[Petit Temple de Calimenthar] Parce qu'on veut n'être que soi

Spoiler:

      L’Automne avait maintenant pénétré à grands pas jusqu’au cœur d’Anaëh, et ses vents froids recouvraient la Forêt : partout, les bois commençaient à roussir et se clairsemer.
      Dans l’enceinte du Petit Temple de Calimenthar, Aranos était agenouillé devant le dieu Soldat : les rameaux brûlaient à pleines brassées de part et d’autre de la Statue, et les vapeurs âcres des ronces consumées venaient vivifier les pensées du Prêtre. Il ne faisait plus de doute à présent que les batailles allaient déferler sur l’Anaëh : déjà, dans le sanctuaire de Calimenthar semblait résonner l’écho des tambours de guerre tonnant dans le Sud. Attendant le jour où il serait rappelé vers Ellyrion et les combats, le Capitaine contemplait les rides au front du dieu Soldat, et voulait y déchiffrer la carte des affrontements à venir.

      « Que les Elfes se souviennent à temps du Bouclier auquel ils doivent leurs longues années de quiétude, murmura le Capitaine. »

      Un bruit léger de pas fit sursauter le Prêtre, qui s’arracha à sa méditation pour se retourner : dans l’encadrement des doubles portes se découpait une silhouette à contrejour. L’espace d’un instant, Aranos crut revoir Taurë qui ici même avait surgi quelques ennéades plus tôt : ce Temple avait été le théâtre d’étranges retrouvailles. Mais celle-là n’était pas la jumelle du Capitaine, il lui manquait les formes plantureuses et presque humaines du Vaisseau de la Mère : c’était une silhouette fine et souple, clairement dessinée comme seules les Elfes pouvaient l’être. Lorsqu’Aranos eut fait quelques pas vers elle, les reflets de lumière cessèrent de l’aveugler et il put découvrir un visage attirant, un nez charmant surmonté de deux yeux brillants.

      « Êl síla erin lû e-govaned vîn, heri (*), salua le Capitaine en accord avec les usages. »

      Aranos laissa son regard s’attarder sur cette mystérieuse présence. Celle-là n’était ni une voyageuse égarée, ni une Elfe effrayée venue tardivement se concilier le dieu Soldat alors que la guerre menaçait. Son corps puissant mais souple, et son front clair, révélaient la force d’une guerrière. Aranos fit quelques pas de plus, et parvenu devant l’étrangère, il s’inclina brièvement :

      « Un ohtar (**) est toujours bienvenu dans le Temple, déclara le Capitaine. Parle, quelle raison t’amène ici ? Aranos t’écoute. »

Note :

Spoiler:

      « Amatulya, ohtar. »

      Les yeux d’Aranos s’étaient écarquillés doucement lorsqu’il accueillit la question, aussi le Capitaine n’avait-il d’abord répondu que par les convenances de bienvenue. Aranos était guerrier, Prêtre de la guerre, et officier dans l’armée royale : une lance hargneuse s’était depuis longtemps muée en un prolongement naturel de sa poigne ; un plastron d’acier cuivré lui seyait mieux qu’une quelconque tunique de lin.
      Mais que l’on questionne sa loyauté, et le Capitaine hésitait un instant dans le silence. Six siècles de son existence consumés pour la défense d’un Ellyrion finalement anéanti ? Il était certain que d’autres auraient douté pour moins que cela.

      Avant même que son esprit n’ait organisé une réponse claire, les mâchoires du Capitaine déjà s’activaient et, automatiquement, il répondit à la guerrière, d’une voix lointaine :

      « Je sers l’armée du Sud comme ma mère avant moi ; seule Tyra nous retirera hors des griffes du combat. »

      Ce n’était pas là un mensonge, mais une vérité bien étouffée. Aranos avait certainement rejoint les rangs des légions d’Alëandir, et tracé sa voie jusqu’aux échelons d’importance en raison de ce que pour moitié, la lignée d’Hëlmeliòn avait toujours répondu fidèlement à cet appel. Mais le Capitaine savait que ce n’était pas tant cette moitié-là de son sang, celle de sa mère étincelante dans l’uniforme des Aigles, qui l’avait conduit à prendre les armes pour le Trône Blanc : c’était bien plutôt l’autre, celle qui préférait les racines et le silence, celle de son père — et de sa jumelle.

