A votre bon souvenir

1er jour de la 4ème ennéade de Vérimios – Premier mois de l’Hiver.
17ème année du XIème cycle.
Dans le bureau royal.

Les derniers jours avaient été des plus fournis en documents à lire, à parapher, à sceller du sceau royal ou à renvoyer devant le conseil afin d’y apporter les modifications nécessaires à leur exécution, leur réalisation. Harald n’en finissait plus avec les conseils, les missives à lire et relire, les heures penchées au-dessus d’une carte du royaume, aussi grande que la plus grande des tables du conseil. Aujourd’hui, Harald était prêt à prendre une dernière fois la parole en face de tous les thanes encore présents à Kirgan, pour exposer sa vision des choses, ses projets, sa politique, ainsi que les enjeux du Zagazorn, et les dangers qui guettent la nation. Prenant son plus beau vélin, et sa plus belle plume, il s’attela à écrire la missive qu’il enverrait bien vite à Salfaryl le Sombre, le Dawi des Mille-Caves. Harald savait maintenant, qu’il devait voir plus grand. Lorsqu’il dirigeait Lante, il n’avait besoin que d’yeux et d’oreilles des deux côtés des frontières entre Lante et les Wandres, et entre Lante et l’Anaëh. Maintenant, en tant que Grand-Roi, il devait avoir des informations venant d’un peu partout, notamment du Sud, où les Drows semblaient être toujours aussi dangereux pour les peuples qu’ils purent l’être jadis pour les Nains. Connaître les enjeux était toujours important pour un souverain, surtout s’il voulait mettre les siens à l’abri.

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2ème jour de la 5ème ennéade de Vérimios – Premier mois de l’Hiver.
17ème année du XIème cycle.
Un corbeau du Zagazorn se présente au relai Kirgan – Mille-Caves.

1er jour de la 4ème ennéade de Vérimios – Premier mois de l’Hiver.
17ème année du XIème cycle.

Maître des Mille-Caves,

Je ne doute point que vos émissaires aient déjà apportés à vos esgourdes, les nouvelles des derniers évènements du Zagazorn. Mais il m’est apparu, en cette période charnière, qu’il était nécessaire de réaliser cette missive et m’entretenir avec vous directement, plutôt que de passer par des émissaires et des porteurs de voix.

Je me souviens d’ailleurs de la visite d’un de vos émissaires de Lante, lorsque j’y étais Gazanundi, et j’espère que cette entrevue saura vous rappeler à mon bon souvenir.

Feu Hardrek Poing-De-Fer, souverain du Zagazorn et premier roi ayant combattu le Voile, a rendu son dernier souffle sur son lit de mort. Son caveau inaugure la crypte royale, là où seront enterrés les prochains Groman-Rik de notre nation.

Au terme de l’Althinkalan, je fus élu nouveau Groman-Rik du Zagazorn, le soixante-huitième. Et c’est en cette qualité que cette missive est rédigée, et que le sceau royal est appliqué.

J’ai souvenance des craintes qui vous animaient voilà plusieurs ennéades, et de l’orage qui planait au-dessus des têtes des Durgazdawi, dont vous êtes le maître. Je partageais ces craintes, et je m’en saisi encore plus en ce jour, alors que les Mille-Caves demeurent un partenaire économique fraternel et important de notre puissante nation.

Aussi, parlerais-je maintenant sans détour, d’un souverain à un autre. Je partage vos craintes liées aux actes et mouvements des Drows, et vous tiendrais grand mérite de bien vouloir informer le Grand Nord dès lors que la situation évoluera par chez vous. Que cette situation évolue par les gestes des Drows, ou ceux des Umgis, ou les vôtres, je souhaite les connaître.

Prenez cela comme le renouvellement d’une confiance séculaire qui demeure forte et sincère. Ne doutez point de la sincérité et de l’honnêteté de mes propos. En échange, j’espère ne point avoir à douter des vôtres.

Je me permets d’espérer lire une missive portant votre sceau dans les délais les plus brefs. Et je vous renouvelle la confiance du Nord en notre partenariat commercial.

Que les divinités posent sur vous une main et un regard bienveillant.

Harald Barbe-Sanglante.
Groman-Rik du Zagazorn

« Ainsi, le jeune Hardrek est mort. »

Voila les premiers mots qui s'échappèrent du vénérable glissoir alors que le Maître des Caves parcourait la longue, lourde, imposante et précieuse missive parvenue du lointain pays paternel. Des origines de sont auteurs, il ne connaissait que peu de chose, outre la renommée et la rumeur, mais Salfaryl se devait d'avouer une chose : il appréciait déjà le geste. Ce Harald Barbe-Sanglante, semblait plus ouvert d'esprit que moult de ses prédécesseurs. Sa longue expérience des récits, ritournelles et autres tournures lui donnait l'avantage de pouvoir décrypter quelques grand traits de personnalités derrière un simple phrasé.
Trempant un stylet rafiné dans un encrier d'or massif, il se mit à coucher les runes sur le vélin.

Le Dawi qui avait fait le chemin depuis l’air de caravane de Kirgan jusqu’à la loge royale, était aussi essoufflé que l’on pourrait l’être après avoir couru au travers des reliefs, avec une armure suffisamment légère pour le permettre, mais suffisamment lourde aussi pour protéger le messager. Lorsqu’il remit la missive entre les mains de Harald, lequel se trouvait au milieu d’une salle creusée qu’il utilisait comme bureau. Pour le remercier, Harald lui offrit un geste de la tête, et le gratifia d’un remerciement sincère, ainsi que d’un temps de repos dans la taverne la plus proche qui, en plus, servait cette délicieuse bière du Brissalion.

