[Mare Noire] L'histoire s'écrit sur du papier

<< Pas de repos pour les braves

à venir >>

Nous conseillons aux druides et Noss jouant l'introduction aux mares noires de ne pas lire ce RP pour garder le mystère entier !

Règles spécifiques HRP :

• Pas de longueur de poste minimale
  
• Double posts acceptés après 24h d'attente
  
• Pas de tour de parole
  
• Pas de nouveau joueur

Une petite carte du trajet espéré:

Les joueurs participant à l'évènement sont priés de ne pas ouvrir de RP se déroulant après la date du présent RP jusqu'à la clôture de celui-ci.

Sujet HRP de l'évènement

Clôture au plus tard : Dimanche 6 octobre à 23h

5e jour de la 8e ennéade de Karfias ~ été
17e année du XIe Cycle
Fin d'après-midi
Palais d'Ardamir

Malgré l'étrange rencontre faite sur la Voie Blanche, les cavaliers venus d'Alëandir n'ont pas croisé le moindre danger avant d'arriver entre les racines énormes des arbres titanesques d'Ardamir. Au bout de l'avenue principale en suivant la voie blanche, un embranchement large permet de continuer vers le sud, ou de gravir les marches du Palais de Chêne. Palais qui fut leur étape pour la nuit.

A chaque voyageur, une chambre fut attribuée dans les étages des dignitaires étrangers. La meilleure fut bien sûr retenue pour le Protecteur de l'Est. Mais avant de les laisser vaquer pour quelques heures et profiter d'un bain chaud, l'intendant remit au Commandant d'Alëandir, une lettre arrivée tout récemment à son intention.

Aegden,

J’espère que votre début d’expédition n’a pas encore vu se pointer trop de désagréments.
En ce qui me concerne, peu après que vous soyez partis j’ai eu la visite d’un certain Haldren Umbarion. Un mage d'Ombre, soi-disant héraut d’I Emël. Bien que je ne puisse me résoudre à totalement lui faire confiance  -  et je vous invite à lui opposer le même scepticisme  -  je crains que le peu de vrai qu’il y ait dans ses paroles ne soit suffisant à nous pousser à la méfiance.

La Mère lui aurait recommandé, à lui et à une poignée de druides, de garder les elfes loin d’Aduram, et s’il est venu me voir, les autres auraient choisi une approche moins diplomatique. Tentez de vous renseigner un maximum avant d’emprunter la route en direction de Wyslena, et si vous l’empruntez, faites extrêmement attention à vous. Les Ornedhels nous ont prouvé – lorsqu’ils sont enfiévrés – être capables du meilleur comme du pire, et surtout du pire.

S’il n’est pas intercepté, les troupes de Wyslena et de Linaëh devraient recevoir un avertissement similaire à celui-ci environ deux jours après vous. Tentez de rentrer en contact avec eux aussi vite que possible, de mon côté je les inviterai à faire de même.

Je te fais confiance pour mener les choses à bien,

Artiön

_____________________

Le Maître du Jeu s'adressant à son audience... L'heure est venue de choisir quoi faire avec les informations reçues jusque là. Concertez vous, IRP ou HRP et laissez nous savoir ce que vous comptez faire à partir d'Ardamir.

Pour mémoire, voilà la carte du protectorat d'Ardamir. La route prévue pour le moment est celle passant par Ostirion et suivant jusqu'à Wyslena.

La veille, à la croisée des chemins vers Ostirion

La voie blanche cédait sa place à un sentier balisé qui s'enfonçait au plus profond de l'Anaëh en direction de l'Ouest... Ouest-Sud-Ouest aurait dit un navigateur mais Haldren ne connaissait des bateaux que l'importance de ne pas vomir à contre-vent. Cette règle n'a jamais permis à personne de rester dans l'histoire comme un grand marin bravant les océans lointains, toutefois la négliger entraînait des conséquences aussi néfastes que salissantes. Bref le sentier s'enfonçait vers l'Ouest et le suivre permettait de se rapprocher de l'Aduram, de ses dangers, de ses trésors. Confortablement installé sur les branches basses d'un chêne multicentenaire, l'archimage ne perdait pas la route du regard tout en caressant nonchalamment les plumes d'un gros corbeau perché sur son bras.

