La grande braderie [Nessys, Grayle]

Fin de la seconde ennéade de Karfias, an 17, cycle XI
Pendant la période qui précède l'Ordalie entre Shyn'tae et Kerath

La solitude avait du bon, surtout quand elle vous privait de la compagnie d'abrutis. Lorsque Shyn'tae avait quitté l'état major, elle avait laissé l'organisation de l'ordalie au grand prêtre de Meinghal et s'était rendue aussitôt au camps du C'nros. Elle n'avait pas beaucoup de temps pour mettre en oeuvre les decisions qu'elle avait prise. Mais pourquoi s'ennuyait-elle ainsi avec de tels hypocrites. Le combat en lui même n'était pas le problème, mais elle n'était pas certaine de son issu. C'était excitant. Lorsqu'elle avait expliqué la situation à Liss'na, cette dernière s'était contentée de hausser un sourcil, bras croisés sur la poitrine comme à son habitude.

- La Ditrown'dare a dit très clairement que tu ne devais pas aller sur le terrain. Même si l'idée n'a pas du lui traverser l'esprit, elle incluait certainement non seulement  certaines de tes rencontres nocturnes, mais aussi les ordalies."
- Elle pourra me punir, ca lui fera une distraction. " La drow était assise à son bureau, et n'avait pas levé les yeux pour répondre à la vétéran. En effet, sa plume parcourait avec vivacité le vélin.
- S'il reste assez de morceaux." La missive était maintenant couverte de son écriture appliquée. Elle en fit un pli, qu'elle cacheta aussitôt.
- Puisqu'on en parle, j'ai justement quelques instructions. Celle-là, " elle tendit la missive qu'elle venait de terminer, "Est à insérer dans les rapports destinés à la triumvir Al'serat, uniquement si je n'étais pas capable de le faire moi-même. Comme d'habitude, tu prends le commandement par interim en cas d'absence." Nouvelle missive. Liss'na avait pris la premiere, et repris sa posture.
- Et en cas d'incident, n'oubliez pas de conserver les morceaux, elle voudra peut-être les relever pour me retuer." Le visage de Liss'na s'ornait d'un sourire carnassier. " Ca donne envie de voir ca." Shyn'tae avait relevé le regard de son travail. Un sourire malicieux apparut sur ses lèvres.

- C'est vrai, ce serait un sacré spectacle. Je vais faire de mon mieux."
- Je n'en attendais pas plus de toi."

Deuxième pli, puis un troisième. Devait-elle en faire un autre pour L'Renor? Non, probablement pas, le temps qu'il arrive au Puy, son ainée serait arrivée à Sol'dorn. Cela n'en valait simplement pas la peine. Elle tendit les deux missives à Nessys. L'esclave était à son service depuis deux ennéades maintenant, et elle en était plutôt satisfaite. Survivre un siècle au service d'Urgoll était un signe évident de compétence car elle soupçonnait que le vieux machin n'était ni patient, ni attentif à sa propriété. Et en effet, sa tente n'avait jamais été aussi propre et ses vêtements en meilleur état que depuis que l'esclave s'en occupait. Il avait aussi appris à monter, et elle avait fait preuve de patience à son égard.

- Les destinataires sont sur les enveloppes, Nessys." Elle se leva pour se rendre dans sa tente, puis en revint avec un gros ouvrage relié de cuir qu'elle déposa bruyamment et sans cérémonie sur le bureau. "Expédie-moi ca pour Aliénor, aux Deux Soleils à Ys. Pas besoin de mot, elle comprendra. Quant à toi..." La drow observa le mâle attentivement, et bientôt ses yeux se mirent à briller d'une lueur pleine de malice, comme si elle s'apprêtait à lui offrir le meilleur des cadeaux et en même temps la pire des punitions. Et Soudainement, elle se lança dans l'écriture de deux documents, qu'elle posa devant lui."

- Lorsque tu auras envoyé les courriers, tu iras voir Na'ri Yisfi au camps nord pour la prévenir de l'ordalie. Les soigneurs du camps sud sont excellents, mais il n'est pas impossible qu'elle ne soit pas de trop. Et maintenant, ces deux documents: A gauche, ton affranchissement. A droite ta cession à Na'ri. C'est quelqu'un de remarquable. Tu l'apprécierais sans aucun doute. Il n'est pas impossible qu'elle refuse et préfère que je te garde, mais qui sait. C'est aussi quelqu'un qui mériterait d'avoir vraiment quelqu'un qui l'écoute." La demoiselle fronça les sourcils. Elle oubliait quelque chose. Quelque chose d'important, qui lui revint brusquement. "Ah oui, amène Noisette à Na'ri. Ca lui fera du bien." Il était difficile de savoir si ce dernier point concernait le cheval ou la drow.

