[Terminé] [La cité perdue] Rassembler l'expédition. (Libre aux nains)

Gondur ouvrit un œil, puis l’autre, levant ses bras pour s’étirer dans une lente complainte et les laisser retomber mollement sur les draps. Il avait veillé beaucoup trop tard cette nuit. Car depuis hier au soir, il hébergeait l’elgi au teint grisâtre. Non que cela lui fasse particulièrement plaisir, mais il avait été désigné comme le « guide » attitré de T’sisra. En vérité, il était là pour la surveiller nuit et jour, ou qu’elle aille, quoiqu’elle dise ou fasse. Et il se devait de se souvenir et prendre note de tout.

Après quelques minutes passées à se convaincre de sortir du lit, il enfila des vêtements et entreprit de toquer aux portes des chambres de ses invités. Seulement, ni l’un ni l’autre ne s'y trouvaient. Ses cheveux s’étaient dressés sur sa tête, c’était pour lui une véritable catastrophe ! Il descendit les escaliers deux à deux pour débouler dans la pièce principale. Le feu y crépitait déjà dans la cheminée, et sur la table se trouvaient encore une assiette propre, du pain, de la confiote et des fruits.

- Que… Qui ?

- Bien dormi ? Demanda la daedhel qui sortait de sa cuisine.

- Tu t’es servi dans mes provisions ?

- Du tout. Je suis allée acheter tout ça.

Le nain se passa la main sur le visage. C’était pire ! Cela signifiait qu’on avait croisé l’étrangère sans lui. Et la tâche qu’on lui avait confiée était pourtant aussi simple que claire, d’autant qu’on lui avait bien expliqué que l’ordre venait d’en haut.

- Où ? Où ?! Scandait-il en s’approchant de la table.

- Et bien… La boulangerie est à dix mètres de chez vous, et j’ai acheté les fruits et la confiture à un petit étal juste à côté.

- Il y avait du monde ? S’enquit Gondur en s’asseyant à sa table.

- Quasiment personne, il était encore tôt. Rassura-t-elle voyant son hôte blêmir.

- Mais quelle heure est-il ?

- On a passé la mi-journée depuis une bonne heure.

- Et Balir ?

- Il est parti pour Thanor. Il va nous ramener Dhomrumli, un de ses amis. Un inventeur.

Le « guide » se répandait en soupirs tout en commençant à déjeuner. Tant qu’il avait la charge de la noiraude, plus jamais il ne veillerait aussi tard.

- Je me demande bien pourquoi personne ne t’a encore taillé les oreilles en pointes toi.

- Parce qu’elles sont déjà pointues. Ironisa la noiraude en s’asseyant à son tour à la table.

- Comprends bien une chose l'elgi, si on m’a désigné pour être ton guide, c’est pas pour rien. Tu ne dois pas sortir ou aller où que ce soit sans moi. Trancha-t-il avec fermeté. Si ça venait à dégénérer et que je ne suis pas là… Ça sera de ma faute.

T’sisra se contenta d’acquiescer, sans rien ajouter. Après un moment de silence à le regarder dans le blanc des yeux, elle opina une nouvelle fois et fit la promesse de ne plus sortir de la maison sans qu’il ne soit là pour l’accompagner. Gondur rajouta une couche de sermon afin d'être sûr et certain de se faire comprendre, ce à quoi l'étrangère avait acquiescé. Puis, la conversation dériva naturellement sur ce qui l’avait menée jusqu’ici : La cité perdue. La daedhel resta évasive sur les péripéties qu’elle et son père avaient traversé, cependant elle ne tarissait pas lorsqu’il fallait décrire la cité elle-même.

- Et la… Brynduraz, à quoi ça ressemble ? S’enquit Gondur en fourrant une fraise dans sa bouche.

- C’est gros comme ça, fit-elle désignant l’écart entre son pouce et son index, c’est bleu et ça brille d’une lueur particulière, on jurerait qu’elle a un cœur presque translucide. C’est un très joli caillou.

- La pierre des Rois… Tu n’imagines pas à quel point c’est rare, vraiment. Si on en a vu deux ou trois dans tout le Zagazorn jusqu'à aujourd'hui… Et que seuls les rois en ont possédé, c’est pas pour rien.

La noiraude se contenta d’opiner avec un sourire. Son père lui avait fait, à peu de choses près, la même remarque.

- M’étonne pas qu’on t’ait crue sur parole.

- C’était sans compter les outils d’un forgerune que nous avons ramené, et l’appui d’une runiste.

La barbe resta silencieuse, observant la noirelfe sans trop savoir que penser. Il y avait une certaine admiration au fond de ses yeux, et d’un autre côté, il se demandait pour quelle raison il avait fallu que ça soit une étrangère qui tomba sur ces vestiges.

