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 Ombre de la nuit [Terminé]

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Ellana
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MessageSujet: Ombre de la nuit [Terminé]   Ombre de la nuit [Terminé] I_icon_minitimeDim 18 Mai 2008 - 19:25

Une ombre souple se faufilait entre les arbres. La voir, comme cela, de loin, n'était rien comparé à la vraie approche. L'obscurité, bien présente en cette fraîche nuit, cachait la vérité et ne montrait que le mensonge. Ce que l'on apercevait ne révélait rien de vrai...ou presque. Car le corps qui se mouvait avec la souplesse et l'agilité d'un félin semblait en bonne santé, bien qu'extrêmement fin. Les cheveux de cette créature, nocturne pour cette fois, volaient au vent de manière très élégante. Ils restaient aussi noirs que le décor qui surplombait la forêt ... le sentier de la forêt d'Aduram. L'être féminin ralentissait de plus en plus, plus méfiant que jamais. La jeune femme effectuait une course effrénée, comme si elle fuyait quelque chose ... ou quelqu'un. Personne n'aurait pu le dire. Mais le sang frais qui coulait d'une coupure à son bras et d'une autre à sa jambe témoignait d'une récente bataille qui ne lui avait guère laissé le temps de s'occuper d'elle-même. Le bruit de son souffle irrégulier se répercutait contre les arbres de la forêt, elle paraissait avoir bien de la peine à se maîtriser. Le souffle semblait lui manquer, elle avait peur. Elle paraissait en danger de mort.

Et pourtant ... elle finit par s'arrêter, s'appuyant contre un arbre pour se reposer et reprendre sa respiration. Elle sentait son coeur battre à vive allure, aller jusqu'à lui donner des crampes. La femme craignait même qu'il ne s'échappe tant il cognait fort. Car, oui, la créature n'était autre qu'une jeune femme. Son visage creux faisait peine à voir, des cernes soulignaient ses yeux bleu terne. Plus aucune lueur de vie n'y brillait. L'aventurière était comme morte, accroupie sur le sol. Ses cheveux de jais cachaient une bonne partie de son visage amaigri par le manque de nourriture et la fatigue. L'on pouvait quand même discerner des lèvres séchées par le manque d'eau. La clavicule extrêmement marquée, la femme posait désormais ses deux fines mains délicates sur le sol boueux, ces dernières reliées elles-mêmes par de longs bras squelettiques.

Le reste du corps, quelque peu dénudé pour cause des habits qui commençaient à tomber en miette tant ils avaient dû subir d'actes tous plus violents que les autres, affichait une maigreur incroyable. Son possesseur n'avait pas dû manger depuis quelques jours pour finir dans un tel état. La déshydratation faisait désormais partie de ce corps féminin qui avait autrefois été si beau. Car beauté ne pouvait plus faire partie d'un être aussi maigre, assoiffé et sans vie. Elle ressemblait plus à un cadavre qu'à l'être humain qu'elle avait toujours été. Une voleuse née ...! La force devait immanquablement lui manquer. Ses jambes longilignes se recourbaient pour qu'elle puisse se tenir dans une position de laquelle on peut facilement sortir. En deux mouvements, elle se sentait capable de se lever et de partir comme une fusée. Si la force ne l'abandonnait pas entre temps ... Mais elle tremblait. De froid? Peut-être. Mais aussi de la carence qui l'habitait désormais. Cette fois, elle fronçait les sourcils, plissait le front ; comme si cela pouvait l'aider à lutter contre la fatigue qui commençait à s'emparer d'elle.

