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 [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]

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MessageSujet: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeVen 27 Nov 2009 - 21:35

    Avez-vous déjà joué au fameux et ô combien célèbre jeu du "Je n'ai jamais ..." ?

    Les règles sont très simples, et n'importe quel illettré de première zone comprendrait les bases puisqu'une fois de plus, tout tourne autour de la bouteille. Les participants forment une joyeuse ronde de gais-lurons, et chacun a son petit godet d'alcool prêt à être débusqué en moins de temps qu'il n'en faut pour dire "Kassandra la catin" ou "Sevaeria la greluche". Le premier participant a juste à lancer une première vérité, qui consiste à conter une chose qu'on n'a clairement jamais faite dans notre vie. Ceux présents et qui ont, eux, déjà fait cet acte se doivent de boire en bonne et due forme leur verre. Le participant le moins soûl gagne, évidemment, tandis que le premier qui s'effondre lamentablement comme une lavette par terre est la risée de tous ses confrères de jeu. Ce jeu était particulièrement puéril et stupide, et c'était sûrement pour ca que la rouquine adorait ce genre de passes-temps.

    Et s'il avait fallu lancer une partie à ce moment précis, la jeune et diablement jolie pirate dirait qu'elle n'avait jamais aimé participer à des lynchages publics. Certes, il était toujours bon de mettre en avant les apparences, et de jeter une ou deux pierres coupantes sur des minables exposés à la foule rutilante et barbare, mais ca n'était pas vraiment sa tasse de thé. Ce genre de facilités... Ligoter une victime et l'offrir, impuissante et faible, à des dizaines de pochtrons malotrus qui pouvaient faire tout ce qu'ils voulaient, que ce soit uriner dans la bouche des pauvres condamnés ou leur faire gober par le nez leurs propres immondices, c'était d'une simplicité tellement déconcertante qu'elle en était ennuyeuse. Où était le défi, l'amusement, la difficulté ? Il n'y en avait pas. C'était insipide, et généralement, les plus tarés appréciaient particulièrement ces défouloirs où plus on agissait de manière idiote, mieux c'était et plus la foule acclamait, hurlait dans un concert d'euphorie malsaine.

    Ce à quoi elle avait donc assisté en plein milieu d'après-midi relevait pour elle de la violence gratuite et sans aucun intérêt. Après avoir passé cependant plusieurs heures à contempler sans ciller les dits responsables du plus grand festin de viande et de bois grillé de tout le continent en prendre pour leur grade plus que de raison - les vices allant du plus banal jet de cailloux aux sévices les moins regardables -, la rouquine rentrait de sa leçon de choses fort instructive, la tête remplie d'images et d'idées. Elle n'avait pas totalement perdu sa journée, car observer ces soi disant coupables se faire littéralement insulter et accuser de tout et n'importe quoi lui avait fait songer aux circonstances des étranges incendies de Meca. Brûler tous les bateaux de marchandage n'était pas une tâche qu'on accomplissait avec une main occupée à se triturer le nez, il fallait forcément une belle tripotée de complices, et en admettant cela, l'Amiral devait veiller au grain et éviter ce genre d'incidents qui n'avaient jamais eu lieu auparavant. Et là.. Même pas trois semaines après la nomination du nouvel Amiral, les dégâts se faisaient ressentir, signe d'un relâchement. Ou d'autre chose.

    Et c'était ca qui tracassait la jeune femme, qui d'un pas nonchalant, traversait le port pour atteindre la passerelle et le pont du flamboyant - permettez-moi l'expression - navire, l'Onirique. Deux ou trois mousses la saluèrent avec enthousiasme, ce à quoi elle répondit avec un naturel déconcertant par des sourires enjôleurs. Et quand elle leur posa la question acidulée du : "Vous n'auriez pas vu le capitaine par hasaaaard ? ", on lui répondit ...

    « Bah il est dans sa cabine ma p'tite ! Pourquoi, t'vas d'jà réclamer ta payer ? »

    Un concert de rires, auquel Kassandra ne se permit qu'un petit " Hihihi " minaudant. Il était de bon ton pour le moment, que l'équipage entier la prenne pour une fillette sans cervelle à qui on devait tout apprendre. Les choses allaient être plus faciles, et avec ce rôle, elle avait déjà réussi à se mettre quelques petits compagnons dans la poche.

    Prenant la direction de l'escalier conduisant aux cales et aux diverses cabines dans un balancement provocant de hanches, la jeune recrue observa d'un regard vif les alentours, comme une voleuse craignant les gardes cachés prêts à bondir sur elle. Pas ou peu de pirates rôdaient dans les parages, beaucoup étant déjà partis se remplir la panse, abîmer leur foie déjà bien mis à mal ou vider ... Autre chose. Enfin bref, chacun s'amusait dans son coin, et il semblait que la voie était libre. Prenant soin de marcher à grands pas vers la dite cabine - la vraie, cette fois-ci et non pas un mensonge inventé par Ajilah - de ce dernier, la rouquine toqua trois fois à petits coups secs, avant d'ouvrir la porte sans même attendre un "Entrez" ou quel qu'autre signe sonore qui lui aurait autorisé à pénétrer dans le bureau de leur grand chef suprême à tous ... Kassandra n'était pas vraiment le genre à lécher les bottes du supérieur hiérarchique sauf cas de force majeur et elle n'aimait pas vraiment les protocoles ou les grandes révérences ampoulées. C'était donc tout naturellement et sans détour qu'elle referma la porte, se laissant aller contre cette dernière pour considérer le capitaine affalé en face d'elle dans son habituelle posture et empêcher d'éventuels visiteurs de pouvoir rentrer aussi librement qu'elle. Sa visite à Ajilah n'avait rien d'étonnant, car elle avait beaucoup de choses à demander à son capitaine et elle voulait voir ses suppositions confirmées.

    C'est donc tout naturellement que la rouquine modula de son petit air d'ange pur et innocent en carton-pâte la première question qui composait le long interrogatoire qui allait s'en suivre ; l'air de ne pas y toucher, par petites touches de coïncidence. Comme si elle ne venait pas du tout d'imposer sa présence. Une fois de plus, Kassandra La "Rebelle" portait bien son petit nom.

    « Tiens, vous êtes ici ! Ca m'étonne, l'Amiral devrait être de ceux qui fêtent le plus joyeusement la lapidation et la mort des responsables du brasier général de l'autre fois.. »

    Son sous-entendu était visible et à peine masqué : pourquoi était-il ici et pas dehors ? Pourquoi n'était-il pas plus virulent que cela dans sa punition contre les incriminés ? Il semblait qu'Ajilah se repaissait plus facilement qu'elle ne le croyait, chose qui la surprenait. Ca n'était pas dans la logique qu'elle imaginait.


Dernière édition par Kassandra le Mar 16 Fév 2010 - 17:49, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeVen 4 Déc 2009 - 21:30

On pouvait dire beaucoup de chose sur notre cher Ajilah. Il était un voleur, un menteur, un manipulateur même. Il se moquait d’autrui, ne se souciait pas de son bonheur et participait sans état d’âme à son malheur. Il pouvait être violent, vexant, vulgaire même. En d’autres termes, peut-être plus parlant, c’était un salopard de premier ordre. Mais, paradoxalement… Il n’était pas cruel. Bien sûr, cela dépend de la définition donnée au mot « cruel ». Si prendre plaisir à infliger la souffrance en était une, alors il ne l’était pas. Il n’infligeait pas la douleur pour le plaisir, mais pour son plaisir. C’était un moyen, pas une finalité, et toute la différence était là. Il ne prenait aucun plaisir à voir un corps devenir lentement un amas de chair sanguinolent, mais il arrivait parfois que ses objectifs l’y contraignent… Il n’allait pas pousser l’hypocrisie à dire que cela le dérangeait, mais s’il avait quelque chose à détruire, il préférait de loin s’attaquer au mental d’un homme. Les résultats étaient souvent bien plus spectaculaires. Il eut d’ailleurs une pensée pour la jeune Sendra, qui luttait péniblement pour rester elle-même dans un monde qui ne désirait qu’une chose : la faire devenir tout autre chose. Aussi se contenta-t-il de regarder la jeune rouquine avec un air neutre et proprement indifférent.

« Tu as donc une opinion si misérable de ton capitaine, Kassandra ? »

La voix n’était pas accusatrice, mais aucun sourire ne vint adoucir ses paroles assez « sèches ». Il fallait dire que la remarque l’avait vexé, en un certain sens. Il n’était pas une bête sauvage, assoiffée de sang et de violence. Il avait fait sa part du travail en leur arrachant leurs aveux - aussi factices soient-ils - et il les avait livré à une foule pour son plus grand plaisir. Bien entendu, le fait est qu’il y avait anguille sous roche… Kassandra cherchait seulement dans la mauvaise direction. Dans une bien mauvaise direction.

« Il faut croire que tu ne me connais pas encore si bien que ça. »

Bon, pour ce point là en particulier, il voulait bien plaider coupable. Il avait été plus occupé que prévu depuis qu’ils avaient quitté Erac. L’Onirique était un navire qui demandait une attention constante, tant le nombre de personnes qui y vivaient était important. Bien entendu, il n’avait pas pu s’empêcher de jouer les marionnettistes, et avait influencé la vie de sa nouvelle mousse à bord de son navire. Quelques incidents, quelques heureuses coïncidences. Toujours discrètement, et bien souvent par le biais de ce bon vieil Haer. Le chauve était un des seuls hommes sur lequel il pouvait compter… Du moins, tant qu’il faisait son boulot de capitaine. L’humain avait été de toutes les mutineries réussies, et avaient boudé celles qui avaient échoué. En vérité, c’était peut-être lui, le véritable maître du navire. Cette pensée fit sourire le sang-mêlé, qui se doutait pour sa part que le principal concerné était le premier convaincu. Jetant un dernier regard vers les cartes qui, comme à leur habitude, s’entassaient sur son bureau, il se leva et le contourna, avant de s’appuyer dessus et de braquer son regard vers Kassandra.

« J’imagine que tu n’es pas venue uniquement pour souligner ma non participation à la barbarie aveugle et sans intérêt des masses abêties, hum ? »

Son visage se fit interrogatif et attentif, alors qu’il penchait légèrement la tête et croisait les bras. Il ne pouvait pas dire que la présence féminine dans sa cabine le déplaisait, mais il aurait préféré qu’elle entame cette nouvelle partie d’une manière un peu plus… subtile. Mais les erreurs étaient le lot des humains. Il avait de la chance sur ce plan, il était un demi-elfe. D’ailleurs, Kassandra l’avait-elle appris ?
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeVen 4 Déc 2009 - 21:57

    Voilà ce qui était agaçant dans un duel : l'avantage hiérarchique. Un chef avait forcément beaucoup de moyens à sa disposition pour écraser par la victoire ses "sous-fifres", qui allaient de la simple chicanerie verbale habituelle aux diverses méthodes de harcèlement licite ou pas ; il était donc d'autant plus glorifiant pour un mousse de parvenir à vaincre, ne serait-ce que pour une des nombreuses batailles qui composaient cette guerre, le terrible capitaine du navire. Kassandra ne détestait pas les gens qui abusaient de leurs conditions, car elle savait pertinemment qu'elle-même était de ce genre là, et il aurait été stupide de blâmer une conduite qu'on adopte. Mais elle ne se laissait pas pour autant bêtement mener par le bout du nez. La rouquine avait aisément compris qu'après leur soirée d'entretien bien arrosée, Ajilah avait peu apprécié de s'être laissé amadouer par une débutante. Le réveil, rendu douloureux par le mal de crâne, avait été encore plus agaçant quand la porte avait refusé de s'ouvrir et que la rouquine avait du tourner, telle une lionne en cage, dans la cabine jusqu'à ce que le capitaine daigne lui ouvrir et lui livrer le repas. Ce à quoi elle n'avait absolument rien répondu, se passant des victuailles et sortant illico-presto de la cabine pour aller digérer ses excès de rhum et son enfermement d'une autre manière que devant le regard fier et conquérant d'Ajilah. Kassandra n'avait pas l'habitude d'essuyer ses vengeances devant le coupable.

    « Il faut dire que m'enfermer dans une cabine et me voler mes affaires ne constituent pas des actes qui me donnent envie d'apprécier le responsable et de l'estimer hautement. »

    Elle avait dit ceci d'un ton tout aussi impartial que lui, jouant avec cet aspect si étonnant de contraste par rapport à la chaleur et la tension qui avaient emprunt leurs esprits et leurs paroles il y a des semaines de cela. Ajilah l'avait vue affreusement torride, mais il devait maintenant se contenter d'une image bien plus lisse et sage de Kassandra - si sage était le mot qui convenait à une fille qui jetait des coups d'oeil coquins aux pirates du bateau sifflant avec enthousiasme la jolie Rose qu'elle exhibait au creux de ses reins -. Voilà qui était frustrant ... Et qui faisait partie de la tactique de la rouquine. Il fallait que Môssieur Ajilah soit sur sa faim et la réclame ; et ils seraient quitte.