      Aranos et cette Eliwa figuraient alors deux guerriers, se saluant sur le seuil tu sanctuaire du Soldat ; cette rencontre était digne, alors le Capitaine retira sa réponse précédente, et il dit :

      « Je protège la lisière d’Anaëh car la vie de certains au cœur de l’Œuvre m’est chère. Nos frères parfois préfèrent le refuge des branches assoupies, des clairières apaisées, et ils rejettent l’acier et l’airain. Pour que ceux-là puissent vivre, ohtar, il faut que d’autres combattent sur la muraille des citadelles. »

      Aranos savait pour qui il avait tenu sa longue veuille au sommet d’Ellyrion : elle s’appelait Taurë, elle était de son sang. Mais c’était là un secret que lui-même n’aurait pas traîné dans la lumière éclatante du jour, car sept siècles de rancœur couvaient entre le frère et la sœur ; en surface, du moins. Ces pensées étaient amères, elles durcissaient encore les traits déjà aiguisés du Capitaine.

      Aussi, il interrogea d’une voix forte, et très rude :

      « Les guerrières indépendantes, sans loyauté pour aucun étendard, peuvent-elles comprendre cela ? »

Note:

Eliwa voyait sur son visage qu'elle avait remué des souvenirs désagréables, des souvenirs trop douloureux peut-être pour que son visage reste impassible. Sans réellement savoir elle avait fouillé dans un passé chargé. L'elfe ne fut donc pas étonnée lorsque le capitaine posa sa question de cette voix si froide et si dure qu'elle donnerait presque envie d'effacer ce qu'elle venait de dire.

- Justement non. Je n'arrive pas à concevoir cela. Un sacrifice d'une vie pour dix autres. Cela me paraît si illogique.

Elle marqua une pause, cherchant ses mots pour formuler ses idées sans pouvoir laisser de doute sur leur signification ensuite.

- C'est pour cette raison que je suis ici en ce moment. Je ressens le besoin de savoir ce qui est vrai, ce qui ne l'est pas et le pourquoi. Inconsciemment, j'espère que vous pourrez éclairer l'obscurité dans laquelle je suis en ce moment même immergée. Je ne saisi que très mal le sens de la loyauté et de... du patriotisme ? Est-ce du patriotisme ?

Debout l'un en face de l'autre, elle avait plongé son regard dans le sien, ouvrant son esprit à une nouvelle vague de connaissance, à de nouveaux mots qui pourraient lui ouvrir un quelconque chemin, lui faire oublier tout ce qu'elle avait put penser, ou lui faire voir au contraire, ce à quoi elle n'avait jamais pris le temps de réfléchir.

Le temple s'élevait derrière l'homme de guerre, et lors, elle ne se sentit plus guerrière pour le moins. Ce corps qu'elle avait minutieusement sculpté, ces bras qui savaient manier l'arc et l'épée, sans réellement exceller dans le premier, et cette idée d'être forte, d'être bien au milieux d'un affrontement n'était pour elle, plus que futilité. Elle avait soif d'entendre les fondements du combat pour un autre, pour plusieurs autres même. Dans son esprit, cette façon de mener un combat, cette envie, ce désir de défendre une si large étendue et ce dévouement qu'elle lisait dans les yeux de certain soldat, devenaient si intrigants qu'elle en était désormais désireuse.

L'elfe était loin d'être envieuse des soldats, mais elle voulait posséder leur vision de la vie pour pouvoir mieux la comprendre, pour pouvoir l'appréhender, et peut-être même la comprendre. Cette dernière étape prendrait du temps, à n'en pas douter, et elle ne savait guère si elle en avait déjà envie, mais elle pensait qu'un jour, ce serait le cas, qu'un jour elle le voudrait tellement qu'elle le ressentirait dans son ventre, dans son cœur et dans sa joie.

Eliwa savait que ce qu'elle demandait au capitaine était loin d'être facile, et qu'elle allait peut-être trop loin. Mais la peur de l'échec faisait ensuite regretter beaucoup trop de chose, et elle ne voulait pas se l'infliger. Si elle avait cependant conscience de cela, elle avait beaucoup moins en tête la candeur dont elle faisait preuve face à un elfe sûrement sept fois plus vieux qu'elle.