Il y eut une pause de quelques secondes. La Phord'ur était réellement curieuse de ce que l'esclave ferait, mais avait bien une petite idée sur la question. Elle pencha la tête sur le coté, pétillante. Une théorie à verifier.

- Si tu veux y réfléchir, tu peux commencer par envoyer les messages et le colis, et prendre le document qui t'intéresse à ton retour. Des questions?"

Garder le regard bas. Rester immobile, dans l'attente. Conserver une respiration égale, quoiqu'il entende, quoiqu'il arrive... Cela était on ne peut plus naturel pour Nessys, bien qu'il fut particulièrement attentif, dans ce nouvel environnement qu'était Sol'Dorn. Deux ennéades depuis que la daehdhel l'avait récupéré, lui faisait quitter le service de l'Etat-Major, où l'avait conduit la disparition de son maître. Non content de lui faire retirer la marque d'or de l'Eda de son front - la peau cicatricielle le grattait encore, bien qu'il s'abstint d'y toucher -, sa nouvelle maîtresse l'avait emmené avec lui, au dehors, quittant ainsi le Puy. L'esclave s'était adapté avec stoïcisme... Pourtant, son être frémissait encore de tant de nouveautés, sous une égide aussi... Tempérée ? Il servait, c'était ainsi, il était né pour cela. Pourtant, les manières de la Vaen're le surprenaient bien des fois. Visiblement, cette journée en serait un autre exemple.

Avec la fluidité résultant d'une vie de servitude, le 'meuble' se fit esclave s'avançant suite aux injonctions de sa maîtresse, afin de recevoir ce qu'elle souhaitait qu'il transmette, de même que ses ordres. Nulle curiosité n'était perceptible dans son attitude. Dépassant sa maîtresse d'une demi-tête, le grand demi-sang parvenait presque à gommer ce fait, demeurant légèrement courbé, la tête basse. Cependant, cette attitude vacilla aux mots de la daehdhel, une idée aberrante faisant son chemin dans l'esprit de l'esclave. L'affranchissement ? Un clignement de paupières fut l'expression de sa surprise, avant qu'il ne l’aplanisse, se détachant rapidement de ce qu'elle risquait de faire naître en lui. Ses mains demeurèrent sagement le long de ses flancs, sans se tendre ni vers l'un, ni vers l'autre des documents le concernant directement. La disparition de son maître, le service à l'Etat-Major, cette étrange maîtresse, et à présent ça... Voilà qui semait en lui une confusion qu'apprécierait le Menteur.

Elle lui laissait le choix. Mais en était-ce vraiment un ?

De multiples questions lui vinrent en tête. Bien peu pouvaient être posées par un esclave. Demeurer silencieux en ce cas ?... Il avait à peine trouver ses marques au service de la sombre. Cependant, pour ce qu'il avait pu en juger, les méthodes de la Vaen're étaient bien moins brutales que son premier maître.

"Devrais-je informer maîtresse Na'ri de ce qu'il vaut mieux éviter avec votre monture ?" dit-il sur un ton on ne peut plus sérieux, en connaisseur de cette bête au caractère peu facile.

En y repensant, il semblait à l'esclave qu'il avait reçu plus de coups de la monture que de la maîtresse. Ce qui, pour une drow pur sang, était plutôt surprenant. Ou une manière quelque peu tordue de faire connaître son déplaisir ? Non, Nessys n'en avait pas eu l'impression. Cette réflexion ne l'amena pas moins à demander encore, sur un ton toujours mesuré, quoiqu'une pointe d'hésitation s'y fit entendre, malgré-lui.

"Maîtresse... Ai-je fait quelque chose qui vous a déplu ?"

Qu'il vente, qu'il neige, qu'il soit passé à tabac comme jeté aux fauves, l'esclave semblait imperturbable, alors même qu'il posait cette question peu anodine. Sans trop savoir pourquoi, cela lui semblait pourtant important. Avait-il fait une erreur ? Maître de lui-même, il s'empêcha de gratter la marque cicatricielle sur son front.

