Terrains d'entraînement | Recoudre une brèche [PV Aegden&Lyorindel]

Fin de la 2nde ennéade de Barkios
Douzième année du Onzième Cycle
Terrains d’entraînement d’Alëandir

D’une manière que seuls ceux pouvaient comprendre les rares elfes qui comme toi s’étaient pris de passion pour la sculpture de leur corps, la sensation était tout simplement jouissive. Ce serait la première fois que tu enfilerais l’armure dans ces conditions. Cìryon était décidément non seulement un génie de la forge, mais aussi un anatomiste bien plus talentueux que tu ne l’imaginais… et pourtant tu le savais doué.

Après que tu aies assez donné d’effort pour que se ressentent les premières congestions, enfiler ta nouvelle armure devenait une expérience totalement différente. Le muscle froid tu t’y emboîtais simplement. Avec l’hypertrophie par contre tu l’épousais. C’est après toi que l’exosquelette avait été sculpté, ça tu le savais déjà, mais à ce point-là, tu ne t’en étais pas rendu compte avant aujourd’hui. Avec l’hypertrophie tu occupais presque entièrement la place qui t’était creusée sous le cuir et le métal, et tes mouvements n’en devenaient que plus agréables, plus intuitifs, plus naturels.
C’est ainsi après tout qu’ils seraient si tu venais un jour à devoir monter en armure sur le champ de bataille. La guerre est un exercice de tout instant. À bien y réfléchir, il aurait été malvenu de la part de Cìryon d’utiliser tes proportions à froid dans la conception de tes protections… ce n’était pas un simple vêtement après tout.

Tu roules des épaules, t’étires la nuque, mesurant à la tension de ta peau la solidité de ton chignon martial. Masqué et armuré, tu prends le chemin de l’arène extérieure des terrains d’entraînements.
Tes doigt font cliqueter les articulations de tes gants, emportant ton sceptre dans de rapides rotations. Ta pulsation retentit avec une intensité qu’elle n’a que rarement adoptée durant ces derniers temps. L’iridescence baignant ton focaliseur laisse de longues traces colorées dans son sillage, et ainsi tu attends.

Derrière ton masque point un sourire ravageur, qu’il ne sera donné à nul elfe d’observer. Et le pied de ton sceptre frappe le sol, et les aurores se dispersent et se diffusent, baignant ton être entier dans leur lumière éthérée. Posté au centre du peu d’espace ouvert des disponible avant que la forêt ne dévore les terrains, tu attends deux de tes collègues.

L’Heru Aran a quelques comptes à régler.

Assis à mon bureau je lis et relis des ébauches de traités, de capitulaires et autres édits, en somme la partie la moins intéressante du travail de diplomate. Faut dire que les réceptions et les négociations sont ce qui fait le sel de la profession. Mais voilà, la paperasse est une partie inévitable malheureusement, une fois les soirées finies et les âpres discussions terminées il est temps de rédiger. Et puis il y a mes rapports à rédiger ensuite, tout ce que j'avais pu apprendre doit tomber entre les mains du roi. Au final la vie d'épervier n'est pas vraiment celle que j'imaginais en rejoignant leurs rangs. J'avoue que je les idéalisais un peu, c'est un métier passionnant à n'en point douter mais disons que l'on ne voit que trop tard l'envers. Cependant je ne regrette pas d'être un Tel'soril, c'est une vie excitante, la plupart du temps en tout cas. Parfois, par contre, c'est d'un ennui mortel alors je me lève, je forme une pile avec les documents que j'ai dérangé puis je sors, en ouvrant la porte je tombe sur Eeyore qui s'arrête de courir en me voyant fermer soigneusement la porte derrière moi.

"Heru, un homme du roi vous demande." Je hausse un sourcil et descend un escalier pour arriver devant la porte d'entrée où attend un elfe d'arme, en me voyant approcher il se redresse, évidemment il est plus grand que moi, et m'adresse un salut militaire des plus formel. Je résistes à l'envie de le lui rendre, je ne suis plus militaire maintenant, enfin si mais ça personne ne doit le savoir.

