu’il lui faudra pour devenir adulte, non ?

Je n’aurais jamais pensé que tu avais la fibre maternelle, répondit le Débonnaire en soupoudrant sa remarque juste ce qu’il fallait de sel.

Ce n’est pas pareil. Elle n’est pas de moi, se contenta-t-elle de répondre en haussant les épaules. Alors, je peux la garder ?

Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Elle est dans tes pattes, désormais. Je ne vais pas aller voir la garde la bouche en cœur en leur expliquant que tu as cru qu’il était malin de kidnapper une gamine. » Il marqua une pause et fronça les sourcils en prenant conscience d’un détail qu’il avait négligé jusque là. « D’ailleurs, elle n’a pas peur de toi ?

Pas plus que ça. Elle n’a peut-être pas eu l’occasion de cotoyer beaucoup de mes semblables. » Cela conclut plus ou moins leur discussion ; il fut par la suite acté que Nilah resterait chez le Débonnaire.

Comme le bourgeois l’avait anticipé, elle chercha à s’enfuir plusieurs fois, mais Hashar sut toujours la retrouver. La prêtresse ne voulait cependant pas se fier à la chance trop longtemps et elle décida de faire tatouer sa protégée de la marque du Débonnaire, pour que les gardes thaarii sussent à qui la rapporter si jamais ils la croisaient dans la rue. Cela faisait d’elle, de facto, une esclave — ce qui n’était pas forcément le projet initial — mais une esclave qui, tant qu’elle restait sagement dans la demeure du Débonnaire, pouvait faire à peu près ce qui lui plaisait. Azza n’était pas une « mère » très exigeante et la véritable éducation fut très vite prise en charge par la maisonnée du Débonnaire.

Hashar ne se faisait pas encore complètement à l’idée qu’Azza fût — même vaguement — responsable d’une enfant.

Nilah s’était petit à petit faite à sa nouvelle vie, jusqu’à finalement renoncer à ses véillités de fuite. Elle commençait tout juste à se remplumer, ce qui faisait plaisir à voir. Même s’il ne se l’avouait pas encore, l’ancien gladiateur aimait bien la petite muette. Elle était telle une petite flamme qui brillait intensément malgré une apparente fragilité. Elle était adorable quand elle fronçait les sourcils, ce qu’elle ne manquait jamais de faire pour tout et n’importe quoi : quand elle ne comprenait pas quelque chose, quand elle avait faim, quand on lui annonçait qu’elle allait devoir prendre un bain…

Azza aussi demeurait fascinée par son nouveau jouet. Elle passait désormais le plus clair de son temps avec elle et faisait beaucoup d’efforts pour s’en faire apprécier. Jusqu’à présent, ils ne payaient pas forcément beaucoup ; Nilah continuait de se méfier d’elle et ne lui pardonnait pas tout à fait le tatouage qu’elle abordait désormais à la base de la nuque. Hashar doutait pourtant que la prêtresse s’en rendait compte, cependant, ce qui n’était pas plus mal. Nilah acceptait de lui tenir la main quand elles se promenaient dans Thaar et c’était peut-être tout ce qu’elle demandait.

« Nous sommes arrivés, » annonça d’ailleurs la prêtresse en montrant une échoppe de sa main libre. Nilah darda son regard émeraude dans la direction indiquée, sans comprendre ce qu’elle voyait. Elle tordit le cou pour jeter un regard inquisiteur à Hashar, qui haussa les épaules.

« Me regarde pas, petite. C’est elle qui sait, répondit-il à sa question muette avec un haussement d’épaule fataliste.

Cette boutique appartient à l’un des meilleurs joalliers de la ville, expliqua Azza en reprenant sa marche. Nous allons lui commander une pièce rien que pour toi. » Comme il était visible que l’enfant ne comprenait pas — elle fronçait les sourcils — la daedhelle compléta : « Je pensais à un collier, par exemple. Quelque chose qui aille avec ta crinière rousse. »

Derrière elles, Hashar ricana ; la prêtresse était vraiment une mère épouvantable. Pensait-elle vraiment que Nilah avait envie d’un collier ? Il était prêt à parier tout ce qu’il possédait que la sauvageonne le perdrait ou le casserait en moins d’une ennéade. Il n’en toucha pas un mot à sa maîtresse, pourtant, et ils pénétrèrent tous trois dans l’échoppe désignée par Azza.