Une scène apparemment fort calme, apaisante, qui ne trahissait pas la colère que l'ancien eldéen ne maîtrisait qu'au prix d'un effort de tous les instants. Il savait qu'y céder n'arrangerait rien et que sa mission devait l'emporter sur son orgueil démesuré, mais cela ne l'aidait guère alors qu'il repassait en boucle dans sa tête son voyage à Alëandir la veille même, sa rencontre avec l'Aran puis le doyen de l'académie de magie. Leurs gestes, leurs paroles, leurs actes, leurs jugements, tout remuait en lui des souvenirs hautement déplaisants qu'il aurait aimé oublié.

Il leur avait tendu la main, et reçut un crachas en retour.

La colère mène à la haine puis à la soif de vengeance et cette certitude lui imposait de ne pas s'y vautrer trop longtemps. Il ne souhaitait nullement se venger, simplement réussir à oublier les menaces proférées par le suzerain des forêts afin de les empêcher de servir de combustible au brasier des sentiments néfastes qui bouillonnait dans les tréfonds de son âme. Le calme et l'apaisement qui émanait de la nature l'aidait grandement à repousser ces viles tentations qui démontraient hélas que son héritage drow se trouvait seulement enfoui et non totalement effacé. Cette faiblesse faisait un sinistre écho à celle d'un autre drow accueilli en Anaëh deux siècles plus tôt.

Tebryn... as-tu toi aussi subi la haine et le mépris ? Est-ce pour cela que tu as empoisonné Telrunya ?

Hypothèse peu probable car Tebryn avait été accueilli plus favorablement au point de devenir un conseiller écouté du trône blanc. Cependant même après son retour au Puy, le drow n'avait pas clairement explicité si ce meurtre résultait d'un plan mûrement conçu ou d'un acte perpétué sous le coup de l'émotion. Haussant mentalement les épaules, en se disant que si l'Histoire bégaye elle ne se répète pas, Haldren reprit sa méditation sur ses prochaines actions. Obtenir de l'aide auprès des citadins s'était avéré un échec cuisant, obtenir celle des noss serait probablement tout aussi compliqué. Il restait cependant une troisième possibilité, qui sans doute lui vaudrait bien des rancœurs par la suite mais tout cuisinier sait qu'on ne peut pas faire d'omelette sans casser des œufs.

Du peu qu'il avait appris auprès du roi se trouvait une information vitale : l'expédition envoyée en direction d'Aduram passerait par Ardamir. Cette cité ne se trouvant pas ; à l'inverse d'Alëandir ; sujette à des téléportations aléatoires, cela avait permis à l'ancien drow de repasser devant dans cette course de vitesse pour éviter la catastrophe. Il ne lui restait plus qu'à les attendre patiemment sans se faire voir et alors... un fin sourire étira les lèvres fines de l'archimage alors qu'il tourna son regard en direction de la créature invoquée depuis les Ombres.

J'ai une mission à te confier.
Crooaaa, répondit le corbeau en se lissant les plumes.

La réponse à la missive que le Mainyth venait de recevoir ne tarda pas. Il n'eut même pas le temps de se reposer ou autre avant d’écrire au roi, et quand bien même il l'aurait eut il n'en aurait pas saisi l'occasion. Un air préoccupé s’était installé sur son visage avant même qu’il n’a terminé la lecture du parchemin lui étant adressé.

Il avait à peine déposées ses affaires dans la chambre qu'on lui avait attribué lorsqu'il se mit à écrire. De toute façon, cette missive, Aegden comptait l'envoyer bien avant même de recevoir la mise en garde de l'Aran.

Lorsque le messager remplirait son rôle, l’Aran recevrait une missive à l’écriture lisible, claire mais penchée comme hâtive.

Artiön,

Nous avons été arrêtées sur la route d’Ardamir pour les mêmes raisons que celles décrites dans ta lettre et je ne pense pas que ça soit une coïncidence. Nous avons probablement eut le même récit, noss, druides, symphonie etc... Il se passe quelque chose au sein d’Anaëh, même si nous ne savons pas encore quoi. 

La (ou les) noss qui nous ont barré la route n’étaient pas agressif mais celle qui parlait nous a bien fait comprendre que c’était exceptionnel. La femme qui nous barrait la route semblait vraiment vouloir nous convaincre. Je pense qu'elle ne nous a laissé passer seulement parce que nous avons seulement dit que nous nous rendions en Ardamir. 
Je n'avais pas non plus confiance au départ mais ce que tu me dit achève de me faire penser que ça ne peux pas être inventé de toute part. Je ne peux pas imaginer un ou plusieurs Anedhel mentir en invoquant I Emël.

je vais essayer de me renseigner autour de moi. Peux être que les Ardamiris en savent d'avantage sur des noss anormalement agités. Je ferais le nécessaire pour nous éviter des risques inutiles, cependant, et bien que je ne puisse pas écrire au nom des autres, tu me connais assez pour savoir que je ne renoncerais pas à cette mission tant que nous n’y seront pas contraints et forcés. L’enjeu est trop important. 

