Une course désespérée (Libre)

HJ: je m'adapte à n'importe quel RP, du moment que ce n'est pas hyyyyper long ^^

Quelle heure pouvait-il bien être ? Comment diable pouvait-elle le savoir, de toute façon ? Le soleil ne tarderait pas à se coucher, voilà tout. Il faisait froid, malgré ce ciel dégagé. Les genoux entourés par ses bras couverts uniquement d’une tunique légère, Lysia s’efforçait de ne pas trembler. De temps en temps elle se pinçait avec vivacité, s’obligeant ainsi à ne pas sombrer dans un sommeil dont elle ne se réveillerait pas. L’hiver. Si elle bougeait, où irait-elle ? Dans une auberge, se réchauffer ? Mais avec quel argent ? Elle se décida finalement à se lever. Après tout, mieux valait marcher que rester immobile lorsqu’il faisait aussi froid. Elle épousseta négligemment sa tunique, et, les bras croisés contre son corps pour se réchauffer, avança d’un pas hésitant. Il y avait très peu de monde dans les rues, et ceux qui s’y trouvaient encore étaient enveloppés d’un manteau de fourrure, étaient à cheval ou marchaient d’un pas vif. Sans doute avaient-ils une chambre qui les attendait dans telle ou telle auberge de la cité. Une porte s’ouvrit dans un fracas alarmant du côté gauche de la jeune fille. Elle sursauta et fronça les sourcils, posant un regard méfiant sur une femme âgée qui leva les yeux sur elle. Lysia baissa immédiatement le regard, comme elle en avait l’habitude.
- Ma pauvre fille, que fais-tu dans les rues en un temps pareil ? s’exclama-t-elle d’un air teinté de pitié.
- Je… me rend dans une auberge, ne vous inquiétez pas madame, balbutia la jeune fille d’une voix qui se voulait assurée.
- Ne voulez-vous point rentrer ? Je vous assure, ma petite, que je ne vous veux pas de mal, répondit-elle avec un sourire confiant.
Lysia hésita une seconde, puis finit par acquiescer d’un signe de tête. Elle entra dans la petite maisonnette positionnée au coin d’une ruelle, et sentit avec plaisir une bouffée de chaleur envahir son corps frêle.
- Voilà… c’est mieux, n’est-ce pas ? demanda la femme en indiquant à Lysia le petit salon illuminé par un bon feu de cheminée.
- Oui… merci.
La jeune fille balada son regard dans la petite pièce, et s’assit sur un petit fauteuil. La femme disparut dans une pièce voisine, et immédiatement des bruits de tasses animère la petite maison. Elle revint quelques minutes plus tard, apportant sur un plateau deux tasses de thé ainsi qu'une petite théière. Lysia accepta en souriant une des tasses que lui tendait la femme. Elle but de longues gorgées, se sentant immédiatement beaucoup mieux. Alors qu'elle allait demander une seconde tasse, son regard se posa sur un bouclier en argent dissimulé dans l’ombre. Celui-ci portait de fines gravures harmonieuses, témoignant de son appartenance à un soldat du seigneur voisin. Ces soldats qu'elle conaissait si bien pour vendre des mendiants à des marchands d'esclaves.
Lysia se leva d’un bond, et posa son regard sur la vieille femme qui souriait étrangement.
- Que vous arrive-t-il ma petite ? demanda-t-elle d’une voix calme et paisible.
- Je dois m’en aller, encore merci pour ce petit instant de chaleur, lança Lysia d’une voix ferme.
Immédiatement la jeune fille se dirigea vers la porte, priant pour que cette vieille femme la laisse sortir. Alors qu’elle s’apprêtait à franchir la porte, deux soldats se mirent en travers de son chemin. Elle poussa un cri de surprise et réfléchit à toute vitesse. Elle n'avait aucune chance contre eux, médiocre comme elle était à l'épée. Mais elle devait jouer la carte de la puissance si elle comptait récupérer quelques secondes d'hésitation dans l'esprit des deux soldats. Elle brandit sa dague d’un air menaçant, et fit mine de parfaitement savoir s'en servir en la faisant siffler autour d'elle de quelques mouvements vif du bras. Elle prit la parole d'une voix calme :
- Laissez-moi passer je vous prie.
- Regardez-moi ça, s’exclaffa l’un des deux soldats, une sale mendiante qui compte s’en tirer ainsi ?
Lysia ne perdit point de temps en bavardages. Elle jeta un coup d’œil furtif à sa droite, et se rua sur la fenêtre. Dans un éclat de verre, la jeune fille traversa la vitre en bondissant, les deux bras en avant, protégeant son visage. Elle se trouva à nouveau dehors, allongée à terre. Les bras lacérés par du verre, elle se leva rapidement, et prit la fuite. Comment avait-elle pu se faire avoir aussi facilement? Elle le savait pourtant, de nombreuses familles pauvres qui avaient la chance de posséder des petites maisons dans la cité étaient payés par les gardes pour faire entrer les mendiants, les pauvres enfants seuls, et d'ensuite envoyer un signal pour inviter les soldats à venir les chercher. Quelle idiote! Elle courut ainsi uniquement quelques minutes qui lui paraissaient être une éternité, et s’apprêtait à ralentir le pas lorsqu’elle se heurta avec violence à une personne qui se trouvait sur son chemin.

[hrp : paroles de calym en blanc, aelene en violet et arcam en bleu]


Arcam sortit de l'auberge pour prendre l'air. Sa fratrie était restée à l'intérieur : Aelene somnolait à une table, Calym était occupé à jouer aux dés, à tricher, plutôt, et il aurait déclenché une bagarre sous peu.

Le jeune homme respira un grand coup l'air frais du bord de mer. Il aimait bien la cité portuaire, elle avait le mérite d'être beaucoup moins dense que Diantra. On y regardait les demi moins hostilement aussi. Peut-être parce que le port amenait beaucoup d'étrangers. Il fit quelques pas sans vraiment s'éloigner. Les triplés ne se séparaient jamais tout à fait. De l'autre côté du mur il savait qu'il y avait sa sœur et surtout, il entendait les éclats de voix de son frère. Encore quelques pas pour avoir un peu plus de tranquillité.

Il ne comptait pas pour autant emprunter une de ces innombrables ruelles sombres qui sillonnaient Ydril. Le meilleur moyen de se faire détrousser, voir tuer. Cela dit, Arcam n'était pas sans défense : assez costaud, avec son épée bâtarde au côté, il ne s'inquiétait pas outre mesure. C'est juste que le caractère amical du jeune homme s'accordait mal avec une quelconque rixe. Pour lui, autant éviter les ennuis.

Il n'était qu'à quelques mètres à peine de l'auberge lorsque quelqu'un déboula dans la rue, le percutant violemment. La première idée qui lui vint était qu'il s'agissait d'un voleur un peu maladroit et pas très discret. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, il eut fermement attrapé l'inconnu par un poignet et sortit sa dague, à défaut de son épée.

Puis il se rendit compte qu'il y avait méprise, il lâcha aussitôt la jeune fille qui l'avait percuté.

" Oh, veuillez m'excuser. J'ai cru... "

Ce n'était pas dans ses habitudes de brutaliser qui que ce soit, il se sentait d'autant plus gêné qu'il s'agissait d'une jolie demoiselle qui avait l'air sans défense. Quoique... Il remarqua la dague qu'elle tenait encore, mais ne s'inquiéta pas plus que ça. D'ailleurs, elle avait surtout l'air inquiet. Il lui fit un sourire navré, rengainant son arme sans tarder :

" J'espère que je ne vous ai pas fait mal. "

Il espérait surtout qu'elle n'allait pas s'enfuir en hurlant au monstre. Car s'il avait une apparence parfaitement humaine, ses yeux couleur de sang dénotaient son sang drow. Ce ne serait pas la première fois qu'il serait fuit comme un pestiféré.


[hrp : je me suis permis de laisser Arcam t'attraper le poignet, j'espère que ça ne te pose pas problème.
Et puis c'est un peu court, mais comme je sais pas trop ta réaction...]

