Julas de la 7e ennéade de Favriüs 18e année du Onzième Cycle Caserne de l'armée royale - Matin
Lâche, certains diraient. Efficient, tu répondrais. Tes hommes étaient partis une centaine et demie. Tes hommes étaient presque rentrés une centaine et demie. Deux mains suffisaient. Deux mains seraient même de trop pour compter vos pertes, parce que tu avais choisi de prendre peu de risques. Très peu de risques. Votre présence avait représenté un avantage tactique inestimable en les armes et l’expérience que vous apportiez. Vous connaissiez les Drows. Peut-être mieux que quiconque. Oh, d’autres peuples les avaient affrontés, mais contre aucun ne se montraient-ils aussi féroces que contre vous. Contre aucun ne déployaient-ils autant leur rage que contre vous. Contre aucun ne faisaient-ils plus grand étalage de leurs force que contre vous. Vous aviez vu le pire de ce que les Drows avaient bien voulu dévoiler au monde, et vous aviez forgé les boucliers capables de parer leurs épées, et les armes capables de repousser leurs assauts. Alors non, tu n’avais pas voulu mettre les tiens en danger, parce que tu savais les tiens pouvoir énormément apporter à Naélis sans prendre de risques inconsidérés.
Toutes proportions gardées, vous aviez extrêmement peu perdu. Seulement, les quelques doigts qui s’étaient vus arrachés à vos mains avaient été source de leur lot de douleurs. Grande serait la douleur des familles ayant perdu un membre. Grande était la douleur des Terres de l’Est, forcées de faire le deuil du Protecteur d’Enolir, et grande était la douleur de l’armée royale, qui avait au cours du conflit perdu l’un de ses reconnus vétérans. Le renouveau d’Anaëh connaissait une page de sang, de sel et de peines. Mais il fallait continuer d’espérer. Et surtout, il fallait vivre. Vivre pour honorer ceux ayant payé le prix de vos vies.
- Frères, Sœurstu entames, debout face aux soldats restés à Alëandir, et entouré de ceux revenus de Naélis Nous avons gagné cette bataille. ta main droite vient se saisir de ton casque pour révéler ton visage Seulement cela aura été au prix de la vie du Mainyth Elrendil. tu baisses le regard, et prends le temps de te recueillir en silence, quelques dizaines de secondes durant, en compagnie de ses frères d’armesHerù Silad pour assurer le fonctionnement d’une manœuvre de précision a choisi de prendre de grands risques. Son choix a payé. Grâce à lui, nous avons pu gagner juste assez de temps pour garantir notre succès, et par la même occasion, faire définitivement pivoter la balance largement en notre faveur. Mais cela il l’aura payé de sa vie. tes sourcils se froncent Vous savez tous comme moi la hargne qui était la sienne. Et vous savez tous comme moi qu’aucun regret ne lui aura effleuré l’esprit en voyant venir la mort. Elrendil a vécu chacune de ses batailles comme s’il s’agissait de la dernière, et espérant pouvoir nous offrir de ne pas – nous – avoir à en livrer une de plus. tu déglutis Si c’est bien loin d’être l’éternité, il nous aura au moins offert l’espoir de quelques décennies de répit.
Tu fais un pas en arrière, te postant légèrement en retrait de celui que tu mettrais maintenant à l’honneur, le cercles de militaires vous entourant en semblant d’autant plus serré.
- Pour autant nous ne pouvons nous permettre de relâcher notre garde. tes yeux se posent un instant sur Aegden avant de revenir sur ton audience C’est pourquoi, avec le soutien de vos Frères et Sœurs ayant combattu à Naélis, je vous propose de prendre Aegden Orian ici présent en tant que nouveau Mainyth. tu laisses le silence s’asseoir quelques instants Je le sais : il n’est originellement pas de vos rangs, mais de ceux de la milice d’Alëandir. Je sais aussi cependant que vous êtes nombreux à avoir eu l’occasion de le côtoyer au cours des missions ayant eu lieu tant au sein des frontières d’Alëandir qu’au dehors. tu souris légèrement Certains d’entre vous ne sont pas sans le savoir, depuis quelques temps déjà, je projetais de lui offrir de rejoindre cette armée, et cherchant à savoir s’il en avait l’étoffe, je lui ai permis de participer à nombre de missions qui vous sont habituellement réservées. Herù Orian fait aussi partie de ceux qui au cours des échanges entre les milices protectorales ont eu l’occasion de se familiariser avec leurs stratégies, et est donc – bien que dans une moindre mesure que les plus aguerris d’entre vous – capable de s’y adapter et de les faire cohabiter. tu poses une main sur l’épaule d’Aegden Mais si je tiens à vous présenter – tant à lui qu’à vous – cette proposition, c’est qu’à chacune des missions auxquelles il se sera mêlé – celles nous ayant mené à Naélis y compris – le soldat Orian aura su non seulement faire sa part, mais aussi garder la tête froide, se distinguer, et s’ériger en tant que roc pour ses camarades au cœur des plus inextricables des situations. ta poigne sur l’épaule du lancier se resserre Encore à Naélis, après que nous ayons perdu Elrendil, c’est lui qui aura pris les devants, et agi en tant que Mainyth de fortune. C’est pourquoi j’aimerais vous voir l’accueillir et l’accompagner pour qu’il puisse pleinement prendre place, et agir en tant que le fer de lance que nous tu collectes l’approbation des combattants de Naélis du regard le savons capable d’être.