Cette femme n'était autre qu'Ellana M'angil, l'amant de Balthier qu'elle n'avait plus revu depuis tant de temps. Cela la faisait tant souffrir, elle ne supportait plus d'être ainsi séparée de lui. Tant de temps sans sa présence révélait de la folie. Elle n'en pouvait plus. Vivait-il encore? Que faisait-il à l'instant? Elle lui était restée fidèle. A lui, son premier vrai amour, celui qui avait su dompter son coeur de pierre ... elle se sentait privée de son oxygène, de sa source de vie. Pourquoi tant d'attachement pour un simple être humain? Elle s'en voulait atrocement, mais elle ne pouvait se détacher de cet amour qui l'étreignait, de ce sentiment si fort qui s'était installé en elle, qui lui avait procuré tant de bien. Et lui? Se souvenait-il seulement d'elle? Des tendres moments, quoi que périlleux, qu'ils avaient passé ensemble? De ce qu'ils avaient partagé?


Quiconque l'ayant connu auparavant aurait bien à s'imaginer la charmante Ellana dans ce corps où la chaire ne faisait presque plus partie. Même Balthier ...

Ellana se laissait mourir ...! La jeune voleuse et aventurière, combattante et fière, périssait lentement. Pourquoi? Elle ne s'en souvenait plus très bien. Ses souvenirs restaient flous, elle avait juste conscience qu'elle se laissait complètement aller, qu'elle ressortait d'une bataille légèrement plus difficile que la normale. Et maintenant, elle laissait le temps faire son travail. Et peut-être que, enfin, elle rejoindrait ses parents dans le ciel. Elle lutta pour user de ces dernières forces pour lever les yeux vers le magnifique océan bleu foncé qui enfermait les étoiles et s'excuser auprès des êtres qui veillaient sur elle depuis toujours ...

-Excuse-moi, papa... excuse-moi, maman. J'ai failli à ma tâche.

Désormais, ses joues ruisselaient. Des larmes torrentielles se déversaient sur ses joues salies par la terre qui s'étalait sur le sol. Elle n'en pouvait plus. Lentement, elle se laissa tomber sur le sol pour sombrer dans l'inconscience. Les bêtes pourraient dévorer son coeur, s'emparer de sa chaire et lui arracher les entrailles ... Ils l'enverraient ainsi dans le repos éternel, celui qui lui ôterait toute souffrance. Ce monde lui privait de la paix éternel donc elle avait tant besoin. Ce repos qui la guérirait de toute blessure. Ellana se sentait tout simplement abandonnée à son triste sort, sa solitude l'ayant rattrapée à grande vitesse.


Dernière édition par Ellana le Jeu 12 Juin 2008 - 10:52, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Ombre de la nuit [Terminé]   Ombre de la nuit [Terminé] I_icon_minitimeLun 19 Mai 2008 - 12:07

[PV Moi, personne ne touche à cette jeune personne >< Je répond dans les 24h Razz Enfin, j'essaye...]
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MessageSujet: Re: Ombre de la nuit [Terminé]   Ombre de la nuit [Terminé] I_icon_minitimeMer 21 Mai 2008 - 19:41

La procession avançait à bonne allure le long du large chemin. Ils étaient nombreux… A pied ou à cheval, ces gens semblaient tous aux aguets et accompagnaient une demi douzaine de chariots lourdement chargés tirés par d’énormes chevaux. Malgré leur nombre, ils étaient aussi silencieux que des souffles de vent… Seule la lueur de leur torches et leurs discrets chuchotements troublaient la nuit de l’orée de la forêt tandis qu’ils se dirigeaient au sud, vers la côte. Silhouette parmi les silhouettes, Daneva marchait du même pas qu’eux et se fondait dans la masse comme un brin d’herbe dans une prairie, pourtant elle se sentait à part. Elle avait l’impression de ne plus faire partie des vivants tant son âme et son corps avaient été ravagés par les drames durant ces derniers jours. Son visage en portait les stigmates, tâches rouges ou bleues sur sa peau d’ordinaire si douce. Et il n’y avait hélas pas que son visage… Ses bras, sa poitrine, ses hanches, ses jambes, son cœur… Physiquement et moralement, Daneva souffrait comme jamais elle n’avait souffert dans sa vie, et pourtant un inconnu qui la croiserait ce soir et l’observerait longuement ne devinerait rien de tout cela. Son visage était fermé, glacial, absent, et ses yeux fixaient sans le voir le sol qui s’offrait aux souliers de ses bottes. Elle cachait ses traits et ses formes sous l’habituel manteau du Silencieux, un long habit sombre et large pourvu d’une lourde capuche, bien pratique en vérité.