Immédiatement après avoir percuté l’homme, elle se sentit attrapée avec violence au poignet. Un soldat ? Encore ? Elle s’apprêtait à reprendre la fuite lorsqu’on la lâcha vivement, lui donnant une liberté de mouvement qui la prit au dépourvu. Elle qui avait déjà en tête de se débattre comme une forcenée ! Elle se redressa non sans difficulté et posa son regard dans celui de son interlocuteur. Les yeux rouges qu’elle vit la firent reculer d’un pas, et elle du se retenir de lancer un cri de surprise. Suivant le regard de l’homme, la jeune femme tomba sur sa dague qu’elle tenait toujours en main. Elle la rangea rapidement, et se retourna, balayant la petite ruelle du regard. Aucun soldat en vue… pour l’instant. Elle reporta son attention sur l’homme aux yeux rouges, et lui adressa un maigre sourire.
« Oh, veuillez m’excuser. J’ai cru… »
- Ne vous excusez pas messire, je vous ai bousculé, c’est donc à moi de le faire, répondit Lysia d’une voix haletante.
Elle se sentait honteuse d’avoir ainsi réagit à la vue de ces yeux rouges. Il avait l’air tout à fait charmant –ce qui était rare ici- et point menaçant.
« J’espère que je ne vous ai pas fait mal. »
Lysia fit un signe négatif de la tête, lui assurant qu’il ne lui avait pas fait de mal. Elle leva le bras et examina ses nombreuses blessures causées par la vitre qu’elle avait traversé. Elle arracha un bout de verre encore logé dans son avant bras, et se mordit les lèvres pour ne pas crier de douleur. Ses cheveux étaient parsemés d’éclats de verre, et du sang ruisselait de sa jambe : éraflure qu’elle s’était faite en atterrissant avec violence sur le pavé. Satanés gardes… Et satané vieille femme ! Elle devait avoir bien piètre allure avec toutes ces blessures.
- Je dois passer mon chemin, ou je risque de me faire rattraper. Encore…
La jeune fille fut coupée par des bruits de sabots martelant le pavé non loin d’eux. Elle se retourna vivement, et aperçu avec désespoir les deux gardes sur deux montures extrêmement rapides. Que faire, maintenant ? Elle reposa son regard sur l’homme aux yeux rouges, et réfléchit rapidement. Mais rien ne vint… Elle finit par déclarer précipitamment :
- Auriez-vous une idée pour échapper aux gardes ?
Elle n’avait plus d’énergie. En fait elle se demandait même comment son corps pouvait encore la porter. Elle sortit à nouveau sa petite dague qui était d’une inutilité frappante, et ajusta brièvement sa tunique. Elle devrait se battre… Si elle pouvait le faire aux côtés de cet homme, elle aurait dix fois plus de chance de s’en sortir vivante. Mais elle n’était pas sûre qu’il accepterait de la sauver… Elle ôta d’un bref mouvement de tête les mèches qui l’empêchaient de voir convenablement, et se prépara à l’attaque. Les soldats étaient à une trentaine de mètres, bousculant toute forme de vie sur leur passage, avec une indifférence effrayante. Ce qu’ils voulaient, c’était elle, Lysia. Et personne d’autre…
- Elle est là-bas! Attrapez-la! Hurlèrent les gardes à tue-tête. Personne ne bougea; aucun villageois n'acceptait de servir les gardes. Pas ceux-ci du moins, au grand soulagement de Lysia. Celle ci reprit la parole, sur un ton d'excuse:
- Messire veuillez m’excusez, je ne voulais pas vous entrainer là-dedans…
Elle hésita une seconde, puis se résigna. Lui proposer de s’enfuir supposai que c’était un lâche, ce serait donc une insulte dont elle ne voulait pas être l’auteur. Si il voulait l’abandonner, alors il le ferait. Elle n’avait pas à lui proposer.

HJ: un peu court, pour la même raison que toi ^^

Lorsqu'elle se lava les cheveux et entreprit de se soigner, Arcam se sentit quelque peu gêné de rester planté là à l'observer. Il finit par s'asseoir sur l'un des lits et attendit qu'elle ai terminé.

" Comment vous remercier ? Sans vous je serais soit morte soit dans une carriole en route pour un marchand d’esclave… ou pire encore. "

Il n'avait pas fait cela dans le but d'une quelconque récompense. Il haussa les épaules, toujours souriant modestement :

" Ce n'est rien, voyons... "

Mais elle continuait, l'air sincèrement désireuse de le remercier. Elle se présenta et il hésita un bref instant : les triplés ne révélaient presque jamais leur nom. Mais là... Il fut coupé par la porte qui s'ouvrait brutalement, laissant apparaitre Calym.

Ce dernier était entré délibérément sans frapper, nota Arcam avec une pointe d'agacement. Mais son frère venait aux nouvelles, l'air curieux. Son regard se posa sur Lysia, il siffla, admiratif :

" Jolie... "

Arcam ne perdit pas une seconde, il vint se s'interposer entre Calym et la jeune femme. Et encore, pour une fois, son frère s'était montré à peu près courtois. Pas un mot, les triplés ne s'opposaient pas devant qui que ce soit, ils se montraient unis. Mais le regard d'Arcam était clair : tu la laisses en paix. Deux secondes d'affrontement silencieux, puis Calym haussa les épaules, l'air narquois.

" Les soldats sont partis. On veut savoir ce qu'on risque. "

Le "on", c'était Aelene et lui. Arcam ouvrit la porte, indiquant clairement que son frère pouvait s'en aller.

" On ne risque rien. "

Nouvel échange de regard. Les triplés étaient passés maîtres dans l'art de communiquer sans utiliser de mot.

Calym finit par franchir le seuil, non sans avoir jeté un dernier coup d'œil à Lysia qui laissait entendre qu'il s'en serait bien occupé lui-même. Puis il disparut dans l'escalier et Arcam referma la porte.

" Hum... désolé... mon frère. Il... "

Que dire ? Que calym avait été élevé en drow et qu'il se comportait comme tel ? Plus enclin à violer et tuer qu'à aider qui que ce soit ? Arcam soupira, préférant se taire.

On frappa à la porte et, plus doucement cette fois, Aelene entra à son tour. Arcam haussa les sourcils. Calym avait dû raconter les dieux seuls savaient quoi.

" Tout va bien. "

Le jeune homme préférait nettement avoir affaire à sa sœur. Au moins elle se contenterait de savoir s'il avait des ennuis et d'y remédier si c'était le cas. Et elle n'était pas du genre à faire des remarques déplacées à une parfaite inconnue. en revanche, elle voudrait en savoir un peu plus qu'un "tout va bien". Arcam hésita sur ce qu'il pouvait dire. En réalité, il faisait entièrement confiance à sa sœur et pouvait tout lui raconter, mais il estimait que Lysia était seule détentrice de ce qui s'était passé. Il ne voulait pas lui forcer la main.

" Cette demoiselle... était blessée. Je lui ai apporté mon aide. "

Aelene fit un petit sourire à Lysia, la saluant brièvement d'un signe de tête. Elle n'était pas idiote, il ne s'agissait pas que de blessures, elle avait bien vu les gardes qui débarquaient dans l'auberge. Mais elle respecta l'omission de son frère.

" Nous sommes en bas, si besoin est. "

Un dernier sourire à Lysia avant de disparaitre à son tour dans l'escalier :

" Vous êtes entre de bonnes mains. "

Arcam referma à nouveau la porte. Où en étaient-ils ? Elle voulait se racheter, et s'était présentée. Il n'hésita qu'un bref instant. Il pouvait se présenter, ainsi que sa fratrie, sous le nom "les triplés". C'est ce qu'aurait fait Aelene et probablement Calym. Mais Lysia avait eu confiance en lui - du moins il espérait qu'elle n'avait pas utilisé un faux nom - et il décida de faire de même :

" je m'appelle Arcam. "

Aelene n'utilisait pas son prénom par crainte d'être reconnue, Calym parce qu'il n'en voyait pas l'intérêt, mais lui... Lui, il voyait ses origines drows qui lui étaient rappelées : "Arcamenel", dieu de l'amour, mais dieu des sombres tout de même. Il savait que ça collait aussi avec les autres peuples, mais pour lui ça restait le prénom choisi par un père drow pour être placé sous la protection d'un dieu drow. Alors, souvent, il préférait ne pas l'utiliser.

" Et vous n'avez pas à me remercier, je n'ai presque rien fait ! "

Et maintenant ? la situation était plutôt inhabituelle, il se demanda que faire.

" Ce n'est rien, voyons... "

Lui répondit le jeune homme. Elle sourit finalement ; elle pensait tout le contraire, mais n’allait pas continuer à le harceler si il n’avait aucune idée de la façon dont elle pourrait se racheter. Elle trouverait, un jour ou l’autre, un moyen de payer sa dette. Elle avait l’impression qu’il allait ajouter quelque chose, lorsque la porte s’ouvrit vivement, et quelqu’un entra sans crier gare. Un homme qui ressemblait énormément à celui qui l’avait sauvé. Il n’était pas dur d’en déduire que c’était lui, son frère. Seul le regard différait. Mais elle n’eut pas le temps de s’y attarder, déjà, il prenait la parole.

" Jolie... "

Lysia fronça les sourcils ; s’ils étaient frères et qu’ils se ressemblaient physiquement, ils n’avaient pas la même mentalité. Elle ne répondit rien par respect pour celui qui l’avait sauvé et soigné, et se contenta de le fixer d’un air indifférent. Elle le suivit du regard lorsqu’il sortit, puis tourna les yeux vers le jeune homme, certainement gêné par l’intrusion de son frère.

