Feu Follet [PV Larme Pourpre et Aguildur Silverfang]

La nuit tombait, rideau bleu moiré, silencieuse et apaisante. L'obscurité avançait, lentement mais sûrement jusqu'à finalement tout recouvrir. Au loin, une bulle creva le silence ainsi que la surface d'une étendue étrangement lisse. Puis, plus rien.
Puis, une explosion de bruits aussi infimes soient-ils brisèrent le silence. Le fourmillement de créatures commençait, accompagné par un doux clapotis dû à des bêtes qui avançaient sur la surface de ce qui semblait être un marais.

Au loin, une silhouette crapahutait, solitaire. Elle marchait dans la tourbière d'un pas léger. Vêtue de cuir et d'une cape brunâtre, cette ombre presque fantomatique atteignit une bute de terre. Elle la gravit en deux pas souples puis s'accroupit.

Shaé savait que ce marais était grand, mais cela faisait déjà une semaine qu'elle marchait dans cette eau horrible où la puanteur s'était accroché à chaque parcelle de tissus et de cheveux.
Fatiguée, elle commençait à sentir ses forces diminuer, mais s'arrêter lui était interdit !

Sa main ouvrit le sac qu'elle portait à son côté droit. Elle en sortit du pain qu'elle croqua avec faim, et une gourde en cuir qu'elle déboucha afin d'y boire quelques goutes d'eau.

Sur elle, il devait lui rester à peu près trois jours de nourriture et d'eau... Normalement, si elle marchait d'un bon pas et qu'elle ne se trompait pas, elle verrait la fin de ce marécage d'ici deux ou trois jours. Donc, tout allait bien !

Un peu plus tard, elle reprit sa route, fatiguée mais rassasiée !
Il faisait nuit complète. Shaé ne voyait pas plus loin que ses pieds mais quelques fois, des bulles crevées avant de s'embraser, ce qui lui permettait d'avancer grâce à ces feux incongrus.

Elle allait se reposer sur un petit îlot quand soudain une bulle éclata juste devant elle et s'embrasa.
Surprise, la demi-drow tomba, fesses les premières, dans l'eau en décomposition.
Trempée et énervée, elle installa son bivouac tandis qu'elle faisait sécher et ses habits et son sac. La nourriture était perdue... Il ne lui restait plus que de l'eau...

[Larme pourpre, à cause de son mutisme, confond phonétiquement dans son esprit certaines consonnes qui lui sont imprononçables. Il y a par exemple le « s » avec le « f » et le « n » avec le « m ». Le « m » est lui-même un son différent et proche de « umm » car émit bouche fermé. Par conséquent pour mieux saisir sa façon de penser, la traduction sera mise entre parenthèse et en italique]

Faisant preuve de patience et de détermination, Larme pourpre arrivait enfin dans les territoires qui, d’après ce qu’on lui avait dit, étaient contrôlés par les Drows. Ca n’avait pas été facile de se faire comprendre et indiquer le chemin. D’ailleurs, celui-ci n’était probablement pas le plus direct ni le plus aisé. Le seul avantage était que la nourriture y était abondante, si on savait quoi chercher…

Avant de pénétrer dans ce marais, Larme pourpre fit escale dans un petit village dans lequel on lui donna la direction à prendre pour aller chez les Drows. Ils avaient l’habitude car des voyageurs passaient régulièrement dans les parages. Grâce à eux et aux ventes qu’ils leurs proposaient, leur village perdurait, car il est sûr qu’autrement, cela ferait longtemps que les gens auraient quittés cette région malsaine.
Larme pourpre commença par y acheter quelques maigres provisions. Ensuite utilisant son cahier et un langage de signes simples mais explicites, Larme pourpre réussit à se faire expliquer quelques trucs sur le marais et on lui proposa des sandales de bois assez larges et crénelées pour éviter de glisser et de s’enfoncer dans la tourbe. C’était leur « produit phare ». Naïvement, Larme pourpre prit les chausses que le marchand lui tendait avant de lui tourner le dos et de s’apprêter à partir alors qu’il n’avait même pas encore prononcé son prix (exorbitant). L’homme, d’abord interloqué avant d’être énervé, saisit une petite lame puis courut pour rattraper ce voyageur malhonnête. Ses pas lourds et ses interpellations firent immédiatement faire volte-face à Larme pourpre qui intercepta sa course et le projeta au sol. Le dos claqué à terre, le bras tordu et sa propre lame sur la gorge, le marchand déglutit un bon coup avant de s’excuser de s’être énervé puis de lui offrir les sandales ou n’importe quoi d’autre pourvu que sa vie soit épargnée. Les autres villageois commençaient à s’attrouper alors Larme pourpre le relâcha et s’enfuit rapidement et sans demander son reste vers le marais.

Cela faisait plusieurs jours que Larme pourpre marchait dans ce lieu des plus particuliers. Ses maigres rations étaient épuisées mais il lui restait encore de grosses racines juteuses dénichées la veille. Trouver de la nourriture dans la nature après avoir observé les animaux était la chose principale que son errance lui avait apprise, n’ayant au début d’autre but que de survivre.

Et voilà, la nuit était déjà tombée ! Il faut dire que la canopée y aidait pour beaucoup. Celle-ci recouvrant en effet une bonne partie du marais, c’est ce qui le rendait si sombre aussi bien de nuit comme de jour. D’ailleurs à cause de ça, on ne pouvait pas se repérer correctement avec les étoiles et c’était un coup à se perdre...

Larme pourpre ne pouvait rien voir dans une obscurité si prononcée et l’environnement était trop dangereux pour continuer. Quand on lui a dit qu’il fallait se méfier des feux follets car ils étaient traitre, Larme pourpre avait enregistré l’information sans pour autant savoir ce que c’était. Mais après avoir vu un de ces feux apparaître brusquement se mettre à danser devant ses yeux ce fut très clair dans son esprit. Grâce aux fameuses sandales, sa progression dans le marais n’était pas trop difficile mais la boue finissant par en avoir raison, cela l’obligeait à les nettoyer (sommairement) tous les soirs.

[La narration est ramenée à l’action présente]

*Muit main-nan. (Il fait nuit maintenant.)

(Bâillement intérieur)

*Fo’umèii !* (Ouaah ! J’ai sommeil !)

Larme pourpre regarde alentour et repère un gros arbre avec des branches basses assez solides pour supporter son poids. En quelques minutes, voilà notre assassin haut perché en train de mastiquer une étrange racine adossé à son arbre. Soudain, quelque chose attire son attention au dessus de sa tête. Il fait vraiment très sombre mais ça émet un imperceptible sifflement à intervalle régulier… C’est un serpent !
La bestiole est enroulée autour d’une branche fine et pointe la tête vers Larme pourpre. Le reptile est apparemment en pleine chasse à l’insecte. Larme pourpre sait que ces créatures, du moins de cette taille, ne sont généralement pas dangereuses et ne mordent que pour se défendre. Mais Larme pourpre sait autre chose : les serpents sont comestibles !

*Maa’m !* (A manger !)

Larme pourpre sors lentement une dague… puis saisit violement l’animal et le décapite d’un seul coup !

On ne sait jamais que sa peau soit venimeuse et ses couleurs ne sont pas distinguables en pleine nuit.
Larme pourpre, sa racine toujours dans la bouche, entreprend donc d’écorcher la bête quand des bruits non loin attirent soudain son attention. Un « plop » suivit d’un « plouf ! » puis d’un mot incompréhensible prononcé par une voix lui révèle la présence d’un autre voyageur. Si jamais celui-ci prenait la même direction, il serait judicieux de le suivre ! Mais d’abord méfiance.

Notre assassin a pu estimer approximativement le lieu d’où provenaient les bruits. Après une descente rapide de son perchoir, Larme pourpre approche prudemment de l’endroit en question. C’est dangereux et difficile d’y voir. Il y a plusieurs feu-follets qui éclairent une des nombreuses mares vaseuses et soufrée du marais. Il y a quelque chose au centre de plus lumineux… C’est un vrai feu ! Quelqu’un a installé son bivouac sur cette butte et a réussi à se faire un feu (probablement en s’aidant du soufre alentour pour allumer des débris de bois humides ?).
C’est un petit peu loin mais Larme pourpre, qui s’est accroupi sur la lande à côté d’une touffe de joncs, ne veut surtout pas aller se mouiller ni se faire repérer. S’il y avait un arbre où grimper dans les parages ça serait l’idéal…

Larme pourpre se surprend à bâiller alors que ses pensées commencent à se perdre. Tout-à-coup, un pressentiment étrange l’envahi. C’est là qu’une bulle de taille impressionnante explose littéralement à proximité, projetant des gouttes d’eau souillée un peu partout avant de libérer une grosse et lumineuse flamme bleutée qui avance dangereusement vers son visage. Ça craint ! L’inconnu a dû entendre le bruit et a tourné la tête dans sa direction. Si ses habits noirs sont pratiques pour passer inaperçu la nuit, ce n’est absolument pas le cas de ses yeux pourpres qui sont probablement à ce-moment là en train de refléter la lumière du feu-follet… C’est raté pour la discrétion…

Trois semaines.

Cela faisait maintenant trois semaines qu'Aguildur avait quitté la cité troglodyte, et capitale des nains Kirgan. Trois semaines qu'ils pourchassait sans relache une bande de pillard qui s'était enfuie alors que le vieux général et son équipe rasaient leur camp. Traversant la forêt d'Anaeh, il était finalement parvenu à cette contrée inhospitalière. Et maintenant, il était un nain, isolé dans un territoire désolé, avec comme compagnie une jeune once répondant au doux nom de Neïsha. Les pattes du félin comme les bottes métalliques du nain était couvert de crasse. Sa barbe aussi. son visage, noircie, fatigué, était pourtant alerte. Il avait déjà repéré, tout bon chasseur qu'il avait été, les avantages (peu nombreux) et les inconvénients (surtout les inconvénients) du marécage. Le félin pataugeait difficilement dans l'eau noires, et se léchait tant qu'elle le pouvait.

Aguildur donc, nullement gêné par les bulles de gaz du marais, fut cependant attiré, à la vive flamme d'un explosion deux lueurs rouges, venant d'un jonc devant lui.

Une rapide analyse tactique s'imposa. Possibilité: yeux, donc ennemis. Si c'est le cas: Déplacement latéral, utilisation de l'arbalète lourde.

Mais, dès qu'il s'approcha, Neïsha se coucha et agita la queue doucement. Ce rituel ne pouvait signifier qu'une chose: Humain à proximité. Un grondement sourd remonta cependant de sa poitrine.

Drow à proximité.