Aegden

5e jour de la 8e ennéade de Karfias ~ été
17e année du XIe Cycle
Soirée
Palais d'Ardamir

De tous les bureaux de cette immense termitière, celui du Protecteur était à la fois le plus simple et le plus difficile à trouver : la pièce la plus haute, située à la cime du Palais de Chêne. Après être passé par l'Intendant Celondil, le grand homme efficace et pragmatique qui les avait accueillit avec les honneur, il ne restait plus qu'à grimper les escaliers sans fin de cette tour végétale.

Depuis le Voile, l'intérieur du Palais avait été bien restauré. Les marches et les étagères étaient d'équerre. Les portes s'ouvraient et se fermaient sans poncer l'encadrement. Les sols étaient même à peu près égaux. Mais les murs et les meubles gardaient un côté sauvage si rare dans les cités de pierre. Il n'était pas rare de voir des bordures des fenêtres 'orner d'une branche ou couverte de plantes grimpantes attachées comme des rideaux. Parfois, au détour d'une salle, quelques feuilles ou fleurs jonchaient leur sol de bois vivant. Et plus le visiteur curieux montait dans les étages, plus la décoration raffinée se faisait chaleureuse et à taille elfique. Seuls les bannières marquées du Chêne stylisé d'Ardamir en brun sur vert rappelaient ça et là qu'il s'agissait bel et bien d'un bâtiment officiel. La batterie de jeunes serviteurs venus passer leur période d'apprentissage au Palais avant leur Choix faisaient également miroiter leurs uniformes de brun et d'ambre un peu partout.

Au dernier étage, annoncé par l'Intendant en personne après s'être assuré que le rendez-vous ne rentrait pas en conflit avec les autres obligations du Protecteur, on découvrait une porte ouvragée. Celondil disparut quelques secondes dans l'embrasure. Une voix posé, masculine, et une plus sèche, indéniablement féminine, s'envolèrent dans le couloir jusqu'aux plus proches oreilles indiscrètes. Elle ne pouvait rien promettre. Il le savait et n'en éprouvait pas moins de reconnaissance.... Mais cela ne dura guère plus de quelques secondes.

Les yeux d'or de Celondil reparurent bientôt pour ouvrir en grand et laisser leurs nouveaux invités entrer sans qu'aucun visiteur ne soit ressortit de la pièce.

Sur le pas de la porte, un grand elfe au visage doux, aux cheveux noirs et au calme communicatif, vint accueillir lui-même le nouveau venu. Sa tunique longue aux teintes ternes brunes et oranges lui donnait un air simple et soigné que renforçait la tiare de cuivre qui lui ceignait le front.

- Heru Medherith, je vous présente Lyorindel Mynervia, envoyé diplomatique du Trône Blanc et son apprentie, Ildilyntra Ianren.
- Merci Celondil. Tu peux disposer, je m'occupe du reste.

L'intendant salua bien bas le Protecteur à la voix douce et referma la porte derrière lui. D'un coup d’œil, le mystère du visiteur qui n'était pas ressorti s'expliquait assez simplement : au fond de la pièce assez spacieuse, une mosaïque de verre aux couleurs pâles couvrait presque tout le mur et laissait admirer un autre jardin suspendu. Au milieu, une porte-fenêtre n'était encore grande ouverte, laissant entrer une brise humide.

D'un geste avenant, Medherith enjoignit son hôte à se rapprocher de l'immense bureau croulant sous les papiers qui occupaient toute la partie droite de la large pièce. Lyorindel s'exécuta en le remerciant d'un hochement de tête, Ildilyntra le suivant comme son ombre, son gerfaut se tenant toujours fièrement, les serres enfoncées dans le gant de fauconnier de sa maîtresse. Plusieurs tapis recouvraient le sol et sur le mur opposé, une banquette et un fauteuil près d'un guéridon chargé de carafes et de fruits de saison créaient un coin plus décontracté. Le Seigneur Protecteur marchait à pas extrêmement lents et ne semblait pas s'être encore décidé sur la cible de cette éreintante balade. Les deux éperviers restèrent à un demi-mètre de leur hôte, allant à la même vitesse que lui, ne profitant pour laisser vagabonder leurs yeux.

