[An XVI] Le fantôme dans les bois | Miriel

Arcamenel, huitième ennéade de Verimios,
Année XVI du Onzième Cycle,
Bois de l'Esterel, Marquisat de Sainte-Berthilde,
— avec Miriel

Sur la route principale menant au Theil, Andran voyageait doucement, comme s'il n'était pas pressé par le temps. Cela faisait déjà quelques jours que circulaient des rumeurs d'un fantôme qui rôdait dans le bois, notamment parce que ceux qui y allaient disparaissaient. Andran était quasiment sûr que ce n'était pas le fait d'un "fantôme", mais plutôt d'un criminel qui cachait ses cadavres. Cela dit, les raisons pouvaient être variées. Le Bois de l'Esterel était beaucoup plus dense que les autres dans lesquels il avait pu s'aventurer seul. Mais le chevalier avait insisté sur le fait que cet endroit n'était pas dangereux, et que d'autres affaires nécessitaient plus de chevaliers sur le terrain. Le chevalier descendit de sa monture, conscient que son destrier ne lui sera d'aucune utilité dans ce bois. Il confia son cheval à l'ancien qui avait appelé les chevaliers à l'aide. Après avoir étiré un sourire rassurant, il s'enfonça dans les arbres, disparaissant rapidement du champ de vision de l'ancien.

Prêt à en découdre avec d'éventuels criminels, Andran ne s'était pourtant pas trop lourdement équipé. L'armure de plates est à éviter dans les forêts, à moins d'être fou au point de vouloir être audible à une longue distance. Cela dit, il avait gardé ses brassards, son casque, mais le reste (plastron, jambières, épaulières) n'était qu'en cuir bouilli, solide mais moins que les armures lourdes. Il avait sur-vêtu le tout de son tabard, et d'une cape noire simple. Il sera discret, certes, mais si le nombre vint à jouer en sa défaveur, le chevalier aura tout de même peu de chances d'y réchapper.

Le chevalier avançait lentement, essayant d'une part de garder quelques repères en tête, tout en essayant de trouver le moindre indice pouvant le mener à sa cible. Mais le sol était normal et régulier, pas un bruit, pas une odeur, rien ne semblait hanter ces bois, et encore moins l'habiter criminellement. Sans pour autant savoir pourquoi, le chevalier continuait d'avancer, toujours prudemment, comme s'il savait qu'il y avait quelqu'un, et que les gens qui étaient venus dans ces bois ne s'étaient pas simplement perdus. C'est pourtant à force de persévérance que l'on réussit à toucher au but, n'est-ce pas ? Ce n'est que trop vrai. Un peu plus loin, où les arbres encerclaient une petite zone verte qui laissait passer la lumière. De loin, Andran voyait une silhouette, qui n'était pas un fantôme, pour sûr.

Il s'approcha prudemment et silencieusement. De là où il était, il ne pouvait pas savoir qui c'était. Au fur et à mesure, il pouvait distinguer certaines caractéristiques d'une personne qui était visiblement seule. Une silhouette plutôt fine, alors que, souvent, les bandits étaient plutôt trapus, si ce n'est gros ou massif. Peut-être était-ce une femme ? Rare ne signifie pas impossible. L'inconnu avait une épée. Andran s'approcha toujours plus prudemment, voulant éviter de l'alerter son éventuelle cible. Son habillement était plutôt étonnant, d'ailleurs, mais elle avait une épée, donc c'était une personne potentiellement dangereuse. Mais cela ne prouve rien : ni les disparitions, et encore moins la mort non-avérée des personnes perdues qui ne sont pas revenues de ces bois. Andran resta là, pensif. Il était caché par un épais feuillage, et par des troncs plutôt épais. Il avançait de tronc en tronc, préférant tout savoir avant d'agir, quelque soit la manière.

Une fois suffisamment proche, le chevalier put distinguer son visage. C'était bien une femme. Elle avait l'air très jeune, si ce n'est une adolescente. Surtout, elle avait un teint d'une blancheur effrayante, on dirait presque qu'elle était malade. Peste ? Lèpre ? Qui sait, Andran n'y connait pas grand chose. Le dernier détail qu'il voyait était ses oreilles pointues. Une elfe, ici, au cœur du Marquisat de Sainte-Berthilde ? Comment était-ce possible que personne n'en ait parlé ? Un seul moyen de répondre à cette question.
Le chevalier prit son courage à deux mains, et s'avança des fourrées. De toutes façons, il ne pouvait pas se permettre de l'assassiner de sang froid, et encore moins sans preuve. Alors, il était obligé de passer par le dialogue. Cela dit, le chevalier resta très distant. On ne sait jamais, si elle est malade. Le chevalier gardait quand même les mains proches de la garde de son épée, prêt à réagir face à tout acte agressif.

« Je ne sais pas ce qui vous amène ici, Elfe. Mais je crois que ces terres ne sont pas les meilleures pour accueillir les gens de votre espèce. » dit-il d'une voix forte et sèche, sans même être sûr qu'elle parlait le langage du Nord de la Péninsule. « Mais… Comprenez-vous notre dialecte ? » finit-il par lui demander.

Le chevalier fit deux pas de côtés, gardant les yeux rivées vers l'inconnue. Il ne savait pas vraiment comment s'y prendre. Elle paraissait si jeune et pourtant si inamicale. Très difficile de juger ce genre de personne rien qu'à leur physique. Puis, la question dévorant son esprit, il ne put s'empêcher d'agiter la main devant le visage pour insister sur sa couleur de peau.
« Est-ce normal d'être… aussi blanc ? » tenta Andran, partagé entre la curiosité et un semblant de crainte. Cela se voyait à ses sourcils froncés. Il n'avait jamais vu d'elfes, ou du moins très peu, c'est bien vrai, mais un tel teint fait forcément l'objet de contes ou de légendes en tout genre, non ? Le chevalier avait déjà vu des drows, l'extrême inverse de ce qu'il voyait là, mais il savait déjà comment ils étaient avant de les combattres. Tandis que là…

Marquisat de Sainte-Berthilde, VIIIe  ennéade de Verimios, An XVI

Elle pouvait sentir le vent souffler dans ses cheveux. Elle pouvait sentir l’odeur de la terre. Le vent légèrement plus frais que celui de l’Ithri’Vaan. Les yeux mi-clos, l’hybride savoura l’odeur de la nature, la saveur de la liberté. Voilà déjà plusieurs ennéades qu’on lui avait donné sa liberté. Pardon, pas donné, mais qu’elle avait réussir à la reprendre – à la conquérir, elle avait dû montrer à son maître de quoi elle était capable, et après avoir prouvé qu’elle était devenue une machine à tuer, un être dépourvu d’émotion, le sombrelfe lui avait donné sa liberté. C’était un prix qui avait été très cher payer. L’hybride avait l’impression de ne plus avoir d’émotion, elle pouvait tuer sans regret, alors qu’il y a quelques années, elle avait un code de conduite assez stricte. La mort ne lui faisait plus peur, la douleur ne lui faisait plus d’effet, mais au contraire la motivait. Un dur rappel des supplices horrible qu’on lui avait fait subir…

Néanmoins, elle se décida à partir en péninsule, terre qui ne lui semblait en aucun cas accueillante, mais qui était un peu plus sûre que Thaar. Là, au moins, personne ne pouvait savoir qu’elle avait un prix sur sa tête et apparemment, qu’en péninsule, l’esclavage était interdit. Finir en prison lui semblait légèrement plus attrayant qu’être le jouet d’un maître déviant… Son voyage dans Sainte-Berthilde avait loin d’avoir été le plus calme. Des enfants étaient rapidement tombés sur son camp de fortune, et ces derniers allèrent rapidement sonner l’alarme à leurs parents. Leur murmurant qu’il y avait un « fantôme », une dame toute blanche qui rôdait dans les bras. Certains parents pensèrent que ce n’était qu’un racontar, qu’une histoire de peur que les enfants avaient inventé dans leurs esprits un peu trop créatifs, mais après avoir vu l’insistance de ces derniers, quelques hommes armés décidèrent d’aller enquêter. Mais cela n’avait jamais bien fini pour les intrus qui se montraient un peu trop agressifs pour l’hybride…

***

Cela faisait quelques jours déjà que la jeune hybride avait chassé les hommes. Elle espérait sincèrement de pas faire d’autres rencontres infortuite, se disant que cette fois, elle ne les manquerait pas. Elle leur avait laissé une chance, une chance de s’en sortir vivant, mais on disait que les hommes étaient des créatures butées qui n’apprenaient pas.  Mais pour être sûre, elle décida qu’il était le moment de partir. Mieux valait éviter que les rumeurs se répandent et que cela attire de malheureuses âmes un peu trop près d’elle. Ce fut un craquement qui attira son attention. L’hybride redressa la tête alors que le bout de ses oreilles se dressait, quelqu’un ou quelque chose approchait… Elle se redressa, avant d’observer les alentours de ses pupilles grisâtres. Définitivement les humains n’avaient pas appris leur leçon encore!  La jeune hybride se retourna à une vitesse fulgurante afin de faire face à l’homme qui venait d’arriver dans son repaire temporaire. Miriel mit sa main sur le pommeau de son épée prête à réagir. Mieux valait être prête à toute éventualité… Surtout qu’elle savait pertinemment qu’elle n’était pas la bienvenue dans ses bois. Elle pencha doucement la tête sur le côté, détaillant chaque centimètre de ce nouvel adversaire qui venait de se présenter. Il était évidemment armé et  semblait savoir comment s’en servir. Définitivement rien à voir avec la racaille qui avait osé l’affronter il y a quelques jours. Ses oreilles se dressèrent rapidement lorsque ce dernier commença à lui parler. Son ton était froid et sec, décidément il n’avait pas besoin de mentionner qu’elle n’était pas la bienvenue, il lui faisait très bien savoir. Elle l’observa se déplacer un peu, sans rien dire. Devrait-elle feindre l’innocence, faire comme si le dialecte de l’homme était en aucun cas incompréhensible? Ou au contraire, devrait-elle se montrer un tant soit peu compréhensive? La situation lui semblait assez similaire à ce qu’elle avait vécu en Anaeh, lorsqu’elle avait rencontré l’intendant aux Ressources de Daranovar. Certes, elle était beaucoup plus jeune  lors de cette rencontre, et disons que ses capacités martiales s’étaient assez développées lors de son dernier – disons – séjour au Puy.  Avant même qu’elle ne puisse ouvrir la bouche pour répondre à son interlocuteur, ce dernier reprit la parole en montrant son visage.


