Le joyau de Thaar [Modeste]

4ieme jour de la 1ere enneade de Verimios, aux premieres heures du matin
An 17, cycle XI.

Suite de Glissade

Le soleil n'avait pas encore dépassé les murs des bâtiments de la rue passante. Bientôt, badauds, coursiers, marchands, porteurs et ouvriers arpenteraient les pavés bien alignés et donneraient vie à la ville. Mais ce serait lorsque les boutiques auraient ouvert. D'ici là, boutiquiers et serviteurs s'affairaient par petits groupes, comme chaque jour.

Deux silhouettes à la peau noire remontaient la rue, vêtues d'uniformes clairement militaires parfaitement ajustés bleu nocturnes ornés de pourpre. Des Eldéennes à coup sûr. Les rares passants s'écartaient, l'air de rien, de leur passage.

La première, pieds nus, portait une robe courte à col large aussi simple que celles que  portaient les esclaves. Sa cuisse droite était couverte de scarifications cursives et une marque au fer rouge caractéristique ornait son cou. En comparaison à l'imposante camarade qui la suivait, elle paraissait aussi petite et gracieuse qu'une poupée. Sa taille un peu trop fine, mise en valeur par sa ceinture pourpre, y était peut-être pour quelque chose.

Mais cela ne pouvait être une esclave. Elle menait la marche, et toutes deux portaient une arme. Le fourreau pendait à la ceinture de la petite, une épée à deux mains oscillait à chaque pas de la deuxième.  

Elles s'arrêtèrent en face d'une boutique à la devanture couverte d'émaux.

- C'est ici? demanda la seconde dans la langue exotique des Eldéens, les bras croisés.
- Oui, ce n'est pas encore ouvert, mais à cette heure-là, elle est censée être déjà présente. La première avait jeté un œil par la vitrine, et frappa à la porte. Il y eut un petit temps de latence mu par la surprise avant qu'une voix masculine ne réponde.
-On est fermé ! Revenez plus tard ! Dit l'homme essayant de pas paraître trop grossier malgré l'agacement qu'il retirait de ce dérangement.
- C'est Talraë, je voudrais voir Maud avant l'ouverture."
- Talraë? L'imposante drow avait haussé un sourcil en chuchotant. "Combien de noms as-tu donc?" Shyn'tae adressa un regard malicieux à sa comparse pour toute réponse.

La porte s'ouvrit brusquement sur un Azhim qui ne cachait rien de son ressentiment envers la sombre. Surtout après la soirée qu'elle et son amie avaient passé ensemble et qui les avaient un peu trop rapprochée à son goût. Il dévisagea la seconde femme de la tête aux pieds avant de revenir sur la danseuse.
-Pour ça, faudrait encore qu'elle travaille ici. Dit-il sèchement. Et si c'est pour finir votre bijou, faudra voir avec une autre bijouterie.

Shyn'tae haussa une oreille, l'air étonnée. L'autre drow observait Azhim, impassible, les bras croisés.
- Vous n'étiez pas censés être associés? Où est-elle? Le regard carmin de l'Eldéenne était posé sur le sien, soudainement glacial.
-On l'est plus. Se contenta-t-il de rétorquer, des fois qu'elle n'ait pas compris le message.
- Manifestement, on a du mal à se comprendre." Soudainement, la drow le saisit à la gorge et le poussa dans la boutique. Derriere lui la deuxième Eldéenne referma la porte avec nonchalance.
- Question simple. Où est-elle? Etrangement, le timbre de sa voix n'avait pas varié d'un hiota. Elle l'observait avec l'indifference d'un chat.

Azhim faisait déjà moins le fier... Il réalisait seulement de la merde dans laquelle il se trouvait après avoir verbalement agressé un drow armée et escortée.
-Je... Chez elle je suppose. Aux dernières nouvelles, elle avait pas retrouvé de travail...
- Bien... On progresse." Elle lui souriait, maintenant. Sa poigne se desserra légèrement du col de son vêtement "L'adresse maintenant."

Azhim bégaya à plusieurs reprises, hésitant manifestement à lui répondre.
-Euh... Ben, je... Qu'est-ce que tu lui veux ? Demanda-t-il, regrettant aussitôt d'avoir posé cette question... Il pensait à la sécurité de Maud mais il oubliait un peu la sienne au passage...

- Tu veux m'expliquer en quoi cela te regarde, Azhim, ou tu me donnes cette adresse tout de suite ?
-Je... Je tiens à ma peau... Mais pas au point de la jeter en pâture. Même si on est en froid.

Etonnement, l'Eldéenne hocha la tête, et consentit à lâcher son col.
- Je viens la payer pour son travail, et lui en proposer plus. Et malheureusement j'ai déjà trop perdu de temps avec toi, j'ai beaucoup à faire aujourd'hui. Donc c'est simple. Tu me donnes cette adresse tout de suite, ou... connais-tu notre déesse Kiel ?" Sa voix douce et exotique glissait comme le vent. L'index de la drow effleura sa joue avec sensualité, faisant se raidir tous les muscles du peintre. Il hocha brièvement la tête de gauche à droite. Il ne connaissait pas cette divinité mais quelque chose lui disait qu'il ne valait mieux pas s'y frotter... Et cette adresse, il l'a lui donna finalement, plus par peur que par consentement. Il n'était pas certain que la sombre vienne vraiment pour le travail... Ni qu'elle ne lui voulait que du bien.

Mais en tout cas, après lui avoir tapoté l'épaule avec bienveillance, elle s'en retourna. Au dernier moment, avant que la porte ne se referme derrière elle, la noiraude s’arrêta et lui adressa un dernier regard chaleureux.

- A propos de Maud... J'espère que tu n'as rien fait qui n'exige le pardon de tes dieux... Les miens sont bien moins magnanimes.

Il ne fallut qu'une dizaine de minutes aux deux magiciennes pour rejoindre le lieu que leur avait indiqué l'humain. C'était une jolie maison, mitoyenne à d'autres habitations, installée sur un terrain légèrement en pente. On accédait à son entrée en descendant quelques marches de pierre usées.

La main valide de Shyn'tae frappa plusieurs fois le bois de la porte. Sa partenaire attendait en haut de l'escalier, attentive. La porte n'était pas très épaisse et la moitié supérieure était vitrée. Aussi, quand des pas approchèrent, ils s’arrêtèrent à quelques mètres de la porte. Le visage grave de Modeste s'illumina soudain et elle se précipita pour aller ouvrir. Sans attendre, elle se jeta au cou de son amie.

-Tu es revenue ! Cria-t-elle joyeusement. L'Eldéenne parut un bref instant surprise de l'enthousiasme de son amie, mais son expression soucieuse se mua en sourire alors qu'elle enlaçait son amie. Ses lèvres se posèrent sur les siennes en un doux baiser que la brune ne refusa en aucune façon.
- Oui. J'avais promis." Elle serait revenue de toute manière. "J'ai... appris que tu n'étais plus à la boutique... Que se passe-t-il ?" Les doigts gracieux de la noirelfe écartèrent une mèche de cheveux rebelle du visage de sa séduisante amante. Modeste lui saisit une main, enlaçant ses doigts aux siens.
-C'est une longue histoire. Répondit-elle en l'attirant à l'intérieur. Ton... amie peut entrer si elle le souhaite. Ajouta-t-elle en jeta un rapide coup d’œil à l'ombre qui se tenait en haut des marches. Ladite drow l'avait saluée brièvement. Elle parvenait à paraître dangereuse malgré une posture nonchalante. Sans lâcher la main de son amie, Talraë échangea quelques mots avec elle dans la langue du Puy d'Elda.

Il y eu un silence, puis la discussion s'accéléra, les mots s'écoulaient des bouches des deux Eldéennes si vite qu'elles étaient difficiles à suivre. L'inconnue leur adressa finalement un sourire carnassier, puis se redressa. Deux derniers mots, un salut et elle s'en retourna.