    Elle ne releva pas son commentaire sur l'étendue de ses connaissances : elle n'évoquerait sûrement pas qu'en une soirée, elle en savait bien plus sur les faiblesses naturelles d'Ajilah que n'importe qui ici présent, le capitaine l'aurait mal pris. Son regard, rivé sur Ajilah, la trahit cependant, reflétant avec aisance ce qu'elle pensait au plus profond d'elle-même.

    « Quelle perspicacité, pour un homme qui orchestre une barbarie qu'il n'apprécie pas lui-même. En fait, je me demandais comment vous aviez fait pour rester aussi ... passif alors que la moitié des bateaux de la Marine prenaient feu. Voilà qui est bien suspect pour quelqu'un de votre rang. On croirait presque que vous cautionnez ce qui est arrivé. Marrant, non ? »

    Sa notion du "marrant" n'avait rien de marrant, en réalité : elle était cynique, et c'en était presque attachant. La rouquine se rendait plus sarcastique qu'à l'accoutumée, comme si elle cherchait volontairement à provoquer le capitaine sur son propre terrain. Une fois de plus, elle dépassait les bornes, ou du moins tendait à le faire, et ce sans une once de remord. Il en fallait bien plus pour qu'elle s'en morde les doigts.

    Dans un silence calme et court de réflexion, la rouquine croisa les bras sur sa poitrine, demeurant adossée à la porte dont elle bloquait l'accès. Une fois de plus l'échange allait être, comme qui dirait, palpitant.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeVen 4 Déc 2009 - 22:51

Voilà qu’il la retrouvait. Voilà qu’à la moindre provocation, elle sortait les griffes, prête à lui faire ravaler ses piques. Il ne put s’empêcher de sourire, secouant même la tête. Il se rendit compte que ça lui avait presque manqué.

« Ah, Kassandra… »

Il n’en dirait pas plus, du moins, pas sur ce sujet. Il avait toujours à lui faire comprendre qu’il n’avait aucune raison à s’occuper du massacre de deux pauvres gamins sans défense, déjà bien amoché par ses soins par ailleurs. Il savait que bien des gens aimaient faire souffrir, que les cris de douleur qui leur vrillaient les tympans ne faisaient rien d’autre que les exciter d’avantage. Une sorte de cercle vicieux dans lequel ils se plaisaient à s’enfoncer. Tu cris, je te fais crier, jusqu’à ce que tu arrêtes. Une logique simple et terrible, qu’Ajilah avait exploité avec… brio, il devait bien l’avouer. Kassandra avait-elle préparé son discours avant de venir le rejoindre ? Il aurait été prêt à parier que oui. Elle lui balançait au visage ses arguments un à un, avec une froide détermination, et il ne pouvait qu’hocher la tête, autant pour se moquer d’elle que pour la pousser à aller au bout de son raisonnement. Et puis il éclata de rire, tout simplement. Ses bras se décroisèrent et ses mains vinrent saisirent le bureau. Il se pencha légèrement en avant.

« Tu me connais peut-être un peu, au final. »

Il laissa le silence planer de nouveau entre eux quelques secondes, histoire d’observer sa réaction, et puis il reprit la parole, moqueur au possible.

« Commençons par le commencement, j’imagine que c’est le plus simple. » Il leva un doigt. « Est-ce que je cautionne ce qui vient d’arriver ? En quelque sorte, oui. C’est une bénédiction pour une société décadente comme a pu devenir celle de cette île. Le commerce devenu impossible, Meca va pouvoir se concentrer sur son domaine de prédiction : la piraterie. »

Du regard, il la défia de le contredire. Après tout, l’activité commerciale de Meca était assez récente, et il n’allait pas la regretter, pour rien au monde. Il leva un second doigt.

« J’orchestre un lynchage public parce que c’est le meilleur moyen de calmer la populace, tout simplement. Et puis, si tu veux tout savoir, il y a des chances qu’ils soient finalement morts des blessures que je leur ai infligées avant de les lâcher dans la fosse aux lions. »

Un troisième doigt vint rejoindre les deux autres.

« Si je reste passif ? Pas vraiment. Tu vois les cartes sur mon bureau ? Elles représentent les côtes de Soltariel. Parce que si je ne peux en vouloir aux royalistes de m’avoir enlevé une épine du pied, il est tout de même de mon devoir de leur faire bien comprendre qu’il n’aurait pas du le faire. Ydrill est la principale responsable de tout ce bordel, c’est donc ses côtes qui seront touchés en premier. Ensuite… Eh bien, ensuite, on ira dire bonjour aux restes des côtes. »

Il leva un quatrième doigt.

« Si c’est marrant ? Pour tout te dire, je m’amuse comme un fou. Le conseil doit rager de m’avoir nommé Amiral, il pensait que ce titre m’apporterait plus de paperasse qu’autre chose, et voilà qu’il a les mains liés, car Meca a les yeux rivés sur l’océan. Et c’est moi qui règne là bas, tant qu’Eris le voudra bien. »
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeSam 5 Déc 2009 - 13:50

    Ajilah était détestable quand il se savait en position de force. Il se gaussait beaucoup de tout ce qu'elle disait, mais n'en restait pas moins très calme, confiant dans ce qu'il savait déjà être comme des réponses qui devaient normalement stopper le flot des arguments perçants de la rouquine. Bon, détestable était peut-être un mot fort, car à proprement parler, Kassandra ne le haïssait pas, loin de là. Elle n'aimait simplement pas être coincée dans ce rôle où elle ne pourrait être que totalement à l'aise quand elle pourrait être pleinement provocante et entière. Or, les pirates, tous aussi différents de caractère et de vision des choses qu'ils étaient, s'accordaient toujours sur un fait : le capitaine était le capitaine, et lui tenir tête ne devait jamais durer plus longtemps que nécessaire. Une loi bien difficile à appliquer : depuis bientôt une paire de semaines elle avait appris sur le tas à rester indifférente et calme quand elle ne retrouvait plus des rubans mystérieusement disparus, quand elle se rendait finalement compte qu'elle allait devoir remplacer un camarade pour une raison obscure et jamais mentionnée, ou pire, quand on faisait sauter ses corvées sans le dire. C'était le seul bon côté en fait, mais comprendre d'où venaient réellement ces petites attaques - parfois aides salvatrices - et ne rien pouvoir faire contre cela était plus qu'irritant. Alors quand elle avait le responsable en face d'elle - du moins c'est ce qu'elle supposait avec justesse -, elle avait du mal à se retenir de demander où étaient ses bijoux.

    Elle écouta son histoire avec la patience d'une enfant douce et innocente, la candeur et les cheveux blonds en moins. C'était très intéressant de voir le pirate aussi fier et enjoué de ses propres idées, expliquant avec beaucoup de subjectivité ce qu'il pensait de tout cela. Il semblait imperturbable et immaculé de tout soupçon, et pourtant la rouquine avait la sensation qu'il se trahissait en utilisant ces mots pour en parler. Pourquoi évoquer une bénédiction ? Comme si les coïncidences existaient. C'était presque précisément ce que le nouvel Amiral de la Marine cherchait en étant revenu à Meca : le retour à la véritable piraterie. Et la chance dont il voulait se glorifier n'était que cousue de fil blanc. Il n'y avait rien de prédestiné et d'accidentel dans toute cette histoire ; clairement, Ajilah n'avait pas orchestré qu'une punition publique pour des coupables qui n'en étaient pas, il avait tout organisé, de A à Z. Restait à ce que cette idée naissante se confirme. Elle n'en avait aucune certitude et porter de telles accusations à l'intéressé pouvaient être très dangereux. Mais elle aimait le risque.

    Dans une petite toux polie, la demoiselle se désadossa du bâti de la porte, s'avançant d'un pas ou deux tout en se contentant d'observer avec indifférence les décorations sobres de la cabine, maintenant son timbre nonchalant.

    « Il y a quelque chose qui cloche. Vous l'avez dit vous-même : on ne peut jamais totalement se fier à sa chance. Il faut agir, ce sont nous et nos choix, nos actions qui font que la chance nous sourit et influe sur les conséquences. Mais quelle influence ! Ridicule. Il faut le vouloir pour que tout ce qu'on veut voir se passer se déroule. Et aucun homme n'a de bonne étoile pareille à celle que vous voudriez vous attribuer. »

    Elle ne s'était absolument pas énervée, gardant ce contrôle de son flux de parole et de sa respiration avec une rigueur presque psychotique, ses bras fermement ramenés contre elle et croisés témoignant cependant de la méfiance qu'elle ressentait quant à la défense du Diable qu'elle avait en face d'elle.

    « Officiellement, les coupables ont été punis. On n'en reparlera plus d'ici un mois. Mais vous avez eu ce que vous vouliez, et ce n'est pas une action divine qui vous a valu le grand brasier de ce soir là. Non. Je ne suis pas persuadée, à tort ou à raison, qu'étant le "héros" ! Elle dit ce mot avec une accentuation à peine masquée, relief d'une ironie mordante. preux et infaillible qui avait démasqué ces chenapans, vous ne les avez pas choisi uniquement pour cacher autre chose, quelque chose de louche. Non, vous avez forcément des preuves flagrantes, n'est-ce pas ? Tellement flagrantes que ça semble fait exprès. Mais racontez-moi, je vous prie. Tout ca m'intéresse vraiment. »

    Il y avait une effluve étrange dans ces mots, comme un parfum d'un retour de bâton tardif mais amer. La rouquine voulait indubitablement avoir raison, se montrant sûrement beaucoup trop sarcastique et irrespectueuse face à un homme. Et quel homme. Elle savait d'avance qu'elle le paierait plus tard dans les semaines à venir - d'autres de ses maigres possession disparaîtraient et à n'en pas douter, elle n'aurait plus beaucoup de répit -, mais qu'importe. Ajilah ne pouvait l'attaquer qu'à distance, et c'était bien peu face à ce qu'elle pouvait lui faire, elle en était étrangement convaincue.


Dernière édition par Kassandra le Mar 8 Déc 2009 - 23:02, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMar 8 Déc 2009 - 22:12

Tout ce petit manège l’amusait. Il était coupable, à tous les niveaux. Rien dans ce qu’il avait présenté à la foule crédule de Meca n’était vrai, mis à part une chose : le début d’une nouvelle ère de piraterie. Le fait qu’on doute de lui n’avait pas d’importance, il était désormais pratiquement impossible de prouver sa culpabilité - seul Haer le pouvait, et dès que sa confiance envers le chauve vacillerait, le souci ne se poserait plus - et le peuple l’avait cru et le suivrait. Aussi, voir sa mousse frôler les bonnes conclusions ne l’effrayait pas plus que ça, après tout il avait toujours soupçonné un esprit vif sous sa masse chevelue rousse. Mais ce qu’il trouvait franchement hilarant, c’était qu’elle arrivait à la bonne réponse en s’aventurant sur les mauvais sentiers. Un peu comme si, pour aller à l’est, elle avait pris l’ouest, mais avait finalement atteint sa destination.

« Toute cette histoire te tient vraiment à cœur, dis donc. »

Une petite remarque anodine, mais un regard appuyé, histoire de la jauger. Alors quoi, qu’est-ce qui lui prenait ? Peut-être aurait-elle aimé faire parti de toutes les manigances… ou peut-être sautait-elle sur la première occasion venue pour rappeler à son capitaine qu’elle existait encore. Comme s’il pouvait en douter, avec l’animation que sa seule présence insufflait à son navire. Il haussa les épaules, puis se détacha de son bureau.

« Pourquoi défendre ces deux rebuts de la Péninsule, dis moi ? »

Il retint de peu le « l’un d’eux aurait-il été un de tes nombreux amants ? » qui lui venait aussi naturellement que vient la soif du rhum après un certain temps loin d’une bouteille. Non, mieux valait ce soir là ne pas rentrer dans son jeu. Parce que, étrangement, Kassandra n’avait pas l’air de prendre cette entrevue comme un jeu. Rapport conflictuel avec l’autorité ? Peut-être regrettait-elle les moments passés lors de leur rencontre ? Ajilah n’aurait pas fait l’erreur de parier là-dessus, mais il avait besoin de se changer les idées, aussi rien que l’hypothèse suffisait à justifier ce qu’il allait faire. La journée avait été longue, et il avait donc autre chose à faire que se lancer dans une longue, difficile mais surement passionnante joute verbale. Surtout que l’adversaire avait l’air en forme.