- J'aurais aimé vous recevoir en des temps moins troublés, mais cela semble être devenu le quotidien de ma patrie ces dernières années. Que puis-je pour vous ?

« Je n’ose imaginer la charge de travail qu’est la vôtre, heru, et si ça peut vous rassurer je peux vous annoncer d’ores et déjà que nous ne resterons pas longtemps. Cela dit avant que nous ne commencions je me dois de vous prévenir et de demander votre autorisation : j’aime que mes discussions soient accompagnées par de la musique, cela pose-t-il un quelconque problème ? »

L'étonnement passa furtivement sur les traits du Protecteur mais la demande était plus incongrue qu'insultante et il l'accepta sans tergiverser, menant finalement ses hôtes vers la banquette, les laissant choisir leur disposition tandis qu'il se glissait du côté des boissons. L'apprentie d'un jour lâcha son oiseau qui voleta quelques instants dans la pièce avant de sortir par la porte-fenêtre grande ouverte puis elle prit sa cithare et s'installa en retrait pour s'assurer que sa musique ne reste qu'un bruit de fond. Quant à Lyorindel il alla s'asseoir en face du guéridon

- Et votre présence ne m'est pas désagréable. Vous voulez boire quelque chose ? Un peu d'eau ? Du jus de mûre ?

« Du jus de mûre, je n’en ai pas bu depuis trop longtemps, merci, et toi Ildilyntra ? »

« De l’eau sera amplement suffisant, merci beaucoup. » Répondit-elle en levant la tête de son instrument pour gratifier le protecteur qui les servait lui-même d’un charmant sourire avant de jouer quelques notes pour s’assurer que ledit instrument était correctement accordé. Une fois qu’elle était prête, Ildilyntra commença à jouer un air lancinant, faisant danser ses doigts d’une lenteur rigoureuse. Une fois servit Lyorindel leva son verre.

« Puisse I Emël faire revenir la paix et le calme à Ardamir. »
- A la paix. Continuant à jouer d’une main, Ildilyntra attrapa son verre de l’autre pour trinquer avec les autres. « Peut-être pouvons-nous aider d’une quelconque manière, heru Mederith. »
- Si je voyais la plus infime possibilité, je vous le ferai savoir. Mais pour l'heure je crains que non. J'ai envoyé un groupe de diplomate au Fort d'Ostirion et à celui de Wyslena hier matin. On dit bien que la patience est une des rares choses qu'on a jamais en trop.
« En effet, c’est une ressource précieuse qui s’use bien trop vite. Cela dit, j’espère que vous pardonnerez mon ignorance, quel problème vous accable tant qu’il nécessite l’envoies de diplomates ? »
- Les Lam'Nir ont mis le siège devant Ostirion pour obtenir de notre part que nous cession toute exploration de l'Aduram à partir de Wyslena. Ils ont également menacé d'attaquer à vue tout citadin qui ne suivrait pas les routes que nous avons tracées.
« Savons-nous de quel droit se permettent-ils tant de choses ? »

Demanda-t-il en ne laissant paraître de sa surprise qu’un haussement de sourcil, Ildilyntra accéléra le tempo pour que la musique colle mieux à la conversation qui se déroulait devant elle. Accessoirement c’était également pour dicter, ou du moins influencer, le rythme de la discussion et elle leva légèrement les yeux pour voir si le protecteur y était sensible.

- Il n'est pas question de droit avec les Noss. Nous marchons sur la corde raide comme nous le ferions pour ne pas empiéter sur le territoire de chasse d'une famille de tigres rouges. " déplora le Protecteur qui ne semblait pas particulièrement réceptif à la musique tant que celle-ci ne dépassait pas un certain niveau sonore. Lyorindel hocha lentement la tête en buvant une gorgée de jus de mûre.

La musicienne pouvait par contre voir la posture de l'ardamiri se tendre légèrement. Il n'appréciait pas cet état de fait, ou peut-être son soucis avec les Noss était-il plus profond ? A moins qu'il ne s'agisse d'un détail qu'il ne pouvait ajouter et qui le mettait sur la défensive. En attendant d'en savoir davantage, de s'assurer de ce qui clochait, Ildilyntra n'en informa pas son collègue, du moins elle lui indiqua d'une note particulière que le sujet était sensible.