"L’Heru Aran vous attend."
"Très bien, je serai là dans une demi-heure."
"Sauf votre respect, l’Heru Aran vous attends maintenant." Je fronce les sourcils de surprise, l'affaire est donc suffisamment grave pour être urgente.
"Je vais chercher mon manteau et j'arrive."
Le garde hoche la tête et je monte les marches quatre à quatre pour aller prendre ce fameux manteau qui se ferme grâce à mon cataliseur, je préfère l'avoir lors des moments importants même si je n'ai pas besoin de ma magie. Une fois de retour à la porte le garde m'attend toujours.
"Ça n'était pas la peine de m'attendre, je connais le chemin jusqu'au palais royal."
"L’Heru Aran ne vous attend pas au palais mais au terrain d'entraînement de la milice."
"Pardon?
"Je vous ai attendu car c'est aussi là où je me rends, pour ce qui est du roi je n'en sais pas plus, vous verrez bien avec lui".

J’emboîte le pas au soldat jusqu'aux casernes en me demandant tout le long pourquoi est-ce qu'il me convoque sur le terrain d'entraînement, terrain que je n'ai pas vu depuis un certain temps d'ailleurs. C'est peut-être à cause de ça. J'écoutes ensuite patiemment le soldat m'expliquer comment me rendre sur ledit terrain même si je sais déjà comment y aller puis je le remercie et lui souhaite une bonne journée avant de rejoindre le terrain en question. De loin je vois Aegden me précéder. Déjà j'ai un mauvais pressentiment. Et une idée assez clair de pourquoi est-ce que j'ai été convoqué. Je déglutis et je vais d'un pas lent rejoindre le roi et le commandant d'Alëandir. Une fois arrivé je regardes avec inquiétude le géant dans son armure dorée et avec encore plus d'inquiétude le sceptre dans sa main. Pour une fois je ne fais pas une révérence en le voyant, je déglutis une nouvelle fois. Il ne va quand même pas se venger parce que je l'ai décoiffé la dernière fois, si?

"Aran Lîn, comment puis-je vous servir?" Dis-je d'une voix mal assurée, un peu caché derrière Aegden.

Tu ne réponds aux salutations d’Aegden que d’un hochement de tête si modique que l’on pourrait aussi bien le considéré ne pas avoir été. Tes yeux, obscurcis par le port du masque se portent en réalité derrière le Mainyth Lëandrin, et sur l’épervier qui fait son entrée.
Parler avant que les deux ne soient présents aurait été malvenu. Ce que tu as à dire à lui, c’est ce que tu as à dire à l’autre. Ce que tu as à rappeler à l’un, c’est ce que tu as à rappeler à l’autre. Et la leçon aurait eu bien moins de poids si tu avais dû la commencer en l’absence de l’un des élèves. C’est une leçon difficile qui s’annonce, et ils le savent.

Chez Lyorindel, plus expressif, le langage de la voix suffit, et le langage du corps n’est que couteau remué dans la plaie. Lui se méfie de ce qu’il sache la raison de sa présence, et aimerais autant se reposer sur l’autorité d’Aegden pour avoir moins part aux réprimandes.

Chez Aegden, le taciturne, le sérieux caricatural était toujours de mise. C’est au contraire dans ses écarts que se trouvaient les preuves. Dans le jeu d’évitement de ses pupilles, à la recherche d’un camarade de peine.

Tu lèves légèrement le menton. Brisant définitivement tout espoir pour eux de se retrouver face à toi. Et cérémonieusement, ton sceptre fait un tour. Le reste est l’affaire d’un battement de cils. La magie pulse à travers le corps d’Aegden comme elle pulse à travers ton focaliseur, et les chairs du Commandant se saisissent soudainement, tous ses muscles conjointement crampés.
Tu fais un puissant bond dans sa direction, te retournes au dernier moment, et dans un adroit passage de bâton, la pointe de ton focaliseur vient s’écraser sur l’abdomen du lancier, avec assez de force pour l’envoyer valser quelques mètres en arrière. Ton attention à ce moment-là est entièrement accordée à celui de tes deux adversaires du moment dont les prouesses martiales se sont quelque peu émoussées, et sans prendre la moindre pause dans tes gestes, tu t’imposes à la fois une rotation et un nouveau bond.
Tu refermes la distance te séparant de Lyorindel sans lui laisser le temps de faire appel à sa magie. Ta paume ouverte se pose contre sa poitrine, et de tout ton poids tu l’accompagnes vers le sol. Lyorindel tombe sur le dos, piégé au sol par ton poids. Accroupi un genou par terre à côté de lui, la main appuyant seulement légèrement moins lourdement contre sa cage thoracique, tu arrêtes enfin de bouger.

