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 Danseras-tu avec moi ? | Fjama

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L'Hirondelle
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MessageSujet: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMar 26 Avr 2011 - 15:55

Le crépuscule drapait le ciel d'un rouge magnifique. L'air rafraichissait, à mesure que l'astre disparaissait lentement derrière les remparts. Bientôt, la nuit s'emparerait une nouvelle fois des cieux et ranimerait les souvenirs aux arêtes tranchantes de la Malenuit et de ses tourments. Depuis la fin du Voile, nombreux étaient ceux qui craignaient la lune et la voûte qu'elle illuminait, si bien qu'on voyait ça et là les volets se clore, les portes se barrer et les torches flamber aux quatre coins de rue. On craignait la nuit noire et on luttait contre, avec les moyens du bord. La peur vrillait le ventre de ces pauvres hères qui avaient vu ce qu'aucun mortel ne devrait avoir à voir. L'Hirondelle comprenait leur réaction, mais rien ne pouvait plus la perturber, alors que ses pieds quittaient le sol. Concentrée pour réguler son souffle, elle jouait sa propre musique, dansait sur sa propre partition. Elle était sa seule maîtresse, détentrice d'une liberté que d'aucun qualifierait de factice, mais qu'elle considèrerait à jamais comme véritable.

Combien étaient-ils à la regarder ? À l'applaudir ? À l'encourager ? À se réjouir de sa venue ? Elle n'en savait rien. Elle ne les voyait même pas. Seul comptait l'air vibrant qui jaillissait de sa flute et le sol rugueux qui accueillait ses pieds nus. Même les cailloux aux bords tranchants ne la gênaient pas. Ainsi en avait-il toujours été. Protégée du monde par un cocon aussi solide qu'illusoire, elle entendait à peine les applaudissements des badauds et grand bien lui faisait ! Les pauvres n'arrivaient pas à être réellement en rythme avec sa musique, qu'elle avait choisi rapide et joyeuse, pleine de sursauts, comme le rire d'un enfant qu'on aurait chatouillé sans pitié.

Du coin de l'œil, elle crut pourtant repérer un motif familier ; plus précisément, elle capta le feu d'une chevelure plus rougeoyante que la sienne. Sans trahir sa danse, elle s'arracha à son état second le temps de vérifier ses doutes, et un fin sourire étira ses lèvres tendues.

Sur un coup de tête, elle ralentit le rythme, improvisant une transition qui n'aurait pas eu lieu d'être en d'autres circonstances. La musique se fit d'un autre monde, laissant pantois et indécis ses spectateurs. D'un mouvement ample de la hanche, elle entama une danse que Fjama connaissait bien, pour avoir été la première que l'Hirondelle lui avait enseigné. Une danse qu'on n'entendait d'ordinaire que sous le couvert d'arbres millénaires.

Une invitation, aussi, appuyée d'un unique véritable regard.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMer 27 Avr 2011 - 20:03

Voilà plusieurs jours à présent qu'elle arpentait les rues sinueuses de Diantra. Son objectif clair et limpide consistait à trouver son arme. Elle passait son temps de marchand d'armes en forgerons. Elle décortiquait leurs possessions avec un soin maniaque. Rien ne convenait. Rien ne l'inspirait vraiment. Lasse, elle se laissait à présent porter par la marée humaine hantant les avenues de la cité royale. Jusqu'à un attroupement, une mélodie gaie et rapide, un chant d'hirondelle.

Curieuse, Fjama se rapprocha. Ses yeux accrochèrent un éclat d'une fleur rousse se mouvant au gré d'un corps-tige aux autours sylves. Elle fronça les sourcils. L'air changea, plus lent, éthéré. Il n'existait qu'une seule personne sur Miradelphia pouvant réunir ces éléments. Alors Fjama sourit. Elle se tortilla à travers la foule compacte, jusqu'à arriver en vue de la danseuse. Sans hésitation, elle se joignit à elle pour honorer son invitation.

La flûte racontait à présent les milles et unes merveilles des forêts séculaires. Au diapason, les pas des deux artistes ruisselaient doucement en ronde féérique. Les bras devenues branches s'étiraient vers le ciel rougissant pour en happer les derniers rayons. Les doigts chuchotaient la croissance des feuilles, de tendres bourgeons à leur chute, valse langoureuse, au gré du vent. Les hanches bougeaient peu, tronc des femmes-arbres. Les jambes, les pieds se faisaient racines et traçaient leurs chemins tortueux à travers un sol meuble. Elles s'élevaient, s'abaissaient, s'entortillaient en autant d'entrechats et pirouettes. Puis, leurs danses à l'unisson se sépara.

L'elfe, à présent, devenait oiseau, virevoltait. Son corps s'arquait pour prendre le vent. Elle étendait ses ailes pour fendre une brise légère. Elle s'envolait joyeuse au gré du courant. L'hirondelle dansait et chantait si bien que parfois son éclat ternissait celui de l'astre couchant. Fjama, moins aérienne que sa comparse, contait la chasse d'une louve. Le paysage valonné de ses agréables complexions se creusait et roulait au gré de la course échevelée sur la mousse tendre. Les talons martelaient le sol pavé, pour faire tinter les clochettes nichées dans sa tenue de feu. Les jupons claquaient à chacun de leur tourbillon.

Leurs danses s'accordèrent à nouveau. Chacune devint le reflet de l'autre. Contraire - ou peu s'en faut- leur sang pourtant brûlait de la même passion pour leur art. Miroirs, elles scintillaient sous les derniers rayons caressants du soleil. Leurs mains se trouvèrent, haut dans le ciel, alors qu'un dernier séisme s'éteignait sur leurs hanches.

Indifférente aux applaudissements et quelques vivats nés de leur union éphémère, Fjama étreignit sa compagne, jusqu'à la soulever du sol pour une dernière pirouette. La demi-sang avait poussé depuis leur dernière rencontre. Ses formes discrètes avaient éclos en une luxuriante féminité. D'un revers de la main, elle cueillit la joue de Moïra d'une caresse douce. Un sourire doux enfantin naquit sur ses lèvres. Au contact de son amie, la flamme se révélait à nouveau, gamine crasseuse et rêveuse, avide de savoir et de tendresse. Elle relâcha l'elfe pour l'admirer, s'émerveillait de la trouver inchangée, ou plus belle encore.

Hélas, la cupidité brisa un instant la contemplation. La métisse rassembla les gains, les fourra dans les mains de sa partenaire, avant de l'entrainer un peu plus loin du passage. Ses mains, alors, s'animèrent silencieusement, d'un langage appris des années auparavant. Avec quelques ratés, voici ce qu'elles exprimèrent.

"Je suis heureuse de te revoir ! Comment vas-tu ? J'avais peur que tu n'aies totalement disparue. Je n'ai toujours pas réussi à te rattraper, il me faudra de nouvelles leçons !"

