La guérison des âmes meurtries [Griffon]

Julas, 8ieme ennéade de Bàrkios, An XVIII, Cycle XI
Port de Leliande, Marquisat de Langehack, Péninsule

La Princesse Marchande observait le port de Leliande alors que le navire marchand s’approchait de ce dernier. La traversée avait été longue, surtout que ce n’était guère un voyage officiel. En effet, cette dernière s’était imposée dans un vaisseau marchand qui avait quitté Thaar. Si certains membres de l’équipage l’avaient reconnu, disons que la besace d’argent et la menace de dévoiler un tel secret avaient fait effet pour ne pas répandre la nouvelle. Après tout, selon les rumeurs, la Princesse Marchande était retournée à Uldal’Rhiz avec ses poupons après l’extraordinaire bataille de Qiryah. Mais en parallèle, une autre opération s’était installé. Des coffres avaient envoyé au préalable à Sorault, ces derniers contenant quelques effets personnels dont la Princesse aurait besoin. L’une d’elles, faite spécialement pour l’occasion, accompagnée bien entendu des plus somptueux bijoux que l’on puisse trouver en Ithri’Vaan. Pouvons-nous être réellement surpris? Après tout c’était une occasion bien spéciale pour la Princesse de la Chair.


Mais était-elle réellement prête à faire cela? Prête à se relancer dans un mariage qu’elle devrait cacher. Prête à retenter l’expérience avec un péninsulaire et non un Vaani? Après tous, leurs mœurs étaient bien différentes des siennes. Combien de fois cela avait causé des problèmes dans le passé? Maralina ferma doucement les yeux, alors que le vent marin venait fouetter doucement son visage, faisant virevolter ses longues boucles brunes. À chaque fois qu’elle fermait les yeux elle pouvait le sentir, et ce même s’il était aussi loin. Elle se rappelait le sentiment qu’elle avait alors qu’il l’enlaçait de ses bras protecteurs. Elle pouvait se rappeler de leur tout premier baiser dans le château de Sorault, celui ou il l’avait brutalement repoussé, avant de venir en quérir un nouveau à Uldal’Rhiz. Si le premier était mémorable par le fait que ce dernier l’avait repoussé, leurs deuxième avait définitivement mémorable pour une autre raison. Elle se souvenait du goût sucré qu’il avait laissé, de l’impression qu’elle avait eue alors qu’il ne devenait qu’un. Le temps semblait s’être arrêté, elle n’avait plus consciente de ce qui se passait autour d’elle et Maralina n’avait aucune idée de ce qui lui était arrivé à ce moment-là, ce n’est qu’après s’être totalement abandonné à lui qu’elle comprit. La Princesse Marchande avait finalement trouvé une pièce de bonheur, une pièce qu’elle ne pouvait pas partager à tous. Et pourtant ses rêves étaient si vivides alors qu’elle revivait ces doux moments.


Mais maintenant elle n’avait plus à être effrayée, elle n’aurait plus à vivre dans le passé. Un sourire vint orner son visage alors qu’elle ouvrait doucement les yeux. Le passé était le passé, il était temps d’avancer, et savait pertinemment que peu importe ce que les dieux mettaient sur leurs chemins ils passeraient au travers. Maralina savait de quoi elle était capable, et ne voulait pas abandonner cette chance. Le capitaine lui fit un signe de tête alors que la passerelle était finalement installée. Sans attendre, la Princesse mit la capuche sur sa tête, avant d’attraper la bride de son étalon noir. « Nous sommes revenus là où tout a commencé, Irtho. » L’étalon hénissa en remontant son museau, puis il suivit sa maîtresse alors qu’ils traversaient le port de Leliande, suivi par Tristan et un autre milicien habillé en civil. Le regard azuré de la Princesse détailla doucement la foule, tentant de trouver un visage qu’elle connaissait et elle s’arrêta soudainement… Griffon avait définitivement un drôle de sens de l’humour. Maralina soupira avant de lever les yeux aux ciels, s’approchant de Lars qui l’attendait au bout du quai. « Lars… » commença-t-elle avant de s’arrêter devant ce dernier. Elle l’observa un moment, inexpressive, il avait définitivement vieilli pendant toutes ces années. Du moins, s’était un petit peu difficile à comparer alors qu’elle, n’avait aucunement changé en plus de sept ans.  Sans attendre, cette dernière se hissa rapidement sur son cheval, replaçant doucement la capuche qui recouvrait sa tête. « J’imagine que le trajet sera long, donc si nous pourrions nous mettre en route, j’apprécierais. » Il avait de la chance que Griffon le portait en si haute estime, sinon il serait définitivement en train de pourrir dans les geôles du palais d’Uldal’Rhiz… Bon, il s’était excusé aussi, mais bon, c’était presque une nécessité quand vous vous retrouviez dans le terrain de celle que vous avez humiliée.

