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 Fin | La Voix

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Zelvajra
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MessageSujet: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeLun 21 Juin 2010 - 0:25

[@ Egmont : Je te ferai signe quand tu pourras intervenir ^^]


Oësgard. Voisine de la Terre Maudite. Zelvajra était déjà venu sur ces terres, en tant qu’Hybride puis en tant que Chevalier du Chaos. Il avait demandé pitié, âme errante à la recherche d’un foyer, puis avait apporté la mort, fou sanguinaire aux pouvoirs débridés. Désormais, il revenait, en tant que Tyran, ses hordes derrière lui, avec une seule envie : mettre fin à une sédition qui n’avait d’autre sens que celui de marquer un point d’arrêt à l’expansion des Enfants. Cette nuit là, sous le regard aveugle de la lune, Chaos recevrait son lot d’âmes, celui de ceux qui s’étaient voués corps et âmes à le suivre, et qui s’étaient perdus en chemin. Les Chevaliers du Chaos, ses frères, l’avaient suivi. A leur côté, les Muses s’apprêtaient à danser. Car finalement, ils les avaient trouvés. Il avait fallu du temps, de l’énergie. D’abord s’assurer de la fidélité des drows, l’étape la plus simple, il avait suffit d’une rencontre avec Brylyan Naerth, le tout jeune Souverain des Sombres, pour sceller un nouveau pacte. Pourtant, ce n’était pas de leur puissance dont avait besoin le Bourreau, mais de leur neutralité, et il avait pu à loisir promettre l’intervention de ses suivants dans les futurs batailles drows sans risquer de se parjurer : il n’avait jamais promis de garder son « armée » en vie. L’inaction des Bannis de l’Est obtenue, les regards s’étaient tournés vers l’Ouest.

Vers cette puissance qu’émanait la Voix, Oracle aux desseins voilés, dont Zelvajra était persuadé d’avoir la bénédiction. A ses yeux, il ne faisait rien d’autre que d’exécuter ses ordres. Il était venu sans étendard ni couleur, suivant simplement les pas qui l’avaient jadis mené à Alonna. Cette guerre maudite, oubliée presque, lui avait ravi sa Muse, une perte qu’il n’avait jamais réellement dépassé. Peut-être le Fils avait-il fait une erreur en le nommant Bourreau, il avait sans doute pensé que cette tâche le détournerait de son apathie, et il était inutile de souligner qu’il s’était trompé. Zelvajra avait changé.

« Attaquez, sans crainte, car Chaos vous regarde. »

En face, les infidèles hérétiques s’étaient massés hors de leurs catacombes, craignant de s’y faire enfermer sans pouvoir rien y faire. La bataille qui s’annonçait n’avait rien d’honorable, ni d’agréable, et pourtant il n’y avait rien qui enthousiasmait plus les Chaotiques que la possibilité de faire couler le sang. Non, nulle jouissance dans le carnage qui s’annonçait, sinon celui de défendre la vision que l’on pensait juste. Il n’y a pas grand-chose de plus dangereux que des fanatiques, surtout quand ces derniers disposent de pouvoirs dont le commun des mortels n’a pas idée, et quand ils doivent faire face à un schisme par-dessus le marché, cela donne une nuit comme celle qu’Oësgard s’apprêtait à vivre.

**************

Carnage. Nul mot n’était mieux adapté. Les tentacules n’étaient qu’une vision d’horreur parmi tant d’autres, les pouvoirs chaotiques se déchaînaient comme jamais. Les humains avaient cru voir le véritable visage d’Abyssea quand ils s’étaient rués sur les remparts d’Alonna, mais ils s’étaient trompés. L’épée de Zelvajra était presque plus redoutable que sa magie, elle fauchait sans remord… et presque sans distinction. Dans la frénésie, chacun avait oublié son camp, il n’y avait de toute façon, aucun signe de reconnaissance sinon les visages bien souvent inconnus. Chacun s’en doutait, la fin approchait, mais ils ne fuyaient pas.

Et puis, il la vit. Immobile dans ce spectacle de morts, semblant le regarder. Nul ne s’approchait, effrayé par ce qu’elle représentait, mais Zelvajra lui n’avait aucune raison de la craindre. Il savait que ce produisait n’était qu’une conséquence… non, la conséquence de ses plans. Aussi se rua-t-il vers elle, pas pour la tuer, non.

Pour lui parler.

Elle ne fit pas mine de bouger quand il fondit sur elle, et il ne fit pas mine de la ménager quand il l’attrapa au passage et la fit monter sur sa monture… lui coupant très certainement le souffle au passage.
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeMer 4 Aoû 2010 - 1:59

L'ombre et le vice s'étreignent en une danse sanguinaire. Je l'ai toujours su. Vorace est l'éternel insoumis, dévoreur est le sombre dessein. J'ai aimé cette voix cruelle et bestiale. J'ai adoré ses griffes lacérant les lambeaux de mon âme donnée voilà des siècles. J'ai vénéré les pas de son Fils et vomit ses fuites. Les ténèbres de mon voile oscillent doucement et se tachent de carmin.