Talraë posa son regard dans les yeux de Modeste, elles se glissèrent à l’intérieur, la porter se referma derrière elles. "On a quelques heures à nous... Il faudra juste la prévenir si on va ailleurs."
-Depuis quand tu es accompagnée comme ça ? S'étonna la jeune humaine avant de poser les yeux sur son cou. Du bout des doigts, elle effleura la marque au fer rouge puis releva un regard inquiet vers la sombre. Cette dernière frémit au délicat contact de son amie sur le contour de cette main stylisée dont émanait un éclair. La drow fit la moue, sans se départir de son expression féline.
- J'ai eu quelques complications... soupira-t-elle. "Mais j'ai su me montrer assez convaincante pour garder la vie, donc tout va bien. Je crois... que Maître Dalhmael est censée s'assurer que je ne fasse honte à personne. Une tâche impossible si tu veux mon avis."

Cette dernière réplique eut au moins le bénéfice de faire sourire son amante. Cependant, l'inquiétude se lisait toujours dans ses yeux. Comme la plupart des vaanis, elle savait reconnaître une marque d'esclave lorsqu'elle en voyait une. Elle avait toujours eu l'impression que Talrae était pleine de ressources et possédait un certain pouvoir parmi les siens. Avait-elle mal compris ou y avait-il eu un revirement de situation ?
Sa main remonta pour venir caresser sa joue noire auparavant marquée par une cicatrice disgracieuse aujourd'hui presque invisible. Depuis la nuit qu'elles avaient passé ensemble, Modeste ne s'était jamais montrée aussi tactile avec quelqu'un. Comme un chat, joueuse, la drow ferma les yeux et tendit la joue, souriante, provoquant la caresse. Elle avait pourtant déjà couché avec d'autres hommes mais, ensuite, ils n'étaient de nouveau plus que des amis. Avec Talrae quelque chose avait persisté malgré tout. Au petit matin, elles étaient un peu plus que de simples amies.

-Dalhmael ? Et cette femme, qui est-ce ? Lui demanda-t-elle en jetant un bref regard vers le haut de l'escalier qu'elle pouvait deviner depuis la porte d'entrée.
- C'est elle justement. La Maitre mysticiste Liss'na Dalhmael, des mages de guerre du Puy d'Elda. La sombre était préoccupée par les problèmes de Modeste, et pourtant, c'était des siens qu'on parlait... Comment en était-on arrivé là ? Modeste vit ses oreilles si expressives se tendre, signe qu'elle réalisait quelque chose. Ses yeux se rouvrirent pour glisser sur ses traits délicats.
- Ne t’inquiète pas tant pour moi, je ne suis pas esclave." Elle souriait, sa voix douce et apaisante. En miroir, ses doigts caressaient la joue de la belle humaine. "Pas officiellement. La Ditrown Da're,... ma supérieure, a jugé que je devais prouver ma fidélité aux dieux et à l'Elda. Cette marque est ma "récompense" pour avoir réussi." L’échec n'avait pas été une option, pas cette fois là. Elle en parlait comme si rien de tout cela ne la dérangeait.

Modeste soupira de soulagement tandis que ses lèvres s'étirèrent dans un sourire. Tous ces événements traversés par son amante la troublait mais, si elle lui disait que tout allait bien, elle n'avait pas de raison d'en douter. Elle trouverait donc moyen de s'en arranger, consciente que les eldéens ne vivaient pas de la même manière que les vaanis. Ce qui semblait être une épreuve terrible à ses yeux ne l'était pas forcément pour Talrae.
-D'accord. Finit-elle par dire pour chasser ses propres inquiétudes. Puis elle se pencha pour venir l'embrasser une nouvelle fois et plus longuement qu'à l'arrivée de la sombre. Un baiser doux et un peu plus langoureux auquel la sombre répondit avec une fougue indomptée. Passant la main dans son dos, elle la retint contre elle, heureuse de sentir la chaleur de son ventre contre le sien, la pression de sa poitrine contre la sienne. Chaque seconde attisait en elle les flammes de sa passion... Si bien que lorsque leurs lèvres se séparèrent, le souffle de Talraë s'était fait rapide et enfiévré, laissant sa compagne dans le même état qu'elle.
- J'ai envie de toi...J'ai encore besoin de toi... Mais... plus tard. Le baiser fiévreux qu'elle lui offrit alors en disait long sur ses priorités.

La première phrase avait fait sourire Modeste tandis que la seconde avait fait se froncer ses sourcils brièvement. Cependant, si cela pouvait attendre... Car la sombre avait su réveiller le feu dans le ventre de la jeune femme et elle souffrait assez mal d'être empêchée à ce sujet. Surtout en ce moment...
Alors que son corps était bien volontiers venu se coller au sien, elle attira la noirelfe vers une porte qui semblait donner sur un salon. Elle n'avait pas envie de quitter la chaleur de ses bras mais, il le fallait. Elle interrompit donc leur baiser à son tour.

-Ne restons pas là... Ma mère n'est pas censé rentrer mais... Sait-on jamais. Je n'ai pas envie qu'elle nous trouve dans la cuisine. Ria-t-elle, plus soucieuse d'être vue en mauvaise posture qu'en la compagnie de Talraë à proprement parler.

- Ce serait si grave? Lui murmura malicieusement la noirelfe, qui pourtant respecta sa volonté. Ses yeux carmins suivaient les mouvements souples de la danseuse, sa démarche elle-même volontairement chaloupée alors qu'elle la suivait dans la maison. Ainsi elle vivait chez sa mère ? Mais il était évident à Talraë que ce n'était pas de questions que Modeste avait besoin à cet instant. C'était réciproque.

-Si nous en parlons assez facilement toutes les deux, les humains ne mêlent pas pour autant leurs parents à leur vie sexuelle. Expliqua-t-elle simplement et sans se départir de son enthousiasme à l'égard de ce qu'il se préparait.
- Ah! L'Eldéenne éclata d'un rire joyeux.

Le salon fut rapidement traversé afin d'atteindre l'escalier qui menait à l'étage. La chambre de Modeste était la première à gauche. La porte en était reconnaissable de part les peintures qui en ornaient le bois. Elle les firent entrer et la porte se referma bien vite derrière elles. La pièce était plutôt petite mais elle permettait d'accueillir un grand lit, un coin de toilette, une grande armoire ainsi qu'une coiffeuse. Les murs étaient colorés, de même que les draps et les voilages. Le tout formait un ensemble harmonieux et chaleureux, à l'image de la jeune femme. Il y avait une porte fenêtre ouverte sur un petit balcon donnant sur une sorte d'impasse. La vaanie ne s'en préoccupa pas une seconde et se tourna vers son amante, le corps vibrant de l'attirance qu'elle avait pour elle et qu'un simple baiser enflammé avait savamment su réveiller.

L'Eldéenne la dévorait des yeux. Puisqu'elle était chez elle et ne comptait pas sortir, la belle avait revêtue une robe plus légère que celles qu'elle mettait pour aller travailler. Le tissu était si fin qu'on pouvait presque deviner le velouté de sa peau en dessous. On voyait un peu plus de son buste et de son dos sans pour autant rendre Modeste indécente et lui donner ainsi la possibilité d'aller ouvrir à la porte sans gêne. Cependant, alors qu'elle observait le regard de Talraë sur elle, elle se sentait subitement bien plus à nue qu'elle ne le pensait, ignorant que la lumière émanant de la fenêtre derrière elle laissait tout voir de ses courbes en rendant le tissu presque transparent. Sa chevelure formait un halo autour d'elle.

- Tu es presque parfaite... L'Eldéenne s’avança vers elle et plongea ses lèvres sur son cou élégant en la poussant vers le lit. Sa main frôla le tissu soyeux qui enveloppait son ventre, puis remonta sur un sein aux rondeurs attirantes. Modeste ne fit rien pour empêcher la sombre de la faire se reculer lentement. Tout juste se tenait-elle à ses bras pour s'empêcher de tomber en chemin.