« Tu me fais un peu de place, dis ? » S’écarta-t-elle ? Si oui, Ajilah passa tout simplement dans l’espace libéré. Sinon il se contenta de la contourner en lui adressant un sourire. « J’ai besoin d’un peu d’air, ça te dit de m’accompagner un peu dehors ? »

Ou l’art et la manière de passer outre tout ce qui a pu être dit. Peut-être aurait-il du la couper plus vite, histoire de l’empêcher de gaspiller sa précieuse salive, mais il trouvait trop amusant le fait d’étudier sa réaction. Il ouvrit la porte, et se tourna vers elle, esquissant un sourire.

« Les dames d’abord, non ? »

Destination ? Le pont, dans un premier temps. Ajilah voulait voir une nouvelle fois ce qu’il avait provoqué. Dans un intérêt purement professionnel, bien entendu. Et puis, ensuite, qui pouvait savoir ? Il se sentait bien d’inviter Kassandra dans une des très nombreuses tavernes de Meca. Histoire d’abolir le temps d’un soir la distinction « Capitaine - mousse ».

Ca ne pouvait pas leur faire de mal.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMer 9 Déc 2009 - 15:43

    « Tout ce qui concerne Meca me tient à coeur. »

    Elle ne voulait pas qu'il soit certain, ou même qu'il s'imagine qu'en réalité c'aurait pu être tout ce qui touchait de près ou de loin au capitaine de l'Onirique qui l'intéressait. De toute façon, la question ne se posait pas ! Kassandra n'éprouvait d'intérêt que pour tout ce qui lui arrivait à elle et à elle seule. Elle n'avait que faire des petites magouilles d'un amiral. Même si au fond elle ressentait une petite pointe d'agacement à ne pas en savoir plus que la majeur partie de la populace. Et puis c'était de SON île dont on parlait ! Pas question qu'elle reste ignorante toute sa vie de matelot !

    A sa question, Kassandra pouffa de rire, secouant la tête dans un geste qui tentait de balayer les reliefs restants de son hilarité. Elle, les défendre ? Il était loin du compte.

    « Je ne les défends pas. Qu'ils soient coupables ou pas, ils n'avaient rien pour que je leur vienne en aide. »

    Ce qui semblait signifier - presque - sans détours que Kassandra ne daignait pas se bouger le petit orteil pour quelque homme que ce soit, qu'il ait partagé sa couche ou pas ne changeant pas grand chose à la donne. A moins bien sûr que quelques espèces sonnantes et trébuchantes ou d'autres avantages alléchants ne se présentent en échange de ces dits services. Mais la rouquine était avant tout une femme d'intérêt. Passionnée, mais réfléchie et manipulatrice. Elle entreprenait et menait rondement ses affaires, veillant cependant à ce que rien n'enraye la machine à broyer les obstacles de ses ambitions. Les soucis des autres, ca n'était comme qui dirait pas les siens. Le monde tournait en grande partie autour d'elle, et rares étaient ceux qui pouvaient se joindre à ce cercle si fermé.

    La pirate garda les lèvres pincées l'une contre l'autre, suivant dans un long regard à l'oblique la silhouette masculine qui passa à côté d'elle, laissant l'air siffler entre eux avec douceur. L'ombre de sa commissure droite se chiffonna dans un sourire faible alors qu'il l'invitait à s'aérer l'esprit et le corps. Monsieur avait-il donc déjà une idée en tête ? Il ne fallut pas plus de trois secondes à Kassandra pour éluder la proposition, envisager les conséquences et accepter d'un petit hochement de menton faussement "hésitant". Comme si elle pouvait tergiverser là-dessus.

    « Ouais... Allons dehors. Mais si on pouvait éviter Haer ; il va encore me demander de récurer le pont pour la douzième fois. Enfin vous voyez de quoi je parle. »

    Il semblait que le Second n'apprécie pas particulièrement la rouquine. Ou alors peut-être était-il comme ça avec toute la bleusaille ? Dans tous les cas, la demoiselle n'avait cessé de sentir son regard inquisiteur et refroidissant sur elle à la moindre petite incartade. Pas le même genre qu'Ajilah ... Et pourtant ils avaient l'air de s'entendre. Encore un détail étrange.

    La rouquine ne patienta pas plus longtemps, tournant les talons pour passer devant le nez du demi-elfe insoupçonné, non sans lui décocher un clin d'oeil moqueur.

    « C'est trop généreux de votre part, cet excès de galanterie. »

    Et sans plus attendre, la rouquine prit le pas, se dirigeant sans difficulté vers les escaliers qui les mèneraient au pont.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 10 Déc 2009 - 22:02

Ajilah ne savait pas si c’était conscient ou non, mais quand il écoutait Kassandra, il avait l’impression de l’entendre claironner « C’est mon île, je l’aimerai toujours plus que n’importe quel mâle faible et sans volonté. ». C’était presque touchant, comme un enfant à qui on aurait caché quelque chose sans importance mais qui voudrait tout de même tout faire pour apprendre de quoi il s’agissait. La réaction normale de n’importe quel être pensant normalement constitué est dans ces cas là de garder le silence, ou même de titiller sa curiosité sans jamais lui livrer le secret tant convoité. On observe alors avec malice et moquerie l’être trépigner d’injustice. C’était puéril. Et le demi-elfe savait être un monstre de puérilité, à sa manière. Il n’allait pas de priver.

Sauf que sa cabine était désormais un terrain trop familier pour leur partie, et il n’avait pas envie de tomber dans la routine. Aussi se leva-t-il et l’invita-t-il à le suivre. Il ne put retenir un haussement de sourcil quand elle parla d’Haer, ne comprenant pas vraiment ce qu’il venait faire là. A vrai dire, le chauve était le plus grand point faible du capitaine, car ce dernier connaissait une grande partie de ses secrets. Ajilah s’était toujours promis de le faire tuer dès le premier soupçon, mais il doutait parfois de pouvoir ne serait-ce que douter de l’homme. Etrange, en vérité, que la relation qui les unissait.

« Si Haer te demande de récurer le pont, c’est que le pont a besoin d’être récuré. »

Il n’ajouta pas qu’il y avait de fortes chances que l’humain ne voit aucune autre utilité à une femme que de faire le ménage. La rouquine était dans un état d’excitation bien assez suffisant, inutile d’attiser la flamme. La suivant de près, il déboucha quelques instants après elle sur le pont de l’Onirique, et laissa l’air marin s’infiltrer dans ses narines et le revigorer. Depuis combien de temps s’était-il enfermé là dedans ? Un coup d’œil vers sire le soleil lui apprit qu’il avait bien faillit le louper. Encore quelques minutes et il aurait disparu derrière la ligne d’horizon. Il lança un regard à Kassandra.

« Une heure idéale pour visiter ce qui fait l’originalité de Meca, non ? »

A comprendre, les auberges, plus nombreuses sur l’île que n’importe où ailleurs. Sans avoir la décence d’attendre sa réponse et se retrouva en moins de temps qu’il n’en faut pas le dire sur l’embarcadère. Il lança un regard par-dessus son épaule.

« Allez, Kassandra, remue-toi un peu, j’ai besoin de me dégourdir les jambes. »

Histoire d’oublier les tortures qu’il avait du pratiquer. Non pas que ça le dérangeait, non non, il avait un objectif et s’y tenait. Mais il y avait des partis du travail dont il se serait bien passé. Il n’y avait rien d’amusant à torturer un homme incapable de se défendre… Mais secouer Meca l’était, incontestablement, aussi était-il prêt à faire des sacrifices. Surtout quand les sacrifices en question ne le concernaient pas plus que ça. Certes, il avait été en contact avec la dague de torture, mais uniquement avec son manche, et non avec son tranchant. Il s’en sortait plutôt bien, au final.*

« Tu pourras continuer à te plaindre une fois que tu auras un alcool digne de ce nom en main, pas avant. »
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeVen 11 Déc 2009 - 18:36

    Le chauvinisme exacerbé de Kassandra n'était qu'une des séquelles des racines dont on lui avait privé. Quand les repères solides de votre existence sont erronés voire inexistants, on se raccroche aux illusions qui ont berné et bercé notre enfance. En l'occurrence, la terre insulaire de Meca était la seule chose qui correspondait à l'identité que désirait Kassandra. Que pouvait-elle faire d'autre, à part s'approprier ces miettes de l'île et de son patrimoine ? Comme si elle était une vraie pirate. Pas une fille venue de l'Eau, de nulle part. Sans père ni mère. La mélancolie de ces pensées n'effleura pas l'esprit acéré de la rouquine, qui s'entendit répliquer sur un ton un peu boudeur.

    « Vous croyez vraiment qu'il a besoin de me regarder d'un oeil aussi noir ? Et puis le pont est toujours propre ... Puis je ne suis pas la seule à pouvoir faire ça, comme si parce que j'étais justement une femme je ne pouvais être qu'une potiche bonne à passer la serpillière. »

    Sa petite crise enfantine avait quelque chose d'attendrissant, mais bien vite les airs de femme-enfant s'estompèrent dans l'air, volatils , alors que quelques poignées de secondes plus tard la flamme rousse dévalait la passerelle de bois dans un claquement sonore et vivace pour atteindre le ponton, qui tel un chemin flottant et instable serpentait en direction des lueurs flamboyantes, signalétique principale qui permettait de distinguer la nuée d'auberges et de tavernes bordant le panorama côtier de Meca. Et bien que l'avance du capitaine était légère, la jeune pirate s'appliqua à sensiblement accélérer la cadence de sa démarche afin d'atteindre et de dépasser de quelques centimètres à peine l'avance du beau mâle. Elle avait horreur d'être en apparence la petite chienne qui suit son maître... Laisser croire cette idée lui aurait fait hérisser le poil, alors quant à la confirmer, il ne fallait pas rêver, c'était hors de question. La jeune femme restait dans le clan des insoumises.

    A l'entente de sa question, la jeune femme aquiesca du menton, maintenant son champ de vision focalisé sur les lanternes à peine ballottées par la bise légère de la nuit. La vue était à la fois attractive et inquiétante de loin, l'obscurité s'épaississant autour des bâtisses de l'île alors qu'au loin perçaient quelques rires et bruits familiers d'une vie fourmillante et agitée. Une vie de brutes épaisses.

    « Vous n'aviez qu'à courir un peu. Courir après le temps, les filles, ce que vous voulez. Ca occupe, plutôt que de se cloîtrer dans sa petite cabine. »

    Elle ne comprenait pas vraiment comment son capitaine pouvait apprécier les joies de la procrastination et de l'oisiveté, elle qui n'aimait que rarement déléguer ou rester passive, en constant besoin d'action. Il passait ses journées les doigts de pied en éventail entre deux tortures publiques, alors forcément, il devait pas vraiment s'épuiser Monsieur Ajilah ! La rouquine se priva de faire partager ses réflexions, tentant même d'adopter un timbre radouci par la fraîcheur nocturne qui l'enveloppait et la sortait de son bougonnement diurne. Aller dans une taverne lui changerait les idées, et qui sait peut-être trouverait-elle un homme avec qui aller vraiment s'amuser ... Pas que la soirée de la dernière fois lui était restée en travers de la gorge, mais tout de même un peu.

    « Méfiez-vous capitaine, l'alcool ne vous réussit pas, parait-il. »

    Elle n'avait pas pu s'empêcher de saisir cette perche indirecte, se gaussant sans se cacher et faisant référence à son excès d'alcool qui lui avait valu des agissements dont il se vantait sûrement bien peu. Ce n'était pas sa faute après tout ; elle n'avait pas à se cacher et assumait ce qui s'était passé, même si de son point de vue, il n'y avait franchement aucun acte qui soit resté fortement imprégné dans sa mémoire sélective. Son cerveau n'avait retenu que l'essentiel : ils s'étaient arrêtés de jouer avant même que la véritable partie soit entamée. Ce qui l'avait un peu rebuté les jours suivants, mais qu'elle avait encaissé comme ... Comme un échec qui n'était que partie remise ! Et si Ajilah faisait tout un fromage de cette soirée, Kassandra n'y avait rien vu de gênant ou de "secret défense". C'était tout juste si ca avait été en dessous de la limite fatidique de la ceinture, pas de quoi fouetter un chat pour notre Sainte Nitouche aux boucles de feu, qui menait la marche d'un pas de maîtresse des lieux.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeLun 21 Déc 2009 - 22:03

« Haer a des raisons que la raison ne connaît pas, Kassandra. Il ne faut pas chercher plus loin que ça. »

Sacré Haer quand même, une perle rare. Ajilah ne regretterait sans doute jamais de l’avoir rallié à sa cause. Quoi que, comment être sûr ? Il était dans son équipage celui qui avait un caractère se rapprochant le plus du sien. Et Ajilah n’aimait rien de plus qu’une mutinerie réussie. Pour autant, le chauve n’était pas un capitaine, et n’avait jamais voulu le devenir. Il était le second parfait, et tant que le capitaine était à la hauteur de ses espérances, il « le gardait ». Etrange pensée, n’est-ce pas ? Et pourtant…

« Quoi que, si tu veux vraiment tout savoir, tu ne dois pas être loin de la vérité. Enfin, si tu es vraiment la fille de ton père, ça ne doit pas te surprendre plus que ça. »

Et il ne savait pas à quel point sa pique pouvait être mal accueillie. Innocent comme l’enfant qui venait de naître, pour une fois, il se contenta de descendre sur l’embarcadère. Quand il lui annonça qu’il avait besoin de se dégourdir les jambes, elle lui asséna avec son tact habituel que c’était sa faute. Courir un peu, qu’elle disait… Comme s’il avait eu le temps. Organiser un coup comme le sien sur Meca demandait un minimum de préparation, tout de même. Mais il se contenta d’éclater de rire, un rire sincère. Ajilah était un bon vivant, après tout, et rire faisait parti de ses talents.