Elle rit franchement, toujours ce grondement suintant de la violence contenue de ses origines au fond de la gorge. Elle aurait pu parler, laisser le flot de mots submerger ses lèvres, mais elle désirer renouer les liens tissés avec celle qui lui enseigna de nombreuses choses. Naturellement, les gestes de leur discussion lui revinrent. L'instant n'appartenait qu'à elles. Pas même les quelques spectateurs réclamant une autre danse ou ceux espérant séduire les deux jeunes femmes ne pourraient déchiffrer les paroles échangées.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeJeu 28 Avr 2011 - 1:53

À l'étreinte de la sang-mêlé, l'Hirondelle répondit naturellement, brisant l'union qui existait jusqu'alors entre ses lèvres et sa flûte pour mieux la prendre dans ses bras. Ainsi mourut la musique, de concert avec la danse qui l'avait accompagnée. Sous le tonnerre d'applaudissements des badauds, les deux femmes oublièrent où elles étaient et ce qu'elles venaient d'accomplir pour se concentrer sur la joie des retrouvailles. Et qu'il était bon de retrouver des bras familiers ! Depuis la fin du Voile et peut-être avant, l'elfe faisait route seule, dansait seule. La caresse fut donc accueillie avec un sourire sincère, peut-être même pencha-t-elle légèrement la tête, comme un remerciement silencieux. Ecartant légèrement son ancienne élève, elle prit le temps de la contempler un peu plus. Force était de constater que Fjama avait grandi, avait muri aussi. Elle était plus femme que jamais. Plus sombre, aussi, mais cela ne troubla pas l'Hirondelle. Elle gardait le souvenir d'une fillette ombrageuse, curieuse de tout et avide d'imiter son aînée et, sous ses yeux amusés, le temps semblait faire marche arrière, se ruer vers un passé pas si lointain, un passé commun où le maître enseignait son art à l'élève ; Fjama redevenait l'enfant d'antan, comme pour ancrer à jamais un souvenir qui ne risquait pas de s'effacer.

Autour d'elles, on commençait à s'agiter. Des écus avaient été lancés, comme autant d'encouragement à continuer. Or, si Fjama aimait l'or – pour preuve sa vivacité à collecter ce qui lui revenait de droit – l'Hirondelle ne s'y attardait qu'au moment où elle ne pouvait plus faire autrement. Tout sourire, elle fit face à son public et s'inclina gracieusement plusieurs fois. Les pauvres seraient déçus, l'esprit de la danseuse n'était plus à son art et il n'y aurait plus de danse avant un petit moment. Quand, soudainement, ses mains furent chargées d'un imprévu fardeau, l'elfe pouffa faiblement. Elle manqua de tout laisser tomber, gênée par sa flûte, mais tint bon. Déjà, ses yeux étaient attirés par un éclat bien différent de celui des pièces s'entrechoquant. Timide étincelle qu'était l'ultime rayon de soleil rebondissant sur l'ongle agité d'une sang-mêlé, mais les gestes familiers réchauffèrent son âme plus sûrement qu'une bourse bien remplie.

Gênée par son fardeau, l'Hirondelle fit signe à Fjama de la suivre dans un langage tout ce qu'il y avait de plus conventionnel. Trois pas à peine et elles eurent rejoint le mur d'une bâtisse. Du bout du pied, elle poussa ce qui ressemblait à une cape de voyage trop longtemps portée, dévoilant le sac qui ne la quittait pas depuis plus d'un siècle. Piètre cachette qu'un vêtement de fortune, mais la danseuse n'était pas celle qui s'attachait à ses possessions ; mis à part, bien entendu, l'instrument qui ne la quittait jamais. À la va-vite, elle y fourra les piécettes durement gagnées, en laissant tomber quelques unes qu'elle ramassa. Ses doigts jouèrent avec avec l'aisance d'un jongleur, avant de les faire disparaître à leur tour.

Rassure-toi, tu les reverras bien vite. Elles sont à toi disaient déjà ses mains, taquines. Anaëh me manquait. M'appelait, peut-être. Comment savoir, avec le Retour ? Marquant une pause, elle saisit la main de la sang-mêlé et l'invita à la suivre. On aurait dit une enfant retrouvant une amie qu'elle n'avait pas vu depuis la veille mais qui, du haut de son jeune âge, pensait avoir vécu la plus longue séparation qu'il était possible de connaître. J'ai appris que Vie avait durement marqué les terres de ses Enfants.

Par respect, ou bien par commodité, la langue muette ne différenciait pas les Dieux de leurs attributs. Le même geste était utilisé pour parler de la vie d'un homme et de Néera. Rendue plus lente car ne pouvant plus utiliser qu'une seule main, l'aînée ne pouvait cacher complètement son inquiétude. Certes, Fjama se tenait devant elle, pleine de force et d'assurance et assurément en bonne santé, mais la marque des Dieux pouvaient être insidieuse et invisible.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeJeu 28 Avr 2011 - 22:38

Elle éclata à nouveau de rire en agitant les deux mains négativement. Elle n'avait récolté les gains que par habitude, pas pour s'en mettre plein les poches. Un vague signe s'esquissa "A toi..." Une vieille rengaine, l'hirondelle refusait toujours une partie de ses gains pour les offrir à son élève. La gamine finissait par les accepter avec un brin de culpabilité et de honte pour sa cupidité.

Anaëh, Moïra lui en avait conté maintes fois les charmes. Elle lui avait enseigné les danses millénaires à la gloire de Kÿria. Pourtant Fjama n'y avait jamais mis les pieds. Trop déplacée, trop sombre, trop incendiaire, elle n'y avait pas sa place. Les elfes croisées auraient tôt fait de se débarrasser d'une porteuse du sang contraire. Elle avait pourtant rêvé, enfant, de marcher dans les pas de la flûtiste. Mille fois, elle s'était imaginé danser à ses côtés, au pied des arbres soutenant le ciel. Avait-elle été attirée par la symphonie de la nature au Retour des Cinq ? Si elle l'ignorait, Fjama ne saurait que répondre.

Rien n'avait réellement changé pour elle durant le Voile. Elle s'était cachée comme elle en avait l'habitude dès que les choses tournaient mal. Ne sortant que pour prendre des nouvelles à Naelis. Rien vraiment ? Ce mensonge la séduisait. Les cauchemars s'étaient intensifiés. Son sang avait bouilli avec violence, hargne, comme s'il goûtait avec satisfaction à la terreur née de la pénombre. Elle avait combattu un temps les impérieux désirs de ses ascendances, s'y était abandonnée l'instant d'après avec volupté. Puis, les enseignements reçus avaient repris le dessus. Tellement qu'elle avait risqué sa vie pour un inconnu en se dressant devant ce haut-prêtre, jouant de mensonges pour sauvegarder sa liberté, son existence. Finalement, peut-être, la présence temporaire de Cyric à ses cotés l'avait-elle sauvé ? Préservé son équilibre fragile ? Le temps le dirait.

"Je vais bien" signa-t'elle. "Ne t'inquiètes pas, je fais toujours autant de cauchemars, mais tout va bien." Elle hésita un long moment. La peine transpira un instant de ses traits. "Nada est morte quelques semaines avant le Voile, elle qui voulait tellement le voir".

L'hirondelle se rappellerait-elle de l'humaine couvant Fjama comme une mère ? "Le temps l'a pris. Je ne sais pas pour le reste de la troupe. Nada ne pouvait plus voyager et nous sommes arrêté en bordure d'Anduram, il y a un an environ. Ils ont sans doute continuer tracer leurs chemins." L'air grave s'effaça du visage la jeune danseuse. Plus enjouées, les mains papillonnèrent à nouveau. "Peut-être les recroiserons-nous un jour."