Les siens, cependant, étaient inquiets. Ils avaient à peu près tous plus ou moins appris ce qui s’était passé la nuit précédent leur départ de Diantra, mais aucun n’avait osé aborder le sujet en la présence de Dane. Et c’était tant mieux. De toute façon, elle n’aurait pas supporté de prononcer un seul mot… Damps avait insisté pour qu’elle monte sur un chariot, mais elle avait décliné la proposition d’un mouvement de tête définitif. Marcher lui occupait relativement l’esprit, et tout ce qu’elle voulait c’était penser le moins possible. Oublier la mort de Calis, oublier les outrages de l’assassin, oublier la honte cuisante de son impuissance, oublier la douleur… Chose difficile, qui la rendait aussi réactive qu’un zombi et aussi bavarde qu’une religieuse ayant fait vœu de silence. La lumière des torches enflammées dansait devant ses yeux, produisant une ronde de petits points lumineux qui l’entraînaient malgré elle dans une valse endiablée entre un mélange de souvenirs et de vide, la plongeant dans une torpeur proche de l’inconscience. Aligner un pied après l’autre, c’était déjà bien assez.

Le vide que provoquait la disparition de Calis en son âme était ce qui lui faisait le plus de mal, ce qui était le plus dur à supporter. Elle avait prévu toute une vie à ses cotés, et voilà qu’elle se retrouvait seule du jour au lendemain, une guilde à gérer et des tas de préoccupations qui la rattrapaient au fur et à mesure que reprenaient les affaires. Quelle importance après tout ? L’homme qu’elle avait aimé d’une passion proche de la folie s’était éteint dans ses bras… Sans cesse l’image de ses traits torturés par la douleur et la proximité de la mort revenait dans l’esprit de Dane, comme si ils s’y étaient gravés à tout jamais. Repenser au ton de sa voix lorsqu’il lui avait dit qu’il l’aimait, une dernière fois, la rendait malade de tristesse et elle se dissimulait alors un peu plus derrière les pans de sa capuche au cas où sa volonté de parviendrait plus à retenir les larmes.

Il y avait ces murmures tout autour d’elle… Ces gens qui chuchotaient et échangeaient parfois des sourires ou des plaisanteries. Daneva détestait cette vision, elle subissait cela en serrant les dents. La vie continuait sans Calis, et il n’y avait au fond aucune raison pour qu’il en soit autrement, pourtant cela la perturbait. Tout avait basculé pour elle, elle qui pensait avoir du soutient de la part de son amant lorsqu’elle dévoilerai l’inexistence de Pahe, lorsqu’elle se sentirait seule ces nuits froides, lorsque la Compagnie aurait des problèmes. Il avait promis mais ne pourrait jamais tenir parole… Trouverait-elle un jour une présence aussi rassurante que la sienne ? Est-ce qu’il existait seulement un homme qui arrivait ne serait-ce qu’à la hanche de l’assassin ? Dane en doutait, et était sûre d’une chose : plus jamais son cœur ne battrait aussi fort pour quelqu’un, qui que ce soit. Par respect pour le défunt, premièrement, il était impossible d’imaginer le trahir… Et puis parce que de tels sentiments la rendaient particulièrement vulnérable, elle venait d’en avoir la preuve. Or Daneva était une jeune femme vivante et ambitieuse, elle ne pouvait se permettre de se laisser atteindre par les tourments qu’elle jugeait d’ordinaire si futiles. Pourtant, elle ne pouvait que subir cet état et en supporter les effets, incapable de se défaire de cette insupportable impression de mort qui planait autour d’elle. Si elle s’était écoutée, elle se serait jetée à genoux sur les graviers et aurait hurlé longuement comme un animal blessé, pour exprimer sa douleur et tenter de la faire sortir de son corps.