" Hum... désolé... mon frère. Il... "

La jeune fille s’apprêtait à répondre, lorsque quelqu’un les interrompue à nouveau. Elle observa la jeune femme qui se tenait devant elle. Sa présence était rassurante, et pourtant Lysia ne la connaissait pas. Le sourire qu’elle lui adressa la rendit immédiatement confiante, et elle le lui rendit avec assurance. Ces trois frères et sœur étaient d’une beauté étrange. Elle attirait la curiosité, et pourtant l’on n’avait pas envie de s’attarder en questions inutiles. Juste les regarder…

" Vous êtes entre de bonnes mains. "

Lysia le savait. Elle murmura un « je sais » intelligible, puis se leva lorsqu’elle sortit. Enfin il lui dévoila son nom. Arcam. Et il ajouta qu’elle n’avait pas à le remercier. Elle sourit à nouveau, l’observant en silence. Puis elle se dirigea vers la petite fenêtre qui donnait sur la ruelle. Trois hommes discutaient avec animation, agitant bras et lèvres avec une vitesse étonnante. La jeune fille fronça les sourcils ; ils devaient sans doute parler de l’intrusion des deux soldats dans l’auberge. Les ragots allaient bon train dans cette ville… Comme dans toutes d’ailleurs. Elle se retourna vers son nouveau compagnon, et lui déclara :

- Je trouverais un moyen de vous remercier… Arcam. Les deux personnes étaient donc votre frère et votre sœur ? Je vous envie, vous avez de la famille.

Elle sourit, puis fronça les sourcils lorsque des bruits de pas précipités ébranlèrent l’auberge. Trois hommes débarquèrent dans la chambre, agitant des épées dans tous les sens. Ce n’étaient pas des soldats, ils ressemblaient plutôt à des voleurs. Deux des trois hommes se jetèrent sur Arcam et le plaquèrent contre un mur, tandis qu’un troisième se rua sur Lysia. Il la plaqua à son tour contre un mur, mais ne jugea pas utile de l'immobiliser. La jeune fille rassembla ses forces et lui assena un coup de poing, espérant que celui-ci servirait à le faire tomber, inconscient. Mais évidemment, elle avait sur-estimé sa force… Le voleur n’en fut qu’étourdit, et encore plus énervé. Il pointa son épée sur la jeune fille et lui lança d'une voix furieuse, après s'être bien assuré qu'elle ne pourrait plus se débattre :

- Donne-moi ton argent sale garce, sinon c’est finit pour toi.

Lysia tourna les yeux vers Arcam, déjà occupé avec les deux brigands. Elle ferma les yeux d’un air dégouté, et sortit sa petite bourse de sa ceinture. Elle la tendit à l’homme qui l’attrapa d’un mouvement vif. Il serait certainement déçu de n’y découvrir que quelques écus. Elle était pauvre. Ce genre d'intrusions dans les auberges étaient fréquentes: au même moment, d'autres voleurs se trouvaient dans les chambres voisines, entrain de détrousser toutes les personnes qu'ils rencontraient. Lysia se mordit les lèvres de ne pas avoir eu le reflex de vérouiller la porte. Ce n'était décidément pas sa journée.

HJ : si tu veux qu’on calme le jeu niveau action, dis-le moi J’ai fais ça parce que sinon, tu n’aurais pas eu grand-chose à répondre avec la seule réplique de Lysia.

[hrp : ben pareil, j'ai continué sur ta lancée ! ^^]


Oui, Arcam avait de la chance d'avoir de la famille. Même si son frère pouvait parfois l'exaspérer de part leurs caractères opposés, ils n'en restaient pas moins très liés.

" ICI ! "

Un cri retentit, qu'il reconnu aisément : sa fratrie donnait l'alerte, c'était leur cri de détresse habituel. Il se leva d'un bon alors que trois hommes entraient dans la chambre. Arcam n'aimait pas se battre, encore moins tuer, mais il n'était pas naïf non plus : s'il ne se défendait pas, ils pouvaient tous y rester.

Il fut brutalement plaqué sur le mur mais parvint à dégager son bras pour envoyer valser l'un des deux hommes. Le second eut la bêtise de jeter un regard à Lysia et son agresseur, d'un mouvement rapide, Arcam se dégagea, juste le temps de dégainer son épée et de faire face.

" ICI "

Aelene et Calym avaient probablement fort à faire, mais au moins ils savaient où il se trouvait et ne comptaient pas sur son aide immédiate. Il essaya de manœuvrer pour se retrouver proche de Lysia et para une des épées avec une certaine habileté. En revanche, la seconde fut trop rapide pour lui : il sentit la lame qui passait contre ses côtes, lui arrachant une grimace.

Les triplés avaient appris à se battre dès leur plus jeune âge, ce n'était pas cela qui allait arrêter le jeune homme. Il para à nouveau, feinta, puis ré attaqua rapidement touchant son premier adversaire. L'homme s'écroula, il mourrait sous peu. L'épée d'Arcam siffla à nouveau, désarmant le second, le jeune homme ne cherchant pas à le retenir dans sa fuite. Restait l'adversaire de Lysia, un peu trop préoccupé par sa bourse. Lorsqu'il se retourna vers Arcam, il était trop tard, un coup de pommeau lui fit perdre connaissance.

Arcam reprit son souffle, gardant son épée à la main et constata que sa blessure pouvait attendre un peu.

" Il faut descendre, vite. Il doit y en avoir d'autre. "

D'un geste rapide, il ramassa la petite bourse et la rendit à sa propriétaire. Puis il sortit à l'extérieur. Du palier, il repéra Aelene qui combattait avec méthode. Pas une expression sur son visage, elle enchainait les coups avec précision, mais commençait visiblement à fatiguer. Sa fratrie l'attendait, apparemment. Calym venait d'achever un des voleurs et leva les yeux vers son frère, lui lançant d'un voix fébrile :

" On file ! "

Comme il l'avait fait un peu plus tôt, Arcam attrapa Lysia par la main et l'entraina à sa suite. Pas question de l'abandonner là. En bas, les triplés n'étaient pas les seuls à se défendre et il y avait déjà quelques cadavres au sol, aussi bien de voleurs que de clients. Dès qu'elle vit que son frère était - enfin - là, Aelene rompit le combat pour revenir vers eux.

La fratrie se dégagea l'entrée à grand coup d'épée et se mit à courir dans la nuit. Des demi drows n'avaient pas forcément gain de cause auprès du guet, même quand ils étaient les victimes. Arcam n'avait pas lâché la main de Lysia, de crainte de la perdre en cours de route.

Après une galopade à travers les rues, les triplés s'arrêtèrent, sans se concerter, sur les quais, à l'abri d'un entrepôt. C'est à ce moment que Calym s'effondra au sol. Il restait assez vaillant pour se maintenir assis, adossé au mur, mais son visage était blême : du sang s'étalait sur sa chemise au niveau de son torse.

" Désolé... "

Aelene se précipita, lui ôtant sa chemise pour s'en servir comme pansement et arrêter l'hémorragie. Elle même n'avait pas l'air blessée, elle releva les yeux vers Lysia, laissant Arcam prendre le relais : les triplés n'étaient pas en ville depuis longtemps, ils ne connaissaient pas les environs.

" Un médecin ! Ou un guérisseur ! Vous en connaissez ? "

Arcam n'avait pas grand chose, lui non plus, même si sa blessure au flanc le faisait souffrir et pourrait à terme lui poser problème. Il avait une belle bosse sur le crane, aussi, récoltée quand il avait été plaqué au mur, mais il s'occupait surtout de tailler à coup de dague dans la chemise de son frère pour que le pansement puisse tenir.

Calym avait fermé les yeux, le souffle court.

Tout se déroula avec une rapidité époustouflante. Arcam se débarrassa de ses deux agresseurs assez facilement, écopant une blessure superficielle. Du moins pour un homme de sa carrure. Les cris qu’avaient échangés les trois frères et sœur étaient de toute évidence un code de ralliement. Elle ne s’y attarda pas, se contentant de suivre Arcam du mieux qu’elle pouvait. Elle sauta une ou deux fois par-dessus un cadavre étendu au sol, souvent entouré par une marre de sang. Le dégout s’empara d’elle, mais l’abandonna rapidement : elle avait d’autres choses à penser. Déjà ils avaient rejoints la belle femme ainsi que l’homme grossier qui ne semblait pas en bonne forme. Ils atteignirent rapidement un petit entrepôt à quelques centaines de mètres de l’auberge qu’ils avaient tous fuit comme la peste.

" Désolé... "

Murmura le frère d’Arcam tout en s’étalant au sol, visiblement gravement blessé. Lysia suivit la jeune femme paniquée du regard. Lorsqu’elle leva les yeux vers elle, Lysia ne comprit pas immédiatement que c’était à elle qu’on s’adressait. Etait-elle complètement idiote ? Non, seulement étourdie. Elle revoyait les corps entourés de flaques de sang, voilà tout. Lorsqu’elle reprit ses esprits, Arcam avait lâché sa main, et s’occupait de son frère étendu au sol.

" Un médecin ! Ou un guérisseur ! Vous en connaissez ? "

La voix précipitée de la jeune femme lui revint en mémoire comme un coup de marteau. Lysia acquiesça d’un signe de tête, et jeta un coup d’œil à Arcam. Elle l’observa une fraction de seconde sans bouger, puis s’éloigna en courant, le froid la réveillant brutalement. Ses cheveux virevoltaient autour de son visage crispé par l'effort de concentration. Un guérisseur... un guérisseur... Oui! Elle s'arrêta net, et prit une toute autre direction, reprenant sa course effrénée sans même faire attention aux rares personnes qui la regardaient curieusement. Enfin elle parvint jusqu'à une petite ruelle dans laquelle elle se rua sans réfléchir. Le soleil venait de se coucher, Mydgar serait donc certainement entrain de manger en compagnie de sa femme. S'il en avait une! Elle frappa la petite porte de bois de toute ses forces, sans faire attention aux contestations des voisins.