Vraiment?


L’hybride resta abasourdi pendant quelques secondes, regardant l’étrange humain avec stupéfaction. C’était cela la première question qui lui passait à l’esprit? Pas le fait qu’elle est écorchée quelques humains, pas le fait qu’elle est terrorisée des enfants pour avoir la paix dans ce bois… Non. Le fait qu’elle soit plus blanche que la neige était la première question qui franchit ses lèvres… Après la stupéfaction, la demie sombre-elfe ne put s’empêcher de rire. Un rire innocent, presque cristallin. Un rire qui aurait pu la faire passer un peu plus humaine, un peu plus chaleureuse. Puis reprenant son calme, non sans laisser tomber son sourire; elle lui répondit dans sa langue. « Non, ce n’est pas normal. Pas pour vous ni pour personne d’autre. » Certes, elle avait un fort accent de l’Ithri`Vaan, mais l’humain pourrait la comprendre assez aisément s’il faisait attention à ce qu’elle disait. Elle plongea ses prunelles grisâtres dans les siennes avant d’avancer vers lui de quelques pas. Elle pouvait bien voir cette légère inquiétude dans ce regard, il ne savait pas à qui ou à quoi il avait affaire et soyons honnêtes – l’inconnu était toujours  dangereux. Miriel promena son regard de haut en bas, détaillant l’humain sans se cacher. Elle tentait de découvrir la moindre faiblesse ainsi que la moindre menace. L’homme semblait beaucoup plus costaud qu’elle, et un combat en corps à corps s’annonçait des plus difficiles… Si elle voulait l’attaquer, elle devrait faire preuve de fougue et surtout d’énormément de vitesse. Soudainement son visage se referma, redevint de marbre, sans expression avant qu’elle ne fasse un pas de plus dans sa direction, tenant de pousser jusqu’à qu’elle point l’humain aurait peur d’elle. «  Je me doutais bien que ces terres ne seraient pas si accueillantes, d’où le fait que je me suis terré dans cette forêt pour finir ce que j’avais commencé. » Miriel eut un léger sourire en coin avant de baisser le regard en haussant les épaules; caressant doucement le pommeau de son épée ; « Mais il me semble que certaines personnes sont attirées par le danger. » L’hybride releva le regard pour le planter une nouvelle fois dans celui de l’humain, reprenant rapidement son air sérieux. Elle avait évité de répondre à sa remarque sur le fait qu’elle était Elfe. À quoi bon? Ce dernier la chasserait probablement encore plus vite s’il apprenait qu’elle était à demi drow. « Vous m’avez l’air d’une personne censée. Ne me forcez pas à vous chasser comme je l’ai fait avec les autres. »

Le chevalier fronça les sourcils. Il était partagé entre la curiosité et la crainte. La simple vue de cette fille lui faisait oublier ce pourquoi il est venu. Des disparitions. Pourquoi s'attarder sur elle plutôt que sur ses faits (ou ses méfaits) ? Voilà une bonne question. Puis il l'entendit rire, sans réellement savoir pourquoi. Cela ne le rassurait pas vraiment. Andran fit de nouveau quelques pas de côté. Il ne connaissait pas le talent de cette personne, et, aussi doué puisse être le chevalier au combat, personne n'est à l'abri de tomber sur plus fort que soi. Ce n'est jamais arrivé à Andran, puisqu'il est toujours en vie, mais le but n'est tout de même pas d'ouvrir les bras à la mort.

Toujours prêt à dégainer sa lame, le chevalier dévisageait l'étrange créature qui lui faisait face de la tête aux pieds. Rien de bien lourd dans son équipement. Si elle prend un coup, elle est morte, mais encore faudrait-il réussir à la toucher ? Avec son attirail, elle peut facilement bouger. Force contre agilité ? Cela ressemble presque à un classique. Le chevalier, aussi prudent était-il, tendait l'oreille. Il comprit rapidement que c'était elle, le "fantôme".

« Finir ce que vous avez commencé ? Et qu'est-ce que c'est ? Des rituels au nom d'Arcam ? » rétorqua moqueusement le chevalier, sourire narquois aux lèvres. « Et je crois bien que nous sommes deux personnes attirées par le danger. Ça nous fera ça en commun, pas vrai ? »

Pourquoi les sarcasmes ? En prenant du recul, même Andran ne sait pas vraiment. Enfin, si, il sait. Est-ce intelligent ? Ça c'est une autre question, mais c'est plutôt celle-ci qu'il faudrait se poser. En tout cas, il a eu tort de minimiser le danger que représentait le "fantôme". Ou alors elle joue les dures pour être tranquille. Cela dit, quelle idée de venir en Péninsule. C'est comme si le chevalier allait au Puy d'Elda pour fuir un quelconque danger. Ça n'a absolument aucun sens.

« C'est bien. Vous savez pourquoi je suis là. C'est tout de même curieux de l'admettre alors que je n'ai rien dit à ce sujet. » reprit-il, toujours avec ce même ton moqueur.
« Mais… "chasser", vous dites ? Si on joue sur les mots, cela signifie que ceux qui ont disparus ne sont peut-être pas morts ? » Le chevalier ignora les menaces de l'inconnue, comme si elle n'était pas sérieuse. Pourtant, le ton semblait sérieux, lui… et l'épée aussi. Elle semblait vouloir en découdre. Le chevalier, de sa main gauche, tenait l'épée par sa garde, commençant légèrement à la sortir du fourreau.

« Ceci dit, admettons que je souhaite rester. Que se passera-t-il ? On va se battre ? Vraiment ? » demanda-t-il d'un ton partagé entre la moquerie et une fausse incrédulité. Ce n'est pas ce qu'il souhaiterait, mais, si c'est ce qu'elle cherche, elle risque de tomber sur un bel os. Andran avait désormais sa main gauche sur le fourreau, et sa main droite sur la poignée. Il essayait aussi de cacher ses positions derrière sa cape noire. Il reprit ses déplacements de côté, même si ses pas n'étaient pas réguliers. Il restait assez loin d'elle. Au moins, il la verra venir.

L’hybride observa l’expression de l’homme devant elle.  Elle pouvait voir que ce dernier n’était pas à l’aise, qu’il se méfiait d’elle. Peut-être avait-il raison? Après tous les péninsulaires n’étaient pas reconnus pour être très ouverts à autrui. Qui plus est on l’avait classé comme un fantôme lorsqu’on l’avait vu la première fois. Une créature toute blanche, en aucun cas humaine… Le chevalier ne serait définitivement pas la première personne à l’appeler ainsi et définitivement pas le dernier. Mais comment dire? Miriel ne pouvait lui en vouloir, elle se savait complètement cinglée, complètement déboussolée, plus rien ne lui faisait peur, plus rien ne l'inquiétait et surtout elle n'avait plus rien à perdre. Lorsqu'il n'avait plus d'espoir, il n'y avait plus de regret et elle l'avait appris bien assez vite. Miriel observa se déplacer de quelques pas vers le côté avant qu’il reprenne finalement la parole.  Il était curieux… Beaucoup trop curieux. Elle n’avait pas besoin de lui raconter sa vie. Qui était-il? Et surtout que voulait-il? Miriel avait l’impression qu’il cherchait la bagarre, il était arrogant, et semblait prendre un malin plaisir à vouloir la provoquer. Elle ferma les yeux en soupirant avant de les rouvrir rapidement, l'air toujours impassible. Puis, commença à avancer de quelques pas vers ce dernier non sans le lâcher du regard. « Je n’en ai rien à faire d’Arcam et des autres dieux. Ils n’ont jamais rien fait pour moi, pourquoi devrais-je leur vouer une adoration? » Miriel savait pertinemment ce qu'elle faisait. En testant l'humain, elle pourrait voir aisément qui il était et surtout quel était son tempérament. Elle avança encore d’un pas avant de continuer; « Je ne suis peut-être pas comme vous, mais cela ne veut pas dire que je suis stupide. »


La demie-drow retira sa main du pommeau de son épée avant de refaire quelques pas vers l’humain. Il était beaucoup plus courageux que les autres qui avaient décidé de s’approcher d’elle. Miriel sentit son souffle s'accélérer légèrement alors qu'elle fit quelques pas vers lui. Et elle avança encore et encore. Jusqu’à ce qu’elle soit qu’à un souffle de son visiteur. Elle était bien consciente de la tension qu’elle créait. Bien consciente des dangers de se trouver à porter de main ainsi de son adversaire. Mais elle avait besoin de le jauger, de connaître ce dernier. Si les autres visiteurs avaient été que des simples paysans, elle pouvait bien voir que ce n’était pas le cas de cet humain-là. Il était trop droit, trop fier. Un chevalier peut-être? Ou un quelconque responsable du Marquisat qui venait vérifier les rumeurs. «  Qui a dit qu’ils étaient morts? Et qui a dit que j’avais quelconques implications dans ses disparitions? » Elle baissa son regard vers l’épée de son adversaire, vérifiant que ce dernier était toujours prêt à dégainer puis releva doucement la tête pour croiser une nouvelle fois son regard.