La demeure de Gondur était devenue un véritable moulin depuis les deux dernières ennéades. Cela ne l’enchantait guère, mais la nouvelle d’une expédition prochaine pour la cité perdue avait attisé la curiosité des biens dawis. Certains étaient venus de loin rien que pour en apprendre plus à ce sujet, quand d’autres s’étaient déplacés uniquement pour voir l’étrangère. On l’étudiait à la fois avec une certaine méfiance ainsi qu’une curiosité non dissimulée, on lui posait des questions sur sa vie, on voulait en apprendre plus à son sujet. Une chose à laquelle T'sisra s'habitua très vite, elle ressassait donc sans cesse les mêmes histoires et anecdotes.
Aussi, la nouvelle s’était vite répandue : Une noiraude élevée par un nain. Si cela en faisait sourire certains, d’autres y voyaient là une grosse erreur. Les réactions étaient mitigées, mais après tout, elle avait eu en sa possession les outils d’un forgerune ainsi qu’une de ces fameuses brynduraz, il y avait donc fort à parier que la découverte de la cité du clan de Molgrunn ne fut pas un mensonge éhonté. Le poids de l'information et des preuves valaient au moins la tentative de lui faire un minimum confiance.

Ainsi, plusieurs runistes désireux de redécouvrir les secrets d’un passé oublié avaient fait le chemin jusqu’à Fort-Garmin. Tous représentaient leurs clans respectifs, chacun y voyait là l’occasion redorer le blason de leur Art, de retrouver la cohésion d’antan. L’expédition compterait une trentaine de barbes versées dans les runes. On y rencontrait des Long-Nez, des Brise-Acier, des Pas-Sûr, et d’autres clans plus ou moins connus.
Des bâtisseurs, des mineurs, des guides de haute-montagnes, des chasseurs et quelques forgerons ainsi que deux historiens s’étaient décidés à rallier la troupe. L’expédition comptait d’ores et déjà une soixantaine de dawis.

La daedhel roulait le parchemin sur lequel elle avait passé la moitié de la journée à écrire des noms. Elle se tourna vers Gondur qui étudiait encore une liste de fournitures.

- Il va nous falloir un paquet de béliers pour transporter tout ça. Déclara-t-il sans plus de cérémonie. C’est le seul moyen.

- Et nous allons avoir besoin de combattants pour protéger les civils sur le chemin. On ne passera pas inaperçus.

- Ah ça… C’est peu de le dire. Les nains sauvages sont une véritable plaie.

- Sans compter la faune. Argua la noirelfe en dressant l'index, se souvenant de sa rencontre avec le bearog.

- On a pas assez de guérisseurs. Affirma le nain en se dirigeant vers la porte.

- Il y a bien des runistes capables de soigner qui nous accompagnent. Et moi aussi, je serai utile sur ce point.

- Mieux vaut ne pas trop se reposer sur la magie. Conclut le dawi en lui faisant signe de venir. Aller, viens.

T’sisra lui emboîta le pas, et tous deux quittèrent la maison. Gondur avait installé, devant chez lui, une table et deux chaises, c’est là que se présentaient les volontaires. Et il y en avait encore assez pour y passer tout l'après-midi.

Le Zagazorn était en ébullition. En cette quatorzième année du onzième cycle, les Grobis fuyaient par milliers depuis les hauteurs du Septentrion pour se rendre plus à l’Est et au Sud, en direction du cœur des terres de Miradelphia. Nouvelle calamité des divinités ? Querelles intestines ? Guerres civiles ? Personne ne savait réellement pourquoi les Grobis fuyaient les entrailles de la terre, mais toujours est-il qu’ils fuyaient. Les colonies disparates se retrouvaient partout entre les Hautes-Terres et les plaines du Brissalion. Cela causait énormément de tracas à Harald, qui devait à la fois lutter contre les Wandrais au Sud, et les Grobis un peu partout sur ses terres. S’il s’acquittait volontiers de la tâche, avec dévotion et sans flancher, cela le fatiguait énormément. Il pensait de plus en plus à partir en pèlerinage sur le chemin de ses aïeux et des barbes illustres qui demeurent aux différents panthéons des Nains. Il faut dire qu’il n’avait pas réellement eu le temps de souffler depuis les évènements de la Malenuit : capitaine d’un régiment d’infanterie lourde envoyé aux quatre coins du Zagazorn pour faire face aux Grobis, aux traitres de Dun Eyr, aux combats contre les Wandrais. Puis il devint Ongaraz, suppléant Thorgrel Poing-De-Fer, alors Gazanundi, lorsque celui-ci n’était plus sur ses terres. Et enfin, il devint à son tour Gazanundi. S’il en ressentait énormément d’honneur et de fierté, il sentait également son esprit s’affaiblir parfois. Un peu de repos serait bienvenu.