Lorsqu'elle bascula sur le lit, l'Eldéenne la suivit aussitôt, à genoux sur les draps colorés, et ses lèvres vinrent sceller les siennes une fois encore pour un long baiser. La vaanie prit son visage en coupe mais ses mains descendirent bien vite sur le corps de son amante pour le couvrir de multiples attentions. Elle passa bien vite sur son buste, cajolant ses seins en chemin, pour trouver ses genoux et remonter le long de ses cuisses déjà mises à nues par se robe si courte...
- Aujourd'hui... laisse moi faire... tu mérites tant de plaisir..." Les lèvres, les doigts de la noirelfe parcouraient ses courbes fines, plus bas à chaque instant. Elle s'attarda sur ses seins, l'un après l'autre, pendant que sa main remontait sa robe le long de sa cuisse si douce. Modeste avait obéi, cette fois encore, et ses mains avaient stoppées leur progression. Elle en reprit plutôt possession afin de dégager sa poitrine de son habillage de tissu. Elle voulait sentir les lèvres de Talraë sur elle. Lui offrir le goût de sa peau...

Son index glissa le long de l'intérieur de ses cuisses... Et le brune soupira de désir.

Elle effleura ses lèvres si alléchantes... Et la vaanie se mordilla la lippe. Elle ne voulait rien réclamer. Elle voulait se laisser faire et laisser la noirelfe mener le jeu. Elle voulait se plier à sa volonté car elle savait que la jouissance qu'elle en retirerait méritait ces instants de frustration et de plaisir mêlés. En cet instant, elle était tout à elle...

Modeste avait offert sa poitrine, Talraë se devait de l'obliger. Son visage fondit dessus, sa chevelure blanche comme la plus pure des neiges caressait la peau des deux globes qu'elle était occupée à flatter. Ses dents trouvèrent un téton raidi par le désir qu'elle mordilla, suçota, pinça doucement.

Plus bas, ses doigts se glissaient entre des lèvres rendues humides par l'excitation.

Son index trouva sa petite perle, l'effleura, puis glissa en elle à peine, juste assez pour qu'elle en veuille plus, mais pas assez pour la satisfaire.

Ses doigts dansaient, répétant leur valse, au rythme de sa bouche passionnée qui suppliciait ses seins l'un après l'autre. Modeste voyait ses oreilles effilées frémir à chacune des preuves de son ivresse. Puis, lorsque Talraë fut certaine qu'elle n'en pouvait plus, son beau visage fiévreux se redressa... "C'est comme ça.. que tu es parfaite", murmura-t-elle, avant de descendre de se glisser plus bas contre ce corps brûlant et de loger la tête entre ces cuisses qu'elle adorait tant. Sa réplique avait étiré un sourire sur les lèvres de son amante qui s' était demandé ce qu'elle entendait par "presque" quelques minutes plus tôt. Ainsi c'était pour ça... Et cela lui convenait parfaitement. Elle leva les bras au-dessus de sa tête, docile.

La sombre la dévora, vorace, fougueuse, sa langue expérimentée enfouie dans sa fleur à laper son nectar un instant, sur sa perle durcie ensuite. Les jambes parcourues de spasmes de la belle caressaient délicieusement ses oreilles pointues si sensibles, l'incitant à continuer, encore et encore, fervente.

La noirelfe sentit la jouissance de son amante approcher alors que sa voix se faisait de plus en plus forte sous ses attentions. Alors, pleine de malice, elle ralentit ses efforts pour offrir à Modeste un peu d'un répit qu'elle n'avait pourtant en rien demandé.

La perspective de l'extase s'éloigna un peu. Les lèvres de la sournoise noirelfe reprirent leur oeuvre, assoiffées de son plaisir, pour la laisser à nouveau si proche... Et la priver à nouveau de la délivrance, en un jeu qui tenait à la fois de la torture et de l'euphorie. C'était frustrant... Si frustrant pour la vaanie qui pourtant se laissait faire et ne bronchait pas. Tout juste libérait-elle un soupir sonore alors que la déception la tenait de voir le bout de son plaisir s'éloigner encore et encore. Elle baissa les yeux, cherchant les iris de son amante bien logée entre ses jambes. Elle toisa son regard carmin mais ne dit rien et ne fit rien. La sombre savait pertinemment quel supplice elle lui faisait endurer. Quant à elle, elle avait choisi de lui permettre de faire ce qu'elle voulait d'elle, de se faire son jouet pour le temps qu'elle le désirerait.

Mais alors qu'elle sentait l'orgasme s'éloigner encore une fois, elle poussa un petit cri de frustration.

-Tu... Tu comptes j... Jouer à ça... Encore... Longtemps ? Demanda-t-elle, le souffle si court, se sentait si fébrile pour la langue de son amante.
- J'hésite... Talraë avait relevé le visage, sa langue vint chatouiller son clitoris. Son regard pétillant dépassait des deux monts qui ornaient le torse de sa belle, sa voix rieuse. "Et si tu demandais gentiment ?

À son tour, Modeste hésita, partagée entre deux envies... Celle de jouir enfin ou de continuer ainsi. Parce que, mine de rien, elle aimait ce que Talrae lui faisait subir. Finalement, elle reposa sa tête sur le matelas sans rien demander. Elle le ferait... Mais pas maintenant... Les lèvres de son amante s'étaient posées contre son clitoris, qu'elle suçotait avec adoration. L'humaine se rendait-elle compte que la drow s'infligeait une frustration pas si différente ? Voyait-elle à quel point ces sensations lui étaient délicieuses, à elle aussi? Qui aurait cru que Maud serait si sensible à ce type de plaisirs ? Combien d'autres surprises l'attendaient-ils encore? Elles avaient tant en commun... Talraë brûlait d'une passion inextinguible seulement en imaginant une fraction de ce qu'elles pourraient accomplir ensemble.  

Alors elle continua, la croupe dressée, concentrée, curieuse de savoir à quel point elle pouvait lui faire approcher l'orgasme sans qu'elle ne le touche. Ses doigts œuvraient à l'unisson de sa langue, le goût délicieux de l'excitation de la belle emplissait sa bouche. Elle vénérait sa partenaire comme si elle avait été une déesse. Le temps ne comptait pas. Une petite voix soufflait à la drow qu'elle était pressée... Mais jamais elle n'aurait pu  précipiter un tel instant.
Et ce moment dura et dura encore. Modeste résistait tant bien que mal alors que la jouissance menaçait de l'emporter de plus en plus vite après chaque pause. Mais Talraë savait toujours quand s'arrêter. Elle était bien trop savante en la matière pour échouer à un tel exercice. Finalement, après un nombre bien trop important d'orgasme manquer, alors que les gémissements de Modeste n'en finissait plus, que son souffle était celuitde quelqu'un qui avait traversé toute la cité avec la mort aux trousses et que son cœur battait à tout rompre, la voix de la belle brisa leur jeu dans un cri.

-D'accord  ! D'accord... Je t'en... Je t'en supplie, finissons-en. Fais-moi jouir !
- Fais-moi jouir aussi pour le mériter !" retorqua l'Eldéenne en bondissant comme un chat sur le lit, elle la chevaucha, glissant ses cuisses fines de chaque coté de la tête de l'humaine. Sa jupe était remontée pendant ses efforts et son sexe rendu luisant par l'excitation se glissa si proche de ses lévres qu'il l'effleura. De l'autre coté, Modeste la sentit se jeter à corps perdu sur le temple de son plaisir.

La vaanie ne rechigna pas devant sa demande. Ouvrant la bouche, elle dressa sa langue et effleura le clitoris de son amante. Une fois... Deux fois... Talraë miaula son approbation, sa croupe s'appuya un peu plus sur ses lèvres. La brune embrassa alors son sexe avec passion, mettant en application tout ce qu'elle lui avait appris la dernière fois. De manière générale, elle était une élève appliquée et plutôt douée. Elle voulait faire preuve d'autant de qualités dans cet instant. Avec ferveur et dextérité, elle travailla l'entrejambe de Talraë de sa langue un petit moment avant de mêler des doigts à l'affaire. Ses propres gémissements et cris se trouvaient étouffés par sa nouvelle position.