Jusqu’ici le soldat au cheveux de feu était resté silencieux. Il écoutait le discours du roi, encaissant par la même occasion la foule de sentiments que tout ça provoquait au fond de son souffle.
Il y avait d’abord la tristesse lorsque furent évoqués les rares et pourtant trop nombreux disparus. Comme ses camarades il avait baissé les yeux et profité des quelques dizaines de secondes de silence pour se recueillir à son tour à propos des disparus. Artiön s’attarda notamment sur Elrendil. Aegden ne l’avait pas connu longtemps, mais assez cependant pour savoir que l’Aran disait vrai. Son sacrifice autant que le sacrifice du protecteur d’Enolir et des autres soldats ne sera pas oublié.
Il y eut ensuite la fierté lorsque l’ancien daranovan recula pour mieux le mettre lui en avant. Aegden n’était pas un elfe cherchant la gloire. La mission qu’il s’était donné depuis des centaines d’années dépassait de loin toute notion d’orgueil. Qu’il fut tout jeune soldat ou mainyth désormais rompu au maniement de la lance courte, Aegden ne s’était jamais battu pour autre chose que la Prime Œuvre, son foyer et désormais celui de sa toute jeune famille. Ce que la Mère les avait voués à défendre. Il rêvait de voir ses frères et sœurs observer l’horizon sans jamais froncer les sourcil en y voyant une nouvelle menace ramper. Il rêvait d’un jour voir son futur enfant grandir sans crainte au sein d’une Anaëh grande et forte comme aux premiers jours. Pour cela il continuerait de se battre corps et souffle, jusqu'à ce que le royaume de Tari ne l’appelle à son tour s'il le fallait. Et pour cela il gardait le dos droit et le menton haut car contribuer ne serait qu’un millième à voir son peuple un jour grandit et rayonnant par l’absence de peur le rendait incroyablement fier.
-Ce serait pour moi un honneur de servir à vos côtés. Comme ce fut toujours pour le soldat un honneur de servir au sein de la milice lëandrine. Même s'il la quittait, elle resterait à jamais une partie de lui, une famille de substitution depuis plus de trois cent ans. Il porta solennellement son poing contre son cœur en observant les elfes réunis là. Et s'il doit en être ainsi, j’espère vous rendre cet honneur chaque jour qu’I Mingely me permettra de passer de cette manière.
Il n’était pas aussi doué en éloquence qu’au combat malheureusement. Il ne ferait pas de discours aussi marquant que celui d’Artiön. Pour ajouter quoi de toute façon ? Dans ses paroles simples et suffisantes à elles même il y avait une promesse que chacun comprenait sans peine : La confiance qu’on lui donnait aujourd’hui, il s’efforcerait de tout son souffle de s’en montrer digne. C’est par les actes plus que les paroles qu’il le démontrerait, il était ainsi.
Il y avait aussi un peu d’émoi avec tout cela mine de rien. De prime abord il ne s’était absolument pas attendu à une telle scène. Il n’apprenait d’ailleurs que maintenant qu’Artiön réfléchissait déjà depuis un moment à lui proposer une place au sein de la milice royale. Là où l’Aran voyait un test, Aegden n’y avait toujours vu qu’une occasion de plus d’accomplir ce à quoi il était voué sans chercher plus loin. Lorsque le mainyth royal était tombé, Aegden n’avait fait que ce qui lui semblait être nécessaire et il n’avait jamais eu l’intention d’être remarqué pour cela. Ce qu’il pouvait lire dans le regard approbateur des soldats avec lesquels il avait lutté côte à côte, sans même parfois savoir d'où il venaient ne le laissait pas insensible même s'il s'efforçait de rester digne.