Les flots adorés du Père s'échappent a gros bouillons, pervertissant la terre, couvrant l'hérétique pensées des honnis des murmures voraces. Affamé. Déchiré. Lacéré.Ecrasé. Tous ils le seront en son Nom, celui qu'exale mon souffle lorsque son étreinte force la porte de mes songes terribles.

Je l'ai vu. Regardé. Je sais qu'il n'a pas comprit. Je sais qu'il sais. Oracle impure sur les pas d'un père sanguinaire, je ne suis qu'une voix, je suis Sa Voix. J'ai plongé dans ses abysses. J'ai gouté ses lèvres putrides. J'ai aimé son dégout. Etrange est la danse de La Voix. Etrange sont ses larmes. Etrange est l'instant. Etrange est mon sourire ombré d'interdit blasphématoires. Etrange est mon rire soudain.

J'ai su. J'ai su a l'instant précis où les sabots de sa monture ont piétinés cette terre impure. J'ai su et je n'ai pas bougé. Approche mon enfant, il est des choses dont tu ignores tout. Approche et laisse Chaos chanter a ton oreille. Laisse ton âme s'éveiller a ces murmures...Approche.

La surprise n'a pas d'emprise. Je sais depuis la nuit, depuis les ombres. Les hurlements acides ont dévorés ma chair, que les griffes ténébreuses ont pénétrés mon flanc. Je sais. Vois tu mon sourire ? Non n'est ce pas. Se déchaine les langues mouvantes de nos folies sur le monde impie. Chante l'oubli abyssale qu'Il toffrira...

Ais je mal ? Je ne sais pas. La douleur, la souffrance ont un goût délicieux, amer et acide. Terrible pour le sain, adoré pour l'impie. Chut. Les pans volages de mon voile se mêlent a l'immaculé. L'enlace. J'étreins. Chut. Laisse moi faire....

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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeMer 4 Aoû 2010 - 18:29

Zelvajra ne s’arrêta pas. Il ne jeta pas un regard en arrière, ne s’inquiéta pas une seule seconde du sort de ce qui avait été ses troupes. A l’instant où ses bras avaient cueilli cette fleur voilée qu’était la Voix, il avait cessé d’être le Bourreau, cessé d’être ce Tyran qui imposait son joug sur les armées chaotiques. Il redevint l’hybride qu’il avait été quelques dix années auparavant : perdu, sans réel visée, indécis. Maintenant qu’elle était là, dans ses bras, qu’il l’avait hissé sur sa selle juste devant lui, il ne savait plus quoi faire. Il avait voulu lui parler, mais pour lui dire quoi ? Elle savait tout ce qu’il pouvait lui dire. Mais il avait des questions à poser. Sur ce qu’elle lui avait jadis affirmé, à lui et à nul autre. Poussant sa monture jusqu’au-delà de ses limites, il finit par troquer le paysage forestier par des montagnes et des plateaux. Pour la première fois depuis le début de la chevauchée, qui s’étalait tout de même sur au moins deux heures, il posa son regard sur sa captive. Elle n’avait pas crié. Pourtant, elle aurait eu de quoi, la violence de l’impact aurait pu lui briser les côtes, s’il n’y avait pas pris garde. Même alors qu’il avait fait son maximum, il n’était pas certain de ne pas l’avoir blessée. Malheureusement, il n’avait pas eu le choix : agir différemment les aurait mis en danger, tous les deux. La Voix était un symbole qu’on ne touchait pas, lui avait fait bien plus que ça. Dès lors, s’éloigner rapidement avait été une nécessité.

Finalement, ils rejoignirent la rive de ce qui ressemblait à un lac… Tirant sans ménagement sur les rennes de sa monture, il balaya l’endroit du regard. Ce serait parfait, pas besoin d’aller plus loin, de toute façon si poursuivants il y avait, ils avaient déjà été semés. Poussant un soupir de soulagement, il démonta, puis tendit les bras et accompagna la descente de l’Oracle.

« Je suis désolé », murmura-t-il, sincère.

Elle était toujours la même. Comment aurait-il pu en être autrement, cachée sous son Voile ? S’il n’y avait pas eu cette formidable aura, il aurait pu douter de son identité, mais la chose lui était impossible. Elle était la source de son pouvoir, il n’y avait aucun doute possible. Il fit un pas en arrière, et inclina respectueusement la tête. Maintenant qu’elle était là, face à lui, il ne savait plus que dire.