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Milynéa Lythandas
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MessageSujet: Re: Un collier pour Misère | Milynéa   Un collier pour Misère | Milynéa I_icon_minitimeVen 12 Oct 2018 - 19:17

A bien des égards, l'Art du Façonneur est celui qui se rapproche le plus de celui des Dieux lorsqu'ils façonnèrent l'univers et y introduisirent l'Ordre – l'état initial de la Trame, vers lequel elle tend constamment à revenir – car, au contraire de tout autre génère le plus souvent un désordre éphémère et dérisoire, le façonneur, lui, introduit un nouvel ordre artificiel au sein d'un monde minéral, stable et durable. Néanmoins, n'est pas Source qui veut, et le plus simple des artifices imprégnés par le plus talentueux des maîtres ne peut durer éternellement, contenir et résorber complètement les effets de son exploitation. C'est là que se situe l'une des frontières, et non des moindres, ici que l'Art de l'Imprégnation trouve sa limite... On parle alors de durabilité, ou d'un nombre de charges – comprendre une utilisation simple – avant l'effondrement de l'ordre artificiel.

Pourquoi évoquer ceci ? N'y cherchez pas vainement un rapport avec la suite mais plutôt une référence au passé, la continuité et l'achèvement d'une métaphore engagée bien des années auparavant, lorsqu'un fameux Façonneur se décida à déménager, comparant le processus à l'Imprégnation elle-même... Puisqu'il en fut ainsi à son commencement, il convient de l'achever pareillement, non ? Bien, nous sommes d'accord, alors allons-y.



L'ordre artificiel sur lequel avait été fondé sa boutique à Sol'Dorn, depuis les premiers jours éprouvé et assiégé par les ambitions des petits chefs et de ces crétins qui n'aspirent qu'à s'approprier un pouvoir qu'ils ne pouvaient préserver, avait tenu bon, longtemps... si longtemps... Mais la volonté à toute épreuve d'un Ranaghar s'obstinant dans son refus de se mêler à leurs histoires, à ne pas s'associer à Jacques et s'aliéner Paul et à les envoyer chier, l'un et l'autre avec leurs requêtes pourries et sans intérêt ne pouvait durer éternellement... Une telle position devenait de plus en plus bancale, tandis qu'à l'est, par delà les Terres Stériles, les esprits s'échauffaient dans les profondeurs du Puy dont se dégageait l'odeur du sang et le fracas des armes... Ce qui affectait l'Elda contaminerait Sol'Dorn, inévitablement...

Bref, c'était un bordel qui n'avait rien de joyeux ! Un merdier pour lequel il ne manqua pas de maudire les dieux, sans les nommer, d'avoir offert à leurs créations le Souffle, le Choix, le Libre-Arbitre – rayez les mentions inutiles – qui les avaient libéré de l'autorité de l'Ordre et en avait fait les instruments de l'Entropie, son opposée, cette force qui ne savait qu'accumulée le désordre pour en produire davantage, encore et encore.
Ce tas de fumiers sur le palier de la porte depuis belle lurette, qui grossissait chaque jour davantage et qu'il était impossible de nettoyer, donc, s'infiltrait petit à petit dans les irrégularités des murs, l'odeur imprégnait l'endroit tant et si bien qu'il ne pouvait plus y échapper complètement... Ça sentait littéralement mauvais, et impossible d'ouvrir pour aérer... L'angoisse absolue !

Bref, une seule solution, filer tant qu'il le pouvait encore !