Miriel eut un sourire en coin, et elle enleva doucement le gant qui protégeait sa main droite, découvrant non seulement sa marque d’esclave, mais de nombreuses cicatrices en tout genre. Elle n’avait pas peur de mourir. L’hybride avait vécu des expériences qui étaient encore plus traumatisantes et douloureuses que la mort. Elle accueillerait cette dernière comme une vieille amie. Miriel repoussa doucement la cape de son visiteur avant de déposer doucement sa main sur le torse de l’humain pour sentir le plastron du chevalier. Cela aurait presque pu paraître pour un geste d’affection, mais elle se doutait bien que l’humain n’était pas dupe et qu’il verrait bien son manège. Elle n’était pas affectueuse, elle voulait simplement voir de plus près l’armure de ce dernier. Miriel baissa finalement son regard de celui de son adversaire pour observer un peu plus près le reste de son équipement. Puis, comme si elle perdu complètement l’esprit, elle releva la tête vers ce dernier. « Ceci dit je ne peux vous forcer à partir ou à rester. La décision est entre vos mains. Il serait dommage d’abimer une telle pièce. » Dit-elle en caressant doucement du pouce  le plastron de ce dernier. Elle aimait bien jouer avec ce dernier, elle le voyait tendu, elle sentait qu’il n’avait aucunement confiance en elle, et ce même si elle n’avait aucunement dégainé son arme.

Les deux personnes semblaient jauger les limites de l'autre. Andran en attendait presque à ce qu'elle l'attaque en premier. Il avait toujours son sourire narquois, provocateur. Il guettait chaque gestes, chaque rictus de cette femme "fantôme". Il était toujours dans l'interrogation. Que fait-elle ici ? Qui est-elle ? Que veut-elle ? Tant de questions, et une personne peu amicale en face de lui. Avec autant de mystères et de secrets qui l'entourent, Andran pourrait presque croire qu'il fait face à son alter ego.

« C'était de l'ironie… » se lassa le chevalier. « Ou un exemple comme un autre, peut-on dire. » dit-il, comme s'il lui proposait une solution alternative à un problème important. Il avait gardé ce ton provocateur et sarcastique. Andran voulait toujours tester les limites de cette femme qui faisait pareil.
« Cela dit, la témérité et la stupidité sont deux choses différentes. »

Le chevalier flirtait toujours avec son épée, alors qu'il s'était immobilisé et qu'elle s'approchait de lui de moins en moins discrètement. Il ne la sentait décidément pas, celle-là. Trop téméraire, et surtout, trop peu amicale et très imprévisible. Et si ce n'est pas que son physique qui suscitait sa méfiance. Elle se jouait de lui, autant que lui se jouait d'elle. Cela ne pouvait pas bien se terminer.
« Personne n'a dit qu'ils étaient morts, je posais une simple question. Mais, force est d'admettre que vos sous-entendus sont douteux. » rétorqua le chevalier, qui, quand ce sujet était en jeu, avait une voix beaucoup plus sérieuse.

Comme quoi sa première impression serait la bonne : elle niera toute accusation "hâtive", qu'elle soit coupable ou non, d'ailleurs. Et, dans le second cas, il ne pourra jamais lui forcer à avouer quelque chose qu'elle n'a pas fait. D'un autre côté, si elle est bien la "meurtrière" ou la cause de la disparition de paysans, cette femme semble trop coriace pour avouer ces crimes sous de simples menaces. Tout serait plus simple s'il avait des preuves autres que des sous-entendus et des rumeurs.

Elle était désormais face à lui. Sa main se crispa sur la poignée de son épée, prêt à l'éventrer au moindre geste brusque. Et puis, aussi surprenant que ce soit, elle lui palpait l'armure de sa main aussi blanche que son visage, quoiqu'assombrie par les nombreuses cicatrices qu'elle dévoilait. Le chevalier était prêt à croire qu'elle n'avait jamais vu un tel équipement. Il avait gardé son sourire, malgré le fait qu'il était toujours prêt à l'empaler sur son épée. À ses mots, le chevalier comprit qu'il était dans l'impasse : elle ne partira pas, et lui non plus. Pas sans combattre, du moins.
« Quel dommage d'en arriver là… » dit Andran, avec un soupir de lassitude.

Sans attendre, il lâcha la poignée de son épée, et se se saisit du bras de l'inconnue et la projeta sur le côté avec ses deux mains, avant de dégainer son épée. Il resta là où il était, loin d'elle pour être sûr de la voir revenir à la charge. Andran ne souriait plus, presque sûr que c'était elle qu'il cherchait dans ces bois. De toutes façons, il était hors de question qu'il revienne d'ici sans rien. Le chevalier était désormais en posture de combat.
« Il ne reste plus qu'à savoir si vous serez capable d'abîmer mon armure. » dit-il d'une voix fort haineuse et provocante.

La jeune hybride ne bougea pas son regard une seule fois, elle laissait ses pupille grisâtre, le détailler, surveiller la moindre réaction de ce dernier. Miriel le sentait nerveux, elle pouvait voir les muscles de sa mâchoire légèrement crispée, et elle se doutait bien que sa main se resserrait de plus en plus sur le pommeau de son épée, prêt à réagir à la moindre menace, prêt à l’éliminer à la moindre occasion. Elle caressa une nouvelle fois l’armure de l’humain avant de relever légèrement la tête en murmurant; « Soyons honnête, peu importe les propos que je vous aurai dit, vous y auriez vu une quelconque menace. Je ne suis pas comme vous, et vous n’aimez pas cela. Peut-être avez-vous peur qui sait? L’inconnue n’est jamais réellement rassurante…. » Ses paroles semblèrent touché juste, puisque son adversaire sembla finalement sortir de sa torpeur et lui saisit durement le poignet avant de la repousser durement. Un bruit bien distinct arriva finalement à ses oreilles et elle put voir que l’homme avait dégainée et s’était rapidement mit en position, prêt à attaquer.


Ce fut un léger sourire défiant qui vint éclairer son visage. L’hybride aimait le danger, elle pouvait sentir la moindre fibre de son corps vibré d’excitation. ENFIN! Enfin un homme qui semblait à sa hauteur.  Mais elle était loin d’avoir finit avec ce dernier, loin de l’avoir poussé assez loin. « En effet, quel dommage! » Miriel avança d’un pas, non sa lâcher l’homme de ses prunelles grisâtre, puis fit de nouveau un pas vers ce dernier avant de ramasser rapidement son gant de cuir qu’elle avait lâché alors qu’il l’avait si brusquement repoussé. Sans rien dire, elle remit doucement le gant de cuir non, en prenant tout son temps. Pas une seule fois son regard dévia de sa future cible. Pas une seule fois son expression changea. Un sourire défiant, presque arrogant. Elle remonta doucement le gant sur son avant-bras, cachant une nouvelle fois ses marques. Miriel l’avait tester sans que la pauvre âme ne s’en rende compte. Elle lui avait donné une parcelle de son passé, mais soit l’humain n’en n’avait rien à faire, soit il ne connaissait rien de ce qui se passait hors de sa patrie… Elle secoua la tête, un air faussement découragé avant de reprendre son air impassible, « Et c’est cela la justice péninsulaire? » La jeune hybride pencha légèrement la tête sur le côté avant de glisser doucement la main sur le pommeau de son épée. «  On ne cherche pas les coupables car de toute façon il est bien plus facile de blâmer les étrangers pour tout les crimes qui se passe dans votre minable bourgade… »


Son visage se referma alors qu’elle dégaina rapidement son arme. Elle eut l’impression que le son de sa lame contre le fourreau avait résonner dans cette clairière. Le bout de ses oreilles se redressèrent, à l’affut du moindre son, elle se doutait bien qu’il y avait des fortes possibilités que l’humain ne soit pas seul et dans ce type de combat mieux valait savoir à quoi s’attendre… L’hybride se mit en position, soutenant le regard de l’humain. On pouvait sentir la tension qui s’installait, les deux êtres étaient concentrés, prêt à passer à l’attaque. Miriel attendit patiemment, pour une fois elle ne donnerait pas le premier coup. Son adversaire avait une épée bien plus longue que la sienne, son équipement était déjà beaucoup mieux que le sien. Il valait mieux l’épuiser, le feinter, l’attaquer de plein front était une idée suicidaire et incroyablement dangereuse. La jeune hybride fit bouger légèrement et discrètement ses pieds, tentant de déterminer comment était le terrain. Ce dernier était bien sec, impossible de faire glisser son adversaire. Voyant que son adversaire n’avançait toujours pas vers elle, elle lui fit un léger sourire en soin avant de le provoquer légèrement; « Alors? On a changé d’idée? »

Elle avait en partie raison. Le fait qu'elle était différente jouait dans les soupçons du chevalier. Cela dit, ce n'est pas pour ça qu'il tuait impunément pour un oui ou pour un non. Mais ça elle ne le savait pas, et, véritablement, elle n'avait pas non plus cherché à le savoir, même si, lui non plus, n'avait pas cherché à se montrer digne de confiance. Enfin… il n'était pas suspect dans une affaire de disparition, lui. Il avait engagé le combat parce qu'il se sentait menacé, et qu'elle-même était un danger potentiel, et probablement la responsable des disparitions qui l'ont amené ici.
Le chevalier serrait ferment son épée, regardant son adversaire se relever lentement. « Allons bon. » lâcha-t-il haineusement face à la mauvaise foi de son ennemie. « Je n'ai pas souvenir vous avoir menacé, avant que vous ne me posiez un ultimatum. »

