[Palais] L'Rei d'Valuk ! | Meurtre de Brylyan

C’était un de ces fameux jours qui faisait l’Histoire…

Depuis son retour, il avait constaté la torpeur dans laquelle se reposait le souverain sombre, et si celle-ci fut un temps pardonnable du fait de l’immense victoire arrachée au Fort Ellyrion, aujourd’hui, elle ne l’était plus. Aujourd’hui, Brylyan Naerth était devenu le souverain qui gênait les desseins du Gardien.
En ce jour, il n’y avait aucun plan minutieux, pas même une quelconque subtilité dans sa manière de procéder, le moindre complot organisé avec d’autres importantes figures. Sa décision prendrait tout le monde par surprise, à l’exception de ses propres hommes qui l’accompagneraient, c’était ainsi qu’il désirait faire les choses.
C’est ainsi qu’il quitta sa demeure, accompagné par la trentaine d’hommes qui constituaient sa garde personnelle, qui à ses yeux n’avaient alors véritablement d’utilité que pour la mise en scène de cet évènement, et se rendit un niveau plus bas, dans la Chambre Magmatique. Si cette petite troupe en mouvement attira l’attention des personnes présentes, cela n’enraya aucunement sa marche vers le Palais Royal où siégeait pour quelques instants encore le souverain.

A proximité, l’attroupement alerta les gardes extérieures, mais alors qu’ils s’apprêtaient à avertir de ce qui se passait, ils furent dévorés par les flammes et leurs vies s’échappèrent aussi rapidement qu’apparurent ces feux qui se dissipèrent ensuite. Aux quelques uns qui venaient d’assister à la scène, le ton était donné, l’intention dévoilée.
Les premières portes franchies, il y en eu d’autres, et tandis qu’ils progressaient à travers couloirs et pièces, l’épée en main, guidés tant par la connaissance des lieux du Gardien que grâce aux yeux de ses soldats, ils abattirent nombre de soldats de garde en ce jour, dont aucun n’avait vraiment le temps de prendre conscience de celui qui approchait du trône.
Et finalement, ils y parvinrent, la dernière grande porte qui barrait son chemin… Il sentait au-delà de nombreuses lueurs rassemblés, ce qui n’était pas un obstacle en soit. Dans sa progression, il ne s’était jusqu'à lors pas annoncé, mais une fois fait, quel soldat assez stupide et fou s’opposerait au Gardien d’Uriz ?

Deux de ses hommes poussèrent les deux grandes portes pour les ouvrir, et sans crainte, il s’avança le premier, suivit ensuite de ses hommes divisés en deux colonnes. Il faisait face au Trône, et tandis que ses hommes formaient ensuite une ligne, il s’adressa d’abord aux gardes qui se tenaient encore face à lui.

« Que ceux qui souhaitent s’opposer à la Volonté d’Uriz s’avancent et meurent, que les autres s’écartent de mon chemin. »

Et si il y en eu plusieurs à vouloir faire valoir leur fidélité au souverain, ils s’abstinrent tandis que le premier d’entre eux à avoir amorcé un pas fut instantanément dévoré par les flammes.

« Ceux qui iront contre son Œuvre brûleront dans le Feu Originel... Êtes-vous sûr que ce souverain mérite un vain sacrifice ? »

Et ses yeux morts se posèrent sur chacun de ceux qui avaient un instant seulement eu l’intention de s’opposer à lui avant que tous ne s’écartent pour désormais laisser se faire le face à face entre le Gardien et le Souverain.

« Tant qu’il ne gênera pas Ses desseins autant que les miens, cet homme règnera sur les nôtres et aura mon soutien. Telles furent mes pensées, telles furent les Siennes. »

« Les Drows ne t’oublieront pas, Brylyan Naerth, l’improbable fils d’un artisan qui trôna sur le Puy d’Elda, là où des noms de légendes ont également siégé… Ils n’oublieront pas ces évènements et tu demeureras dans cette Histoire que tu as participé à écrire, laissant une trace. »

« Aujourd’hui, moi, Tebirahc Zaurahel, Gardien et Elu du Divin Père des Batailles, je viens te reprendre ce trône que l’on t’a confié et dont tu n’es plus digne. »

Il tira l’épée du fer et pointa la lame vers l’ancien roi.