- J’aurais probablement pu faire pareil avec la grande majorité des soldats tu entames, sérieux comme la foudre et là est le grand problème de nos armées. tu te lèves, libérant ton ami par la même occasion Vos dernières mésaventures faisaient de vous l’exemple parfait, mais ne vous y méprenez pas, la même chose, et même pire, aurait pu arriver à d’autres.

Tu connais des soldats qui auraient été tout bonnement non seulement incapables de reprendre ce qui leur appartient à ce gobelin, mais aussi incapables de lui passer l’envie de revenir en Alëandir. Et parmi ces soldats, certains étaient des maîtres d’armes virtuoses. C’est juste que :

- Nos milices sont très mauvaises pour gérer l’imprévisible. tu enchâsses ton sceptre à sa place dédiée dans ton dos Et c’est un luxe que l’on ne peut plus se permettre.

Au vu de l'endroit et de la tenue du roi je m'attendais un peu à ce que l'on combatte mais pas à ce qu'il se jette sur nous sans même nous prévenir, sans nous laisser le temps de nous mettre en garde. Lorsqu'Artiön lève la tête je déglutis et en sentant qu'il use de magie j'ouvre grand les yeux de surprise et mes oreilles se rabaissent. En voyant qu'il saute sur Aegden je me met de profil par réflexe pour éviter de prendre un commandant dans la tête, c'est jamais très bon ça. Ledit commandant disparaît bien vite de mon champ de vision, même périphérique, je me retrouve tout aussi vite dans l'ombre du géant en armure. Je lève les yeux le temps d'un battement de cœur pour questionner le roi du regard.

Pourquoi recourir à de tels moyens? Certes nous n'avons pas été spécialement bon mais une conversation posée autour d'un verre au palais royal aurait été bien meilleur. Enfin bien meilleur pour mon dos vu que je suis tombé sur une partie rocailleuse du terrain, bien meilleur également pour mes cotes qui tentent de résister tant bien que mal à la pression exercée par Artiön, je les sens presque me titiller les poumons rendant d'autant plus difficile mes tentatives de les remplir d'air. Avec le choc l'air s'en est allé de mon corps et je commence à étouffer, comme un poisson hors de l'eau je tente comme je peux de respirer. Avec mes deux mains j'essaye de déloger celle du roi mais rien n'y fait, il est trop fort pour moi, surtout dans cette position. Lorsqu'il se lève c'est une libération, j'hyperventile pendant quelques secondes, le temps de me remettre de la surprise puis je m'assois pour écouter l'Heru Aran. J'ai bien envie de me plaindre de l'attaque en traître mais ça serait lui donner raison alors je me tais. Je me relève en faisant une grimace et en échappant un grognement de douleur. Une fois difficilement sur mes deux pieds je me grandis pour compenser ma taille, à propos de laquelle je ne complexe pas, et je cherche le regard d'Artiön. La question d'Aegden est bonne et je ne sais pas comment le roi compte changer un problème qui touche tous les elfes, je suis d'ailleurs bien curieux de l'entendre à ce sujet.

"Sauf votre respect, Heru Aran, je ne vois pas en quoi le corps diplomatique peut aider à résoudre ce problème qui touche la milice mais je me tiens évidement à votre disposition."

Vexation pour l’un, incompréhension pour eux deux. Les réactions furent toutes proportions gardées aussi intenses que tu te l’imaginais. Aussi intenses qu’elles avaient dû l’être lorsqu’ils s’étaient retrouvés dans une fantasque course poursuite face à des dizaines d’habitants d’Alëandir. Moins intenses qu’elles le seraient s’ils devaient pour l’un ou l’autre faire face à un assaut surprise des Eldéens ou à un coup bas des peuples mortels.

- De la même manière qu’avec vous deux ton regard s’écrase sur Aegden En forçant les soldats à réagir.