« Pourquoi avoir soutenu celui qui reniait l’existence de Père ? L’avait-il voulu ? Lui avions nous déplu au point qu’il veuille nous voir nous entretuer ? »

Son regard doré, pareil à celui du loup dont il avait parfois l’attitude, tenta malgré lui de percer les voiles qui le séparaient du visage de la Voix. Elle avait préféré suivre Elverion, plutôt que de lui apporter son soutien. Elle ne l’avait pas jugé digne de prendre la suite d’Arashkham, mais c’était peut-être uniquement parce qu’il n’y avait aucune suite au règne du Fils. Il n’avait aucun moyen de le savoir, sinon qu’elle consente à lui répondre. Jetant un regard à la surface paisible du lac, il esquissa un léger sourire. La lune, pleine et nacrée, se reflétait et le tout donnait une image des plus belles, des plus… poétiques. Mais il n’éprouvait rien, sinon du désintérêt. Jadis, il aurait su profiter du spectacle, aussi fugace et futile soit-il.

Mais il n’était plus l’hybride de jadis. Il était une coquille aussi vide que la Foi d’Elverion.
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeMer 4 Aoû 2010 - 22:46

« Non tu ne l'es pas. »

Ais je dormi ? Je ne sais pas. J'ai rêvé peut être. J'ai rêvé les lambeaux de chair, j'ai rêvé le sang, j'ai rêvé la peau déchiquetée. Son Murmure me tuera, il hurle si fort a mes oreilles. Souffrance bien heureuse. Déchéance adulée et souhaitée.

Notre mère, ronde et pleine, jette sur le ciel une lumière blafarde. Et mon visage voilé lui rend hommage.

« Entends tu parfois ses cris déchirants ? »

Ma voix glisse sur les intonations subtiles de la fascination. Je suis le Symbole et La Voix. La Mort et la Vie qu'Il dissémine au creux de ce monde perverti. Mon regard aveugle parcourt les traits de ce fils perdu. Il a cru si fort en Toi Père...Mais tes desseins sont cachés, même a ta servante la plus fidèle. Le sens m'est donné. Le verbe aussi. Le pourquoi est...Cachés derrière mes lèvres craquelées de vices.

« Le reniait il vraiment ? Es tu sur qu'il crachait sur son Nom ? »

Le Voile flotte doucement sous la brise qui me meurtri la chair. Le froid semble devenir moi. Etrange. Délicieux. Perdue. Qu'importe au fond.

« Il aime chacun de ses fils. Ne doutes pas. Jamais ou je t'arracherais moi même la langue. Son Amour est vice et sang. Entrailles ouvertes. L'étendue de Sa tache est immense, ses Enfants doivent se battre, c'est ainsi...Sombres sont les Desseins du Père. Grande est sa Soif...Un noyau n'est rien dans sa complexité, éclate le et ses fragments se disperseront dans le monde entier. Comprends tu ? »
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeJeu 5 Aoû 2010 - 0:30

Zelvajra tiqua, alors qu’elle refusait ses excuses. Il ne s’était pas attendu à ça, mais était-ce pour autant surprenant ? Il en doutait, soudainement. Après tout, il n’avait pas fait montre d’autant de respect qu’il aurait dû. L’enlèvement n’était pas la meilleure façon de prouver sa fidélité et sa dévotion. Pour se donner une contenance, il passa une main dans ses cheveux couvert de sueur, mais ne protesta pas. Comment l’aurait-il pu ? Si la Voix décidait qu’il n’était pas désolé, il n’avait guère le choix.

« Comment l’être, dans ce cas ? » demanda-t-il simplement.

Face à la Voix, il avait l’impression de retourner un an en arrière, avant la disparition d’Arashkam. Non pas qu’il ait été amené à la rencontrer souvent, mais au moins, les choses étaient simples. Pas comme les conséquences malheureuses de la disparition du Fils, où il avait fallu se battre pour garder sa place, se battre pour devenir un Tyran. Là, la lutte était inutile, tous deux avaient conscience de leur place et l’acceptaient pleinement. C’était cette simplicité qui lui manquait.

Elle tourna son visage voilé vers la lune et lui demanda s’il entendait « ses » cris déchirants. Il aurait sans doute pu répondre s’il avait su de quels cris elle parlait. Il voyait mal l’astre nocturne hurler, et supporta donc qu’elle parlait de Chaos, mais il n’avait aucun moyen d’en être sûr. Plutôt que de parler à tort, il préféra garder le silence, la laissant à sa contemplation. Quand il estima son mutisme assez éloquent, il changea de sujet, posant la question qui lui brûlait les lèvres : pourquoi Elverion ?

« Il affirmait qu’Il n’était rien sans nous… Un blasphème, quand on sait tout ce que nous lui devons », répondit-il durement.

