Julas de la 2ème ennéade de Fävrius
17e année du Onzième Cycle
Alentours d’Alëandir
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Ne t’en fais pas. Après l’agitation de ces dernières années, c’est tout à fait naturel. C’était… étrange. Tu ne savais pas quoi en penser. Tu aurais presque préféré que vous vous soyez disputés. Tu t’attendais à ce que vous vous disputiez, qu’elle te retienne, t’explique que partir une nouvelle fois n’était pas raisonnable. Au lieu de ça, elle t’y avait poussé comme rarement elle ne t’avait poussé à faire quoi que ce soit. Et à cause de ça tu te sentais coupable. Tu aurais dû t’y attendre. Kaëlistravaë est ton épouse, ta moitié, ton pilier, ton flambeau, ton étoile, la mère de ta fille, la chair de ta chair, choisie par
La Mère. Tu étais censé la connaître… et pourtant, l’évidence t’avait échappé.
Durant ces dernières années, Kaëlistravaë avait plus d’une fois fait le voyage jusqu’à Ardamir.
Parfois à l’aune de considérations politiques, parfois simplement rappelée par des devoirs de son ancienne vie, chaque fois profitant de l’occasion pour reconnecter avec sa famille, de cœur comme de sang. Chaque fois profitant de l’occasion pour respirer l’air de la Cité qui l’a vue naître, et se gorger d’une atmosphère qui lui est familière et rassurante. Ardamir est la Source de Jouvence de Kaëlistravaë de la même manière que Daranovar est la tienne, seulement toi, voilà longtemps que tu n’as pas posé le pied sur les Hauts-Plateaux du Norn.
Car tu es
l’Aran, tu as mis toute ton énergie dans la gestion d’Alëandir, dans la gestion des frontières, dans la gestion des migrations, dans la gestion des prémices d’une potentielle guerre à venir, et tu as oublié que tu étais faillible. Car tu es
l'Aran, tu as cru les dieux avec toi, tu t’es cru accompagne plus que quiconque, et en cela tu t’es pensé invincible. Sauf que les temps t’ont rappelé ta fragilité. Les temps t’ont rappelé comme les dieux étaient capricieux, comme ils vous étaient incompréhensibles à vous créatures de Miradelphia. Les temps –
et ton épouse – t’ont rappelé qu’il était naturel d’avoir besoin de se ressourcer.
Tu es un vieil elfe, mais tu es un jeune Roi. Tyral, Lyra’Suan, Lindal, Alenis, Findarato, Glorfindel, Orëlindë, Dyarque… aucun d’entre eux n’avait été ni parfait ni infatigable.
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Son tout premier voyage…-
Et il semblerait qu’elle n’en soit pas mécontente !-
Elle vogue sur un fleuve à son nom après tout !C’était comme si plus que de simplement
savoir l’origine de son prénom, Elorëa la comprenait, et l’embrassait. Rarement aviez-vous vu votre fille aussi animée que lorsqu’elle observait les flots du fleuve reliant Mera et Alëandir. Ainsi face à ses réactions Kaëlistravaë et toi vous étiez vous amusés à conjecturer de ce l’avenir amènerait pour elle. Peut-être était-ce le bateau qu’elle aimait, et qu’au jour de sa Cérémonie du Choix elle prendrait la direction de la mers et des fleuves en tant que navigatrice. Peut-être était-ce simplement la vision de l’extérieur des murs, et alors vous auriez à composer avec une aventureuse naturaliste ou une courageuse exploratrice ! Peut-être était-elle consciente de la poésie du moment, du baptême de voyage qu’elle vivait sur les eaux selon lesquelles vous l’aviez baptisée elle, et y trouverait-elle quelque aspirations à l’écriture. Ou peut-être était-elle seulement consciente du bonheur que c’était pour vous deux que de retrouver vos Cités-Mères.
Elenwënas de la 2ème ennéade de Fävrius
17e année du Onzième Cycle
Frontières Ouest d’Ardamir
C’est une Ardamir toujours secouée par les derniers événements que tu quittais. C’est à de palpables restes de tension que tu abandonnais ton épouse, sachant pour autant pertinemment qu’elle ne s’y laisserait jamais aspirer. Peu importe son état, un refuge est un refuge, et cet endroit est son refuge.
Pas le tien.
Tu as passé une journée entière à Ardamir tout de même, dont la majorité fut dépensée à suivre Kaëlistravaë dans ses pérégrinations, alors qu’elle présentait la petite Elorëa à tous ces gens qui furent part importante du passé de sa mère. Des nourrices, des instructeurs, des tailleurs, des joaillers, des forgerons, des gardes, des amis, un prêtre, un Protecteur, et même quelques militaires ! Et toi, tout pratique que tu es, tu avais profité de l’occasion pour prévenir le-dit Protecteur de ta destination en personne. Les doléances, les missives, les voyageurs cherchant à te rencontrer de visu… tout cela devrait te suivre jusqu’au manoir des Laergûl durant quelques temps. Le temps que tu te sois recentré.
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Je passerai te voir d’ici la fin du mois. -
Pour qu’on puisse repartir ensemble ?Trois sourires. Un baiser sur le front de la petite blonde. Un baiser sur les lèvres de la grande. Des au-revoirs. Le claquement sourd de ton manteau alors que Virìn donnait la première foulée. Et puis rien. Rien d’autre que des pensées pleines d’espoir.