      Les yeux d’Aranos balayaient en silence le corps encore jeune et souple de la guerrière, qui était venue trouver la parole de Calimenthar. Elle devait être à peine plus qu’une enfant, peut-être n’avait-elle-même pas complété son premier siècle, ou si peu. Le Prêtre et Capitaine ne la jugeait pas : même les enfants pouvait rejoindre les cohortes du Soldat.

      Mais c’était en tout cas un esprit confus, et comme embrumé, traversé de mille questions compliquées, qui se bousculaient dans sa bouche. C’était le premier enseignement de la guerre : le combat obnubile l’esprit, il fait se tarir les questions superflues.

      « La loyauté est rare sous les frondaisons de la Prime Forêt, gronda Aranos. Elle n’est pas une plante, un arbre ou une ronce, qui croissent avec l’âge. Le guerrier loyal est un roc, jeté par le Soldat sur la lisière d’Anaëh, pour ancrer la Forêt sur ses limites ancestrales. Si cette pierre cède, elle se rompt avec fracas. »

      Pour qui avait combattu, un temps au moins, dans les légions royales, la loyauté rompue avait un nom et visage, honnis tous deux. Mais cette Eliwa devait être trop neuve pour avoir connu le traître aux Eclaireurs, celui qui avait tourné le dos au Trône blanc.

      « Calimenthar révèle les entrailles secrètes de ceux qui combattent pour lui : les lâches aussi. Aldaron Anaëh Dil compte parmi les atalantëa, nos frères qui n’ont pas supporté la discipline du Soldat : hier Capitaine parmi les plus robustes dans les armées royales, aujourd’hui une bête en fuite, un assassin traqué par nous tous. »

      Six siècles de guerre, de combat et de mort, entachaient le regard autrefois clair du Capitaine. Son front portait les rides du souci, ses lèvres étaient gercées et flétries par le service de Calimenthar. Lentement, il fit s’étirer un mince sourire en travers de ses joues parcheminées.

      « Ce Temple-ci a effarouché nombre de nos frères et sœurs, ohtar, concéda Aranos. Mais si tu tournes les talons aujourd’hui, tu retourneras à la forêt passagère, peuplée de bêtes éphémères et qui en un souffle sont passées. Tu verras fleurir et faner mille fois le même bosquet, et trimer mille générations d’insectes. »

      Le Capitaine étendit sa main rude et puissante vers la guerrière, jusqu’à lui toucher l’épaule.

      « Bientôt, nous partons vers le Sud, et le combat. Tolo ar nin, et tu sauras comment la guerre illumine une vie d’immortel. Les Fils de Calimenthar choisissent une existence brève, violente, cruelle, et ils disparaissent au faîte de leur puissance. »

Note:

La fraîcheur de l'air la fit frissonner, légèrement. Elle en apprécia d'autant plus le contact de la main du Capitaine. « Viens avec moi... » Qu'irait-elle faire au sud, dans une armée ? Est-ce que ce ne serait pas comme une occasion d'éprouver ces émotions, ces principes qu'elle avait tant de mal à cerner ? Si, certainement. Le tout était de savoir si c'était ce qu'elle voulait. Et le plus dur était de ne pas se tromper.

- Vous me proposez de vous suivre ? Que ferai-je sur un champs de bataille ? Au milieu d'une armée ? Je veux bien voir, je veux bien apprendre mais... est-ce de cette façon que je dois le faire ? Certes, je ne sais pas ce que je veux, ce que j'ai envie de faire. Mais là... je ne sais pas. Ce n'est plus de la simple réflexion. C'est n'est plus un jeu. Là, tout devient vrai, irraisonnable.

Elle passa derrière lui et pénétra dans le temple. La fraîcheur qui y régnait était tout autre que celle qui caressait sa peau dehors. Elle était comme apaisante, et le calme, l'absence de sifflement ou de chuchotements, accentuait encore cette douce impression. La paix, la sérénité, que respirait cet endroit était tant en décalage avec le dieu pour qui l'édifice avait été érigé qu'une expression plus grave vint voiler son regard. Celui là même qui était encore émerveillé, impressionné par la grandeur qu'elle avait sous les yeux. Sa position avait elle aussi changé. Dehors, elle était ouverte, réceptive aux paroles du Prêtre. Curieuse de savoir. Curieuse d'entendre.