- Les Lam'Nir sont dangereux, mais ils sont honnêtes. Ils ont toujours respecté nos accords, même lorsqu'ils ont eu l'occasion de nous faire du mal. La voie diplomatique à toutes les chances de réussir une fois de plus avec eux. Le véritable problème est de comprendre pourquoi soudainement, ils se mettent dans l'idée que l'Aduram ne peut supporter notre présence et que nous voudrions forcer le passage. C'est une idée fixe qui se propage parmi les clans de la région, soit disant portée par des Druides que nous n'avons jamais vu."

« Les noss devraient se rappeler qu’ils ne sont pas les seuls à évoluer dans l’Œuvre et qu’I Emël ne nous en pas exclus jusqu’à preuve du contraire ; les évènements du Voile peuvent même tendre à indiquer l’inverse. Mais j’imagine qu’ils n’ont pas voulu communiquer quoi que ce soit quant à leurs motivations… ils doivent pourtant bien savoir qu’autant d’agressivité ne mène à rien si ce n’est des larmes. » Le diplomate regarda le breuvage si sombre de son verre avec un air contemplatif avant de relever la tête vers son interlocuteur. « En tout cas j’admire votre patience, heru Medherith et je me permet de vous répéter mon offre : si nous pouvons faire quoi que ce soit pour aider votre protectorat n’hésitez pas, ce serait avec plaisir. »

Les mains du Protecteurs se crispèrent légèrement. Les paroles du Lëandrin ne lui parlaient que trop et il avait beau être confortablement assit, il s'en trouvait presque gêné.

- Et bien... à force d'y réfléchir, il y a peut-être bien quelque chose que vous pourriez faire. "

Le sourire doux de Medherith devint étrangement triste. A vrai dire, il regrettait déjà d'avoir prononcer ces paroles, mais il en allait de sa Cité... et si l'homme qu'il avait à son côté déplorait aussi vivement les tensions qui pouvaient exister en comprenant que les Noss avaient sans doute tort...

- Pourrez-vous vous faire en sorte que l'Aran s'assure que rien n'a pu suivre son retour des terres mortelles ? Rien qui aurait pu manipuler les Noss, au moins. Ce sont des gens simple, vivant dans la foi sans beaucoup de recule. Jamais il ne leur viendrait à l'idée qu'un elfe puisse usurper le titre d'un Druide... "
« J’étais avec Artiön lors du retour en Anaëh et il ne me semble pas que quoi que ce soit nous ait suivi mais je lui ferais part de vos craintes. » Dit-il en hochant la tête. Puis le protecteur pris une gorgée de son propre verre et ajouta.
" Mais je parle, je parle. Et vous ne m'avez toujours pas dit ce qu'une suite aussi hétéroclite que la votre venait faire ici. "

« Quant à la raison de notre venue… elle concerne justement Wyslena, comme le roi vous en a sûrement fait part il y a de quoi s’inquiéter avec ce qu’il se passe en dehors de l’Œuvre. Pour ce qui est des noss, vous y avez sans doute pensé toutefois si je peux vous suggérer une solution : envoyez des troupes renouveler la garnison d’Ostirion avec pour ordre de n’engager les hostilités sous aucun prétexte. Si les noss ne les laissent pas passer ça pourra être considéré comme un acte de guerre, s’ils les laissent passer leur position auprès des noss s’en trouvera compromise, sans compter leur position auprès des citadins ; ça nous permettra de montrer à tous qu’ils bluffent si c’est bien le cas, amoindrissant grandement leur crédibilité. Evidemment s’ils ne laissent pas passer vos soldats il est hors de question de devenir violent, vos troupes peuvent rester derrière les assiégeants et inverser les rôles, être encerclé rend souvent nerveux. »
- Nous ne sommes pas des hommes de guerre. Nous protègerons les nôtres s'il y a une véritable nécessité de passer, mais nous ne mettrons pas le feu à l'huile répandue sur nos propres terres. Comme je vous l'ai dit, les échos sont très récents et ne sont peut-être qu'un bref souffle. Les problèmes d'Ostirion datent d'hier à peine.
« Et c’est bien pour ça que je vous conseille de ne pas avoir recours à la violence. Vous avez envoyé des diplomates, ils vont négocier contre des noss en position de force si vous ne faites rien. Mais de toute façon je ne suis pas là pour ça, j’écrirais une lettre à notre roi une fois notre entrevue terminée. »

Lyorindel avala une nouvelle gorgée de jus de mûre qu’il savoura avant d’être rappelé à l’ordre d’une note, la même note qu’avait joué Ildilyntra à la fin de l’avant dernière phrase de Mederith, juste avant sa question. Il posa ensuite son verre et regarda le protecteur avec un air surpris sur le visage.