Tu te tournes ensuite vers Lyorindel, qui marquait un point en pointant du doigt son absence de prérogatives militaires. Seulement si Aegden devait être sujet à remontrances, il ne serait pas juste qu’il le soit seul quand les témoignages ne le peignaient pas comme la victime première du gobelin.

- Quant à toi Lyorindel, en tant que diplomate, tu ne peux pas te permettre d’être sans défenses. Avec les déplacements réguliers en réalité tu es beaucoup plus exposé à l’imprévu que les soldats tu penches légèrement la tête vers la gauche et en tant que Daranovan tu as encore moins d’excuse.

Tu avances légèrement vers eux, ton sceptre à nouveau en main, ta magie à nouveau dessinant son aura autour du focaliseur. Un tour de bâton tout en douceur, un mouvement de ta main tout en souplesse, et ta lumière fleurissait sur eux deux. Les douleurs que tu leur avais infligées se firent un instant plus gênantes, avant de doucement disparaître. Là tu rappelais que tu es avant tout un guérisseur.

- Tu te rappelles Aegden, lorsque nous parlions de commencer des échanges entre les différentes milices Protectorales ? tu plantes ton sceptre dans le sol Je ne sais pas exactement de quelle manière pour l’instant, mais je pense que l’on pourrait profiter de l’occasion pour soumettre les milices à des exercices qui les forceraient à sortir de leur zone de confort.

À partir de là tu t’adresses à Aegden plus qu’à Lyorindel.

- Dans le cas des armées d’Alëandir, c’est plutôt simple. L’imprévu est la spécialité des Aigles et leurs instructeurs ne sont jamais loin. Pour ce qui est des autres Protectorats… l’organisation risque d’être plus… complexe.

J'imagine bien Artiön se mettre à inspecter l'armée royale et frapper au hasard des soldats pour voir s'ils vont réagir ou non. J'en aurai presque souris si je n'étais pas si proche de son sceptre. Quoi que, il est certain que les soldats en question vont réagir, trop tard sûrement, quant aux autres oseront-ils faire quoi que ce soit? Je pense qu'au mieux ils couvriront leurs camarades de leurs boucliers mais aucun n'osera répliquer. Enfin j'espère.

Lorsque le roi se tourne vers moi je m'attends presque à me prendre un coup pour avoir tenté de me cacher derrière ma couverture de diplomate afin d'éviter toute remontrance. Heureusement rien si ce n'est une remarque acrimonieuse, enfin elle l'est vers la fin, en même temps je l'ai un peu cherché. Certes je suis originaire de Daranovar mais mes camarades daranovan ne sont pas mieux armés que moi face à l'imprévu, bien malheureusement d'ailleurs, c'est sûrement pour ça qu'il veut changer tout ça. En le voyant user de son focaliseur un frisson me remonte la colonne vertébrale, ce qu'il avait fait à Aegden n'avait pas l'air spécialement agréable ; en lieu et place d'une douloureuse contraction de mes muscles, les maux que j'ai subi s'estompent, c'est bien pratique la magie de la vie.

"Aran Lîn, l'idée de mêler des instructeurs des aigles à la milice d'Alëandir est une bonne idée, la proposition d'Aegeden en est une meilleur encore. Ça permettrait d'uniformiser les milices, de gommer les faiblesses de chacune et possiblement de commencer à effacer ce sentiment d'appartenance à une cité en particulier qui est profondément enraciné en chaque elfe. Cela dit je vois quelques obstacles: les protecteurs eux-mêmes. Les aigles font parti intégrante de l'armée royale, je crains que les protecteurs voient l'arrivée d'officiers royaux dans leurs milices comme une ingérence. J'ai peur qu'ils voient ça comme une tentative, à terme, d'intégrer les milices dans l'armée royale et qu'ils s'insurgent comme un coup de force, une spoliation de pouvoir, un accaparement etc... peu importe le terme qu'ils vont utiliser l'idée sera la même. Cela dit je ne doute pas que les Aigles, et les éperviers naturellement, se tiennent à vos ordres en cas de... problème."

- Sortir de sa zone de confort oui, mais apprendre à réagir de manière inventive non.

