Spes
Prénom : Spes
Nom : Thal
Âge : 20 ans
Sexe : Masculin
Race : Demi-Drow
Particularité : Spes est père d'un gosse de six ans, Laesi Diem, qui possède trois quarts de sang drow pour un quart de sang humain. Et quoi de plus rare qu'un homme qui fut enceint ?
Notons aussi sa particularité physique qui illustre fort bien ses tourment, à savoir l'alternance de sa peau entre le noir et le blanc. Impossible de dire si elle est maculée de l'une de ces couleurs sur fond de l'autre... Sûrement est-ce une dualité sans fin.
Alignement : Neutre mauvais
Métier : Assassin, ou tueur, selon les goûts.
Classe d'arme : Spes sait fort bien manier les petites lames (poignard et dague) comme les plus nobles (rapière). Il a plus ou moins laissé tomber le maniement de l'arc, pour se consacrer à l'apprentissage magique minimum pour survivre.
Offensif & Magie
Équipement : Contre ses hanches se balancent un poignard effilé, trois dagues, ainsi qu'une rapière. Cette dernière a beaucoup vécu, ayant été brisée puis ressoudée sans que sa solidité n'en fut affectée, ce grâce à une petite intervention magique.
Il lui arrive d'emporter avec lui son arc, par mesure de précaution, mais il est fort rare que ce dernier lui soit d'une quelconque utilité. Sauf si l'on considère qu'il est intéressant d'attirer les voleurs. La parure du félin brille aux yeux des chacals... L'arc en question fut taillé au cœur d'un arbre rare au bois d'une noirceur sans pareille. Les flèches, elles aussi de conception Drow, sont contenues dans un carquois en peau translucide, laquelle n'est pas sans évoquer celle des prisonniers du Puy.
Jadis, Spes portait une fine cotte de maille qui lui sauva la mise a plusieurs reprises sans pour autant lui épargner tous dégâts, tant et si bien qu'elle finit par rouiller sous les assauts répétés de ruisseaux de sang. Spes n'en retrouva jamais de semblable. Peut-être n'a-t-il guère cherché...
Description physique : Jadis, Spes fut une jeune fille dont la noirceur des yeux surpassait en beauté l'argent de ses cheveux coupés courts. Il n'en est plus rien car, sous les soins experts d'une sorcière, le jeune Demi changea de corps.
Ainsi Térébantine, au cours de l'opération, transféra-t-elle l' âme et l'esprit de Spes dans l'enveloppe charnelle d'un Drow mâle de son âge, lequel avait été choisi avec soin.
La décision concernant le sexe avait été rapide, Spes ayant souffert dans l'enfance d'appartenir à celui que l'on dit faible. Cependant, opter pour la race Drow ne fut pas la décision de Spes à proprement parler. Du moins, pas du côté humain de Spes, le côté Drow espérant ainsi vaincre tout à fait, éradiquer son "ennemi"... Cependant, le Drow échoua dans son entreprise. Et sous le regard compatissant de la lune, la peau du jeune drow nouvellement habité se vit maculée de taches blanches, tandis que ses yeux s'éclaircissaient...
Un visage dessiné en amande qu'encadre une volée de mèches couleur de bois brûlé, un nez à l'arête droite et un regard lumineux d'un bleu trouble, voici ce que l'on retient de prime abord. Quoi de plus ? Spes est imberbe, sa respiration brève et rapide, ses réflexes prompts. Il exécute le moindre de ses mouvements avec une grâce et une précision silencieuses.
Quant à sa voix, elle semble légèrement farineuse, râpeuse, mais terriblement douce. Ses intonations sont si suaves et délicates qu'elles laissent à penser que Spes est incapable de crier, que le murmure est son ton naturel.
Son corps maculé, il ne le soustrait plus tellement aux regards. Peut-être le verrez-vous vêtu d'une chemise très légère, sûrement de soie fine, ainsi que d'un pantalon très ample, serré aux chevilles ou en-dessous des genoux. Il ne porte plus de noir ni de blanc, optant pour des tons pourpres, ocres, cobalt ou absinthe. Parfois, il arbore des motifs ou des carreaux.
Mais pour Spes, qui vit de nuit, il n'est nullement gênant de ne s'envelopper que d'un drap léger.
