Car ma vie n'est qu'un jeu de cache-cache - PV Menuith.

Dernière édition par Keylä le Mer 17 Nov 2010 - 21:30, édité 2 fois

La forêt d'Aduram.
Jamais encore cette surface boisée de Miradelphia fut explorée par les soins de notre vagabonde. Elle en avait certes entendu parler, mais elle n'avait pas spécialement prévu de s'y rendre. Ce qu'elle trouvera dans cette forêt, c'est ce qu'elle trouvera certainement dans une tout autre forêt.
Pourtant, la silhouette de Keylä se trouva immobile, face à la lisière de celle-ci. Sa longue cape noire flotta doucement au gré d'une brise douce et tiède. Ses yeux bleus qu'elle haïssait tant, observèrent attentivement l'intérieur mystérieux de cet endroit que les troncs des arbres dissimulent par centaines. Perdra t'elle son temps a s'y aventurer ?
Le temps. Un léger rictus étira le coin de sa bouche. Comme si elle se moquait de sa propre bêtise. Du temps elle en avait à revendre. Voilà donc qui venait de répondre à sa question. La drow inspira longuement, chassant d'un geste distrait ses cheveux d'un blanc de neige de son visage. Cette fois, ceux-ci se retrouvèrent libre, dénotant avec grâce sur les couleurs sombres de ses vêtements. Keylä avait décidé de changer un peu...Pas de queue de cheval. Pas de bandeau sur ses yeux non plus.

La drow fléchissa ses genoux avant de bondir tel un félin de la haute pierre sur laquelle elle s'était perchée. Souple et silencieuse, elle ne fit aucun bruit tant qu'à son atterissage. Non loin, la forêt immobile mais certes silencieuse lui sembla soudain un terrain minée. Après tout, qui sait qui ou quoi pouvait croiser sa route à l'intérieur. Ses sourcils se froncèrent, et sans un bruit, extirpa de sous sa cape un long bandeau noir. La drow le noua rapidement autour de ses yeux, le serrant fort par un noeud derrière sa tête. Puis, l'instant d'après, elle avait disparut.

Telle une ombre, la jeune femme usait de ses jambes agiles et rapide pour se déplacer rapidement. Le bandeau ne représente plus un handicap pour elle. Plus après tant de décennies à avoir été masquée de sa vue par ce bout de tissu. Ses sens et son instinct développé se montrent parfois être bien plus efficace que ses yeux.
L'odeur des feuilles que ses pieds trépignent, l'air portant cet arôme de pins et d'herbe. Puis ce bruit de bruissement de branchages d'un niveau plutôt bas, comme un buisson, suivit d'un couinement. Un lapin ? Et quelque part, un coulis d'eau chantait. Des oiseaux gazouillèrent au-dessus de sa tête, les branches des arbres remuent sous le vent qui les agitent, le bruit de ses propre pas ou encore celui d'un élan, non loin.
La course avait un effet exaltant, faisant naître un sourire sur les lèvres pleines de notre "jeune" elfe de la nuit. Son déplacement si silencieux, la faisant comparer à un spectre avec cette longue cape virvoltant tout autour d'elle lui donne un effet d'éclair vivace. Un éclair sombre parsemé d'une blancheur limpide dû à sa cheuvelure. On dirait que rien ni personne ne pouvait l'arrêter.

Et pourtant.
Keylä vit sa course interrompue par un bruit. Un craquement dû au piétinement d'un pied ou d'un sabot. Mais c'était un pied. La question est : De qui ? La jeune femme se vit stopper net, provoquant l'envol de plusieurs feuilles mortes plus loin.
Tournant sa tête, provenant de sa gauche, la drow renifla un court instant avant de faire volte face, sa main déjà posé sur le pommeau de son arme.
Tendue, elle ressemblait à une lionne prête à bondir, à l'affut du moindre bruit. Du moindre mouvement. Son ouïe aiguisée tilta sur un bruissement de tissus. Sa poigne sur son arme devint plus ferme. Cette personne, car s'en était une, n'était pas en train de marcher. Elle était immobilisée, et cela non loin d'elle. Rien qui ne pouvait plus déplaire à la drow qui n'avait pas confiance jusqu'à sa propre ombre...C'est pour dire.

- Qui est là ?

Maudite forêt.