« Viens, Roi Déchu, bats-toi pour la vie ou pour une mort honorable ! »

Et les deux s’affrontèrent… Le combat dura, Tebirahc se refusant à user de ses pouvoirs et ses qualités de fine lame amoindries par sa cécité, même si ses perceptions nouvelles ne le rendaient pas totalement aveugle, Brylyan qui n’était pas un moindre adversaire, élève de la plus fine lame du dernier Cycle.
Sous les yeux des nombreux gardes, pourtant, vint un moment où Brylyan céda de plus en plus de terrain, commit de plus en plus d’erreurs face à la régularité de son adversaire, ouvrant des portes dans lesquelles le Gardien se jetait. Et finalement, après un combat au cours duquel le Karliik Glenn prouva sa valeur, il du mettre genoux à terre face au Gardien.

« Tu t’es bien battu, Brylyan Naerth, et au contraire de ton maître d’arme, tu seras demeuré digne de ton rang jusqu’à la fin… Ces gardes sont les témoins de ton honorable fin, et ton nom demeurera à l’instar des autres… »

Il posa la lame sur la nuque de l’ancien roi.

« Puisse Teiweon t’accueillir en son royaume. »

Et d’un mouvement net et puissant, il lui trancha la tête.
Le corps s’écroula, la tête roula alors que le Gardien approcha du trône sous les yeux des gardes, sans offrir plus d’attention à son adversaire. Il s’adressa alors à ses gardes autant qu’à ceux du Palais.

« Apportez sa dépouille au Temple de la Mère des Âmes, que les cérémonies rituelles aient lieu et qu’on rende hommage à son corps autant qu’à sa mémoire, il en es digne.
Allez, annoncez à chacun et chacune dans le Puy d’Elda qu’aujourd’hui, par la Volonté d’Uriz, le Karliik Glenn et déchu et mort… Annoncez à chacun que le trône laissé vacant reviendra à qui s’estimera capable de s’y asseoir et d’y demeurer. »

Tandis que les gardes après un instant se dispersèrent, Tebirahc appela le chef de sa garde.

« Rends toi auprès du Premier Ost, vas, et dis lui de ne pas chercher à s’emparer du trône, ni de soutenir le moindre candidat… Je vais partir, quand je reviendrais, et si la situation le permet, je l’informerais de celui ou celle qu’il devra soutenir et défendre… En attendant, qu’il se tienne tranquille et en retrait. »

Le Premier Ost devait demeurer le protecteur du Trône qu’il avait toujours été, mais pour l’heure, il fallait laisser la sélection se faire afin qu’un souverain digne et suffisamment fort émerge… Il savait les puissants assez malins pour ne pas croire s’y asseoir sans nouer quelques alliances et mettre à mal quelques adversaires.

La Conquête du Trône était lancée.

Le Gardien d'Uriz a quoi ?

Assise derrière son bureau de l'Erkd'fe Renor, la Prime Sorcière eu du mal à assimiler la nouvelle qui venait de lui être annoncée. Devant elle, le garde agenouillé qui venait de l'avertir en venant en courant de la chambre magmatique crut bon de vouloir répéter le message mais un geste de la Sombre sorcière lui indiqua que ce n'était pas la peine.
En oubliant totalement les rapports qui trainaient sous sa plume, Y'Shahinn se renversa un peu dans son fauteuil, réfléchissant à la nouvelle totalement inattendue qui venait de tomber.
Le Gardien d'Uriz avait déchu et tué Brylyan Naerth, l'actuel Roi des Sombres. Jamais elle n'aurait pu penser cela à peine quelques mois après la chute d'Ellyrion, bataille qui avait justement vu l'émergence de l'actuel Gardien. La volonté du Père était incompréhensible mais il n'y avait pas matière à chercher à l'expliquer, surtout depuis le Voile les Dieux étaient imprévisibles.