- Mydgar, pitié, ouvrez-la porte, c'est moi, Lysia! Ouvrez donc!

La jeune fille s'arrêta; elle entendait des bruits de pas précipités de l'autre côté de la porte. Enfin la porte s'ouvrit, et apparut en face d'elle un homme d'une quarantaine d'années, les sourcils froncés de colère. Il lui demanda d'une voix méfiante:

- Qu'est-ce qu'il te prend, Lysia? Que se passe-t-il?
- J'ai... Un ami, à dix minutes de marche... Il est très mal en point, il a besoin de vous, s'il vous plait, je vous payerai, je vous le jure, je vous payerai! déclara précipitamment la jeune fille qui ne savait pas le moins du monde comment elle le payerai.
- Ah oui? Et avec quel argent? Mais je viens quand même, tu me seras utile autrement. Amène-moi ma jument, et vite! lança-t-il d'une voix sévère.

Lysia ne se le fit pas dire deux fois: elle se jeta dans les écuries voisines, et attrapa la petite jument du médecin qu'elle conaissait bien pour s'en être occupé de nombreuses fois. Elle l'emmena au guérisseur qui rassemblait et plaçait ses herbes médicinales dans une besace. Pendant ce temps, la jeune fille plaça une selle sur le dos de l'équidé, et lui enfila négligemment un filet. Mydgar se hissa sur sa monture, et attrapa la main de la jeune fille; il la souvela avec une facilité frappante, et la plaça en croupe. Elle respira profondément, et lança avec audace:

- Je vais vous guider, en avant!

Quelques minutes plus tard, la vagabonde et le guérisseur parvinrent jusqu'à la fratrie. Lysia descendit du cheval avec une vivacité étonnante. Puis elle se dirigea vers le jeune homme blessé en compagnie du guérisseur qui prit immédiatement les choses en main. Lysia posa les yeux sur Arcam, et se rendit compte qu'elle était épuisée. Elle s'assit contre le mur, et tenta de reprendre son souffle.

Dès que Lysia partit en courant, l'attention d'Aelene et Arcam se reporta sur Calym. S'il lui arrivait malheur... Lorsque le guérisseur arriva, ils s'écartèrent pour le laisser travailler. et il avait intérêt à faire du bon travail !

A vrai dire, Calym n'avait pas été touché à des points vitaux. En revanche, il avait perdu beaucoup de sang et ses tissus avaient été déchirés par la course effrénée. Il avait juste besoin qu'on stoppe l'hémorragie, qu'on lui fasse quelques points de suture et qu'on laisse la blessure se refermer.

Aelene, debout, s'était adossée au mur. Perdue dans ses pensées, le regard droit devant elle, elle jouait machinalement avec sa dague. Arcam posa une main apaisante sur son épaule :

" Ça va aller, ne t'en fait pas. "

Sa voix n'était qu'un murmure, on voyait qu'il n'en était déjà pas convaincu lui-même. La jeune femme hocha la tête comme un automate. Quand elle était dans cet état, il valait mieux la laisser un temps seule. Il la laissa donc pour se tourner vers Lysia. Cette dernière s'était assise contre le mur, le souffle court. Il s'assit à son tour à côté d'elle.

" Merci infiniment. Si vous considériez que vous aviez une dette envers moi, elle est largement payée ! "

Il se forçait à sourire, à mettre en peu d'entrain dans sa voix, mais on sentait qu'il était particulièrement inquiet. Le guérisseur se releva enfin et annonça que le jeune home était hors de danger. Restait ses honoraires. Calym désigna son escarcelle d'un geste las :

" Là... J'ai gagné suffisamment je crois. "

Aelene reprit les choses en main, fouillant pour trouver les sous et payant le médecin. Arcam avait vu que Lysia était prête à payer ce qu'elle pouvait mais il secoua la tête :

" vous avez déjà fait beaucoup. "

Le guérisseur repartit, Calym se redressa un peu, se remettant en position assise. Il avait l'air de souffrir, mais reprenait déjà des couleurs.

" merci. "

Il s'était adressé à Lysia, d'une voix faible mais, pour une fois, dénuée de sarcasme. Aelene haussa les sourcils, surprise : son frère s'humanisait ? Il devait vraiment se sentir mal !

" On ne peut pas rester là. Il fait trop froid et il te faut un lit. "

Arcam se tourna à nouveau vers Lysia :

" Vous connaissez une autre auberge ? Bien fréquentée de préférence. "

Aelene était déjà occupée à compter argent qu'il leur restait. Elle secoua la tête :

" Oh, non... Même en réunissant tout, on n'a plus assez... Ou alors, une chambre vraiment minable. "

" Et ça ? "

Arcam désignait une enseigne, un peu plus loin. Plutôt branlante : "au chat noir". Bien fréquentée, peut-être pas, mais minable et à prix réduit, surement. Mais il valait mieux risquer de nouveaux ennuis que laisser leur frère blessé mourir de froid. Aelene soupira :

" C'est parti. "

Arcam et elle soulevèrent leur frère chacun par un bras et l'aidèrent à se redresser, tandis que Calym s'efforçait de ne ne rien dire. un drow n'exprime aucune souffrance... Ils firent quelques pas hésitants avant de trouver leur rythme. Arcam se retourna vers Lysia, esquissant un sourire :

" Venez, vous n'allez pas rester dehors par ce froid ! Et puis..."

Il sourit d'avantage. Maintenant que Calym avait eu des soins, il retrouvait sa bonne humeur naturelle.

" Et puis, il nous faut un coup de main pour ouvrir la porte ! "

Une bonne excuse pour qu'elle les suive. Arcam ne savait pas trop si c'était par simple gentillesse qu'il lui proposait un toit ou si, en plus, c'était il n'avait pas tellement envie qu'elle ne les quitte. Qu'elle ne le quitte.

Ils arrivèrent tant bien que mal à l'auberge et Aelene se chargea d'aller demander une chambre. Si les quelques clients présents les regardèrent bizarrement, ils se retrouvèrent tous à bon port sans ennuis. Du moins pour l'instant. Arriver avec un blessé dans ce genre d'endroit n'était jamais une très bonne idée.

Calym fut installé dans un des deux lits et ferma les yeux. Sa sœur retourna au comptoir pour connaitre le prix des repas. Arcam resta avec Lysia, ayant soudain perdu sa langue. Ca ne lui arrivait pourtant pas souvent...

Une étrange angoisse s’empara d’elle lorsque le médecin se pencha sur le blessé. Elle n’avait pas ressentit ce genre de sentiments depuis longtemps : elle ne tenait à personne et n’avait pas vu sa famille depuis des années. La seule raison pour laquelle son cœur battait aussi rapidement, c’était par compassion pour Arcam. Perdre son frère… personne ne voulait endurer cela.

" Merci infiniment. Si vous considériez que vous aviez une dette envers moi, elle est largement payée ! "

Devant cette réplique de la part d’Arcam, Lysia resta muette. Avait-elle déjà payé sa dette ? D’habitude cela prenait plusieurs mois, voir années pour qu’elle se rachète tout à fait. Mais ce n’était pas « comme d’habitude », de toute évidence. Et c’était tant mieux. Lorsque le guérisseur annonça que le jeune homme était hors de danger, elle poussa un soupir de soulagement.

" merci. "

Le petit mot retenti aux oreilles de la jeune fille qui ne su que répondre. Elle sourit avec sincérité ; peut-être l’avait-elle jugé trop vite ? Son regard se posa sur la sœur qui prenait la parole d’une voix active. Apparemment, elle était la plus sage des trois. Celle qui réfléchissait à toutes les conséquences d’une situation délicate, et prenait toujours –ou presque- les bonnes décisions. Ce genre de personnes étaient rassurantes. Lorsque vint le moment de se déplacer, Lysia revint brutalement sur terre. Elle n’avait plus aucune raison de rester avec eux. Ils allaient partir, et elle serait à nouveau livrée à elle-même. Non ! Elle cherchait énergiquement un moyen de rester avec eux, lorsque la voix d’Arcam la sortit de ses pensées :

" Venez, vous n'allez pas rester dehors par ce froid ! Et puis..."
" Et puis, il nous faut un coup de main pour ouvrir la porte ! "

Un petit rire s’échappa des lèvres de la jeune fille. Du soulagement mêlé à de l’amusement. Elle les suivit donc dans l’auberge, montant les escaliers derrière eux, et s’asseyant sur le second lit, aux côtés d’Arcam. Elle jeta un coup d’œil au blessé, allongé sur le lit, puis reposa son regard sur le jeune homme. Elle fut prise d’une terrible envie de laisser courir ses doigts glacés sur ce visage aux traits réguliers qui se tenait si prêt d’elle. Elle se ravisa, et se contenta de demander :

- Comment s’appellent votre frère? Et votre sœur ? Je connais votre nom, mais pas les leur.