Description mentale : La frontière entre ce corps qu'il a volé et la Terre ne lui apparaît pas nettement. Et, lorsqu'il se fond parmi les ombres, il s'enivre, il en perd conscience. Sa peau devient cette pellicule de poussière sur les murs, ses cheveux un souffle de vent sur sa nuque. Il pourrait alors, de sa main, caresser son bras, et croire effleurer celui d'un autre.
Spes est double, incessamment tiraillé entre des désirs contradictoires. S'il réfléchit à ce qu'il fait, ceux qu'ils tuent, il en vient à se haïr. Cependant, il ne s'arrêtera pas, pour la simple raison que, lorsque l'
autre, le Drow, aura repris le dessus, il ne réfléchira plus, et la soif de sang se fera incontrôlable. Il cohabite avec lui-même...
Cependant, ces deux parties de son être ne sont pas aussi tranchées et, s'il arrive à Spes de se "décaler" de l'Humain vers le Drow à la manière d'un Sombre dont les yeux se teintent d'écarlate, le plus souvent il s'opère un subtil mélange entre les deux parts. En somme Spes est versatile, changeant et imprévisible.
Voir un sourire heureux se dessiner sur ses lèvres est d'une rareté surprenante. Pourtant, Spes ne vit pas seul. Il fréquente, du fait de son métier, un certain nombre de personnes aux profils inhabituels. Il s'est accoutumé à leur sautes d'humeur comme à leur froideur ou leurs meurtriers caprices. Du fait, il n'est pas en reste. Spes leur paraît en retour renfermé, lointain, inaccessible peut-être. Il parle peu, et ses sourires malsains à peine esquissé cachent mal son plaisir de faire le mal, lorsqu'il est Drow.
Il ne leur a pas laissé le loisir de remarquer ses fragilités. Capable d'hésiter au possible, il s'effondre parfois magistralement, abandonnant toute force.
Spes apprécie les plaisirs simples, tantôt ceux que lui offrent la nuit, la chaleur d'un feu ou la douceur de couvertures, tantôt le goût du sang entre ses lèvres closes. Il est capable d'aimer, à commencer par son jeune fils que, paradoxalement, il semblerait parfois délaisser.
En proie à de constants doutes, par-dessus tout, Spes a peur. L'angoisse glace son sang et guide ses pas. Il cherche à se fuir, à perdre conscience, devenir objet mouvant.
Histoire :[Spes sera considéré, pour la clarté et des facilités d'accords orthographiques, comme masculin tout au long de l'histoire. Cependant, s'il cachait avec brio sa féminité jusqu'à son opération, il n'en était pas moins une jeune fille.]
La mère de Spes était une mercenaire drow, adepte de sang frais de telle sorte qu'elle passa des années sur les routes, pillant et violant. Un soir d'automne, alors qu'elle traversait une épaisse forêt avec une poignée de compagnons, elle fut prise de violents vertiges. Leur ayant intimé de faire halte, elle s'écarta pour la nuit, une bouteille dans chaque main.
Spes naquit tel un chiot. Sa mère, ivre morte, se leva presque aussitôt qu'elle fut libérée, maudissant sa négligence – habituellement, elle usait de plantes abortives. Elle jeta un ultime regard au nourrisson... oreilles en pointes, yeux sombres, s'il ne criait pas, il respirait néanmoins.
Sa peau, étrangement, était maculée d'un étrange entrelacement de rose chair et de noir.
Le fracas d'une bouteille éclatant contre un tronc retentit un peu plus loin, tandis que la Drow disparaissait parmi les arbres.
Le nouveau né serait très rapidement mort si sa présence n'avait été perçue par une créature à l'ouïe aiguisée. Ce fut un elfe Sylvain, un aveugle, qui s'approcha pour le recueillir. Par un coup du sort, il possédait quelque savoir et put sauver l'enfant.
Les années passant, il l'éleva, lui transmit toutes les miettes de savoir qu'il est possible d'assimiler en cinq ans de vie. Spes savait parler, écrire et lire, vivre au cœur des bois.
Mais Spes changea. A vivre avec cet ennemi naturel, avec cette haine dormante profondément ancrée dans tout son être, il devint violent. Il apprit à tromper les sens de son père, jusqu'à ce que celui le découvre un beau jour occupé à dépecer un ocelot. Les effluves de sang corrompaient la pureté de l'air.