Andran s'approcha d'elle, arme au clair. « Les dieux me blâmeront si vous êtes innocente de toutes façons. Et mes frères avant ou après eux. » dit le chevalier, avant d'engager une première attaque verticale que la femme esquiva. Il n'enchaîna pas directement sur une autre attaque. Il se contenta de se replacer. Puis il ré-attaqua, une attaque horizontale plus puissante et rapide, et, malgré l'esquive de son adversaire, enchaîna trois attaques rapides et puissantes. Mettant l'inconnue en difficulté, Andran continua et continua encore de la harceler d'attaques, jusqu'à temps de la désarmer et de la faire tomber sur le sol après lui avoir asséner un violent coup de coude dans le buste. Le chevalier empoigna son épée à deux mains, s'apprêtant à l'achever en la lui plantant, mais ne la planta que devant la tête de la femme. « Vous serez peut être disposés à parler maintenant ? »

Le chevalier retira son épée, et s'en alla ramasser celle de son ennemie à terre, qui avait volée un peu plus loin. Une fois ceci fait, le chevalier revint près d'elle. « Alors, repartons donc du début, si vous le voulez bien. » dit-il en joignant les mains sur les deux épées qu'il tenait. Le chevalier avait abandonné son ton sarcastique et son caractère menaçant, il était devenu étonnamment neutre. « Et non, ce n'est pas une plaisanterie : je ne vais pas vous embrocher. Malgré les menaces et les sous-entendus douteux, je n'ai pas la preuve que vous êtes la personne que je cherche. Enfin, la responsable des disparitions je veux dire, pas le fantôme. » dit Andran, avec un demi-sourire espiègle. Il rengaina son épée, gardant celle de son adversaire vaincue dans les mains, fixant la lame.
« Alors je vais vous reposer la question que je vous ai posé en arrivant. Pour quelle raison une elfe se terre dans le Bois de l'Esterel ? » demanda-t-il simplement.

Miriel bougea doucement son pied, ses pupilles grisâtres fixaient l’humain sans bouger. Attendant patiemment la moindre réaction, le moindre mouvement. Elle pouvait sentir le moindre de ses sens en alerte, et ses oreilles dressées trahissaient sa concentration. Elle ne voulait pas perdre, pas cette fois. «Menacé? Certes non, mais le défi d’atteindre votre armure me semble particulièrement clair. » Soudainement, le temps sembla s’arrêter. Elle eut l’impression que la scène se passa au ralenti. Elle vit le chevalier qui s’élança, engageant une attaque verticale puissante. Aucun doute, si la lame la touchait elle y passerait. Elle sut l’éviter rapidement, suivant du regard les autres mouvements du chevalier. Une autre attaque ne tarda pas arriver, suivi d’une autre et d’une autre. Le chevalier ne s’arrêtait pas et l’hybride tentait tant bien que mal de les parer ou de les éviter. Mais cette adversaire était beaucoup plus fort que ceux dont elle avait l’habitude. Elle le savait qu’il lui donnerait du fil à retordre et elle se doutait bien que sa force était beaucoup plus puissante que la sienne. Ne suffisait que comparer la carrure frêle de l’hybride contre celle du chevalier. Les combats comme ce dernier étaient loin d’être la force de Miriel et elle voulait en finir le plus rapidement possible. Cela ne prit qu’une seconde… Une simple seconde ou le chevalier la désarma avant de lui donner un violent coup de coude dans le thorax. L’hybride en eut le souffle coupé, elle tomba à genou, le visage a quelques centimètres du sol en toussant. Sa respiration était devenue incroyablement difficile et son visage était devenu d’une blancheur encore plus éclatante. Miriel se concentra pendant quelques secondes, tentant de reprendre son souffle en toussant. La douleur était poignante, incroyablement douloureuse.


Elle s’arrêta qu’une fois qu’elle put voir ses prunelles grisâtres dans l’acier. L’hybride s’arrêta, comme sous le choc. Puis releva son regard vers l’humain.  Elle porta sa main à son thorax, tentant de reprendre sa respiration, avant de tousser. Mais ce qui ne l’avait pas manqué. Le chevalier retira son épée avant de ramasser la sienne. Désarmée, du moins sans compter les armes dissimulées sur elle, Miriel s’agenouilla en fermant les yeux. Cela lui prit quelques secondes pour reprendre sa respiration, quelques minutes ou elle laissa l’humain déblatérer, non sans porter une oreille attentive à toutes les questions qu’il posait.  «Vous voulez la vérité? Très bien. » Dit-elle d’une voix rauque, en se tenant toujours le thorax. L’hybride se releva doucement, non sans lâcher son regard du chevalier. Mieux valait, le surveiller, on ne savait jamais si ce dernier essayerait de la terrasser une nouvelle fois. «Je ne suis pas elfe.»  Elle sentit sa respiration s’accélérer rapidement, puis continua à parler; « Mon maître était drow, ma mère était son esclave. Ai-je besoin d’en dire plus? »  L’homme ferait rapidement le lien. Elle était née esclave. Née dans la peur, avait grandi en côtoyant le mal et la douleur, puis lorsqu’elle avait réussi s’échapper la première fois elle avait connu la liberté, pour finalement la perdre quelques années plus tard. Maintenant plus rien ne la faisait sourire, plus rien ne lui en donnait envie. Plus rien, sauf peut-être une personne qu’elle ne réussissait pas à supprimer de ses pensées… Miriel soupira avant de relever ses prunelles grisâtres pour fixer l’humain, elle laissa tomber doucement sa main, maintenant que sa respiration devenait de plus en plus régulière, et continua; «J’ai réussi à avoir ma liberté, depuis je prends les contrats de mercenaire. Un homme m’a recruté il y a quelque temps à Thaar pour retrouver un homme qui se terre dans ses forêts. Une histoire d’argent apparemment. »


Miriel fit un pas de reculons, comme pour s’assurer qu’elle serait hors de sa portée si ce dernier se préparait à utiliser sa propre arme contre elle. Puis continu; «Je n’ai pas posé de question sur le pourquoi du comment. Je devais quitter Thaar, j’ai pris la première opportunité qui m’en donnait l’occasion.» L’Ithri’Vaan était devenue beaucoup trop dangereuse pour l’hybride. Trop de drow, trop de chasseurs de prime. Elle savait qu’elle avait toujours un prix sur sa tête et la dernière chose qu’elle voulait était de retourner dans les entrailles du Vatna. Ne restait qu’à déterminer ce que voulait réellement l’humain…

« Une demie-drow ? » demanda Andran, surpris. La dernière demie-drow qu'il avait vu ne ressemblait pas du tout à celle qu'il avait devant lui. C'était la toute la curiosité des hybrides : ils ne sont jamais pareils. « C'est pour ça que vous êtes aussi blanche que le lait ? » Le chevalier n'y connaissait rien. Aucune de ses questions n'étaient posées sur un ton moqueur ou haineux. Il était sérieux, et curieux. Mais, force est d'admettre qu'il ne s'attendait pas à ça. En tout cas, l'inconnue déballait son sac, et Andran l'écoutait avec attention, malgré son accent qui ne changeait rien à la compréhension de ses mots. Dommage, en plus d'être une demie-drow, elle était une mercenaire… ce genre de personne qu'Andran détestait au plus haut point. Cela dit, que pouvait-elle bien faire d'autre ? Elle savait se battre, et elle était d'une ethnie que Miradelphia tout entier détestait. Ça ne laisse que très peu de possibilités.

« Un homme qui se terre dans ses forêts… » répéta-t-il, perdu dans ses pensées. Andran connaissait bien ses terres, mais qui pourrait bien se cacher dans les bois pour fuir quelqu'un ou quelque chose ? Est-ce pour ça que des gens ont disparu ? Ou est-ce qu'elle lui ment ? Il était perdu, il ne savait plus quoi penser. Le chevalier resta silencieux face au récit de l'inconnue, et même après. Il fixait l'hybride de la même manière qu'elle le fixait. Puis il rompit le silence.

« Et je suppose que, pendant votre "traque", vous avez rencontré les fameux enfants qui ont parlé des histoires de fantôme, et on en vient rapidement aux gens que je cherche. » conclut-il. « Reste à savoir qui les a fait disparaître. Vous, pour être tranquille, ou votre homme, parce qu'il se sait en danger. Tout ceci sans exclure le fait qu'ils se soient perdus, et caetera et caetera… » Il soupira, peu rassuré à l'idée de savoir pourquoi elle traque un homme qui fuit Thaar. Il sait que les problèmes d'argent sont fatals, par là-bas. Et si on ne trouve rien de mieux que le Bois de l'Esterel pour se cacher de ses créanciers, c'est qu'on doit avoir de sacrés problèmes. Andran ne savait pas si elle comptait le tuer, mais il ne pouvait pas laisser faire. D'un autre côté, il n'était pas là pour ça. Est-ce qu'il voulait se mêler de cette histoire ? Rien n'est moins sûr.