Leurs voix se mêlaient maintenant pour former un cœur qu'Isten devait trouver des plus doux. Talraë se laissa porter toujours plus haut. Leurs corps tremblaient, tendus. De son bras, l'eldéenne plaqua la Vaani contre sa bouche. Elle retint l'extase qui menaçait de l'emporter. Cette fois-ci, lorsque son amante fut sur le fil du plaisir, elle continua, éperdue, pour la plus grande satisfaction de Modeste qui était enfin libérée de l'étau que leurs ébats avaient créé autour d'elle.

Ensemble, les corps enlacés furent emportés par une extase rendue plus grande encore par la frustration qu'elles s'étaient infligées. Bien loin de s'arrêter à cause de l'orgasme, la brune embrassa le sexe de son amante avec plus de ferveur encore, étouffant son propre cri sur ses lèvres fébriles alors que sa partenaire, consumée par le plaisir, faisait de même. Elle sentit les spasmes de la sombre sur ses doigts et continua ses allées et venues en elle jusqu'à ce que ses cris ne finissent par cesser...

Talraë sentait son ventre soulevé par la respiration de son amante. Elle ne bougea pas pendant un long moment, ses caresses devenues tendre. Elles étaient si bien ainsi l'une contre l'autre... Finalement, l'Eldéenne se souleva laborieusement pour pouvoir se retourner, et se recoucher tout contre Maud, les yeux dans ses yeux.
- Toujours aussi bien... Elle déposa un baiser sur ses lèvres, un sourire enchanté aux lèvres.

-Le sexe avec toi est une série d'expériences dont je ne me lasserai jamais. Répondit la brune avec une étincelle de malice dans les yeux.

Leurs tenues étaient totalement indécentes mais ni l'une ni l'autre ne semblait vouloir s'en préoccuper. Modeste avait les seins mis au jour et les pans de sa robe retroussés jusqu'au hanches. Mais cela faisait partie du charme de cette scène.
Apaisée pour l'instant, la vaanie plongeait son regard dans celui de sa partenaire. Elle l'observa, dégageant son visage de mèches de cheveux blancs.

-J'y prends toujours autant de plaisir.
-J'ai envie de t'apprendre tout ce que je sais... puis de découvrir de nouvelles choses. Pas forcément dans cet ordre. ronronna sa partenaire avant de lui tirer la langue. Modeste libéra un rire cristallin puis reprit plus de sérieux pour lui répondre avec une pointe d'envie dans la voix.
-Avec grand plaisir...

La jeune humaine pressa un peu plus son corps contre celui de la sombre mais ce contact ne l'a satisfaisait qu'à moitié. Elle fit une moue boudeuse.

-Ta peau me manque... Dit-elle juste avant de remonter une main sur le décolleté de Talraë. Son index se glissa sous l'uniforme et le tira délicatement vers le bas. Avec un peu d'effort, sa poitrine en déborda finalement. De nouveau, elle vint se coller à elle mais cette fois ses seins nus trouvèrent sa chaire noire en lieu et place du tissu et les deux amantes soupirèrent d'aise en se blottissant un peu plus l'une contre l'autre, enlacées.
- Je passerais bien ma journée comme ça... Sa main caressait tendrement le dos de la belle brune. "Mais je crois qu'il y a un rendez-vous auquel je ne couperai pas..." Le regret était perceptible dans sa voix. Cela ne devait pas être pour tout de suite, car l'Eldéenne ne semblait pas décidée à bouger. Sa réplique provoqua cependant un grognement enfantin et déçu chez son amante qui releva de nouveau un visage contrarié vers elle. Sa réaction était surjouée mais le fond était sincère. Elle partageait son sentiment.

-Tu restes plus longtemps cette fois ? Demanda-t-elle avec une lueur d'espoir dans la voix.
Le sourire de Talraë grandit, plein de malice alors qu'elle continuait, énigmatique.

- Si on se débrouille bien, peut-être. D'une pause, elle ménagea le suspense. Son index vint effleurer les lèvres de la belle."J'ai du travail pour toi. Mon rendez-vous... Je vais rencontrer le conseil des princes marchands.  Non annoncée. Mais je crois qu'ils n'auront pas le choix de me recevoir ou non. L'Eldéenne adopta une moue timide. "Tu peux m'aider à faire forte impression? J'ai tous les moyens qu'il faudra, cette fois, et bien plus encore." Son nez vint caresser le sien, délicatement, ses yeux carmins plongés dans les siens... "Et si je peux faire forte impression auprès de toi en même temps..."
Modeste sourit à cette dernière phrase pour lui faire savoir qu'elle appréciait cette petite référence à elle.

-Tu me fais déjà forte impression pour bien d'autres raisons. Dit-elle en se redressant pour se retrouver au-dessus de la sombre. Elle caressa sa joue d'un revers de main puis la remit droite pour effleurer son cou. Je dois pouvoir t'aider mais à seulement quelques heures du rendez-vous, tu exagères... Fit-elle faussement outrée par l'audace de sa requête.
- Désolée.... La mine coupable de chaton pris sur le vif était particulièrement réussie.

Elle ignorait quand aurait lieu le rendez-vous mais, puisque la sombre ne semblait pas pressée, elle imaginait avoir un peu de temps pour la préparer. Mais elle ne ferait sans doute pas aussi bien que si elle avait eu une journée ou plus.

- J'y vais quand je veux, je suppose. Mais il faudrait mieux ne pas trop attendre. Ils vont vite savoir que les Eldéens sont là. La drow prit une mine contrite. "Tu voudrais bien faire de moi une déesse alors? S'il te plait?"
Modeste se pencha pour déposer un baiser sur les lèvres de Talrae puis se redressa pour lui adresser un sourire.
-Hmmm... On va devoir aller aux Soieries alors... On ferait mieux d'y aller. Je vais passer quelque chose de plus décent. Surtout que maintenant ma robe est froissée.
- Pourtant je te trouve très attirante comme ça. La drow lui adressait un regard plein de promesse auquel la brune répondit en la grondant silencieusement. Elle n'aurait pas à insister beaucoup pour lui redonner envie et elle le savait parfaitement...

***

Liss'na s'était installée à la terrasse d'un salon de thé non loin de la demeure de Modeste. Son épée à deux mains posée contre sa table, une tasse fumante posée devant elle, elle était plongée dans un ouvrage à la couverture couverte de symbole mystiques lorsque les deux amantes passèrent devant elle main dans la main. Shyn'tae la salua et lui adressa quelques mots dans la sombre langue, et la Maitre mage passa la bandoulière de son épée au travers de son épaule aussi que s'il s'agissait d'un sac pour les suivre. Ses regards furtifs témoignaient qu'elle était plus attentive à son environnement qu'elle n'en donnait l'impression au premier abord. L'accompagnatrice de Shyn'tae ne les dérangea en rien pendant le temps que les deux amies passèrent à arpenter les boutiques du quartier des soieries.

Evidemment, il aurait été plus pertinent de faire réaliser à l'Eldéenne des vêtements sur mesure par un tailleur, mais le temps manquait pour cela. Alors Modeste la conduisit dans les boutiques où elle savait pouvoir trouver robes et bijoux de la meilleure facture que l'artisan pourrait retoucher assez vite pour son amie. Pendant le trajet, la drow ne fit rien pour masquer sa relation avec son amie. Tout au contraire, ses attentions s’enchaînaient, entre caresses et baisers joyeux. Elle avait décidé que ce jour serait dédié au plaisir plutôt qu'aux épreuves qu'elles avaient toutes deux traversées et avait la ferme intention d'en profiter, pour elle comme pour son amante.

Cette boutique là était une des plus en vogue dans la capitale de l'Ithri'vaan. Si l'artisan avait un doute sur ses deux clientes, il n'en laissa rien paraître, car, en bon commerçant, il s'avait qu'à Thaar, il ne fallait jamais se fier aux apparences. Entourées de mannequins présentant les créations raffinées du tailleur, et avec son aide, elles sélectionnèrent plusieurs robes qui pourraient convenir à la morphologie de l'Eldéenne, puis vint le moment des essais.