Rester digne et droite, empêcher les commissures de ses lèvres de trembler… Voilà la tâche à laquelle elle s’appliquait depuis le début du voyage. Elle avait sous les ongles le sang et la chair de Kurt, et cela était bien assez pour réprimer toute velléité de haine qui aurait pu la reprendre. Le chariot derrière lequel elle avançait s’arrêta soudain, sans doute à cause d’un trou sur la route à éviter. La Silencieuse vacilla. La quiétude des troncs sombre sur sa droite l’attirait… Elle voulait fuir cet environnement trop humain et respirer la nature, se retrouver seule face à sa défaite et décrisper quelque peu ses nerfs… Pleurer peut être, cela pourrait être agréable, même si Daneva n’était pas du genre à s’apitoyer sur son sort. Il fallait bien extérioriser la chose, sinon cela finirait par être pire. Elle ne supportait plus ces soupirs et bruits de pas… Et puis cet appel était trop fort, elle n’aspirait plus qu’à l’obscurité maternelle et aveugle. Sans prévenir personne, elle se tourna vers la forêt et s’enfonça dans les ténèbres. Dans son dos, une femme fit un geste pour la retenir, mais Damps posa une main sur son bras en lui lançant un regard entendu. Il comprenait Dane, ou du moins essayait… De toute façon, rien n’aurait pu l’empêcher d’agir comme bon lui semblait.

Cette paix agit sur ses sens comme une compresse glacée. Si le silence de la nuit pouvait être oppressant voir terrifiant pour certains, il apaisa quelque peu l’esprit de la jeune femme tandis qu’elle avançait à l’aveuglette entre les arbres. Elle avait l’impression de ne plus exister pour personne, de se retrouver comme aux premiers temps de ses errances, alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente. Puis ce fut Calis qu’elle revit. Un Calis bien vivant dont le visage occultait le soleil. Ils avaient fait l’amour à cet endroit, elle reconnaissait la petite clairière à la fable lueur de la lune. Sa gorge se serra compulsivement au souvenir de ces merveilleux instants passés en sa présence… Il avait accepté d’être son bras droit au sein de la Compagnie, elle se souvenait parfaitement de ses paroles, et chacune lui arrachait un frisson supplémentaire. « Je serai à tes cotés »… Il semblait si sincère lorsqu’il lui avait murmuré ces mots ! Et où était-il aujourd’hui ? Entre quatre planches, chargé sur l’un des chariots… A cette pensée, Daneva laissa échapper un gémissement plaintif et elle dû se retenir à un tronc pour ne pas s’effondrer au sol. Il fallait qu’elle s’en aille, vite… Ses jambes plus que son esprit décidèrent de vider les lieux, trop familiers, et elle se mit à courir dans le sens opposé, évitant avec peine les obstacles divers de la forêt.

Puis, elle s’arrêta brusquement. C’était idiot, elle allait se perdre… Il fallait retrouver les autres maintenant, la Compagnie, le pouvoir, la richesse et tout le reste. Tout ce qui semblait maintenant inutile et dénué d’intérêt. Un bruit éveilla les sens de la Silencieuse au moment où elle faisait demi-tour. Un glissement, imperceptible, mais un glissement. Et cela n’avait rien d’animal, puisqu’il avait été accompagné d’un gémissement féminin. Daneva n’avait jamais été quelqu’un d’insensible, mais elle hésita franchement à aller voir. Qu’est ce qu’elle en avait à faire après tout ? Qu’elle souffre, qu’elle crève cette inconnue ! Elle devait sans doute le mériter, ils le méritaient tous. Pourquoi alors la jeune femme changea une nouvelle fois de direction ? Sans doute l’instinct, un sentiment impératif qui dirigeait ses pas. L’ombre était étendue sur le sol et bougeait faiblement dans l’obscurité. La haute silhouette noire et méconnaissable qu’était Daneva s’accroupit à ses cotés et posa ses mains sur le corps froid de l’inconnue. Ses doigts tremblants effleurèrent le visage baigné de larmes, et s’arrêtèrent sur les bijoux qui ornaient les oreilles de la jeune femme. Elle connaissait ces choses là…