L'elfe en frémit de colère et, le ton allant croissant, il en vint à gifler l'enfant. Sous le coup, les prunelles de Spes se rétractèrent, révulsées, écarlates. Il leva le couteau dégouttant des fluides du chat sauvage. Cela ne dura pas. L'objet chuta, glissant hors de ses doigts tremblants. Spes se leva et s'enfuit.
Il entendit la voix de l'elfe chargée de crainte puis d'une douceur coupable. Une détresse immense envahit alors Spes, qui n'interrompit pas sa course pour autant.
Deux semaines plus tard, il franchissait les portes de la capitale, Diantra la belle, les pieds en sang. Un infâme amertume lui collait au ventre. A voler pour vivre, il sombra peu à peu dans les bas-fonds, les lieux encore un peu protégés de la garde. Spes ne devint rien de plus qu'un gosse paumé, errant parmi les bandes des ruelles glauques.
Il n'avait pas dix ans cette nuit-là. Lorsqu'un vieux s'approcha de lui, le souffle rauque. Spes se retrouvait coincé parmi des décombres, au fond d'une impasse. Son sang entra en ébullition, il perdit la tête. Ivre de violence, il s'empara d'un bâton et frappa, frappa encore. Des larmes de rages enflammaient sa peau sur leur sillage, roulant jusqu'à son menton, chutant sur sa poitrine osseuse.
C'est alors qu'il sentit une main sur son épaule. Ferme, osseuse, ridée aussi et une main de femme, vit-il en faisant volte-face. Il ne l'avait pas entendu descendre du toit. Elle lui fit cadeau de son nom.
Surmontant la haine et la stupeur, un désespoir abyssal le submergeant, Spes lui rendit la pareille. Alors un rire fluet s'éleva de la carcasse courbée, grinçant jusqu'aux toits. Elle partit et le laissa seul, en proie aux ténèbres.
Deux semaines plus tard, Spes, d'une maigreur à faire peur, volait sur un marché. Poursuivi, il s'abrita sous un pont le temps de reprendre son souffle. Une ombre subite lui dévora le soleil. Il leva la tête pour découvrir un homme imbibé au possible, qui l'interpela. Spes demeura muet. L'autre s'approcha, s'emparant d'un bâton. A sa ceinture, un poignard, qu'il jeta dans la vase aux pieds de l'enfant tétanisé. Ce avant de se ruer sur lui.
Spes n'osa pas toucher la lame, jusqu'à ce que l'homme ne le frappe et qu'il ne s'écroule. Il tendit un bras tremblant ; un pied lui écrasa la main. Mais la douleur ne parvint pas à l'arrêter. Ses doigts glacés rencontrèrent enfin l'arme.
Son cœur pulsait dans sa tête, tandis qu'il levait vivement le bras, poignard en main. Un nouveau coup lui roidit l'échine. L'homme, soufflant et ahanant comme un bœuf, était tombé à genoux, sans s'interrompre pourtant dans sa sinistre besogne.
"Les jambes, ce n'est pas vital, ce n'est pas vital", se répétait l'enfant, abruti de peur et de douleur.
Puis le poignard s'enfonça dans la chair. Un filet de sang noir jaillit au son d'un cri étouffé. Détachant son regard de ce spectacle à vomir, Spes rencontra trois silhouettes. Il reconnut parmi elles la femme de la dernière pleine lune.
Ils l'emmenèrent, le nourrir, l'installèrent dans des combles crasseuses mais sèches, où se trouvaient un matelas et une arme.
Spes vécut chez Auln qui fut son maître d'armes. Cet Elfe taillé à la truelle était devenu assassin de métier. Lorsque le Demi-Drow eut une petite douzaine, il l'emmena avec lui. Spes lui passait des outils ou faisait le guet, généralement. Mais plus le temps passait, plus Auln prenait de risques avec lui.
A douze ans et demi, Spes commit son premier meurtre prémédité. Il ignorait tout de la victime, un homme adulte, si ce n'est qu'il avait les cheveux encore roux. Cela valait mieux, lui avait-on dit.
Lorsque Spes entrait dans une masure qui n'était sienne, il perdait doucement la raison. Ses taches sombres l'engloutissaient... Son esprit humain se rangeait en retrait, laissant toute liberté à la soif de sang du Drow.