Ces infos contradictoires ne pouvaient signifier que trois choses: Ou bien il y avait un humain, ou bien il y avait un demi drow, ou bien les deux. C'est la conclusion qu'il en tira. Il décrocha lentement son arbalète lourde, et se posta, à guêt, derrière une grosse souche, utilisant l'écorce pourrie comme support, guêtant l'apparition de sa cible, et la suite des évènements.

Deux yeux pourpres. Deux lueurs vives et vivantes qui la regardent, la lumière d'un feu follet reflété dans ceux-ci.
Shaé se leva d'un bond, sa main sur un poignard et lança à l'adresse de la silhouette :

- Qui va là ? Montrez-vous !

La jeune femme se déplaça de façon à se tenir face à l'inconnu tout en ayant un aperçu des alentours. Car personne de censée ne viendrait seule en ces lieux reculés et dangereux. Enfin à part Shaé...

D'ailleurs, sa tactique ne fut pas mauvaise. En effet, un bruit discret et furtif attira son attention sur sa droite.
Elle inclina légèrement sa tête, à l'a guet d'un quelconque mouvement qui puisse être ennemi. Elle observa les alentours, visionnant ainsi plusieurs endroits où pouvaient se cacher des hommes. Une grosse souche défraichie, un talus assez haut, l'eau du marais...

En souplesse, elle s'accroupit, récupérant ainsi une dague dans sa botte.

- Je propose que vous vous rapprochez vers le feu, tout les deux. je ne ferais rien. Promis !

Sur ces derniers mots, elle déposa ses armes qu'elle tenait dans ses mains. Il lui restait sur elle un poignard et deux dagues bien camouflés. Au cas ou...

C’est bien beau de conseiller aux autres de se méfier de quelque chose. Même si en effet on s’en méfie, ce n’est pas comme si le simple fait de se méfier allait empêcher les choses de se produire…

Il était trop tard pour se cacher. Larme pourpre payait sa curiosité. L’individu s’était levé rapidement, sur le qui-vive, en lui demandant de s’identifier.
Sa silhouette était mieux visible et Larme pourpre reconnut des oreilles effilées en plus des atours et de la voix d’une femme.
Mais avant de pouvoir réagir, un autre individu, s’était fait remarqué non loin. Les crépitements du feu, les bulles qui éclataient et les autres bruits ambiants du marais avaient masqué le bruit écœurant de succion provoqué par ses pas dans l’eau bourbeuse. Un son grave et sourd durant un instant aida Larme pourpre à repérer son ombre se glisser derrière ce qui semblait être une vieille souche. Son comportement n’était pas celui d’un animal, mais le son sourd et grave ne lui disait rien… La situation s’était corsée. L’inconnue l’avait aussi détecté. Elle voulut apparemment éviter le conflit et leur demanda d’approcher, après avoir déposé son arme à terre.

[La narration est ramenée à l’action présente]

*Laa’me pou’mpe ê méfianfe. F’ê moi fau’e. Veu pa méfianfe. Pa bon muit bua-bua mai fi, fi main’nan veu pa méfianfe.*
(En agissant ainsi j’inspire la peur et la méfiance. Ce n’est pas ce que je voulais et c’est entièrement ma faute. Ce n’est pas le bon moment, en pleine nuit, d’aller discuter mais dans le cas présent je n’ai pas trop le choix, si je ne veux pas continuer d’inspirer la méfiance.)

Larme pourpre se redresse alors lentement et enlève son capuchon (ce qui ne change pas grand-chose mais est un signe de bonne foi). Pour répondre à l’invitation « amicale » de l’inconnue, Larme pourpre lève la main droite puis sors lentement la dague de son dos avec son fourreau. Les deux mains ainsi bien en évidence, l’une sans arme et l’autre tenant la dague par son fourreau, Larme pourpre indique son intention de ne pas se battre.
Maintenant il lui faut rejoindre la butte et pour cela se tremper les chevilles dans l’eau. Tant pis, ce n’est pas un grand sacrifice si c’est pour faire une rencontre intéressante. Larme pourpre entreprend donc d’avancer lentement vers le feu, d’abord un pas (bwoerk) puis deux… Mais pas trop pour l’instant, il faut que l’autre individu, très suspect lui aussi, se montre et indique ses intentions. Larme pourpre espère et a toutes les raisons de penser qu’il choisira d’être raisonnable. Sa situation est la plus délicate puisqu’il est le dernier protagoniste et que les deux autres, qui se sont montrés des signes de neutralité, ont maintenant leur attention tournée sur lui…

-HJ- du fait du bac, je deviens indisponible, je ne vais pouvoir assurer la suite du topic,aussi,pour vous laisser la possibilité d'évoluer librement ceci est mon dernier message. désolé.... bonne continuation.-HJ-

Aguildur regarda, ébahi, la scène. Un humain et une drow se faisant face, et point de combat? C'était pour le moins étrange. Il s'interrogea sur la nature de la rencontre. De la conversation présente, il en déduit que cette rencontre n'avait pas été organisée. Aussi lâcha-t-il l'affaire. Ces deux étrangers n'étaient pas les pillards qu'ils poursuivaient. Mais la drow ou demi-drow sous-entendait qu'il avait été repéré. Mince,comment s'éclipser sans danger? Il regarda Neïsha. Après tout.... pourquoi pas. Tout les éléments du terrains sont bon. Il lui fit un petit signe, et elle surgit des fourré.

Les deux jeunes gens purent voir un magnifique félin d'une blancheur immaculée sortir de derrière la souche, les regardants un moment, puis s'enfuir vers la gauche.

Pendant ce temps là, le nain, usant des tactiques du chasseur, rebroussa chemin sur la terre ferme, par la gauche, se fondant parmi les arbres avant de disparaître complètement.

L'un des deux individus se montra, tout en indiquant son intention de ne pas faire couler de sang.
Shaé soupira légèrement, un poids enlevé. Elle ne savait pas vraiment se battre. Elle dégainait ses poignard juste en cas de défense.

Son regard suivit celui de l'inconnu (qui semble étrange) vers la grosse souche où il se cachait très certainement.
Contre toute attente, un félin d'une blancheur irréelle puisque la nuit est présente, sortit de derrière le bosquet. Son regard impérieux croisa celui de la demi drow. Puis, il courut, disparaissant dans la nuit.

*Le félin sert à détourner l'intention*. Cela se tenait, puisqu'un bruit, certes discret, disparu dans la nuit à l'opposé du chemin que le félin avait emprunté.

Sans attendre, Shaé se rua dans l'eau en direction de la souche. Elle la contourna mais il n'y avait personne.
*Bah... Après tout, l'individu est parti. Ça signifie qu'il ne voulait pas nous parler...* Elle haussa les épaules, retourna sur ses pas et s'arrêta face à l'inconnu.

- Visiblement, nous ne sommes plus que deux. Elle sourit afin d'essayer de détendre cette atmosphère assez pesante. Et si on se mettait au sec ?

Sur cela, elle se dirigea vers la monticule de terre où un feu crépitait. Elle déchaussa ses bottes et les mit à sécher près du feu. Elle se retourna ensuite vers l'inconnu, le détaillant au passage. Environ 1m6, son visage camouflé, on ne pouvait pratiquement rien savoir sur son physique. Seul un morceau de peau était visible, d'une couleur fumée...

- Je me présente : Shaé Calden. Que faites-vous ici ? Je croyais sincèrement ne croiser personne dans ce marais...

[HJ : Bon courage pour le BAC et à une prochaine fois]

Alors que les regards se tournaient vers la vieille souche, une once magnifique surgit hors de la cachette. Nécessairement, cette intrusion détourna l’attention mais Larme Pourpre n’était pas dupe. Sans se douter que le fait de rencontrer un félin dans un marais n’était pas chose commune, Larme pourpre savait néanmoins que ce comportement téméraire n’était pas caractéristique d’un tel animal, qui ne se serait jamais montré de la sorte.

*Un ’haa ! Pa bon ‘haa fuu’vie, ou fi maî’pw’ ou fi bébé…
(Un (gros) chat ! Un chat qui surgit comme ça et qui se montre ce n’est pas normal, à moins qu’il soit dressé ou qu’il ait une portée à protéger…)

Comme pour lui donner raison, l’animal leur tourna le dos et s’enfuit en bondissant, donnant paradoxalement l’impression qu’il voulait qu’on le suive dans la nuit noire. Il était certain que l’individu qui l’accompagnait avait profité de cette diversion pour s’en aller.
Bondissant alors de sa butte, la jeune femme partit vérifier, aussi rapidement qu’elle le pouvait, derrière la souche, mais il n’y avait (plus) personne. Larme pourpre la regarda faire tout en se posant des questions sur le probable individu qui était parti. Cette attitude très suspecte ressemblait à une tactique d’éclaireur. Était-ce un Drow ? Si c’était le cas, maintenant qu’on l’avait repéré, il y avait peu à craindre dans l’immédiat. Mais plus tard qui sait ?...

La jeune femme revint sur ses pas et déclara une évidence dont les gens loquaces ont l’habitude mais qui était idéal pour servir d’introduction et débuter la conversation. Larme pourpre opina brièvement de la tête pour accepter l’invitation à grimper sur la butte et à se rapprocher du feu. Son attitude décontractée était rassurante, elle offrait confiance et montrait qu’elle ne craignait plus la présence de Larme pourpre. Chacun se dévisagea rapidement à la lumière des flammes. La jeune femme ressemblait à une Drow, bien que Larme pourpre n’en ait jamais vu qu’une seule fois de près.
Sur le moment, un sentiment indescriptible l’envahit. Il y avait beaucoup de petites ressemblances entre les deux. La couleur blanche étincelante des yeux était aussi étrange que pour les siens, et on pourrait se tromper en la pensant aveugle. Le visage pâle contrastait avec les cheveux sombres comme sa peau claire contrastait avec ses vêtements. Les oreilles aussi, qu’elle avait aperçut plus tôt (mais à présent cachées par la chevelure) étaient pointues (certes beaucoup plus nettement). Enfin, il n’y avait pas une grande différence de taille non plus et leur carrure fine et musclée était comparable… Après il y avait toutes les autres différences propres à chacun, à commencer par le fait que la jeune femme était adulte.
Celle-ci d’ailleurs reprit la conversation.

(La narration est ramenée à l’action présente)

- Je me présente : Shaé Calden. Que faites-vous ici ? Je croyais sincèrement ne croiser personne dans ce marais...

Le fait que la jeune femme commence par se présenter est un signe de confiance supplémentaire pour Larme pourpre. Sa première question n’est pas sur son nom, montrant que ce n’est pas une information qui lui paraît essentielle.