- Je suis certes trop jeune pour avoir connu de grandes batailles. Et même si la vie des enfants de Calimenthar est brève et fulgurante, je crois aussi être beaucoup trop jeune pour connaître quelque chose d'aussi grand aujourd'hui. J'assisterai sans nul doute à l'affrontement. D'une façon ou d'une autre. Et peut-être vous apercevrai-je au front.

Les bras croisés sous sa poitrine, fermée comme elle ne l'avait pas été depuis longtemps, elle fit une pause. Pour peser ses mots. Pour savoir s'ils étaient justes. En accord avec ce qu'elle voulait faire passer. Plantée devant l'elfe, elle réfléchissait. Puis, lorsqu'elle sut, elle parla de nouveau.

- Mais ce combat, je ne le mènerai pas sous les ordres des lieutenants, des capitaines ou des seigneurs protecteurs. Je le mènerai sous les miens. Chaque enfants de Kÿria sera utile dans cet affrontement qui se prépare. Je le serai, n'ayez crainte. Car si je peine à concevoir l'utilité de se battre pour un frère, je peine beaucoup moins à saisir l'importance de protéger la Prime Forêt.

Ce mouvement, cet agitation au sud lui faisait peur. Parce qu'elle n'avait jamais connu une chose d'une telle ampleur. Et elle ne se sentait pas prête à la connaître. Dans ses yeux, on pouvait lire ce sentiment. Tout comme on pouvait lire la détermination. Certes, elle n'irait pas s'engager demain. Certes, elle ne voulait pas donner sa vie pour son peuple. Mais elle était prête à la donner pour ne pas souffrir plus que de raison.

      « Lertahehtanë ohtar, ai ? lança Aranos d’une voix sifflante. »

      Le regard du Prêtre s’était durci, il dardait à présent un œil assombri sur la jeune Guerrière. Combattre loin de tout étendard, avec d’allégeance qu’à sa seule épée, cela n’était pas la voie du Capitaine : peut-être les Nains fanatiques de Mogar, loin sous la montagne ou boxant contre les Bearogs, se vouaient à la guerre pour la seule gloire et la mort, sans blason sur leurs boucliers fracassés. Mais Calimenthar était le dieu Soldat, et son chemin n’était que discipline.

      « Comment sauras-tu de quel côté abattre ta lame, guerrière ? questionna Aranos. Nos armées mènent des assauts sagaces, nos soldats se coulent dans les entrailles de la Prime Forêt. Les Quendi ne se massacrent pas sur des fronts unis, comme le font les mortels. »

      Maintenant que la Guerrière et le Prêtre avaient retrouvé l’intérieur du Petit Temple, les vapeurs âcres des ronces les assaillaient à nouveau, comme ces branchages se consumaient lentement sur l’autel du Soldat. C’était un parfum âpre et puissant, qui aiguisait l’esprit et électrisait les nerfs. L’instant d’après Aranos bondissait derrière la pierre de l’autel, là où s’alignaient des paniers et des nasses tressées de fougères, et le Capitaine y plongea la main : il en extirpa une courte épée de bronze, dépolie et verdie par le temps, bien incapable de trancher, mais assez lourde encore pour heurter et écraser.

      « Tu seras toujours la bienvenue sous la bannière du Trône Blanc, déclara Aranos, et un grand destin attend ceux qui suivront le Soldat dans la guerre à venir. »

      Le Capitaine avait fait volte-face. A présent il dardait ses yeux d’acier sur Eliwa, et par-dessus l’autel de pierre qui les séparait encore, son bras tendu portait la lourde épée de bronze extirpée des mannes du Petit Temple. Sur son front se creusaient les rides du souci, et son souffle s’était accéléré.

      « L’armée royale doit veiller sur les Enfants de la Mère, cracha Aranos. Si tu refuses d’intégrer le rempart de nos cuirasses, alors prouve au moins, ici et devant le Soldat, que les Moriquendi ne t’abattront pas en un instant. »

      Le défi était féroce, le visage d’Aranos s’était soudain refermé. En sept siècles de combat, lui avait vu des guerriers sans loyauté combattre aux lisières de la Forêt. Mais rares étaient ceux qui vivaient encore aujourd’hui sous la bénédiction de la Mère.