Il avait entendu parler d’un évènement grandiose et ô combien inattendu, là-haut, dans le Nord. Les nouvelles allaient bon train, et un Thane d’un clan demeurant à Fort Garmin et qui s’était rendu jusqu’à Lante pour faire affaire avait eu la langue bien pendue un soir, à la taverne « La chope dorée ». Un groupe hétéroclite avait retrouvé une cité perdue depuis des cycles et des cycles. Et pas n’importe quelle cité : la cité du clan de Molgrunn. Qui n'a jamais entendu la chanson à la gloire de Molgrunn ? Cette illustre barbe, dont le nom traversa les époques, prêtait à rêver pour les jeunes barbes, et à fierté pour les plus anciennes. Retrouver la cité de Molgrunn, était-ce là un signe des demi-dieux à l’intention de leurs enfants ?

Les rumeurs firent état d’un nain, une vieille barbe respectée quoi que connue pour être… Spécial, comme diraient certains. D’aucun doutaient de lui, d’autres trouvaient qu’il était visionnaire et doué. Ou simplement très chanceux. Ces mêmes rumeurs parlèrent d’une fille, une Drow. Comment une Drow aurait-elle pu entrer dans une cité Naine antique ? En tout cas, il semblerait qu’elle ait des preuves irréfutables.

Eté, Kÿriano, première ennéade de Karfias, an 15:XI.
Lante, porte Nord.

Les rumeurs de jadis se concrétisèrent en bruits, puis en vents, puis en tornades annonciatrices de changements. De bons changements, des changements bénéfiques pour le Zagazorn, le passé glorieux et l’avenir un peu plus clair qui s’annonce jour après jour. Si le Malenuit avait laissé un goût fort amer dans la bouche des Dawis, tout n’était pas à jeter dans le passé du Zagazorn. D’après les dires de certains poilus érudits, cette cité fut celle du clan de Molgrunn mais ce n’était pas là les seuls trésors qui se trouvaient en ces lieux abandonnés. Une Brynduraz avait été retrouvée, « la pierre des Rois ». De mémoire de barbe, il n’y eut qu’un ou deux exemplaires de cette pierre en possession d’illustres Groman-Rik. Et en plus de cette pierre aux reflets irisés, on trouva également les outils d’un Forgerune. Un Forgerune ! Non pas que l’art des runes ait disparu, mais depuis la Malenuit et les évènements qui en découlèrent, les clans disposant encore de savoirs liés aux runes se comptent sur les doigts d’une main. Découvrir une cité renfermant de tels savoirs, et les outils qui y furent liés… De véritables trésors.

Le Groman-Rik lui-même autorisa la mise sur pied d’une expédition dans le but de reconquérir et de redévelopper la cité. Harald n’avait aucun doute sur le fait que beaucoup de clans voudraient se rallier à cette expédition, et on aurait besoin de toutes les compétences : bâtisseurs, forgerons, guerriers, pisteurs, guides, historiens, runistes, tanneurs, chasseurs et cueilleurs, tous étaient attendus et viendraient assurément pour pouvoir mirer de leurs yeux ébahis cette cité du passé. Harald lui-même était de ceux-là.

A Lante, aucun runiste ne se présenta malgré l’appel réalisé aux nains plusieurs ennéades auparavant. En revanche, les autres spécialités de clans se présentèrent et se rassemblèrent sous l’impulsion d’Harald. Seule la réponse du Gormisson se faisait attendre. Allait-il venir avec la cohorte de Lante ? Seul ? Pas du tout ? Vêtu de son amure d’un noir profond agrémentée de formes géométriques couleur carmine et de broderies en or, Harald s’adressa à la foule de Dawi devant lui, ses pognes posées sur ses haches Lantaises.

- Dawis ! Barbes, bavettes ! Qu’Ikthor vous remercie tous d’avoir répondu à l’appel ! Aujourd’hui, nous prenons la route en direction de Kirgan, pour ce qui semble être une autre aventure ! Nous allons redécouvrir une cité qui accueillit jadis certains de nos ancêtres, et qui renferme encore aujourd’hui d’antiques savoirs liés aux runes et à la magie qu’elles renferment. En ce jour, nous nous apprêtons à nous illustrer ! Je ne doute pas de votre courage et de votre amour pour notre nation ! Et je suis sûr qu’après cela, nous mériterons tous nos places au Mogarkordum ! Fiers cognards ! Fières barbes ! Fières bavettes ! En avant !

Et la cohorte se mit en route. Il s’agissait plus d’un groupe que d’une armée. Les chemins impraticables, escarpés et difficiles d’accès ne pouvaient laisser passer une véritable Drangthrong, aussi fallait-il restreindre le nombre de barbes. Ils s’avancèrent néanmoins tous ensembles. La plupart d’entre eux montaient des béliers, soit de guerre, soit domestiqués. Harald lui-même montait un bélier de guerre, tout comme les soldats qui l’accompagnent. D’autres béliers furent réquisitionnés afin de transporter les marchandises et équipements, afin d’accélérer la cadence. Et les béliers et boucs seraient bien plus utiles dans les monts du Septentrions.