« Décidément, nos bois sont les refuges de tout le monde. » dit-il d'un ton un peu moqueur. Le chevalier reprit rapidement son sérieux. « Bon… ce qui m'importe, ce sont les disparus. Même si vous n'avez rien fait, vous savez sûrement quelque chose, et si vous m'aidez, je ferai en sorte d'éteindre les rumeurs et de vous laisser tranquille. » Le chevalier tenait avant tout à remplir sa mission. Il n'était pas là pour faire couler le sang, outre le fait que tuer l'hybride ne lui saurait d'aucune utilité. Si c'était le cas, elle serait déjà morte depuis longtemps. Cela dit, si ses projets venaient à enfreindre la loi, le chevalier serait tenu d'intervenir aussi. Il le savait, et c'est aussi pourquoi il ne pouvait pas ignorer les raisons de la présence de cette femme dans les bois. « Et votre homme ? Vous en savez surement plus que vous ne le dîtes. Vous connaissez surement son nom, et la profession qu'il exerce ? » demanda-t-il, soucieux. C'est peut-être un Thaari, et il a des problèmes d'argent si elle lui raconte la vérité. Tout les moyens sont bons pour retrouver la monnaie… y compris des moyens pas nets ou illégaux. De toutes façons, il n'avait pas la preuve que cette demie-drow était coupable, même si elle l'était.

L’humain sembla surpris alors qu’elle lui mentionna qu’elle était une demie-drow. Comme s’il venait d’apprendre la nouvelle la plus surprenante au monde…  La jeune hybride desserra rapidement ses poings, non sans lâcher du regard l’humain qui se trouvait juste devant elle. « Je l’ignore, j’imagine… Apparemment que ma mère était pareille. » Dit-elle sans émotion.  Elle soutenait son regard sans rien dire, pendant que ce dernier semblait pensif. Allait-il lui offrir son aide? Ou au contraire l’arrêtait-il pour un crime qu’elle n’avait peut-être pas commis? Soudainement, ses oreilles se dressèrent et elle pencha doucement la tête en l’observant; « Et qui êtes-vous? Comment pourrais-je vous faire confiance? Les autres hommes qui sont venus à ma rencontre on était loin d’être sympathique. » Et c’était vrai, elle avait perdu le compte d’homme qui était venu et l’avait attaquée. Tous semblaient avoir pris peur devant Miriel, certains étaient partis en courant, d’autres l’avaient attaqué et avaient rapidement fui les lieux lorsqu’ils constatèrent que la partie était perdue d’avance et un dernier gisait dans un fossé à quelques kilomètres d’ici… Mais elle tiendrait ce détail secret, elle était désarmée et se doutait bien que l’humain n’hésiterait pas à lui donner le même sort.


Miriel avança d’un pas vers l’humain avant de s’arrêter. « Pourquoi je vous aiderais alors que vous avez tenté de me tuer? Puis-je vous rappeler que vous êtes le premier à avoir dégainé. » Ses mains s’ouvrirent légèrement, alors que son regard cendré se plongeait dans celui de son adversaire. L’hybride suivit du regard l’humain, alors que ce dernier tenait toujours son épée dans ses mains. « Vous pouvez essayer d’éteindre ses rumeurs autant que vous voulez, vous savez aussi bien qu’ils reviendront, et qu’ils réessayeront de me tuer ou de me mettre en cage. Arrêter de penser que les humains sont bons. Vous savez aussi bien que moi que vous être intolérants. » Son visage resta de marbre alors qu’il commençait à lui poser des questions sur son contrat. Il lui semblait incroyablement curieux, et ce n’était pas bien pour les affaires, et d’ailleurs qui était-il? L’hybride croisa ses bras contre elle en plissant un peu plus le regard; «  Je ne vous dirais absolument rien sur ce contrat.  Qu’es qui me fait dire que vous n’êtes pas un assassin ou un mercenaire vous aussi? » Miriel fit quelques pas vers l’humain, s’approchant le plus possible de son pas léger. Elle devait reprendre le dessus.


Une fois qu’elle fut assez près de ce dernier, elle tendit la main vers ce dernier. Un silence pesant semblait avoir envahi le bois de l’Esterel, comme si tous êtres vivants retenaient leurs souffles. Comment réagirait le chevalier à ce nouvel affront? Miriel n’avait en aucun cas confiance en lui. « Maintenant, redonnez-moi mon arme et retournez à vos affaires. Vous pouvez vois qu’il n’y a aucun cadavre autour de moi, et vous savez pourquoi je suis ici. C’est bien assez. » Son ton était glacial, l’hybride voulait réellement se débarrasser de l’humain le plus rapidement possible.

Le chevalier étira un sourire narquois. Malgré sa position de faiblesse, l'hybride se montrait tenace, combattive, même si le noble lui tendait la main pour “faire la paix”. « Dans le coin, on m'appelle Andran. Et, je ne suis pas un homme comme les autres. » dit-il avec son ton sarcastique et provocateur qu'il avait employé plus tôt. Quelque chose l'étonnait. Il n'avait pas l'allure d'un paysan, et pourtant, elle ne semblait pas le distinguer des gens communs. Andran était un noble, lui.

« Si je n'avais pas dégainé, vous m'auriez éventré. C'est aussi simple que cela. » rétorqua-t-il, avec un ton plus froid et plus sérieux. « Cela dit, nous n'en serions pas là si vous aviez accepté de discuter dès le départ. » ajouta-t-il. Andran la voyait avancer. Il se demandait ce qu'elle mijotait, surtout qu'elle ne semblait toujours pas comprendre ce que représentait Andran. Il était chevalier. Tout le monde savait qu'il cherchait quelqu'un. Il était censé rendre la justice. Les hypothèses que soumettait la demie-elfe le firent rire aux éclats. « Ma chère, ma chère, ma chère… » soupira-t-il. Même s'il lui disait tout, il n'était même pas sûr qu'elle comprendrait. Il reprit rapidement. « Je ne suis pas comme vous, je ne réponds pas à l'appel de l'argent mais de la justice. » dit-il, sans masquer une légère pointe de dédain. « Je suis chevalier, donc un noble. J'ai été appelé pour enquêter dans ces bois, pour retrouver les gens qui ont disparu. Le rapport que je dresserai mettra fin à toute rumeur concernant le fantôme ou quoi que ce soit d'autre. Si vous tuer m'était d'une quelconque utilité, vous seriez déjà morte. » dit-il, en serrant la poignée de l'épée de l'hybride. Il ne préféra pas argumenter sur ses accusations vis-à-vis des péninsulaires. Elle n'avait pas totalement tort, mais ce n'était pas le sujet.

Andran comprit rapidement qu'elle cachait quelque chose. Et, si elle a songé au fait que son adversaire était un assassin ou un mercenaire, c'est qu'elle fuyait quelqu'un. Le noble souriait : même sans le vouloir, elle dévoilait son jeu. De plus, elle s'approchait toujours de lui jusqu'au point de se tenir droit juste devant lui. Elle avait de l'audace. D'un certain côté, il aimait beaucoup ce jeu, et, maintenant qu'elle était sans arme, il pouvait se permettre de laisser faire. Quand elle tendit la main pour récupérer son arme, il sourit à nouveau. « Vous m'avez dit que vous n'étiez pas stupide. Alors, je me doute bien que si vous avez tué certains paysans, vous ne garderiez pas les cadavres à vos côtés, d'autant plus que cela serait le meilleur moyen de tomber malade. » répondit-il.
« Non, vous n'êtes pas stupide. Vous êtes désespérée. » la provoqua-t-il, en tenant l'épée les mains derrière le dos. « Je ne sais pas encore si votre histoire est vraie ou non, tout comme je ne serai jamais sûr que vous êtes innocente dans l'histoire des disparitions. Mais je suis à peu près sur d'une chose, vous avez des ennuis, et je n'en suis qu'un seul de plus. » déclara-t-il d'un ton sérieux. Il était persuadé de voir juste.

Le chevalier se saisit de la main de la femme, et retira le gant qui la couvrait. « Curieuse, comme marque, pas vrai ? » dit-il d'un ton moqueur. Un peu plus tôt, elle avait retiré son gant sans cacher cette marque. Elle était bizarre, incompréhensible. Mais Andran se doutait qu'elle avait une quelconque signification, même si elle le dépasserait. « J'ai très bien compris que vous fuyez quelque chose ou quelqu'un. Et si vous êtes venu jusqu'ici, au travers du royaume le plus haineux qui existe, c'est que ce que vous fuyez est redoutable. » dit-il, en lâchant le poignet de l'hybride et en la bousculant pour l'éloigner de lui. Le chevalier était déterminé à tout savoir, même s'il se méfait toujours d'elle. « Sachez une chose. Je ne repartirai pas tant que je ne saurai pas où sont passés les disparus. » Andran recula de deux pas, comme s'il avait appris que l'hybride était malade, et que c'était contagieux. « Et vous récupérerez votre arme quand je serai sûr que vous me dites la vérité, et que je n'aurai pas à revenir demain pour trancher la tête. Bref, si vous voulez votre épée, il faudra me convaincre. » Ce qui était sûr, c'est qu'il ne la lâcherait pas. Il savait qu'il l'ennuyait ou qu'il la rendait nerveuse, et maintenant qu'elle était désarmée et qu'elle ne semblait plus représenter aucun danger, il n'allait pas s'arrêter en si bon chemin.