-Ellana… Est-ce que c’est toi ?

Les nuages découvrirent alors quelque peu l’astre nocturne, et la Silencieuse pu observer la femme allongée. Il s’agissait bien de son amie, la jeune voleuse qui avait fait le voyage à Kirgan avec elle. Durant ces quelques semaines d’aventures, elles avaient eu l’occasion de faire connaissance et s’étaient découvert pas mal d’intérêts communs… Cependant Daneva était obnubilée par Calis et avait bien plus passé le temps à profiter de lui qu’à discuter avec ses autres compagnons de voyage. Cette expédition était une partie de sa vie qu’elle voulait rayer de ses souvenirs, car elle correspondait au moment ou sa relation avec l’assassin avait été la plus passionnée. Pourquoi, donc, la situation de la voleuse la touchait autant ? Ellana semblait elle aussi avoir fait la guerre seule et à mains nues… Elle faisait peine à voir, bien que les détails soient invisibles dans la pénombre. Daneva tomba à genoux et tenta de réchauffer les mains de son amie entre les siennes.


-Par la sainte, mais qu’est ce qu’ils t’ont fait ?

Par « ils », elle entendait eux. Eux, le monde, les autres, la vie, le destin… La mort ? La fatalité, les déceptions, les salauds… Tout ce qui pouvait, d’une façon ou d’une autre, descendre une personne plus bas que terre et la faire agir comme un animal.

-Tu ne peux pas rester là.
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MessageSujet: Re: Ombre de la nuit [Terminé]   Ombre de la nuit [Terminé] I_icon_minitimeVen 23 Mai 2008 - 14:24

Etendue sur le sol, la jeune voleuse chevauchait l’inconscience. Elle se sentait étrangement légère, comme si son corps ne lui appartenait plus. Car elle ne se sentait plus capable de commander ses membres. Ni ses doigts, ni ses jambes, ni ses bras ne lui obéissaient. Ses yeux encore moins … ils restaient fermés, malgré ses nombreux efforts pour rien que les entrouvrir et y voir plus clair. Ses paupières empêchaient au monde extérieur d’admirer le bleu de ses iris, leur empêchant en même temps de constater l’étrange contraste entre eux et ses longs cheveux de jais. Les pensées d’Ellana, elles, se baladaient dans un brouillard on ne peut plus épais. Elle n’y voyait guère quelque chose, se demandant même si elle risquait de se perdre. Etrangement, aucune douleur ne faisait rage. Elle ne se souvenait de rien, les idées noires qu’elle ruminait juste avant de sombrer dans l’inconscience s’étaient volatilisées. Bien qu’elle ne pouvait guère bouger, elle ne ressentait de l’emprisonnement. Car d’esprit, elle restait libre. Elle qui, d’habitude, ne supportait pas de ne plus pouvoir être libre de ses mouvements, acceptait tout à fait naturellement de s’enfoncer dans ce profond coma. D’ailleurs, plus elle y sombrait, plus la souffrance s’éloignait d’elle. Elle se sentait de mieux en mieux. Un faible sourire s’étira lentement sur ses lèvres. Il était tellement plus facile de tout laisser tomber, de se laisser aller et de s’abandonner … à quoi exactement ? A la mort, peut-être ?