Eté, Elenwënas, deuxième ennéade de Kàrfias, an 15:XI.
Kirgion – Fort Garmin

La route n’avait pas été la plus confortable, surtout une fois arrivé au Nord de Thanor, mais ils n’avaient pas eu trop de problèmes. Point de fanfare pour célébrer leur arrivée, points de tambours pour indiquer aux barbes du fort que Lante se joignait à l’expédition. Ils arrivèrent sobrement. Le cortège disposait de plusieurs cognards à l’avant, dont Harald, des clans non combattants et d’autres cognards à l’arrière. Les béliers qui transportaient les marchandises et équipements se trouvaient au centre de la colonne. Un maximum de sécurité, pour faire face aux dangers qui guettent dans les montagnes. Les Grobis avaient quitter les montagnes rocheuses l’année d’avant, mais d’autres colonies subsistaient encore. Sans compter les créatures qui guettent…

Mais le convoi était au complet. Point de blessé, ni de barbe ayant rejoint les derniers halls avant l’heure. Ils entrèrent dans Fort Garmin après avoir salué les sentinelles, lesquelles montrèrent les différentes zones de cantonnement dans le fort. Les béliers furent cantonnés au même endroit, tandis que les barbes purent vaquer à leurs occupations. Certains, ceux qui n’avaient plus vu la capitale depuis avant le Voile, décidèrent de visiter les tunnels, les accès et les salles dégagés de la roche volcanique. Rendre un hommage à feu le Roi Garmin, dont la stèle fut tracée quelques années auparavant, et arpenter les couloirs séculaires que des poilus acharnés s’efforcent de restaurer du mieux possible. Cette tâche était un véritable honneur pour les clans sachant magner le marteau, l’enclume et la forge, la pioche et les pelles, l’architecture et les constructions. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les barbes ne ménageaient pas leurs efforts. D’autres, enfin, rendirent honneur à un autre art maîtrisé depuis des cycles : l’art de brasser l’alcool, et celui de le boire fièrement. Bref, ils vaquèrent à leurs occupations.

Ne pouvant rencontrer le roi, Harald se contenta de remplir son devoir, à savoir, se faire connaître auprès des barbes qui organisent l’expédition placée sous la bénédiction du Groman-Rik. Montant des escaliers aux marches usées à moitié restaurées, il se dirigea tant bien que mal jusqu’à ce qui semblait être un bureau de recrutement. Imaginez sa surprise lorsqu’il vit que toutes les rumeurs furent enfin corroborées. Une elfe noire. Une oreille sombre. Une Drow ! Ici ! A Fort Garmin, la dernière porte connue ouvrant sur les ruines de la capitale Naine ! Le dernier étranger à être arrivé aussi prêt de ce sanctuaire Dawi… A vrai dire, Harald ne s’en souvenait même plus.

S’approchant avec assurance – la même que tous les autres poilus confiant en eux -, il ne put réprimer un rictus nerveux dissimulé par sa longue et épaisse barbe, mais bien visible par l’immobilité qui vint saisir son corps. Il ne bougea plus, son regard fixé dans celui de cette elfe sombre, côtoyée par une barbe qui semblait bien habitué à cette présence saugrenue. Heureusement pour Harald que sa barbe dissimule convenablement le bas de son visage, sous peine de quoi, tout le monde ici-bas se trouverait gêné par l’ambiance subitement tendue. Il faut dire que la dernière fois qu’Harald avait fait face à un Drow, c’était à Almis, lors de sa reconquête face à Dun Eyr et ses fanatiques. Là aussi, sa stupeur fut totale, mais la violence des combats l’obligea à se sortir de sa torpeur pour faire face, sous les ordres de Thorgrel Poing-De-Fer. Il abandonna enfin l’Elfe sombre du regard pour le rediriger sur celui de la barbe qui notait les noms des volontaires. De sa voix forte, grave, à l’accent trempé, il s’exprima en Khazalide :

- Baruk ! Harald Barbe-Sanglante, Gazanundi de Lante ! Qu’est-ce que cette foutue oreille noire fou ici ?! Est-ce réellement elle qui a redécouvert la cité de nos aïeux ?

Nul doute dans l’esprit de Harald que cette elfe ne connaissait rien du dialecte des Nains. Mais sans doute que le langage non verbal et le regard acéré de Harald parlait d’un langage universel, qu’elle comprendrait fort bien. L’opiniâtreté légendaire des nains, l’entêtement et la méfiance envers les autres races se démontraient à cet instant. Nul doute que l’Elfe, présente en Zagazorn depuis quelques temps, a certainement déjà fait face à tout cela maintes et maintes fois.

À la remarque lancée par le Gazanundi, le guide de la daedhel se fendit d’un sourire amusé, se transformant bien vite en un rire gras qu’il ne put contenir. Quant aux quelques dawis qui patientaient aux alentours, ils ne pipaient plus mot. Jetant un œil à la daedhel dont le regard passait de l’un à l’autre, Gondur opina du chef.

- Ce n’est pas au goût de toutes les barbes, mais il semblerait pourtant bien que ça soit exact.