Larme pourpre entreprend alors de lui répondre par signe et montre l’emplacement du coin de sa bouche avec un doigt puis fait un « non » de la tête en croisant ses mains. (Bien que ça lui soit prononçable, ça ferait plus débile que crédible de dire « Eu fui muet »).
Ensuite, Larme pourpre se pointe la poitrine du pouce puis place son index à côté de son œil avant de faire un demi-cercle avec sa tête. Puis ça enchaine en mimant le contour d’oreilles pointues avec le bout de ses doigts. Ses deux index se superposent alors dans un sens puis dans l’autre avant que le pouce ne désigne son interlocutrice. Après quoi, un index pointé vers le ciel à hauteur de son visage fait un cercle complet avant de finalement se rabattre vers le sol… Une pause. (Ce que Larme pourpre à voulu dire avec ses signes : moi / cherche / « grandes oreilles pointues » / comparatif incertain / toi / dans la région).

Devant la mine intriguée de la jeune femme, Larme pourpre lui fait signe d’attendre puis sort son carnet et son crayon d’une poche cousue à l’intérieur de sa cape. Ca devrait être plus facile à comprendre avec ça… Enfin, espérons. Larme pourpre se met donc à écrire de son écriture maladroite avant de lui tendre. Ça lui semblait correct…

« Moi humain mai fan Dwow ~~u’hè~~ cherche Dwow , toi Dwow ? »

Pendant que Shaë lit le message, Larme pourpre rapproche ses pieds du feu pour les faire sécher. Puis ses doigts décrochent le serpent décapité et écorché qui pendait épinglé à sa ceinture avant de l’embrocher et de le tendre dans les flammes. Ça serait bien meilleur cuit !
Devant le sourcil interrogateur des yeux qui se relèvent pour lui répondre, Larme pourpre fait un signe ondulatoire horizontal avec son bras libre puis sert le poing et mime l’action d’arracher un morceau avec la bouche avant de lui tendre la chose invisible que tient sa main tout en penchant la tête légèrement sur le côté avec sourcil relevé…

Intriguée par cette personne dont elle ne pouvait dire avec certitude si elle était un homme ou une femme, Shaé essaya tant bien que mal de comprendre le langage quelque peu étrange et incertain de l'individu.

Finalement, l'inconnu préféra l'écriture à la parole, ce que la demi drow accepta avec plaisir.
Elle se pencha sur le carnet, réellement intriguée.
Ainsi c'était un humain (ou une humaine). Visiblement il recherchait un Drow dans ce marécage.

Shaé releva les yeux pour répondre à l'humain, mais celui-ci lui faisait des signes. La demi-Drow arriva à peu près à comprendre.
Elle hocha avec force sa tête, de haut en bas.
Tient, depuis quand n'avait-elle plus de langue ? Shaé s'arrêta et répondit :

- Merci, j'en veux bien. Justement je mourrais de faim... J'ai tout perdu dans le marais... Maudit marais ! Tu es mon sauveur ! Vraiment, je me demande si on aurait retrouvé un jour mon cadavre ! Tu sais à combien de lieux on est d'un village ?

*Mince, faut que j'arrête de parler !* Elle s'autorisa un sourire, se pinça les lèvres avant de répondre à la question de l'humain.

- Non, je ne suis pas une Drow, enfin si. A demi... Pourquoi recherches-tu un Drow ? Et dis-moi, comment t'appelles-tu ?
Désolée... Je sais pas ce qu'il m'arrive. Visiblement je suis en manque de dialogue. Faut croire que c'est le marais qui fait ça ! Mince... Voilà que je recommence. Bon, j'me tais et je t'écoute !

Shaé fit mine de fermer sa bouche, un sourire sur ses lèvres.
Elle était vraiment contente de parler avec quelqu'un ! Cela faisait plus d'une semaine qu'elle errait seule. Elle aurait pu devenir folle !

Dès que Shaé commença à se mettre à parler, Larme pourpre sentit tout de suite qu’il ne s’agissait pas d’une personne dangereuse. Puis, à son attitude et à ses paroles confiantes, on pouvait sentir son éreintement et son exaspération, ajoutée à cela son soulagement de trouver de la compagnie. Larme pourpre était plutôt du genre solitaire mais ce sentiment ne lui était pas inconnu. C’était comme retrouver son maître après avoir effectué une mission difficile : un sentiment exagéré de confiance et de sécurité.

Shaé avait apparemment très faim. Le reptile avait très vite cuit. Larme pourpre le découpa en deux filets de quelques furtifs coups de poignard, (un peu comme on l’aurait fait avec du poisson), puis en tendit un morceau à Shaé sans comprendre pourquoi elle se posait une question aussi hypothétique qu’inutile sur sa mort. A croire qu’elle pensait mourir dans ce marais… Peut-être était-elle complètement perdue et errait depuis longtemps ?

Shaé posait beaucoup trop de questions à la fois… Larme pourpre savait (à peu près) à combien de lieux était le village « aux sandales ». Mais une autre question devrait suivre : « Était-ce bien la direction qu’elle souhaitait prendre ?

Ah ! Shaé était donc une demi-Drow. Ce n’était pas exactement ce qu’espérait Larme pourpre, mais ce n’était pas plus mal car leurs objectifs étaient peut-être proches. Cette idée lui évoqua des souvenirs. Les entrainements se faisaient toujours en équipe mais c’était beaucoup plus rare en ce qui concernait les missions. Au début l’Instructeur assistait directement la mission et expliquait toutes les astuces puis passait le relais à un élève plus expérimenté qui se contentait de regarder et de « rectifier les tirs » au besoin. A la fin c’était plutôt pour couvrir les arrières d’un autre ou bien servir de témoin à un élève moins expérimenté…

Bon, visiblement son explication sur les Drows n’était pas assez claire, mais c’était un début. Il fallait maintenant répondre aux questions et éclaircir quelques points.

[La narration est ramenée à l’action présente]
Larme pourpre récupère son carnet et entreprend d’y écrire lentement mais sûrement ses réponses…

« Moi Larme pourpre. Gomme toi , ~~fan~~ §an Dwow ~> cherche peupbe Dwow.
Humain viVaye loin oue§t ~~pwe~~ prè bw Gran laC ~~Uraab~~ Uraal. Puy Dwow pulu prè ~~fub~~ §ut.
Ou toi ~~aVé~~ aVer ? toi ~~bup~~ but ?
fi toi bien vouloir, eGrir bon mot moi pa bien ?

Larme tend le carnet puis se met à mimer lentement ce qui est écrit avant que Shaé ne lise. Larme pourpre désigne alors sa poitrine avec son pouce puis y pose sa main. Un doigt mime le ruissellement d’une larme avant de designer la couleur d’un de ses yeux avec un petit cercle. La main revient sur la poitrine puis se retire pour mimer une balance avec la seconde main. Les deux index se rejoignent ensuite parallèlement se croisent puis se remettent en parallèle avant qu’un pouce ne désigne Shaé. A la suite de ça, Larme pourpre mime une coupure et du sang qui en sort, puis renouvelle l’image des oreilles pointues. « Chercher » à nouveau, puis « les oreilles pointues », puis un nouveau signe composé de « toi et moi » avec le pouce et l’auriculaire allant de Shaé à Larme pourpre, suivit des deux index collés pointés vers le bas puis remontant en s’ouvrant dans deux directions vers le ciel indiquant « une multitude ». Une main paume ouverte vers le haut et une autre recourbée qui représente un amas de blocs tout autour, pour « le village ». L’index tendu au loin vers ce qui semblerait être l’ouest puis la main qui fait des petits moulinets en s’éloignant vers cette même direction. Une main ouverte doigts serrés pointée vers le ciel et l’index de l’autre main qui fait un bond pour venir pointer juste à côté indiquant une « proximité » suivit par un mouvement de vague avec la main puis d’une ouverture des bras avec amplitude pour indiquer la grandeur.
Une courte pause puis une forme de montagne est formée avec les deux mains en triangle sans base, « oreilles pointues », « proximité », « toi et moi », puis l’index qui indique une direction perpendiculaire à la première. « Toi », deux doigts qui marchent, les mains tournées vers l’extérieur avec les épaules qui se soulèvent. Larme pourpre renouvelle ces deux derniers signes.
Une courte pause à nouveau. Larme pourpre montre le carnet puis indique « toi », fait signe de tirer un trait puis d’écrire suivit de trois petits hochements de tête. Larme pourpre termine avec un signe les mains jointes comme pour une prière.

Larme pourpre avait plutôt l’habitude de traduire en écriture un signe quand une personne ne comprenait pas, mais l’inverse était aussi possible dans le cas présent. Il suffisait de demander… Larme pourpre ne manquait pas de patience et espérait qu’avec tout ça, même s’il serait long, le dialogue puisse s’installer entre les deux…

Le serpent cuit avait le goût du poulet et sa couleur :blanche. Cependant, c'était très gouteux et délicat sur le palet, presque comme du poisson, très fin.
Shaé dégustait donc le serpent avec une joie toute nouvelle. Bien que de toute façon, elle en aurait mangé que ce soit bon ou pas.

Après une rasade d'eau claire, dont elle tendit la gourde à l'humain, elle suivit des yeux le tracé sur le calepin que l'individu formait avec une plume.

Comprendre n'était pas chose aisée... Mais, avec patience et les signes de l'humain, Shaé réussit tant bien que mal à comprendre ce que le prénommé Larme Pourpre (si elle avait bien comprit) essayé de lui dire.
Le dialogue, certes très hésitant, commençait à naitre entre les deux individus. Même si comprendre l'autre risquait de prendre du temps, un dialogue était toutefois en place, ce qui était rassurant !

D'après ses gestes, un village se trouvait à proximité. Non, pas un village, le Puy Drow... Un village humain se trouvait à l'ouest mais loin, d'où le Puy Drow qui, selon les dires de Larmes Pourpres se trouvait pas très loin au sud.
Mais Shaé ne voulait pas se rendre là-bas, ni chez les humains d'ailleurs ! Elle n'avait sa place nul part au final... D'un côté les humains qui tuaient les Drows, de l'autre les Drows qui rabaissent les demi-Drows...

- Où aller ? Je n'en sais rien. Comme tu dois le savoir, les Drows ne sont pas portés dans le cœur des humains, ces temps-ci. Donc, non, je n'ai aucuns buts. Pourquoi cherches-tu les Drows ?

Elle prit un morceau de bois, s'installa aux côtés de Larme Pourpre et entreprit de tracer des lettres sur le sol meuble.