Apaisée, elle lâcha un soupire d’aise dans son inconscient. Elle ne voyait rien, au plus profond d’elle. Ne ressentait plus rien … Seul le noir, la couleur avec laquelle elle s’habillait en temps normal, faisait rage. Que pouvait-on espérer de pire que de voir que du noir, sans savoir ce que l’on faisait ou, plus exactement, où l’on se trouvait ? Autour de son corps que l’on pourrait croire sans vie, la nuit continuait sa route, tranquille et innocente. L’air se faisait frisquet, mais Ellana ne ressentait point cela. Le mal qui étreignait ses articulations ne se faisait plus sentir… ! Les arbres majestueux l’entouraient de toute leur grandeur, la protégeant des fines gouttelettes de pluie qui débutaient leur ascension. Peut-être s’arrêterait-elle bien vite, cette pluie naissante. Or si, au contraire, elle s’amplifiait, les arbres ne lui seraient de plus aucun secours. La lune prenait désormais la place du soleil depuis quelques heures bien entamées, déjà, éclairant la forêt de sa lumière d’une blanche impeccable.

Soudain, comme si elle s’éveillait d’un long cauchemar, Ellana reprit conscience. Non pas réellement, mais elle put à nouveau maîtriser ses pensées, se rappeler et réfléchir. Ce fut alors le début d’une longue route pour son esprit. Ce chemin ne laissait aucune échappatoire pour qui s’y engageait. Et l’aventurière y était entrée avec rapidité et conviction … En premier lieu, elle se vit, elle, jeune voleuse se battant avec courage contre une bande de voyous perfectionnistes et malhonnêtes. Ils riaient de bon cœur, sûrs de leur victoire. Mal rasés, ils ne s’étaient sûrement pas lavés depuis plusieurs jours et leur physique laissait franchement à désirer. Quant au visage de l’aventurière, il affichait une expression impassible. Aucun sentiment, aucune émotion ne traversait la barrière qu’elle s’était construite. L’habitude la fit solide et infranchissable. Ses ennemis se trouvaient dans l’incapacité de deviner ce qu’elle ressentait, ou encore ses intentions. Elle restait aussi imprévisible que le temps lui-même. Une main posée sur sa dague, elle observait les hommes d’un œil moqueur. Sans les sous-estimer, elle aimait se moquer de leur assurance, pour but de les déstabiliser ne serait-ce qu’un peu. Mais ils ne réagirent guère à sa provocation, se contentant d’attendre quelque chose qui ne tarderait plus à pointer. Quoi exactement ? La bataille, bien sûr. La voleuse se prépara à l’attaque, confiante. Un homme début le combat par une droite qui n’atteignit jamais sa cible …

Tout allait pour le mieux, Ellana gardait la tête des hommes, se battant avec sa souplesse et son tact naturel. Sereine et toujours aussi impavide, elle prenait à un malin plaisir à s’amuser avec eux. Ils voulaient se battre ? Qu’ils soient donc servis. Le premier homme ne tarda pas à tomber, sous un craquement d’os. Il perdit la vie avant même de s’étaler sur le sol. Ses compères, furieux, se démenèrent avec un peu plus de professionnalisme et de sérieux. Mais la plupart de leurs nombreux coups s’enfonçaient dans le vide, leur proie ayant subitement disparue. Mais le cours tranquille des événements se devait bien de changer à un moment donné. Et cela tourna irrémédiablement en la défaveur de la combattante. Brutalement, l’humaine aux yeux bleus si expressifs tomba à genoux, se prenant la tête dans ses mains. Trop surpris pour lui porter le coup d’honneur, les hommes encore en vie restèrent pétrifiés devant elle, se demandant ce qu’il pouvait bien se passer. Lorsqu’ils se ressaisirent, il était trop tard : Elle s’était déjà relevée. Pestant contre leur manque de tact, ils reprirent les armes, décidés à la neutraliser sans pitié. Une deuxième surprise leur fut alors offerte : l’aventurière se combattait, bien sûr, avec toujours beaucoup d’énergie et de talent. Mais la qualité de ses gestes diminuait à vue d’œil. Elle paraissait souffrir alors qu’ils ne la touchaient même pas. Les voyous auraient juré qu’elle était rongée de l’intérieur. Mais par quoi ? Des souvenirs, peut-être ? Ses gestes de plus en plus lourds et gauches procuraient le doute qu’en à la véracité des événements.