A chaque fois que, durant le jour, il manquait reculer, son tuteur – ou plutôt, ses tuteurs consécutifs – le poussaient en avant. A quatorze ans, Spes allait seul. Marionnette vide de vie, plus pâle que la lune, il affrontait son insomnie, délaissant un lit gluant de sueur.
*
Spes avait débouché hors du conduit d'aération de la cheminée. La chambre était dénuée de fenêtre. Il exécuté une dernière reptation sur ses coudes douloureux, puis il se redressa, sa silhouette cambrée projetant une ombre noirâtre sur la mur opposé. La victime dormait et Spes pouvait entendre son souffle calme et profond.
Alors que, presque assis sur le bord du lit, il portait la main à son poignard, la lumière envahit la pièce. Aussitôt, Spes bondit en arrière, clignant vivement des yeux.
L'adolescent qui se trouvait là s'était redressé, plaqué dos au mur, la main sur la poignée de la lampe à huile. Comme Spes s'approcher de nouveau, il posa l'objet sur la commode pour mieux voir son assassin. Mais il ne put soutenir le regard du jeune meurtrier, ne serait-ce qu'une seconde, et ses yeux verts glissèrent sur le sol.
Cependant, il ne tremblait ni ne pleurait. Il tenta bien de reculer quand Spes posa un genou sur le lit, mais il était coincé contre la pierre glaciale de la paroi. Il ne bougea pas lorsque la lame se posa sur sa gorge.
Étrangement, Spes hésita. Ce n'était pourtant ni l'endroit ni le moment pour se laisser aller à de telles faiblesses d'âmes. Mais il ne sentait pas les pulsations habituelles de son corps, ce désir Drow de tuer. Il percevait seulement les battements de cœur précipités du garçon.
« Pourquoi me tuer ? » La voix était rauque.
Spes ne sut quoi répondre. Il eut un sourire dénué de joie.
« Et pourquoi pas ? » Le visage qui lui faisait face était d'une pâleur mortelle.
« Tu es seul.
- Ne te perds pas à supposer des trucs pareils.
- Si tu tues sans raison tous les gens que tu croises...
- Ton nom, c'est quoi ?
- Atmyr.
- Si je te ne tue, d'autres le feront. L'un de tes serviteurs, ou un autre, a mis du poison dans l'eau de la cruche qui est près de ton lit. D'ici, je reconnais l'odeur.
- ... » Ils attendirent. Avec une curiosité toute scientifique, Spes appuya un peu la lame. Une goutte de sang perla. Cependant, cela ne déclencha en lui aucune des réactions qu'il en venait maintenant à espérer.
Alors il glissa avec vivacité la dague dans sa ceinture, saisit le poignet frêle et bondit sur ses pieds. L'autre tomba. Agacé, Spes le releva, le souleva par les aisselles et le poussa dans le conduit.
« Passe devant. Ça coince, parfois, mais t'as les épaules tombantes et tu pèses rien. Alors tu devrais glisser pas trop mal. » La respiration d'Atmyr se fit rauque et d'autant plus précipitée.
Ils parvinrent dehors. Sur le pavé, accroupi au sol, Spes écrivit sans quitter l'autre du regard. Le jeune aristocrate, adossé au mur, ne bougeait absolument pas. Sous la lumière grise de la lune, ses cernes paraissaient d'autant plus creuses, ses os saillants. Il semblait plus maigre encore que Spes.
Le Demi glissa le pli sous une porte cochère, quelques rues plus loin. En un éclair, cynique, il enfonça ses ongles dans la main droite du garçon qui l'avait suivi. Sa résistance fut vaine, l'assassin lui trancha un doigt.
Alors qu'il mordait violemment sa main, accroupi à peine plus loin, Spes enfonçait l'auriculaire dans la serrure.
« M'en veux pas. Maintenant, pour tout le monde, t'es mort. » Atmyr lui lança un regard chargé de haine.
Spes ne s'approcha pas de lui. Il partait. Le jeune nobliau hésita, aveuglé par la douleur, la colère. Ce ne fut lorsque le jeune assassin disparut que son désir lui apparut clairement. Il voulait suivre Spes.
Lui qui mettait sa vie en danger pour lui, qui paradoxalement l'avait sauvé. Qui lui laissait le choix.