« Peut-être ai-je mal compris ce que vous avez dit, heru, mais avez-vous parlé d’usurpation ? »
- Je le crains. " Le protecteur eu l'air embêter, mais il avait déjà abordé le sujet alors à quoi bon... " J'ai déjà eu l'occasion de rencontrer un druide, ici même, et il nous a aidé à reprendre Eraison et à sauver des vies. Il était très jeune pourtant. Que certains druides mettent ainsi les clans sur la brèche sans venir d'abord nous entretenir alors que nous avons toujours accueillis dignement les leurs dans notre cité me semble aberrant. Si quelqu'un en avait appris assez au contact de la délégation du roi pour se faire passer pendant quelques minutes ou quelques heures pour un druide, cela aurait sûrement suffit à convaincre le premier clan. Le reste est hélas plus facile à imaginer. "
« Je vous présente mes excuses, je ne suis pas certain de comprendre. Vous pensez qu’une personne nous aurait suivi à notre retour, aurait, d’une façon ou d’une autre, appris suffisamment de choses sur les druides et leurs fonctionnements alors qu’il n’y avait aucun noss dans notre délégation, et avec ses connaissances aurait réussi à se faire passer pour un vrai druide auprès d’un clan entier de noss ? Je ne veux pas remettre en doute la parole du druide qui est venu vous voir heru mais êtes vous certains qu’ils vous a tout dit ? »
- Il n'en faut pas tant que ça pour faire croire à des personnes crédule qu'on leur apporte la vérité. Assurez vous seulement que le roi soit prévenu. Si mes craintes sont fondées, nous ne savons pas à quelle échelle ces problèmes se développeront. "
« Mais pourquoi croiraient-ils que cet individus leur apporte la vérité ? Pourquoi lui plutôt qu’un autre ? »
- La question est : pourquoi pas ? Je ne suis pas membre des clans et je ne prétend pas savoir ce qu'ils pensent. C'est une simple idée de ma part et j'espère sincèrement que ce n'est que l'imagination trop fertile d'un homme qui ne comprends pas les coutumes de ses voisins. " Il reposa son verre sur le guéridon près de lui et ajouta. " Écoutez, si vous souhaitez poursuivre votre route, sachez que nous n'enverrons pas de soldat réguliers pour vous accompagner. Nous avons encore trop peu d'informations pour savoir comment agir. Mais des diplomates et des Limiers pourrons vous escorter jusqu'à Ostirion si vous le désirez. "
« Parce qu’il s’agit d’un étranger mais peu importe, j’en informerais le roi. Cela dit nous nous contenterons des limiers pour notre voyage, merci beaucoup. »

Lyorindel termina son verre et échangea quelques autres banalités avec le protecteur toujours sur un fond musical qui n'osait monter assez pour être qu'autre chose qu'un accompagnement puis après les salutations de circonstances, l'épervier se leva finalement.

« Heru Merderith, je dois dire que vous rencontrer fut un plaisir et, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, ce serait avec joie que je reviendrais vous saluer à notre retour de la frontière. »

Lyorindel s'en alla ensuite avec Ildilyntra qui salua à son tour le protecteur, une fois sortis il demanda à son homologue d'aller voir si Aegden en avait terminé le temps qu'il écrive une brève missive au roi comme il l'avait en effet promis à Mederith.

Artiön,

Je t’écris pour te mettre au courant de ma dernière discussion, j’ai pu m’entretenir avec le protecteur d’Ardamir, Mederith, et il semble que la situation locale avec les noss soit tendue mais son hypothèse est aussi déstabilisante qu’elle est… farfelue ? J’ai un peu de mal à trouver le mot juste alors voilà sa théorie : quelqu’un nous aurait suivie lors de notre retour en Anaëh et aurait profité du voyage pour en apprendre sur nos cousins sauvages afin de se faire passer pour un druide et agiter lesdites noss. Pour le moment il semble qu’un seul clan soit sur le pied de guerre et je ne sais pas s’ils comptent mettre leur menace à exécution mais dans tous les cas la situation est suffisamment inquiétante pour tu en sois informé. Ma mission n’ayant pas pour objet les querelles entre sauvages et civilisés dans la région, je ne m’attarderais pas davantage pour en apprendre plus et je quitterais la cité dès que j’aurais retrouvé Aegden mais si tu veux mon avis la situation mérite qu’on s’y intéresse de près. Ou que tu envoies quelqu’un.

Dans tous les cas, qu’I Emël veille sur toi, ton épouse et ta fille,
Lyo.