Sa vision coupa net à cet instant-là, la jeune aventurière transpirait à grosses gouttes. Toujours plongée dans son léger coma, elle se sentait prise dans une situation inconfortable, sans pouvoir s’en échapper. Elle qui voulait oublier cet horrible moment qu’elle avait passé en compagnie de ses attaquants, ne se sentant que trop faible pour pouvoir supporter cela une nouvelle fois… ! Affaiblie, elle se sentit, tout d’un coup, plus légère, comme si son corps quittait lentement le sol, lévitant à une hauteur de plus en plus éloignée de la terre. Etrangement, elle se vit obligée de fermer les yeux, éblouie par une lumière aveuglante. Et lorsqu’elle les ouvrit à nouveau, elle se tenait au-dessus de son corps humidifié par la fine pluie qui s’écoulait de ce ciel si purement bleu foncé. Ce bleu foncé seulement troublé par la présence imposante de la lune elle-même. Elle ne put que restée estomaquée devant ce corps qui, apparemment, était le sien. Entièrement abîmé, il ne ressemblait plus vraiment à ce qu’il avait été, autrefois. Un beau corps fin qui avait charmé Balthier, l’homme qui prenait une place énorme dans son cœur. Elle s’en voulait, de s’être ainsi laissée aller. Mais elle ne voulait vivre encore quelques secondes de plus dans ce monde cruel qui, vu les circonstances, ne voulait plus d’elle.

Sur ces idées obscures, elle se mit à s’élever dans l’air, effectuant de petits loopings dans les airs. Son corps transparent, semblables aux âmes errantes ou encore aux fantômes, virevoltait dans les airs. Elle observa alors ses jambes qui, normalement, se devaient d’être en mauvais état. Miraculeusement, aucune trace d’une quelconque blessure n’y figurait. Elle prenait conscience de la pureté des âmes humaines. Bien que, parfois souillées par le mal, elles restaient belles, charmantes et envoûtantes. Sûrement invisible pour tout être vivant, elle atteignit un lieu qu’elle ne connaissait guère. L’au-delà, peut-être ? Dans tous les cas, elle se sentait prise d’une euphorie séduisante, enveloppée par le bien. Ce qu’elle vit brisa entièrement son attitude rêveuse … Ses parents, se tenant main dans la main, l’observaient une expression sérieuse peinte sur leur visage. Ellana se tint un instant devant eux, pétrifiée. Puis, dans un élan d’amour, courut vers eux pour les prendre dans ses bras. Mais ils effectuèrent un trou qui l’empêcha de les atteindre. Surprise et blessée, la voleuse demanda :

-Pourquoi ?

Son père, une expression sévère peinte sur son visage, déclara d’un ton dur :



-Tu le sais très bien, Ellana.

Le simple fait qu’il prononçât son nom lui procura un frisson de plaisir. Ses parents, qu’elle aimait plus que tout et qui lui avait été arraché il y de cela quelques années, se tenaient devant eux. Mais une ombre persistait au tableau : il paraissait franchement mécontent de leur fille. Ellana sentit alors un goût salé s’infiltrer dans sa bouche entrouverte. Elle sécha rageusement ses larmes, honteuse de se comporter ainsi devant ses géniteurs qui lui avaient tant appris. Sa mère prit alors la parole, usant cette fois étrangement d’un ton doux :

-Tu es une humaine, Ellana. Tu as le droit de posséder des émotions.