- À vrai dire… Nous étions deux. Intervint la daedhel en affichant un léger sourire. Mais oui, c’est bel et bien vrai.

Ceci démontrait que la noirelfe, quand bien même son accent laisser à désirer, comprenait et était capable de parler le khazalid. Si elle pouvait être encore hésitante sur certains mots, elle semblait en utiliser d’autres bien fréquemment.

- Dois-je en déduire que des dawis de Lante souhaitent se joindre à l’expédition ? Demanda la drow en regardant Gondur et Harald l’un après l’autre. Ou seule la curiosité vous a mené jusqu’à nous ?

- Je doute que le Gazanundi se soit déplacé uniquement pour satisfaire sa curiosité. Rétorqua le guide en se levant de sa chaise avec un sourire. C’est la gloire qui vous intéresse Harald Barbe-Sanglante ? Ce serait un honneur de vous avoir à nos côtés lorsque nous pénétrerons dans la cité !

Derrière, se pressait une vieille barbe apportant un épais registre. Il passa devant tout le monde sans la moindre gêne, pour déposer le fameux registre sur la table.

- Tout est bon. Nous faut plus de bras, c’est tout. Lança-t-il en tournant les talons sans rien ajouter de plus.

Gondur se pinça l’arête nasale et tira le registre vers lui. Son paternel n'était pas très loquace et avait tendance à aller trop droit au but. Cette nouvelle était pour le mieux en tous les cas, car malgré que le mot n’avait été donné qu’aux thanes, et que cela ne les avait pas tous enchantés, la rumeur avait tendance à se répandre dans Fort Garmin malgré tout.

- Soit… Harald Barbe-Sanglante, vous joindrez-vous à nous ? L'heure du départ approche à grand pas.

Qu’Ikthor foudroie cette oreille-noire ! Elle parle Khazalide et elle semble fière de sa découverte et de sa présence ici ! Immédiatement après avoir entendu la réponse de la Drow, Harald lui lança un regard plein de hargne et de colère. Les derniers Drows qu’il avait rencontré jusqu’ici gisent encore dans les environs d’Almis, à l’état d’ossements rongés par le temps, les neiges et éboulements de terrains. Subrepticement, le vieux guerrier eut l’image de tous ces Drows qui jonchaient le sol alors qu’il quittait Almis après une troisième reconquête. Ils furent nombreux à tomber durant cette épopée, pour le plus grand plaisir du Gazanundi qui était encore capitaine de régiment. Cette image allait disparaître aussi vite qu’elle était apparue, moins par respect que par sagesse, car cette expédition demeurait importante malgré une naissance illégale. Comment des frères avaient pu enfreindre les ordres royaux et laisser une étrangère vagabonder sur les terres du Zagazorn en toute illégalité ?

La question emprunte d’acidité que l’Elfe lui adressa l’irrita encore plus. Cette Drow avait déjà eu de la chance qu’une patrouille, qu’aucun garde, qu’aucun clan ne l’ai vu. Elle aurait pu se faire attraper, se faire arrêter… Se faire exécuter. Une autre Elfe sombre dont le sang aurait empoisonné la terre du Zagazorn, encore une fois. Se doutait-elle seulement de l’incroyable chance qu’elle avait d’être encore en vie, quand bien même elle avait trouvé l’antique cité, et apparemment suffisamment de preuve pour que le Roi lui-même donne l’accord d’une expédition de reconquête ? Se doutait-elle seulement de qui était Harald ?

Heureusement, le frère qui se trouve à ses côtés semble vouloir calmer la situation, tandis que Harald ne répond que par grognements, regards acérés et mouvements de barbes nerveux. Il faut dire qu’il doit être impressionnant, Harald. Doté d’une carrure musclée, son visage porte une grande cicatrice s’étendant de l’œil gauche jusqu’en-dessous de l’œil droit, en passant sur l’arrête du nez. Ses yeux bleus transcenderaient presque l’acier, et surtout, il dispose d’une armure de plate complète, d’un noir de jais complété de formes géométriques rouge carmin. Des anneaux dorés se trouvent sur sa jupette de plate, et il porte la traditionnelle cape de Lante, majoritairement de couleur rouge. Cette armure a elle seule lui permet de sortir des rangs, alors que les troupes de Lantes sont dotées d’armures rouges très visibles. Nul doute que le Nain présent avait mesuré le personnage qui se trouvait face à lui, et pourtant, la seconde partie de sa phrase fut plus que déconcertante. La gloire ?

Qu’est-ce que la gloire, sinon une ambition bassement humaine qui pousse le plus vile à trahir son frère et le plus ambitieux à vendre ses parents pour pouvoir graver son nom sur une pierre ? Qu’est-ce que la gloire sinon une volonté égoïste, motivée par et pour soi-même, qui caractérise tant les longues-jambes et les oreilles-pointues ? La gloire ?! Non, bien sûr que non !