Arkuisa de la septième ennéade de l'an 18 : XI,
Dans les rues de Langehack, au levé du soleil.

Lorsqu’il était question de son histoire avec Maralina, Griffon sentait qu’il ne pouvait pas compter sur les dieux pour l’aider et pour cause ils semblaient avoir fait tout ce qui était en leur pouvoir pour que leur relation parte du mauvais pied. Toutefois, une fois rentré à Langehack, il avait repoussé les préparatifs, ce qui en réalité ne fut pas bien difficile, mais lorsqu’enfin la princesse marchande devait arriver, le marquis se trouva bien dans l’embarras. En effet il devait l’accueillir et comme il ne pouvait pas se présenter sur les quais de Léliande personnellement sous peine d’être reconnu, il lui fallait trouver quelqu’un de confiance et malheureusement il se rendit compte que la liste était courte. Son frère, à qui il confierait sa vie, avait malheureusement la fâcheuse tendance à parler à n’importe qui lorsqu’il s’agissait d’amour ; Gabriel, qui avait fini par devenir l’ombre de son seigneur, devait rester à Langehack pour s’assurer que Théodoric ne profite pas de l’absence de son père pour utiliser les ressources du marquisat dans sa lutte contre sa sœur ; son fils ne comprendrait pas pourquoi il serait envoyé là-bas et considérerait de toute façon l’estréventine comme une créature d’Arcam qu’il faudrait rejeter à la mer ; Prudence chercherait sans doute à tirer profit de cette information… il ne restait plus qu’une personne. Et l’identité de la personne en question fit sourire Griffon qui n’aurait pas pu choisir meilleur homme pour accueillir Maralina même s’il l’avait fait exprès. Cependant il y avait un problème : il fallait le retrouver.

Ce qui ne fut pas si difficile que ça lorsqu’on savait où chercher. Lars eut le droit à un réveil glacial, en sursaut, l’eau qu’on lui avait lancé au visage collait la paille sur laquelle il dormait quelques instants auparavant à sa tunique tâchée de sauce… à moins que ce ne fut du vomis, Griffon avait du mal à le dire. Le garçon d’écurie recula d’un bond lorsque le vieil ami du marquis, une fois le choc passé, voulait se lever pour lui expliquer avec peu de diplomatie qu’on ne réveillait pas les gens ainsi.

« Inutiles de t’en prendre au gamin, c’est moi qui lui en ait donné l’ordre. » La voix de son seigneur fit tourner la tête du hautvalois qui se serait bien plaint si jamais ils avaient été seuls. A la place il se contenta de bougonner. « Bonjour Lars, comment vas-tu ? »
«Très bien. » Il croisa les bras. « Comment puis-je aider son Excellence ? Peut-être a-t-elle besoin de mon expertise en vins et en prostituées ? »
L’Excellence en question sourit, sachant justement ce qui dériderait son vieil ami. Jusque là adossé à l’un des piliers qui soutenaient l’écurie, il s’en dégagea.
« Tu peux m’aider en allant prendre un bain et en changeant de vêtements. Il faut que tu ailles chercher quelqu’un qui en connait plus sur les prostituées que tu n’en sauras jamais. »
« Ah… » se bras se décroisèrent tous seuls alors que son cerveau encore embrumé par l’alcool et le sommeil commençait à lentement comprendre à qui Griffon faisait allusion. « Quand est-ce qu’elle arrive ? »
« Dans un peu moins d’une ennéade. Six jours pour être précis. Mais nous en discuterons au palais, quand tu seras présentable. Je te fais confiance pour t’y rendre tout de suite au lieu d’aller te réchauffer à l’intérieur de la taverne avec je ne sais quelle boisson assez forte pour t’aveugler. »
« Comme si c’était mon genre... tu ne rentres pas avec moi ? » Le marquis préféra ne pas répondre bien que la réplique lui arracha un sourire.
« Vu que je suis sortis je vais en profiter pour aller prier au grand temple. A plus tard. »

Julas de la huitième ennéade de l'an 18 : XI,
Sur les quais du port de Leliande.