Elle se demanda si il accepterait de lui donner les noms des deux autres. Après tout, Lysia était une inconnue à leurs yeux, alors pourquoi se mettraient-ils en danger inutilement en révélant leurs noms ? La jeune fille sourit donc, et ajouta :

- Mais si vous préférez ne rien dire, j’accepterais votre discrétion.

Elle marqua une courte pause, puis continua :

- Ah et je vous en prie, tutoyez-moi.

Elle fut prise d’une soudaine envie de connaitre tout sur eux. Pourquoi ces yeux rouges ? D’où venaient-ils ? Etaient-ils de passage à Ydril, ou comptaient-ils s’y installer ? Elle posa un regard songeur sur les yeux du jeune homme. Non, ils étaient de passage, c’était évident : ils n’étaient pas du genre à se poser, à prendre un travail régulier. Des aventuriers, sans doute.

- J'ai tellement de questions à vous poser!

Plus elle le regardait, plus elle se rendait compte qu'il n'était pas complètement humain. Il devait être un mélange de race, pour posséder de tels yeux. Et même s'il parassait si jeune, ses expressions étaient ébranlées par une certaine expérience de la vie. Il avait déjà vécu beaucoup de choses... Quel âge avait-il? 24 ans? 25? Tout portait à croire cela, et pourtant, elle avait un doute.

- Quel âge avez-vous?

Au risque de passer pour une curieuse indiscrète, elle se décida finalement à poser cette question. Elle en aurait le coeur net, au moins.

Arcam ne pouvait détacher son regard de celui de Lysia. Ses grands yeux noirs le troublait plus qu'il en voulait bien l'admettre. Il finit pourtant par se reprendre, brusquement ramené à la réalité, lorsqu'elle posa sa première question.

" Comment s’appellent votre frère? Et votre sœur ? Je connais votre nom, mais pas les leur. "

Il hésita. Il lui faisait confiance, mais pourtant... Il eut un sourire gêné et se décida pour une réponse évasive.

" Vous le leur demanderez. Je crois qu'ils préféreront. "

Elle n'aurait pas de réponse, probablement. Du moins pas de la part d'Aelene, c'était certain. Sa sœur optait en général pour quelque chose comme "on nous appelle les Triplés". En revanche, la deuxième phrase de Lysia le fit sensiblement se détendre. Ce n'était pas agréable de devoir se cacher ainsi, mais il savait que sa fratrie lui en voulait s'il en disait trop. Déjà qu'ils n'apprécieraient pas qu'il ai donné son propre prénom...

" Ah et je vous en prie, tutoyez-moi. "

Il sourit, sincèrement heureux de sa demande :

" C'est d'accord, si tu fais de même. "

C'était agréable de pouvoir parler à quelqu'un comme... à un ami. Arcam se liait facilement, il était assez ouvert pour cela, mais depuis qu'ils étaient devenus mercenaires, il ne tutoyait personne si ce n'était sa fratrie. ils voyageaient trop pour lier amitié avec quiconque, ne fréquentaient que leurs clients. Et dans le domaine du mercenariat, on ne fait pas ami-ami avec un client sous peine de récolter pas mal
d'ennuis.

Alors là, qu'elle lui propose spontanément de le tutoyer, c'était inespéré. Une bouffée d'oxygène.

Il fronça néanmoins les sourcils lorsqu'elle parla de questions et demanda leur âge. Elle ne savait donc pas... Il se raidit, et son regard se voila quand il comprit ce que cela impliquait. C'était donc ça ! Elle n'avait pas compris qu'ils étaient demi-drow ! Si c'avait été le cas, elle l'aurait fui depuis longtemps ! Elle l'aurait soudainement poignardé dans le dos qu'il n'aurait pas été plus choqué. Il avait été d'une naïveté !

Sa réaction était peut-être excessive, mais il avait passé sa vie à être jugé sur ses origines. Sans cesse sur le qui vive, à se demander à qui il pouvait faire confiance. Justement, il avait accordé sa confiance à la jeune femme, et maintenant...

Il détourna le regard et répondit sourdement :

" Nous avons 76 ans. " autant en finir tout de suite, il se força à lâcher : " Nous sommes demi-drows. "

Elle allait pousser un cri d'effroi et s'enfuir en courant. Son cœur se serra à cette idée. Il n'avait aucune envie qu'elle s'éloigne. Il avait apprécié de ne pas se sentir regardé comme une bête curieuse, de ne pas être rejeté. Au début, il s'était dit qu'elle n'avait pas eu le choix, et puis il s'était attendu à ce qu'elle lui fausse compagnie rapidement. Au lieu de cela, elle était restée et il avait pensé qu'elle ne faisait aucun cas de ses origines. Il s'était même surpris à se chercher des excuses pour qu'elle reste près de lui. Mais quel idiot !

" Je comprendrais que tu veuilles partir. "

Il n'osait même plus la regarder, gardait son regard obstinément fixé sur Calym qui avait dû s'endormir et respirait paisiblement. Franchement, qui aurait eu l'idée de sauver ainsi un demi ? Aelene avait raison : ils n'étaient pas humains, et ces derniers le leur rendait bien. Devait-il faire comme sa sœur ? Se couper du monde ? Ignorer drows et
humains ? Il ne le supporterait pas.

Il finit par relever les yeux vers Lysia. Un regard blessé, terriblement perdu. Il songea qu'il devait avoir les yeux encore plus rouges avec la tension qu'il ressentait. De quoi terrifier la jeune femme, sans doute, ce qui le rendit encore plus malheureux.

" Vous le leur demanderez. Je crois qu'ils préféreront. "

Ce fut la réponse à sa première question. Cela n’étonnait pas la jeune fille. Elle acquiesça d’un signe de tête, lui montrant ainsi que cela ne la dérangeait pas. Elle était prête à parier qu’aucun des deux autres ne lui donnerait leur prénom, mais ce n’était pas grave. Elle sourit à la réaction d’Arcam lorsqu’elle lui demanda de la tutoyer, et sourit lorsqu’il lui proposa de faire de-même avec lui. C’était une bonne chose ; elle vouvoyait par politesse, mais cela instaurait une certaine distance entre les deux personnes. Elle cessa de sourire à la réaction du jeune homme devant sa seconde question. Que lui prenait-il ? Pourquoi cette soudaine… tristesse ? Elle n’en était pas certaine, c’était un mélange de plusieurs sentiments qu’elle ne parvenait pas à déceler. Voulait-il dissimuler son âge ? Ce n’était pas un problème aux yeux de la jeune fille… Elle aurait aimé le lui dire avant qu’il parle, mais c’était trop tard.

" Nous avons 76 ans. "
" Nous sommes demi-drows. "

La dernière phrase frappa brutalement Lysia. Drows… Demi-drows. Elle n’y croyait pas. Elle avait beau s’obliger à dissimuler sa surprise, c’était en vain. Les drows… Elle en avait beaucoup entendu parlé. Dans les histoires contées par les ménestrels, ils étaient décrits comme des créatures sournoises, cruelles, vicieuses. Et… Arcam n’était pas comme cela. Il était bien différent. Mais… Qu’en savait-elle, au fond ? Elle ne le connaissait pas. Il pouvait bien être cruel et avide de sang, elle n’en savait rien. Elle baissa les yeux, posant son regard sur le sol. Non, ce ne pouvait pas être vrai.

- Vous… Tu…

Elle se leva d’un bond, et recula de quelques pas. Immédiatement elle regretta ses gestes. Ils étaient des demi-drows, moitié humains ! Arcam était donc plutôt humain que drow. C’était évident. Elle se rapprocha d’un pas et reposa doucement son regard dans le sien. Elle revint s’asseoir près de lui, et lui adressa un léger sourire, tout en déclarant, sur un ton d’excuse :

- Pardonne-moi pour cette réaction, Arcam. Je n’ai pas l’habitude de croiser des demi-drows, mais à présent je n’y accorde aucune importance ; vous êtes mille fois plus noble que n’importe quel humain que j’ai pu rencontré dans toute ma vie.

Mais déjà le regard du jeune homme fuyait le sien. Avait-il honte de ses origines ? Sans doute. Et sa première réaction n’avait sans doute rien arrangé. Elle s’avança vers lui, et déposa avec une douceur infinie sa main pâle sur son visage, le redressant délicatement, de façon à ce qu’il la regarde droit dans les yeux. Rouges… Elle s’y perdrait. Puis elle reprit doucement la parole, peu après avoir retiré sa main :

- Je n’ai que 18 ans Arcam, tu as beaucoup de choses à m’apprendre.

Elle rit doucement, et jeta un coup d’œil au blessé, toujours étendu sur le lit. Il devait dormir profondément pour ne rien entendre de leur conversation. A moins qu’il n’entende ? Elle s’en désintéressa rapidement, et sourit à nouveau, ne le quittant plus des yeux. Elle finit par détourner le regard, pour le poser sur le plafond. Cette taverne était miteuse... Mais au moins, ils étaient au chaud, et ils avaient un toit. C'était sans doute le plus important.