Un sentiment de frustration et de colère étreint Harald. Les poilus qui fréquentent la noiraude doivent être à ses côtés depuis trop longtemps, pour penser de manière si… Elfique. Il frappe de son poing ganté d’acier sur la table, en signe de colère.

- Pourr la gloirre ? Vous êtes-vous perrdus vous-même pour rréfléchirr comme des Elfes ?! Si Lante a fait le chemin jusqu’à Forrt Garrmin, ce n’est pas pour la gloirre d’un Dawi ! C’est pourr rretrrouver la cité de Molgrrun, la cité de nos aïeux ! C’est pourr la gloirre du Zagazorrn ! Pisse lait !Dit-il avec son accent très prononcé, avant de baisser le regard, conscient de l’emportement quelque peu démesuré mais si caractéristique du guerrier.

Un Nain au visage bourru et à la panse proéminente apporte un registre énorme sur lequel figurent plusieurs runes que Harald peine à lire. Lui et son interlocuteur échangent quelques mots, et l’interlocuteur retourne vers Harald. Il savait pourquoi il était là, et l’extrême importance de ce qui est en train de se jouer. Après le Voile, après l’effondrement de Kirgan et les conquêtes et reconquêtes d’Almis, une cité antique, oubliée depuis des cycles, pourrait symboliser un renouveau pour le Zagazorn, après tant d’années sombres et difficiles.

-Bien-sûrr que je me joins à vous ! Dit-il d’une voix sourde, presque un grognement. Harald Thormundson, dit « Barbe-Sanglante », Gazanundi de Lante et Thane du clan Brise-Os. Avec moi marchent 30 cognards montés sur autant de béliers de guerre, et une cohorte de 30 poilus et bavettes des clans bâtisseurs, ingénieurs, cueilleurs, forgerons, chasseurs, éleveurs et miniers, et une trentaine de béliers de transport.

Bien-sûr, l’éternel caractère trempé de Harald n’aidait pas à la discussion, mais que voulez-vous… Les Nains sont rudes autant en affaire qu’en terme de tolérance, surtout depuis la malenuit…

Gondur plissait les yeux sans pour autant ciller ou regarder ailleurs que vers son interlocuteur, tandis que la daedhel observait le paternel de son guide repartir sans lui avoir adressé un mot ni même un regard. Enfin, le dawi baissa les yeux sur sa table abîmée par le poing du Gazanundi et se fendit d’un léger sourire derrière sa barbe broussailleuse. Il échangea un regard avec la daedhel qui afficha à son tour un discret sourire en coin.

Harald était agacé par la vue d’une oreille un peu trop longue et ulcéré par sa couleur grisâtre, sous-entendre qu’il avait fait le déplacement pour la gloire personnelle le courrouçait assez pour le décontenancer. Cependant, il était prêt à mettre ceci de côté pour se joindre à l’expédition non pas pour lui-même, mais bel et bien pour le peuple nain.

- Voilà qui fait plaisir à entendre. Je gage que les barbes vous suivant soient de la même trempe que la vôtre Harald Barbe-Sanglante ! S’exclama Gondur en ouvrant son registre à lui, et non pas celui qu’on venait de lui apporter.

La barbe tournait les pages, plusieurs noms y avaient été rayés, quelques-uns entourés. Armé de son fusain, il écrivit le nom de Barbe-Sanglante, traça un cercle autour et referma son registre d’un coup.
Sa méthode était rondement huilé, le faciès de la noiraude couplé à une question pouvant se révéler irritante, voire insultante, pour ceux qui voyaient en cette expédition plus une cause qu’un intérêt personnel, avait tendance à permettre de faire le tri.

- Et avec une telle cohorte de frères et sœurs du Zagazorn… Je vous avouerai que cela comble toutes nos espérances. Déclara Gondur, visiblement ravi, en jetant un œil à la daedhel qui acquiesçait dans un sourire. Le départ est prévu pour le début de l’ennéade prochaine, les vôtres seront-ils prêts ?

Les yeux bleu acier de la noiraude ne quittaient pas le nain, attendant d'observer sa réaction avec un léger sourire sur les lèvres. Au premier abord, les dawis lui étaient toujours un peu hostiles, mais cela ne l'empêchait pas d'être heureuse de la tournure des événements.

Un vrai dawi est toujours prêt, altrommi ! s'exclama une voix rocailleuse depuis l'entrée de la pièce.

Le nain qui venait d'entrer dans la maison de Gondur était nettement plus âgé qu'aucun des autres présents et son vieux visage buriné par les ans reflétait une longue vie pleine d'épreuve, mais l'éclat d'acier qui brillait dans ses yeux demeurait vif et acéré comme le diamant. Hardrek Poing-de-Fer, suzerain du Zagazorn, fit signe aux gardes qui l'accompagnaient d'attendre à l'extérieur tandis que lui-même s'approchait de la table où se tenait la discussion tout en observant attentivement les participants. Il s'avérait difficile de lire dans son regard les émotions qui pouvaient agiter la caboche royale, mais une méfiance non dissimulée s'y devinait cependant lorsqu'il observait la daedhelle. La lourde pogne royale s'abattit amicalement sur l'épaule du Gazanundi lorsqu'Hardrek arriva à sa hauteur.