      « L’âge où Anaëh tenait elle-même ses frontières est révolu, ohtar, gronda un Aranos impétueux. Aujourd’hui l’étendard de l’armée commande aux guerriers, et son étoile à sept branches orne leur cuirasse à tous. Aujourd’hui, nous veillons. »

Note :

Son ton, sa posture et sa voix s'étaient faits plus dur. Dans ses yeux, elle voyait étinceler une rage féroce, animale. Une rage qu'elle connaissait trop bien. Elle lui rappelait celle qui transformait son Père, celle qui amenait des nuits et des jours de souffrance. Celle qui le prenait lorsqu'elle essayait de désobéir. De s'évader, ne serait-ce qu'un instant. Pendant un court moment, elle vit son Père. Là, devant elle, bouillant de colère. Mais désormais, elle n'était plus une enfant. Et elle avait grandit. Évolué.

Le temple lui paraissait soudainement moins accueillant. Elle le revoyait comme elle l'avait vu, ce jour ou il l'avait emmené. Et elle n'aimait pas ça. La douce chaleur était devenue fraîche. Le silence bienfaisant, une absence de son étouffante. La présence rassurante du prêtre, une menace.

- Pourquoi se soucier tant de ma survie ? Je ne suis qu'une simple guerrière, n'ayant joint aucun étendard qui plus est.

Son regard avait prit cette assurance qu'elle ne connaissait qu'au combat. Et même si elle doutait fortement de ses chances, elle dégaina sa dague. Il voulait un combat ? Il aurait un combat. Elle s'avança, doucement. L'autel les séparait toujours. Plus pour longtemps. Elle était passé outre cette barrière, et désormais, plus rien de les séparait. La lame qu'il abattit sur elle produisit des étincelles lorsqu'elle rencontra la sienne. Mais elle dut se dérober rapidement, sous peine de céder rapidement.

Elle évita de justesse un second coup qui visait son flanc, et fendit sur le côté droit du capitaine. Coup qui fut aisément paré. Elle balança son pied et frappa au tibia. Effleura plutôt, puisqu'il avait reculé avant qu'elle ne puisse le toucher comme elle l'avait souhaité. Elle roula au sol pour éviter un autre coup et se trouva sur le flanc gauche de celui qui était devenu son adversaire. Où elle frappa du poing avant d'être chassée par la lame. Elle ne le touchait pas. Tout du moins, pas assez fortement. Mais pour le moment, elle n'était pas non plus blessée.

Elle se releva avant qu'il ne la bloque au sol et se plaça de nouveau en face d'Aranos. Sa respiration était lente, maîtrisée. Elle était loin d'être déjà épuisée, non, sa condition physique aurait été médiocre si ça avait été le cas. Elle observait ce corps qui s'était mué en arme. Eliwa était entraînée, oui, elle s'était battue pour sauver sa peau, mais elle n'avait pas tant combattu que lui. Elle était jeune, beaucoup plus jeune. Et ce n'était pas un atout, parce qu'il était aussi souple et aussi rapide qu'elle, si ce n'était plus, et possédait une expérience beaucoup plus importante qu'elle.

Se recentrant sur elle même, elle para deux coups des plus violents, se dérobant sous la lame et utilisant la sienne pour dévier la trajectoire. L'acier mordit plusieurs fois le sol avant qu'elle ne puisse porter un nouveau coup. Qui n'atteignit pas sa cible. Mais celui-ci ne devait pas forcément l'atteindre, puisqu'elle dégaina alors sa seconde dague qui mordit la cuisse du Capitaine. De peu, certes, mais tout de même. Elle avait passé la garde et se trouvait désormais trop proche. Quand elle voulu se dégager, elle ramassa un coup de genoux dans l'estomac, qu'elle encaissa avec plus ou moins de difficulté. Il lui fallut quelque instants pour se reprendre, instants qu'Aranos mit à profit pour l'assommer sous les coups. Et même si elle se savait dans une mauvaise position, elle ne baisserait pas les bras.