Les paroles d’Elverion avaient sonné aux oreilles de Zelvajra comme le blasphème suprême. Même la Voix ne parviendrait pas à lui retirer cette idée de l’esprit. Ou il lui faudrait se montrer un peu plus persuasive et répondre à ses questions autrement que par d’autres questions. Et elle parla. Durement, crument, sans artifice. Et malgré lui, il comprit : Abyssea, jadis une force de Chaos, était devenue sa plus grande faiblesse. Ses Enfants avaient trouvé un refuge, et il leur coûter de le quitter. Lui-même ne s’était mis à sillonner Miradelphia qu’à la mort de sa compagne, une compagne qu’il n’aurait jamais trouvé hors de la Cité.

« Je… comprends. »

Ainsi, servir Père n’était pas maintenir sa Cité, ni même préserver l’unité de ses Enfants. Il était dérouté, et ne savait plus quoi faire. Il repensa à sa rencontre avec le solitaire aveugle, et douta… Etait-ce lui qui avait raison, en fin de compte ? Zelvajra s’était-il trompé depuis le début ? Ces neuf dernières années n’étaient-elles qu’une suite d’erreurs ?

« Que dois-je faire ? »
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeJeu 5 Aoû 2010 - 1:17

« Ne le sois pas. Je sais. J'ai vu. Chaque choses est écrite et voulue. »

La lice informe des perversions s'incline. L'onde soyeuse du Voile s'anime, vibrations intenses et pourtant suaves. Les plans infinis sont durs a comprendre. Les Fils ont choisit de se déchirer, était ce réellement ce que voulait le père ? Ah ! Tous étaient son sang, tous étaient sa chair. Je veux leur souffrances pour mienne.

J'aime ce Fils. Intense et douloureux déchirement. J'aime l'autre, suave blessure. Le choix m'est inconnu car tous sont moi.

Il est grand. Fort et puissant. Je suis cette fragilité douce et blessée. Pourtant, ma voix sera plus intense que la sienne. J'écoute ses louanges lacérées de sang honni. Ses mains sont couvertes des lambeaux de mon âme. Etrange constat. Je t'aime sache le.

« Ah Zelvarja...Ton prénom est doux a mon âme mais comprends...Je suis celle qui à abandonné l'éternité, je suis celle qui fut appelée, je suis celle qu'Il déchire chaque nuit de ces cris...Je suis Celle dont Il a besoin. L'amour qu'Il nous porte vaut celui que nous lui rendons. L'un ne va pas sans l'autre...Chut et écoute...Ma vie...Ma vie réside au creux de tes limbes. Il en a décidé ainsi. »

Mes pas s'évanouissent a peine esquissés et pourtant j'avance. Colosse de chair portant la Marque, vois la statue de cristal s'animé et venir t'enlacer. Sens ses mains sur tes joues, sens son souffle sur ton cou.

« Tues moi, embrase moi, brule moi, oublie moi. Le choix est tien. Rien ne m'appartient depuis des temps immémoriaux. Ainsi décide-t-Il de sa Voix... »
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeJeu 5 Aoû 2010 - 2:10

Zelvajra paniquait. Il ne comprenait rien à ce que disait la Voix, ou ne voulait pas comprendre. Elle était l’Oracle, la figure incontournable, intouchable. Elle était son voile, et ses paroles étaient celles du Père, irréfutable. Souvent, ses mots et ses actes s’étaient empreints de folie, mais l’hybride avait rapidement compris que tel était le prix à payer pour écouter Chaos. Elle n’était pas à plaindre, elle était à vénérer, ce qu’il avait toujours fait. Elle était un symbole, on ne touchait pas un symbole, on ne le souillait pas. Mais voilà qu’elle recherchait son imperfection, qu’elle se collait à lui, sirène qu’il n’était en mesure ni de satisfaire, ni de repousser.

« Oracle, vous… » commença-t-il, mais les doigts sur ses joues lui intimèrent le silence. En tout cas, c’est comme cela qu’il interpréta leurs caresses.

Déglutissant péniblement, il resta immobile, à guetter l’instant où il comprendrait quoi faire. Il sentait le corps chaud sous le voile, humait le parfum, frissonnait sous les assauts subtils du souffle chaud. Soudainement, elle n’était plus cette statue inatteignable, elle perdait de son mysticisme. Elle redevenait une mortelle. Pour la première fois, Zelvajra la voyait fragile et tourmentée, alors qu’elle lui était toujours apparue déchirée mais assurée.

« Vous ne pouvez pas… »

Quoi ? Qui était-il pour lui interdire quoi que ce soit ? Ses protestations moururent avant d’avoir pu être formulée, et il se laissa faire en silence, gardant ses mains passives malgré les tentations. Dire qu’il était troublé par les paroles prononcées à l’instant aurait été un doux euphémisme, en réalité il aurait pu rester plus stoïque face à une apparition de Chaos en personne. Et pourtant, elle ne lui avait pas encore livré le « pire ».

