Le régent est mort.
Toute la ville bruisse des rumeurs de son trépas, mais du palais du Roi, rien ne s’échappe et un mystère étrange continue de nimber le trépas du Nordien. Dans cinq jours, les pairs du Royaume se réuniront pour lui rendre un dernier hommage ; les premiers cortèges sont déjà parvenus aux portes de Diantra et d’autres les rejoindront bientôt. Certains, d’ailleurs, ne pourront pas terminer leur voyage à temps, mais ils pourront se recueillir face aux reliques du Duc de Serramire, à Sainte-Deina.
Élu par les grands pairs du Royaume, le Régent de Sa Majesté Bohémond Ier du nom ne gouvernait pas seul ; il avait réuni autour de lui un conseil restreint dont faisaient notamment parti la Dame Constance et Francesco di Castigliani. Jusqu’au prochain Concile, prévu dans la foulée de la cérémonie religieuse en l’honneur du défunt, ces deux-là se partagent la plupart des affaires courantes.
Le Maître du Jeu, s’adressant à Brohan… Ton audience avec Aymeric, prévue initialement pour quelques jours après son trépas, a logiquement dû être repoussée ; au moins ce désagrément t’épargne-t-il un voyage en catastrophe d’Oësgard jusqu’à Diantra.
Aujourd’hui, cependant, ton attente prend fin. Même si tu sais que Dame Constance ne pourra sans doute pas entreprendre quoique ce soit de déterminant sans un Régent pour la soutenir, tu connais la réputation de cette femme qui, depuis plusieurs décennies déjà, navigue dans les cercles royaux. Serramiroise d’origine, on la dit parente par alliance de feu Aymeric.
Un page est venu te chercher quelques minutes plus tôt et tu l’attends dans un petit prieuré adossé au palais. En ce premier jour d’automne, le temps est encore clément ; il fait beau à Diantra, le ciel est dégagé et le soleil darde fièrement ses rayons.
« Sire Wulfekiin, » te salue-t-elle en venant à ta rencontre. Elle se fend d’une révérence respectueuse, avant de l’inviter à la suivre. Elle est accompagnée d’une jeune femme d’une vingtaine d’année à la chevelure noir corbeau. Cette dernière demeure silencieuse, mais imite sa maîtresse. « Je suis navrée que votre demande d’audience n’ait pas pu être honorée plus rapidement, te confie-t-elle. Cela vous convient-il si nous discutons ici ? Je n’ai guère eu l’occasion de profiter du jour, ces derniers temps. »