Avant que Lars ne se retourne parce qu’on avait prononcé son nom, Maralina pu entendre un éclat de rire d’une jeune femme à qui l’intéressé parlait et lorsqu’il se retourna ce fut avec un air un peu déçu. Déçu parce qu’il sentait qu’il n’était pas loin de conclure mais comme le disait son seigneur : quand le devoir appelle il faut y répondre. Une vision qu’il ne partageait pas tant que ça mais si servir la noblesse avait ses avantages, ça avait également ses inconvénients. Toutefois parmi ces avantages se trouvait une situaton financière qui n’était pas à plaindre et le moins qu’on pouvait dire c’était que, depuis la dernière fois que la princesse marchande avait eu la chance de le voir, il avait pris du poids. Son visage avait rougi un peu à cause de l’alcool et sa peau avait bronzé sous l’effet du soleil du sud ; il fallait dire que l’on ne prend pas le soleil aussi bien dans les marais de Sorault que dans les rues de Langehack. Ses cheveux avait commencé à griser, il avait d’ailleurs abandonné sa petite queue de cheval pour une longue tresse qui tombait sur son épaule et qui descendait juste au-dessus de son torse. Mis à part ça il restait le même et les estréventins purent admirer son plus beau sourire, dans lequel il manquait toujours quelques dents, lorsqu’il vit la monture de Maralina.

« Je sais qu’il m’a manqué. » Il s’avança vers le groupe venu de l’autre côté de la mer pour flatter l’encolure de l’animal. « Madame a fait bon voyage ? » Bien qu’il eut posé sa question de façon tout à fait innocente, la réponse l’arrêta dans son élan et il préféra s’arrêter là. L’humain imita alors Maralina et monta sur la sienne de monture. « Tant pis mais je comprends: vous ne voulez pas faire attendre monsieur hein ? » Il fit faire demi-tour à sa jument avant de se retourner sur sa selle. « Si vous voulez bien me suivre. »

Calimehtarus de la huitième ennéade de l'an 18 : XI,
Non loin de Sorault.

Il les mena à travers la campagne langecine, en évitant les routes, les chemins les plus fréquentés et plus particulièrement la Route d’Or. Bientôt les délicieux marais de Sorault s’étalèrent devant le groupe mais ils n’allèrent pas au château en lui-même. A la place Lars les conduit jusqu’à une maison forte qui avait sans doute vu des jours meilleurs. Dans la cour intérieure Griffon attendait en faisant les cents pas, tournant en rond. Habillé de façon très commune, on aurait pu le convaincre avec l’un de ses sujets dans les rues de Langehack ; toutefois pour trouver un de ses sujets suffisamment courageux pour garder au doigt l’anneau sigillaire des de Langehack il faudrait sans doute bien chercher. Il se dirigea alors jusqu’au cheval de Maralina lorsqu’enfin il l’aperçut pour l’aider à descendre afin de la prendre dans ses bras. Le marquis la serra contre lui, il inspira profondément pour s’imprégner de son odeur ; chacun de ses sens devait l’assurer qu’elle était bien là et qu’elle avait survécut à sa guerre contre l’autre prince marchand.

« Je suis heureux que tu aies pu venir. » Murmura-t-il en expirant doucement.

Le trajet fut long, et bien qu’elle n’appréciait pas particulièrement Lars, ce dernier fit un excellent travail. Conduisant le trio de Vaani en dehors des chemins trop passant, si les paysages du Langehack lui semblaient luxuriants, ils changèrent rapidement alors qu’ils s’approchèrent de Sorault. Ils entrèrent finalement dans la cour d’une maison et Maralina sentit son cœur se serrer alors qu’elle le vit. Sourire aux lèvres, la demi-elfe retira doucement sa capuche, libérant ses longues boucles brunes alors que son regard fixait l’homme devant elle. Il était habillé de haillon, et pourtant il n’en n’était pas moins attirant. « Oh pardon, vous m’attendiez? » lui dit-elle alors qu’elle enlevait doucement ses gants de cuir. Cela ne prit qu’une seconde pour sortir ce dernier de sa torpeur, à peine eut-elle finit sa phrase, ce dernier se précipita dans sa direction, elle eut à peine le temps de déposer les rennes de Ithro que le Marquis l’avait pris par sa fine taille pour la faire descendre de l’étalon avant de la serrer dans ses bras. Sans attendre, la demie-elfe posa doucement sa tête contre son torse, ramenant sa main à côté de sa tête, profitant de l’étreinte confortable de l’homme qu’elle aimait. Sa remarque lui arracha un sourire, alors qu’elle relevait doucement la tête pour croiser le regard de Griffon. « Comme si j’aurais manqué cette occasion. » Sa main se glissa doucement pour caresser la joue de l’humain, alors que la demie-elfe observait le Marquis. « Je te l’ai dit. Tu m’as donné une raison de continuer. » Elle se hissa sur le bout des pieds pour lui donner un léger baiser avant qu’une voix des plus excitée vint déranger leurs moments;