"PEUPLE" Elle prit le crayon et le calepin, montra le mot que l'humain avait inscrit "peuble" et le raya après avoir souligné de "b". Elle retourna au mot tracé sur le sol et souligna le "P".
Elle fit pareil pour les autres mots qui n'étaient pas correct, s'appliquant et s'assurant que Larme Pourpre comprenait bien.

- Et enfin, on ne dit pas égrir mais écrire.

Sur cela, elle éffaça le mot d'avant et remplaça par l'écriture correcte du mot "ECRIRE". Elle souligna le "C", souligna le "g" sur le calepin et le raya.

- Ça va ? Je n'ai pas été trop vite ?

Shaé écrivit sur le sol sa question, regarda Larme Pourpre et écrivit une dernière phrase avant de rendre le calepin et le crayon à l'humain.

"Comme ça tu vois comment il faut écrire tel mot, ainsi que l'ordre de la phrase."

[HJ : franchement, chapeau bas
=> tu décris de façon très minutieuse, c'en ai presque magique !]

[HJ- Merci beaucoup :) Je suis ravi que mon style te plaise -HJ]

Larme pourpre coupa son « filet de serpent » en morceaux et récupéra la gourde que Shaé lui tendait. Lorsque celle-ci baissa les yeux pour lire le carnet, ce fut l’occasion de se détourner afin d’engouffrer la viande dans sa bouche, de mâcher très rapidement (la chair très tendre du serpent s’effilocha en tout petits morceaux comme l’aurait fait celle d’un poisson), puis d’avaler tout rond à l’aide de plusieurs goulées d’eau.
N’ayant pas de langue pour malaxer la nourriture, Larme pourpre devait prendre plus de temps pour mâcher sans avaler afin que la salive soit suffisamment sécrétée et pénètre les aliments. Il lui fallait donc faire attention en mangeant afin de ne pas s’étouffer. Un morceau trop volumineux pouvait malencontreusement glisser au fond de son gosier sans aucun barrage. Évidemment, avec de l’eau, ça passait beaucoup plus facilement.

Larme pourpre rajusta les bandes de tissus qui couvraient sa bouche puis se retourna vers Shaé pour lui rendre la gourde. Celle-ci répondit à sa question. Elle n’avait donc finalement pas de but, un peu comme Larme pourpre l’année passée. Son seul but était de survivre loin des grandes villes afin de se faire oublier de ses semblables qui auraient été à sa recherche. Shaé ne savait pas où aller, admettons. Mais alors pourquoi s’était-elle enfoncée dans ce dangereux marécage ?

Pourquoi Larme pourpre cherchait le peuple Drow ? La réponse la plus logique serait la quête de ses origines. Mais en fait, qu’est-ce que Larme pourpre pouvait en faire de ses origines ? Ses parents, soit l’avaient soient abandonnés, soit étaient morts. Pourquoi rechercher les Drows et ne pas se contenter de son côté humain ? Si Larme pourpre continuait de se cacher c’était aussi à cause de cette différence. Est-ce que les Drows pouvaient accepter quelqu’un qui avait une partie de leur sang ? Ce n’était pas sûr. De plus, en voyant Shaé qui était clairement plus Drow que ne l’était Larme pourpre et qui pourtant ressemblait quelque peu à une exilée-solitaire, on pouvait douter du fait que ce peuple accepte les être hybrides. Larme pourpre ne pouvait pas comprendre cette façon de penser et de juger seulement par l’apparence. Même si son but était ridicule et sans espoir, en avoir un lui permettait au moins d’avancer toujours de l’avant. Si Shaé n’en avait pas, que faisait-elle là, suicidaire sans pourtant l’être sciemment ?

Shaé s’était rapprochée. Elle entreprit de s’aider du sol meuble pour corriger quelques erreurs que Larme pourpre avait commises en écrivant. « b » et « l » c’était plus de la dyslexie à cause de l’écriture semblable des lettres car les sons étaient clairement différents mais « C » et « G » était plus difficile car phonétiquement proche et imprononçable pour Larme pourpre. Il lui fallait faire attention à ces deux lettres et retenir l’orthographe des mots. Un hochement latéral de la tête confirma à Shaé qu’elle n’était pas allée trop vite. Il y avait aussi le « f » et le « S » ainsi que le le « d » et le « t » etc… même problème de confusion phonétique… Ah ! Et puis les petites lettres en fin de mots qu’on ne prononçait pas, ou du moins que Larme pourpre ne prononçait pas… Mais…mais…en voilà une idée !

Larme pourpre venait d’avoir une idée. Mais d’abord il fallait répondre. Autant le faire directement par écrit car certaines notions étaient plus faciles à faire comprendre par écrit. De plus, Shaé était trop proche à présent pour que Larme pourpre ne puisse lui mimer. En s’aidant des corrections appliquées sur les mots du cahier Larme pourpre écrivit ses réponses.

« Moi cherche Drow ~> rasine , oriyine.
Moi Comme toi avan, pas but ~> fuir , ehapper , pas mourir. Mai pas but pas bien. Touijou peur , touijou fuir , touijou ~~pedu~~ perdu , pas favoir ou aV aller. Moi but , moi favoir , mai moi temp , pas ~~pwe§é~~ présé. f Si toi vouloir, moi aiter toi trouver but , trouver ou aller < ~ > toi me aiter moi lire ecrire , coi favoir Drow ~> moi vouloir , ~~bev~~ bezoin. Si toi vouloir , Can trouvé , moi ~~patir~~ partir.

Larme Pourpre était donc comme elle : un demi Drow, mais plus humain que Drow. Il recherchait ses origines, cela lui rappelait quelqu'un... Une jeune femme en quête de connaissance sur sa famille, sur son passé, sur ses origines : Elle-même.
Désillusion et tristesse allait être la réponse de Larme Pourpre, même si Shaé, au fond d'elle même espérait qu'il trouve des réponses à ses questions.

Larme Pourpre avait un but : retrouver ses racines. Mais il voulait aider Shaé à trouver un objectif, car pour reprendre ses paroles, ne pas en avoir induisait la peur, la fuite et la perdition... Contre cette aide, il lui demandait de lui inculquer la lecture et l'écriture. Ce n'était pas grand chose comparé à sa proposition ! Si Shaé avait tout bien compris, il demandait aussi qu'elle lui apprenne le Drow. Enfin, si elle avait bien compris !

- Merci beaucoup de ta proposition, mais je ne tiens pas à ce que tu perdes du temps à m'aider. Moi, par contre j'en ai à revendre ! Je vais donc t'enseigner ce que je sais, puis tu partiras. Un but, j'en trouverais bien un !

Elle lui prit le carnet et son crayon et lui montra ses fautes en les soulignant.

- En fait, je n'ai pas bien compris si tu voulais que je t'apprenne le Drow ou l'humain ou les deux...

Shaé termina de lui souligner les deux derniers mots "Can trouvé..." Elle pointa le crayon sur "Can", le raya et le réécrivit soigneusement en dessous "Quand".
Puis, elle prit sa gourde et but une rasade d'eau douce. Elle était rassasiée grâce à Larme Pourpre, elle lui devait beaucoup !

Réveillé par son instinct, un amphi-hydrus tourna lentement la tête de gauche à droite pour observer son environnement obscur. Ses yeux à la mobilité réduite plutôt orientés vers l’avant lui permettaient de fuir rapidement ou de cibler ses proies une fois qu’il les avait détectés avec ses capteurs tactiles développés. Ses yeux s’arrêtèrent sur le feu un peu plus loin à découvert et y restèrent fixés un instant. Il était bien camouflé et ressemblait à un gros rocher boueux, (dont la tête viendrait de se mettre à bouger). Son regard dépourvu d’intelligence observa la scène sans comprendre…

Il avait ressenti quelque chose qui l’avait réveillé mais étrangement il n’y avait plus rien. Il n’y avait pas vraiment de lumière autour de lui, donc pas d’ombre non plus. Ses sens ne captaient plus aucun signe de mouvement mais son instinct de conservation était activé à son maximum. C’était…. au dessus de lui ? Le reptile leva lentement la tête. Il y avait bien quelque chose mais quoi ? Une grosse branche repliée ? « Alerte, alerte ! » Lui disait son instinct, faisant battre son cœur. Ces battements mettaient la pression dans ses muscles, dans ses pattes postérieures. Son cerveau instinctif comprit ce qu’il avait devant les yeux avant même que son esprit primitif lui-même ne puisse le déterminer. C’était un anaconda géant qui était dressé au dessus de lui et qui attendait qu’il fasse le moindre mouvement pour le « sentir » avec plus de précision.

Lorsque la peur de l’animal fut à son paroxysme, le serpent put le cibler avec précision en ressentant ses phéromones. L’action se déroula en quelques fractions de seconde. L’amphi-hydrus commença à bondir alors que la gueule de son traqueur piquait sur lui. Tout le corps du gros amphibien avait déjà décollé et seules les extrémités tendues de ses pattes postérieures demeuraient encore sur place lorsque les crocs du géant reptile se fichèrent dans sa chair et stoppèrent net son élan. La pauvre victime n’eut même pas le temps d’émettre un hurlement de désespoir car l’instant d’après, sa tête se fracassait contre le tronc d’arbre le plus proche dans un bruit écœurant d’éclaboussure qui passa totalement inaperçu dans la mélodie ambiante du marais. Un hululement d’oiseau nocturne vint couvrir le crime comme le sifflement de distraction de quelqu’un qui n’a rien fait ni rien vu.

L’ombre gigantesque avala tout rond sa proie avant de repartir sans un bruit d’où il venait pour aller digérer tranquillement son repas… On pouvait dire que nos deux téméraires aventuriers avaient eu de la chance. Bien heureusement, le feu avait aidé à les camoufler aux sens du reptile en brouillant leurs odeurs…

[La narration est ramenée à l’action présente]

Larme pourpre observe les corrections de Shaé et écoute ses réponses. Il y a encore un petit quiproquo mais rien de grave. Si Shaé ne veut pas de son aide mais accepte de lui fournir la sienne, pourquoi protester ou insister ? Mais tout de même, ça ne lui plait pas de partir en la laissant seule au milieu de ce marais en considérant son état d’esprit au moment de leur rencontre un peu plus d’une heure plus tôt.
Shaé reprend sa gourde pour boire une gorgée. Larme pourpre récupère alors le carnet, tourne la page et écrit sa réponse. Grâce aux corrections de Shaé sur la page précédente, Larme poupre peut éviter les erreurs sur les mots déjà employés.