Le fier et raffiné Menuith, plus habitué à recevoir clients ou invités dans des salons richement décorés, autour de mets raffinés et d'une bonne bouteille d'alcool, n'avait jamais considéré l'activité éreintante de crapahuter dans une moiteur étouffante comme partie intégrante de son métier de marchand.

La nature ! Jamais, en se lançant dans le commerce, l'idée ne lui était venue un seul instant qu'il aurait à sortir dans le monde extérieur, dans l'immensité sauvage et incivilisée dont il avait toujours eu connaissance par les livres et récits d'aventuriers et qu'il s'était depuis bien longtemps contenté d'observer du coin de l'oeil, installé confortablement dans son fauteuil favori, comme un vieil ennemi que l'on surveillerait au cas où il lui vienne l'envie de nous chercher des crosses. Non, jamais, jamais il ne lui serait venu à l'idée de s'aventurer dans cette enfer de lianes, d'arbres et de lichen à la chaleur étouffante sans même prendre une escorte avec lui ! Il n'était ni guerrier ni magicien, et s'aventurer à affronter seul tous les dangers de l'existence (qui pouvaient s'avérer nombreux et féroces, et qui avaient une dramatique tendance à accroître exponentiellement quand on avait la peau sombre) relevait de la pure folie.

Mais voilà, quelqu'un avait besoin de lui. Quelqu'un qui aurait bien pu se donner la peine de se bouger les fesses jusqu'à sa demeure au lieu de se contenter de lui envoyer ce genre de message lapidaire dont il était coutumier. Quelqu'un qui avait franchement intérêt à avoir une excellente raison de l'avoir fait se déplacer, et qui allait se faire sérieusement remonter les bretelles par un autre quelqu'un si il continuait à s'imaginer qu'il suffisait de siffler son grand frère à la rescousse pour que celui-ci n'accoure (ou patauge, dans le cas présent). Furieux en imaginant la tête que ferait Berg'inyon en le voyant débarquer dans sa tunique magnifique, si bien adaptée au faste et aux mondanités, aussi sobre et discrète qu'un papillon dans un repère de serpents à sonnettes, l'orgueilleux Menuith jeta un regard à ses pieds et sa colère se changea en consternation.

Fichue forêt ! Ses bottes étaient ruinées, maintenant.

Alors qu'il marchait à grands pas rageurs, bien content que personne ne soit là pour assister au rare spectacle de sa frustration, Menuith s'immobilisa soudain en voyant une femme drow débarquer en plein dans son champs de vision, et se retint de faire le moindre bruit. Les drows n'étaient pas franchement bons et miséricordieux les uns envers les autres, et il espérait franchement que ce bandeau qui lui cachait la vue l'empêcherait de remarquer sa présence.

Alors qu'elle s'immobilisait elle aussi, sans doute alertée par un quelconque bruit (bien qu'il ait toujours été doué pour la discrétion, il n'avait pas la divine faculté de disparaître totalement. Et puis il était fatigué, énervé, et il avait été pris par surprise, alors...), il fit silencieusement glisser dans sa main un fin poignard qu'il gardait toujours dissimulé dans sa manche et se tint prêt à agir. Il n'était pas idiot ; il avait vu sa démarche guerrière, l'épée qu'elle trimballait et la vivacité avec laquelle elle se déplaçait. Si il la laissait prendre l'initiative, il ne serait sans doute pas en mesure d'esquiver son attaque, alors autant prendre les devants. Elle avait déjà posé la main sur la garde de son arme, et si il ne réagissait pas immédiatement il n'aurait sans doute pas le temps de regretter une éventuelle hésitation.

Il était si près d'elle qu'il n'eut qu'à étendre la main dans un faible froufrou de tissu. Bien qu'il soit plus grand qu'elle, il aurait probablement
le dessous en cas de combat. Cependant, il ne comptait pas lui laisser l'occasion de quoi que ce soit...

- Vendui', mademoiselle, murmura-t-il d'une voix basse et parfaitement mesurée. Je n'ai pas fait tout ce chemin pour me colleter avec une charmante quoique imprudente inconnue, mais je me dois de vous prévenir : ce petit picotement que vous pouvez sentir contre votre peau est celui d'une dague enduite d'un poison foudroyant qui n'attend que votre bon vouloir pour faire son office, et dont je n'hésiterai pas à faire usage si jamais vous ne faites que penser à dégainer cette lame à laquelle vous vous agrippez.