Andran… C’était donc ainsi que l’humain se faisait appeler. Un homme peut être différent des autres, mais incroyablement arrogant. Un homme qui ne semblait pas comprendre le coût d’une vie, et encore moins la liberté qu’il avait eu sans avoir à lutter pour. Il était gâté, et ne semblait même pas le réaliser… Miriel pencha légèrement la tête sur le côté lorsqu’il mentionna qu’il avait dégainé parce qu’elle l’aurait probablement éventré. Elle secoua la tête, découragée, se disant qu’il ne comprendrait pas, que peu importe, ce qu’elle pourrait lui révéler, il ne pourrait jamais savoir ce qu’elle vivait tous les jours… « Vous vous trompez Andran. Sur toute la ligne. » Elle n’aurait jamais attaqué la première, et elle répondait qu’à un seul appel; celui de la liberté. Ce droit de vivre comme on le souhaite, la vie sans liberté était probablement pire punition que la mort. Andran se saisit durement de son poignet, avant d’enlever rapidement son gant, laissant à quiconque l’opportunité de voir sa honte.


L’hybride fronça les sourcils lorsqu’elle attendit la dernière remarque de l’homme. Ce dernier n’était définitivement stupide, il semblait avoir tout compris… ce qui ennuya  énormément la demie-drow. Elle resta là, debout devant lui pendant ce qui lui semblait être une éternité. Que devait-elle faire? Fuire, semblait être une idée des plus stupides, il la rattraperait et elle passerait définitivement un mauvais quart d'heure. Quant à l'attaquer une nouvelle fois, cela ne lui semblait pas un choix des plus judicieux. Ne restait qu'à lui dire la vérité. Il se disait noble? Elle verrait bien assez vite, si il méritait son titre.« Très bien. » Elle arracha son gant des mains de l’humain avant de retourner à sa cape qui ornait le sol. Elle prit le bout de tissus, avant de mettre sa main sous la doublure. Elle attrapa un bout de parchemin avant de retourner vers l’humain, le visage sérieux. Elle tendit le bout de papier à l’humain, et lorsque ce dernier l’eut attrapé, elle enleva rapidement une des sangles de son armure avant de rabattre le col de sa chemise, dévoilant une autre marque à son cou. « Voici une des nombreuses cicatrices que mon maître m’a faite. » Elle passa doucement le bout de ses doigts sur la cicatrice qui encadrait son cou, lissant le détail du collier beaucoup trop serré qu’on lui avait fait porter. Puis, remontant son col, elle plongea son regard cendré dans celui de l’humain, tentant de déterminer si ce dernier comprenait, ce qu’elle venait de lui révéler. « Naître hybride au Puy est une malédiction, du moins l’était jusqu’à ces dernières années. Mon maître se servait de ma mère, et cette dernière est morte en couche. J’ai été élevé comme esclave, servant les moindres desseins de ce géniteur qui ne me voyait que comme un objet. » Sa gorge se serra pendant une seconde, ses yeux descendirent au sol alors qu’elle repensait à tous les supplices qu’Alak et Kahveka lui avaient fait subir. Les viols, les coups, les assassinats et la torture étaient devenus tellement courants qu’elle avait arrêté de compter les occasions, qu’elle avait eu l’impression qu’elle avait perdu toute envie de vivre... Puis, il était apparu…


L’hybride soupira, avant de continuer;  « Après une centaine d’années de servitude, je me suis évadée. » Elle releva les yeux vers son adversaire, mieux valait ne pas en dire trop sur comment elle avait réussi à s’évader. « Je suis arrivée à Thaar où j’ai dû me débrouiller comme j’ai pu. Puis il y a quelques années j’ai fait une mission pour un Drow, mon ami était dans de beaux draps et je ne pouvais pas le laisser écoper. Et le drow a découvert que j’étais une esclave en fuite. » Elle désigna le bout de parchemin dans la main de l’humain. « Au cas où vous ne compreniez pas l’Olliyan, cet avis promet à quiconque quatre fois ma valeur marchande à quiconque me ramène au Puy. » Miriel s’arrêta net, bien consciente qu’elle venait de révéler un terrible secret. Un secret qui pourrait la mettre dans de beaux draps encore une fois. L’humain voulait connaître la vérité sur elle? Il apprendrait que le monde était beaucoup plus noir qu’il l’avait pensé…  « Il est inutile de vous dire que l’Ithri’Vaan n’est pas sure. D’où le fait que je me suis réfugié dans cette forêt. » Miriel s’approcha de l’humain encore une fois, avant de le regarder de la tête au pied. Son regard était beaucoup plus doux, certes elle était toujours aussi suspicieuse, mais elle n’avait plus cette colère sourde qui grondait en elle. « Vous vouliez savoir la vérité, vous la savez maintenant. Je suis désespérée. Je veux vivre et je me suis donné comme but de retrouver quelqu’un. » Miriel fronça les sourcils quelques secondes, l’air pensive et reprit son discours; « Peut-être était-ce une mauvaise idée. » Dit-elle en plantant ses yeux cendrés dans les siens; « Mais au moins je ne mourrais pas les profondeurs du Vatna à servir un maître sadique. J’aime mieux mourir ici, libre. » Que savait-il à la liberté de toute façon? Les péninsulaires n’avaient aucune idée de ce qu’était l’esclavage. N’avait aucune idée de qu’est-ce que c’était vivre sous le joug d’un maître. « Alors qu’allez-vous faire maintenant que vous connaissez la vérité? M’envoyer en cage? »Dit-elle en remettant doucement son gant pour cacher l’horrible marque de son maître.

Ah oui ? Il se trompait ? L'aurait-elle vraiment laissé vivre ? Andran n'était pas du tout convaincu, mais l'animosité changeait bien des ressentis. Le chevalier l'écouta et évita de lui couper la parole. Il avait ce qu'il voulait, après tout : elle allait enfin parler. Assez de ce qu'il s'était passé. Il avait surement tort de jouer les malins en la provoquant… tout comme elle avait sûrement tort de le rembarrer. La tactique d'approche n'avait pas été bonne. Ni pour l'un, ni pour l'autre,

Une esclave… tout s'expliquait. Le chevalier connaissait la hargne des Drows, cela expliquait donc cette fuite jusqu'ici, en Péninsule. Tout les moyens étaient bons, visiblement, y compris se jeter chez les personnes les plus haineuses de Miradelphia. Andran n'avait pas ce vécu, il ne pouvait pas réellement comprendre. Mais dans le Sud du Royaume, il paraitrait que les étrangers ou les hybrides sont toujours mieux reçus là-bas, même si ce n'est pas non plus l'apothéose.
Lorsqu'elle acheva son récit, le chevalier resta silencieux. Terminées les moqueries, terminées les provocations à deux ronds, terminées les menaces. Curieux, il essaya de lire le parchemin qu'elle lui avait donné pendant qu'elle parlait. Mais il n'y comprenait rien à l'olliyan. Les marques qu'elles avaient sur le corps étaient méprisables. Dans le Nord, l'esclavage était méprisé. C'était l'une de seules belles choses en ces terres. Pour le coup, Andran s'attendait à tout sauf à un esclave.

« Très bien. » finit-il par lâcher d'un ton neutre. Aussi intelligente était-elle, elle ne pouvait sûrement pas imaginer un tel bobard pour l'endormir, d'autant plus qu'elle ne s'attendait surement pas à tomber sur un noble dans cette forêt. Un noble instruit et cultivé, et qui plus est un chevalier, somme tout capable de faire preuve de compassion. « Et, non. Je ne vais pas vous envoyer en cage. » reprit-il en détournant le regard. « Déjà parce que ce récit ne prouve pas que vous ayez tué ou fait disparaitre mes disparus. » Le chevalier se doutait qu'elle n'était pas aussi blanche que sa couleur de peau dans cette histoire, mais, le doute profite à l'accusé comme on dit. « Et aussi parce que l'esclavage n'est pas un passe-temps que j'affectionne. » Andran ramena l'épée devant son ventre, fixant l'arme comme s'il n'allait pas s'en servir pour faire une bonne chose. Il inspira un coup. Il avait eu un bel aveu, pouvait-il être gourmand et en demander plus ? Ou devait-il s'arrêter là, ce qui était déjà bien ? Malgré tout ce qu'elle avait dit, le chevalier évitait de montrer une quelconque émotion. Il restait totalement neutre.

« Cela dit, j'aurais quelques autres questions. » admit-il. Cette fois-ci, il avait un ton très sérieux. Ce petit jeu avec assez duré, et la provoquer ne lui servirait plus à rien. Se moquer de sa vie d'esclave serait aussi déplacé que pitoyable. Andran n'avait pas ce vécu, et il ne tenait pas à le vivre. « Vous vous êtes évadé, c'est une chose. Mais, pourquoi s'évertuer à vous retrouver ? Si je ne m'abuse, les esclaves ne sont pas ce qui manquent, au Puy d'Elda, ni même en Estrevent, si ? » demanda-t-il, même s'il n'était pas sûr de tout ce qu'il avançait, et que cela se voyait. Pour lui, l'esclavage était monnaie courante, par là-bas, et donc il était facile de remplacer les audacieux qui s'échappaient par d'autres esclaves. Ça ne pouvait pas être qu'une fierté mal placée. « Et cette personne que vous êtes venu voir. Est-elle vraiment dans ces bois, ou vous vous êtes réfugiés ici car il y a eu un imprévu ? Qui est cette personne ? Que fait-elle dans le Royaume ? » Le chevalier était un peu anxieux. Il était conscient qu'il demandait beaucoup, peut-être trop, à quelqu'un qui avait déjà dit pas mal de chose. Le pire, c'est que son affaire semblait lui échapper. Depuis le temps qu'il était là, les disparus pouvaient s'être fait dévorés par les loups, ou même être morts de faim ou de soif. Mais il avait le fin mot d'une histoire plus qu'étonnante.