"Que se passe-t-il ?" ajouta-t-il plutôt, ses sourcils se fronçant légèrement.

Quoique, peut-être aurait-il dû garder cette interrogation pour lui-même. Les affaires des maîtres ne regardaient qu'eux-même, et les esclaves devaient s'estimer chanceux d'être tenus au courant. Nessys guetta avec plus d'attention, du coin de l'oeil, les réactions de la daedhel.

Liss'na les avait quitté, et Shyn'tae avait observé Nessys pendant qu'elle lui donnait les deux documents et les explications associées. Il était resté très majoritairement imperturbable, si on excluait quelques mouvements quelques mouvements de paupières intempestifs. Elle devait bien admettre qu'il l'impressionnait. Ce calme apparent, cette indifference malgré ce qu'elle venait de lui dire était tout simplement difficile à concevoir. Elle ne serait probablement pas parvenue elle-même à reproduire cette attitude.

Finalement, il ouvrit la bouche, pour poser une question d'ordre pratique qui la fit rire. L'avait-il déjà entendu rire depuis leur arrivée? Peut-être, mais alors fort rarement. Quelque chose se tramait clairement.

- Non, à moins qu'elle ne te le demande, ne lui dis pas. Je suis sûre qu'elle saura le gérer. Shyn'tae trouvait qu'au fond Noisette était une brave bête. Certes il pouvait frapper les passants, et assez souvent sa propriétaire. Certes il ne faisait jamais ce qu'on attendait de lui. Mais c'était aussi un animal étonnamment intelligent et fiable dans les moments critiques. Pour tout dire, si les choses venaient à virer mal, elle serait heureuse de savoir l'animal entre les mains de Na'ri. Il lui vint l'idée assez saugrenue qu'il la protégerait.

Entre temps, Nessys avait continué en posant la question exacte que sa Maitresse attendait. L'avait-il déplu pour qu'elle veuille s'en débarrasser. Un petit sourire joueur apparut sur ses lèvres et elle se pencha sur le bureau, les coudes sur la table et les mains sur le menton. Sa chevelure coulait sur le bois. Devant son silence, elle le vit s'inquiéter, puis exprimer ses craintes. C'était autre chose qu'elle appréciait chez lui. Cette sincérité hésitante apte à démêler les malentendus assez tôt pour qu'ils ne gonflent pas. Elle ne voyait aucune raison de le tenir à l'écart de la réalité. Le serviteur qui comprenait le contexte était souvent en mesure de faire bien mieux que celui qui ignorait tout. Shyn'tae tenait à ce que son entourage puisse donner le meilleur de lui-même.

- Non. Au contraire, je suis extrêmement satisfaite", souffla-t-elle d'une voix chantante." Pour tout dire, je m'apprête à tenter quelque chose de particulièrement enthousiasmant, mais aussi particulièrement dangereux. Et s'il s'avérait que cet au revoir soit définitif, je préfère te savoir soit libre, soit auprès d'une Maîtresse qui saura utiliser tes talents à bon escient. C'est à dire pour autre chose que balayer des couloirs."

Non, vraiment, cette maîtresse-la n'agissait pas comme il s'y attendait. Bien qu'il accepta le compliment ? Sans sourciller, sa volonté réaffirmée de le voir libre l'ébranla encore quelque peu, pour bien des raisons, ou encore entre les mains d'une autre maîtresse. Du peu qu'il avait vu, la dénommée Na'ri étant déjà venue voir la Vaen're, Nessys supposait que les deux drows s'appréciaient. Quant à savoir comment cette autre était en privée, avec ses esclaves... C'était là un tout autre questionnement. De ceux qui ne trouvent leur réponse que dans le vécu. Les deux possibilités ne le faisaient pas sauter de joie, c'est certain. L'une plus que l'autre. Malgré le trait d'humour de sa maîtresse, qui fit frémir les lippes de l'esclave. A moins qu'il ne s'agisse d'un infime mouvement non contrôlé ?