A nouveau, les doigts rencontrèrent la joue pâle de l'Oiseau. Griffes rentrées, la métisse caressait lentement l'arrête de la mâchoire de l'elfe. Enfant déjà, elle exprimait sa tendresse de cette manière, mêlée d'une crainte révérencieuse, d'une fascination incrédule face au lien tissé. Elle craignait visiblement toujours autant de la briser. Presque brutalement, elle affirma : "Tu m'as manqué". Comme pour se rattraper de cet aveu, elle enchaina sur la question qui la taraudait : "Que fais-tu à Diantra ?"
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeVen 29 Avr 2011 - 4:16

Flûte loin des lèvres, l'Hirondelle ne chantait plus. Pieds fermement ancrés au sol, l'Hirondelle ne volait plus. Elle préférait sautiller sur place, joyeuse comme aurait pu l'être une enfant. Sa main ne lâchait pas celle de Fjama, la serrait parfois, comme pour rassurer la sang-mêlé ; oui, elle était à ses côtés et non, elle ne repartirait pas. Du moins, pas sur l'instant et si au moment du départ, elle désirait l'accompagner, alors elles iraient ensemble. Après l'avoir rassurée quant à son sort, le visage de la danseuse aux origines bafouées se teinta de tristesse. Silencieuse, l'Hirondelle était de celles qui savaient écouter si bien qu'elle n'essaya même pas de presser son ancienne élève et quand finalement cette dernière confessa la raison de sa douleur, elle put sentir la douceur de l'étreinte. Sans un signe, l'elfe nicha sa tête dans le cou de sa compagne et la serra contre elle. Mort prendra soin d'elle tentèrent d'assurer finalement ses mains, quand elle consentit à la relâcher.

En réalité, il était des sujets avec lesquels la danseuse n'était pas à l'aise et la mortalité en était un. Pour elle, le temps n'avait aucun sens. Le destin l'avait éloigné d'Anaëh trois siècles plus tôt, mais aux yeux d'un humain, combien d'années avaient ruisselé sur son visage ? Cinq ? Peut-être dix pour les plus critiques, mais guère plus. Durant ses voyages, elle avait vu de nombreuses personnes mourir. Certaines qu'elle connaissait et appréciait, d'autres dont elle ignorait jusqu'au nom, mais chaque décès avait été synonyme de départ. Pourtant, elle aimait la culture humaine, était même persuadée que cette spontanéité qu'on pouvait y trouver était due à cette extrême mortalité... Comment prendre le temps de soigner une œuvre, quand on avait qu'une vie humaine pour la terminer ? Peut-être la craignait-elle, cette sombre et inquiétante mort. Peut-être, elle aussi était-elle hantée par quelques sombres cauchemars peignant avec un réalisme saisissant le corps désarticulé d'une mère aimée.

À moins qu'il ne s'agît d'autre chose encore. Avec l'Hirondelle, comment savoir, elle était parfois plus avare de signes que de parole, ce qui n'était pas peu dire. Tu m'as manqué aussi, trésor. Une caresse, légère, juste le temps d'éprouver la douceur d'une boucle sanguine. Curieuse taquina-t-elle, tu devrais pourtant savoir que je n'ai pas besoin d'une raison pour être quelque part. La réponse n'était guère satisfaisante, mais elle résumait pourtant tout. L'Hirondelle avait ouvert ses ailes, s'était laissé portée par le vent et avait atterrit à Diantra, juste aux pieds d'une vieille amie. Là était la réelle beauté du voyage et la raison pour laquelle elle quittait si souvent Anaëh.

J'aurais voulu être là. Et, sans plus préciser sa pensée, elle lâcha Fjama, récupéra la flûte qu'elle venait juste de ranger et titilla l'air d'une mélodie que les deux femmes connaissaient bien. Parfois, quand le hasard de ses errances entre les roulottes et les chariotes la conduisait à une fillette en pleurs, terrorisée par une nuit trop noire et un sommeil trop cruel, elle s'arrêtait et jouait. Toujours la même mélodie, toujours les mêmes notes enchaînées sur le même rythme, comme un point de repère inébranlable auquel se raccrocher. Cette fois, Fjama ne pleurait pas mais la tristesse de son visage n'avait pas menti.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeLun 2 Mai 2011 - 3:01

Lorsque son amie la prit dans ses bras, elle se tendit tout à fait. Même alliés, les contacts imprévus la troublaient, voire la rebutaient complétement s'ils étaient masculins. Une brève seconde, elle exalta une chaleur un tantinet plus élevée avant de se nicher étroitement dans les bras de sa compagne. Les lèvres baisèrent un instant la peau claire, pour en éprouver la saveur avant qu'à nouveau l'oiselle s'enfuit des mains de la prédatrice. Le baiser n'était, évidemment, aucunement un prémisse à des jeux sensuelles et saphiques, à peine un effleurement pour assurer qu'elle se portait bien. La peine du récent deuil coulait encore dans ses veines. Mais, elle ne focalisait pas là-dessus. Cela n'était qu'une péripétie dans son histoire. Sa mort à elle ne viendrait que dans bien des années. Si toutefois, elle ne la hâtait pas en mettant à exécution son plan. Elle redoutait le passage du temps. Elle haïssait sa mortalité. Peut-être était-ce pour cette raison qu'elle désirait choisir son heure elle-même en emportant la raison de ses tourments.

Elle rit. Bien évidemment que l'Hirondelle n'avait aucune raison d'être ici hormis le chemin parcouru. Elle-même voyageait souvent ainsi, se laissant guider par une idée, d'un pas décidé même s'il ignorait sa destination. Pour sentir le vent dans ces cheveux, la terre sous ses pieds, le soleil sur sa peau. La liberté. Rien ne la liait à un endroit. Rien ne l'obligeait à quoique ce soit, à part peut-être les désirs d'un comte scylléen et encore : Il ne partirait pas à sa poursuite si elle ne revenait jamais. Plus que son amant, la raison qui mènerait à nouveau ses pas en Scylla était la promesse faite à son maître d'arme et l'enseignement de celui-ci.

"J'aurais voulu être là"


Moïra prit sa flûte et entama une mélodie. Cet air que la métisse espérait, sans vraiment se l'avouer, réservée à elle seule, s'élevait claire avec la tombée de la nuit. Avec une douceur peu coutumière, Fjama sourit. Sur les quelques marches menants au perron d'une demeure, elle s'installa, jambes repliées contre elle. Son menton s'appuyait sur ses genoux, alors que la sang-mêlée fredonnait en silence la chanson. Combien de fois était-elle venu la rassurer de son chant ? Combien de fois s'était-elle lovée contre Nada avec toute l'ardeur éperdue de l'enfance, écoutant les notes cristallines dissiper les brumes sombres d'un cauchemar trop réaliste ? Les deux femmes avaient été les étoiles la guidant sur ses sentiers torturés si souvent que le compte en était perdu.