A la lecture de la missive, Harald comprit maintenant quelle différence cruciale se jouait entre le Grand-nord, et le Sud. Le Nord n’était point parfait – quand bien même Harald aimait y croire. – mais l’honneur était le maître mot de toute une nation depuis des cycles et des cycles. Il existait, bien-sûr, des parias, des nains de mauvaise vie, de peu de confiance. La rumeur selon laquelle, les Nains tenaient plus à l’or qu’à la parole donnée, n’était pas tout à fait vraie, mais pas tout à fait fausse non plus. De son passé à Lante et dans le Brissalion, de ses jeunes années de militaire au bas de l’échelle obligé de patrouiller dans les quartiers de Lante durant les heures de commerce, Harald se souvenait avoir vu mainte et mainte fois, des heurts et des échauffourées entre commerçants et négociants Nains, et d’autres négociants d’autres races, principalement Umgis. Cependant, tout cela n’était point aussi développé que dans le Sud, où l’influence des oreilles sombres et des mal-faits, s’était répandue jusque dans les Braises de certains Durgazdawi, d’après les dires de leur maître. Harald ne dit rien une fois la missive entièrement lue. Comme le lui apprit sa vie de militaire, il rangea la missive dans un porte vélin, afin d’en garder trace, et cette trace serait enfermée dans la bibliothèque royale, là où seul le Grand-Roi pouvait avoir accès.

De cette missive cependant, Harald retint plusieurs choses. Tout d’abord, cette aisance presque malsaine et dérangeant du Maître des Caves à user de mots et tournures de phrases, de manière à cerner son interlocuteur de fort belle façon. Si cela n’étonnait point Harald que Salfaryl connaisse son identité, et que celle-ci lui revienne à son bon souvenir, le fait qu’il connaisse son clan était un peu moins habituel, les Nains s’arrêtant bien souvent sur son surnom de Barbe-Sanglante. Bien qu’il l’avait imaginé, Harald ne savait pas encore à quel point les relations entre les Nains du Nord et ceux du Sud étaient importantes et pour les uns, comme pour les autres. S’emparant de cette importance, et comprenant également de ce qui se tramait dans le lointain Sud, Harald en vint à une décision : le commerce, et les relations entre le Grand-Nord et les Mille-Caves, devaient être consolidées. Consolidées, pour que les caisses soient toujours remplies. Consolidées, pour que la confiance règne. Salfaryl avait convaincu Harald, peut-être pas totalement – le suzerain aurait été bien naïf de se fier qu’à une seule missive – mais suffisamment pour que la prochaine missive soit bien moins formelle, et bien plus solidaire.

Si seulement Harald pouvait rencontrer un tel Nain du Sud.

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6ème jour de la 9ème ennéade de Vérimios – Premier mois de l’Hiver
17ème année du XIème ycle.
Une missive cachetée su sceau royal de Kirgan, arrive jusqu’à la dernier cave par une caravane Durgazdawi s’en revenant du Grand-Nord.

7ème ennéade de Vérimios – Premier mois de l’Hiver.
17ème année du XIème cycle.

Maître Salfaryl des Mille-Caves,

Tout d’abord, sachez que vos pensées auront été transmise au clan Poing-De-Fer. Je suis certain qu’Heidum lui-même aura saisi la valeur de vos sentiments, et en aura gratifié le clan Poing-De-Fer, aujourd’hui, gardien de Fort Garmin et de la cité de Kirgan.

Vos pensées à l’encontre de mon clan et de moi-même, auront été accueillies chaleureusement. Soyez assuré qu’elles sont aussi partagées par les miens, et moi-même. Puisse Ikthor me donner la force de me battre pour le Zagazorn, et puisse Yaron m’en accorder la sagesse.

Enfin, concernant les évènements récents, sache, maître Salfaryl, qu’aucun poison d’origine sombre, ni qu’aucun malaise d’origine du Sud, ne saurait entraver le déroulé de nos ententes, ni de nos confiances.
Il est peut-être admis que la nature des mal-faits, et la présence putride des sombres Elgis, auront influencé tôt ou tard les Braises de vos sujets les plus faibles, ou les plus enclins au changement, ou les plus éloignés de leurs aïeux du Grand-Nord, mais je compte sur vous et vos plus proches braises de confiance, pour rappeler que les Nains, eux sont dignes de confiance.

Je vous réitère le soutien de la couronne et du Nord, tant en matière de commerce qu’en matière diplomatique. Si notre nation n’est point encore remise des affres du Voile, celui-ci s’éloigne de jour en jour, par les trouvailles de nouveaux filons, la construction de nouvelles forges, le développement des cités. S’il en était besoin, s’il en était possible, envoyez un émissaire jusqu’au cœur de la cité de Kirgan, afin qu’il puisse vous représenter auprès des différents clans de commerce et d’artisanat. Je vous y autorise, à la seule condition de n’avoir aucun secret pour le Grand-Nord.

Que le gardien du pont veille sur vous et les vôtres, et puisse Ikthor vous accorder sa vaillance.

Harald Barbe-Sanglante.
Groman-Rik du Zagazorn