« Toi aprande moi , toi confianfe. Moi aider toi sotir marai aller ou toi vouloir, ~~ifi~~ isi trèS ~~den~~ danyer , pas re§ter fi Si toi pas vouloir aller a Drow, ni humain, ausi prés Tere §téwile § Sud-Ouest et moi pas o louin Puy.

Larme pourpre a aperçu cette région « Terres Stériles » sur une carte grossière qu’on lui avait montrée, mais ne sait absolument pas ce qu’il s’y trouve. De son avis, ça ne peut pas être plus dangereux que ce marais, ni moins long à parcourir à pied. D’après son attitude, soit Shaé sait bien se défendre face au danger et sait être prévoyante, soit au contraire elle est téméraire sans pour autant être bien préparée. Dans les deux cas, à son avis, il y avait avantage pour l’un et l’autre, car ainsi, Larme pourpre pourrait apprendre durant plusieurs jours le temps de rejoindre les bords du marais, plutôt que de partir le lendemain ou peut-être un peu plus tard si Shaé acceptait de l’accompagner sur un bout de chemin. Mais Larme pourpre ne savait trop comment l’exprimer, ce sentiment étrange de confiance, qui ne voulait pas la laisser seule dans ce marais alors que l’instant précédent ils ne se connaissaient même pas. C’était comme avec son maître mais cette fois pour une inconnue. C’était trop confus dans son esprit pour être décrit mais c’était là son sentiment.

La nuit était déjà bien avancée et Larme pourpre n’avait pas pris de repos depuis un long moment. Dormir peu mais plusieurs fois lui suffit à récupérer mais casser ce rythme et manquer un créneau et voilà la fatigue qui revient à la charge comme si une nuit blanche venait de passer…

Larme pourpre regarde Shaé et mime un bâillement (mime ?). Usant de nouveau de ses gestes, Larme pourpre lui propose de dormir à tour de rôle. Dormir à découvert sur le sol et près d’un feu c’est bien, mais il faut être sûr d’être en sécurité et donc quelqu’un doit veiller…
Ainsi ses mains vont et viennent : « toi » et « moi », un index qui se présente seul puis la tête qui s’incline et se pose sur les mains jointes. De nouveau l’index se présente mais cette fois c’est l’autre main. Ensuite le majeur le rejoint pour former un ciseau qui pointe les deux yeux avant que la seconde main n’arrive et que les deux index partent vers l’avant pour faire un cercle se terminant derrière la tête. Larme pourpre montre ensuite un de ses yeux avant de désigner le feu puis de se désigner. La paume de sa main lui sert de support virtuel sur lequel un cercle se dessine puis un angle et enfin le pouce puis l’index qui se relève comme si Larme pourpre était en train de compter « deux » sur ses doigts.

Shaé rectifia les fautes de Larme Pourpre une nouvelle fois. Cette correction du langage humain commençait à plaire à la jeune demi Drow ; elle semblait apprécier aider une personne.
Sans compter le fait que, malgré le peu de temps que les deux aventuriers se connaissent, il y avait un lien assez étrange de confiance.

La nuit avançait rapidement, où plutôt Shaé ne voyait pas passer le temps. Des animaux ou insectes grouillaient un peu partout dans le marais, créant de temps à autres des remous dans le bourbier ainsi que des sons de plongeon...
Le feu était d'un réel réconfort, du moins temps qu'il crépissait et qu'il faisait nuit noire ! En effet, les rares rayons lunaires qui s'accrochaient aux vêtements des voyageurs quelques heures auparavant, avaient désormais disparut.
De même que la chaleur avait laissé place à la froideur, accompagné d'un vent frais mais sec (ce qui est plutôt pas mal !).

Shaé récupéra sa cape qui séchait près du feu. Elle l'agrafa puisque sèche. Elle frictionna ses épaules avec ses mains le temps que sa température corporelle remonte. Puis, elle se tourna vers Larme Pourpre. La fatigue commençait à assommer nos deux téméraires voyageurs, mais seul un ne devait se reposer puisque l'autre veillait.
La jeune femme ne compris pas les gestes de Larmes Pourpre, mais réussi néanmoins à comprendre ce qu'il voulait dire.

- Je veille, repose-toi. Demain, on verra ce que l'on fera...

Cette dernière phrase était plus pour elle que pour Larme Pourpre. Que ferait-elle demain ? Une question sans réponses... La nuit portait conseil à ce qu'on prétendait, alors elle verrait bien...
Elle s'essaya sur le sol meuble, dos contre une souche après avoir remis une souche sur le feu. Elle recouvrit son corps de sa cape en s'emmitouflant dedans. Dans sa main, cachée par un pan de sa cape, une dague aiguisée au cas ou...

La jeune femme bailla, se cala mieux contre la souche, les yeux perdus dans les braises du feu...

[HRP : Avec ta permission donc, j’introduis un événement durant la nuit… /HRP]

Deux yeux observaient en silence le talus sur lequel deux formes appétissantes se trouvaient. Cela faisait un moment qu’elles étaient là mais l’observateur n’était pas pressé. Il attendait que la lumière qui brûle du marais s’affaiblisse et s’éteigne. Elles faisaient toutes cela, et en particulier la nuit à cause des nuages de brume ! Sauf que celle-ci était beaucoup plus grosse que les autres et devait durer plus longtemps.
Ce n’était pas facile de dégotter des proies comme celles-ci sans se les faire chiper. Les pullulant schroggs commençaient à le rendre malade. Leur chair était juste assez bonne pour caller la faim mais à force ils devenaient indigestes et les autres créatures étaient plutôt coriaces à chasser.
En plus, défendre son territoire de chasse au sein de son espèce était une chose, mais en ce qui concernait les autres, ce n’était pas une mince affaire … Heureusement, l’anaconda préférait les amphi-hydrus, bien goûteux alors autant lui laisser pour ne pas avoir de problème.
Les démons des marais quant-à eux, très agiles et adorant ce genre de proies avaient peur de la lumière qui brûle. Ils préféraient rester à couvert dans les branchages de la canopée et surprendre leurs proies dans les zones moins à risque. Il y avait aussi les toxeuvores, ces satanés insectes omnivores à la chair venimeuse et qui ont la fâcheuse habitude de tout contaminer leur territoire tout en dévorant tout ce qui s’y trouve.

La lumière avait fortement diminué, comme prévu. Ca valait le coup d’attendre ! Avec les petits qui allaient bientôt éclore, il fallait prévoir des réserves de nourriture. L’occasion était trop belle !

Il fallait bien s’organiser et les surprendre avec finesse. Ce genre de proie avait la mauvaise habitude de posséder des prolongements très tranchants sur ses bras…

« Ooouummh clonk clonk clonk uuumh »

« yoiyum clonk uuuuwin’uyonm clong clonk clonk »

« Clonk yoooonm »

L’avantage avec les infrasons, c’est que peu de créatures peuvent les entendre… Pratique pour communiquer !

......................................................................................................................................

Larme pourpre récupérait un peu. Cela faisait bientôt deux heures et son esprit, toujours en alerte, était prêt à se réveiller en sursaut à la moindre alerte, comme le fait qu’il commençait à faire froid… La petite secousse que Shaé lui donna en chuchotant son nom agit comme un déclic. Le stress stimulant lui permit de se remémorer tout ce qui était nécessaire à la situation : dormir 2h, lieu dangereux, Shaé, tour de veille, feu. Si tout allait bien, les deux heures avaient passé sans encombre et c’était à présent son tour de veille. Si au contraire ce n’était pas le cas, Shaé allait l’en informer tout de suite.

Son corps était tout humide et ses yeux piquaient, voire brûlaient. Quelque chose n’allait pas ! Shaé disait des choses mais Larme pourpre ne les comprenait pas à cause du stress. Elle lui montra le feu : celui-ci était presque éteint. Ce n’était pas faute d’avoir rajouté du bois, mais celui-ci, trop humide, n’avait pas pris. La brume avait émergé alentour sans que Shaé ne s’en rende vraiment compte dans le noir ambiant jusqu’à ce l’humidité finisse par pénétrer ses vêtement comme tout ce qui se trouvait sur le talus : feu y compris. Manque de combustible et d’oxygène à cause de l’air trop saturé en eau et voilà le résultat. Shaé n’avait pas eu ce problème auparavant, mais elle n’avait pas non plus levé le camp sur un îlot au milieu d’une grande mare cernée par des arbres… De même pour Larme pourpre, qui d’habitude dormait dans les arbres et qui aurait fait pareil si sa curiosité n’avait pas provoqué sa rencontre avec Shaé…

Sans être devint, n’importe qui aurait vite pris conscience de la dangerosité de la situation. Mais la brume et l’obscurité percée seulement par une faible flamme avait de quoi provoquer la panique car les repères disparaissaient et n’importe quoi pouvait surgir de n’importe où… Et ce fut d’ailleurs le cas !

Larme pourpre voulait jeter un peu de poudre dans le feu mais ses doigts se rendirent vite compte qu’elle avait pris l’humidité. Debout, Shaé et Larme pourpre avaient instinctivement la main sur le pommeau de leurs armes. Il fallait très vite réfléchir ! Mais le temps leur manqua. Quelque chose bondit hors du néant et atterrit sur la butte juste devant eux. Une gueule impressionnante et remplie de belles dents pointues s’ouvrit et plongea vers la tête de Larme pourpre. C’était un Absreith !

Pour l’esquiver, pas d’autre choix que de tomber à la renverse ! Larme pourpre roula sur le côté en prévision du retour de la gueule du monstre et lui permettre de se relever. Mais la créature détourna le regard pour s’intéresser à Shaé ! Mais ce ne fut qu’un bref instant car la tête revint vers Larme pourpre qui tenait à présent un poignard dans chaque main en position défensive.

Mais pourquoi la créature avait dédaigné Shaé alors qu’à cette distance, son attaque aurait pu lui être fatale, et à présent elle lui tournait dangereusement la tête ?
De sa position, Larme pourpre voyait parfaitement le scénario qui allait se dérouler et ne pouvait pas intervenir ! Ses yeux s’écarquillèrent et avec un grand geste de bras, Larme pourpre indiqua à Shaé de bouger immédiatement ! Un second Absreith était en train de sauter toutes griffes dehors sur elle !

Un geste du bras. Un étonnement face au danger, imminent. Un pas sur le côté. Puis un soupir...

Larme Pourpre s'était endormi pratiquement aussitôt qu'elle s'était assise contre la souche. Deux heures à attendre. Deux longues heures et ce serait à elle de se reposer. Deux heures à rester éveillée - du moins à essayer de le rester. Shaé ne réussit pas.