- Enfin si tu veux bien de ma compagnie, bien sûr!

Ajouta-t-elle en souriant, référence à sa dernière réplique.

Autant Arcam ne fut pas surpris de la voir se lever et s'écarter, autant il ne s'attendait pas à ce qu'elle vienne se rasseoir près de lui.

" Pardonne-moi pour cette réaction, Arcam. Je n’ai pas l’habitude de croiser des demi-drows, mais à présent je n’y accorde aucune importance ; vous êtes mille fois plus noble que n’importe quel humain que j’ai pu rencontré dans toute ma vie. "

Il écoutait à peine... quand il sentait sa main sur son visage. Il osa alors relever les yeux vers elle, n'osant plus bouger de peur qu'elle ne s'écarte à nouveau. L'impression d'être en plein rêve... si elle se perdait dans ses yeux rouges, lui se noyait dans son regard noir.

" Je n’ai que 18 ans Arcam, tu as beaucoup de choses à m’apprendre. "

Lui ? Elle lui parlait bien à lui ? Son cerveau avait déconnecté du monde réel, le rire de Lysia le ramena à la réalité. Douce réalité... il lui rendit son sourire tandis qu'elle continuait :

Enfin si tu veux bien de ma compagnie, bien sûr!

Il ouvrait la bouche pour répondre lorsque deux coups légers à la porte retentirent et qu'Aelene se glissa dans la pièce. La jeune femme tenait deux assiettes d'une soupe au contenu plus qu'indéterminé. Elle se figea en voyant l'expression d'Arcam et son regard glissa vers Lysia. Puis elle fit un effort sur elle-même pour ne rien laisser paraitre et déposa les deux assiettes sur un petit meuble.

" On avait juste pour deux plats. Il y en a un pour... " Elle hésita et sembla se résoudre à parler devant Lysia. " ... pour Calym. On se partagera l'autre. "

Arcam acquiesça, mal à l'aise, sachant pertinemment ce qui allait suivre. Comme il s'y attendait, sa sœur ajouta :

" Je voudrais te parler. "

Il acquiesça d'un air las et sortit dans le couloir, refermant la porte derrière eux. De là où elle était, Lysia ne pouvait entendre ce qu'ils disaient. Calym ouvrait les yeux au même moment. Le jeune homme balaya la pièce du regard, semblant chercher sa fratrie, avant de s'arrêter sur le jeune femme.

" Ma sauveuse. "

Le ton était neutre, il se redressa tant bien que mal en grimaçant.

" Où sont les autres ? "

Des éclats de voix retentirent à ce moment. Eclats de voix plus ou moins étouffés par la cloison et surtout par leurs propriétaires qui faisaient leur possible pour ne pas être entendus tout en défendant leur opinion.

Calym sourit d'un air narquois.

" Laissez moi deviner. Mon frère et vous... ? "

Il fit une pause, dévisageant Lysia :

" Il vous a dit qui nous étions ? Ce que nous étions ? Oui... Bien sur, il est honnête mon frérot ! "

Il ricana. Un rire qui donnait des frissons...

" Et il vous a dit aussi que nous étions mercenaires ? Que nous faisions le sale boulot pour de l'argent ? Sans cesse sur les routes ? Seulement de passage à Ydril ? "

Calym cernait bien son frère. Il savait comment il fonctionnait, savait d'autant mieux ce qu'il avait pu dire, ou ne pas dire, à la jeune femme. Et ce que ça impliquait... Il se doutait qu'Aelene était en train d'en discuter avec lui et il rageait de ne pas faire partie de la discussion.

La porte se rouvrit, laissant entrer le frère et la sœur. Aelene, l'air neutre, fit un signe discret à Calym qui ouvrit la bouche pour protester. Arcam alla aussitôt se planter devant lui, lui assenant à voix basse :

" Souviens toi de Méropée. "

C'était dit sans émotion aucune. Les triplés ne s'opposaient pas, pas devant d'autres personnes. Calym blêmit et déclara forfait. Puis Arcam se retourna vers lysia, le regard brillant :

" Je descends. "

Sous entendu : je ne sais pas ce qu'il t'a dit, mais suis moi, je t'en prie... Sans attendre, il disparut dans les escaliers.

Les expressions qui passèrent dans les yeux d’Arcam la firent sourire. Et cela ne surprit pas Lysia lorsque la sœur de ce dernier lui demanda de lui parler en privé. Elle aurait aimé entendre ce qu’ils se disaient, mais évidemment, ils parlaient tout deux trop bas pour qu’elle ne puisse comprendre. Elle resta debout, le regard posé sur la porte, attendant qu’ils rentrent. Soudain, une voix faible retentit derrière elle :

" Ma sauveuse. "

Lysia se méfiait de lui ; il avait beau être le frère d’Arcam, c’était tout de même un demi-drow. Elle resta donc là où elle se trouvait, tout en l’observant, impassible. Les premières répliques de Calym n’éveillèrent pas la curiosité de la jeune fille, ce qui ne fut pas le cas de la dernière.

" Et il vous a dit aussi que nous étions mercenaires ? Que nous faisions le sale boulot pour de l'argent ? Sans cesse sur les routes ? Seulement de passage à Ydril ? "

Des mercenaires… ? Elle porta un regard teinté de surprise qu’elle tenta en vain de dissimuler. Ils tuaient, volaient et protégeaient au compte de truands ? Elle ne sut que penser de tout ceci. Devait-elle croire ce que lui disait cet homme ? Ou plutôt ce demi-homme ? Immédiatement elle regretta cette pensée ; en pensant cela du blessé, elle insultait Arcam. Elle détourna les yeux du blessé étendu sur le lit, et porta son regard sur la porte de la petite chambre. Le jeune homme et sa sœur apparurent sur le pallié, et Lysia suivit Arcam du regard lorsqu’il s’approcha du lit de Calym. Elle entendit uniquement le dernier mot : Méropée. Qui donc était cette fille ? Elle devait être importante, à en voir l’expression qu’adopta le blessé. Lysia ne pu s’empêcher d’en ressentir une certaine jubilation.

" Je descends. "

La voix d’Arcam retentit dans la chambre, avertissant par la même occasion que Lysia ferait mieux de le suivre. Elle jeta un dernier coup d’œil à Calym, puis posa le regard sur la jeune femme. Elle lui adressa un léger sourire, tout en déclarant :

- Je ne veux pour rien au monde vous causer de soucis, à vous trois… Si c’est le cas, faites-le moi savoir, je ferais en sorte de m’éclipser.

Elle regrettait presque ses paroles après les avoir prononcées ; jouer la gentille fille commençait à l’agacer. Mais elle préférait cela que passer pour une garce auprès de la fratrie. Elle se dirigea ensuite vers la porte, et descendit les escaliers étroits à la suite d’Arcam qui était déjà en bas. Elle s’approcha de lui et lui jeta un regard curieux, tout en choisissant une petite table. Le jeune homme la rejoint, et Lysia jeta un coup d’œil à un garçon qui était de service dans la modeste taverne. Il s’approcha d’eux et déclara :

- Que désirez-vous ?
- Deux bières, répliqua la jeune fille en souriant.

Le garçon acquiesça d’un bref signe de tête, et s’éclipsa pour aller chercher les boissons. Lysia sortit sa petite bourse, et la posa sur la table. Puis elle leva les yeux vers Arcam, et l’observa quelques minutes sans rien dire. Le silence posa finalement sur la jeune fille, qui prit parole d’une voix neutre :

- Arcam… Je ne te connais pas, ou presque pas. Et je ne veux certainement pas être l’objet d’une dispute entre vous trois juste après notre rencontre! Calym m’a dit des choses…

Elle ne termina pas sa phrase. Devait-elle lui demander s’ils étaient vraiment des mercenaires ? Si c’était le cas, cela changerait-il quelque chose ? Elle ne savait pas, et c’était justement ce qui la dérangeait. Elle savait qu’Arcam lui demanderait ce que son frère avait bien pu lui dire. Elle le lui dirait ; pourquoi mentir ? Mais… il allait d’abord devoir répondre à sa question :

- Qui est Méropée ?

Hrp: désolée, j'ai joué Arcam en disant qu'il la rejoignait à table, mais je n'avais pas trop le choix xD

[hrp : pas grave, c'était logique ! :)]


Aelene ne répondit rien à Lysia. Oh, elle ne doutait pas de la sincérité de la jeune femme, seulement c'était beaucoup plus compliqué que ça... Elle les regarda disparaitre dans les escaliers et se tourna vers son frère, lui donnant une des assiettes de soupe :

" C'est la première fois que je le vois dans cet état... et on ne peut rien pour lui. Ni pour nous. "

Calym ricana à nouveau :

" Arrète, tu te montes la tête... "

Les yeux d'Aelene lancèrent des éclairs, elle rétorqua sèchement :

" Arcam n'est pas comme toi. Quand il s'attache à quelqu'un... Cette gamine risque de lui briser le cœur. "



Attablé devant Lysia, Arcam semblait chercher par où commencer. Calym lui avait donc parlé ? Lui aussi connaissait bien assez son frère pour savoir ce qu'il avait pu raconter... Il hésitait encore, fuyant le regard de Lysia lorsqu'elle posa une question qui lui fit lever la tête. [/i]

" Qui est Méropé ? "

Il la regarda, surpris. A vrai dire, il ne pensait pas qu'elle l'avait entendu et il ne considérait pas que ça avait à voir avec le sujet. c'était juste une pique destinée à avoir la paix avec Calym.