En tripotant l'épée courte de l'hybride, il s'osa à une dernière question, probablement la plus compliquée, sur le sujet qui pourrait très bien la froisser. « Concernant les personnes qui ont disparus… » Il hésitait. Il ne savait pas trop comment amener le sujet sans la froisser. Elle était calme et semblait apaisée, et il ne voulait pas retrouver une hybride en colère qui la provoquerait. « Je me doute bien que vous n'avez pas besoin de les provoquer pour qu'ils vous attaquent. Je ne connais que trop bien les miens. » déclara-t-il. Cela allait en son sens, peut-être qu'elle serait plus ouverte s'il montre qu'il est attaché à la justice. « J'aimerais les retrouver, morts ou vifs. Je veux les ramener à leurs familles. Je suis sûr que vous savez vers où ils sont partis, s'ils sont en vie. S'ils sont morts, vous pourriez me dire où ils gisent ? » Le chevalier avait toujours un ton sérieux, même s'il était un peu gêné et que cela se voyait. Il était là pour ça, après tout.

Un soupir s’aise traversa les lèvres de la jeune femme blanche. Même si l’émotion du chevalier resta naître, Miriel savait très bien que tout pouvait changer très rapidement. Elle ne lui avait pas tout dit, mais elle se doutait bien que ce dernier pouvait très bien s’imaginer ce qu’elle avait subit… Ou du moins, une partie de ce qu’elle avait subi, car les atrocités qu’elle avait endurées révélaient d’une méchanceté sans fin…  Mais l’humain était curieux, et il n’hésita pas à poser d’autres questions, des questions beaucoup plus personnelles. «J’aimerais vous dire la raison exacte, mais je n’en ai aucune idée. Plaisir déplacé? Revanche impitoyable? Mon géniteur n’a jamais manqué d’idée pour s’amuser avec moi. Je suppose que le fait que sa progéniture disparaisse sous son nez l’a humilié et il cherche à exercer sa vengeance. » Miriel fronça les sourcils, en avalant difficilement.


«Quant à la personne que je recherche… C’est difficile à expliquer… » Comment expliquer ses sentiments alors qu’elle-même ne savait pas ce qu’elle ressentait. « J’ignore où il est… J’ignore s’il est encore au Puy ou s’il est retourné au Puy.» Elle se retourna  pour faire quelques pas vers un tronc d’arbre qui jonchait la petite clairière, et s’y assit, silencieuse. Comme si d’innombrables pensées envahissaient son esprit. Au bout de quelques secondes, elle releva son regard, pour une fois ce dernier semblait envahi par la tristesse. «Son nom est Grayle. Il est un humain que j’ai rencontré au Puy, un autre esclave. » Miriel soupira, et ne put s’empêcher de continuer; « Mon maître m’avait envoyé faire une course, intimidé quelqu’un qui lui devait quelques choses. Alors que je revenais, j’ai vu ce jeune homme se faire tabasser par deux drows. Je n’ai pas pu m’empêcher et je suis intervenue. » Miriel releva les yeux vers le chevalier. Ce dernier était toujours interdit, sans émotion, et elle continua; «Je les ai tués, et j’ai amené l’humain dans une maison abandonnée pour le soigner, et lui donner l’énergie de continuer, de se battre. Chaque jour est un combattant, chaque jour que l’on réussit à survivre est un trophée, je ne voulais pas le voir abandonné. La liberté est si précieuse, si  agréable… Le fait de voir quelqu’un aussi résigner à mourir m’a peiné. » Elle leva les yeux aux ciels, comme si elle tentait de retenir ses larmes, et continua; «J’ai réussi a le convaincre, et j’ai commencé a l’entraîné. On se rencontrait comme on pouvait, et puis l’improbable s’est passé… »Elle plongea son regard cendré dans celui du chevalier; «Nous nous sommes arrivé devant l’évidence que nous avions des sentiments l’un pour l’autre. » L’hybride se releva du tronc d’arme, non sans faire quelques pas vers l’humain; « Puis quand j’ai eu ma liberté, j’ai dû partir, sans un adieu, sans un sourire.  Je risquais ma vie là-bas… Tout devenait beaucoup trop incertain et je suis parti vers Thaar ou j’ai recommencé à travailler comme mercenaire. J’ai commencé à chercher Grayle. Je sais c’est stupide,  mais je le chercherais a travers tout Miradelphia si nécessaire. J’exploiterais chaque plaine, chaque vallon et chaque forêt s’il le faut. »


C’était bien la première fois qu’elle mentionnait à qui que se soit les sentiments qu’elle avait pour l’humain. Elle avait tenté de tout garder au plus profond d’elle-même. Elle avait l’impression que chaque souffle du vent murmurait son nom. Son cœur était définitivement mort sans lui. Miriel fronça une nouvelle fois les sourcils avant de baisser le regard une nouvelle fois, comme si elle était honteuse. « J’ai beau essayer de l’enterrer au plus profond de ma mémoire, mais il est toutes mes pensées. Mon seul désir et de le retrouver, de vivre la vie que j’ai toujours imaginée a ses côtés. On dit qu’on trouve toujours un chemin pour retrouver ceux qu’on aime… J’aimerais bien pour une fois que cela soit le cas, mais c’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin. J’espérais que les rumeurs d’une dame blanche dans la forêt attirent son attention…» La mercenaire releva doucement son regard vers le chevalier, elle venait pleinement d’admettre qu’elle lui avait menti, mais après tout, aurait-il cru cette histoire si elle avait commencé avec cela? L’hybride l’observa tripoter son épée avant de poser une dernière question sur les gens qui sont disparus. «Il y en a qu’un qui est mort. Les autres se sont enfouis dans les bois. J’ignore ce qui leur est arrivé… Je peux vous y conduire si vous voulez.» Une révélation qui pourrait la mettre dans de beaux draps, mais après tout qu’avait-elle réellement à perdre?

Andran écouta l'hybride sans l'interrompre. Elle vidait son sac, c'est ce qu'il voulait et elle avait bien compris qu'il ne la lâcherait pas. Son récit était étrange. Le chevalier la regardait, sourcils froncés, attentif mais curieux. En vérité, elle en disait plus que ce qu'il voulait savoir. Elle gardait sûrement cela en elle depuis un long moment, sans avoir eu l'occasion d'en parler avec qui que ce soit. Difficile de se trouver un confident quand on est une esclave. Quand elle acheva son histoire, Andran resta silencieux quelques instants. Elle avait avoué avoir menti, et il avait bien raison d'avoir douté d'elle.

Cela dit, tout le reste était… déroutant. Elle avait fait tout ce chemin pour espérer revoir son être aimé ? Si elle avait commencé par là leur rencontre, il aurait sûrement ri. Quoique, là encore, elle ne pouvait pas inventer un tel mensonge. Et puis son comportement avait totalement changé. Elle n'était plus agressive, ni combattive. Elle semblait triste et désemparée.

« Je ne connais pas de Grayle, ici, je dois l'avouer. » dit-il simplement. « Et, sans même avoir besoin d'essayer de l'attirer, je pense que beaucoup auraient entendu parler de lui depuis l'Estrevent, vous ne pensez pas ? »

Le chevalier baissa légèrement la tête. S'il s'attendait à une histoire d'amour. Et puis, un humain amoureux d'une hybride ? Dans le fond, il ne pouvait pas trouver cela "mignon" même si c'était un couple pour le moins curieux. Pouvait-il la juger pour cela ? Lui-même avait déjà pris des risques inconsidérés pour sauver les personnes qu'il aime et il avait souvent réussi à les sauver d'une morte certaine. Andran se frotta les yeux et le front.

« Je crains que vous n'ayez fait tout cela en vain. »

Andran fit quelques pas de plus vers l'hybride. Malgré le fait qu'elle avait tout avoué, il ne pouvait pas s'empêcher de rester méfiant. Il hésitait à lui rendre son épée. Mais, le dicton ne disait-il pas que la faute avouée était à moitié pardonnée ? Cela dit, si elle l'aidait à les retrouver, elle se confronterait à ceux qui l'ont défié. Pensif, le chevalier inspira, étirant un sourire en coin discret.

« Vous m'aideriez à les retrouver ? Vous vous doutez bien que si vous les avez délibérément agressé, je ne pourrai pas vous laisser partir ? »

Au fond de lui, Andran connaissait une partie de la vérité. Le nordien connait bien son peuple… hélas. Lui l'avait laissé vivre, d'autres n'auraient pas été aussi magnanimes. Il savait pertinemment qu'une elfe ou une hybride n'avait pas besoin d'ouvrir la bouche pour que des gens tentent de l'égorger. Mais ils mentiront fermement, même devant le chevalier.

« Mais je dois vous avouer que je ne peux refuser une telle offre. Si vous savez où ils ont pu aller… » admit-il. Cavaler dans tout ces bois ne feront que l'énerver. « Je verrai bien ce qu'ils ont à dire. Une fois que j'aurai toutes les cartes en main, je ferai ce qui doit être fait. »

Une jolie manière de dire qu'il fera en sorte que la justice soit appliquée. Il était un chevalier, et il ne pouvait pas la tuer de sang-froid. Il s'attachait à la justice et à la vérité. Tuer cette hybride parce qu'elle était une hybride serait contraire à son serment, il le savait. Pas elle. C'était le seul avantage qu'il avait sur elle.