« Peut-être bien. Mais je suis Amiral, moi, j’ai quelques responsabilités bien contraignantes. C’est d’ailleurs pour ça que je le suis. »

Sacré Conseil des Leaders. Ces sots l’avaient sous-estimé plus que de raisonnable. Aujourd’hui, ils se retrouvaient pieds et poings liés, obligés de suivre un capitaine qu’ils exécraient. Aaaah, la jouissance de la victoire. Ce n’était pas le pouvoir qui intéressait le sang mêlé, mais plus les visages décomposés, verts et dégoutés de ces vioques sans envergure. Dean sortait du lot, cependant… Il allait devoir trouver un moyen de l’écarter. Il était trop dangereux pour lui laisser un tel pouvoir entre les mains. Kassandra le ramena au présent en lui rappelant sa « défaite », et il secoua la tête, esquissant un nouveau sourire. Peut-être un peu moins naturel, celui-ci. Avoir été battu, en quelque sorte vu qu’il avait eu sa vengeance, par une donzelle sortie de nulle part avait mis son amour propre à mal.

« Ne t’inquiète donc pas pour moi, et garde un œil sur les portes. On sait jamais, certaines ont la mauvaise habitude de se fermer toute seule. »

Et vlan pour la crédibilité du personnage mature, bonjour l’image du gamin boudeur. Bah, ce soir, il était parti pour se détendre, autour le faire de la façon la plus complète possible. S’aventurant dans les ruelles de Meca, il jeta un regard distrait sur les enseignes, cherchant celle qui l’inspirerait. Un mouvement attira son attention, et il crut apercevoir, à travers une vitre mal lavée, une très vieille connaissance. Dirigeant ses pas vers la porte, il l’ouvrit calmement et fit signe à Kassandra de le suivre.

« Si ça se trouve, je vais pouvoir te présenter quelqu’un. » Il fut vite déçu quand il ne reconnut personne. Haussant les épaules, il s’approcha du comptoir. « Fausse alerte, en fait… Mais vu qu’on est rentré. »

Du coin de l’œil, il aperçut Gabriel. Il n’en était pas sûr, mais il était presque certain qu’il faisait parti de l’équipage de ce bon vieux Haize. Un heureux hasard, même si ça n’avait guère d’importance à ses yeux. Haize Sepiida était bien loin, et son île appartenait désormais à Ajilah.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMar 22 Déc 2009 - 11:35

Une poignée de jours à peine... Les fidèles de Haize n'avaient que trois jours pour se préparer, en toute discrétion, à mettre les voiles et partir vers le continent pour mettre la main sur ce damné pirate. Quelle idée d'abandonner ainsi son poste, ses responsabilités... Sa mère avait laissé entendre qu'il s'était entiché de cette satanée nobliaute. Une noble invivable, entre parenthèses. Bien des marins avaient eu envie de la jeter par dessus bord au cours de la traversée qui l'avait vu les rejoindre. Seul Haize avait l'air de pouvoir supporter cette fille. Mais qu'est-ce qui lui était passé par la tête d'aller la retrouver vivre avec hein? Il y avait assez de filles potables sur Méca! Et puis Haize était un coureur de jupons, un séducteur, quelle mouche l'avait piquée de se fixer avec elle? Lui qui se battait contre les nobles, la royauté et les privilèges... Il se parjurait.

Quoiqu'il en soit, l'équipage du Fossoyeur était bien décidé à mettre la main sur leur capitaine et à lui rendre son statut d'amiral de la Marine Marchande. Tout était parti à vau l'eau depuis son départ... Les bâteaux perdus, l'accession d'Ajilah au poste d'amiral... Quelque chose n'allait pas. Les changements n'étaient pas forçément mauvais, mais cela allait un peu trop vite et profitait un peu trop à certains.

Las d'une longue journée de préparatifs secrets, il se rendit dans une taverne mal famée (comme toutes les tavernes de l'île) et se commanda un verre de rhum. Il n'était pas alcoolique, contrairement à Téohdor, mais il ne disait pas non à un petit verre de temps en temps. Et puis, les rumeurs de taverne étaient d'excellentes sources d'information. A trier, bien entendu, mais cela restait une mine d'or.

D'ailleurs... Qui donc fit son entrée dans la taverne peu de temps après? Ce bon vieil Ajilah pardi! Gabriel le regarda approcher vers le comptoir du coin de l'oeil, un sourire goguenard aux lèvres. Sourire qui s'accentua en remarquant qu'il était accompagné d'une charmante rouquine de sa connaissance. Tiens donc, Kassandra s'acoquinait avec le demi elfe? Non sans un certain plaisir, il se remérmora quelques nuits torrides qui avaient prit fin quand il était parti. Le plus naturellement du monde, il se leva, son verre à la main et s'approcha du... couple? Difficile à dire s'il y avait quelque chose entre eux. Il aurait pu être jaloux ou agacé qu'elle aille voir vers Ajilah, mais il n'éprouvait plus pour Kassandra que de la sympathie. Il l'aimait bien. Ils avaient vécu des choses fortes.

- "Tiens donc, mais qui voilà donc!"

Il détailla Kassandra d'un air appréciateur, avant de regarder Ajilah, d'un air indéchiffrable cette fois.

- "Kassandra, cela faisait longtemps... Je ne pensais pas te revoir dans ce genre d'endroit et en cette... compagnie."

Il pencha un instant la tête, avant de regarder Ajilah.

- "Ajilah."

Juste un bref salut. Pure politesse. Il revint à Kassandra et son expression se modifia quand il avisa les boucles d'oreilles qu'elle arborait. Ses yeux s'écarquillèrent un instant alors qu'il reconnaissait le symbole des Noblegriffons... mais qu'est ce qu'elle foutait avec ça? Un vol?

- "Jolies babioles Kassandra, tu as toujours autant de gout."

Savait-elle seulement ce que c'était?
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMar 22 Déc 2009 - 13:57

    La fille de son père ... Quelle belle ironie. Les dents de la rouquine ne grincèrent pas sous l'appellation, mais c'était tout comme. Bien sûr elle cacha sa réaction amère et vive à la remarque anodine d'apparence, ne cherchant pas à se rendre suspecte pour des mots qui ne l'étaient pas. Si seulement elle pouvait découvrir que son père n'était pas Rhamyr mais un quelconque autre capitaine ... N'importe qui ... Malheureusement pour elle, elle avait appris la vérité. Et les mots d'Ajilah avaient, l'espace infime d'une milliseconde, rouvert la plaie à vif, jetant du sel dans l'inconscient meurtri de la rouquine. Elle avait mal, mal de savoir que son père n'était pas un homme vaillant de Meca mais ... Bien autre chose. Une chose qu'elle n'osait même pas nommer, honteuse et souillée.

    Elle avait donc nié en bloc, fuit les certitudes et cligné des yeux avant de sentir le vent de Meca souffler les blessures. Kassandra espéra que son capitaine n'ait pas remarqué l'étrange grimace fugitive qui était apparue sur son visage. La rouquine se contenait comme elle pouvait. Avant que tout n'explose à la figure du malheureux qui déclenchera la bombe humaine. D'un ton à peine piqué par la mesquinerie la demoiselle lui balança avec affection.

    « Tant qu'il n'y a pas un idiot pour les verrouiller, je suis tranquille avec tout ce qui a une serrure et qui obstrue les entrées. »

    Ajilah poussa la porte, satisfait d'avance de pouvoir montrer à la demoiselle l'étendue de ses connaissances sur l'île ... Sauf qu'une fois de plus, et sûrement au grand damne de notre étrange duo, c'était la jeune femme qui allait une énième fois prendre au dépourvu le demi-elfe. Décidément, elle n'en ratait pas une, et ce même quand ce n'était pas de sa propre initiative que les hasards avaient lieu. Il y avait de quoi remettre en question la chance d'homme trompé d'Ajilah.

    Le regard mutin et violine de la jeune pirate suivit celui de l'Amiral, mais se figea net en remarquant qu'une silhouette familière dénotait, se redressant parmi cet amas de buveurs et de ricanements lourds et grossiers. Non ! Sur toutes les tavernes, toutes les auberges où ils auraient pu avoir le loisir de se soûler en toute impunité, il avait fallu que parmi le nombre incalculable de mâles qu'elle avait séduit et croqué, elle tombe sur le seul qui avait délibérément filé avant elle ! Merveilleux, songea t-elle avec ironie. Et voilà cette chère gueule d'ange qui se levait avec toute la nonchalance dont il savait faire preuve. La rouquine avait encore en mémoire leur rencontre et loin d'être déçue, elle en avait même conservé un petit souvenir assez flatteur et ... Mouvementé, le mot était faible.

    Et bien que Kassandra ne dépréciait pas, bien au contraire, de recroiser un de ses amants éphémères, elle n'aimait pas l'idée d'être une femme qui n'avait pas de prétendant à mettre sous le nez de Gabriel. Il lui fallait un justificatif quelconque de sa présence ici, et Ajilah était là. Mais ca n'était pas suffisant. Il lui fallait, pour une obscure raison - un comportement typique de la jeune femme, et pas une quelconque jalousie envers le Second du Fossoyeur -, toujours attiser la jalousie entre les mâles, surtout quand il s'agissait d'être au bras de la rouquine. Histoire de renforcer son égo.

    C'est donc dans un geste tout à fait naturel que la jeune femme entrelaça sournoisement son bras avec celui du capitaine sans même le prévenir, réduisant la distance entre leurs deux corps, le sien venant se souder un peu plus amoureusement à celui d'Ajilah. Comme une posture factice d'amants totalement sous le charme l'un de l'autre. Du bout des lèvres, et sans rater la progression d'un Gabriel plus qu'amusé de la situation, la jeune femme souffla sans se départir de son charme hautain.

    « Faites comme si, d'accord ? Je vous en serai redevable. »

    Pas besoin d'expliquer davantage, la demoiselle savait qu'il avait bien compris le message et le rôle qu'il allait jouer, minime. Ils auraient tout le temps d'en rediscuter, d'en rire, ou d'en hurler d'horreur plus tard, mais là, il fallait prendre sur soi - si tant est qu'il était déplaisant de jouer le compagnon temporaire d'une telle créature -. Elle avait déjà une dette à son actif avec Ajilah, ca commençait mal. Et quelle dette, il allait la lui faire payer le plus chèrement possible, mais Kassandra n'avait pas le choix, il fallait au moins qu'elle soulage sa fierté et sa dignité. De sa voix si malicieuse et reconnaissable, la rouquine plissa les yeux, hilare, jaugeant longuement l'hybride qui se trouvait maintenant face à eux.

    « Mais la surprise est partagée, Gabriel ... Ca fait si longtemps. Tu n'as ... Vraiment pas changé. Que fais-tu donc tout seul par ici ? »

    Ses yeux trainèrent de haut en bas tandis qu'elle le saluait à sa façon. Ses mots étaient emprunts de l'habituelle sensualité sarcastique. Après tout elle était sincère : il était toujours aussi tentant, même si cette fois-ci, la jeune femme savait à qui elle avait affaire, et surtout, qui était à ses côtés. Le capitaine de l'Onirique allait sûrement mal prendre l'idée qu'une de ses recrues s'était permis un léger écart de conduite avec un des membres du Fossoyeur. Non pas que les deux navires se haïssent particulièrement ... Non, il y avait juste un vague parfum flottant de rivalité. Compréhensible, et évident quand on sentait la tension entre les deux hommes. La flamboyante rouquine s'amusait intérieurement de l'échange qui allait être savoureux. Et elle ignorait à quel point.