Sans le vouloir, l'oscillation de la flûtiste hypnotisa la demie-sombre. Loin, très loin, elle la plongea dans ses souvenirs. Leur première rencontre. Dans la campagne proche d'Alona, la troupe de Nada distrayait un petit village en bordure d'une forêt. Fjama, alors âgée d'à peine une trentaine d'année, était chargée de soulager discrètement la foule de quelques écus supplémentaires. Rien de bien méchant, une juste rétribution ! Le public profitait du spectacle et négligeait si souvent de payer les artistes, pensant qu'ils "vivaient de leur art". Alors, les plus petits qui ne manquaient d'accompagner une coterie aux mœurs plus libres étaient mis à contribution pour se faufiler entre les jambes et délester les plus richement vêtus de leur bourse. L'exercice périlleux réclamait du doigtée et une bonne dose de savoir faire. Des deux, Fjama n'en manquait pas. A force d'expérience, la technique s'était affinée. Facile pour une enfant qui paraissait dix ans et capable de réfléchir avec la vélocité d'un adulte de trouver le bon angle d'attaque.

Ce jour-là, une elfe, la première vue, captura son attention. Les habits sylves resplendissaient parmi les atours de terre. Aussi, la gamine en fit sa proie. Mais lorsqu'elle s'apprêta à la défaire de ses biens, elle suspendit son geste. La main en l'air, elle s'approcha pour tenter de cueillir une fleur parsemant la parure.

La mélodie cessa, brisant le flot de souvenir. Fjama dévisagea alors l'hirondelle, puis signa.

- Te souviens-tu de notre première rencontre ?
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeSam 2 Juil 2011 - 23:21

Se souvenir...

L'Hirondelle sourit. Portant son instrument à ses lèvres, elle fit œuvre de la seule magie dont elle était réellement dépositaire : la catharsis. Elle rassembla tous les souvenirs qu'elle pouvait garder de cette fameuse journée, chaque détails, jusqu'au doux parfum du pain qui cuisait non loin de la petite troupe, et l'air vibra sous l'assaut d'une nostalgie doucereuse. Elle se souvenait, oui, de la musique qui l'avait attirée. Elle n'était pas spécialement belle, ni même bien jouée, mais elle était empreinte de joie et de bonne humeur, et cela suffisait. Le vent se leva, et Diantra la majestueuse s'effaça, cédant le pas à l'image d'un village qui n'existait peut-être même plus. Les pavés tombèrent en poussière et les pieds nus de l'Hirondelle dansèrent sur la terre meuble, douce et fraiche. Les odeurs piquantes de la plus grande cité du monde s'inclinèrent face à celles, plus fruitées et authentiques, d'une campagne offerte aux bienfaits du printemps.

Se souvenir...

Elle aurait pu opiner du chef, mais sa langue n'était pas celle des Hommes, elle n'était pas celle des Elfes, elle n'était pas même ces signes qu'elle avait inventé. Non, sa langue était celle de la musique et de la danse, ces deux dialectes qu'elle mêlait jusqu'à les rendre indissociables. Parfois, ses mouvements l'entraînaient si loin que son souffle s'en retrouvait saccadé, et saccadées étaient les notes qu'elle jouait. Parfois, la musique, lente et languissante, étreignait ses membres, rendaient ses gestes amples et somnolents. Dans un cas comme dans l'autre, l'émotion de l'un débordait sur l'autre, et sans jamais se trahir, ils s'influençaient. Marquant une pause, l'elfe fit face à Fjama redevenue enfant, et son sourire était comme une invitation à plonger avec elle dans un passé révolu, une après-midi perdu dans l'immensité du temps, mais qui ne serait jamais oubliée.

Se souvenir...

La musique changea, et les ombres mouvantes d'Alonna cédèrent à leur tour, comme s'il s'agissait d'un dessin à la craie, qu'un revers de main suffisait à effacer. D'une patte experte, elle jetait les basses d'une nouvelle esquisse, d'une nouvelle après-midi, plus au sud cette fois-ci. Une musique bien particulière, sur laquelle la danseuse avait commencé à transmettre ses savoirs. Deux pas en avant, deux pas en arrière, petit saut, pas sur le côté, virevolte et mains levées. Deux pas en avant, deux pas en arrière, petit saut, pas sur le côté et mains levées. Comme une litanie, elles avaient répété, encore et en encore, élève et maître sur un pied d'égalité. Elle continua ainsi quelques minutes, les paysages succédant aux paysages, les souvenirs appelant d'autres souvenirs. Elles étaient à Serramire puis à Sybrondil, puis à Soltariel, puis aux frontières d'Anaëh, puis perdues en Aduram. Jusqu'à ce que Diantra se rappelât à leur bon souvenir. Le souffle légèrement court, l'Hirondelle laissa le pavé reprendre ses droits.

Se souvenir...

Oui, l'Hirondelle se souvenait de tout, toujours, témoin muet d'une histoire qu'elle ne pourrait jamais conter de vive voix, mais qu'elle utilisait sans retenue pour donner vie à ses spectacles. Chaque note était la résonance d'un passé, ou l'écho d'un présent, ou le tintement d'un futur, chaque pas était la promesse d'un lendemain et la gratitude d'un hier. Des siens ou de ceux des autres, ce n'était pas ce qui importait.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeLun 18 Juil 2011 - 18:20

Alanguie sur les marches du perron, Fjama se prélassait au son des souvenirs. Lentement, la flûte faisait naître un foisonnement d’images dans son esprit : Le passé chéri, son apprentissage, les voyages, leurs aventures. Tout cela l’emplit d’une joie enfantine, presque sauvage qui bientôt gagna ses membres. Elle se redressa vive et esquissa les pas de cette première danse, l’origine de tout ce qu’elle était devenue. Les quelques virevoltes ainsi nées contaient la même histoire d’un point de vue différent à son Hirondelle : Joie, découverte, bonheur, impatience.

Lorsque l’instrument regagna son fourreau, Fjama riait à gorge déployée. Bien vite, elle se saisit du bras de l’elfe et la tirait déjà vers les rues grouillantes. Brutalement, l’ambiance retomba. Sur leur chemin se dressaient trois hommes pauvrement vêtus. Nonchalamment, le plus grand, appuyé contre le mur de pierre, jouait du couteau sur un morceau de bois. Le plus fluet, la mine teigneuse sous sa tignasse broussailleuse, mirait les deux femmes. Son regard glissait sur les atours des deux saltimbanques, s’accrochaient aux formes et à leurs bourses. Le dernier ne disait mot, cerbère redoutable à la forte carrure. Toujours au bras de sa compagne, Fjama se détourna lentement et prit la direction inverse, entrainant à sa suite l’Hirondelle. Ferme, son pas s’enfonçait dans la ruelle sans se presser.

A peine eurent-elles fait quelques mètres que trois autres hommes s’interposèrent. Plus massifs que les premiers, leurs trognes peu amènes défiaient les danseuses de passer autant que leurs mains négligemment posées sur la garde de leurs armes. L’entourloupe à venir tendit les muscles de Fjama et son sens de la conservation lui criait, mais bien trop tard, de prendre ses jambes à son cou. L’étau humain refermait lentement son emprise. Les échappatoires s’amenuisaient à chaque seconde. Comme un naja, Fjama ramassa doucement ses jambes sous elle-même, prête à bondir.

- IL veut juste vous parler, déclara le fluet. Suivez nous sans faire d’histoire.