« MAMAN! »


La Princesse sembla se crisper pendant un moment avant que son regard ne se porte sur la voix qu’elle ne connaissait que trop bien. Sans attendre, la Princesse se sépara de Griffon pour se mettre à marcher vers son fils. Ce dernier, semblant oublier toute éducation péninsulaire qu’il aurait pu avoir se mit à courir pour rejoindre sa mère avant de lui sauter dans les bras alors qu’elle s’agenouillait devant lui, faisant fit de la poussière, le couvrant la tête de baiser alors que ce dernier se cramponnait à cette dernière. « Tu m’as manqué ! Mais j’ai entendu dire que tu avais participé à plein de guerre! Et que tu avais gagné plein de trucs! Et avec tout ce que j’ai appris ici, j’aurais vraiment pu t’être utile! Griffon m’a même appris à manier l’épée comme un vrai chevalier! » Maralina laissa son fils déblatérer, lui racontant sa nouvelle vie au côté de son père, alors qu’elle tentait de se relever avec son fils dans les bras. Il lui semblait tellement lourd maintenant! Ce dernier s’accrocha à son cou avant d’enfouir sa tête sur son épaule, tout en lui racontant les millions d’exploits qu’il avait faits durant son année à la cour de Langehack. Puis soudainement, ce dernier s’arrêta, et vit Tristan qui descendait à son tour de son étalon. « Oh! Mais c’est Tristan! » Maralina l’embrassa sur le bout du nez avant de lui répondre; « Oui, allez va le saluer. » Elle le déposa doucement alors que l’héritier d’Uldal’Rhiz se précipitait vers le milicien pour lui raconter à nouveau ses exploits. La Princesse Marchande se retourna vers le Marquis, sourire aux lèvres, malgré la fatigue de ce long voyage et du stress accumulée, elle était heureuse. « Quel est le plan, Votre Excellence? » Elle savait pertinemment que les titres le faisaient soupirer, mais elle se prenait un malin plaisir à lui rappeler. Après tout, c’était de bonne guerre.

Griffon fit un pas difficile en arrière. Il n’avait pas envie de se séparer d’elle, fut-ce d’un mètre ou deux, pas après avoir passé tant de temps à regarder les portes de Langehack depuis les nombreuses fenêtres du palais, à se demander quel cavalier lui apporterait la nouvelle tragique ; nouvelle qu’il redoutait tant, à laquelle il préférait ne pas penser et c’était pourquoi il avait passé son temps à combattre les rumeurs qui avaient traversé la mer, disant que la princesse d’Uldal’Rhiz avait perdu la vie durant les affrontements qui l’opposait à son comparse du conseil. Car des rumeurs à ce sujet, il y en avait eu, autant que celles faisant état de sa victoire et plutôt que de ne savoir quoi penser, qui écouter, le marquis avait préféré rester ignorant, passant plus de temps à prier que d’ordinaire au point qu’il ne quittait que rarement le temple palatial.

Mais tout ça c’était fini, elle était là, devant lui, avec leur enfant. C’était une idée avec laquelle il avait du mal, qu’il avait du mal à se convaincre que c’était réel. Les bras croisés, il se demandait si les dieux étaient suffisamment cruels pour que tout ça soit un rêve. Il avait imaginé tant de choses qui aurait tout ruiné et pourtant rien de tout ça n’était arrivé, ce qui rendait la chose bien trop belle pour être vraie. Lorsque son fils décida de laisser sa mère tranquille, Griffon repoussa ses pensées incrédules dans un coin de sa tête pour revenir sur Miradelphia.

Il leva les yeux au ciel lorsqu’elle l’appela par son prédicat honorifique.