Touchée au plus profond de son âme, l’aventurière se laissa choir sur les genoux, complètement abattue. Elle implora le pardon de ses parents, ne pouvant supporter la vue de leurs visages déçus.

-Je vous en prie, excusez mes erreurs. Je ne parvenais plus à suivre le cours de ma vie qui n’avait plus aucun sens à mes yeux. Vous retrouver me ravissait, me rendait heureuse. Je ne supportais plus de vivre sans vous…

Cette fois, ses parents apparurent magiquement à ses côtés et la soutinrent avec amour et chaleur.

-Ton instant de mort n’est pas encore arrivé, Ellana. Tu dois encore vivre. Et n’oublie pas que nous t’aimons et t’aimerons toujours. Où que tu sois, nous sommes là. Nous te suivons et te soutiendrons dans tous tes actes, jusqu’à ce que tu surviennes ton dernier souffle. Là, tu nous retrouveras dans l’au-delà. Mais aujourd’hui n’a pas sonné ton heure, ton destin te quémande encore de vivre.

Ce fut son père qui lui procura ces douces paroles apaisantes. Calmée, Ellana essuya ses nombreuses larmes et esquissa un faible sourire empli d’amour.

-A bientôt, murmura alors sa mère avant qu’elle ne disparaisse avec son mari tout aussi subitement qu’elle était apparue.

-A bientôt, conclua alors Ellana. Elle se sentit redescendre vers la terre, n’effectuant aucun geste de résistance. Les paroles de ses parents l’avaient reconstruites, elle se sentait prête à affronter à nouveau son destin. Aussi courageusement qu’elle l’avait fait toutes ces années de vie. Ces vingt et une années dans ce monde cruel peuplé d’hommes ne sachant que faire la guerre. En demeurant à nouveau dans son corps, elle sentit la douleur s’emparer d’elle avec force. Mais elle ne montra aucune faiblesse, luttant contre cette souffrance qu’elle s’était infligée par son manque de volonté. Elle se sentait prête à vaincre le monde, bien qu’elle restait consciente que son statut d’humaine l’en empêchait. Elle se promit alors de ne jamais plus baisser les bras, de ne plus briser la fierté de ses parents avec autant de lâcheté. Cette expérience l’avait transformée…

Lorsqu’elle ouvrit les yeux, elle se tenait dans les bras de Daneva, une jeune femme qu’elle avait rencontrée dans une quête lointaine. Cette dernière, trop occupée à dévorer des yeux son amant, Calis, n’avait pas vraiment trouvé le temps de lui parler. Mais les rares dialogues qu’elles avaient sagement échangés révélaient beaucoup de complicité entre ces deux femmes qui, bien que se connaissant à peine, vivait du même « métier », si l’on pouvait classer les mots voleur et aventurier dans la grande catégorie des métiers. Un sourire, certes empli souffrance mais franc, s’étira sur les lèvres de la voleuse. Sa tête lui procurait un sentiment de lourdeur effroyable. Elle devait se battre pour garder les yeux ainsi ouverts et ne pas démontrer sa souffrance par de simples mimiques humaines du visage. Elle se permit de prendre la main de la jeune femme qui venait à son aide pour se soutenir et, après avoir pris un grand souffle destiné à lui donner du courage et de la force, elle se mit assise. Elle vacilla un instant, son esprit encore embrouillé. Elle ressentait, au plus profond d’elle, la présence de ses parents. Et cela suffisait à lui donner un air serein. Malgré tout, le mal restait là, bien présent. Et elle ne pouvait rien contre cela, à part le repos. Il lui faudrait du temps pour grimper à nouveau la pente de laquelle elle avait chuté. Mais elle sentait prête à cela. Son front se plissait, démontrant ses efforts pour rester assise, et de la sueur s’écoulait sur son front. Elle déclara tout de même sur un ton calme et motivé :

-Merci, Daneva …
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