A six contre deux, elle ne pouvait se tirer de ce mauvais pas sans faire usage de magie. Or, en plein jour, au milieu de Diantra, le feu lui attirait un surplus d’ennuis à éviter en priorité. D’autant qu’aucun maquillage ne tromperait qui que ce soit quand la magie allumerait son regard de l’éclat des sombres. Quant aux capacités martiales de l’Hirondelle, de mémoire, elles étaient inexistantes à part pour une excellente esquive et fuite. Les carottes étaient cuites. Alors, elle leva les mains en signe de reddition et enjoint Moïra à faire de même.

Rudement, mais sans violence, le cerbère lia leurs poignets au creux de leurs reins et recouvrit l’entrave en arrangeant les étoffes de leurs tenues. De cette manière, la petite troupe pourrait se promener en ville sans alerter la populace. Un ruffian par donzelle s’approcha et attrapa sa cible à la manière des couples d’amoureux flânant en ville. Sous le couvert de la proximité et des replis des vêtements, un poignard pointu dardait les côtes des belles leur coupant toute envie d’esclandre et de fuite. Ainsi encadrée, les demoiselles et leurs soupirants fendirent la foule sans être inquiétés. Calme à l’extrême, Fjama cherchait à analyser le pourquoi de cette invitation cavalière et surtout qui était ce « Il » sans en trouver la réponse. Très bas, elle rassurait de quelques paroles l’Hirondelle avant de subir une piqûre, fort habile et douloureuse, de son gardien sur son flanc.

Après quelques minutes de marche forcée, ils arrivèrent dans le quartier le plus pauvre et délabré de la cité. Là, la reconstruction avec les divers fléaux avaient à peine débuté. Les bâtiments ressemblaient à des ruines branlantes et, à part quelques chiens et chats errants, l’endroit semblait désert. Une vision de Naelis, en plus cossu, s’imposa à l’esprit de Fjama. Ce genre de lieu était affectionné pour établir un fief de bandits en tout genre. Généralement, les petites bandes s’organisaient autour d’un chef un peu charismatique, ancien soldat, déserteur parfois, un bretteur un peu plus agile, bref un petit prince déclamant ses lois sur ses gens et son domaine. Dans une sorte de temple, probablement dédiée à Néera avant la Peste et la Guerre civile, les demoiselles furent jetées dans une alcôve fortement gardées.

- Attendez ici, je vais voir s’il peut vous recevoir.

D’une révérence goguenarde, le fluet prit congé et laissa seules les demoiselles avec des gardiens armés et peu loquaces.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMar 2 Aoû 2011 - 16:30

S’il y avait une chose que l’Hirondelle savait, c’était bien qu’une musique était imprévisible. Un tempo n’était jamais éternel, et le tumulte pouvait succéder au calme, la peur à la joie, la violence à la douceur. Quand elle vit les premiers hommes, l’elfe retint sa respiration, se laissant entraîner sans protester par la sang-mêlé. Les notes s’enchaînaient encore avec une relative paix, quoique troublées et parfois saccadées. Quand l’étau, sans surprise, se resserra, le rideau tomba et le silence recouvrit la scène de sa chape glacée. Depuis avant la naissance de ces hommes et jusqu’après leur mort, l’Hirondelle était et resterait un être libre, aussi s’opposa-t-elle à ses liens qui l’entravaient. Dans un premier temps de façon visible, en luttant contre les mains qui la brutalisaient ; ses vaines tentatives lui valurent un bon coup aux tempes et une virulente injonction au calme. Etourdie, elle se laissa faire, faisant son possible pour ignorer l’étreinte odieuse. Plus que la dague, la proximité de son agresseur lui donnait la nausée.

Le dégout surmonté – en partie – l’Hirondelle commença à s’interroger sur les tenants et aboutissants de cette « confrontation ». Elle doutait que leurs maigres gains fussent la cause de leur malheur : Fjama et elle avaient à peine gagné de quoi passer une nuit dans une auberge descente. Peut-être espéraient-ils les utiliser, d’une façon ou d’une autre. L’Hirondelle jouissait d’une réputation bien à elle, dans la Péninsule, et savait se faire ouvrir la plupart des portes, fussent-elles de châteaux ou de manoirs. La sang-mêlé, quant à elle, avait des talents enviables, mais l’elfe savait avec quelle minutie elle les cachait aux yeux du monde. Restait d’autres possibilités, certaines inquiétantes, d’autres répugnantes, aucune qui ne fut réellement à leur avantage. Dès lors ne restait qu’une idée : il fallait fuir.

La marche ne dura que quelques minutes, mais cela fit l’impression d’une éternité à la danseuse qui, sans paniquer, sentait le malaise la gagner. Quand elles s’engouffrèrent dans les restes d’un Temple, elle marqua instinctivement un arrêt, inclinant la tête et rendant grâce à Néera. Un signe de dévotion envers le divin qui ne fut pas du goût de son chien de garde. D’un coup d’épaule bien placé, il la força à avancer, manquant de la faire s’étaler au sol. Heureusement, l’Hirondelle était une danseuse et une acrobate, elle tituba à peine mais ses prunelles ombragées de colère fixèrent le malotru. Nouvelle erreur, nouvelle punition, elle ferma les yeux pour échapper aux étoiles qui dansaient sur son nez.

Après un regard pour Fjama, elle entreprit de l’ignorer, concentrée sur la tâche qu’elle s’était fixée. Prenant bien garde à ne pas bouger ses épaules, elle tenta de libérer ses poignets. Très vite, sa peau cria sous l’assaut des liens, manqua se déchirer même, mais l’elfe parvint tout de même à ses fins. Loin de s’en réjouir, elle entreprit la démarche inverse, desserrant le nœud de la cordelette juste assez pour pouvoir les enlever plus facilement en cas de besoin, mais pas trop. Il ne fallait pas qu’un balourd se mît en tête de vérifier et découvrît la supercherie.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMer 3 Aoû 2011 - 3:39

Pendant que l’Hirondelle se tortillait, Fjama guettait leurs gardiens afin de la prévenir en cas de besoin. Quant à l’initiateur de la cavalière invitation, elle n’en savait goutte. Elle tenta bien de nouer un dialogue avec un des cerbères, de récolter quelques informations sur le maitre des lieux mais, après une généreuse mandale, elle consentit à lui foutre une paix royale. De cette occupation fournie chaleureusement, elle s’en saisit avec avidité. Tenter de calmer un saignement de nez intempestif, sans faire usage de ses mains, voilà un défi intéressant ! Fort heureusement, le flot vermeil se tarit rapidement. Quelques vaisseaux avaient dû rompre sous la force du coup. Rassurée par l’absence de douleur lancinante, elle pesta à cause de la tâche sur sa chemise. Elle riva ensuite son regard à celui de l’Hirondelle et tenta de la rassurer d’un sourire.

Malgré le manque de crédibilité flagrant, ce simple sourire lui rappellerait peut-être une des une des « règles » de la coterie : « Même dans la dèche, souris ! » ce qui signifiait en gros que tirer une tête d’enterrement et déprimer n’apportait rien de bon ou peut-être bien que la vie était un jeu. Alors qu’elle débattait avec elle-même sur le sens profond de cette maxime, le fluet revint, tout fringuant et vêtu comme un prince. Sans doute dérobés à un noble ou un petit bourgeois, les vêtements élimés par l’usage et aussi mités que les autres témoignaient néanmoins de l’effort développé pour la mise en scène. Avec une révérence aussi goguenarde que celles dont Fjama avait le secret, il déclara d’une voix claire.