C'est toujours une joie de te voir, Harald-Azul.

Azul... un adjectif désignant un métal ferreux de bonne qualité mais qui pouvait également être ajouté au nom d'un dawi pour indiquer qu'on le considérait comme une personne d'une fiabilité à toute épreuve. Le Gardien des Plaines faisait partie de ceux sur lesquels Hardrek savait pouvoir s'appuyer quelles que soient les circonstances. Rude voire brutal mais d'une loyauté sans faille envers le trône, un dawi selon son cœur. Rien d'étonnant à sa présence en ce jour ; car même si le Gormanrik avait ordonné de limiter les nouvelles relatives à la découverte de la cité perdue tant qu'une expédition n'en aurait pas confirmé la réalité ; il s'avérait impossible d'empêcher les cognards de parler d'un événement d'une telle ampleur. S'installant face à la longue-jambes, le vieux dawi reprit la parole :

T'sisra Do'ath... sans les outils du forgerune et la brynduraz que vous avez amené, même les sages recommandations de Grimelda ne vous auraient pas évité de goûter à nos cachots pour vous apprendre à respecter nos lois. Les terres du Nord sont fermées aux elgis et votre père adoptif ne pouvait ignorer le crime qu'il commettait contre sa propre race en vous laissant les fouler.

Le regard royal parut s'apaiser et le feu qui brûlait dans ses pupilles diminua d'intensité.

Mais parfois le mineur doit employer de bien étranges voies pour trouver un filon prometteur. Êtes vous une dawongi envoyée par le destin, ou tout ceci n'est-il qu'un kruk ? J'ai choisi de croire à votre histoire et d'autoriser cette expédition, ne me faites pas regretter ma magnanimité.

Le rappel à l'ordre était clairement à destination des dawis qui auraient trop rapidement baissé leur garde et considéreraient déjà la daedhelle comme une alliée. Membre d'une race fourbe et perfide, T'sisra demeurait sous surveillance et le roi venait d'indiquer qu'elle ne pourrait être considérée comme fiable que si l'expédition s'avérait réellement obtenir le succès espéré. Les dawis sont par nature portés à la méfiance et n'accordent pas aisément leur amitié envers des étrangers, ce qui contrebalance la fidélité adamantine qu'ils portent ensuite à ceux devenus leurs amis. Délaissant temporairement T'sisra, Hardrek se tourna vers le dawi qui remplissait le registre.

Alors, Gondur. Avec les renforts du Gazanundi, êtes-vous en capacité d'atteindre le site recherché ?

Il était redressé de toute sa stature de Nain : peu grand par la taille, mais bien large par les épaules. Il regardait le Dawi qui notait les informations sur un registre de vélin, sa tête rentrée dans ses épaules appuyait sur sa grande barbe sombre qui se soulevait et masquait une partie de son visage. Une telle position n’était pas agréable pour faire face à son interlocuteur assis, mais c’était un moyen comme un autre de marquer son rang, et surtout, de montrer sa fierté tout en rappelant le caractère éphémère de cette association. Les mots du Dawi nommé Gondur flattaient Harald, qui voyait là une tentative rondement menée de désamorçage de situation, tout comme un remerciement pour l’aide inattendue pour cette quête… Toute aussi inattendue.

Lorsque soudain, une voix résonna derrière eux. Harald cru reconnaître la voix, bien qu’il pensa, de prime abord, que ce n’était pas lui l’altrommi dont parlait l’illustre personnage dans son dos. Harald n’était pas le plus vieux des Dawis du royaume, mais du haut de ses 165 ans, il n’était pas tout jeune non plus.

Il se retourna et vit que la voix n’était autre que celle d’Hardrek, souverain du Zagazorn et ancien du clan des Poings-De-Fer. Il s’avança vers Harald et ses précédents interlocuteurs. De son pas assuré et de toute sa prestance, il fit place nette dans cette pièce, surpassant – et de loin – tous les êtres présents ici. Lorsqu’il s’approcha de Harald, ce dernier baissa la tête et les yeux, et plaça son poing droit sur son cœur. Il le fit avec force, et le bruit du poing ganté sur l’armure rendit un écho semblable au son sourd d’un bouclier. Puis il plaça sa main d’acier sur l’épaule de roc du Roi.

- Plaisir partager Groman-Rik ! Vous voir en ces lieux est un véritable honneur ! Il prononça ses mots en baissant à nouveau son visage vers le sol en signe de respect, après quoi, il retira sa main et la porta à nouveau à son cœur, avant de s’écarter quelque peu.