Quelles qu’elles soient, les armées elfiques trop habituées à répéter les mêmes manœuvres défensives – bien qu’efficaces – depuis l’aube des temps partageaient cette atroce rigidité. Parmi elles seulement deux se démarquaient : l’armée Royale, dont les prérogatives nourrissaient justement cette versatilité, et celle de Daranovar, qui une fois scindée, forte de l’exercice des régulières joutes, était dotée de vétérans plus que capables de tirer leur épingle du jeu. Mais un corps et quelques vétérans pour enseigner tout un peuple… ça ne suffirait jamais.

- Et séparer les Aigles de leurs quelques rares instructeurs et vétérans est hors de question lorsque le corps bat de l’aile comme il le fait actuellement. tu te tournes vers Lyorindel et comme Lyorindel le dit si bien, la présence de Gradés Aigles parmi les armées risque d’être mal vue. Les milices ont souvent déjà assez de mal à encaisser le fait qu’un Aigle puisse prendre autorité sur elles sur le terrain. Le leur infliger au quotidien, même pendant une courte période serait un véritable suicide.

Tu t’écartes d’un pas, portes ton regard loin vers l’horizon forestier alors que tu réfléchis une solution. L’Anaëh vit une époque d’intenses mouvements, ce n’est décidément pas le moment d’infliger quelconque surprise qui ne soit pas bienvenue au peuple Taledhel. Mais alors comment faire pour qu’il soit prêt lorsque viendraient de réelles surprises ?

- Aegden tu te tournes vers le Commandant si parmi les instructeurs de la milice Lëandrine il y en a un ou deux qui soient partant par contre, ce pourrait être intéressant qu’ils aillent emprunter un peu de l’approche des Aigles pour vous l’enseigner ensuite. Qu'est-ce que tu en dis ?

Et au vu du nombre très réduit d’Aigles actuellement, pouvoir compter sur le soutien des autres milices ne serait pour eux certainement pas de refus.

Après ça il va falloir que je propose à quelques collègues de s'entraîner. Sûrement le Lassöril et a fortiori l'Hestoril doivent bien savoir comment gérer l'imprévu, j'imagine que c'est à eux de mettre en place des exercices et autres formations pour régler le problème. Car problème il y a, que les aigles se débrouillent avec l'imprévu après tout c'est bien normal, c'est un peu leur boulot. Cependant que ce ne soit pas le cas des éperviers est assez troublant vu que l'espionnage regorge d'imprévus en tous genres avec lesquels il faut savoir composer.

Je me demande si Artiön ne va pas glisser quelques éperviers parmi la milice d'Alëandir pour profiter de ce que les instructeurs ont pu apprendre des aigles. Jouer le soldat stagiaire pour participer aux entraînements promet d'être aussi intéressant qu'amusant.

"Non, commandant, ce n'est pas une mauvaise idée. C'est seulement une idée que l'on ne peut pas implémenter tout de suite ; une idée qui nécessite du temps pour être applicable." Sûrement un cycle ou deux sans changement brutal dans la façon de penser des elfes et qu'on s'y met dès aujourd'hui. "Les aigles, qu'ils soient contents ou non, sont sous les ordres directs du roi et par conséquent feront bien ce que ce dernier leur demande de faire. Cependant il n'est pas question pour ces instructeurs d'être dans le secret des dieux. Ils ne connaîtront pas toutes les bottes secrètes des aigles, déjà parce que les aigles n'ont aucun intérêt à les apprendre à quiconque n'étant pas des leurs mais surtout parce que ce n'est pas l'objectif. Une fois que les instructeurs auront compris comment mieux gérer la surprise ils pourront tenter de répliquer ce qu'ils ont appris et ainsi le transmettre aux troupes d'Alëandir." Je me tourne vers Artiön pour voir s'il confirme ce que je raconte puis je poursuis. "Pour ce qui est des autres cités, les protecteurs se donneront les moyens de faire la même chose. A condition qu'Alëandir démontre l'efficacité de cette méthode. Aran Lîn, il est certain que les protecteurs vont observer cette réforme avec intérêt, si vous arrivez à montrer que c'est une méthode viable ils seront moins réticents pour l'adopter. Si vous n'y arrivez pas, votre règne commencera sur un mauvais pied. Cela dit il vaut mieux que votre coup d'essai soit une réforme qui touche seulement les troupes d'Alëandir plutôt que celle dont nous avons... longuement discuté."