Une demi-heure plus tard, elle s'était assoupie dans les bras de Morphée. Elle rêvait de son enfance avec Greg, insouciante et souriante alors. De ces belles journées ensoleillées passées à voyager en sa compagnie distrayante. Un rêve des plus enchanteur qui la fit esquisser un sourire tandis qu'une larme, seule, coula sur sa joue.
Son rêve se transforma en cauchemar... Une ombre s'abattit sur son père adoptif qui disparut aussitôt, après un cri effroyable.

Battement de cils, lumière tannée et le noir. Shaé se leva avec souplesse sur la défensive. Le feu s'était presque éteint, il ne restait que de la cendre fumante. Elle se pinça les lèvres tout en comprenant qu'elle s'était endormie. *Quelle débile ! Même pas capable de rester éveillée deux petites heures de rien du tout !*

Tout en grommelant, elle se dirigea vers du bois à peu près sec et entreprit de rallumer la braise, vainement... La brume, épaisse et opaque, était chargée d'humidité. Cela faisait donc office de fine pluie qui traversait les vêtements de nos deux voyageurs. Complétement paniquée vu leur situation plus que précaire, elle réveilla Larme Pourpre en chuchotant - pas la peine qu'ils se fassent encore plus repéré qu'ils ne l'étaient déjà !

- Je me suis assoupie. Combien de temps, je l'ignore. Mais le feu s'est éteint. Une brume nous encercle de façon à ce que l'on devienne des proies faciles. Tu m'entends ?

En effet, le jeune humain semblait encore tout endormi malgré le fait qu'il soit assis. Alors, elle entreprit de lui faire comprendre la situation par des gestes. Ce qui anima Larme Pourpre, au plus grand bonheur de Shaé !
Mais un Absreith bondit sur le talus, gueule ouverte et dents pointues et acérées sorties. Il regarda un instant les deux individus - ses proies - avant de sauter, crocs dehors vers la tête de Larme Pourpre, qui l'esquiva en roulant au sol.

La créature jaugea un instant la jeune femme, qui le toisa avec force. Puis, peu intéressé visiblement, il se tourna une nouvelle fois vers l'autre humain.
Shaé entreprit se sortir un poignard de sa botte et fit un pas en avant vers la créature qui venait de la dédaigner. *T'as mal joué très chère ! Tu aurais du me tuer avant !!!*

Un geste du bras. Un étonnement face au danger, imminent. Un pas sur le
côté. Puis un soupir...

De justesse, elle avait évité le second Absreith qui avait tenté de la prendre par surprise. Toutefois, elle n'évita pas le coup de patte qui lui griffa son dos à sang. Étouffant un juron, elle remercia de la tête Larme Pourpre qui venait de lui sauver la vie. Puis, en position d'attaque elle se tourna vers la créature.

Shaé avait lu ou entendu - elle ne savait plus - que ces créatures des marais avaient comme point faible la mobilité. Elle en tira donc profit, commençant à contourner de droite à gauche l'Absreith. Celui-ci suivait de la tête sa proie avant de grogner - était-ce d'ailleurs un grognement ? Elle tenait dans chaque main un poignard assez long et effilé.

Tentant une percé, elle s'avança rapidement vers la créature, lui ouvrit une entaille dans une des pattes arrières avant de reculer rapidement. Elle évita de justesse, en s'accroupissant et en roulant, un coup de corne suivit d'un claquement de dents.

- Nous voilà dans de beaux draps...

Ouf ! Shaé avait pu éviter de justesse le monstre qui lui avait sauté dessus. Le combat se jouerait à présent à un contre un.
Larme pourpre avait peur que Shaé ne soit pas à la hauteur pour se défendre face à une telle créature mais elle semblait plutôt bien se débrouiller. L’agilité n’était pas le meilleur atout des Absreiths, qui misaient plus sur la vitesse et la surprise de leurs attaques. La queue de ces créatures aurait pu leur faire une arme redoutable capable de contrer leur handicap, mais au contraire elle leur servait de balancier pour se mouvoir sur leurs pattes postérieures ainsi que sprinter et sauter avec puissance et précision.

Larme pourpre, les sens aux aguets, esquivait tant bien que mal la gueule qui piquait vers sa tête avec répétition tout en frappant celle-ci avec ses poignards. Malheureusement, cette partie était une vraie carapace et ses poignards ne suffisaient pas à infliger la moindre blessure. Le point faible de la créature devait se trouver à un endroit peu exposé. C’était souvent l’abdomen le plus fragile, mais qu’en était-il pour l’Absreith ?

Alors que la corne de la créature revenait dangereusement, Larme pourpre profita de sa position excentrée pour laisser son poignard s’y accrocher. Profiter de l’élan pour se faire propulser sur le dos du monstre et y tenter à nouveaux quelques coups de poignards fut malheureusmeent peu efficace. Larme pourpre fut obligé de sauter à terre lorsque sa monture improvisée se redressa pour un désarçonnage dans les règles… quoiqu’avec une tentative d’embrochement au passage…

Le reptile, plutôt que de se retourner, préféra bondir dans la brume. Larme pourpre jeta un œil rapide à Shaé qui faisait de son mieux de son côté. Combattre dans une terre bourbeuse, en pleine nuit et au milieu d’un nuage n’était pas des plus évidents. C’était probablement la pire situation d’affrontement que Larme pourpre ait jamais connue jusque là. Rien à voir avec la fois où un Kerkand de mauvais poil avait voulu sa peau. D’ailleurs voilà que l’Absreith sortait de l’obscurité en chargeant ! Larme pourpre pivota rapidement pour éviter l’impact mais la longue corne savamment orientée par l’animal toucha sa cible. Le déséquilibre du mouvement fit tournoyer sa victime qui glissa pour aller s’aplatir sur le sol détrempé et boueux sans aucune reprise possible.

Il était certain que la créature allait revenir rapidement en lui sautant précisément dessus. Ces créatures pouvaient-elles voir dans de telles conditions ou bien leur intelligence particulière leur permettait-elle de mémoriser avec exactitude l’emplacement de leurs proies ? Larme pourpre roula sur le côté juste à temps pour éviter de finir avec la poitrine compressée et perforées par les pattes griffues du reptile, pour finalement mourir par empoisonnement à cause de sa fiole qui aurait éclaté et dont le contenu aurait souillé les blessures…

Larme pourpre profita de la bref surprise du monstre, étonné d’avoir atterrit dans le vide, pour piquer son poignard vers la base inférieure de sa queue tout en se redressant. Retirant la lame aussi sec pour se mettre à distance, Larme pourpre constata que celle-ci attira dans son sillage un jet de liquide sombre. L’arme avait pénétrée les écailles fines et profondément entamé la chair. Le reptile tourna sa tête vers l’arrière. Le regard qu’il lança à Larme pourpre de ses yeux jaunes aurait eu de quoi faire pâlir un Drow si toutefois l’obscurité ne l’avait pas masqué. Mais l’intention était là, palpable ! Le reptile pivota lentement pour mettre sa menace à exécution. Une fois face à face avec sa proie récalcitrante, il se jeta gueule la première. Larme pourpre plongea de biais pour l’esquiver puis se relever. La créature semblait avoir pris un temps de retard car elle avait raté sa réception et glissé en avant. L’assassin vit là une occasion unique pour aller augmenter la taille de la blessure par une entaille bien placée. Le monstre roula sur le dos pour s’aider à se redresser et s’éloigna dans la brume à nouveau.

Plutôt que d’attendre bêtement sans bouger que son adversaire charge à nouveau, Larme pourpre retourna là où devait se trouver Shaé perdue de vue au cours de l’affrontement. Il valait mieux se rassembler. Malheureusement, détourner la tête d'un adversaire enragé n’était pas une bonne idée. L’Absreith qui chargeait sauta dans le dos de Larme pourpre qui n’eut que le temps de se retourner de moitié avant de subir l’impact. Son bras droit se contracta sous la douleur de la lacération et l’épaule gauche n’aima pas vraiment le choc non plus. Heureusement, l’équilibre du reptile semblait altéré et celui-ci glissa sur le côté. Sa blessure était plutôt mauvaise car en plus de lui faire perdre du sang à chaque mouvement, elle l‘empêchait d’utiliser correctement sa queue car un muscle étaient touché.

Larme pourpre se releva aussi rapidement que possible avant de penser à s’inquiéter de son état. L’animal roula à nouveau sur le dos pour se relever lui aussi. Larme pourpre avait lâché un poignard. Son bras gauche ne répondait plus mais il lui restait encore sa dague rangée dans son dos. Une règle d’or de l’assassin : toujours agir en premier ! La lame courut puis sauta vers le reptile qui tournait la tête pour chercher son adversaire. Le coup sur la vertèbre libéra une douleur atroce qui fit pousser à la créature un cri sourd mais néanmoins perçant aux oreilles de son compagnon, et dont la vibration résonna dans le corps de Larme pourpre. Douloureux sans mais sans gravité, l’os ayant pris le relais pour retenir le métal, ce coup permit à l’assassin de prendre l’avantage sur son adversaire désormais à quatre pattes. Un violent coup de coude dans l’extrémité de la mâchoire ferma le bec de l’oiseau primitif. Suivit une estafilade dans le cou. La lame glissa sans dommages le long du flanc de l’animal dont l’œil tenta de suivre le mouvement jusqu’à ce qu’elle rejoigne la queue et ne replonge dans la blessure déjà béante.

-------------------------

L’Absreith trouva quelque part la force de sauter puis de courir maladroitement afin de s’enfuir et de s’évanouir dans la nuit sans demander son reste. Ses plaintes rappelèrent son compagnon qui n’avait pas donné de nouvelles depuis plusieurs assauts. La créature espérait survivre pour voir ses œufs éclore. Et même si ce n’était pas possible, il fallait au moins que son compagnon survive. Ils n’avaient pas réussis à chasser ces proies que pourtant les démons parvenaient facilement à vaincre. Ils n’allaient pas pouvoir rassembler un stock de nourriture suffisant pour leurs petits voraces… Mais au moins cette lutte n’aura pas servie à rien. Dans le pire des cas, si elle ne survivait pas, sa chaire nourrirait sa progéniture….

----------------------

Vu la façon dont le reptile s’était enfui, Larme pourpre pouvait espérer qu’il ne revienne pas de sitôt. Contrairement à ses missions d’assassinat où le travail devait toujours être fini quelque soit les circonstances, ici, ce n’était pas une question qui se posait. Qui donc, de toute façon, serait assez stupide pou poursuivre une créature dangereuse enragée et blessée, dans un endroit encore plus dangereux en pleine nuit et au milieu du brouillard de surcroit ? Mieux valait retrouver Shaé en espérant qu’elle soit vivante.