Ils vécurent plusieurs mois ensembles, Spes en tête qui décidait de tout et qui le protégeait, Atmyr marchant dans ses traces, tachant de taire ses plaintes. Les sentiments qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre étaient complexes, mais nullement amoureux. Spes, au yeux du garçon, était de sexe masculin. Et c'était un elfe.
Il ne le détrompa jamais.
Un soir d'automne, alors qu'ils traversaient une épaisse forêt, Atmyr fut pris de vertiges. Il s'écarta de Spes sans lui faire signe.
Spes s'aperçut vite de son absence. Il retourna sur ses pas pour le chercher. Mais, excepté quelque hululement, il ne percevait aucun bruit. L'inquiétude s'empara de lui.
Il lui sembla alors qu'au loin, parmi les bosquets de ronces, filaient de furtives ombres.
Spes eut beau chercher Atmyr, il ne le retrouva pas.
Jamais.
[Début des Rps]
Spes, se sachant toujours poursuivi par les assassins de sa guilde, entreprit de s'éloigner tant que possible de Diantra. Il erra, tachant de retrouver quelque espoir. Ayant presque toujours été rejeté, du fait de sa bâtardise, il trouva en la rencontre d'une herboriste une mince promesse d'avenir. En effet, celle-ci atténua quelque peu son mal-être psychologique.
Cependant, il demeurait incapable de livrer bataille à son côté Drow. Fréquemment, il se "décalait", changeant de monde, parodie édulcorée des Drows changés en furie sous le coup de la rage. Placé dans des situations qui attendaient de lui une certaine conduite par rapport à son côté Humain, ou à l'inverse le côté Drow, Spes se comportait de manière saisissante.
Ainsi céda-t-il et, serrant les dents, prit-il la route d'Alëandir la glorieuse afin d'intégrer un nouveau cercles d'assassins. Il tuerait encore. Il n'avait pas quinze ans, le corps d'une jeune fille de treize et, s'il se faisait sans trop de mal passer pour un garçon, il n'en paraissait pas plus fort ni moins frêle.
Afin d'intégrer la sombre guilde, il lui fut demandé de faire ses preuves.
Il accepta.
Ce fut en état de Drow qu'un demi, tout comme lui,
Ashitaka, le rencontra. Alors que Spes était sur le point de transpercer un elfe endormi de sa lame, il intervint. Le jeune assassin n'allait pas être capable de lui opposer éternellement un masque de haine glaciale...
Mais, si Ashitaka empêcha Spes de commettre ce nouveau meurtre, puis qu'il le sauva du courroux des Sylvains à l'aube pointante, il ne fut pas capable de le garder auprès de lui. Il n'avait pas eu le temps de percer tout à fait à jour la division de l'adolescent, ne put comprendre.
Alors que Spes sentait le drow le surpasser une nouvelle fois et prendre le contrôle de leur corps commun, il murmura quelques mots à l'adresse du demi... "Je... Ashi... Je dois partir. Pour peu de temps. Je... je pourrais te retrouver dans trois semaines ? Au nord des plaines d'Atral... près du château de Serramire ?"
A peine une seconde plus tard, de toutes autres pensées le traversaient.
Non, je n'irai pas là-bas, crétin. Je partirai pour les contrées Drow, terres de mes ancêtres, et j'y retrouverai notre père ou notre mère. Et alors, je trouverai le moyen de te tuer. Il fuit plus qu'il ne quitta Ashitaka, et ce sans se retourner. Sans nulle tergiversation, il fonça droit en direction du Puy, loin au-delà de milles contrées inhospitalière.
A la faveur de la nuit, il s'approcha d'un campement. Ses doigts habiles, frémissant, firent glisser la boucle d'étain. Un souffle tiède au parfum de paille parcourut son cou. Il n'attendit pas pour monter en selle, faisant claquer les rênes. Le destrier partit au galop.
Deux jours plus tard, il déroba une monture plus fraîche qui semblait l'attendre. Attaché à un arbre dans une clairière elfique, elle paissait paisiblement. Son cavalier retrouverait à la place un destrier bai roidi de sueur.
Le soleil au zénith, Spes pénétra dans les Terres Stériles. Une heure plus tard, il chuta. Surmontant la douleur, il se traîna sur une lieue, en direction de maisons qu'il lui semblait apercevoir.
La réalité s'avéra plus amère, ces habitations n'étant autre que les Ruines de Nisetia.