« Son Excellence n’a pas de plan, par contre Griffon en a peut-être un, il faudrait que je lui demande. » Et puis il put voir, par-dessus l’épaule de Maralina, Lars s’occuper de la monture de la princesse marchande, l’amenant dans l’écurie, et il se demanda ce qu’il comptait faire. « Dans mes souvenirs il m’a dit que tu avais l’après-midi pour te reposer et puis la cérémonie se fera la nuit tombée. Dame Irohivrah a-t-elle des questions ou des réclamations ? »

La réaction du Marquis lui arracha un sourire, c’était de bonne guerre. Après tout ce dernier lui avait Lars comme accompagnateur. « Dame? »  La demie-elfe pencha légèrement la tête sur le côté, sourire amusé aux lèvres, avant de s’avancer de son pas félin vers Griffon. Elle ne s’arrêta que lorsqu’elle fut à un souffle de ce dernier, en déposant doucement sa main sur le torse de Griffon et plongea son regard dans le sien. « C’est Votre Altesse. Après tout, je suis une Princesse. »  Princesse Marchande de deux cités qui plus est, peut-être trois lorsqu’elle aurait fini avec Qyriah. Pour le moment, elle contrôlait cette dernière, et s’assurerait définitivement de garder ce contrôle. Il n’y avait qu’à jouer ses cartes correctement avec le conseil des comices. « À moins qu’Excellence soit plus appropriée demain? Qui sait? »  


« Qui sait? » La question le fit sourire. « Mais ça serait réduire ton statut, pour une princesse on préférera votre Majesté. Mais tout ça, ça s’applique à la noblesse péninsulaire, il faudra donc attendre ce soir. »


Elle lui lança un sourire avant de l’attirer à elle, échangeant un baiser passionné. Il lui avait définitivement manqué. Elle s’était languit de sa présence, languit de ce jour spécial et voilà que son attente allait être récompensée. Se détachant finalement de Griffon, cette dernière lui fit un léger sourire, avant de reprendre la parole, l’air légèrement inquiète; « Les paquets que j’ai envoyés sont arrivés? »  Une priorité en soi, la Princesse Marchande n’allait définitivement pas se marier en haillon. Maralina se détacha doucement de Griffon avant de lui prendre la main, l’embrassant légèrement avant de relever son regard vers ce dernier; « Fais-moi visiter les lieux… »


« Ils sont bien là et ils t’attendent, ainsi qu’un bain si jamais tu veux te débarrasser de toute cette poussière. »

***

La maison forte, abandonnée depuis un certain temps mais que le marquis avait fait remettre en état pour l’occasion, était loin du palais ducal mais comme la discrétion importait pour l’occasion, il avait préféré ne pas faire dans l’extravagant. S’il pouvait justifier la dépense à quiconque se posait des questions, il fallait admettre que c’eut été plus difficile pour quelque chose de plus grand, de plus flamboyant. De toute façon ce ne serait pas là qu’ils passeraient le plus clair de leur temps après la cérémonie.


L’après-midi passa rapidement, passée à se reposer, le temps de se préparer arriva bien vite car le soleil commençait à décliner et en prenant en compte le temps de voyage, il ne faudrait pas arriver trop tard pour ce que le marquis avait en tête par la suite. Griffon attendait sa fiancée dans la cour, habillée d’or, de rouge et de noir, ses vêtements avaient été confectionnés pour l’occasion et avaient coûtés une fortune ; c’était d’ailleurs pour ça qu’il avait utilisé une partie des souverains que lui avait donné Maralina il y avait des années de ça, tout le monde aurait vu un tel retrait de la trésorerie ducale. Il attacha son manteau fait en fourrure de leomenis aux couleurs de sa maison qui retombait sur son dos, couvrant l’arrière de la cuirasse d’or qu’il portait ; une pièce d’armure d’apparat qui aurait sans doute brillé de mille feux si jamais il faisait encore jour et c’était d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle la cérémonie se passait de nuit : sans les reflets du soleil il était plus aisé de voir les œuvres d’art gravés dans le métal. Lesdites gravures retraçaient la conversion du duché au pentianisme entre les motifs floraux qui entouraient les personnages et les scènes. Il enfila ensuite ses gants en peau-fourrure de tatzelworm d’un noir profond. Il attendait à côté d’un cheval bardé tout aussi richement que son propriétaire et lorsque Lars sortit enfin il lui fit signe pour que ce dernier monte en selle en s’en aille dans la clairière où ils s’étaient rencontrés pour la première fois.


Il n’était d’ailleurs pas difficile de le repérer, cet endroit, vu que depuis peu un autel était placé là. Lorsque Griffon arriva, Mère Menia attendait, la prêtresse de Sorault, dans ses vêtements sacerdotaux, était déjà vieille lorsque le marquis était né, elle s’était occupée en bonne partie de son éducation et était petit à petit devenu une figure maternelle ; si les péninsulaires appelaient les prêtresse de Néera mère, Griffon mettait un poids bien plus important derrière ce mot lorsqu’il était question de Menia. Malgré l’âge elle avait toute sa tête mais elle n’avait plus toute sa vue, ce qui, en l’occurrence, arrangeait un peu le maître des lieux, il fallait bien le dire.