Une fois qu'il fut certain qu'elle avait saisi le message, il desserra un peu sa prise et ajouta de son ton le plus conciliant :

- Mon nom est Menuith Brekkel, marchand d'esclaves à l'excellente réputation. Je ne sais pas à qui j'ai l'honneur, mais j'aimerais que nous trouvions rapidement une issue à ce qui semble être une impasse...

Foncer tête la première...Voilà qui était assez ressemblant à notre sombre vagabonde.
Cette drow intrépide n'avait pas entièrement mesuré les risques qu'elle encourait en ayant courut librement dans un terrain inconnu. Comme cette forêt, par exemple.
Jusque là, rien n'avait attiré particulièrement son attention. Tout était ressemblant aux autres forêts dans lesquelles Keylä se serait aventuré. Et pourtant. Son élan et sa frénésie se virent diminué si ce n'est stoppé par ce bruit qui signifia trop bien la proximité d'un être qui était tout sauf animal. Un être qui pouvait contenir donc des intentions viles. Ce qui provoqua automatiquement la méfiance chez notre vagabonde.

A présent immobile, les genoux légèrement fléchis, prête à bondir, la jeune femme était aux aguets.
Son ouïe ne l'avait pas trompé. Sur sa droite, des mouvements attirèrent particulièrement son attention. Le déplacement de cette personne dont elle ignorait encore son identité mais qui provoqua en elle une vive curiosité se vit décuplée lorsque le contact d'une chose dure et froide rencontra la surface lisse de sa peau. Un grondement se fit entendre dans la poitrine de la drow, celle-ci n'appréciant guère le culot de cette personne à la menacer directement d'une arme sans même qu'elle ne l'ai vu venir.
Keylä compta bien dégainer son épée et apprendre la leçon à cet inconscient, seulement il en vint vite à parler. Des paroles qui ne calmèrent pas la jeune femme. Certes non. Toute sa vie durant, elle manie son arme avec un seul dicton en tête "Tue avant d'être tué" et je vais vous avouer sans surprise de votre part, qu'elle préfère de loin jouer le rôle de l'assassin. Elle a encore trop à voir, trop à apprendre pour être tué aujourd'hui.
Lorsque la voix de cet imprudent parla de poison, Keylä pencha légèrement la tête sur le côté. Bluffait-il ? Dur à dire. La voix de cet homme, peu importe ce qu'il est, était assez confiante. Il semblait être plutôt rusé pour avoir devancer les actes de la jeune femme et de par la suite, l'immobiliser en précisant le détail du poison.
Keyla se mit à sourire. Ou plutôt, à ricaner.

- Voilà une bien étrange façon de me forcer à baisser ma garde, alors que vous êtes vous même en train de me menacer d'une arme. Ce n'est pas très équitable de votre part. De plus, ce n'est pas votre poison ridicule qui me fera trembler, voyez vous...

Même si elle pensait sincèrement tout ce qu'elle venait de lui répondre, Keylä se détendit légèrement. Cet homme ne semblait pas être guerrier dans l'âme. Plutôt prudent. Ce n'était pas atteinte à la vie de Keylä qu'il voulait, mais protection de la sienne. Cependant, il était clair qu'elle n'apprécia en rien ses manières de faire. C'était une elfe de la nuit après tout, avec le terrible orgueil qui va avec. Sa fierté de n'avoir pu anticiper son geste l'avait quelque peu vexée. La main toujours sur son arme quand même, la damnée écouta cet homme se présenter. Menuith....Marchand d'esclaves. Elle n'était qu'à moitié étonnée. Il avait un léger côté manipulateur qui semblait s'accorder parfaitement à ce milieu commercial et des plus rustres, cela va sans dire. En tout cas, si il avait une excellente réputation, Keyla n'en a jamais eu vent. Lorsqu'il parla de trouver une issue à cette situation, la drow répondit rapidement, toujours dans un élan incontrôlé...Impulsif.

- Je n'ai pas pour habitude de divulguer mon nom à une personne qui me menace de son arme. Quant à ce qui est de trouver une issue...

La drow se redressa, reculant légèrement. A vrai dire, elle n'avait plus le moindre argent. Ces derniers temps, elle vivait de ce que la nature daigne bien lui donner...Ce n'était pas du luxe et malgré son côté fier et indépendante elle reste une femme avec des désirs et autres envies qui ne peut être comblé que par le tintement d'une bourse bien remplie.