Nisetia, Térébantine, la mort peut-être et la peur et le sang, autant de mots dont il ne se déferait plus jamais.
Spes, en proie à la noirceur de son âme, conclut un pacte qui l'obligerait à se rendre sur l'île de Meca neuf mois plus tard.
Ayant quitté la sorcière au hachoir, Spes se mit en quête de drogues qui pussent remplacer le pavot auquel il avait goûté. Lorsqu'il pénétra dans le Cimetière des Obscurs, le voile de la nuit recouvrait la terre. Il devait rencontrer en ces lieux un Drow qui deviendrait le père de son fils.
Cet enfant, c'était le Drow en lui qui l'avait voulu, désireux d'un esclave, d'un miroir ou, peut-être, d'un prolongement de son corps trop étroit.
Jeune femme atrocement blessée, perdue, Spes avait perdu tout repère. Dès lors, une seule idée l'obséda. Il devait retrouver Ashitaka, le seul qui, lui semblait-il, ait jamais réussi à faire taire son côté Drow avec tant d'assurance, au moins pour un temps.
Spes prit donc la route des Plaines d'Atral. Par bonheur, il retrouva celui qu'il cherchait. Étrangement, cela ne le satisfît pas tout à fait. Peut-être la présence d'un jeune homme, fort proche du demi-drow, y était-elle pour quelque chose ?
Neuf mois plus tard, Spes, contraint par le pacte scellé au prix du sang, prit la mer pour l'île de Meca. Il accoucha sur le navire même, en présence de nombreux esclaves et d'une jeune maître coq du nom d'Azadeh qui lui sauva la mise.
Lorsqu'il débarqua, il n'était guère en bon état, psychologique comme physique. Dans ses bras tremblants, il portait le nourrisson, ses doigts glacés contre cette peau neuve elle aussi maculée de taches. Ses pas le menèrent aux ruelles les plus glauques. Ignorant de celui qui le suivait, il chercha un corps. Son nouveau corps. Cependant, Ashitaka ne l'avait pas attendu pour le laisser se détruire à sa guise. De toute sa force, il intervint.
Le transfert eut tout de même eu lieu, cette nuit-là. Et, sous les yeux horrifiés de la sorcière, des plaques blanches, telle une gangrène instantanée, envahirent le corps. Elle luttèrent contre la noirceur, se répartissant très inégalement. Elle pulseraient encore durant un certain temps.
Spes parla à Ashitaka. Ils vécurent ensemble, durant un certain temps. Puis le jeune Demi débuta, seul, un périple qui le mènerait jusqu'au grand temple de la déesse de la mort, Tari. Là, il fut initié aux mystères de la magie. Il s'appliqua tant et si bien qu'il en vint à maîtriser un unique sort. Il devint capable de plonger une partie de son être dans un état fort proche de la mort. Cela semblait voué à devenir une arme de plus qu'il utiliserait contre lui-même. Jamais il n'eut l'idée de s'essayer à appliquer ce sortilège sur autrui, mais il est évident que ce ne serait adapté ni n'aurait l'effet voulu.
*
« Laesi, Laesi Diem, j'aimerais tant pouvoir te dire que je n'ai plus peur. » L'enfant avait six ans depuis le printemps. Serré contre son père qui, de sa main, parcourait ses cheveux d'une lumineuse blancheur, il sanglotait en silence. Laesi Diem, littéralement, le jour qui blesse. Spes avait choisi "blesser" avant même sa naissance, mais l'idée de lumière dévorante s'était imposée par la suite à son côté Humain.
« Mais je ne veux pas que vous me laissiez. Je serais si seul. » Les grands iris pourpre cendré de l'enfant se levèrent vers les yeux bleus.
« Je ne veux pas être seul. » Sa petite voix boudeuse, hachée, avait de quoi attendrir. Avec douceur, Spes lui lécha la joue. Puis un rire léger, terrifiant, monta de sa gorge maculée de taches. Il se détacha de son fils, se retourna. Avança dans le brasier.
Le gosse tomba à genoux, fasciné.
Laesi Diem
- Spoiler:
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Comment trouves-tu le forum ? : Si après un an et demi j'y suis encore, c'est qu'il ne doit pas être trop mal ;)
Comment as-tu connu le forum ? : Je m'auto-cite : "Par recherche dans un top forum." Ah, j'étais déjà pragmatique, dirait-on.
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