C'est dans un tel contexte que se présenta la proposition d'une Princesse-Marchande de Thaar, plus raisonnable que l'autre folle qui avait cru posséder suffisamment pour acheter son temps par grappe de siècles, que sa réputation précédait. Celle-ci semblait cerner – ce qui n'est pas une moindre affaire – ou tout au moins comprendre dans une certaine mesure le degré de liberté qu'exigeait le Maître Façonneur pour se laisser amadouer dans ce moment où il y était le plus enclin.
Je vous passerais les détails de l'accord sur lequel ils finirent par s'entendre, mais pour faire simple, la Dame Blanche devint sa mécène et protectrice, lui offrirait un atelier pour ses travaux, en échange de quoi il mettait à disposition dans une certaine mesure ses talents, tout particulièrement son savoir et ses compétences en magie défensive. Bien sûr, cela signifiait déroger à sa règle de neutralité... Mais il en avait aperçu les limites du confort et de deux maux préféra le moindre en la personne de cette Milynéa dont les ambitions singulières la tenait à l'écart des véritables luttes de pouvoirs, y préférant l'influence et la prospérité.

C'est ainsi que Ranaghar en vint à s'installer à Thaar...

Bon... Et le rapport avec toute cette histoire, vous me direz ? On y vient, un peu de patience.



Il dut exister, chez les nisétiens, un adage qui disait qu'il fallait se méfier des vents d'est, messagers malveillants, apportant sécheresse et tempêtes de sable ou accompagnant le pas cadencé des osts eldéens. Et cette croyance marqua à ce point cette partie du monde qu'elle en devint une réalité...

Une réalité pour Ranaghar... Autant que pour Agryr, Maître Joaillier de Thaar.

Ce dernier était issue d'une lignée d'artisan-joaillier dont le sang hybride s'était peu à peu altéré en même temps que s'accumulait le savoir-faire et le renom dans leur domaine, pour devenir l'une des enseignes les plus en vues en la matière, sous la protection et avec la bénédiction des Lythandas depuis plus d'un siècle maintenant.

Comprenez que dans ces conditions, et quand il n'y eut jamais de véritables sujets de querelles entre lui et la Dame Blanche, l'arrivée d'un Ranaghar, insupportable et critique, accompagné de son immonde gobelin travesti paru comme une punition injuste... Oh, elle tenta de lui passer la pommade, évidemment, lui disant que c'était simplement pour un temps, jusqu'à ce que son atelier soit prêt, que c'était un service qui ne serait pas oublié à l'avenir, il n'empêche !
Son image allait inévitablement souffrir de la présence et du passage de ce phénomène de foire, car on verrait le gobelin, on verrait cet individu difforme, son sale caractère, on se moquerait de ces talents qu'il possédait et que nul autre que la Princesse pouvait saisir... Façonneur, qu'est-ce que ça pouvait bien signifier pour le tout venant, hein ! Surtout qu'il ne vendait même pas ses services, le bougre, que nenni, il s'était accaparé une pièce, la privatisant en la rendant même imperméable aux clés traditionnelles, des gemmes, insultait ses apprentis qu'il considérait de moindre valeur que son misérablement gobelin... Alors oui, il avait un certain savoir-faire, mais il fallait passer outre ses grands airs et la folie qu'il dégageait pour tenter de tirer quoique ce soit d'intéressant, ce qui n'était pas évident, et pour lequel il n'avait clairement pas le temps...

Bref, les emmerdes viennent bien souvent de l'Est...

Voila pour les présentations... Revenons au présent, désormais.


Lorsque se présenta la doeben, le Façonneur était malheureusement sorti depuis un moment déjà... Pourquoi malheureusement ? Parce qu'il pouvait donc revenir à tout moment, pardi ! Et si il semblait se moquer totalement des origines raciales en général, ce fichu parasite avait une hostilité latente envers ses propres congénères... C'est donc avec la crainte de le voir débarquer avec son « assistant » et provoquer les foudres de cette nouvelle cliente qu'il accueillit avec professionnalisme, sans réagir à la présence de la jeune fille tatouée – tous ne pratiquaient plus cette tradition, mais la Dame Blanche en était une fervente, aussi était-il plus qu'habitué à voir ce genre de marquage sur des individus – qu'il choisit donc d'ignorer, comme n'importe quel esclave.