Du premier abord, l'annonce de la chute de Brylyan était une bonne nouvelle pour la Prime Sorcière car cela lui ouvrait la perspective d'une course vers un trône désormais vacant, trône jusque là tenu par un Choisi d'Uriz donc intouchable par les moyens actuels, sa chute changeait la donne. Seulement c'était également une mauvaise nouvelle car Y'Shahinn avait acquis son poste de Prime Sorcière surtout grâce à sa prise de pouvoir de la branche de la magie, évinçant les anciens fidèles d'Aetherya mais aussi grâce au détournement de regard de Brylyan sur ses agissements dans la chute de l'ancienne Reine. La situation politique au sein du Puy venait une fois de plus de devenir instable.

Convoquez moi le chef de ma Garde Noire ainsi que mes lieutenants au sein de l'école. Prévenez aussi nos principaux mécènes.

Quelques instants plus tard, le bureau de la Prime Sorcière avait été envahi par diverses personnalités du Puy mais surtout de l'école de magie. Les discussions allaient bon train après qu'ils furent mis au courant de la situation. Certains étaient partagés entre excitation et méfiance.

L'occasion est trop belle pour nous emparer du trône. La Magie peut à nouveau régner sur le peuple Sombre ! disait l'un.

Ne soyons pas aussi prompts à nous lancer à l'assaut, l'occasion est unique je l'admets mais le Gardien d'Uriz tuera ceux qui ne se montreront pas dignes. Disait l'autre.

Aetherya a gagné le trône suite à la disparition de Tebryn car elle avait été choisie comme épouse, cette fois chaque prétendant part de zéro.

La Prime Sorcière restait silencieuse pour le moment, observant pensive les débats passionnés qui agitaient son entourage. Oui ils voulaient une nouvelle Prime Sorcière en tant que Reine et elle-même le souhaitait mais la conquête du trône allait être difficile.

La Magie saisira sa chance. La soudaine parole de la sorcière fit taire les paroles des autres Drows qui se tournèrent vers leur supérieure. Celle-ci s'était levée de son siège et regardait chacun avec un regard des plus assurés.

La chute de Brylyan vient de briser la toute-puissance du pouvoir qu'il partageait avec sa soeur, la Haute-Prêtresse Alyryne. Nous n'y arriverons pas seuls et devrons tisser nos alliances sans tarder mais la situation nous est favorable. Il n'existe plus que deux pouvoirs qui possèdent une organisation puissante et hiérarchisés dans le Puy d'Elda : la Magie et la Religion. Nous possédons nos chances car la Haute-Prêtresse ne peut s'opposer à la volonté du Père des Batailles et refuser la mort de son frère qui contrôlait l'armée. Même si elle est la servante d'Uriz, la chute de Brylyan qui était vu comme un Choisi du Dieu la fragilisera dans sa légitimité.

Il risque d'y avoir de nombreux prétendants ma Dame. Surtout parmi les anciens fidèles de Brylyan. Crut bon d'ajouter l'un des sorciers.

C'est pourquoi nous sommes à notre avantage. L'armée est fragilisée par la perte de son commandant, les Obok Sengers n'existent plus en nombre suffisant pour maintenir une cohésion sur la Grande Armée des Drows. Avant qu'elle ne se lance à la succession du trône elle devra se livrer à une guerre des chefs en interne pour élire un nouveau Kaarlik Glenn. L'essentiel de la lutte des pouvoirs se jouera sur celui ou celle qui parviendra à attirer l'armée de son coté.

Pour l'heure, restons silencieux et observons autour de nous. Nous devons identifier les possibles prétendants et agir en sous-main pour asseoir nos intérêts.
D'ici là je place la Garde Noire en alerte pour protéger à la fois l'école mais aussi ses dirigeants. Nous sommes aussi des prétendants mais aussi des cibles.

Que devons nous faire pour la Haute-Prêtresse d'Uriz et la religion en général ? demanda l'un des sorciers.

J'aurais prochainement une certaine discussion avec Alyrine Naerth. Pour l'heure je dois me rendre aux funérailles de Brylyan afin de lui rendre hommage au Temple de Teiweon, cela permettra aussi de prendre la température au niveau de la Religion.
Allez tous et soyez vigilants, notre gloire comme notre échec seront déterminés par nos efforts.