7e jour de la 8e ennéade de Karfias ~ été
17e année du XIe Cycle
Soir
Environ d'Ostirion

Le Maître du Jeu s'adressant à son audience... Le voyage entre Ardamir et son improbable fort assiégé ont été particulièrement calme.

Le Protecteur et le représentant de Daranovar ont préféré repartir à Alëandir. Le premier pour ne pas interférer dans la politique locale déjà particulièrement échauffée et le second pour transmettre les messages et les avertissements, non seulement au Trône Blanc, mais également à sa cité, puisque Linaëh dépendant de cette dernière.

C'est donc avec un effectif réduit à six elfes que vous êtes arrivés au pied de la colline déboisée que surplombaient les murs à moitié effondrés d'Ostirion. Mais pas de panique, l'état des murs n'est pas nouveau. La pierre éclatée pendant le Voile a été remplacé par du bois et de la terre pour consolider les gravas, en accord avec les Noss alentours. D'ailleurs, la Noss en question, vous ne pouvez pas la rater. Un campd e fortune établis près des murs voit s'agiter une cinquantaine d'elfes sauvages aux cheveux colorés de façon particulièrement vive.

Pour ceux qui entendent la Symphonie, même sans la comprendre vraiment, un mauvais pressentiment vous atteint en regardant vers l'Ouest. Le chemin qui s'éloigne du fort vers votre destination réelle n'est pas sûr, vous en mettriez votre main à couper. Mais pour l'instant les Noss se contentent de vous regarder passez en vous jetant des regards mauvais.

A l'intérieur du fort, on vous propose de passer la nuit en toute tranquillité et de refaire vos provisions. En plus des informations que vous avez grappillées à Ardamir, les officiers vous font savoir que les Lam'Nir n'empêchent plus les elfes de passer du moment qu'ils restent sur la route. Ils disent qu'une druidesse attend plus loin et que c'est à elle de choisir qui doit passer ou non. Ils restent juste pour s'assurer que le Fort n'envoie pas de troupe en masse dans la forêt. Mais les faits sont là : sur les trois équipes envoyées sur le chemin pour parler à cette fameuse druidesse ou prendre des nouvelles de Wyslena ces derniers jours, pas une n'est revenue. Les oiseaux se font aussi tirés à vue sur le trajet. Un faucon vient d'ailleurs tout juste de partir pour Ardamir pour recevoir les ordres officiels sur la façon de gérer cette mystérieuse lubie des Noss et les disparitions successives. La tension est bien présente et il n'en manque que peu pour que la situation ne dégénère du côté des citadins, mais pour le moment, l'équilibre tien bon.

Mais l'aube se penche déjà sur vous et avec elle, la plongée dans l'inconnu.

Croaaaa ! Croa croa crooooa !
Oui, je sais que c'est très malpoli de t'avoir fait ça. Mais arrête de gigoter.

Habilement, l'archimage retira la flèche qui dépassait du poitrail du corbeau, lequel ne semblait pas plus affecté que cela par la blessure si ce n'était la rage qui brûlait dans son regard. Certains allaient payer pour cet outrage, et des doigts seraient férocement pincés en guises de représailles lorsque la créature issue des Ombres leur mettrait le bec dessus. Seule la magie pouvant sérieusement la blesser, elle n'en demeurait pas moins handicapée en terme de mouvements si les archers du coin commençaient à la transformer en porc-épic. Aussi, et avant de la renvoyer sur la trace des six elfes qu'il pistait, Haldren ajouta quelques recommandations de bon sens.

Essayes d'être plus prudent, ne voles pas trop haut ni en ligne droite comme si tu portais un message.
Croa...croa.

Difficile de dire si le corbeau avait compris les consignes, ses semblables pouvaient suivant les cas faire preuve d'une intelligence remarquable ou d'une attitude bornée à l'extrême. De toute façon, aucune autre solution ne s'avérait viable pour traquer ses proies car ils risquaient de passer par des rivières ou des précipices où seule une créature volante serait apte à les suivre. Tout en observant le petit point noir disparaitre à l'Ouest et en préparant patiemment ses sortilèges pour se téléporter loin au-delà, l'archimage s'interrogea sur les chances de succès de l'expédition dont lui avait parlé le roi lors de leur entrevue à Alëandir. Si les Noss réussissaient à décourager leur avancée en les renvoyant dans leur pénate la queue entre les jambes, tout irait pour le mieux et il n'aurait nul besoin d'intervenir. Sinon... eh bien il les attendrait au delà de Wyslena, à proximité de l'Aduram.