" C'est... c'était une danseuse. "

La réponse était plus qu'incomplète, il en avait conscience, aussi il enchaina en se demandant dans quoi il mettait les pieds. Car c'avait plus à voir avec le sujet qu'il ne voulait bien l'admettre. Seulement, mettre en parallèle cette Méropé et Lysia, ça lui paraissait soudain insultant pour cette dernière.

" Une jeune femme, rencontrée en venant ici. Mon frère... l'appréciait beaucoup. "

Il garda le silence un instant, tout à ses pensées. Puis il reprit, dans un mélange de colère et de peine :

" Il t'a dit quoi ? Que nous sommes mercenaires, je suppose ? "

Il essayait de déceler ce qu'elle pouvait en penser. Il se mit à parler, en prenant une certaine distance dans le ton, préférant aller au fond des choses :

" On gagne notre vie comme on peut, c'est vrai. C'est aussi vrai que nous parcourons les routes sans cesse, parce qu'en tant que demi-drows nous avons vu qu'il valait mieux être difficilement accessibles. Et puis c'est la condition pour exercer ce métier. Garde du corps, escorte, la plupart du temps... voleurs parfois... Il se crispa un peu à ces derniers mots, visiblement, ça ne lui plaisait pas. Nous finissons par être recherchés aussi bien pour nous donner du travail que pour nous faire regretter d'avoir fait le précédent. Sans cesse sur le qui vive... Tu nous a vu nous séparer de nos armes ? Ça n'arrive jamais... Et nous n'avons plus un sou, donc nous allons être obligés de trouver un travail et de repartir rapidement. Dès que mon frère sera remis. "

Il serra le poing en soupirant de frustration. Il avait commencé à parler et ne semblait plus capable de s'arrêter.

" Tu me parlais tout à l'heure, comme si nous pouvions avoir un avenir... Je n'ai rien à t'offrir, si ce n'est une absence permanente et un danger quand je suis là. "

Il regardait fixement sa bière, à laquelle il n'avait pas touchée. Plus il parlait, plus il avait conscience que ses mots l'amenait à l'exact contraire de ce qu'il souhaitait au plus profond de son cœur. Il n'arrivait pas comprendre comment il avait pu en arriver là, ce qu'il savait c'est qu'il ne voulait pas la voir s'éloigner. Et pourtant, pour son bien à elle, il ne pouvait pas la bercer d'illusions. "tu as beaucoup de choses à m’apprendre", avait-elle dit. Il lui prit la main, secouant la tête :

" Lysia... Je n'ai rien à t'apprendre de bon. Je ne sais rien d'une vie normale. "

Il aurait tout donné pour avoir tord, mais il y croyait fermement. Quarante ans passés à vivre chez les drows... il ne s'en détacherait jamais tout à fait.

- Voilà vos bières, ma dame, déclara une petite voix derrière la jeune fille.
- Ah ? Merci, répondit-elle tout en lui tendant quelques pièces.

Elle attrapa une chope de bière et la tendit vers le jeune homme, puis elle prit la sienne et la porta à ses lèvres, tout en observant Arcam. Elle se demandait pourquoi elle avait posé une question sur cette Méropée ; quelle importance avait-elle, au fond ? Certainement aucune. Les réponses qu’il lui donna lui suffirent ; elle avait du être une danseuse dont Calym était tombé amoureux –si il pouvait être amoureux- et Lysia ne voulait pas en entendre plus. C’était tout autre chose qui l’intéressait. Et Arcam alla au vif du sujet sans qu’elle n’ai à le lui demander. Elle s’en voulu de l’avoir inconsciemment blamé pour être mercenaire ; elle-même avait du être réduite plusieurs fois à mendier dans les rues. Alors de quel droit se permettait-elle de juger un métier comme mercenaire ? Au moins ce n’était pas un travail honteux. Du moins pour elle. Au fur et à mesure qu’il parlait, elle redoutait la conclusion de toutes ces paroles. Elle avait trouvé une personne à qui parler, quelqu’un qui serait devenu un ami avec le temps, voir même plus. Et il allait déjà repartir ? Non ! Elle ne voulait pas !

" Tu me parlais tout à l'heure, comme si nous pouvions avoir un avenir... Je n'ai rien à t'offrir, si ce n'est une absence permanente et un danger quand je suis là. "

Lysia posa sa chope de bière avec délicatesse sur la table, et plongea ses grands yeux noirs dans les rouges brillants de son compagnon. Elle attendit qu’il finisse de parler, tout en réfléchissant à toute vitesse à un moyen de le dissuader de cette idée qui l’éloignait d’elle.

" Lysia... Je n'ai rien à t'apprendre de bon. Je ne sais rien d'une vie normale. "

La jeune fille baissa les yeux sur son verre. Elle l’attrapa et bu les dernières gorgées d’une traite. Puis elle leva à nouveau le regard, et tenta de cerner ce qu’il pensait vraiment. Mais elle n’y parvint pas ; tout était trop embrouillé dans son esprit. Etait-ce cela que lui avait dit sa sœur ? De faire fuir Lysia, par n’importe quel moyen ? La jeune fille tenta de garder son calme, tout en reposant sa chope vide. Elle hésita à appeler de nouveau le garçon, mais sa bourse vide l’en empêcha. Elle prit finalement la parole :

- Je vois ce que ta sœur t’as dit. Ce n’est pas dur à deviner.

Elle avait une soudaine envie de boire sans s’arrêter ; sentir ce liquide chaud couler le long de sa gorge, son esprit s’égarer. Elle baissa à nouveau les yeux, et continua :

- Si tu penses réellement que tu n’as rien à faire avec moi, alors dis-le moi. Je veux l’entendre de ta bouche.

Elle jeta un coup d’œil aux escaliers, se demandant si sa vipère de sœur ou son diable de frère ne les observait pas. Elle se demandait comment établir quelque chose avec un homme dont elle n’aimait pas le frère ou même la sœur. Elle ne l’aimait pas, mais elle n’était même pas certaine de ce que celle-ci avait dit à Arcam. Alors pourquoi était-elle aussi remontée contre elle ? Lysia fronça les sourcils, agacée. Elle qui n’avait pas connu la tendresse ou même l’attachement à une personne depuis si longtemps voyait un nouvel espoir s’échapper. Oui, il s’échappait… Elle rejeta ses cheveux en arrière, et soupira.

- Dis-le, et je me lève et je pars. Si c’est ce que tu veux vraiment, alors je partirais.

Son regard était plongé dans celui du demi-drow, et son ton était on ne peut plus sérieux. Elle sortirait de cette taverne si il voulait la voir partir. Mais si ce n’était pas le cas, Calym et sa sœur devront faire avec. Certes elle n’allait pas les suivre dans leur travail de mercenaires mais… Peut-être réussirait-elle à convaincre Calym d’arrêter ? Mais comment gagneraient-ils de l’argent ? Et jamais le jeune homme ne voudrait se séparer de son frère et de sa sœur ! Elle tenta de chasser ces pensées décourageantes, les yeux toujours posés dans ceux de son compagnon.

Elle pensait qu'il s'agissait juste de la discussion avec Aelene... Il soupira. Si seulement c'était si simple...

" Ma sœur voulait juste savoir où j'en étais... Ce que je dis, je le pense, je n'ai pas besoin de répéter quoi que ce soit. "

Son ton était un peu plus dur, plus sérieux. Non seulement c'était vrai, mais en plus les Triplés n'avaient pas pour habitude de laisser critiquer leur fratrie. En visant sa sœur, elle le visait lui. Mais il comprenait parfaitement la réaction de la jeune femme et il se radoucit aussi vite : il ne pouvait jamais rester désagréable bien longtemps. Surtout pas avec elle, remarqua-t-il.

Il fit une pause, ferma les yeux. Non, il n'avait aucune envie qu'elle s'en aille, même s'il ne s'expliquait pas ce sentiment alors qu'il ne la connaissait qu'à peine. Pour lui, il voulait qu'elle reste, mais pour elle, elle n'y gagnerait rien, il devait lui dire de partir. Il allait lui expliquer. Puis il rouvrit les yeux, replongea dans son regard et se retrouva muet.