« Tue moi, embrase moi, brule moi, oublie moi. Le choix est tien. Rien ne m'appartient depuis des temps immémoriaux. Ainsi décide-t-Il de sa Voix...
- Je ne peux pas vous tuer… » murmura-t-il.

Comment aurait-il pu ? C’eut-été le rendre muet, le priver de son porte-parole sur Miradelphia. Il se sentait incapable d’une telle monstruosité, et ce même s’il n’y aurait bientôt plus personne pour écouter.

« Je… »

La Voix n’était pas un visage, elle n’était pas un être, elle était le message qu’elle portait. C’était pour cette raison qu’elle apparaissait toujours voilée. Sous le regard indifférent de la lune, elle semblait pourtant appeler à la mort, sans rien imposer. Voulait-ce dire qu’elle était lassée ? En avait-elle seulement le droit ? Zelvajra hésita, puis ses mains se portèrent sur le voile. Il était incapable de la tuer, mais il ne pouvait pas non plus ignorer ce qu’il prenait pour un appel. Caressant le tissu, il hésita encore, puis l’agrippa et le retira. Doucement, comme s’il caressait le corps d’une femme, et c’était un peu ce qu’il faisait.

Le masque tomba, et il crut devenir fou. Là, juste devant lui, se tenait Sylea.
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeJeu 5 Aoû 2010 - 10:28

« Me voir est mourir. Me toucher est souffrir. Ainsi en fut il décidé lorsque le Fils marchait encore. »

Ma laideur, ma terreur nées au coeur de ses abysses. Lui seul a le droit de regard. Lui seul possède l'envie et le devoir d'écraser ma chair sous Son étreinte. Le Père qui couvrit sa Fille d'immondices, Lui qui dévora son âme soumise. J'erre dans les tenèbres de ses voracitées. Voix Adorée et sombre entité.

« Je vois les tourments de ton âme. J'entends les hurlements silencieux. Relent putride d'un oublié. Il ne redonne jamais ce qu'Il arrache, ainsi siège-t-elle au creux de ses iris écarlates. »

La nuit effleure ma peau. Je tremble. Le bouclier de ma vie git a terre. Les sentiers pavé de sang s'ouvrent et m'éclabousse.

« Regarde moi Fils. Admire la Disgrace qu'Il érigea en etendard de Sa Volonté. »

L'éclat de sa lame m'attire. Elle rougoie. La nuit est chaude, la nuit est notre car Il me la susurré en lacérant mes chairs. Ma main effleure, glisse, elle qui se crispa sur les âmes des hérétiques, se saisit de l'arme. Je tremble sous son poids, mais se n''est pas mon bras qui l'elèvera. Aérienne est la danse de mes pas. Je flotte sur cette terre impure de Sa voix. Le métal est froid contre mon dos. La lune rit et j'ai comme envie de rire avec elle. Le pommeau glisse sur la paume de son maitre. Sacrifice de tant d'âme, l'Assoiffé lui doit l'immensité et le pouvoir pervertis qu'il déverse en vagues putrides sur les entrailles de ce que nous sommes. Comme un souffle empoisonné, ma tête sur son épaule, la pointe de sa lame sur mon sein flétrit.

« Brûlée. Déchirée comme la Marque qui te fut faite, preuve flagrante de son baiser vénéneux. Déchiquetée est l'âme de la mère qui s'abreuve a la souffrance de ses Fils. M'aimes tu ? »
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeDim 8 Aoû 2010 - 1:11

C’était impossible. Pas elle, pas maintenant, et surtout pas comme ça. Sylea était morte, sur le champ de bataille, à Alonna. De cela, il était certain. Il avait vu sa tête se découper de son corps, il l’avait suivi du regard, alors qu’elle roulait au sol. Il s’était entendu hurler.

Elle ne pouvait pas être vivante. Elle ne pouvait pas être la Voix.

Tout cela n’était qu’une sombre mascarade. Zelvajra aurait été incapable de dire s’il était en train de rêver ou si les Dieux se jouaient de lui. Pourtant, il devait se rendre à l’évidence, il avait en face de lui un sosie presque parfait de son ancienne compagne. Presque, parce qu’il existait des différences. Les yeux n’étaient pas semblables, pas plus que la forme du visage, et la voix n’avait rien à avoir. Mais il ne se souvenait même pas de la voix de sa Muse, tout comme les détails les plus précis de son portrait s’estompait de sa mémoire. Le temps faisait son office, et le trompait.

« Quel est ce maléfice… ? » bégaya-t-il misérablement.