Le moins qu'on pouvait dire de Talraë était qu'elle n'était guère pudique, aussi entreprit-elle de se déshabiller sur le champ, ce qui fit beaucoup rire Modeste qui trouva son geste plutôt amusant. Gentiment, elle l'arrêta dans son élan avant que le commerçant ne s'en mêle et elle l'attira vers l'arrière de la boutique. Là se trouvait un espace assez restreint dans lequel elle l'entraîna avec leurs robes puis elle tira le rideau pour les cacher de la vue de tous.

-Les Thaaris ne sont pas connus pour être pudiques mais ils ont leurs limites en publique. Expliqua-t-elle en se retournant vers son amie. Bon, on s'y met ? Fit-elle avait une excitation soudaine. Il lui tardait de découvrir l'allure de Talraë dans une riche tenue locale.
- Pfff, les humains sont parfois ennuyeux, il y a quelques trucs qu'on pourrait vous apprendre." soupira-t-elle, faussement agacée. Dextrement, devant la Vaanie, Talraë se saisit d'un ourlet de son uniforme Eldéen et, après s'être penchée en avant, et s'en libéra, dévoilant son corps gracieux dans sa nudité. Son corps, plus encore que lorsqu'elles s'étaient vu un mois auparavant, était parcouru de cicatrices. Son abdomen, en particulier, portait sur tout son pourtour des traces de nombreuses coupures profondes et maladroites. Maud avait déjà vu les scarifications rituelles sur sa cuisse, mais c'était là autre chose. Elle perdit subitement son sourire en découvrant les blessures récentes de son amie. Elle s'avança, l'air de nouveau aussi inquiète que lorsque la sombre était venue frapper à sa porte.

-Talraë... Elle approcha ses mains du buste de l'eldéenne mais n'osa pas la toucher. Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ?!

La drow s'était penchée vers sa sacoche mais s'arrêta, ses oreilles s'orientèrent dans la direction de Modeste.
- Je... Elle aurait voulu dire qu'elle ne voyait pas de quoi elle voulait parler, mais cela aurait été un mensonge qu'elle ne se sentait pas capable de rendre crédible. Pas maintenant, pas à elle. Les muscles de la danseuse s'étaient tendus, le silence seul répondit d'abord à Modeste. Elle préférait tant ne pas se souvenir... De la douleur, un peu, mais surtout de tout son corps qui s'opposait à sa volonté, qui lui hurlait d'arrêter, seconde après seconde, alors qu'elle le déchirait.

Parce que c'était la seule chose à faire, la seule chose qui lui permettrait de survivre.

C'était une épreuve qu'elle avait surmonté pourtant, non?

Le plaisir était si efficace pour effacer l'angoisse.

- J'ai eu à prouver... ma dévotion... ma persévérance ? L'amante de Modeste semblait douter de ce qu'elle même disait, le regard égaré sur le sol de l'arrière salle. Sa réponse troublait la vaanie plus qu'autre chose. Il y eut un silence d'hésitation.
-Qu'est-ce que... Qu'est-ce que tu as dû faire ?...

Question simple, et pourtant redoutable. Comment dire cela à une amie? "T'en fais pas, je me suis juste enlevée moi-même deux cotes, et d'une seule main avec ça! Ça a l'air compliqué? En vrai, ça l'est encore plus que ça en a l'air, elles sont bien accrochées les vilaines !" Peut-être que ça passerait mieux avec un clin d’œil? Non... Au même instant, l'idée qu'elle était en train à nouveau d'usurper la confiance que sa supérieure avait placé en elle se développait en elle. La prochaine fois... Elle ne se contenterait pas de deux côtes. La drow serra les dents. Elle devait faire... ce qu'elle avait à faire.

Il fallut de longues secondes pour que Talraë réagisse à la question. Elle se retourna vers son amante, et lui adressa un petit sourire contrit. Dans sa main, l'Eldéenne prit celle de Modeste, et s'approcha d'elle, jusqu'à ce que leur poitrine vienne à nouveau appuyer l'une contre l'autre. Elle pouvait presque sentir les battement de son cœur. En dessous de la cage thoracique, il y avait une paire de côtes détachées des autres. Guidant sa main, Talraë fit sentir à Modeste leur dureté, juste sous la peau recouverte d'étoffe légère. Puis, ces doigts fins et clairs, elle les fit évoluer doucement sur sa peau d'ébène... elle lui fit sentir leur absence.

"Je suis vivante, je suis là... maintenait tout ira bien" aurait-elle voulu dire.

La jeune vaanie retira subitement ses doigts dans un geste incontrôlé et recula d'un pas. Elle observa les marques sur la peau de son amante. Il y avait tellement de traces... Le geste avait été maladroit... Elle fut soudain prise d'un haut le cœur en comprenant qu'elle avait dû s'infliger ça elle-même. Se trancher les chaires... S'arracher les côtes... Demeurant les yeux désespérément fermés, elle refoula de son mieux la nausée qui l'avait saisie. L'univers de son amie n'était définitivement pas le sien et il était si sanglant qu'elle n'était pas sûre de le comprendre un jour. A voir Modeste souffrir ainsi, Talraë sentit son cœur se serrer, les angoisses refoulées agréger en une boule douloureuse logée dans sa poitrine. Finalement après un long silence, l'humaine reprit la parole d'une voix étranglée.

-P... Pourquoi on t'a obligé à t'infliger ça ?...

Une larme perla sur sa joue. Une sensation dérangeante titillait ses propres côtes. Comme si quelqu'un les tenait dans ses mains et tirait dessus. Ce n'était pas douloureux mais cela n'en demeurait pas moins étrange et désagréable, n'aidant en rien sa nausée. La sombre tendit la main, une distance s'était formée entre elles. Elle aurait voulu la prendre dans ses bras, la rassurer mais s'en sentait incapable à cet instant. Son corps la dégoûtait-elle maintenant ? La drow avait-elle encore cassé quelque chose ? Elle sentit une fatigue irrésistible la submerger.

Ce n'était pas le moment...

La douleur se fit d'autant plus forte.

- J'ai... La vérité... quelle était-elle vraiment? La sombre n'était plus certaine de rien. Tout avait fait sens dans son esprit à un moment, autrefois. Cela faisait des ennéades qu'elle refusait de répondre à cette même question.
- Il se dit que... j'ai déserté... que j'ai usurpé un rang qui n'était pas le mien... que j'ai négligé nos dieux... J'ai été punie... Mise à l'épreuve devant Kiel, pour tous mes échecs... Je crois... je crois que L'Renor l'a fait pour moi. Elle aurait pu se contenter de me tuer.

Alors c'était ça l'alternative ? La mort ou une souffrance sans nom ? Une souffrance qu'elle ne devait pas se contenter de supporter mais se donner à elle-même ? Modeste avait mal pour elle... Au sens métaphorique car elle ne pouvait sans doute pas imaginer la torture que cette épreuve avait pu représenter. Cependant, si c'était le prix à payer pour la revoir en vie... C'était peut-être égoïste de sa part mais elle l'acceptait alors plus facilement.
La jeune humaine s'approcha finalement de Talraë et vint se blottir dans ses bras, l'enserrant à peine des siens, comme si elle craignait de lui faire mal. Elle tenait à elle, plus qu'elle n'avait bien voulu l'admettre. Son amie. Sa partenaire de danse. Son amante. Son instructrice des plaisirs. Et peut-être d'autres choses qu'elle ne voyait pas encore où qu'il était trop tôt pour reconnaître.

-Dis-moi que tout est fini maintenant... Ou est-ce qu'il y a autre chose que je devrais savoir ?