Larme pourpre retourna sur ses pas et chercha le poignard perdu à l’endroit de sa chute qui avait marqué l’impact. Miraculeusement, la trouvaille fut aisé car Larme pourpre trébucha dessus : il s’était planté verticalement dans le sol. A présent il fallait retrouver Shaé au beau milieu de cette purée de pois… Si au moins l’appeler était possible, mais avec les dents serrées par la douleur…

La brume s'épaississait tandis que les crocs de l'Absreith approchaient dangereusement la peau bleutée de la jeune demi Drow. Elle avait esquivait de nombreux coups, mais certains avaient réussi à passer sa défense. Elle ne voyait rien d'autre que le reptile comme si son champ de vision avait été rétrécit. Cela avait un avantage : elle n'avait de yeux que pour la créature, et vice versa.

- Approche... Je t'attends !

Cela faisait déjà un petit moment que les deux combattants se jaugeaient et s'élançaient vers l'autre dans le but de tuer. Mais jusqu'à maintenant, ça ne l'aient avait qu'épuisés et blessés... Shaé était désormais accroupie dans le marais. L'eau lui montait à la taille, froide et vaseuse. Mais elle ne tremblait pas, trop occupée à observer minutieusement tous les gestes du reptile. Elle se déplaçait avec lenteur, ses mains dissimulées dans l'eau opaque, deux poignards fermement tenus. Prêts à jaillir de l'eau, tranchants.
Prêts à verser du sang.

Le reptile se tapit sur ses pattes et sauta. Haut et équilibré. Il atterrit, gueule béante sur Shaé. Celle-ci se laissa tomber, écrasée sous le poids de l'Absreith, bras tendus de façon à repousser au plus loin les crocs acérés du carnivore. Des claquements secs résonnèrent dans la brume - seul bruit véritable. Les griffes empoisonnées griffèrent à maintes reprises l'abdomen et la poitrine de la jeune femme, qui grimaçait à chaque blessures infligées.
Avec fureur, elle relâcha ses bras ce qui attira tout d'un coup le reptile vers elle, positionna ses pieds sous le torse (si on peut appeler ça un torse) du reptile et poussa de toute ses forces vers le haut.

Volant un instant, le reptile retomba lourdement en s'écrasant sur la face, l'apesanteur revenue. Il poussa un espèce de feulement qui ressemblait fort à celui d'un chat tout en se remettant sur ses pattes. Pendant ce temps, Shaé s'était remise sur ses pieds et tenait une nouvelle fois face à la créature. Sa vision était brouillée, la fatigue affluait, les blessures saignaient. Elle souffrait, mais elle ne devait pas faillir maintenant ! Résolue, elle se tint droite face au reptile.

Cependant, celui-ci regardait fixement vers sa droite. Un bruit de pas se fit entendre puis plus rien. L'Absreith tourna son regard féroce vers Shaé comme s'il se demandait si sa proie valait finalement la peine d'être blessé mortellement. Puis, dédaignant la jeune femme, il partit vers le bruit disparu, et s'enfonça dans la brume jusqu'à disparaître.

N'y tenant plus, Shaé tomba sur ses genoux, la tête basse, les bras en croix sur sa poitrine. Statut vivante, elle resta ainsi quelques minutes avant de finalement relever la tête.
Larme Pourpre avait peut-être besoin de son aide. Elle devait l'aider même si son aide serait de court instant... Elle se releva péniblement, rangea ses poignards après les avoir essuyé sur sa cape. Elle alla s'asseoir sur un rocher, et regarda ses blessures. Enlever sa tunique lui tira quelques grimaces mais la remettre la fit souffrir encore plus ! Elle banda rapidement ses blessures violacées (le poison sans doute, était à l'œuvre) avec des pans de sa cape. Puis elle prit la même direction que la créature ; vers sa droite.

Se repérer dans la brume avait quelque chose de sournois : tout était blanc au-delà de deux pas sans compter sur les rochers et souches dans le marais. Plusieurs fois elle se prit les pieds dans une racine, la faisant tomber dans l'eau...
Elle s'étonna de la distance entre elle et le camp quand elle vit à quelques pas, une lumière vacillante : le feu - ou du moins ce qu'il en restait...

- Larme Pourpre ?

Ces deux mots la firent grimacer. Parler était à la limite de l'insupportable ! Elle marcha jusqu'à la lumière et monta la butte. Larme Pourpre était bien là à quelques pas d'elle, le visage angoissé. Nulle trace du second reptile ce qui réconforta Shaé. Elle s'avança vers son compagnon, du moins tenta deux pas. Elle se tenait le ventre, le dos vouté. Elle s'essaya tant bien que mal contre la souche, relâchant tout.
Son regard était tourné vers son ami.

- Larme Pourpre... Tu n'as rien ?

Larme pourpre avait, presque par hasard, réussi à se retrouver à l’emplacement du campement. Il valait mieux, du coup, rester à cet endroit plutôt que de chercher Shaé dans l’humide obscurité. Le feu avait miraculeusement survécu sous forme de braises mais s’éteignait inexorablement. Les vêtements étaient trempés et la cape, de même que les chevilles, alourdies par la vase malodorante qui les maculait, n’aidait en rien la situation. L’épaule déboitée, douloureuse à cause de la foulure, ne pouvait être remise en place faute de n’importe quelle aide possible. Pourtant, le tronc d’un arbre aurait pu faire l’affaire, mais il n’y en avait malheureusement pas sur cette butte.

Larme pourpre ne sentait plus vraiment la douleur de son épaule droite qui avait été lacérée, plutôt un engourdissement… Peut-être que la douleur était trop intense ou au contraire trop sournoise pour se distinguer du tiraillement provoqué par les contractures et autres courbatures des muscles de son corps ? Avec un bras inutilisable et l’autre engourdit, Larme pourpre ne pouvait plus se battre. Il ne fallait pas qu’un autre prédateur surgisse de nulle part.

Shaé n’était pas loin c’était certain, mais où ? Larme pourpre tournait sur place en la cherchant du regard dans le noir. Finalement, l’épuisement l’obligea à s’assoir à même le sol et d’attendre.

Soudain une voix faible perça à travers la brume :

« Larme Pourpre ? »

La silhouette de la demi-drow se fit de plus en plus nette à mesure qu’elle se rapprochait. Elle était vivante mais avait l’air bien mal en point. Survivre à une attaque comme celle-ci était quelque chose dont on pouvait être fier. Mais l’heure n’était pas aux réjouissances. Shaé se cala contre la souche en se tenant la poitrine, où une vilaine blessure devait probablement se trouver.

« Larme Pourpre… Tu n’as rien ? »

[La narration est ramenée à l’action présente]

L’assassin se rapproche et s’accroupit à côté de sa compagne d’infortune. Il lui dépose sa main valide sur l’épaule et répond à sa question en niant de la tête. Ce n’est bien sûr pas la vérité, mais que dire ?
Larme pourpre voit bien que la blessure de Shaé est du moins douloureuse sinon grave. Malheureusement ses connaissances médicales sont quasi-nulles.
Dans l’immédiat, il fallait soit parvenir à rallumer le feu, soit trouver le moyen de se mettre à l’abri quelque part… Plus facile à dire qu’à faire dans de telles conditions. Tant pis, mieux valait rester là jusqu’au petit matin, le temps que la brume se lève.
Il fallait donc rallumer le feu, qui produisait encore quelques maladroites flammèches en son cœur en dessous des morceaux de bois humide. Larme pourpre avait déjà vu une fois des voyageurs le faire sous une pluie très modérée, des conditions relativement proches. Pour cela il fallait retirer la partie humide des branches à l’aide d’une lame et faire des allume-feu en y faisant des encoches fines mais profondes afin de les faire ressembler à des hérissons.

Larme pourpre indique le feu à Shaé après les avoir désignés tous les deux. Si Shaé peut l’aider ça sera plus rapide qu’avec un seul bras valide…

Il fallait se mettre au travail. Après, Larme pourpre pourrait veiller et laisser Shaé se reposer. Dormir deux heures avait quelque peu rechargé ses batteries. Tenir au moins 4 heures en éveil ne serait pas trop difficile, stress aidant…

Visiblement Larme Pourpre ne se portait pas mieux que Shaé. Il était également blessé...
Mais il était vivant ! Cette information réconforta Shaé de façon démesurée : si elle avait pu, elle se serait levé, aurait couru et elle aurait serré très fort son compagnon d'arme. Mais elle avait bien trop mal pour courrir ! Aussi, sourit-elle de soulagement quand elle vit l'occupation de Larme Pourpre. Il tentait de rallumer le feu, en vain semblait-il.

Larme Pourpre pointa son index sur Shaé, puis sur lui-même et montra le foyer du feu. La jeune Drow comprit aussitôt ce que voulait lui dire son ami. Elle s'aida d'une racine plantée profondément pour se relever. La main toujours posée sur son abdomen, elle boitilla vers ce qui restait d'un feu de bois. Quelques semaines auparavant, elle n'aurait jamais parié qu'elle était capable d'allumer un feu en pleine humidité. Aujourd'hui, elle aurait parié. Elle s'était découvert cette compétence dans le marais. D'un côté, quand on a le choix entre se laisser mourrir de froid et de faim (et oui, un repas chaud est beaucoup plus réconfortant niveau moral, qu'un repas froid !) ou allumer un feu coùte que coùte, le choix était vite fait !

Son expérience passé lui tira un sourire. Encore... Au moins, ces soirées passées à se brûler les doigts auront été utiles ! Après avoir demandé à Larme Pourpre tel bois ou tel objet, et après de longues minutes de frottements incessants, une lumière vive éclaira nos deux malchanceux aventureirs !

- Haaaaa.... Enfin...

La lassitude s'entendait à la voix de Shaé. Elle était complétement crevée ! Qui plus est, la douleur au ventre ne décröîssait pas, au contraire, elle augmentait ! Shaé prit sa gourde, qu'elle proposa auparavant à Larme Pourpre, et y but trois bonnes goulées d'eau glaçée.

- J'te propose de te reposer. De toute façon, je n'arriverais pas à dormir, donc tant qu'à faire, que les heures qui nous restent soient utiles à quelqu'un !

Elle grimaça quand elle se leva pour aller se caler contre la souche. Elle passa sa main sur son front et la regarda : humide de sueur. Cela ne présageait rien de bon... Greg lui avait toujours dit que la sueur après une blessure était signe de fièvre... Elle frotta ses doigts sur sa main, puis devant le regard observateur de Larme Pourpre, elle souria une nouvelle fois.