« Je suis heureuse que tu aies finalement décidé de te marier à nouveau. » Lui souffla-t-elle avec un grand sourire.


« Et moi donc, Mère, et moi donc. Merci d’avoir accepté d’officier la cérémonie. »
« Inutile de me remercier, depuis le temps que j’attends ça. » Ses yeux vitreux ne s’étaient pas tournés vers Griffon, continuant de regarder devant elle. « D’ailleurs tu m’as fait attendre, j’ai presque cru que tu attendais que Tyra m’emporte pour que je ne me charge pas de ton mariage, malhonnête va. »


« C’est que… » le marquis ne répondit rien pendant quelques secondes, incapable de trouver quoi dire, ayant presque l’impression d’être revenu près d’une quarantaine d’années en arrière quand elle lui faisait des remontrances parce qu’il n’avait pas après ses leçons. « Il fallait que je trouve la bonne. »


Et l’élue arriva, laissant le fiancé sans voix alors qu’elle remontait le couloir dégagé pour atteindre l’autel dans l’une des robes  les plus belles qu’il ait pu voir. Déjà que la Princesse Marchande avait l’habitude de porter les tenues les plus extravagantes qui soit, cette dernière n’avait pas lésiné sur celle-ci. Entièrement faite de soie, la totalité de la robe était recouvertes de fine dentelle et de pierre précieuse. Ajustée à la perfection, l’intrigante robe mettait en valeur les longues jambes hâlées de la Vaanie ainsi que sa fine taille alors que des bijoux ornée de diamant retenait ses longues boucles brunes sur ses tempes.  Il attendit alors qu’elle vienne jusqu’audit autel et la prêtresse hocha la tête pour signifier que la cérémonie pouvait commencer.


« En ce moment où Griffon Henrry Louis Abseyrde  du sang de Langehack et Maralina se présentent devant Vous, ô Bienveillante Déesse, nous prenons l'engagement de faire respecter le Choix en Votre nom et selon Votre volonté car c'est dans la joie et sans contrainte que nous sommes rassemblés ici aujourd'hui pour unir deux vies.

  Soyez, ô DameDieu, témoins de ce Choix qu'ils font ici, librement, et qu'ils auront à garder tout au long de leur vie. Donnez-leur d'être sincère comme Vous êtes sincère. Donnez-leur d'être bienveillant comme Vous êtes bienveillante. Donnez-leur d'être clairvoyant comme Vous êtes clairvoyante et que par la grâce de vos bénédictions, ils puissent faire le Juste Choix.. »


Sa voix ferme, et forte, était facilement audible et portait loin. Ce qui n’était d’ailleurs pas vraiment nécessaire étant donné que le nombre de témoins était très réduit. Devant l’autel, elle leva les mentons des futurs époux  pour qu’ils se regardent dans les yeux, ce qui ne fut pas non plus nécessaire pour Griffon qui n’avait d’yeux que pour la princesse marchande depuis qu’elle était arrivée.


« Moi, Griffon Henrry Louis Abseyrde de Langehack, choisis librement prendre comme épouse Maralina. Et devant tous les dieux, je fais le serment de la protéger, de l’honorer, de lui rester fidèle, de faire de son malheur, mon malheur, et ses intérêts, mes intérêts. Deux Souffles, une seule vie. »


« Moi, Griffon Henrry Louis Abseyrde de Langehack, choisis librement prendre comme épouse Maralina. Et devant tous les dieux, je fais le serment de la protéger, de l’honorer, de lui rester fidèle, de faire de son malheur, mon malheur, et ses intérêts, mes intérêts. Deux Souffles, une seule vie. »

Le marquis prit alors la main de Maralina, son cœur battant si fort qu’il croyait que ses côtes allaient céder. La prêtresse se tourna alors vers l’estréventine et commença à répéter les formules sacrées.