" Non. Non, je ne veux pas que tu t'en ailles. Mais... "

Exactement le contraire de ce qu'il pensait dire une fraction de seconde plus tôt. Il secoua la tête, découragé :

" Tu ne sais pas dans quoi tu t'embarques en acceptant mon... amitié. "

Il but une gorgée de sa bière, plus pour s'occuper les mains qu'autre chose. Puis il se mit à parler doucement, comme s'il racontait autant pour lui-même que pour Lysia :

" Si tu veux cerner un peu ce que je suis, ce que nous sommes, il faut que tu saches que nous avons grandit chez les drows. Nous y avons passé une quarantaine d'années. Les demi ne sont pas appréciés des humains, mais ils le sont encore moins des sombres. Nous avons dû faire notre place, envers et contre tous. Nous n'avions que nous sur qui compter. "

Il semblait voir défiler son enfance, gardant le regard perdu dans le vague.

" On ne survit pas chez les drows si on est faible, ou gentil... On survit à force de meurtres et de complots. Sans Calym, sans mon frère, je ne serais plus de ce monde. Et sans Aelene, ma sœur, nous nous serions entredéchirés depuis longtemps."

Il en avait profité pour lui révéler les prénoms de sa fratrie. Peut-être n'en avait-elle pas conscience, mais, pour lui, c'était une marque de confiance énorme, parce qu'il ne s'agissait plus seulement de lui-même mais son frère et sa sœur. Pourquoi lui racontait-il tout ça ? Les triplés n'avaient jamais parlé à personne de leur enfance. Jamais. Il regarda à nouveau Lysia et conclut en murmurant :

" Nous n'avons plus de famille et nous n'avons jamais eu d'ami. Nous n'avons que nous. "

Et maintenant, il y avait cette jeune femme, devant lui, qui, défiant toute logique, avait accepté de comprendre un demi. Il ne voulait pas la perdre, mais elle, qu'elle place pourrait-il lui donner ?


[hrp : désolée, c'est un peu court]

[hrp : désolée pour le retard et pour la taille de la réponse, j'ai pas mal à faire avec mon propre forum ces temps ci. ]


Arcam regarda Lysia, perplexe. Elle savait se défendre ? Même si c'était le cas, il n'avait aucune envie qu'elle ait besoin de le faire par sa faute. Puis elle se leva et quitta la pièce.

Il n'avait pas bougé, pétrifié. C'était allé si vite ! C'était mieux pour elle, se répétait-il. Et puis, il ne la connaissait qu'à peine, quelle importance ? Sauf que le nœud qu'il avait dans l'estomac ne voulait plus disparaitre. Il allait faire quoi ? Devenir comme Aelene, complètement renfermé, hermétique aux autres ? C'était facile d'en rester là tant que l'on était rejeté, mais Lysia l'avait accepté, elle, même en sachant ce qu'il était. Alors pourquoi cherchait-il des excuses ? Il avait peur de quoi ?

Dans un sursaut de prise de conscience d'il ne savait trop quoi, il se leva précipitamment et courut à la porte.

" Lysia ! "

Il avait crié avant même de la distinguer dans la foule. D'ailleurs, elle était peut-être déjà partie et il ne la reverrait plus... Cette idée le rendait malade. Il scruta la rue jusqu'à ce qu'il l'aperçoive. Elle était encore là et elle regardait vers l'auberge. Elle... l'attendait ? il aurait aimé que ce soit le cas, même s'il en doutait.

En quelques pas, il la rejoignit et, plantant son regard dans le sien lâcha d'une voix peu assurée :

" Je suis désolé. Nous avons... J'ai vécu trop longtemps à l'écart du monde pour me rendre compte de la chance que j'ai. "

Il se reprit un peu et son inquiétude fit place à un sourire soulagé, soulagé de l'avoir rattrapée à temps :

" Je n'ai aucune envie que tu t'en ailles. "

Voilà, c'était dit, et ça lui faisait le plus grand bien. Un poids s'envolait de ses épaules. D'ailleurs, c'est seulement à ce moment qu'il se rendit compte qu'il avait totalement oublié sa blessure. Elle n'était pas grave, certes, mais il fallait qu'il la désinfecte. Qu'il se trouve une autre chemise, aussi, parce que sa cape laissait désagréablement passer l'air glacial. En fait, il réalisa que Lysia la lui avait fait totalement oublier : il s'était inquiété pour son frère, certes, mais ensuite, ses discussions avec la jeune femme avaient pris le dessus.

Il continua néanmoins à sourire, il ne voulait pas l'ennuyer avec ça :

" J'ai une bière à finir que je partagerais volontiers... "

Si elle refusait... Mais il ne voulait pas l'envisager. Pas maintenant.

Hrp: Moi aussi j'ai du retard, j'ai repris les cours >.< Mon texte est pas terrible, désoéle! Passe le lien de ton fo par mp =]

" Lysia ! "

Elle l'apperçu une fraction de seconde, puis le chercha activement du regard. Enfin il apparu, se dirigeant en hâte vers elle. Il l'avait rejoint... Elle sourit discrètement, puis reprit un regard contrarié. Il l'avait rejeté, alors pourquoi revenait-il maintenant? Elle lui lança un regard interrogateur, auquel il répondit par une phrase simple et pourtant tellement importante aux yeux de la jeune fille :

" Je n'ai aucune envie que tu t'en ailles. "

Elle lui adressa un grand sourire, puis leva les yeux une fraction de seconde vers la fenêtre de l'auberge. Plus personne. Elle reposa son regard sur celui d'Arcam, et écouta sa seconde réplique.

" J'ai une bière à finir que je partagerais volontiers... "

Et cette blessure à soigner, effectivement. Mais elle voulait s'assurer de quelque chose avant. Pouvait-il quitter son frère et sa soeur, ne serait-ce que quelques heures pour passer un peu de temps en la compagnie de la jeune fille? Ce serait lui demander beaucoup, et elle le savait. Mais pourtant, elle ressentait le besoin de le savoir. Elle posa une main sur la blessure du jeune homme, et s'aperçut à quel point elle était froide. Il fallait la nettoyer, c'était une évidence. Mais certainement pas dans cette auberge miteuse. Elle se détourna d'Arcam, réfléchissant activement. Où pourraient-ils aller pour être tranquille... Et, mieux encore, soigner avec efficacité l'entaille du jeune homme. Elle posa les yeux sur l'étroite ruelle qui s'offrait à eux, puis se retourna vers son compagnon, tout en souriant. Lui en voudrait-il de l'obliger à faire un choix? Elle en aurait le coeur net bientôt :

- Ne restons pas dans cette auberge, elle est bien trop sale, et nous ne trouverons jamais le nécessaire pour nettoyer ta blessure.

Elle jeta un coup d'oeil à la fenêtre de la chambre d'Aelene et de Calym, et continua :

- Je connais une petite prairie où on pourra être au calme.

Elle lui prit la main avec douceur, et attendit qu'il se décide. Ce ne serait juste pour quelques heures... Pour finir la nuit tranquille, voilà tout. Elle doutait fortement qu'il accepte. Peut-être trouverait-il une alternative? Elle n'en savait rien. Elle espérait seulement. Et d'un autre côté, elle s'en voulait de s'interposer entre lui et son frère et sa soeur. Elle n'avait aucun droit de faire cela. Et pourtant, elle l'avait fait. Une vague de remords s'empara d'elle, qu'elle repoussa avec vivacité, fixant son regard sur celui d'Arcam.

- Tu peux aller chercher ta bière!

Elle rit doucement, puis attendit calmement qu'il fasse un choix. Elle savait qu'elle ne lui en voudrait pas si il déçidait de rentrer dans l'auberge au lieu de partir avec elle. Aelene et Calym étaient sa soeur et son frère... Il ne voulait certainement pas s'en séparer. Alors elle ne lui en voudrait pas.

Le regard qu'adopta Arcam lorsqu'elle lui proposa de s'éloigner de l'auberge lui fit bien comprendre qu'il ne voudrait pas. Elle ne dit rien, attendant qu'il lui donne des excuses. Qui étaient plutôt plausibles d'ailleurs; ou seulement bien tournées. Elle acquiesça d'un signe de tête, marquant le fait qu'elle comprenait. Mais elle ne comptait pas le rejoindre dans l'auberge. Dormir dans la rue ne la dérangeait plus. Elle jeta un coup d'oeil à la lune; la nuit était déjà avancée. Elle ne dormirait sans doute pas du tout. Elle posa son regard sur la main du jeune homme qui se retira de la sienne, puis releva les yeux sur Arcam. Elle hésita un instant, puis finit par secouer la tête négativement. Elle lui adressa un triste sourire tout en déclarant :

- Pardonne-moi Arcam.

Puis elle se détourna de lui, et s'éloigna en marchant, le regard rivé devant elle. Ses jambes tremblaient légèrement; elle aurait aimé courir. S'enfuir, en quelques sortes. Mais elle n'osait pas. Elle sentait déjà des larmes envahir ses grands yeux noirs. Elle avait été idiote. Devait-elle faire demi-tour? Son coeur s'accéléra fortement, la forçant à s'arrêter. Elle baissa les yeux sur le sol, sentant ses cheveux bruns contre son visage refroidi par la fraicheur de la nuit. Elle reprit sa marche, et ne pu s'empêcher de courir. Seuls les bruissements de ses cheveux flottant au vent étaient réels pour elle.

Hrp: on s'en refait un Tu fais? Moi? Où?