Le corps nu de l'Eldéenne frémit à ce contact si doux. Sa main se glissa contre le dos de son amante avec tendresse, et elle posa la tête contre son cou pour soupirer, rassurée sans qu'elle ne parvienne à savoir pourquoi. Les derniers mots que Modeste avait prononcé résonnaient dans son esprit. Tout pouvait-il être jamais fini ? L'expression incrédule du Prima Sanguis, agonisant sur le plancher, une auréole sanglante autour de la tête se matérialisa dans son esprit. Elle était tout aussi incapable d'oublier les derniers mots qu'il avait prononcé, les mots qui l'avaient tué. Que ferait le Karliik lorsque finalement, il apprendrait la trahison des princes marchands? Elle s'en doutait. Elle n'avait fait que prendre une vie pour offrir un peu de temps à Thaar, à son amante, à l'artisan qui les recevaient. Qui d'autre qu'elle pouvait mettre ce temps à profit? C'était elle qui avait fait le premier pas. Elle ne pouvait pas s'arrêter.

Talraë se redressa alors pour admirer son amante, leurs regard plongés l'un dans l'autre.
- Je ne peux pas te dire ça... Ce serait mentir... lui souffla-t-elle doucement. "Désolée... Je ne... " Elle était incapable de dire toute la vérité... Peut-être devait-elle se lancer. "Je ne m'appelle pas Talraë, même si j'aime beaucoup entendre ce nom sur tes lèvres... Mon nom est Shyn'tae. Elle sourit, malicieuse. "Mais j'ai rien contre avoir un nom juste pour toi. Mon bras... je l'ai perdu aux jeux de Thaar, il y a quelques années. Pour le reste... Je suis ici pour convaincre les princes marchands de ne pas provoquer l'ire de mon peuple... Tu veux toujours m'aider ?"

Modeste ne dit rien durant quelques instants. Cela faisait tellement d'informations d'un coup... Elle réalisait qu'elle ne savait presque rien de son amante jusque là. Mais elles avaient passé si peu de temps ensemble... Et si on l'avait prise pour une traîtresse à son retour au Puy, cela expliquait qu'elle ne lui ai pas donné son vrai nom. Elle se cachait sans doute. Elle ne saurait lui en vouloir pour ça. La sombre semblait soucieuse concernant ce que la brune pensait et ressentait en cet instant. Elle paraissait si sincère dans ses paroles autant que dans ses gestes plein de tendresse. Maud n'était certainement pas prévue dans ses plans. On disait les drows manipulateurs mais qu'aurait-elle à retirer d'une relation avec une simple joaillière ? Pourtant, elle était revenue...

Mais pourquoi pensait-elle à cela ? Comme si quoi que ce soir était engagé entre elles. Ce n'était pas le cas. Officiellement, elles s'entendaient bien, elles s'amusaient, prenaient du bon temps ensemble, expérimentaient... Elles étaient amies.
Maud étira un sourire malgré ses inquiétudes et ses réflexions.

-On dit que les drow sont violents et égoïstes mais tu manœuvres pour la sécurité d'un peuple qui n'est pas le tiens... Bien sûr que je veux toujours t'aider. Je me passerai bien d'une guerre.

Une guerre qui les séparerait d'ailleurs...

- Je me passerais de celle là en particulier..." soupira sa compagne. Une guerre facile, sans défi, qui ne ferait qu'affaiblir le Puy, et la priverait de l'Ithri'vaan et de tout ce qu'il s'y trouvait. Peut-être était-ce là une véritable raison non avouée... Shyn'tae se sentait bien ici.

Comme pour sceller sa promesse, la vaanie embrassa Talraë avec plus de douceur qu'elles ne l'avaient fait jusque là. L'Eldéenne fut prise au dépourvu, puis se détendit, s'oubliant dans ce baiser plein de tendresse qu'elle voulu faire durer. Lorsqu'elles se libérèrent l'une l'autre, Modeste plongea de nouveau son regard dans le sien.

-Nous disions donc... Une déesse.Un sourire amusé se peignit sur son visage puis observa les vêtements qu'elles avaient sélectionnés. Son amante hocha la tête. Et soudain... Oh ! J'ai une idée !Et elle sortit aussitôt de la cabine pour venir quelques instants plus tard. Elle lui tendit une robe blanche plutôt simple à première vue mais ce qu'elle avait encore dans les bras donnait un aperçu de ce qu'elle avait en tête...

Les doigts de Talraë effleura l'étoffe douce. Elle réalisait qu'elle ne se souvenait pas avoir jamais rien porté de similaire. Elle frissonna, un sourire pensif accroché à ses lèvres.

- Essayons. Aidée de son amante, la sombre elfe n'eut guère de difficulté à se glisser dans la robe toge dont le blanc immaculé contrastait avec sa peau noire. Ouverte sans interruption sur le coté droit, la robe dévoilait un liseré de flanc sombre du bras jusqu'à la jambe coupé seulement par les quelques chainettes d'or qui la retenaient. Elle mettait en valeur sa taille que l'épreuve qu'elle avait subie rendait à nulle autre pareille. Plus bas, asymétrique, la robe découvrait toute la longueur de sa jambe d'ébène ornée des scarifications rituelles.

Ceci fait, Modeste étira devant les yeux de Talraë ce qu'elle avait trouvé pour l'accompagner. Elle passa alors dans le dos de l'eldéenne pour le fixer autour de son cou. L'accessoire était des plus large et d'une finesse rare. L'or dont il était constitué s'associait parfaitement au blanc de la robe dans une alliance très riche et distinguée.
Lorsqu'elle eut terminé, la vaanie repassa devant la sombre. Lui tenant la main, elle recula pour l'admirer. Puis, dans un rire de joie et d'excitation, elle l'attira hors de leur petit recoin, la conduisant jusque devant un miroir. Elle se posta derrière elle et détailla son reflet.

-Tu es magnifique. Lui souffla-t-elle.

La drow en avait le souffle coupé. Elle se déhancha, comme étonnée de voir la sombre devant elle suivre ses mouvements. Son oreille droite s'abaissa, l'autre relevée.

Ces teintes claires contrastaient avec sa peau noire. La coupe de la robe mettait en avant tout ce qui rendait la noielfe si belle, en passant par ces nouvelles marques à sa cuisse sur lesquelles Modeste n'osait plus la questionner après tout ce qu'elle venait d'apprendre. Mais cela faisait partie d'elle, c'était gracieux et très eldéen. Puisqu'elle venait afin de représenter son peuple, il ne fallait surtout pas les cacher.

La jeune femme releva les cheveux encore courts de son amie afin de dégager sa nuque.

-Il faudrait une coiffure en hauteur pour mettre ta tenue en valeur. Avec un diadème ou des accessoires en or pour faire un rappel des teintes. Songea-t-elle.
- Il faut absolument..." Elle s'était agenouillée devant sa sacoche, et en extrait deux bijoux. D'abord vint un bracelet d'avant bras en or fin. Il était orné de ce que la joaillière identifia immédiatement comme des pierres précieuses. Puis Talraë souleva avec délicatesse un enchevêtrement de chaînettes et de bandes d'argents et... étaient-ce de fines lames ? "... que je porte ces deux bijoux."
Modeste détailla ce que la sombre lui montrait. Le premier se mariait assez bien avec sa tenue même s'il était dommage qu'il comporte des pierres précieuses. La richesse et la beauté de ce qu'elles avaient choisi étaient amplifiés par sa simplicité. Le second en revanche détonnait un peu avec l'ensemble du fait de sa teinte. Elle scruta le regard de son amante et comprit qu'elle n'avait pas vraiment le choix. Alors... Elle prit les deux joyaux d’orfèvrerie et passa le bracelet au bras gauche de la sombre puis passa le suivant à sa main droite. Se faisant, elle ralentit soudainement la cadence avant de s'arrêter totalement pour observer le bijou.

-Attends, c'est...

La noirelfe se déhancha sensuellement, sa longue jambe nue effleurait le tissu, visible sur toute sa longueur et plus haut encore. Un sourire félin illuminait son visage. Majestueuse, elle étendit un bras gracieux, et une griffe d'argent effleura la menton de sa compagne. Il en aurait fallut plus pour qu'elle ne coupe, mais il n'y avait aucun doute sur ce qu'elle voulait signifier par ce geste.

