Deux soeurs à l'assaut d'un château

Bien vite, la quiétude de la campagne fit place au brouhaha de la ville. Le retour de la duchesse ne passait pas inaperçu et la nouvelle de sa grossesse s’était largement répandue maintenant et elle pouvait entendre les félicitations et les exclamations de joie des passants. Hernando lui avait recommandé de se tenir tranquille et de ne pas saluer, mais elle se sentait tout de même obligée de leur adresser un petit signe de vie. Elle écarta donc le rideau de tissus et apparu brièvement au monde extérieur avant de retourner dans l’intimité de la voiture. Même si cela ne dura que quelques secondes, ce fut suffisant pour nourrir l’excitation de la foule qui se massait de plus en plus autour de la voie empruntée par l’escorte. « Nous serons bientôt arrivés, regarde. » La silhouette du château se profilait au-dessus des demeures des notables de la ville. Elle redoutait son retour, surtout après ce qu’elle avait pendant son séjour à Béronia. Elle ne s’était pas contentée de prendre du repos, elle avait passé des ordres qui auront certainement impacté certaines choses, dont l’humeur générale de Franco. Elle était convaincue toutefois que de ramener les troupes à Soltariel était la meilleure chose à faire, surtout si c’était pour se rendre à Merval par la suite. Rien n’était décidé encore et c’est pourquoi elle devait absolument parler à Franco même si ça ne lui tentait pas particulièrement.

« Je ne veux pas t’inquiéter, mais la situation risque d’être assez tendue au château. Nous avons des problèmes à l’interne avec une armée qui a envahi l’Ydril. Un homme est venu réclamer son titre et il s’y prend d’une bien drôle de façon si tu veux mon avis. Nous n’avons rien à craindre à Soltariel, mais c’est un problème qu’on devra éventuellement régler. Il y a aussi la guerre au nord, mais elle doit tirer à sa fin maintenant. Enfin, les combats seront terminés, mais il y a beaucoup à faire encore comme ramener le roi dans la capitale, récupérer des terres usurpées, bref que des joyeusetés qui seront, je l’espère, discutées principalement autour d’une table et non sur un champ de bataille. » L’escorte s’engouffra par la grande porte qui menait à la cour. On referma aussitôt derrière pour éviter que la place ne soit envahie par plus de curieux encore alors qu’une bonne partie des habitants du palais s’y était déjà rassembler pour accueillir la duchesse. Tibéria fut la première à sortir, trop heureuse de s’extraire de l’espace confiné de la voiture. En haut des marches l’attendait Cassio, son fidèle serviteur et ami, mais aucun signe de Franco. Il souriait, mais quelque chose semblait le troubler. Il descendit la volée de marches pour aller à la rencontre de la duchesse devant laquelle il s’inclina respectueusement. « Altesse, je suis heureux de vous revoir en bonne santé. » Tibéria sourit. « Je suis heureuse de te revoir aussi. » Elle savait que Cassio avait été déçu de ne pas pouvoir venir à Beronia, mais sa tâche à Soltariel s’était révélée tout aussi essentielle pour la jeune femme alors qu’il avait fait passer le courrier jusqu’au domaine des Soltari-Beronti. « Il faudra préparer une chambre pour Antonia, car à partir de maintenant, elle habitera au palais. » Il acquiesça d’un signe de tête, aucunement surpris par la commande. « Elle sera installée dans sa chambre habituelle. Ce sera fait immédiatement. » Un seul signe de la main suffit pour qu’une petite troupe d’esclaves viennent s’occuper des volumineux bagages. « Sais-tu où se trouve Franco? » L’ancien esclave haussa les épaules. « Quelque part à l’intérieur. Il y a eu un peu d’agitation pendant votre absence. » La duchesse fronça les sourcils, mais elle s’y attendait. Elle congédia Cassio d’un signe et retourna à sa sœur. « Allons à l’intérieur où on nous servira des rafraîchissements. Je dois également trouver Franco. Avec un peu de chance, nous tomberons sur lui. »