- Votre argent me suffira à oublier ce petit incident.

La bourse ou la vie, en gros. Keylä ne plaisantait pas. Du moins, il y avait peut-être bien une petite note d'humour dans son offre, afin de tester la patience et surtout le caractère de son interlocteur. Sûrement que la vision l'aurait aidé à l'analyser un peu mieux et surtout à le cerner. Mais il venait de se vanter de sa répuation. Sûrement quelqu'un de fier. Et de riche. Hmmm....Un drow ?
Les lèvres de la jeune sombre s'étirèrent en un fin sourire. Pour une fois, elle semblait de bonne humeur. Bien sûr, elle reste toujours aussi méfiante, mais après tout qu'avait-elle à craindre ? Ce n'était pas une immortelle comme elle qui allait geindre sous la menace d'un fil tranchant d'une lame.
Pour l'amadouer, il fallait bien plus que ça...Et elle espéra que ce dit Menuith l'avait saisit.

Maudites soient les femelles drows et leur damnée fierté !

Car c'était la fierté sans aucuns doutes la fierté qui poussait la téméraire intruse à prendre des airs pareils malgré la menace claire et sans équivoque de la lame contre sa peau. La fierté que se partageaient toutes les femmes drows, guerrières ou non, et qui les rendait parfois aussi dangereuses que des mères cogianth devant leurs petits menacés. L'esprit tout à ses problèmes de famille, préocupé par les nombreux soucis qui ponctuaient sa vie d'homme d'affaire et mal à l'aise sur ce terrain boueux et un peu trop boisé à son goût, il s'était bêtement laissé distraire et, au lieu de réfléchir, avait cru qu'il pourrait se débarrasser du problème en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire.

La tuer n'était pas une bonne idée. Tentante, sûrement, mais bonne, certainement pas. On ne devient pas riche et respecté dans un créneau comme le sien si on ne respecte pas deux ou trois règles logiques de base, marquées au coin du bon sens, genre : on ne tue pas son prochain sans raison, surtout quand il s'agit d'un drow. Primo, parce que tout finit par se savoir, et secundo, parce que chaque quelqu'un a toujours au moins un parent encore en vie suffisamment timbré ou attaché à lui pour avoir envie de crier vengeance, et alors on est sacrément dans la panade.

Quand à ce qui était de se laisser racketter...

- En général, quand on est dans une situation aussi délicate, on évite de poser ses conditions, répliqua-t-il d'un ton calme et un brin amusé. Mais je respecte votre sang-froid, mademoiselle, et il est vra que j'ai été le premier à menacer. Aussi j'accepte de retirer mon offense, et de ranger mon poignard, pour peu que vous me donniez en échange votre parole que vous ne tenterez rien de... d'inconsidéré.

Sa maîtrise était tout bonnement parfaite, étant donné qu'il se trouvait lui aussi dans une position plus que critique, mais Menuith était un bluffeur-né. Il aurait pu jouer au jeu de Sava dans une pièce entièrement noire, avec un bandeau sur les yeux, sans perdre une miette de sa concentration ou de ses capacités d'attention. L'instant de distraction précédent était une erreur, et comme toutes les erreurs qu'il avait faites dans sa vie elle ne se reproduirait plus. Il y veillerait.

La situation devenait de plus en plus intéressante. A vrai dire, il était même curieux de voir ce qu'elle allait bien pouvoir dire à ça. Il lui proposait une trêve, soit, mais il gardait ses poignards sous la main et au moindre petit mouvement suspect de sa part, il l'enverrait vers le joyeux monde des rêves éternels sans plus d'hésitations. Qu'on le prenne pour un crétin, passe un temps, mais pas trop quand même !

Et puis, elle n'avait pas l'air de mal se débrouiller, en ce qui concernait les armes. Elle avait un fort caractère, ça c'était certain, et elle n'avait pas froid aux yeux pour se balader dans ses marécages, un bandeau sur les yeux. Etait-elle vraiment aveugle, d'ailleurs ? Elle en avait tout l'air, mais son ouïe ne devait pas être si développé que ça puisque elle avait été incapable d'anticiper ses mouvements. Curieusement, Menuith avait toujours pensé que les gens malvoyants possédaient un espèce de sixième sens qui leur évitait de se retrouver dans ce genre de situation, mais peut-être n'était-ce là qu'un mythe urbain de plus...

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