- Krish me l'avait offerte... Je crois qu'elle me respectait... J'ai l'impression que c'était il y a des siècles... Je n'ai jamais pu lui rendre. C'est trop tard maintenant.... Peu à peu, elle s'était rapprochée de la belle humaine, d'une démarche féline qui faisait danser l'étoffe soyeuse de sa jupe.... Le métal froid glissa sur sa joue si douce.. et se retira. "J'adore quand tu me rends belle." Et sur ses mots, elle avait plaqué ses lèvres sur les siennes.
Maud avait l'impression de ne jamais pouvoir lui refuser un baiser, une étreinte ou bien plus encore. Elle n'avait jamais eu une telle attirance pour quelqu'un. Aucune qui ait duré aussi longtemps en tout cas. Aucune qui perdure même en dehors de ces instants où la curiosité et la fièvre la tenaillaient. Mais elle avait l'impression que Talraë n'avait presque rien à faire pour raviver le feu en elle. Un regard, une caresse, une phrase... Cela suffisait.

-Mais tu es belle. Souffla-t-elle entre deux baisers.

Cependant, leur étreinte devait s'arrêter là. Derrière elles, le tailleur se racla la gorge pour les interrompre alors qu'il était en train de discuter avec une cliente et sa jeune fille. La vaanie dut se tourner pour voir son regard désapprobateur puis elle se retourna vers la sombre, ne pouvait s'empêcher de pouffer de rire.

-Tu me fais totalement perdre le contrôle je crois. S'amusa-t-elle. Le sourire malicieux de sa compagne grandit. Manifestement imperméable au jugement, elle se pencha sur ses hanches, le buste droit, et la pointe de sa langue vint effleurer le lobe de l'oreille ronde de Modeste. "Tu n'aimes pas quand on perd le contrôle ?" lui glissa-t-elle d'une voix séduisante. La brune laissa échapper un soupir qui en disait long sur l'effet qu'elle lui faisait.
-Je n'ai jamais autant aimé ça que depuis que je te connais... Susurra-t-elle à son oreille avec envie avant de se redresser légèrement, se forçant à reprendre un peu de sérieux malgré l'étincelle qui venait de s'allumer en elle. Mais ici, il y a des lieux pour ça... et je te rappelle que tu as un rendez-vous à ne pas manquer aujourd'hui. Finit-elle en plissant les yeux.

- Oh... " La drow fit la moue comme une enfant à qui on refusait une sucrerie, provoquant l'amusement de sa partenaire. Elle n'avait à cet instant personne d'autre qu'elle à qui rendre des comptes. Grâce à Modeste, elle se sentait libre, chargée d'énergie, capable de tout.
- D'accord. Le Prima Sanguis qui est venu avec moi à Thaar avait des chaussures à talon. Je soupçonne qu'il faisait ça seulement pour être le plus grand. Tu crois que des sandales comme celles là m'iraient bien? Modeste se retourna pour voir de quelle paire elle parlait.

-Hm... Un peu trop clinquant vu ce qu'on a déjà choisi. Réfléchit-elle tout haut. Pourquoi pas celles-là ? Avec les lanières dorées qui remontent assez haut, sa mettrait ta jambe déshabillée en valeur et ferait un rappel des ornementations sur tes épaules.

- Avec ces griffes, je suis à ta merci... Veux-tu bien m'aider ?" La sombre elfe avait tendu sa jambe fuselée, l'exposant entièrement, et posé la pointe de son pied svelte sur l'assise d'une chaise. Le regard qu'elle surprit de la part d'un apprenti du maître tailleur lui plut au plus haut point. Le jeune humain s'était déjà enfui. Modeste quant à elle apprécia la vue et, si elle avait remarqué son échange silencieux avec le fuyard, cela l'aurait surtout amusée. Elle s'agenouilla, une chaussure à la main, et la lui passa. Puis elle la laça autour de son mollet et jusqu'à son genou, chacun de ses gestes se faisant caressant. Les frémissements de la jambe de la drow comme son regard dévorant témoignaient de l'effet qu'elle avait sur sa compagne. Lorsqu'elle eut fini, elle laissa l'une de ses mains lui échapper discrètement le long de la cuisse couleur de nuit. A son plus grand plaisir, Talraë ferma les yeux un instant. Puis Maud se releva, l'air de rien afin de ne pas éveiller un peu plus la contrariété du marchand, et alla chercher la seconde pour répéter le même petit jeu.

Devant le miroir, la drow ne pouvait qu'admettre que l'effet l'enchantait. Blanc, noir et or se mêlaient harmonieusement. Depuis combien de temps... ne s'était-elle pas sentie aussi fière ? "Toi aussi tu es une magicienne..." L'humaine fit une légère révérence devant le compliment. Talraë souriait, fit quelques pas de danse. Les chaussures la gênaient, mais elle avait l'envie de faire cet effort, d'apprendre à corriger ce changement. Un défi qui paraissait si simple et tellement en valoir la peine en même temps.

Face à Modeste, elle s'approcha, puis s’arrêta avant de pencher la tête de coté, pensive. Elle observait la Vaani tel un chat prêt à bondir sur sa proie.

-Il y a un gros problème...
-Lequel ? S'étonna la belle vaanie incrédule.
- On ne fait pas la paire... Mais ça peut s'arranger... sa griffe effleura son épaule, ses yeux carmins la dévoraient.
-De quoi est-ce que tu parles ? Fit la brune en étirant un sourire étonné et intrigué, ne comprenant toujours pas où elle voulait en venir.
- Quelle robe te plairait ? N'importe laquelle. enchaîna aussitôt la drow, clairement amusée.

Maud écarquilla les yeux dans une expression de surprise. Elle regarda rapidement autour d'elle. Il n'y avait pas d'étiquette avec les prix mais elle n'en avait pas besoin pour imaginer que la vente de son ancienne boutique et de son fond de commerce ne suffirait jamais à payer une seule de ces merveilles. Si elle pouvait espérer partir avec une chaussure orpheline, ce serait déjà beaucoup...

-Non, je peux pas... Talraë. Je peux pas accepter. Répondit-elle, gênée par la simple idée du cadeau qu'elle voulait lui offrir.
- Mais pourquoi ?" Sa compagne paraissait sincèrement surprise. "Il n'y en a aucune qui te plait ?" Elle se tourna vers le tailleur, clairement sur le point de l'alpaguer sur le sujet mais Modeste l'arrêta dans son geste.
-Non non, ce n'est pas ça... Mais c'est trop ! Et puis, je n'aurais jamais l'occasion de la porter. Continua-t-elle, mal à l'aise à l'idée que son amie dépense une fortune pour quelque chose qui resterait dans un placard. On ne met pas de tenue aussi dispendieuse dans les endroits que je fréquente. Ajouta-t-elle avait un sourire qui devait lui rappeler sa propre condition. Elle n'était qu'une femme du bas peuple. Alors certes, elle vivait dans une jolie petite maison dans un quartier plutôt calme mais c'était bien loin de ce que connaissait ne serait-ce que les richesses moyennes de ce pays.
- J'ai gagné tout cet argent en faisant des trous dans un vieux croûton et un Triumvir dépressif. J'en fais ce que je veux.
-Attends ! Tu es... La comète ?!Lâcha Maud en essayant de ne pas laisser sa surprise faire s'élever sa voix trop fort.

Talraë cligna des yeux, prise à son tour au dépourvu. Quelques clients avaient tourné la tête, le tailleur semblait intéressé.
- Oui ? Elle fronçait les sourcils, ses oreilles asymétriques, l'une baissée, l'autre levée. "C'est... Les gens se souviennent ?" murmura-t-elle alors. Et Modeste d'étirer un sourire amusé devant l'air crédule de son amie.
-Bien sûr. Tous les champions d'arène gardent leurs noms gravés dans les mémoires. La comète, le Gobelin, Noble Lame et même des plus anciens comme l'Araignée ou le Briseur de marteaux. C'est l'activité nationale ici, même si je n'aime pas trop ça, j'avoue.
- Oh... J'aimais bien ma petite jupe... On l'avait conçue pour qu'elle soit facile à arracher. Lorsqu'Hanegard a tiré dessus, elle est partie... je crois que ça m'a fait gagner la finale.