- Sa Majesté est à présent disposée à vous recevoir.

D’un regard, il avisa la tâche de sang maculant le haut de la métisse.

- Cependant, nous ne pouvons tolérer une mise aussi médiocre au sein de notre cour.

Dans le froufroutement des dentelles grisées et effilées de sa blouse, il claqua des mains autoritairement deux fois. A l’injonction débarquèrent une horde de gamines en robes du même acabit que le pseudo-majordome. Elles s’emparèrent rapidement des deux saltimbanques étonnées. Fjama, intriguée, haussa les épaules à l’attention de Moïra – Non, elle ne comprenait pas plus – et lui fit comprendre tant bien que mal qu’elle voulait aller au bout de l’aventure. Menées par les petites servantes improvisées, elles gagnèrent les anciens dortoirs du temple transformés en vastes champs de costumes divers et variés. Après un long babille sans queue ni tête, les gosses sommèrent les almées de passer derrière un paravent pour revêtir les atours choisis. Là, les plaies éventuelles laissées par les rabatteurs furent soignés. Puis, de plus ou moins bonne grâce, Fjama les laissa l’engoncer dans un corset et passer une robe rouge sertie de quelques perles. Poussiéreuse, elle lui arracha une quinte de toux. Elles avaient choisi pour la flûtiste une tenue du même genre mais vert forêt. Etonnamment, les petites prirent soin de plier les tenues originelles des danseuses et de les fourrer dans une sacoche de tissu assorti à leurs tenues. Leurs armes éventuelles furent confisqués sous prétexte que « l’dames ont pas b’soin d’s’battre » et on leur assura qu’elles pourraient les récupérer si elles répondaient par la positive à la demande de « sa majesté ».

Ainsi parées, les domestiques les escortèrent jusqu’à l’ancienne grande pièce réservé au culte. La statue de Néera qui y trônait auparavant gisait à présent en plusieurs morceaux sur le sol jonché de pamphlets divers. Sur son socle préservé, une sorte de trône recouvert de tissus chatoyants. Nonchalamment assis, « sa majesté » brandissait dans une main un os de jambon. Grand gaillard, ses épaules néanmoins se voûtaient sous le poids de l’âge. Ses cheveux poivre et sel tombaient, crasseux, sur son visage mangé d’une épaisse barbe. A la vision des danseuses, son œil valide s’éclaira brusquement de joie et, d’un geste désinvolte, il jeta sur son majordome son « sceptre ».

- Ah mes chères marquises ! Que n’avons-nous pas dû faire pour vous retrouver ! Nous étions las d’attendre votre retour !

Chaleureux, il s’approcha d’elles et les serra chacune brièvement dans ses bras. A la mine tout à fait déconfite de Fjama et celle de Moïra probablement toute aussi dubitative, il sembla peiné.

- Elles ne se rappellent pas de moi.

Prenant à partie la petite foule de suivants – les gamines domestiques, le majordome fluet, les cerbères mais aussi quelques catins alanguies et autres roublards, tous parés avec le même soin de vieux vêtements de cour - il répéta plus fort.

- Elles ne se rappellent pas de moi !

Un vague murmure d’assentiment grimpa le long de murs couvert de tentures sales. Sa Majesté, fulminant, parcourut en long et en large la salle pendant plusieurs minutes. Brusquement, il s’approcha à nouveau des demoiselles et d’un air de conspirateur, il leur chuchota :

- C’l’p’tit Justin ! Dia d’vriez quand même m’reconnaître même s’ça fait plus d’vingt ans que j’ai quitté l’Ephémère !
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMer 10 Aoû 2011 - 10:57

On avait ravi à l'Hirondelle sa flûte adorée, aussi se résolut-elle à s'essayer aux percussions : sa main claqua la joue de l'impudent, laissant une note sèche et tranchée résonner contre les murs pour moitié en ruine du Temple. Au soulagement se mêlait la colère ; le visage changé du « p'tit Justin » se parerait très bien d'une joue rougie, gageait-elle, en paiement de la manière dont elles avaient été traitées. Ignorant les très probables cris d'indignation d'une Cour devant souffrir pareil manque de respect envers leur Majesté, elle signa le premier mot qu'elle apprenait toujours à ceux avec qui elle était amenée à voyager. Flûte. L'Hirondelle ne pouvait souffrir la séparation avec son bien le plus précieux. Si elle était muette, son instrument lui donnait une voix, bien plus claire et distincte que le brouhaha qui pouvait s'échapper de la bouche maladroite des hommes. Avec ses notes, elle parlait au cœur, quand les mots s'attaquaient trop souvent à la raison.

Elle ne s'intéressait pas au cadre, grotesque mélange entre luxe et poussière, entre somptueux et décrépi. Elle préférait ignorer qu'elle était elle-même affublée de ces haillons immondes, qu'elle était comme enlacée par ce corps étranger et rêche. L'Hirondelle aimait l'aventure, l'inconnu et le frisson excitant de l'indécision ; mais elle haïssait le joug, qu'importât sa nature.

Dans tous les cas, il était rare de le voir dans cet état là.

Parce qu'il mettait, à son goût, trop de temps pour réagir, elle eut envie de le gifler une nouvelle fois, mais se retint de peu. Après tout, il avait beau se donner des apparences de cordialité et enrober ses manières de complicité, il n'en restait pas moins qu'il les avait faites enlever, alors qu'une simple invitation eut suffit. Il n'était plus le p'tit Justin qu'elles avaient connu, du voleur talentueux qu'il avait pu être enfant, il était devenu le Roi d'une Cour, aussi ridicule fut-elle, un œil en moins mais une prestance certaine en plus... quoique gâchée par un sens du spectacle bien trop prononcé.

Le regard qu'elle lança à Fjama n'était adouci par aucun sourire : l'irritation était réelle, et il faudrait plus que quelques pirouettes pour obtenir son pardon.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMar 1 Nov 2011 - 21:55

Sa Majesté, yeux exorbités et pas loin de retourner la mandale, mira longuement l’Hirondelle avant que les différentes connexions de souvenirs ne se fassent dans sa cervelle de moineau. Trois pas énergique plus tard, il secouait son « majordome » comme un prunier en réclamant avec le parfait ton de la petite frappe cette fois-ci qu’il avait intérêt à ramener la flûte séance tenante. De retour auprès des deux danseuses, il les invita d’un large geste de la main à venir prendre place. Fjama, pas spécialement dérangeante, s’installa tranquillement sur un des divans. En sautillant sur celui-ci, un nuage de poussière rance s’en échappait vaporeusement. Toussotant, Fjama couvrit son nez et sa bouche le temps que ça. Evidemment, elle aurait pu tout aussi bien éviter de tapoter les coussins, mais c’était moins drôle.