    Surprise par la remarque - elle ne le cacha d'ailleurs pas -, la jeune humaine effleura de sa main libre l'une de ses boucles d'or suspendues à ses lobes. Un précieux cadeau de sa naissance, un héritage plus ou moins légitime ... Qui fut remarqué par le pirate. De manière étrange. Bah ... Il devait sûrement avoir un œil affuté quand il s'agissait de jolies choses brillantes et intéressantes à échanger contre des espèces sonnantes et trébuchantes. Sur le ton de la conversation, la rouquine haussa doucement les épaules, souriant avec langueur et ironie. Elle se permit même une petite remarque qui sonnait comme une plaisanterie ingénue.

    « Toujours aussi charmeur ! Contente qu'elles te plaisent. Elles viennent de mon père. »

    Elle n'avait pu s'en empêcher. De toute façon, tous croiraient que c'était un butin de Rhamyr offert à sa protégée, et ce n'était pas plus mal. Qui pouvait bien savoir ici que ces bijoux étaient marqués du sceau d'une noblesse du continent ? Qui pouvait bien ici savoir que ce sceau était celui de son vrai père ? Personne. Non ... Personne.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMar 22 Déc 2009 - 17:58

L’ambiance était chaleureuse, dans la taverne choisie par Ajilah. Et, pour une étrange raison, elle était surtout calme. D’habitude, le sang-mêlé avait le chic pour choisir celle où éclaterait forcément une rixe. On le considérait comme chanceux, et à juste titre, mais uniquement sur l’océan. Dès que ses pieds foulaient la terre, il pouvait dire adieu à cette petite étincelle d’insouciance qui l’aidait à n’en faire qu’à sa tête. Car ainsi était le pirate le plus influent de l’île volcanique, comptant autant sur sa chance que sur son talent, l’une étant la conséquence directe de l’autre, il pouvait parfois se laisser entraîner dans une folie sans nom sans sourciller. C’était ce qui faisait son charme, dirons-nous. Mais ce n’était surement pas ce charme là qui motiva sa belle Kassandra à se lover contre lui comme la première des pucelles énamourées. Non pas que la sensation était déplaisante, et il caressa l’idée un instant de passer son bras sur ses épaules… mais elle était surtout inattendue, et connaissant la jouvencelle, pas innocente. Elle avait une raison d’agir ainsi, et le fait de ne pas la connaître ne pouvait que le rendre méfiant. Mais il joua le jeu, histoire de gagner du temps, sans même la regarder. Et puis Gabriel la salua, et tout devint clair. Une ancienne conquête ? C’était fort possible, les deux avaient ce petit regard qui ne mentait pas. Se voir utiliser comme un épouvantail pour rendre jaloux un ancien amant n’était pas pour plaire au capitaine qui ne pipa pas mot sur le coup. Après tout, il y aurait bien une occasion de se venger.

Le regard qu’il reçut du pirate du Fossoyeur lui confirma ce dont il se doutait bien. Il n’était pas vraiment aimé par l’équipage de l’ancien amiral. Qu’était-il, à leurs yeux ? Usurpateur ? Incapable ? Non pas que leur jugement l’aiderait ou non à dormir, mais il était toujours intéressant de savoir qui pourrait avoir envie de lui planter un poignard dans le dos. Eh ! Meca n’était pas un paradis tropical, et les hommes qui y vivaient été bien plus dangereux que les nobliaux de Diantra. Eux savaient laver un affront proprement, ils n’avaient pas besoin de cheveux et de lance - peut-être les fiers chevaliers de la péninsule avaient-ils quelque chose à compenser ? - aussi cela ne faisait-il pas de mal de sonder un peu la populace.

« Gabriel. » Et puis, l’illumination. Il allait devoir se faire pardonner par sa chère mousse, mais il ne pouvait laisser passer une telle occasion. « Je vois que tu connais déjà Kassandra. Une perle, n’est-ce pas ? Pour un tel tarif, je ne m’attendais pas à tant d’empressement. » Voilà qui allait surement la décourager de recommencer à se servir de son capitaine comme d’une marionnette.

Et puis Gabriel surprit Ajilah en parlant de… boucles d’oreille. Lui-même n’avait même pas jeté un œil sur les bijoux qui pendaient aux oreilles de sa protégée. C’était un détail qui ne collait pas au personnage. Pour ce qu’il savait du pirate, il n’était pas superficiel. Alors le voir s’intéresser à quelque chose d’aussi futile que des boucles d’oreille. Se penchant, il en attrapa une entre deux doigts et l’observa aussi rapidement que possible, conscient que la rouquine se dégagerait rapidement… surtout après le tour qu’il venait de lui jouer.

« Joli. C’est un blason de la Péninsule, non ? » Une petite pause, le temps de s’éloigner légèrement des représailles. « Il me dit quelque chose, en plus… »

Mais où avait-il vu ce griffon auparavant ?
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMar 22 Déc 2009 - 19:50

Amusant.

Vraiment amusant. Alors même qu'il se demandait s'ils étaient en couple ou seulement amis, voilà que Kassandra avait la gentillesse de se saisir du bras d'Ajilah de façon possessive et un brin outrancière, arrachant un sourire goguenard à son ex amant qui ne ressentait aucune jalousie. Oh, Kassandra était toujours une créature absolument magnifique... Et Arcamenel savait que c'était une tigresse au lit, une de ces femmes qu'un homme ne peut oublier. Il avait passé d'agréables heures en sa compagnie. Puis il était parti. Avant qu'ils ne se lassent tous deux. Parce qu'ils étaient libres et indépendants. Parce qu'il devait en être ainsi. ils se regardaient sans animosité, mais avec ce regard qui ne trompait pas quant à ce qu'ils avaient pu vivre ensemble. Il y avait une certaine intimité dans cet échange.

- "Je me détends."

Et c'était l'exacte vérité. Il n'était pas obligé de lui dire quel avait été son dur labeur aujourd'hui et surtout, il n'avait pas envie d'éveiller la curiosité d'Ajilah.

- "Un petit verre n'a jamais fait de mal à personne... Je suppose que vous ne me contredirez pas, au vu de votre présence ici... A moins que les chambres soient agréables à l'étage?"

Il se fendit d'un sourire de nouveau goguenard et légèrement moqueur.

- "C'est un plaisir de te revoir Kassandra. Tu es toujours un régal pour les yeux."

Elle était... époustouflante. Et pourtant, l'image d'une demie elfe à l'aspect polaire ne cessait de danser dans son esprit, bien loin de la charnelle humaine aux boucles de feu. Il salua Ajilah qui lui rendit son salut, avant de se fendre d'une remarque fort peu galante concernant Kassandra. De nouveau, l'amusement s'afficha sur les traits du Second.

- "Etrange, personnellement, je n'ai jamais eu à débourser le moindre écu... Il faut croire que notre Kassandra à des critères d'exigeance auxquels tu ne corresponds pas sans une petite compensation pécunière."

Il n'y avait nulle animosité dans les propos de l'hybride, juste un brin de moquerie, mais cela était un trait normal de caractère chez lui et rien de personnel contre le nouvel amiral... Quoique...

- "Quant à toi Kassy, je vois que ton style d'homme à radialement changé..."

Sous entendu : tu les prends goujat maintenant? Gabriel n'était pas un modèle, mais quand même, il n'avait jamais traité Kassandra ainsi... Même pour plaisanter. Cela dit, il s'était barré, était-ce mieux? Son regard accrocha alors ses boucles d'oreille et l'amusement disparut de son expression alors qu'il parlait des bijoux l'air de ne pas y toucher. Son regard se fit perçant quand la jeune femme lui répondit que c'était un cadeau de son père... ou un leg... Difficile de savoir.

- "Sacré héritage alors..."

Parce que cela valait une petite fortune. Mais cela intriguait Gabriel qui ne savait comment en savoir davantage sans se révéler lui-même. Il se raidit imperceptiblement quand Ajilah fit remarquer que c'était un blason de la Péninsule. L'hybride aurait pu facilement l'aider à retrouver d'où venait ce blason mais s'en abstint.

- "Je ne te savais pas si érudit Ajilah."
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMar 22 Déc 2009 - 21:49

    « Aucune idée. Je n'ai pas mis les pieds ici depuis ... Fiuh. Alors à l'étage ... Mes souvenirs ont été un peu altérés. Ca reviendra, j'imagine. »

    Le sous-entendu était à peine voilé, et son expression mutine se renforça alors que sa main libre jouait avec une de ses boucles de feu. Pour être honnête, Meca et son ambiance lui avaient quelque peu manqué, et chaque taverne rapportait à la rouquine des réminiscences toutes plus divertissantes les unes que les autres.

    Cependant, l'atmosphère décontractée entre les deux pirates ne manqua pas d'être brusquement interrompue par la, hem... fine et pernicieuse critique d'Ajilah. Qui insinuait donc qu'elle n'était qu'une prostituée. Ce à quoi Gabriel répondit avec dextérité - sa répartie semblait être devenue encore plus désarmante et poussée qu'auparavant -, mais qui ne put empêcher quelques secondes avant que le bras de la demoiselle se crispe et se resserre - comme si elle voulait lui faire mal -.

    « Connard... »

    Ses lèvres étaient si collées l'une à l'autre que le sifflement qu'elle émit fut tout juste audible pour Ajilah. Sa bouche pulpeuse, pourtant étirée en un sourire affable et fier, comprimait difficilement le fleuron de jurons qui lui venait tout naturellement à l'esprit suite à la remarque de son capitaine. Incroyable comme elle était mise à l'épreuve depuis son entrée dans l'équipage de l'Onirique : ce soir elle apprenait et saisissait totalement la signification de l'expression "maîtrise de soi". Ajilah demeurait un bon professeur ... Et aussi un parfait crétin qui savait où appuyer pour faire cracher des flammes à la séduisante rouquine... Qui ne trouva qu'un seul échappatoire, s'esclaffer. Avec toute la condescendance dont elle était capable, rire pour rabaisser au maximum Ajilah. Foutue autorité, s'il n'était pas ce qu'il était, elle l'aurait castré. Humilié sur place, arrosé avec du rhum, immolé, écartelé ... Respire, Kassandra, respire.

    « Il ne sait pas s'y prendre, lui, ce n'est pas sa faute. »

    Elle lâcha ce dernier mot perfidement, avec la dose juste et équivalente de douceur pour que ce ton n'ait que l'air d'un reproche sucré. Comme si elle quémandait de clémentes excuses à Gabriel pour la petite puérilité d'un Ajilah presque "absent", et qui ne l'affectait guère soit dit en passant. Tu parles. Elle lui en voulait à mort, elle bouillait d'impatience de lui faire regretter ses mots insultants. Mais pas maintenant, non pas tout de suite, elle devait encore se contenir un peu avant d'incendier Ajilah. Plus tard dans la soirée sûrement, aurait-elle assez d'énergie pour fomenter une froide vengeance.

    « J'expérimente. Mais c'est difficile de te trouver des concurrents, quasiment même impossible. »

    Elle le taquinait, ou du moins, Gabriel savait bien qu'elle ne faisait que pousser un peu plus le bouchon devant l'actuel Amiral de Meca. La rouquine n'avait que ça comme moyen de pression sous la main. Même si en un sens, elle devait avouer qu'elle avait rarement vu plus sauvage que l'hybride. Tout ceci aurait pu lui manquer si elle n'avait pas tant d'occupations et de projets en tête, bien plus importants que des coucheries déraisonnables. Et puis là, elle était vraiment trop soucieuse, parce que l'un et l'autre semblaient soudainement passionnés par les petits trésors qu'elle arborait à ses deux oreilles...

    Le geste du capitaine ne passa évidemment pas, comme il aurait pu s'en douter, et la pirate le repoussa au même moment où il se recula, lui lançant un regard courroucé. Eh bien quoi ?! Ce n'était que de simples bijoux, bon sang, mais qu'est-ce qu'ils avaient ces deux là à remarquer ses boucles comme si c'était la première fois qu'elle les portait ? Grmpf. Maudites soient-elles, dès demain Kassandra se jura de les remplacer par quelque chose de beaucoup moins important et ... Intime que celles-ci.

    « Oui, merci, je sais ce que c'est. Dites-moi, sommes-nous vraiment dans une taverne de Meca pour parler bijouterie ? Je vous pensais plus virils. »

    Sa remarque était à la fois taquine et trahissait son impatience. Faisant signe au tavernier, elle lui coula un regard peu correct, accompagné d'un sourire charmant.