- Les Aigles feront ce qui est nécessaire pour protéger l’Œuvre, tu conclues l’intervention de Lyorindel et si ça doit passer par le partage de certaines de leurs méthodes, ainsi soit-il.

Le ton est péremptoire. Que l’élite du peuple immortel range sa fierté de côté, c’est du devenir de votre foyer, et d’une mission confiée par votre Déesse Mère qu’il s’agissait. Et si les instructeurs des autres milices trouvaient blessant pour leur égo de s’enquérir de conseil donnés à de plus jeunes recrues, alors ils auraient eux aussi affaire à toi. Quelques ennéades. Quelques mois tout au plus. C’est tout ce qu’il leur serait demandé de passer loin de leurs Cité-Mères. En échange de nouvelles options pour en assurer la sécurité, quel poids est-ce que cela pouvait donc peser ?

- Il n’est de toute façon pas là question pour les Aigles de dévoiler tous leurs atouts, seulement de partager un peu de leur méthodologie tu lèves le menton en direction de Lyorindel et de la même façon en retour il n’est pas non plus question pour les autres milices d’abandonner leurs spécificités. L’Anaëh en sortirait affaiblie plutôt que le contraire.

Trop peu de temps, trop de changements à faire dans un système dont tu constatais un peu plus chaque jour la millénaire immobilité. La rouille qui coinçait les engrenages d’Anaëh était elle-même rouillée. Les Protectorats qui depuis le début des temps reprochaient à Daranovar son sectarisme et sa rigueur quasi tyrannique se dévoilaient n’être finalement qu’autant de versions plus insidieuses de ce qu’ils décriaient. Les populations trop confortées dans la pérennité d’une machine datées devenaient farouche à l’idée d’acter sur des changements qui avaient déjà eu lieu…

- Et comme tu le dis si bien, une fois que l’échange aura fait ses preuves au sein de la milice Lëandrine, il n’y aura plus de raison valable pour que les Protectorats ne refusent de s’y prêter. tu te tournes vers Aegden S’ils prétextent de pas en avoir les moyens c’est que leur milice est en bien mauvais état, et alors c’est témoignage de problèmes bien plus profonds…

Tu ranges ton sceptre dans ton dos pour te libérer les mains. Et tes bras en profitent pour venir se croiser sous ta poitrine, mettant par la même occasion en valeur l’excellent jeu d’articulation de ton exosquelette. Tu es de la Cité des Armes, et tu as toujours été un maître d’armes consciencieux. Tu connais de près ou de loin la composition, à défaut des techniques, de presque toutes les milices Protectorales d’Anaëh, et tu doutes fort qu’il y en ait une seule d’entre elles qui ne puisse pas se passer d’un ou deux des enseignants faisant la formation des recrues.

- En attendant, Lyorindel ton attention se porte sur le petit homme en parallèle avec l’expérience Lëandrine, j’aimerais que tu rejoignes le camp Celimë et que tu fasses part de l’idée aux officiers de l’armée Royale présents sur place. Tant qu’à partager la position avec des officiers d’autres milices, j’aimerais les inciter à profiter de l’occasion pour faire entraînement commun au moins le temps de leur cohabitation.

Tu soupires, et à cause de ton masque tu es seule victime de la chaleur que tu souffles. Ta réflexion va et revient aux derniers mots de l’épervier. Il marquait un point. Vous pourriez commencer par l’un ou par l’autre. Commencer par le plus léger était préférable. Attaquer les deux ensemble à grande échelle était inconcevable. Tes bras se décroisement, et tu laisses légèrement tomber tes épaules de résignation avant de reprendre tes esprits et de poser tes mains sur tes hanches.

- Et pardonnez-moi tous les deux si j’ai été un peu pressant. Je n’aurais simplement pas imaginé Anaëh à ce point fractionnée. tu reprends avec un timbre adouci Celimë et les Lëandrins, contentons-nous de ceux-là durant les mois à-venir. Des objections ?