Une pensée parasite vint troubler la quiétude de l'elfe. Pourquoi tant de simagrées ? Ils ne sont que six, tues-les et bon débarras. C'est presque un acte de charité envers ces idiots que de leur épargner ce qui les attends à Lomëar. Un ricanement sardonique ponctua cette déclaration inquiétante. Je ne souhaite pas leur mort, juste leur échec. Baenfere n'insista pas plus, peut-être temporairement troublé par la difficulté selon ses critères de différencier les deux termes car en Elda l'échec amène souvent à une fin des plus funestes. Poussant un soupir affligé, Umbarion pria la déesse pour que sa mauvaise conscience ne vienne pas le tenailler à un moment autrement plus critique que ces instants de pause avant le grand chambardement.

Mais cela, seul l'avenir le dirait.

Tes craintes sont en train de se réaliser. Ardamir s’agite. Les « druides » plutôt que de choisir la voie des mots ont préféré agir, et tu as bien peur que les choses ne risquent fort de s’envenimer avec le temps. Parce que s’ils en savent autant que ce avec quoi est venu te trouver Haldren, ils en savent à la fois trop et pas assez. Ils menacent le secret du Chapitre Blanc sans présenter en face la moindre solution… et si Ardamir venait à devenir trop inquisitrice, alors le peu de confiance durement gagnée serait comme de la paille au feu.

Un geste, il te fallait faire un geste, mais cette fois-ci, il serait plus calculé.

Heru Mederith,

J’ai appris de mes hommes que la situation actuelle en Ardamir était particulièrement tendue, et que l’une de tes hypothèses quant au pourquoi de la situation était liée à notre retour de Thaar.

Effectivement, notre délégation n’est pas revenue seule des terres mortelles. Je tiens cependant à te promettre notre vigilance avoir été suffisante pour que je puisse t’affirmer que seules trois vies nous ont suivies à l’intérieur des frondaisons d’Anaëh.

- D’abord une elfe Vaanie de première génération dénommée Lirunwen, qui souffrait d’avoir été entraînée par la fuite de son père en ces tristes contrées. Elle est aujourd’hui sous la protection de l’Hospice des Libertaires à Alëandir, et en train d’être éduquée à nos mœurs, puisqu’elle a choisi de les adopter.

- Ensuite une jeune elfe Sylvaine, anciennement esclave du nom de Ciriyë, que tu connais peut-être. Récemment ses anciens maîtres auraient tenté de la reprendre, mais par quelque miracles, il nous fut donné de la croiser durant notre mission. Elle loge aujourd’hui avec sa mère, une dénommée Maliss, dans votre Cité d’Ardamir même. Loin de craindre d’elle qu’elle n’excite la frénésie des Ornedhels, j’ai tout de même peur qu’en proie au trauma, elle ne soit condamnée à revivre le même triste cycle d’événements tant qu’elle n’aura pas été délivrée de son mal.

- En dernière une autre Sylvaine, une Ornedhelle du clan Mirthil’Di dénommée Miresgal. Victime collatérale du sort de Ciriyë, elle trouva les mains des ravisseurs en même temps que la petite Ardamirie. Peut-être est-elle la seule finalement dont je ne peux avec certitude assurer la bonne conduite. Cependant, tu me verrais hautement choqué d’apprendre que celle s’étant fait un devoir d’accompagner sa camarade de calvaire au point d’accepter de repousser son retour plein et entier au sein de son clan ait la moindre once de goût pour la conspiration en elle.

Maintenant je vous fais confiance, à toi et aux Ardamiris, sachant cela, pour gérer au mieux la situation ; et je te remercie sincèrement d’avoir pris le temps de partager avec mes hommes. Il semblerait malgré tout que ce qui aurait dû être pour eux un trivial entraînement soit destiné à se transformer en enquête. Je me fie donc à toi pour l’orchestrer puisqu’il s’agit de territoires qui te sont connus, et je me tiens entièrement à ta disposition dans le cas où l’aide du Trône Blanc – de quelque manière que ce soit – te paraisse nécessaire.

PS : Entre tracer des cartes militaires et des portraits il y a un monde, mais si cela peut t’aider, voici des portraits de ma main des trois elfes en question.

Artiön

Mais maintenant que le Protecteur d’Ardamir en savait juste assez, il était impératif que le Doyen soit à son tour tenu au courant. Cette simple expédition secrète commençait à prendre des dimensions complètement démesurées.