    « Trois verres de rhum ..? »
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeMer 23 Déc 2009 - 13:37

Une mutinerie. C’était une mutinerie, dans tous les sens du terme. En tant qu’Amiral de la Marine Marchande, tous les matelots de Meca étaient plus ou moins sous ses ordres, aussi l’irrévérence à peine voilée de Gabriel était en soit un acte de rébellion… quant à Kassandra, on en parlait pas. Elle était directement sous ses ordres, après tout. Mais il y avait un mot qui pardonnait tout le reste, et qui mit son humeur au beau fixe. « Connard », ou comment avouer sa défaite. Il esquissa un sourire satisfait et laissa glisser les insinuations qui suivirent. Qu’ils s’amusent à lui rendre la monnaie de sa pièce, lui avait obtenu ce qu’il voulait.

« Paix, mes amis. »

Ah, qu’il était amusant de les voir s’agiter comme des enfants, à tenter de le faire rougir ! De quoi flatter son égo, même s’ils ne le comprendraient surement pas. La conversation prit un tour d’un coup bien plus intéressant quand Gabriel remarqua les boucles d’oreille de Kassandra. Saisissant l’objet des attentions, le demi-elfe l’examina rapidement, et fut certain de reconnaître un blason de la Péninsule. La question était donc maintenant de savoir lequel. Et ce n’était pas si simple que ça en avait l’air… Vu le nombre de familles noble pullulant sur les terres de Trystan, et vu que chacune d’elle possédait son propre blason, il était difficile de les retenir tous. L’intérêt d’Ajilah envers le gratin de Diantra étant ce qu’il était, il n’avait même pas fait l’effort d’essayer. Et pourtant, il se souvenait de celui-là… Gabriel se fit légèrement acerbe, sans vraiment de raison… Que se passait-il ?

« Tu as encore beaucoup de chose à apprendre sur ton amiral, il faut croire. »

La réaction de Kassandra lui finit de lui mettre la puce à l’oreille. Elle qui d’habitude avait l’impressionnante faculté de faire comme si de rien n’était, la voilà qui tentait désespérément de changer de sujet. Ce n’était pas… normal. Il flottait une drôle d’ambiance, d’un seul coup, entre les trois pirates, et ce qui était sûr aux yeux d’Ajilah, c’était qu’il n’y était pas pour rien.

« Il y a quelque chose que tu as oublié de me dire, Kassandra ? » Le ton était léger, mais le regard inquisiteur. Et pour cause, il n’aimait pas vraiment ça.

Comme pour éluder la question, elle proposa trois verres de rhum. Outre le fait qu’il n’avait pas qu’un bon souvenir de sa dernière expérience avec l’alcool des pirates, il n’avait pas spécialement envie d’en boire… pas avant d’avoir démêlé la chose. Mais il haussa les épaules, comme si de rien était.

« Pourquoi pas. Et comme ça, Gabriel et moi pourrons nous amuser à deviner d’où viennent tes griffons. »

Eris l’aide, il était sûr d’avoir déjà vu ce blason…
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 24 Déc 2009 - 12:03

Quelque chose disait à Gabriel que Kassandra n'était pas si ravie de la situation que ça et que son cavalier était un peu forcé. Ou son sourire. La façon dont celui-ci la rabaissa en la traitant joliment de prostituée suffisait à Gabriel pour deviner qu'entre ces deux là, il y avait une légère tension et sans doute un rapport de force. Ce serait à celui qui prendrait l'avantage. Ah la fierté faisait faire bien des bêtises et malheureusement, Kassandra n'en était pas dépourvue. Au contraire même. Mais l'hybride ne pouvait guère leur jeter la pierre, ne valant pas mieux à ce niveau là. Pourtant, il n'avait pu s'empêcher de voler au secours de Kassandra, malgré son amusement. Quoique... Pour la défendre de cette manière, il aurait aussi bien pu s'abstenir, puisqu'il ne faisait que clamer haut et fort que lui, il l'avait eu gratis. Pas forçément flatteur pour elle, mais il avait pu ainsi rabattre le caquet de l'amiral usurpateur. Qu'il profite, bientôt, le véritable amiral reviendrait.

Mais le pirate se fendit d'un sourire alors que la jolie rousse répliquait que le pauvre Ajilah ne savait pas s'y prendre avec elle... contrairement à Gabriel. Pauvre demi elfe, il semblait avoir ses deux camarades sur le dos. Alors qu'il était censé être leur supérieur et qu'il pouvait très bien leur pourrir la vie. Il se tourna vers Kassandra et reprit, tout miel :

- "Veux-tu que je lui apprenne ?"

Il laissa échapper un rire franc quand elle continua sur sa lancée en disant qu'il était difficile de l'égaler. C'était flatteur. Même si c'était pour faire chier Ajilah, c'était quand même flatteur.

- "Eh bien, si tu te lasses d'expérimenter, reviens vers les valeurs sures."

Il lui fit un clin d'oeil. Il plaisantait. Quoique, retrouver la volcanique Kassandra n'avait rien de déplaisant, bien au contraire. Peut-être que cela chasserait Syria de ses pensées après tout. Ajilah ne répondit à aucune attaque, se contentant de jouer les médiateurs. Gabriel retint un ricanement fort peu adulte et se contenta de sourire en coin.

Cela aurait pu en rester là.

Ils auraient pu continuer à se chicaner dans une ambiance bonne enfant.

Oui, si seulement Kassandra n'avait pas arboré un bijou aux armoiries douloureusement familières pour l'hybride. L'air de rien, il tentait d'en savoir plus sur ce bijou, ne chassant sur quel pied danser pour amener Kassandra à ne pas mentir et l'aider. Après tout, il caressait toujours l'idée de profiter de son voyage à terre pour retrouver Noah et lui faire payer son acte. Et peut-être que Kassandra pouvait lui en apprendre davantage...

Ajilah fit remarquer que c'était un blason de la péninsule, ce à quoi Gabriel répondit avec ironie. Il se crispa quand l'amiral lui rappelait qui il était. Cela ne se vit pas extérieurement, mais intérieurement, il bouillonnait... Avant de se détendre en se rappelant qu'Ajilah ravalerait bientôt son orgueil. Il se fendit d'un sourire.

- "Il faut croire en effet."

Quant à Kassandra, elle tentait désespérément d'attirer l'attention sur un autre sujet, réveillant les soupçons de Gabriel. Il fallait qu'il lui parler et en privé.

- "Pourquoi? Elle est censée tout te confier de sa vie? C'est ça que tu exiges en tant que nouvel amiral?"

Kassandra commanda du rhum, Ajilah se raccrocha aux boucles d'oreilles. Ca aidait Gabriel dans un sens, mais son insistance le gênait. Parce qu'il ne pouvait pas parler librement. Et hors de question d'indiquer à Ajilah que l'hybride avait lui aussi un lien avec ces bijoux. Finalement, il reprit un peu brusquement :

- "Kassandra, tu aurais quelques minutes à m'accorder... en privé?"

Il jeta un regard lourd de sens à Ajilah.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeJeu 24 Déc 2009 - 13:15

    « Amis. Depuis quand on traite ses amies de pute ? »

    Quelle grossièreté ! Le juron si incongru en fit éclater de rire l'aubergiste, qui cependant, face aux trois regards que lui renvoyèrent respectivement les trois comparses, retourna laver ses chopines sans demander son reste. Certes, la délicatesse n'avait pas écorché les lèvres carminées de Kassandra, mais un petit peu de franchise indolente ne faisait pas de mal au centre de ce duo d'hommes qui se toisaient avec plus ou moins d'orgueil et de méfiance. Et puis quoi, quand bien même ils avaient le droit de se défier verbalement, l'insulter, même implicitement, passait difficilement. Même si l'air de rien elle reflétait cette constante indifférence lascive.

    « Eh bien, propose-lui deux ou trois leçons un de ces quatre. Qui sait. Mais en effet, je penserai à vérifier si mes valeurs sont toujours aussi sûres, Gabe. »

    Elle orna ses paroles d'un sourire qui seyait totalement à la situation, le genre de rictus qui vous donne l'étrange impression que la mangeuse d'hommes n'allait faire qu'une bouchée de vous si vous n'y preniez pas garde, et qu'au fond on n'attendait que ça. Il y avait aussi un arrière-goût de moquerie et de provocation dans cette ébauche d'hilarité, comme une trace de complicité dans cet océan de taquineries. Sur ce coup là, Ajilah devait lutter contre ses deux "adversaires du soir", qui avaient peut-être la fâcheuse tendance d'agir comme des enfants pour narguer le capitaine de la sorte. Mais peu importe, chacun trouvait son compte dans cette scène, au point que Kassandra aurait préféré qu'ils continuent à se chercher des poux l'un et l'autre plutôt que de discuter de la provenance de ses ornements précieux.

    Tournant ses prunelles mauves pour les ficher implacablement dans les iris verdoyantes d'Ajilah, la rouquine se laissa aller à un vent d'enthousiasme feint, susurrant l'espace d'un instant d'une voix teintée d'évidence, telle l'arrogante personne qui énonce des vérités pourtant bien claires à ses yeux. Sa voix sifflait, vipérine, s'insinuant tout comme son souffle tiède qui venait chatouiller l'ouïe de son supérieur hiérarchique.

    « Quelle idée voyons, mais je raconte toujours tout à mon capitaine. Je lui dois aussi respect, obéissance et suis entièrement dévouée à lui. Hors de mes heures de service par contre, je fais ce que je veux. »

    Sous-entendu : ici, elle n'avait rien à lui dire, et qu'il fût Amiral, Roi ou même son géniteur, il était hors de question qu'elle se mette à lui confesser le moindre de ses actes, le plus ridicule de ses péchés. Pendant qu'il y était, il voulait quoi ? Un compte-rendu détaillé de chaque heure qu'elle passait et de ses activités ? La liberté primait sur tout rapport avec un individu selon Kassandra, qui se refusait obstinément mais toujours avec plus ou moins de politesse, à raconter sa vie ; surtout quand on l'exigeait de la sorte. Et puis un bar pareil n'était pas propice à des révélations du type : " Mon père est un noble de Serramire ! Ma mère est morte ! J'ai une soeur ! ". Non, il ne saurait rien. Pas maintenant, ni demain ... Peut-être, un jour.

    Gabriel en rajouta une couche, non content de prendre la défense de la demoiselle. Et à nouveau ils reparlèrent des boucles.

    Stop, stop, stoooop ! Voilà ce qu'aurait voulu crier la rouquine. Sauf qu'elle ne pouvait pas et n'en avait pas envie, tout ça la rendait folle de joie au fond. Kassandra, ou l'art de mettre ses deux pieds dans le plat toute seule sans l'aide de quiconque. Le hic, c'est que les ennuis et les taquineries s'attardaient avec beaucoup trop de lourdeur sur sa personne, chose qu'elle digérait difficilement. Pour faire passer le coup, elle attrapa son verre de rhum, en engloutissant une bonne gorgée qui calma la boule d'anxiété naissante et endormit l'envie de les planter là et d'aller se jeter dans Eris. Non vraiment, c'était une bien mauvaise idée de piquer une tête à une heure où l'eau devait être affreusement glacée. Un poil dubitative devant l'invitation du Second à s'isoler un peu, la pirate jaugea la demande dans un léger silence, puis soupira sans protester.

    « Mh, si tu veux. On revient. »

    Kassandra prévint son "ami" avec insistance, comme si elle voulait éviter tout mal-entendu ou tout sous-entendu qui laisserait croire qu'ils allaient le faire poireauter, clairement. Parce qu'après, c'était sûrement elle qui subirait les conséquences de leurs âneries communes, et même si ça la faisait beaucoup rire sur le moment, la charmante pirate doutait fort qu'Ajilah apprécie ce genre de farces à excès. On se lasse vite des bonnes blagues, surtout quand on en est le principal centre d'attention. L'auto-dérision a ses limites, et il valait mieux pour Gabriel et Kassandra que leur troisième compère n'en vienne pas à les explorer.

    Faisant donc signe à Gabriel de la suivre - et ne laissant donc pas le choix à Ajilah -, la jeune femme garda son verre de rhum en main, s'écartant du comptoir où les trois pirates s'étaient rejoints pour atteindre un rideau de perles que la demoiselle poussa dans un tintement quasi-inaudible, pour déboucher dans un couloir étroit et à peine éclairé par deux torches grossières suspendues aux murs, et une volée de marches d'escaliers grinçantes guidant sûrement aux chambres dont parlait Gabriel. Mais la rouquine se stoppa dans le corridor, puis s'adossa au mur, observant l'hybride qui lui faisait face avec une lueur malicieuse dans le regard, avant de jouer avec son verre d'une main distraite.