Quand elle se saisit de son arme, il hésita puis se laissa faire. Il avait eu envie, l’espace d’une infime seconde, de briser une dernière fois cette image qu’il avait tant aimé. Une seule seconde, puis il s’était haï pour cela. La Voix et Sylea étaient les deux femmes qu’il ne pouvait en aucun cas tuer, et découvrir qu’elles étaient si semblables, au moins de visage, apparaissait presque comme une mauvaise plaisanterie. Mais voilà que le fil de son arme glissait dangereusement sur le corps jadis tant aimé, et pourtant jamais touché. Soudain soucieux, il reprit en partie le contrôle, afin d’éviter un accident. Elle lui demanda s’il l’aimait, et il ne comprit pas. Il n’était « que » le Bourreau, et n’avait que rarement été confrontée à l’Oracle de Père.

Pourtant, obéissant, il répondit sans hésiter.

« J’ai aimé une femme, autrefois, avoua-t-il. Elle était magnifique. »

Il n’avait aucune envie de mentir, et savait très bien que cela ne lui était pas permis. Il oubliait que la Voix était une femme tout autant qu’une Oracle, et que sa déclaration pouvait potentiellement la rendre excessivement jalouse et donc dangereuse.

« Tout ce que j’avais pris pour des idioties devenaient tellement vrais, à son contact. Elle était la moitié de mon âme, et quand elle est morte, je suis mort avec elle. » Surement à cause de son sang elfique, ce sang elfique qu’il avait appris à aimer, parce qu’il le partageait avec elle. « Quand je vous regarde, je la revois. Quand je vous regarde, c’est mon âme que je retrouve. Je ne sais pas si je vous aime, Oracle, mais je sais qu’il faudra me tuer pour me séparer de vous. »

Posant sa main libre sur les doigts de l’elfe, il les dégagea doucement de sa lame et la rengaina, avant de l’enlacer doucement et de la serrer doucement contre lui. Pour la première fois depuis deux ans, il était de nouveau en paix. Cela n’avait rien à voir avec Père, c’était beaucoup plus simple que cela.
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeDim 8 Aoû 2010 - 2:15

Ne perds pas le fil du chemin qui s'ouvre. L'ombre aimée est partie rejoindre les ténèbres venimeuses du Père...Je ne répondis pas. Qu'importe en vérité. Les mots m'enchantent. M'enivrent. Ils me chuchottent des choses qui ne peuvent, qui ne doivent être. Je suis Sa Voix. Celle que l'on craint. Celle que l'on venère. Celle sur le passage duquel on s'incline...Et pourtant. Sonne la justesse du ton.

« -Tu serais mort si Il t'avait entendu.. »

Son Fils..Celui qui disparu dans les limbes impossibles. Eternelles. Est il mort ? L'a-t-Il rejoint ? Les griffes qui lacèrent mon âme sont si silencieuses, si cruelles parfois...

« -Syléa...Ton ombre, ton bouclier, ta Muse. Je l'aimais. »

Amour étrange. Amour perverti. Amour cruel. Amour sadique. Je ne sais pas. Ils sont ma voix, ils sont mon sang et ma chair. Chaque perte est une plaie purulente. Chaque âme arrachée a sa gloire me plonge dans la souffrance. Désirée, voulue, acceptée. Je virvolte, encore une fois. Sylphide oubliée des éternels. Vénus enlevée alors qu'en elle s'accomplissait l'ombre d'un devoir, la déchirure d'un amour absolu. Dénués de leur voile de douceur, mes doigts osent l'impensable pour le déchu. J'effleure les sinuosités de Sa cicatrice. Marque imposée dont Il m'a absoute. Sa Laideur est née au creux de ma chair, de mon sang. Elle jouit chaque jour des sursauts douloueux de mon âme. Marquée je le suis, plus profondément, au creux de mes entrailles, jusque dans mon ventre.

« -Est ce vrai ? »

L'éclat aérien de mes prunelles dévoilées, oubliées plonge sans vergogne. Fils...parle.

« -Est ce vrai ? Tu ne sais pas ? Je suis celle que l'on venère. Je suis celle que l'on aime. Celle que l'on désire ardemment. Celle qui ne pourra jamais être. Celle qui erre parmi Ses tenèbres. Celle qui psalmodie...Je suis Celle que l'on..adore et pourtant toi, toi tu ne sais pas... »

J'esquisse les lignes de son visage. Fils qui se rebelle, Fils qui avoue sans honte. Ce Fils qui voit au delà de l'Eternel rivière de sang.

« Aalya fut le nom de ma naissance, La Voix fut celui de ma renaissance. Comment m'appeleras tu ? »
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeDim 8 Aoû 2010 - 3:59

La Voix avait l’art de poser les questions pièges. Ce n’était guère étonnant, elle était une Oracle, après tout, et les Oracles étaient connus pour soumettre de tortueux exercices aux esprits qu’ils côtoyaient. Il ne savait pas quoi dire. Il avait avoué ne pas savoir s’il l’aimait, parce qu’il ne savait pas si un visage suffisait à faire naître l’amour. Mais en répondant ainsi, il n’avait pas voulu la renier, il n’avait pas voulu oublier ce qu’elle était, ni ce qu’elle représentait.