Et puis... De particulièrement dangereux ? Pour une drow, cela pouvait tout signifier. Pour une Phord'Ur, cela dit... Un assaut allait-il être lancé ? Les oreilles tendues, Nessys n'entendit rien sortant de l'ordinaire, au delà des parois de tissu. Quoi alors ? Mieux, même : à quoi bon le savoir ? Qu'advient-il des esclaves dont les maîtres disparaissent ? Le demi-drow l'avait déjà expérimenté, mais au sein de l'Etat-Major, l'un des lieux les plus importants de tout le Puy. Tandis qu'ici, loin de ce dernier... Après un siècle de stabilité, voilà qu'il passait de main en main. Frôlant la disparition, l'oubli propres aux esclaves, qui changeaient au gré du plaisir de leur maître. Lui-même ne l'avait guère expérimenté, à l'inverse d'autres de ses semblables, qui avaient vécu pour le raconter à qui écoutait. Les mires écarlates jetaient des coups d'oeil à la sombre, sans répondre encore. Il ne savait quoi penser de son... Attention.

Il sembla vouloir dire quelque chose... Puis se ravisa. Toujours la tête basse, ses observèrent pendant un instant la daedhel, plus que d'ordinaire.

"Que les Dieux Sombres vous regardent, Maîtresse." fit-il simplement, finalement.

Ses mains se portèrent alors sur les courriers, le lourd volume... Ainsi que le document attestant sa cession à la dénommée Na'ri. Non sans s'être incliné devant sa maîtresse, l'esclave recula vers l'entrée de la tente, avec l'intention, sur le seuil, de faire volt-face afin de mener à bien ses tâches. Aussi étranges soient-elles.

- Que les Dieux Sombres vous regardent, Maîtresse."

Ils nous regardent toujours, pensa la magicienne en le regardant s'éloigner, les bras encombrés. Le menton toujours posé sur sa main, elle baissa les yeux vers le document d'affranchissement. Il était resté sur la table. Ce n'était guère une surprise pour elle. Qu'aurait-elle fait à sa place? Aurait-elle seulement réussi à survivre à Urgoll'ven si longtemps? Elle resta pensive quelques instants de plus, avant de se remettre debout.

- Vas me chercher l'esclave Grayle." L'esclave qui était posté à l'entrée, immobile telle une statue, s'inclina et se faufila au dehors, la laissant seule pour quelques instants, dans le silence. Il n'y avait rien à faire, ou presque, d'ici à ce que l'humain pointe son nez. Elle n'avait pas vraiment l'utilité de deux esclaves attachés à son service personnel, et avait donc choisi d'affecter Grayle aux tâches communément réservées aux autres esclaves du C'nros. Elle savait qu'une paire de mains supplémentaires et laborieuse n'était jamais de refus. L'humain avait donc été chargé de nombreuses tâches domestiques et logistique qu'imposaient une structure telle que le C'nros, et ce d'autant plus lorsque la Phord'ur cherchait de nouveaux moyens de permettre à ses mages de se concentrer sur leurs tâches, et de pouvoir répondre toujours plus vite aux demandes des Osts. La vitesse était la clé.

Grayle avait nettoyé, fait la lessive, assemblé des paquetages et aidé à préparer des montures aux coté de ses camarades. L'activité n'avait pas manqué, et lorsqu'il n'avait rien eu à faire, le contremaitre lui avait trouvé d'autres tâches. Il y avait toujours quelque chose à faire.

Elle s'étira comme un chat puis se pencha sur son coffre pour en extraire une bourse qu'elle soupesa. Traversée d'émotions contraires, elle lança finalement la bourse sur le bureau, et referma le coffre du pied.

Avait-elle bien fait? Les doutes revenaient toujours. Peut-être aurait-elle mieux fait de se taire, une fois n'était pas coutume. Peut-être essayait-elle d'aller trop vite, peut-être prenait elle trop les choses au sérieux. Elle était convaincue d'avoir raison, mais était-elle dans son rôle? La réalité était que Ssol et Kerath étaient déjà d'accord. Si elle échouait, ce qui avait de bonnes chances d'arriver, personne ne comprendrait ce qu'elle aurait essayé de faire. On ne retiendrait probablement que son arrogance. Si elle réussissait vraiment à immobiliser son père pour cette ennéade, c'était aussi possible néanmoins.