« Bienvenue, ma dame, que puis-je pour v... » commença-t-il, en langue commune, mais sa phrase mourue en même temps que la porte s'ouvrit une seconde fois... Il y a des moments comme ça, où le pire arrive sans mettre de gants. En l'occurrence... Le pire invita le Ranaghar sans attendre, et c'est donc précédé par son gobelin qu'il pénétra dans la boutique, à son tour, faisant comme chez lui.

« Vas déposer tout ça dans l'atelier, Klez. » Klez, « Chose », le nom drow universel qu'il donnait à ses assistants à la peau verte, portait en l'occurrence quelques babioles soigneusement emballé avec un équilibre particulièrement précaire qui ne semblait pas outre mesure inquiéter son maître... Confiance aveugle ou indifférence et promesse de coup de pieds au cul en cas de casse ? Faites votre choix.

Mais le drow loufoque, dont le corps légèrement difforme, des oreilles longues et basses et la maigreur de ses mains dont les doigts osseux semblaient de fait plus long que la normale – et de l'intégralité de son corps, mais camouflé sous ses amples vêtements colorés, conséquence de son Addiction – quant à lui ne l'accompagna pas, observant quelques instants les clients, à son tour, mais au contraire du propriétaire de la boutique, c'est sur la gamine qu'il arrêta son regard, y percevant les résidus d'un sort...

« Qu'est-ce qu'elle a cette gamine... ? » Agryr aurait voulu le gifler, sans comprendre ce dont il s'agit, la légèreté du ton – autant que le fait de se mêler des affaires qui n'était pas les siennes – l'agaçait... Il ne faisait que le strict nécessaire, sans considérer le mal qu'il pouvait provoquer. « Oh, ne fais pas cette tête, je ne fais que passer ! Mais c'est pas commun de par chez vous d'ensorceler vos esclaves, alors... »
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MessageSujet: Re: Un collier pour Misère | Milynéa   Un collier pour Misère | Milynéa I_icon_minitimeMer 31 Oct 2018 - 20:41

La renommée Nilah ne portait pas Azza dans son cœur, loin s’en fallait. Pour autant, à choisir entre la prêtresse et le maître mage et son étrange créature, l’ancienne gamine des rues n’avait pas véritablement matière à hésiter. Aussi, quand elle devint le centre de l’attention des adultes présents dans la pièce, elle se glissa sans un mot dans le dos de sa « protectrice », agrippant au passage le tissu léger de sa robe.

Sans qu’elle ne sut véritablement pourquoi, ce simple geste gonfla le cœur d’Azza d’une affection inattendue et elle glissa ses doigts fins dans la chevelure encore par trop hirsute de sa protégée.

« Je ne vois pas de quoi vous parlez, » répondit-elle en toute bonne foi au drôle. Ce n’était pas tant qu’elle avait oublié l’épisode malheureux qui l’avait vu assomer magiquement sa créature d’adoption, mais il ne lui venait pas même à l’idée que cela ait pu laisser des traces dans la psychée de sa victime. Reportant son attention sur Agryr, qui était après tout la personne qu’elle était venue rencontrer, elle enchaîna tout naturellement : « Je suis venue pour la petite, commença-t-elle à expliquer en continuant de lui caresser le sommet de la tête. Je voudrai lui offrir un collier — quelque chose de joli — pour fêter son anniversaire. »

Dans son dos, Nilah jetait des coups d’œil en direction de Klez. Le gobelin la fascinait autant qu’il la terrorisait. C’était qu’elle n’en avait jamais vu, avant.

Ranaghar, quant à lui, n’avait finalement pas retenu l’attention des visiteurs d’Agryr. Ce n’était sans doute que parti remise, mais Azza était tout entière tournée vers l’apprivoisement de Nilah pour se laisser distraire aussi facilement. Ce qu’elle ne savait pas, c’était toute la virtuosité du maître mage quand il s’agissait de se faire remarquer. À n’en pas douter, il trouverait bien un moyen de devenir le centre de l’attention pour de bon…

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