« Ma vie appartient au Père, et des lèvres de la Voix s’égarent ses paroles. Je respecte l’Oracle, et la suivrai là où elle décidera d’aller. Je lui confierai mon épée, et la laisserai choisir qui devra souffrir de son tranchant. Je lui offrirai mon âme, à elle seule, pour qu’elle la lui livre. »

Mais ce n’était pas de l’amour. C’était de la vénération, de la confiance aveugle en ce qu’elle représentait, mais ce n’était pas l’amour comparable à ce qu’il avait ressenti pour Sylea. Aussi devait-il en conclure qu’il n’aimait pas la Voix. Il n’aimait pas ce voile impersonnel, ce linge sacré qui avait gouverné Abyssea durant la décennie qu’il y avait vécu.

« Mon cœur appartint à Sylea, et elle le garda quand elle mourut. Je me meurs depuis le jour où elle ne respire plus. C’est peut-être pour cela que j’ai provoqué cette dernière bataille, pour qu’ils meurent tous avec moi. Parce qu’Abyssea n’était plus la même, sans elle, et que j’aurai sacrifié mille fois Sa cité si j’avais pu la retrouver. »

Sous la lumière nouvelle de ses questions, il comprenait enfin. La lente déchéance qu’avait été la sienne s’expliquait si simplement qu’il se sentait libéré. Il devait continuer. Il avait l’impression que ce qui se jouait ici était très important. Qu’entre eux se jouaient la véritable fin du Chaos. Pas sur le champ de bataille, ni même dans les ruines d’Abyssea où, savait-il, les Hauts Prêtres restant tentant désormais de ramener le calme et la « Foi ».

« Quant à Aalya… » commença-t-il. Dire qu’il connaissait le nom de la Voix, ce nom qui s’était perdu et qui n’avait jamais été cherché. Qu’importe le nom de celle qui se cachait sous le voile, car seul ce qui en ressortait avait de l’importance. Le message. « Aalya est un fantôme du passé. Elle m’apaise. Elle m’éclaircit l’esprit. Aalya ravive un souvenir chéri, émousse ses épines cruelles. J’ai l’impression de revoir Sylea quand je la regarde, tout en sachant que ce n’est pas elle. Je devrai être fou de rage, mais c’est comme un soulagement, au contraire. »

Il marqua une pause, puis esquissa ce qui ressemblait à un sourire. Le colosse de deux mètres ne ressemblait plus vraiment à la brute épaisse qui s’était autoproclamée Tyran. Il apparaissait bien pitoyable, et l’incurvation de ses lèvres trahissait qu’il en avait conscience. Il comprenait enfin. Le Chaos n’avait été qu’un prétexte. Un prétexte dont il n’avait plus besoin. Il sentit ses pouvoirs l’abandonner, mais ne chercha pas à les retenir. Toute sa vie, il avait recherché à établir des liens, à ne plus être seul, et quand il avait perdu le seul qui avait réellement compté à ses yeux, il s’était mis en tête de trancher tous les autres. Maintenant, c’était chose faite, et il devait abandonner le dernier, celui qui le retenait à un Père illusoire.

Zelvajra n’était plus un Chaotique, il n’était plus qu’un homme. Un homme qui n’allait pas tarder à mourir, si l’Oracle se vexait de cet « abandon ».

« En cet instant, Aalya compte bien plus à mes yeux que la Voix. Elle vient de m’ouvrir les yeux, et je l’aime pour cela. » Alors, il lui tendit son arme, lui présentant son pommeau. « Reste à savoir qui vous serez, vous, et ce que vous déciderez de faire de ceci. »
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeDim 8 Aoû 2010 - 14:47

La lune aspire, lentement, terriblement les langues vénimeuses qui parcouraient indéniablement, iimplacablement les limbes de la Cité. La Sienne. L'Eternelle détruite par ses enfants Déchu. Je suis l'Oracle. Je suis Sa Voix. L'est toujours été et le serait a jamais. Nul ne peut renier la Marque de l'Oublié. Autrefois, mes ongles auraient déchiré ce visage. Oui, sans nul doute. Le Fils aurait frappé au coeur même de l'hérésie. Aujourd'hui, mes Enfants se lacèrent, déchirant l'âme qui fut la mienne.

« L'Oracle ne peut survivre a la destruction de la Cité. Ses hurlements déchiquètent les lambeaux de son âme. La souffrance de ses Enfants creuse de profonds sillons dans la chair morte de son coeur. L'Oracle ne peut vivre sans Eux. »

Roule diamant de ma douleur sur ma joue. A mes pieds, le bouclier qui fut le mien, l'habit de sang qui devenait divin par Sa Disgrace. Cruauté qui voilait chacun de mes pas. Protection indéniable et incontournable.