« Moi, Maralina, choisis librement de prendre comme époux Griffon Henrry Louis Abseyrde de Langehack. Et devant tous les dieux, je fais le serment de le soutenir, de l’honorer, de lui rester fidèle, de faire de son malheur, mon malheur, et ses intérêts, mes intérêts. Deux Souffles, une seule vie. »


« Moi, Maralina Irohivrah, choisis librement de prendre comme époux Griffon Henrry Louis Abseyrde de Langehack. Et devant tous les dieux, je fais le serment de le soutenir, de l’honorer, de lui rester fidèle, de faire de son malheur, mon malheur, et ses intérêts, mes intérêts. Deux Souffles, une seule vie. » La princesse caressa doucement les doigts de Griffon, son regard accroché dans le sien, ne regrettant aucunement le serment qu’elle venait de faire à ce dernier. Elle savait, alors qu’elle se tenait debout devant lui, qu’elle avait fait le bon choix. Des années à attendre, à espérer, et voilà que cette nouvelle étape s’ouvrait devant elle. Sans y faire attention, la demie-elfe replaça doucement une bouclette indisciplinée du Marquis sur son front.

La suite de la cérémonie voulait que la fiancée prenne la main libre de son futur époux et comme ce dernier supposait que la princesse marchande ne soit pas au courant, il tendait sa main pour qu’elle s’en empare. Sans attendre, la demie-elfe prit gracieusement la de l’humain. Ses prunelles semblaient briller plus qu’à l’habitude. La prêtresse fit alors le tour de l’autel pour qu’il se trouve entre elle et les fiancés.

« Réunis devant les hommes et les dieux, cet homme et cette femme ont fait vœu de toujours être là l'un pour l'autre. Sur ce serment, ils bâtiront leur futur. Vous qui êtes ici aujourd'hui, soyez témoins de leur Choix. »
La vieille femme sortit alors une grosse perle d’une quinzaine de millimètres de diamètre qu’elle fit tomber dans un calice qui, jusqu’à présent, reposait patiemment sur l’autel, attendant son heure. Fait de nacre, d’argent et décoré de lapis lazuli, ses mains passèrent sous les ailes de chaque côté de l’objet pour le soulever et le tendre à Maralina afin qu’elle le garde en attendant d’en boire le contenu. Ledit contenu était un fond de vinaigre dans lequel se désintégrait la perle ; il s’agissait-là d’une vieille tradition familiale, en buvant une perle c’était se rapprocher de la DameDieu qui avait une pierre précieuse enchâssée au niveau de sa gorge, le liquide purifiait alors le Souffle. Griffon se disait qu’il existait tout de même des traditions plus agréables mais s’il y avait bien une chose avec lesquelles on ne plaisantait bien, c’était bien les dieux et les traditions, après tout elles étaient bien là pour une raison importante. Mais il n’avait pas l’occasion de continuer à réfléchir à ce sujet car c’était à lui d’agir. D’une main preste il défit son manteau qu’il rattrapa juste avant que ce dernier ne tombe au sol afin d’aller le déposer sur les épaules de Maralina.

« Ô Bienveillante Mère des hommes, devant Vous nous nous agenouillons. Bénissez cette union. Bénissez de votre grâce vos enfants Griffon Henrry Louis Abseyrde de Langehack et Maralina qui aujourd'hui se consacrent dans le mariage. Que votre bénédiction descende sur eux et leur permettent de rester sur la bonne voie, main dans la main. Qu'ils trouvent le bonheur en se donnant l'un à l'autre, qu'une descendance vienne embellir leur foyer. Dans la joie, qu'ils sachent vous rendre grâce ; dans les épreuves, qu'ils se tournent vers vous ; que votre présence les aide dans leurs tâches quotidiennes. Dans la tristesse enfin, qu'ils vous trouvent à leurs côtés afin que vous allégiez leur fardeau et que marqués de vos signes, ils sachent se garder l'un l'autre des tromperies et de la vilenie. »

Griffon s’empara lui aussi du calice, recouvrant les mains de sa fiancée et vint ensuite le temps de boire. Le marquis montra l’exemple et trempa les lèvres dans le vinaigre en se forçant pour ne pas grimacer, avalant rapidement une gorgée. Il poussa alors le calice vers la princesse marchande pour qu’elle aussi, goûte au doux breuvage. Maralina ne put s’empêcher de sourire devant l’expression de son fiancé alors que le liquide aigre et porta le calice à ses lèvres à son tour, buvant l’affreux liquide en tentant tant bien que mal de conserver une apparence digne. Tâche difficile en soi, mais qu’elle réussit.