    « Vu que tu as dit quelques minutes, ca m'étonnerait que tu veuilles faire autre chose que me passer un interrogatoire... Donc je t'écoute, qu'est-ce qu'il y a ? »
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeVen 25 Déc 2009 - 21:26

Kassandra avait toujours son franc parler, cela faisait plaisir. Finalement, à bien y réfléchir, Syria n'était pas si différente... D'apparence moins volcanique bien sûr, mais elle avait un sacré caractère, bien que plus glacial que Kassandra. Il fallait croire que Gabriel aimait les femmes de caractère qui avaient du répondant. Au moins, avec elles, on ne s'ennuyait pas! La façon dont elle lâcha le mot "pute", sans complexe, sans honte, arracha un sourire à l'hybride. Cela dit, le rire de l'aubergiste effaça cette ébauche de son visage alors qu'il le fusillait du regard. Et il ne fut pas le seul. Aussitôt, l'homme sembla trouver un intêret soudain dans les chopes qu'il astiquait avec plus de vigueur.

Il échangea un regard entendu et complice avec la jeune femme alors qu'elle acceptait son aide pour apprendre la façon de la contenter à Ajilah et qu'elle songeait à retourner dans ses bras quand elle serait lassée. Il ne l'attendrait pas pour cela, et ils le savaient tous deux, mais cette camaraderie alors qu'ils faisaient front commun contre Ajilah était la bienvenue.

Le Second du Fossoyeur éclata de rire quand Kassandra se fit mielleuse concernant Ajilah, lui assurant sa complête fidélité... quand elle travaillait. Une jolie façon de l'envoyer paître qui plaisait énormément à Gabriel. D'un ton goguenard, il lâcha à l'intention d'Ajilah :

- "Je te souhaite bien du plaisir avec elle."

Et il était à moitié sérieux en disant cela. Parce que les poules auraient des dents avant que le demi elfe ne dompte la fougueuse humaine. Mais bien vite, il se concentra sur les boucles d'oreille, et n'y tenant plus, finit par demander à Kassandra un entretien privé. Inutile de lui saisir le bras et de la trainer derrière lui, c'était le meilleur moyen de la braquer. Cela piquerait la curiosité de l'amiral, mais tant pis. Fort heureusement, Kassandra ne fit aucune difficulté et le suivit simplement, le conduisant à l'étage. Il pensait aller dans une chambre, mais elle se stoppa dans le couloir, avant de l'asticoter. Mais toute lueur de plaisanterie avait déserté son regard.

- "Je ne songeais en effet pas à cela, bien que cela ne soit pas difficile de t'honorer en quelques minutes tant tu es désirable ma chère."

Bien que pour le moment, nul désir ne fouaille ses reins. Il était trop occupé avec ces maudits bijoux.

- "Kassandra. Je sais que notre relation passée ne me donne absolument aucun droit sur toi. Cependant, j'ai réellement besoin que tu me dises la vérité... Ces boucles d'oreille... Si je m'y intéresse, c'est parce que je connais ce blason... Un peu trop bien. Il appartient aux Noblegriffon. Comment te les es-tu procuré?"

Il était mortellement sérieux et il levait un pan du mystère le concernant. Cela ne manquerait sans doute pas de susciter quelques interrogations chez la demoiselle.

- "C'est vraiment important Kass."

Puis, finalement, afin de l'inciter à se confier, il lâcha dans un murmure :

- "J'ai cotoyé la famille de très près il y a quelques années..."

Son instinct lui soufflait que ces boucles d'oreille n'étaient pas anodines et que Kassandra en savait plus qu'elle ne voulait l'avouer.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeSam 26 Déc 2009 - 11:00

    Les mêmes questions revinrent, elle aurait du s'en douter. Son air de petit diable s'effaça doucement pour laisser place à une indifférence teintée de perplexité. Kassandra avait toujours vu clair dans les désirs des Hommes, mais ce soir-là, elle avait décidément bien du mal à se mettre au diapason des motivations de Gabriel.

    Dans un soupir irrité, la rouquine balaya d'un ample geste de la main l'air comme s'il l'eut gêné dans ses explications, sa voix se faisant à son tour murmure caressant mais bien moins enjôleur et taquin que ce que sa voix avait pu être en présence de son capitaine, et sur d'autres sujets.

    « Je te l'ai dit, Gabriel. Elles me viennent de mon père. »

    Comment pourrait-elle dire à un pirate de son rang qu'elle était ... La bâtarde d'une lignée de nobles marchands ? Car Kassanra s'était renseignée bien sûr, après les mots fatals qu'avaient porté Aerandir sur elle, comme des coups violents et brusques assénés à son mental déstabilisé par cette réalité. Une réalité qui ne convenait pas à la jolie flamme rousse. Elle avait donc cherché, fouillé, et compris que Noah Noblegriffon était un homme riche, puissant, mais âgé. Qu'il était heureux à présent, vivant loin de tout ce qu'il ignorait, nageant dans le bonheur bruyant des pièces qui s'entrechoquaient. Le reste, Kassandra l'avait peut-être volontairement occulté, sûrement plus par peur d'en connaître trop sur un homme odieux qui lui, vivait très facilement dans l'oisiveté sans vous. La rouquine n'était pas troublée à l'idée qu'elle allait prochainement bouleverser le monde tranquille des Noblegriffon : non, elle se donnerait d'ailleurs un grand plaisir à piétiner et balayer le château de cartes de ces messieurs les grands marchands. Ce qui la perturbait, c'était qu'au fond, il s'en ficherait, elle l'imaginait. Personne ne l'attendait là-bas, à Serramire.

    Puis les mots, qui tentaient de l'amadouer, elle s'en doutait, de Gabriel la firent froncer les sourcils. Elle était interloquée par ce qu'il venait de lui dire à demi-mot, sous le couvert d'une obscurité faible qui les encerclait, comme pour les pousser à se confier. Comme si aucune oreille indiscrète ou aucune mauvaise intention ne rôdait, hagarde, entre ces murs ... Tss.

    Cotoyé ? Il connaissait donc sa famille ? Bon sang, ce qui devait être une soirée décontractée et palpitante s'annonçait d'une manière qui ne plaisait pas vraiment à la rouquine, ou qui plutôt, la mettait dans un état de malaise étrange. On - le destin, une force supérieure quelconque ou que sais-je encore comme foutaise de croyances mortelles - voulait la confronter à ce qu'elle refusait tout bonnement d'accepter, c'est-à-dire son père, celui qui aurait du la voir grandir plutôt que de laisser son enfant survivre sans indice, sans nouvelles ... Sans rien. Kassandra avait toujours voulu savoir qui était derrière tout cela, mais elle aurait préféré que ce soit son géniteur qui la retrouve et qui la cherche. Au moins se serait-elle sentie aimée, ou objet des pensées d'un homme tourmenté par cet abandon peut-être involontaire ? ...

    Son visage ne laissa rien filtrer de ces amertumes, si ce n'est que son sourire s'était chiffoné dans une expression plus pensive. Elle ne pouvait rien prendre à al légère et si Gabriel détenait des informations sur les Noblegriffon, alors la rouquine allait devoir mettre un peu d'eau dans son vin et concéder quelques ... Informations.

    « Qu'est-ce que tu entends par côtoyer ? Réponds-moi franchement. Je veux bien être honnête avec toi - et pourtant Eris sait que si je te fais confiance, je ne dois pas oublier que toi et moi sommes pirates avant tout -, mais ca ne sera pas sans contrepartie. »

    La demoiselle n'oubliait pas ses priorités, son intonation basse mais plus grave qu'auparavant en témoignait, et la sincérité allait devoir être réciproque dans ce petit entretien. Sous la lueur vacillante des torches, on distinguait l'ombre des deux silhouettes se mouvant sur les murs. Le demi-silence pesant qui imprégnait le corridor n'était pas si loin de la grande salle où tous ces hommes de Meca partaient à la dérive en compagnie de leur or liquide préféré, et pourtant il semblait que franchir le rideau de perles les avait poussés dans une atmosphère totalement différente.

    « Parce que pour moi aussi, c'est important, bien plus que tu ne penses le croire. Parle-moi des Noblegriffon, Gabe. Qu'est-ce que tu sais sur eux ? »
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeDim 27 Déc 2009 - 10:10

Le Second fronça les sourcils alors que Kassandra continuait de dire que les boucles venaient de son père... A qui les avait-il volé? Où? Il espérait qu'il n'avait pas tué son porteur ou sa porteuse. Cela amoindrirait la vengeance de l'hybride. Et s'il était bien une chose que Gabriel ne supportait pas, c'était la frustration.

Il se ferma comme une huitre quand Kassandra lui demanda ce qu'il entendait par cotoyer. Elle était encline à être franche avec lui, s'il jouait le jeu. Mais tous deux étaient pirates et tous deux savaient qu'ils n'avaient pas vraiment de parole et pouvaient très bien se servir de ce qui allait se dire... Cependant, le Second hocha la tête, reprenant d'une voix solenelle :

- "Kassandra, ce qui va se dire ici et maintenant doit rester entre nous deux strictement. Je ne confierais pas tes secrets et tu ne confieras pas les miens. Nous aurions tous les deux trop à perdre je pense."

Il vrilla ses yeux couleur de glace dans ceux de la jeune femme. Elle comprenait. Elle était intelligente et savait quand il fallait cesser de jouer.

- "J'ai très bien connu Reldas Noblegriffon et Noah Noblegriffon."

Pour le moment, cela suffirait. Il disait la vérité, comme elle le lui demandait, sans pour autant tout dévoiler. Son regard se durcit alors que la jeune femme lui demandait de lui parler de cette famille.

- "Pourquoi cela t'intéresse?"

Cependant, il s'exécuta. Il avait eu raison de suivre son instinct. Kassandra en savait plus qu'elle ne le disait et cette famille semblait avoir de l'importance pour elle. Comme pour lui. Pourquoi?

- "C'est une famille de Serramire. Ancienne et influente de par sa richesse. Ce sont des marchands et ils savent comme personne s'enrichir. Ils sont vaniteux et arrogants, comme beaucoup de nobles, mais la pureté de leur sang semble primer sur tout. Surtout pour Noah."

Il parlait avec une note d'amertume dans la voix, comme s'il parlait en connaissance de cause... Et pour cause, il avait lui-même subi cette folie de la part de son demi frère. Certes, son père n'avait eu envie de le reconnaitre comme son fils que quand son héritier légitime avait été au bord de la mort, avant de laisser l'affaire en suspens quand Noah s'était rétabli. Mais Noah n'avait pas l'intention de se laisser éclipser par un frère bâtard plus vieux que lui et pourtant d'apparence plus jeune. La fierté de la famille ne s'en remettrait pas. Alors il avait fallu éliminer le demi frère gênant en le livrant aux bras d'Eris la cruelle.

Qui avait décidé de l'épargner.

Son regard s'était fait lointain alors qu'il repensait à cet instant, gravé au fer rouge dans sa mémoire. Son masque rigide s'était fissuré pour laisser entrevoir à Kassandra une souffrance encore réelle et une colère grondante.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeDim 27 Déc 2009 - 13:09

    Pourquoi tout cela prenait-il une telle tournure ? C'était donc si grave que cela d'avoir de tels bijoux ? Où était le problème ? Kassandra avait de moins en moins de mal à cerner l'implication de Gabriel quant à son propre lien avec ces boucles d'oreille. Elle les lui aurait volontiers donné si cela le perturbait tant. Sauf qu'on n'offrait pas à n'importe qui un tel leg aussi précieux, et aussi lourd de valeur sentimentale. Ses lèvres se froissèrent dans une moue de plus en plus songeuse, comme si l'affreux sentiment qu'une mauvaise chose se tramait dans l'ombre de leurs silhouettes coincées dans ce couloir trop froid naissait en elle avec lenteur, telle la fleur éclosant au petit matin.

    « Je ne dirai rien. Tu as ma parole, et j'ai la tienne. »

    Et seule Eris savait que Kassandra ne riait pas quand il s'agissait de tenir de tels propos. On ne pouvait pas reprocher à la rouquine de garder un certain sens de la loyauté, du moins quand cela touchait à des points sensibles qu'elle ne tenait pas à exposer à quiconque d'autre qu'un amant du calibre de Gabriel. Il était influent à sa manière dans le monde de la piraterie, et si elle allait répéter ce qu'il lui avait dit, elle savait pertinemment que la réciproque serait appliquée. Ce qui avait une fâcheuse tendance à la rendre encore plus ... Déroutée par leur discussion. Ils tournaient tous les deux autour du pot, donnant la nette impression que chacun savait où cela allait les mener, mais qu'ils n'en avaient ni l'un ni l'autre la moindre envie.

