L'ardent soleil méridional illuminait le ciel d'une douce couleur ocre, rayonnement de l'âme aux dires des histoires populaires, qui, ne devrait s'éteindre qu'une fois le sang du premier être astral disparu. Les pensées de la duchesse s'aventuraient pendant quelques moments dans les infinités hypnotiques des vastes étendues aquatiques, allégorie éternel des terres de Tyra, vision apocryphe du royaume des morts, la jeune demoiselle songeait à son propre destin. Elle croyait apercevoir, loin perdu dans l'horizon, des formes se mouvoir, comme des âmes damnées qui jaillissaient hors de l'eau cherchant à rejoindre désespérément la terre des vivants. Dans une lutte interminable, ils essayaient encore et toujours de rallier le chemin de leur demeure. Les soldats tombés à la guerre contemplaient leurs corps meurtris encore inconscient de leur états. Des enfants morts avant d'avoir appris à s'exprimer, balbutiaient des sons tentant vainement de se faire comprendre. Des femmes mortes en couche espéraient pouvoir faire leurs adieux,... L'océan baignait dans une tristesse mélancolique, cette infinité qui semblait toujours avide de se gorger d'âme supplémentaire, comme un glouton à l'appétit vorace, jamais rassasié. La cruauté de l'océan frappait la duchesse, pourtant elle admirait son impartialité. Là bas, perdu dans ces vastes champs maritimes, nul titre, nul richesse, nul savoir ne manifestait la moindre importance. Il ne régnait que la paix, une tranquillité absolue, le repos...
La douce demoiselle laissa sortir un délicat soupire, loin de ses occupations ducales, loin de l'emprise que le pouvoir exerçait sur sa personne, elle retrouvait ici, son enfance abandonnée, sa juvénilité perdue, elle se retrouvait elle. La brise côtière lui effleurait le visage et y déposait une douce fraicheur chassant pour quelques instant la chaleur que le soleil avait fait naître sur sa peau. Les yeux clos, elle laissa son imagination vagabondait : son enfance, les rires, l'innocence, la joie. En ouvrant à nouveau ses paupières elle contemplait l'immensité céleste. Dans les cieux, elle s'imaginait s'envoler comme propulsée par les vents septentrionaux qui l'entraînerait loin, toujours plus loin vers les corps stellaires. Sa rêverie prit fin lorsqu'un cavalier s'approcha. Elle reconnu Valérian qui s'avançait, monté sur son destrier, la chevelure libre et flottante aux grées des battement que le vent laisser agiter, il semblait être l'un de ses épiques cavaliers que les contes évoquaient. Margot referma les yeux, elle s'imaginait libre, elle s'imaginait emmené par son défenseur. Ensemble, ils pourraient disparaître, s'évader et ne jamais revenir. Là, loin de toute chose, disparaître était si facile et si tentant.
« Illustre Astre... »
« Appelle moi Margot, Valérian.... depuis le temps qu'on se connait et.... je ne supporte pas ces titres lorsqu'on est loin de la cour et de ses mondanités. »
« Dame Margot... Nos hommes l'ont bien trouvé. »
Le regard nébuleux de la Dame aux Mille-Éclats se libéra des voiles oniriques pour se rappeler la raison de son voyage. Outre les différentes visites qu'elle réalisait une par une dans chaque fief de sa noblesse, un tout autre but l'amenait ici, quelque part le long des côtes entre le pays d'Ysari et les terres Boniverdienne. Les contes et mythes allaient bon train dans cette terre. Parmi les plus populaires, après celui de l'Ogre Ydrilote, venait celui du Grand Jeteur de Flammes. Un dragon disait certains, un dragon à l'esprit fou et voué aux créatures démoniaques. Une créature adepte du feu, et nombreux était à dire, le Feu lui même ! Beaucoup portaient encore les traces de brûlure, affichées comme une bénédiction divine, comme l'onguent du grand Dieu de la Guerre !
Margot n'avait pu oublier après tout ces années, l'émoi qui fut le sien lorsqu'on lui raconta cette histoire. Le Feu, lui même, peut être était-ce cette créature aillées qu'elle avait cru voir dan sa jeunesse. Cette incarnation chimérique du soleil, cette représentation majestueuse des astres et de la grandeur. Peut-être était-il là, peut être avait il prit feu dans l'enfer d'Arcani,... Les pensées du Blanc-Soleil virevoltaient, son esprit s'en retournait dans les songes et l'onirisme. Elle espérait tant trouvait un sens à cette apparition. Rêve de jeune fille égarée, elle espérait rencontrer le Dieu-Soleil, ce personnage mythique que les contes populaires louait à l'ombre du culte des Cinq. Sortant de ses songeries désordonnées, le Blanc-Soleil suivit Valérian rejoindre son escorte. La présence du chevalier la réconfortait, mais ses pensées l'avait abandonné un moment pour rejoindre celle de cet étrange dompteur des flammes.
Ayant rejoint la villa de Plazia, vaste demeure des Soltariis, Marguerite se glissa dans une tunique pourpre, souhaitant impressionner ce qui pourrait être le Dieu-Soleil dans son esprit égaré aux rêveries. Elle revêtit ses plus beaux ornements et fit sa plus belle toilette. Icône du pouvoir et de la richesse de Soltariel, le Blanc-Soleil attentait dans la salle d'audience, aux tournures d'une basilique, assit au fond dans un trône d'argent – revêtu de fine damasquinerie –. Entouré de plusieurs chevaliers de l'Épée d'Or, leurs aspects stoïques et leurs armures dorées venaient ajouter au grandiose de la scène. Quelques mages l'encadraient, tandis que Valérian se tenait à ses côtés. La salle était décorée de plusieurs gravures et sculptures. Entre les colonnes formant l'entré de la pièce, deux personnes attendaient un signe de la duchesse pour la rejoindre. D'une gestuelle de la main, la duchesse laissa tombé son signal. L'un des hommes avait l'allure d'un rustre, mais l'autre était différent. Sa peau calcinée, son regard fou, sa démarche,... tout chez lui laissaient indiquer un grand pouvoir, une grande folie, le Grand Jeteur de flammes était là.