D’un geste se fut elle qui invita Moira à prendre place. Elle lui signa brièvement que pour le moment, elle ferait mieux d’obéir et d’attendre. Certes, cela paraissait sans doute un peu étrange venant de la part de la colérique sang-mêlée. Cependant, la réaction était du fait d’un simple calcul : Un majordome, quatre-cinq brutes, une dizaines de courtisans-ruffians et autant de catins. Sans magie à deux donzelles, pas la peine d’y songer. Avec magie, si elle usait correctement du terrain, ça restait dans le domaine du réalisable. Quoi de mieux pour examiner minutieusement les environs ? S’asseoir et feindre l’intérêt ! Puis, après réflexion, si elle s’en sortirait sans trop de mal en faisant tout cramer, restait le problème d’une oiselle non-ignifugée et des gamines-servantes qui n’avaient pas fait grand-chose de mal.

Une fois la poussière suffisamment dissipée à son goût, Fjama s’installa correctement. Singeant efficacement la posture des dames de la cour, en fin bord du divan et bien droite afin que le corset lui permette toujours respirer à son aise, elle jetait des regards en coin à l’Hirondelle. Assurée que son amie n’allait pas refrapper un Justin, plus bougon qu’à leur arrivée, elle parcourut la salle des yeux. Traînant sur l’amoncèlement d’étoffes, sur un rideau déchiré sur un vitrail brisé, elle notait scrupuleusement tous les nids à incendie intéressants Les petites domestiques leur présentaient à présent du vin. Fjama, polie, ne refusa pas le breuvage. Cependant, elle attendit sagement que sa majesté n’engloutisse un deux verres de la même carafe d’étain que leur propre breuvage avant de toucher au sein.

Bientôt le majordome revint avec la flûte sur un coussin, un peu à la manière dont un garçon d’honneur ramènerait les alliances à un mariage. Après qu’il se soit excusé platement plusieurs fois, le maître des lieux le somma de faire disparaître toute sa cour hors de sa vue. Après avoir faiblement protesté, prostitués et petites frappes quittèrent les lieux, ne laissant que sa majesté et sa garde rapprochée dans la salle. Celle-ci frotta rudement sa barbe, avant de mirer les deux jeunes femmes sans les fioritures de tout à l’heure.

- Z’allez croire que j’suis devenu dingue. C’pas entièrement faux.

Il aboya un rire.

- Vous vous souv’nez pas pourquoi j’avais quitté l’côterie, hein ? Je vais vous raconter. Y avait c’te fille, une nouvelle qu’on avait ramassé sur les chemins pas loin d’Olyssea, une danseuse elle-aussi. Pas une « vraie », une d’celles qu’on appelle danseuse pour pas dire pute qui danse. Josette qu’elle s’appelait. Un joli brin de fille blonde avec des seins énormes… enfin… j’veux dire… j’étais tombé amoureux d’elle et elle de moi. Quand on s’était arrêté à Diantra, elle avait trouvé un job de serveuse et moi j’m’étais fait engagé ici – il désigna le temple d’un geste las – pour aider les prêtres et les pauvres gens. On s’est marié et on a même eu un môme. On l’a même appelé Julot, comme mon pote qu’s’était fait coupé les mains par la garde d’Ydril.

Fjama hocha lentement la tête. Elle se souvenait de l’affaire. Un conflit d’intérêt avec la Bastola si elle remettait bien. Julot avait piqué un truc sur un de leur mec qui avait lui-même piqué la marchandise à un bourgeois. Petit poisson, Julot avait été brusquement au centre des intérêts du guet alors qu’il se tenait tranquille. En gros, on lui avait fait porté le chapeau et récupérer le bien convoité. Moira n’en avait pas connaissance, la chose s’étant déroulé après son départ. La pyromancienne, par contre, se souvenait parfaitement comment le petit voleur avait agonisé, bouffé par des vers et la fièvre de ses plaies infectées.

- Ecoute, c’est mignon ton histoire-là, mais j’vois pas du tout c’qu’on vient y foutre. Tu pouvais simplement nous demander de venir au lieu de nous envoyer des gros bras. Et c’est quoi tout c’cirque-là ? Les vers ont p’t-être bouffé les mains d’Julot mais toi, ils t’attaquent carrément la tête.

Justin redressa les mains en signe d’apaisement.

- J’y viens, j’y viens.

Il engloutit une nouvelle gorgée de piquette.

- Donc, Josette, l’petiot et moi, on avait une vie rangée. J’dis pas que j’grappillais pas d’temps en temps deux-trois broutilles pour améliorer l’quotidien, mais globalement, on était tranquille et on vivait pas mal. Pis ça a été la débandade. Josette l’est morte en couche alors que l’second allait naître. Une petite fille, j’l’ai appelé Justine. Vous l’avez vu tout à l’heure, c’est elle qui a choisi vos tenues. C’est en partie pour elle tout c’cirque.

Il s’humecta les lèvres brièvement.

- Après, Josette, c’est le petiot qui a disparu. Au sens premier du terme. J’sais pas trop comment, mais j’sais qui est responsable. Et c’est pour ça que z’êtes là. J’ai tenté plusieurs fois de m’approcher de lui, mais j’m’suis toujours fait rétamer.

Il tapota son œil-mort.

- Un p’tit souvenir. Donc, faudrait que vous vous introduisiez chez lui, soit que vous l'tuiez pour moi, soit vous m'faites entrer et j'm'en charge. Pourquoi vous ? Parce qu’il a une faiblesse pour les artistes et ensuite pour les rousses.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeMer 2 Nov 2011 - 18:05

L'elfe avait envie de gifler Fjama, de la même façon qu'elle avait giflé Justin. S'asseoir ? Ironie du sort, en effet, la sang-mêlé d'ordinaire impulsive découvrait son aînée sous un jour totalement nouveau ; elle qui, d'ordinaire, affrontait le monde avec calme et décontraction, peu importe la situation, semblait incapable de gérer les événements. Néanmoins, toute énervée qu'elle pouvait être, l'Éternelle n'était pas devenue stupide et elle comprenait bien que les deux danseuses n'étaient pas en position d'exiger quoique ce soit, ni elle de n'en faire qu'à sa tête. Toutefois, s'il n'y avait pas eu l'ordre de sa Majesté, peut-être n'aurait-elle pas accepté si facilement de se laisser tomber sur les coussins proposés. Elle délaissa cependant le verre tendu, n'offrant comme récompense au serviteur dévoué qui le lui offrait un regard aussi noir que les ténèbres du Puy. Ce dernier battit en retraite sans demander son reste.
Et quand, finalement, on ramena son trésor, l'Hirondelle manqua renverser ses gardiens. Ces ruffian n'avaient aucune idée de l'importance que pouvait représenté l'instrument pour la danseuse. Il s'agissait d'un objet unique, façonnée par sa mère adoptive, une merveille trois fois centenaires qui l'avaient accompagnée sur tous les chemins qu'elle avait empruntés. Elle était son passé et son histoire, mais elle était son présent aussi. Grâce à elle, elle pouvait chanter mieux que quiconque, elle touchait le cœur des hommes et des femmes qui l'écoutaient. Sans elle, elle n'était qu'une marionnette aphone, qui s'agitait face à un monde incapable de l'entendre. Dès qu'elle fut à portée, elle s'en saisit, jetant un dernier regard noir au majordome avant de s'isoler dans son monde.
La fraîcheur du bois, d'apparence intact, lui procura un sentiment d'apaisement comme elle n'en avait que rarement connu ; elle décida pourtant de porter l'instrument à ses lèvres et d'en tirer quelques notes. Esquissant un sourire bien heureux, elle ne résista pas à l'envie de jouer un rythme d'une dizaine de secondes que Fjama et Justin connaissaient bien, pour être l'introduction d'une de ses danses fétiches. Définitivement rassurée, la sylvaine reposa l'instrument sur ses genoux, non sans maintenir ferme sa prise.
Très vite, elle oublia son énervement pour écouter, attentive, le récit du Roi badaud. Avec des mots simples et un parler rustique, Justin décrivait une vie heureuse, et l'Hirondelle se réjouit pour lui. L'amour, qu'il fut éprouvée avec le romantisme des grandes œuvres ou la simplicité du petit peuple, attendrissait toujours la danseuse. Malheureusement, son sourire attendri se teinta d'une tristesse sincère quand leur tortionnaire entama la description de sa déchéance. Ses sourcils se plissèrent pourtant d'incompréhension quand il parla de sa fille et de sa mascarade.