«  Ce n’est pas un Vaanie. Mais un péninsulaire. » Répondit-elle du tac au tac. Comment pourrait-il seulement comprendre les plans qu’ils avaient faits dans cette maison abandonnée? Comment aurait-il pu comprendre le désespoir qui l’avait envahi? Elle se souvenait de ses paroles qu’elle avait prononcées au Puy. Cette promesse qu’elle lui avait faite alors qu’elle était dans ses bras, étendue sur le sol froid de leur refuge délabré. Miriel soupira avant de baisser le regard, inquiète. « Nous avions l’idyllique vision de s’établir quelques pars en péninsule. D’élever une famille, avoir une vie tranquille. À croire que le destin ne nous le permette pas encore… » L’hybride fronça légèrement les sourcils avant de relever le regard vers l’humain, incertaine de sa réponse, et lorsque l’humain lui répéta qu’elle avait fait cela pour rien. L’expression de l’hybride se referma rapidement, avant que ses yeux ne se plissent un peu, lui donnant un air déterminé. « Qui a dit que j’avais dit mon dernier mot? Je lui ai fait une promesse. Je ne compte pas l’abandonner et si je dois retourner au Puy pour aller le chercher moi-même je le ferais. » Certes, elle n’osait pas l’avouer, mais elle était terrifiée à cette idée. Terrifié d’avoir à faire face â ces créatures qui la remettrais en chaîne à la première occasion. Les choses changeaient au Puy, mais pas les mœurs.


Le chevalier fit quelques pas vers elle, avant de s’arrêter net pour lui promettre d’appliquer une certaine justice à son endroit. Miriel ne put s’empêcher d’avoir un sourire amusé en haussant un sourcil. Croyait-il réellement l’amadouer en lui disant cela? Il n’y avait point de justice dans ce monde. Ses adversaires l’accuseraient devant quiconque, et elle finirait bien entendu la corde au cou, ou pourrirait dans une quelconque cellule. « Vous savez aussi bien que moi qu’es qui s’est passé. Je n’ai pas attaqué ces gens, je n’ai fait que répondre à leurs actes. Mais dès qu’ils le pourront, ils feront tout pour discréditer mes paroles. Et qu’est-ce que la parole d’une demi-drow contre celle d’un humain? » Miriel eut un air amusé avant de tourner le dos au chevalier pour aller récupérer sa besace qui contenait ses maigres possessions. Une simple besace en cuir qui semblait avoir vu des jours meilleurs, quelqu’un vêtement pêle-mêle dans le sac, qui semblait avoir de la difficulté à fermer correctement. L’hybride passa rapidement la ganse sur son épaule avant d’attraper la cape de voyage qu’elle avait jeté un peu plus tôt lors de lors combat. Elle la mit rapidement sur ses épaules avant de rabattre le capuchon, cachant ainsi ses longs cheveux blancs ainsi que le bout de ses oreilles. Sans demander son reste, Miriel se mit en marche, faisant quelques pas à l’opposée de la petite clairière avant de se retourner vers Andran qui ne semblait pas avoir bougé. « Vous voulez que je vous montre ou on reste ici pour déjeuner ? » Dit-elle un sourire amusé aux lèvres.


L’hybride s’enfonça sans attendre dans la forêt, se disant que l’humain ne la laisserait pas partir comme cela. Elle marcha en silence pendant de longues minutes, avançant doucement en prenant bien soin d’éviter les branches et les ronces qui se dressaient devant elle. La marche dura bien une bonne heure, l’hybride était bien au courant qu’elle n’avait pas d’affaire à se trouver trop près du lieu de la bagarre. Soudainement, Miriel s’arrêta net, en tendant le bras, arrêtant ainsi la marche du chevalier. Une falaise abrupte se dressait devant eux, et au pied de cette dernière, le corps inanimé, d’un homme au crâne ensanglanté. Ses bras étaient couverts de quelques coups d’épée, preuve d’une rencontre des plus violentes avec quelconque assaillant. Mais ce qui marquait le plus était ce crâne en bouilli, comme s’il avait heurté violemment quelques choses… Comme la grosse roche qui se trouvait juste devant l’hybride. Une vilaine chute? Ou un meurtre de sang-froid?   L’hybride se retourna vers le chevalier en désignant l’homme du menton. «  C’est arrivé il y a quelques jours, j’avais établi un camp un peu plus haut, et j’étais tombé sur des enfants qui se sont enfuis aussitôt qu’ils m’ont vu. Trois hommes sont arrivés quelques heures plus tard. »  Miriel soupira avant de retourner son regard cendré vers le corps inanimé de son adversaire. « Je vous laisse deviner la suite, après une discussion haute en couleur, ils m’ont attaqué. J’ai répliqué, et après quelques minutes j’ai tenté de m’enfuir. En longeant la falaise, celui-là m’a attraper, je l’ai touché avec mon épée et est tombé. Il a fini sa course ici. » Miriel releva ses yeux grisâtres vers Andran, tentant de déterminer sa réaction, puis continua; « Les deux autres se sont enfouis, j’ai cru qu’ils étaient retournés dans leur village, mais si vous me dites qu’ils ont disparu, je me suis pas certaine d’où ils sont partit… » Miriel avait un ton froid, détaché, comme si ce qui venait de se passer n’était qu’une routine… Et pour elle c’était le cas. L’hybride avait commis des atrocités hors nom pour son ancien maître,  un accident aussi bénin, aussi sanglant qu’il fût, était bien loin de l’impressionné…

Un péninsulaire ? Au Puy d'Elda ? Curieux. Mais, pour cette fois, Andran n'osa pas lui demander comment un péninsulaire s'était retrouvé là-bas. Il en avait assez de ces histoires toutes aussi étranges les unes que les autres, et celle-là ne manquait sûrement pas d'une certaine horreur. L'hybride décrivit l'avenir qu'elle imaginait aux côtés de ce fameux Grayle, même si la Péninsule ne serait pas l'endroit idéal. Même le Sud ne sera pas les plus accueillants. Mais, inutile de préciser ce qu'elle savait sûrement déjà. De toute façon, il est difficile d'arrêter quelqu'un qui agit par amour. Et, visiblement, elle était déterminée.

Elle voulait le retrouver. Et lui, il voulait retrouver ces crétins de paysans et les ramener à leurs familles. Plus il en savait, moins il en avait envie d'ailleurs. « Je ne suis pas du genre à laisser les assassins courir nos rues. » rétorqua-t-il en fixant impassiblement l'hybride « Et ceux qui croient bon de faire justice soi-même sont de ces gens-là ». Andran n'aimait pas ces lynchages permanents sur qui que ce soit pour telle ou telle raison. Dans le pire des cas, il revenait aux autorités de réagir. Bon, en revanche, le chevalier ne se targuera pas d'avoir fait pencher la balance de la justice en faveur d'une demie-drow, mais il se targuera sûrement d'avoir la conscience tranquille. L'ancienne esclave du Puy empaqueta ses affaires avant de mener la marche vers le lieu de son escarmouche. Il l'avait observé sans bouger, ce qui semblait amuser l'hybride. Étirant un sourire en retour, le noble se mit en marche.

L'endroit se révéla être bien plus loin qu'il ne l'avait imaginé. Ils marchaient depuis un bon moment, même si Andran n'oublia pas de prendre quelques repères dans le bois. L'hybride s'arrêta près d'une falaise qui dominait le cadavre qui gisait devant son pied. Il était tout maculé de sang, et les mouches s'étaient déjà lancées à son assaut. « Oui, pour les enfants, c'est en effet ce qu'on m'a dit. Et, vous conviendrez que cela corrobore le fait que ce sont eux qui vous ont chassé, et non l'inverse. » répondit-il avec un sourire narquois. Mais, elle ne savait pas où étaient les autres. Ils ont pris leurs jambes à leur cou le plus loin possible d'elle, et, ils n'ont sans nul doute pris aucun repère sur leur chemin. Donc ils se sont perdus. Et surtout, elle n'a pas cherché à les massacrer.

Andran resta pensif en fixant le cadavre pourrissant devant eux. Il soupira avant de secouer l'épée de l'hybride dans sa main. Inutile de la forcer à l'aider pour les trouver. Les deux derniers étaient sûrement morts, eux aussi, en tombant sur un animal prédateur. Crétins qu'ils doivent être, ils se sont sûrement perdus en plein cœur du bois, et ils ont sûrement croisé une bestiole plus dangereuse encore. « D'aucun dirait que c'est toujours mieux que rien… » soupira-t-il en reposant les yeux sur l'hybride blanche comme la lune. « Inutile de chercher les deux derniers… Nous n'avons aucune certitude qu'ils soient encore en vie, et, quand bien même, les chercher prendraient trop de temps. »

Andran s'approcha de la demie-drow. Un court instant d'hésitation traversa son esprit, avant qu'il ne tende l'épée courte qu'il avait dans la main vers elle. « Reprenez-là. Je vais emmener celui-là à sa famille, et, vous, vous pouvez partir. Je dirai que le fantôme a été vaincu mais je n'ai pas su trouver tout le monde. Cela vous offrira suffisamment de temps pour quitter cet endroit, si jamais quelqu'un voudra chercher les deux autres dans ce bois plutôt dense. » Il étira un large sourire, trahissant une certaine bienveillance. « Je vous crois sur parole, et votre récit coïncide avec celui que l'on m'a raconté avant que je n'intervienne. Pour cette raison, je considère que vous n'avez rien à vous reprocher aux yeux de la justice : vous n'avez fait que vous défendre. Pour ce qui est de votre sang, c'est autre chose que je ne désire pas juger, même si certains se croient aptes à le punir sans réfléchir. » Et, qui sait, il pourrait quitter le Royaume en ayant une plus haute estime de celui-ci. Tous ne sont pas des assassins brutaux de ceux qui sont différents des humains, après tout.