« Il soufflait mon nom mais criait l'autre. L'une peut elle survivre sans l'autre ? »

J'ai toujours su que cette nuit se lèverait. Moi qui possède le don de divination. Cela dormait aux creux de mes abysses. Eclatant et purulent. L'a-t-il vu au coeur de mes songes ? Le diamant roule et glisse, étreignant le fer qui m'enlace.

« Nul ne doit toucher l'Intouchable. Nul ne doit voir l'Irréelle. Nul ne doit aimer la Vénérée. Nul ne doit désirer l'Indésirable...Tues la. »

Les mots s'animent pour la première fois sans l'ombre Adorée du Père.

« Brules son symbole toi qui a oublié jusqu'à son nom. »

Mes doigts glissent sur la lame offerte en une épée justicière et pourtant, je ne l'empoigne pas. Ombre cristalline qui se reflète avec pour compagne la douleur et la souffrance. Je veux...la paix peut être...
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MessageSujet: Re: Fin | La Voix   Fin | La Voix I_icon_minitimeLun 9 Aoû 2010 - 2:47

Pendant deux longues années, Zelvajra avait été obsédé par une seule image, celle de sa compagne, sauvagement assassinée sur le champ de bataille. Pendant deux ans, il s’était laissé détruire par cette conclusion sanglante d’une histoire par trop d’aspects trop courte. Plus jamais Sylea n’avait ri, plus jamais Sylea n’avait dansé avec lui.

« Nous sommes bien pitoyables… » murmura doucement l’hybride, sans trop savoir de qui il parlait. De lui, bien entendu, mais pour le reste, le mystère restait entier.

Il avait tué, encore et encore, pendant plus de dix ans. Il s’était hissé au sommet, Chevalier parmi les Chevaliers, Tyran d’une Cité devenue aussi folle que son idéal. Ses mains étaient couvertes de sang, et pourquoi ? Parce qu’il avait été seul, toute sa vie. Il avait suivi Arashkam parce qu’il lui avait promis une famille, il avait décidé de se vouer corps et âme à ce Père fantasmagorique qu’était Chaos, mais ne lui avait rapidement accordé que la seconde place, loin derrière sa muse. En réalité, Zelvajra avait trompé tout le monde, lui le premier, pendant les dix dernières années. Et ses mensonges avaient précipité la fin de la cité. Abyssea n’avait jamais conté, seule Sylea avait été importante. Sans elle, les ruines devaient retourner à l’oubli.

Mais voilà que la mort de sa compagne s’effaçait doucement, et que se dessinait sous ses yeux sa renaissance. Sous le voile qu’il avait jadis respecté, vénéré même, il découvrait son visage, plein de vie. C’était comme si on lui offrait une seconde chance. Aalya n’était pas Sylea, il le savait, mais il s’en moquait. Non, en réalité, ce qui importait était de délivrer celle qui avait été la Voix, et pour cela, il fallait d’abord qu’il se libère lui-même. Il n’était plus un Chaotique, il n’était plus qu’un mortel parmi tant d’autres. Faible, mais libre, pour la première fois.

« Ta tâche est terminée, Aalya », affirma-t-il avec douceur, alors qu’il caressait sa joue.

Levant la tête, il regarda la lune, unique témoin de l’étrange scène sur laquelle se jouait la mort de deux piliers du culte du Chaos. Mais pour lui, et pour elle, ces temps étaient révolus. Ce qu’il n’avait pu offrir à Sylea, une vie paisible, il pouvait l’offrir à Aalya. Toujours avec cette douceur qu’il avait oublié pendant deux années, il l’écarta de lui, puis attrapa le Voile. Ce Voile qui, a jamais, serait la Voix. Elle avait voulu qu’il brûle quelque chose. La pièce de tissu, ou bien elle-même, il ne savait pas, mais en réalité, il s’en moquait. Il avait parfois du mal à la suivre. Parlait-elle d’Arashkam, ou bien de Chaos ? Evoquait-elle sa mort ou celle de sa fonction ? L’étoffe était rêche sous ses doigts. Lourde, aussi. Autour de lui, rien, sinon ce Lac qui avait marqué la fin de sa chevauchée. Avec un sourire, il fit quelques pas en sa direction, ne s’arrêtant pas avant que ses genoux frôlent l’onde glacée.

« Chaos s’est arrogé les âmes de Tyra pendant bien longtemps… Il est normal qu’elle récupère quelque chose », dit-il en déposant son fardeau.

Sans se soucier des âmes qu’il avait lui-même ravi, il se retourna et rejoignit Aalya. La pauvre n’avait rien pour la protéger de la morsure du vent nordique, et s’il était vrai que les elfes supportaient bien le froid et ne craignaient pas la maladie, cela ne l’empêcha pas de retirer son manteau pour la recouvrir.

« Nous avons beaucoup à faire. »
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