L'humaine ria de cette petite anecdote.

-Tu me ferais presque regretter de ne pas avoir été là pour voir ça.
- Je pense que tu as bien fait, c'est aussi lui qui m'a fait perdre mon bras, rétorqua-t-elle, sans aucune acrimonie.

Modeste effleura tendrement le membre invalide du bout des doigts. Elle savait pertinemment que cela ne lui ferait aucun effet mais elle le fit pour le geste plus que pour la sensation. Et puis, un sourire malicieux étira malgré tout ses lèvres.

-Ça ne t'empêche pas de lui trouver des utilités.Lança-t-elle en référence à leur première fois ensemble.

- Oui." Le même sourire coquin éclairait son visage.
- Excusez-moi Mesdemoiselles? Le tailleur était venu jusqu'à elles. "Vous êtes vraiment... " Son regard parcourait Talraë des pieds à la tête comme s'il avait du mal à y croire. La Comète avait disparu peu après sa victoire, et certains pensaient que le Puy d'Elda l'avait faite disparaître pour avoir gagné à la place du Triumvir Urgoll'ven. D'autres affirmaient que tout avait été truqué. Et il y avait ceux qui admiraient la combattante qui, avec son air de jeune femme à peine entrée dans l'âge adulte, avait su triompher de deux vétérans alors que tout semblait perdu pour elle. Comment avait-il fait pour ne pas reconnaître cette drow? C'était un homme pragmatique. Il y avait là une occasion en or, qu'il ne pouvait pas manquer.
- Êtes-vous à Thaar officiellement ?" C'était une question rhétorique. Personne ne venait s'habiller chez lui pour rester incognito.
La Cométe plissa des yeux, son regard glissa du mâle à Modeste. Elle commençait seulement à comprendre où il voulait en venir. Sa voix s'éleva.
- Je peux mettre en avant vos créations. Au conseil. Plus tard aussi. Tant qu'elles continuent à me plaire autant qu'aujourd'hui. L'homme sourit. Il pouvait être indifférent aux relations qu'entretenaient la drow, tant qu'elle lui apportait du marché.
- En échange... Il me parait juste que je ne paie pas ce que je vais porter. Je vous les rendrai.
- Bien sûr, rendez les quand vous le pourrez." Il savait comment cela marchait. Il ignorait que ce n'était pas son cas. La drow pressa aussitôt l'avantage.
- Et cette jeune femme m'accompagne. Admettez qu'elle mettrait bien en valeur vos plus sensuelles créations.
L'homme était commerçant, il n'hésita pas. "Bien sûr."

Talraë adressa un sourire victorieux à Modeste.
- Tu ne peux plus refuser, je crois.
La jeune humaine la fusilla gentiment du regard. Elle avait bien mené sa barque pour arriver à ses fins. Elle repartirai avec une création de couturier hors de prix. Profitant que le commerçant soit occupé, elle lui murmura quelques mots.

-D'accord, tu as gagné. Mais je te signale que je vais devoir emporter puis ramener une robe que je n'aurais pas l'occasion de porter de toute manière.
Les griffes de la drow effleuraient sa joue gauche, elle se pencha, et ses lévres glissèrent sur la droite. Le ton qu'elle employa était plus malicieux que jamais.
- Et pourquoi pas ? Si tu te laissais aller... si tu étais libre... Si tu te contentais de suivre tes désirs... que ferais-tu ? Tu es si belle... J'ai envie de t'admirer... j'ai envie de te voir fière... J'ai envie de voir les Vaani se retourner à ton passage... Modeste sourit en détournant légèrement le regard. Depuis le début, Talraë lui faisait tant de compliments... Elle se savait plutôt jolie mais, avec elle, elle l'avait l'impression d'être la plus superbe de femmes. Tu du moins à ses yeux. Elle retrouva assez vite les iris carmins de son amante.
-Je n'ai pas beaucoup d'ambitions tu sais. Isten ne m'apprécierait pas je crois. Plaisanta-t-elle à moitié en se souvenant de cette conversation durant laquelle elle lui avait expliqué très brièvement les préceptes de cette Déesse.

Les lèvres de Talraë frôlèrent les siennes, elle se redressa alors vivement, et s'étira, joliment cambrée. Pourtant, c'était elle qui se considérait incapable, inadéquate, insuffisante.. Désespérée de se convaincre du contraire par tous les moyens.

- On ne peut pas être sûre avant d'avoir vraiment essayé. Alors ! Quelle est ta couleur préférée ? La drow étincelait, magnifique, son sourire conquérant. Maud la regarda d'un œil toujours réprobateur. Cependant, elle savait admettre sa défaite et ne chercherai donc plus à lutter. Il était temps de se prêter au jeu.

-Le bleu foncé me va bien. Il fait ressortir mes yeux et contraste avec ma peau dorée. Mais je me demande si je ne devrais pas essayer le noir... Acheva-t-elle en venant caresser le teint sombre de son amie. Elle n'avait jamais rien porté de plus foncé que le bleu nuit mais elle n'aurait rien contre l'idée d'être assortie à Talraë.
- Parfait! Essayons.

Lorsqu'elles eurent terminé, Modeste était vêtue d'une robe de soie noire. De la soie d'araignée du Puy d'Elda, avait insisté le tailleur bien plus aimable qu'auparavant. Les yeux pétillants de Talraë buvaient aux courbes séduisantes de la demoiselle que le bustier comme la jupe courte mettaient si bien en avant. Elles avaient porté leur dévolu sur une robe plutôt simple, modeste même en comparaison à d'autres qui emplissaient la boutique, mais Talraë avait elle même reconnu que c'était avant tout son amante qu'elle voulait admirer. Des bijoux d'argent et des sandales de cuir noir semblables à celles de la sombre complétaient ses atours. La jeune vaanie n'avait jamais été si richement parée alors que c'était sans doute une tenue parmi les moins chères de la boutique.

Talraë avait remercié le tailleur avec enthousiasme, lui avait promis plus d'une fois de faire fructifier son investissement, mais, apparemment pressée, ne s'était pas attardée. Leurs affaires s'étaient retrouvées dans la sacoche de la drow, son épée accrochée à une ceinture de soie assortie à la robe qu'elles avaient déniché. Prenant son amante par la main, rieuse, elle l'avait entraînée dehors.

Et sitôt la porte franchie, elle l'avait enlacée, la soie douce sous son bras. La sombre préférait avoir le visage de son amante à sa hauteur. Tête inclinée, les lèvres des belles demoiselles s'étaient scellées une fois de plus. Le baiser langoureux qu'elle voulu partager avec elle aurait pu n'avoir de fin. Dans la rue, un passant qui les regardait en percuta un autre.

- Tu es magnifique.. J'ai tellement envie de toi" Avoua-la drow à son oreille, d'une voix chargée de désir. Il y avait eu une époque où elle aurait fait l'effort de se retenir, de se contrôler. Mais Talraë savait ce qu'était perdre ce qui vous était cher. Elle savait à quel point Modesteavait été fière de son travail. Alors, aux yeux de son amante elle méritait ces compliments et cette franchise.
-Si tu n'avais pas ce rendez-vous.. Répondit l'humaine en l'embrassant de plus belle. Cependant, elle devait se contraindre à interrompre leur étreinte. Elle se redressa alors légèrement pour lui adresser quelques paroles susurrées pour sa seule oreille. Allons te coiffer puis tu fileras au Conseil. Plus vite tu auras fini, plus vite tu auras le plaisir de me retirer cette robe que tu voulais tant que je porte...

Elle n'évoqua pas les bijoux. Y avait-il vraiment besoin de les enlever pour assouvir leurs désirs ? Mais plus tard... Pour l'heure, il fallait trouver une bijouterie disposant des bons accessoires pour réaliser une coiffure de déesse. Et Modeste de l'entraîner encore une fois à sa suite en riant, ses doigts mêlés aux siens.