    « Noah ... Et Reldas. Qui est Reldas ? Et d'où connais-tu Noah ? »

    Sa voix ne se voulait pas pressante, mais elle peinait à freiner sa curiosité. Elle ignora volontairement sa question pour un temps. La rouquine ne se sentait pas prête à lâcher le morceau. Sur l'île, beaucoup de pirates méprisaient les nobles, et ceux qui descendaient de grands capitaines d'anciens navires de piraterie faisaient la fierté de l'île. En plus de prendre Kassandra pour une menteuse qui avait longtemps répandu la bonne parole selon laquelle Rhamyr était son père, elle serait vue comme une de ces filles à papa en manque de sensation. Ce qui était faux. Oh, comme elle aurait tant voulu, en ce moment même, d'une autre vie bien différente de celle qu'on lui offrait ... Là, déchirée entre deux mondes, l'un qui lui convenait tant, mais l'autre, où ses racines étaient enfouies, et où on la rappelait ... Commele chant des sirènes tentant d'amadouer le marin égaré.

    La façon dont Gabriel parla de la lignée des Noblegriffon, et surtout de Noah, surprit la jeune femme. Le voilà même qui se laissait aller à percer l'armure impassible. La douleur de ses traits lui rappela son prorpe visage, qui s'était crispé aux révélations du Gardien d'Arcamenel. Il lui rappelait aussi combien il pouvait être difficile de garder un secret pour soi quand on savait que s'il était divulgué, il nous ruinerait. On ne pouvait se fier qu'à soi-même, par peur d'être trahi ou pire, de voir se répandre ce qu'on a si durement voulu cacher aux yeux du monde.

    D'après le Second, Noah - son ... père - n'était pas un ange. Ca ne la surprenait même pas. Il appartiendrait à cette catégorie de nobles fiers pour qui le pouvoir et la richesse étaient des valeurs primordiales. On était si loin.. Si loin de ce que sa fille illégitime songeait réellement. Quelle importance accordait-elle à tout cela ? Sûrement un impact moindre que ce lâche. Cet homme qui, rien qu'à en entendre parler, l'écoeurait davantage. D'une voix d'outre-tombe, Kassandra s'entendit répondre à Gabriel des mots qu'elle regretterait peut-être plus tard. Mais après tout, il semblait être le seul à qui elle pourrait peut-être ... Délivrer un peu de sa personne ? Partager le poids qui pesait sur sa conscience ? Qui sait. Kassandra savait qu'elle se mordrait les doigts d'avouer tout à Gabriel, parce qu'elle se basait sur l'apparence. Et le jugeait capable de tenir sa langue indéfiniment.

    « Je n'ai pas menti, les boucles me viennent de mon père ... Plus ou moins indirectement. Je ... ne les ai pas volés, je n'ai tué personne pour les avoir. C'est ma mère qui les a eu. Mon... L'homme qui l'aimait en ce temps là, en était le propriétaire. Et c'est à Rhamyr que ma mère a confié les boucles, avant de mourir. Elle voulait que je les garde, parce que c'était grâce à elles que je saurais la vérité. Qu'elle m'arrange ou non, d'ailleurs. »

    Une vérité qui la dégoûtait ; elle en était même incapable de dire clairement et audiblement que Noah était son véritable père. Ses yeux brillaient de fureur et d'amertume, tandis que ses lèvres semblaient expulser comme un venin infect chaque mot qu'elle disait. Chaque mot qui les rapprochait inexorablement et involontairement.
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeDim 27 Déc 2009 - 21:27

Il hocha simplement la tête alors que Kassandra résumait la situation : chacun avait donné sa parole. Elle valait ce qu'elle valait et ils ne se devaient rien l'un l'autre, mais ils étaient tous deux assez intelligents pour savoir où était leur intérêt. Et il n'était pas à la délation. Le regard de l'hybride se durcit alors que Kassandra posait des questions gênantes. Mais il était bien obligé d'en passer par là.

- "Reldas est le père de Noah. Enfin, était. Il est mort maintenant."


Il ignora délibérément la question suivante, pas encore prêt à lui révéler qu'il était le fils ainé, bien qu'illégitime, de Reldas Noblegriffon. Ah si seulement, la batârdise n'était pas une si grande honte dans leur société... Si seulement, cela n'importait pas et que seul l'âge primait... Il serait, à ce jour, à la tête d'un immense fortune, ayant vécu dans un luxe outrancier. Avait-il envie de cette vie oisive? Il n'en était pas certain. La liberté et l'aventure lui convenaient bien mieux.

- "Quant à Noah, nous n'avons que quelques années de différence. Sauf que le temps ne signifie pas la même chose pour nous deux et ne laisse pas les mêmes traces."

Noah était désormais un vieil homme. Gabriel, au contraire, était encore dans la fougue de la jeunesse et le resterait pour un très long moment. Mais ce fut surtout la douleur dans son regard qui décida enfin Kassandra à avouer. Certes, ce n'était qu'à demis mots, mais le Second était intelligent et les pièces du puzzle se mettaient en place. Un peu trop brutalement. Il saisit soudain le bras de Kassandra, alors que son visage était devenu livide. La vérité ne lui plaisait pas. Ses déductions lui donnaient brusquement envie de vomir. Non... Le destin ne pouvait pas se jouer si cruellement d'eux...

Rhamyr n'était pas le père de Kassandra. Il avait adopté une fille qui n'était pas la sienne, avec pour seul héritage une paire de boucles d'oreille en souvenir. Des bijoux qui étaient plus criants qu'un aveu. Et Kassandra qui insistait sur Noah... Le demi frère de Gabriel... Non... L'hybride n'avait tout de même pas couché avec sa nièce?

- "Ne me dis pas que Noah est ton père... C'est... impossible."

Ses lèvres n'étaient plus que deux traits minces, pincés par l'horreur. Son regard était agrandi dans son visage sévère, soudain empreint d'une fragilité que Kassandra ne pouvait pas encore comprendre. Mais quand elle comprendrait... Allait-il lui avouer la vérité au risque de la détruire?

- "Il était si accroché à l'idée de pureté... Jamais il n'aurait pu faire une bâtarde..."
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeDim 27 Déc 2009 - 22:08

    Voilà des données intéressantes. Gabriel connaissait la généalogie de Noah, et qui plus elle apprenait que son grand-père était mort... Oh bien sûr, ca ne chamboulait pas grand chose. Quoique entendre des détails aussi précis et concis sur la famille de son père inquiétait de plus en plus la rouquine. Mais quel statut avait Gabriel pour savoir autant de choses au sujet des Noblegriffon ? Et d'où lui venait cette subite virulence, cette froideur inexplicable lorsqu'on évoquait Noah ? Il manquait trop de détails, trop de questions demeuraient sans réponse pour que la jeune pirate comprenne clairement ce revirement de réactions.

    Et la comparaison qu'il faisait entre lui et Noah ne pouvait qu'augmenter son anxiété due à cette absence de compréhension. Mais pourquoi n'était-il pas plus explicite ? Bon sang, lui aussi avait donc quelque chose à cacher ? Ce serait tout bonnement impensable. Les Noblegriffon causaient déjà bien des peines à Kassandra sans même savoir qu'elle existait, alors si en plus même Gabriel subissait les affres de cette lignée de marchands sans scrupules apparents, il y avait vraiment de quoi se faire du souci quant au caractère et à la morale du dit Noah.

    La jeune rouquine se retint difficilement de pousser un cri de surprise quand l'hybride lui saisit le bras avec vigueur, comme s'il faillit tomber à la renverse d'apprendre de telles nouvelles. L'espace d'un instant, la jeune femme crut même qu'elle allait devoir l'éventer et lui apporter à boire tant il paraissait au bord du malaise, sa peau devenue blafarde et ses lèvres pincées, ses yeux reflétant l'horreur angoissante de celui qui a compris bien avant vous la gravité du moment. C'était dans ces instants là que Kassandra avait une sainte horreur de n'être informée qu'à demi-mot de toutes les informations et les connaissances dont disposait Gabriel réellement. Posant une main sur le bras qui la tenait, comme pour chercher à compatir ou au moins pour tenter vainement de l'apaiser par un geste futile, les prunelles assombries de la rouquine cherchèrent le regard polaire de Gabriel, le pressant malgré elle.

    « Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ?! Gabriel, s'il te plaît, jure-moi que tu garderas ca pour toi, il faut vraiment que personne ne le sache ... Crois-moi si j'avais vraiment choisi mon père, ca ne se serait pas porté sur lui... »

    Il ne pouvait décemment pas être choqué à ce point juste en apprenant que le père de Kassandra était Noah Noblegriffon. Il y avait autre chose, songeait la rouquine, et la lueur d'effroi qui s'attisait dans les pupilles dilatées par le choc de l'hybride confirmèrent ses pensées.

    Tentant malgré son avidité de savoir ce qui avait provoqué une telle tension chez le pirate, la jeune femme chercha à le parler d'une voix basse et inutilement radoucie malgré les inflexions vibrantes d'impatience de son timbre, comme pour l'inviter à la confidence. Elle supportait de moins en moins l'allure du Second, qui n'avait pas l'habitude de se laisser aller à une telle expansivité. Ce qui ne la rassurait guère.

    « Tu n'as pas répondu à une de mes questions. Quel est ton lien avec Noah ? Crois-moi, ce que tu diras restera entre nous. »

    Si seulement elle savait à quel point ses mots étaient importants, ce soir là ...
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MessageSujet: Re: [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE]   [L'Onirique] « Je n'ai jamais ... » [TERMINE] I_icon_minitimeDim 27 Déc 2009 - 22:29

Ça pour ne pas avoir l'habitude d'être aussi expressif, il n'en avait pas l'habitude. Mais il fallait quand même avouer que les dieux leur jouaient une bien cruelle farce... De toutes les femmes de Méca, il avait fallu qu'il couche avec celle qui avait un lien de parenté avec lui... Il avait fallu qu'il brule de désir pour la fille de son frère... En toute ignorance, mais quand même... Peu de femmes avaient laissé un souvenir aussi marquant à l'hybride que la rouquine incendiaire. Sans en être tombé amoureux, il l'avait apprécié et il avait été plus que satisfait avec elle. Heureusement qu'un enfant n'avait pas été conçu... Il s'était littéralement décomposé en comprenant. Ce fut d'une voix blanche qu'il répondit à la jeune femme :

- "Ne t'en fais pas, je ne dirais rien..."

La main de la jeune femme s'était posée sur la sienne qui enserrait encore son bras. Il déssera son étrainte, mais sans tout à fait la lâcher. Il avait une folle envie de sombrer dans l'oubli et dut se faire violence pour ne pas s'emparer d'une herbe qui l'enverrait planer quelques heures.

- "Mais quel salaud hypocrite..."

La rage bouillonna de nouveau, avant d'exploser, quand il lâcha complêtement Kassandra pour frapper le mur près de sa ravissante tête. Son poing laissa une empreinte dans le mur peu solide, mais un craquement de mauvaise augure résonna également alors que les os se plaignaient violemment d'un tel traitement. Il n'avait pas eu l'intention de frapper Kassandra. Pas du tout. La douleur irradia dans sa main, fulgurante, dissipant un peu le brouillard rouge dans lequel il venait de se perdre. Son autre main vint se poser sur le mur, bloquant ainsi la rouquinen mais sans pour autant paraitre menaçant. Non, il était effondré. Il baissa la tête, comme vaincu, offrant à Kassandra une image de lui-même que personne n'avait jamais du voir ici bas. Ses cheveux cachaient totalement son visage alors qu'il reprenait d'une voix sourde, dénuée de timbre :

- "Ce n'est pas une question de confiance Kassandra."

Il releva doucement la tête, son visage à quelques centimètres de celui de Kassandra, son regard à hauteur du sien. Un regard soudain tourmenté... hanté.

- "J'ai peur que la vérité ne te blesse cruellement. Et quoique tu puisses penser de moi, te faire du mal n'est pas dans mes intentions."

Il se mordilla la lèvre inférieure, soudain très jeune. L'ombre du gamin jeté dans les bras cruel d'Eris flotta dans ses yeux froids.

- "Ma mère était une hybride d'une grande beauté... A ce qu'on m'en a dit. Elle est morte en me mettant au monde. Elle est morte, payant ainsi le prix de son amour pour un homme qu'elle n'aurait jamais du rencontrer... Cet homme... C'était Reldas..."

Il fut incapable d'en dire davantage. Kassandra était une grande fille... Elle avait compris que Reldas était le père de Noah et donc son grand père. Et elle allait vite comprendre qu'il était également le père de Gabriel... Faisant ainsi de lui le frère de Noah... et l'oncle de Kassandra. Tous deux batards, ssur deux générations différentes... Rejetés. ils s'étaient pourtant trouvés à un moment donné. Et avaient commis l'un des plus infâmes péchés.

Il s'éloigna de la jeune femme, de quelques pas, ramenant sa main blessée contre lui. Cet aveu l'avait épuisé psychiquement. Mais comment Kassandra allait-elle acceuillir la nouvelle? Il la regardait, presqu'avec honte, mais ils avaient péché par ignorance... Et il ne voulait pas voit le dégout d'afficher sur le joli visage de la jeune femme.
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