Il se déporta un peu de côté, afin de laisser au Roi toute la place nécessaire au but de sa venue. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le Roi avait un message à faire passer. Alors qu’il rappelait à la Noirelfe, les funestes conséquences qui auraient pu lui être appliquées si elle n’avait pas eu les mythiques objets en sa possession, Harald croisa ses bras et plaça son regard acéré en direction de T’sisra. Il était heureux que la dureté de ses propos soit corroborée par l’éloquence du Roi. Toutefois, le Roi fit preuve de magnanimité, mais également d’intelligence et d’indulgence. Harald comprit alors que ces paroles s’adressaient non seulement aux Dawis qui côtoyaient la Daedhelle, mais également à lui. Si la Daedhelle devait voir à quel point le suzerain était magnanime, Harald devait aussi comprendre que cette quête était importante, et que le Roi lui-même ordonnait – sans pour autant avoir besoin de clairement le dire – que tout se fasse le plus aisément possible, afin de retrouver réellement cette antique citée. Il comprit alors que son caractère rustre et rude devait être quelque peu contrôlé, afin que cette expédition soit un franc succès et non un cuisant échec.

Gondur mit une bonne seconde avant de réaliser quelle était l'identité de l'illustre barbe qui venait de faire irruption chez lui, ce n’était nul autre que le Roi du Zagazorn. S’étant raidi en premier lieu, il inclina le buste dans la foulée et écouta parler Hardrek sans moufter. Bien sûr qu’il n’avait pas baissé sa garde, quand bien même il ne quittait pas l’étrangère d’une semelle et qu’il l’avait, jusque-là en tout cas, trouvée plutôt sympathique et coopérative, il n’en oubliait pas moins les enjeux.

- Alors, Gondur. Avec les renforts du Gazanundi, êtes-vous en capacité d'atteindre le site recherché ?

Le dawi releva le nez, il sentait le sol se dérober sous ses jambes. Cette expédition de ne devait pas être un échec, il jouait tout là-dessus.

- Pour sûr que je l’peux ! S’exclama-t-il en tournant la tête vers la noiraude. Tant que l’elgi ne se perd pas et en retrouve le chemin. Dans le cas contraire, je ne réponds plus de rien et elle en assumera les conséquences.

- Je saurais en retrouver le chemin, ne vous en faites pas. Je peux comprendre la méfiance, et sachez que mon père restera ici à Fort Garmin. Donc sous bonne surveillance. Précisa-t-elle comme pour apaiser les craintes. Quoiqu’on puisse en penser, je suis un agneau dans la tanière des loups et je leurs montre mon flanc. Mon sort dépend des dawis désormais, j’ai confiance car je sais le peuple du Zagazorn juste et droit.

Elle marqua un temps d’arrêt avant de tourner le regard vers le roi.

- Je n’abuse pas de la confiance des gens et je suis consciente de la chance que vous m’accordez. Vous ne serez pas déçu. Aucun d’entre vous ne le sera. Conclut-elle en passant de l’un à l’autre sans ciller. J'en fais la promesse.

Un regard appréciateur naquit dans l’œil d'acier du suzerain face à l'enthousiasme de l'altrommi. Hardrek appréciait de voir ainsi la nouvelle génération de dawis relever fièrement la tête après les épreuves du Voile et l'infâme trahison du Père. De même qu'un médecin encourage le patient qui se lève de son lit et fait ses premiers pas, un suzerain se réjouit lorsque son peuple fourmille d'énergie et de motivation.

Bien, Gondur. On m'a rapporté le sérieux et la rigueur avec lesquels vous avez effectué les préparatifs, j'en suis heureux.

Un compliment bref mais rare, le Gromanrik n'étant pas connu pour exprimer aisément sa satisfaction. Fallait-il que la recherche de la cité perdue ait profondément titillé son intérêt pour qu'il se laisse ainsi aller ! Mais il s'avérait peu probable qu'Hardrek soit venu uniquement pour s'enquérir des préparatifs comme le démontra la suite de ses propos :

Harald Barbe-Sanglante portera ma voix durant votre expédition. J'ai une totale confiance en lui pour prendre les décisions qui s'imposeront face aux épreuves.

Les mots du roi ne prêtaient ni à contestation ni à ambiguïté : le Gazanundi de Lante se voyait clairement attribué l'autorité sur l'ensemble des dawis qui participeraient à l'expédition. Certes il en porterait aussi ce faisant la responsabilité, mais les robustes épaules du Thane des Brise-Os pouvaient supporter pareil fardeau. Se tournant vers T'sisra, Hardrek la regarda longuement comme pour jauger dans des balances connues de lui seul la sincérité qui pouvait transparaître dans ses dires.

Si tu parles vrai, elgi, alors le Zagazorn tout entier saura t'en être éternellement reconnaissant car aucun dawi ne mésestime l'importance de la cité de Molgrun. Mais si tu te joues de nous ou que tu nous trahis, notre vengeance sera si terrible qu'elle entrera dans la légende. Puisses Heidum être le garant de ce serment !

Sur ces paroles, le roi quitta la pièce, laissant les participants à l'expédition régler les derniers détails.

[HRP : bon voyage !]