Est-il vraiment juste d'enfermer un esprit faible dans le mensonge ? demandèrent ses doigts.

Se rappelant que si Justin avait un jour connu les rudiments de sa langue, il devait avoir oublié la majeure partie de ses préceptes avec le temps, elle interrogea Fjama du regard et recommença si la sang-mêlé en avait besoin. Elle ne jugeait pas l'ancien gamin de l'Éphémère, cependant, et son regard désormais dépourvu de toute colère se teintait d'empathie.
Mais si l'elfe pouvait faire preuve de beaucoup de compréhension, ses yeux devinrent légèrement froid alors qu'il allait au bon de son idée. Alors, c'était donc ainsi qu'il les voyait ? Comme des outils, des dagues qu'il pouvait à loisir planter dans le cœur de son ennemi. Encore aurait-il fait mine de leur demander leur avis, mais la manière dont il les avait convoqué – il n'y avait pas d'autre mot – et le ton utilisé pour expliquer son plan ne laissait aucun doute ; il savait ce qu'il voulait et ne s’embarrassait pas de savoir si elles le suivraient de plein grès. Pourtant, cette fois-ci, il allait devoir composer sans l'elfe. L'Hirondelle n'avait jamais tué personne, ni participé au moindre versement de sang. Elle était une danseuse, une voyageuse, si elle savait se battre c'était uniquement pour esquiver et fuir. Oh, elle avait déjà fait montre de violence, avait assommé un badaud un peu trop pressant à la faveur d'une inattention. Mais jamais beaucoup plus. Elle évitait les ennuis presque aussi bien qu'elle dansait.
Sans rien répondre, elle porta sa flûte à ses lèvres, et l'air fut bientôt empli de tristesse et de déception. Si sa Majesté voulait une réponse, les accents graves qu'enfantait la danseuse éternelle saurait l'informer de la décision de son aînée.
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MessageSujet: Re: Danseras-tu avec moi ? | Fjama   Danseras-tu avec moi ? | Fjama I_icon_minitimeLun 9 Jan 2012 - 21:31

Fjama ne disait pas grand-chose, observant les réactions de son aînée sans rien laisser transparaitre de ses propres intentions. Plusieurs fois, elle darda un regard en biais dans l’encadrement d’une porte et une petite silhouette. Elle fit la traduction à l’attention du Roi de cette cour fantoche. Presque aussitôt, il commença à expliquer :

- J’l’enferme po dans c’simulacre ! Elle est au courant qu’on a rien. Comme tout l’monde.

Il hésita, plissant un peu son œil unique avant d’enchaîner.

- Au départ, c’était juste un jeu, Un moyen d’faire sourire l’gens après l’peste. A la Guerre Civile, c’théâtre a pris d’l’ampleur. Les blessés, les orphelins en nombre, même avec l’secours de la garde et des nobles prêts à débourser pour l’bonnes œuvres, l’quartier a commencé à sombrer.

Il soupira.

- L’Voile… Peste soit des Dieux…

Justin cracha au sol autant par dégoût que pour conjurer le sort. Il se signa d’ailleurs ensuite.

- Après l’Voile, avec l’soucis de bouffe, c’est devenu pire. Les prêtres qui restaient ici, y s’sont barrés pour les plus grands temples, voire pour Erac là où y a eu la Néera. C’là que la représentation permanente a commencé. J’suis devenu l’Roi parce que j’suis plus doué que les autres pour flairer l’bons filons où gagner l’oseille pour remplir les panses. L’hiérarchie permet à la baraque de tourner.

Il marqua un temps. Il le dédia à dévisager les deux femmes.

- J’vous demande po de comprendre. Pis encore, j’vous demande même po votre avis. Pour l’instant, ça marche. C’te mascarade protège l’groupe et c’est tout ce qui compte.

Le borgne se renfrogna sur son fauteuil et fit tourner, d’un geste maussade, son vin dans son verre. Il écouta alors la mélodie de l’Hirondelle. Alors que la pyromancienne allait l’éclairer, il leva une main autoritaire pour la couper.

- J’ai compris. Pour être honnête, j’attendais pas d’toi, Moira, que tu t’exécutes. Sauf ton respect, t’es pas une arme bien utile. L’demande s’adressait plutôt à Fjama. T’serais d’accord en souvenir d’nos plans foireux d’jadis ?

Au son tour, la sorcière se renferma. Autant que les autres, elle n’appréciait guère qu’on lui force la main en prétextant les liens d’antan. Pourtant, au fond d’elle, sa loyauté allait souvent à ses compagnons de route, surtout ceux de la coterie. L’hésitation dura le temps d’un long soupir contrit.

- Je vais le faire. Mais nos simples liens ne suffiront pas. Je te ferais entrer, mais pas pour l’assassinat. Tu te chargeras de piller les biens de la cible et tu m’en offriras la somme que je déciderais, sur le moment, en fonction de ce que tu récolteras. Nous réglerons les détails demain. Je reviendrais n’aie crainte. Cependant, j’aimerais passer cette soirée avec l’Hirondelle si elle le veut bien.

Elle adressa un sourire à l’oiselle. Elle se redressa, donnant le signal de départ.

- Je serais là vers midi. Ne t’inquiète pas.

Peu importait alors ce que pensait Justin. Prenant la main de l’elfe, Fjama la mena vers l’extérieur et l’air libre. Si les « gardes » souhaitaient les arrêter, ils n’en firent rien sur un signe de la main de leur souverain. Le borgne ne doutait point que l’almée tiendrait sa promesse d’autant qu’elle impliquait la possibilité de se mettre en poche quelques deniers. Seule avec l’Hirondelle, Fjama s’excusa simplement.

- Je sais que tu n’aimes pas ça. Et pourtant, tu sais aussi bien que moi que je le ferais. Aussi, n’en parlons plus et oublies ça. Passons simplement cette soirée ensemble. Tu m’as manqué et je n’ai pas envie de te laisser t’envoler à nouveau sans profiter pleinement de ta présence.

Sur ces mots, elle étira un sourire espiègle et captura sa « proie » pour la couvrir de baisers enfantins. Elle la relâcha ensuite. Elle trottina un peu plus loin, à nouveau vers le centre-ville. D’un air mutin, Fjama se retourna alors à demi et étira la main vers son ainée en guise d’invite.

- Viens, viens danser avec moi, mon Hirondelle.
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