Mais au moins, ces deux pressés seraient forcés de faire les choses correctement. Devenait-on à ce point impatient en vieillissant, ou avaient-ils peur déplaire aux dieux? Si c'était le cas, peut-être auraient-ils du parler un an auparavant. Elle, avait-elle peur de son père? Bizarrement non, probablement pas assez, analysa-t-elle... Elle se sentait détachée. Elle verrait bien ce qui allait arriver, et ferait seulement de son mieux. Cela risque de ne pas être beaucoup. Tu aurais du laisser les grands s'en occuper. Elle serra les points. Si elle commençait à penser comme son père…

L'éphémère choisit cet instant pour franchir l'entrée de la tente et l'interrompit dans ses sombres pensées. Elle se tourna vers elle et lui sourit. La distraction était bienvenue.

- Ah, Grayle! J'ai une excellente nouvelle!

Lorsqu'il était entré dans la tente, la Phord'ur était seule. Le garde à l'entrée avait laissé passer l'humain sans même lui octroyer un regard, car après tout qui ferait attention à un esclave?

Elle était à moitié assise sur la grande table couverte de documents qui occupait le centre de la pièce. Appuyée d'une main sur le meuble, ses deux jambes croisées. La tunique bien ajustée aux couleurs du C'nros lui conférait sans nul doute une prestance certaine, et laissait suffisamment de ses longues jambes nues à la vue du malheureux pour qu'il ait envie d'en voir plus.

Shyn'tae lui souriait. Était-ce un sourire sincère, y avait-il une pointe de malice? Lui avait bien changé en quelques années. Déjà il avait survécu, ce qui, étant donné le déroulement de leur premiere rencontre, lui avait semblé improbable. Il semblait aujourd'hui pressé de plaire là où autrefois elle l'avait trouvé brut, mal taillé. Cela en disait long sur les capacités d'adaptation de l'esprit humain. Les drows étaient-ils différents? Elle avait de grandes raisons d'en douter. C'était vertigineux. Dans la même situation, risquerait-elle de devenir ainsi? Tu n'es déjà pas si différente, souffla la petite voix sarcastique au fond de sa conscience.

C'était vrai. Elle préféra enchainer avec enthousiasme.

- Oui, j'ai cru comprendre que tu étais assez proche de L'Renor Crysto, la Ditrown Da're." Était-ce de l'ironie? La drow s'étira, cambrée, puis, d'un geste vif de la main, attrapa une lourde bourse sur la table qu'elle lança à l'esclave.

- Elle arrive dans quelques jours. Je voudrais que tu organises un banquet pour elle, vas à frontière. Je pense te mettre à son service, après tout tu connais bien ses besoins un peu particuliers. Ses yeux d'un rouge sombre étaient figés dans les siens comme deux pierres précieuses pétillantes de malice.

- L'apprentie Ty'lrae t'escortera, remets lui ce pli de ma part." Elle lui tendait la missive entre deux doigts d'ébène. Lorsqu'il la prit, elle la retint quelques instants de plus.
- je te fais confiance."

la missive:

Shyn'tae avait vu la colère dans les yeux de Grayle. Il fulminait, alors elle en rajouta un peu plus, malicieuse et sensuelle dans sa posture. C'était un plaisir de découvrir qu'il avait des limites si simples à atteindre. Ceci étant dit, il avait rapidement repris contenance, mais ses questions témoignaient tout de de même des limites de son education.

Ce serait peut-être mieux en effet qu'il soit relâché dans son milieu naturel en effet. Quelque part, si sa Maitresse lui confiait une tâche, il était théoriquement assez peu à propos de commencer à les discuter.

- He bien… Disons que je te fais confiance pour cette tâche là, et s'il y a des choses qui sortent de ton champ de compétence, je suis certaine que tu sauras te débrouiller pour trouver des gens capables de t'aider. Mais tu sais, je ne devrais pas avoir à répondre à ce genre de questions…

Elle souriait, carnassière, le regard pétillant, et se pencha un peu plus sur le coté vers lui. Sa chevelure glissa sur la table, entrainant un ou deux documents.

- Non, elle doit juste s'assurer que tu sois bien sage. Mais c'est quelqu'un de charmant, elle te plaira. Montre lui le marché, elle a rarement l'occasion d'y aller."

La Phord'ur appréciait Ty'lrae, même si ce n'était pas le cas de tout le monde. Une mage pleine de potentiel, travailleuse, mais parfois très rêveuse au point d'en être distraite. Shyn'tae l'appréciait depuis qu'elle l'avait eu comme élève dans ses classes à l'étude noire, une dizaine d'années auparavant. La meilleure personne pour cette mission.

- Tu peux y aller. Bonne chance.