Les sorciers et gardes se levèrent en obtempérant avant de saluer la Prime Sorcière et de quitter la pièce. Désormais, Y'Shahinn n'accepterait auprès d'elle que ses plus fidèles sujets, ceux dont elle savait la loyauté parfaite. Désormais seule dans son bureau, elle se prit à sourire en observant le symbole de la branche de la Magie d'Elda qui décorait son bureau. Qui sait le temps était peut être venu pour une nouvelle Reine de régner.

Le lion est mort ce soir. Enfin tout du moins le roi est mort. Mais le lion étant nommément le roi de la savane, la phrase n’est pas erronée. Bien que les drows ne s’y connaissent probablement guère en matière de savanes, parler du Karliik Glenn comme du lion du Puy d’Elda reste acceptable. Oh et puis vous avez compris ce que je veux dire, c’est assez évident non ? Alors cessez de m’interrompre toutes les cinq minutes sinon nous n’y arriverons jamais.

Haldren Baenfere, Ditronw Da’re du C’nros, en était resté de longues minutes incrédule lorsque la nouvelle de la mort de Brylyan avait atteint ses oreilles. Il venait à peine de se réveiller et de sortir des doux bras d’Halystra lorsqu’un messager essoufflé lui avait apporté la nouvelle. Et quelle nouvelle mes amis ! Il s’agissait d’un choc qui ne le cédait que de peu à la venue du Père des Batailles durant le Voile, et dont les répercussions restaient encore malaisées à estimer.

Sitôt habillé, il avait ordonné aux Phord’ur, aux Jabbuk d’Iloun et aux An'kin d'Thalack de le rejoindre de toute urgence dans la salle servant aux conseils restreints afin d’y décider de la marche à suivre. Les informations affluaient peu à peu et le tableau se dévoilait quand aux événements qui venaient de marquer cette journée d’une empreinte sanglante.

Le meurtrier du roi n’était autre que Tebirahc Zauharel lui-même, l’Élu d’Uriz, le Gardien. Les intentions précises de l’ancien Obok Senger du premier ost restaient floues. Après avoir décapité proprement le maître du Puy, le Fils de la Guerre n’avait pas revendiqué le trône pour lui-même, laissant au plus puissant des drows le soin de s’y asseoir. Cela ne pouvait vouloir dire qu’une chose : la guerre. Oh, pas de grandes batailles rangées sur de mornes plaines, non bien sur. Mais une guerre de l’ombre, plus sournoise et plus discrète, allait se mener entre les seigneurs du Puy.

Les avis des sorciers quand à l’attitude à adopter restaient divisés. Certains prônaient une action agressive et rapide afin de mener un coup d’état et de rendre à la magie sa véritable place en haut de la hiérarchie. L’heure est venue, affirmaient-ils, que nous écrasions enfin ces fourmis de manieurs d’épées, incapables de voir la sublime beauté des flux sous-jacents à notre magie. Nous sommes les maîtres des arcanes, les plus puissants des drows, alors reprenons la place qui nous revient de droit !

D’autres, plus réalistes, plaidaient pour une tentative de conciliation. Le C’nros ne pouvait à lui seul imposer sa loi sur le Puy, et ce pas plus d’ailleurs qu’aucun autre partie. Le temps des alliances était venu, le soutien de chacun allait se monnayer ferme et les mages de guerre pouvaient apporter un appui précieux à qui saurait les convaincre. Nous ne sommes pas des politiques, affirmaient-ils, notre grandeur est le Grand Art, pas le simple pouvoir temporel.

Levant sa main fuselée pour mettre fin au discussions, le Ditronw Da’re prit la parole :

Je vais me rendre aux funérailles du seigneur Brylyan. Tout ceux qui vont se mêler de la querelle de succession y seront et cela permettra d’évaluer les forces en présence. Pendant ce temps, prévenez le Faern d’Hosse du cinquième ost que je désire le voir de toute urgence. En attendant, que tous nos frères présents au Puy reviennent ici, n’y laisser entrer personne d’autre et ne répondez à aucune sollicitation d'où qu'elle vienne.

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