- Rien que de la sueur... Aller, repose-toi ! Je te réveillerais s'il y a quoi que ce soit ! Juré !!!

Shaé lança un clin d'oeil à son ami. Après quelques secondes de silence elle s'écria :

- Mais que suis-je bête !!! Tu veux peut-être bander tes blessures pour la nuit !

Sur cette phrase, elle retira sa cape brune (avec mal) et la jetta à Larme Pourpre, après en avoir déchiré un pan. Elle retira le tissus qu'elle avait mis sur sa blessure et le remplaça par l'étoffe de sa cape.
Avant de bander son torse, elle nettoya la blessure avec de l'eau de sa gourde. Elle lança d'ailleurs celle-ci à Larme Pourpre.

- Ne me regarde pas comme ça ! Fichue pour fichue, autant qu'elle serve à quelque chose avant d'aller à la poubelle !

En effet, sa cape était morte. Elle avait été déchirée à de nombreux endroits lors du combat.
Une fois le bandage terminé, elle remit son haut convenablement et se radossa contre la souche.
La nuit passerait lentement. Mais surement !
L'aube pointait déjà son bout du nez...

Finalement, grâce à l’aide de Shaé, qui semblait avoir l’habitude, le feu finit par reprendre de l’ampleur. La manœuvre de sauvetage aurait pu leur paraître durer une éternité si leur esprit accablé de fatigue et accaparé par le stress ne leur avait pas fait oublier presque tout le reste.

Larme pourpre observa sa compagne soupirer. Elle semblait exténuée. La gravité de sa blessure n’était pas apparente mais les larges taches de sang laissaient tout de même matière à s’inquiéter.

Shaé tendit sa gourde encore bien remplie heureusement. Larme pourpre refusa poliment. Ce n’était pas faute d’avoir suffisamment fait d’efforts pour survivre l’instant d’avant… Il faisait juste trop humide à son goût pour avoir soif.

Lorsque Shaé lui proposa de se reposer sous prétexte qu’elle n’arriverait pas à dormir, Larme pourpre ne sut que répondre. La proposition lui semblait totalement contradictoire. Shaé n’attendit d’ailleurs pas une réaction de sa part pour se relever difficilement afin d’aller se caler contre la souche. Il ne faisait aucun de doute qu’elle souffrait. Bien plus que Larme pourpre en tout cas, dont l’épaule enflée n’était qu’une gêne tant qu’elle ne bougeait pas, ce qui risquait difficilement d’arriver. Seule la griffure sur l’autre épaule était vraiment douloureuse. Heureusement, les muscles ne semblaient pas touchés, ce n’était que superficiel, si on peut dire.

Shaé essuya son front humide. Sans bouger, Larme pourpre continuait de l’observer, ne parvenant pas à réfléchir convenablement face à une situation aussi inconnue.

- Rien que de la sueur... Aller, repose-toi ! Je te réveillerais s'il y a quoi que ce soit ! Juré !!! Déclara Shaé avant de lui lancer un clin d’œil.

Déjà sans voix, Larme pourpre resta stoïque, dans une expression particulière de concentration : les sourcils légèrement froncés mais relevés au milieu. Est-ce qu’on n’oubliait pas quelque chose d’important par hasard ? Que faire dans une telle situation ? Durant quelques secondes, une suite d’images fugaces apparut dans l’esprit de l’enfant à mesure que sa réflexion avançât jusqu’à ce que ce Shaé eût finalement une illumination ! Bien sûr, elle parlait aussi pour elle-même. En fait ce n’était pas tellement le fait de se faire des bandages auquel Larme pourpre réfléchissait. La réponse lui revint enfin lorsque Shaé lui lança un morceau de sa cape avant de découvrir ses plaies béantes à la vue de l’enfant. Le regard éclairé de l’assassin dû lui paraître un regard béat puisqu’elle lui fournit une justification inutile à son geste.

Larme pourpre dénicha dans sa tunique l’objet recherché ! Une fine aiguille ! Et oui, maintenant c’était clair ! La scène lui revenait en mémoire. Lorsqu’un jour, un de ses camarades était revenu de mission avec une vilaine plaie béante, leur Instructeur leur avait dit : « Ah, les choses ne se passent pas toujours comme prévu ! Dans ce genre de cas, il ne faut pas laisser vos plaies dans cet état ! La peau c’est comme un vêtement, quand c’est sale et déchiré, il faut laver et recoudre ! » Après avoir nettoyé très sommairement la plaie avec un morceau de chiffon humide, il avait alors attrapé une petite aiguille, celles utilisées d’habitude pour piquer dans les nerfs, puis y avait attaché à son petit crochet un fil qu’il a décousu d’une bande quelconque. Après quoi, il avait recousu la peau de la victime (qui serrait les dents pour ne pas crier) de manière très sommaire là aussi, mais visiblement, ça semblait efficace, et le jeune assassin n’en a visiblement montré aucune séquelle.

Malheureusement, le temps de se remémorer tout ça avec un air pensif tout en regardant le fin morceau d’os taillé, Shaé avait déjà remis un bandage autour de la plaie toujours aussi saignante à première vue…

Larme pourpre se releva pour venir s’accroupir en face de Shaé afin de lui présenter très visiblement son aiguille avant de lui tendre pour qu’elle la prenne.

Larme pourpre avait dormi quasiment deux heures et déjà, à travers la brume, il semblait que le ciel commençait à s’éclaircir légèrement. Était-ce déjà l’aube qui approchait ? Après tout, en été les nuits sont courtes. Larme pourpre commença quelques gestes maladroits pour demander à Shaé de lui remboiter l’épaule… Larme pourpre montra donc sa main valide avant de désigner son omoplate, puis, refit le même mais cette fois désigna son épaule en l’attrapant, puis en poussant violemment le vide au dessus de celle-ci. Enfin, se plaçant ensuite presque de dos par rapport à Shaé, lui montrant ainsi toute sa confiance, Larme pourpre attendit…

[…]

Et l’épaule retrouva sa place… La violence de l’action sur l’articulation rompue et enflée eut pour effet de provoquer une douleur encore plus intense que la première. C’est alors que sous la surprise, un court et aigu gémissement l’accompagna… Larme pourpre bascula en avant puis se traina à genoux pour aller s’adosser à côté de Shaé… Lorsque l’aube se sera levée et que leurs vêtements auront séchés, le moment sera venu de partir de cet endroit malsain…

[...]

Après s'être sommairement soignés, les deux compagnons d'infortune veillèrent le feu tout en sommeillant à moitié sous l'engourdissement et la fatigue, jusqu'à ce que l'aube se lève enfin. Personne n'avait "parlé" depuis. Shaé, même si elle avait entendu un court instant la voix aigüe de l'assassin, n'avait fait aucun commentaire. Après tout, il est normal de crier lorsqu'on souffre. A présent recousues, les plaies devraient se refermer de façon suffisante dans les deux jours.

La brume s'était progressivement dissipée sans toutefois avoir disparue. Des rayons de soleil perçaient faiblement ça-et-là et les bruits du marais reprirent de plus bel comme s'ils s'étaient complètement arrêté durant la nuit bien que ce ne soit pas le cas. Il était temps de reprendre la route et se dire au revoir à ce lieu dangereux. Larme pourpre se releva et aida sa camarade à faire de même. Shaé parlait toujours pour ne rien dire car après tout, elle le pouvait : "Il est temps de partir d'ici !", "Je déteste ce marais.", "Aah ! Je n'avais pas vu à quel point nous étions sales ! Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour un bon bain !". Une fois les affaires bien rangées, ce fut le moment de partir. D'après le soleil, Larme pourpre détermina la direction à prendre : l'Ouest, vers les terres stériles. D'après ses estimation et sa carte sommaire, il leur faudrait trois ou quatre jours seulement pour atteindre la lisière du marais, en comptant une marche ralentie par la fatigue et les blessures.

Ainsi les deux compagnons progressèrent prudemment dans cet environnement pesant, et étant sans cesse sous la pression de l'atmosphère tendue. Les pauses furent instaurées au rythme imposé par Larme pourpre, c'est à dire environ deux heures toutes les quatre heures, mais ce qui voulait dire marcher également de jour comme de nuit avec une torche (histoire aussi déloigner les bêtes trop curieuses). Ces grandes pauses permettaient de grignotter des morceaux de nourriture locale (gros insectes écoeurants et autres racines infectes mais le tout pourtant très riche et très sain), mais aussi à Shaé d'enrichir saommairement les connaissances de Larme pourpre en grammaire en usant de la terre meuble plutôt que de son carnet aux pages gondolées par l'humidité.
La progression durnat ses quatre jours se fit dans des zones beaucoup plus denses de végétation dans lesquelles la terre était toujours meuble mais relativement stable et avec très peu mares boueuses. Le fait de se rapprocher de la lisière du marais diminuait au fur et à mesure les risque de rencontrer des créatures agresives ou autres prédateurs. Seule une fois des créatures volantes indéterminées tentèrent une attaque surprise sans succès et ne purent la renouveler une fois repérées par leurs proies et celles-ci à couvert derrière un arbre.

Le matin du quatrième jour, enfin, après une végétation de moins en moins dense, ce fut la fin du marais et le début des terres stériles. Les blessures allaient mieux sans toutefois être guéries mais tout le monde était sauf. Shaé pouvait à présent trouver un nouvel objectif et Larme poupre pouvait continuer sa route vers le sud en longeant le marais. Après une longue pause, ce fut le temps des séparations. Shaé regaradait larme pourpre sans trop savoir quoi dire tandis que l'enfant faisait de même, attendant qu'elle se retourne la première pour partir sans un mot. Finalement, à sa grande surprise, Shaé se r'approcha, lui posa d'abord une main sur le bras alors que leurs yeux se croisaient, puis soudainement, serra l'enfant contre elle un instant en lui souhaitant "Au-revoir et bon courage pour ta quête." Pour se permettre une telle attitude, Shaé avait dû penser soit que Larme pourpre était une fille, soit simplement que ce n'était encore qu'un enfant... Quoi qu'il en fût, elle tourna les talons en laissant l'assassin pantois sous le coup de la surprise. Larme pourpre se secoua brièvement la tête avant de se retourner à son tour et de partir vers l'inconnu poursuivre sa quête...

RP TERMINE

» Larme pourpre - Assassin
» Deux assassins pour une seule cible [PV: Larme Pourpre/Haven Do'orst]
» Feu follet
» Aguildur, général d'armée Nain.
» Petites mésaventures d'un Nain dans la forêt... [PV : Aguildur / Julia]

Rechercher

Résultats par : Messages Sujets
Recherche avancée