« Embrassez-vous, et par ce baiser vous devenez mari et femme. Le serment prêté devant les dieux est sacré. Nul Homme ne peut le disjoindre et maudit soit celui qui se met entre eux. »

Maralina se retourna doucement vers la prêtresse, avant de lui murmurer; « Vous permettez? » Cette dernière acquiescat en lui faisant un sourire, et la Princesse Marchande se retourna vers Griffon, prenant volontairement la parole; « Tout ce que je t’ai dit, ne sont pas que des mots, ils sont une tentative de transmettre à un homme qu’il est la seule chose que j’aurais besoin dans cette vie. Je te suivrais avec une passion qui mettra le monde à genoux. Tu es mon seul, et unique amour, et aujourd’hui j’unis ma vie à la tienne sans aucune hésitation et sans aucun doute. » Elle eut un léger sourire, avant de rajouter; « Te dire que je t’aimerais toute ma vie ne me semble pas juste, car une vie avec toi ne me suffirait pas. Alors avec tous ses mots, et de tout mon coeur, je te donne ma vie.» La prêtresse eut un léger sourire, avant de murmurer à l’intention de Griffon; « Tu peux embrasser ta femme. »

Maintenant que la cérémonie était terminée, il était hors de question de retourner dans la maison forte, elle était loin d’être digne des nouveaux époux, surtout pour profiter des premiers temps de leur mariage ; pourtant ils ne pouvaient pas non plus retourner au palais ducal pour profiter de leur lune de miel alors que faire ? Griffon avait eut le temps d’y réfléchir pendant qu’il attendait et il demanda à Maralina de bien vouloir le suivre dans un petit voyage, un petit voyage qui la ferait en partie faire demi-tour car si le palais ducal était hors de question, il avait décidé d’en faire un second pour l’occasion.

Le lendemain ils arrivèrent dans l’un des méandres de la Shanae, entre Leliande et Monal, entre les arbres, sur la rive du fleuve les attendaient la galère ducale. Il s’agissait d’une galée d’une trentaine de mètres, auparavant la pièce centrale de la flotte langecine, le navire amiral, avec les cycles et les modernisations successive, le bâtiment se retrouva mis au banc mais les ancêtres de Griffon n’avaient visiblement pas le cœur de s’en débarrasser ou de l’utiliser pour en construire une navire plus grand alors elle était restée en réserve jusqu’à ce que le marquis actuel se dise que finalement la galère pouvait se révéler utile pour au moins une chose. Alors elle fut remise en état, Griffon ne regardant pas à la dépense : ses grandes voiles latines étaient aux couleurs ducales, faites de fil d’or et d’argent, la poupe était recouverte d’or mais c’était la figure de proue, brillante sous le soleil d’été au point qu’on aurait pu croire qu’un deuxième astre était descendu sur Miradelphia ; le dragon d’or des de Langehack coupait les flots en deux avec une certaine arrogance.

Descendant de cheval, le marquis aida alors son épouse à faire de même pour qu’ils puissent embarquer.

« Si Sa Majesté Maralina de Langehack veut bien se donner la peine. » Il lui tendit une main secourable pour qu’ils puissent monter tous les deux. Au milieu des mâts et juste au-dessus de la porte menant à la cabine principale pendaient des encensoirs qui laissaient s’échapper une douce odeur sucrée mais ce n’était pas ce qui sautait en premier aux yeux. En effet on pouvait trouver, à plusieurs endroits sur le pont, des tas de coussins sur lesquels il était possible de s’allonger pour se servir dans des plats posés à même le sol, sur un tapis de pétales de rose de près d’une trentaine de centimètres d’épaisseur. Outre le serviteur qui attendait de servir les nouveaux époux en vin, des musiciens attendaient sur le château de poupe qu’on leur donne le signal de débuter. « Je me suis dit que tu aurais envie de te reposer un peu. »

D’un mouvement du bras il embrassa la scène qui se présentait aux yeux de la princesse marchande et plus particulièrement les lits de coussins.

« A moins que la faim ne l’emporte sur la fatigue, après tout nous n’avons mangé qu’une perle depuis hier-soir. »

Étonnamment le voyage lui avait semblé beaucoup plus rapide qu’à son arrivée. Elle se serait cru sur un nuage, là, à galoper aux côtés de Griffon après la cérémonie et lorsqu’ils arrivèrent finalement à la rive du fleuve, Maralina ne put s’empêcher de regarder le navire, l’air étonnée. L’énorme galère était à couper le souffle encore une fois, comme si elle avait été préparé dans le plus grand des soins. Encore une fois, la Princesse n’eut même pas le temps de débarquer de son étalon, que le Marquis l’attrapait doucement par la taille pour l’aider. Sourire aux lèvres, elle se mit sur la pointe des pieds pour lui donner un léger baiser sur le bout du nez avant d’hausser un sourcil alors que Griffon reprenait la parole. Maralina de Langehack…? Cela était si… différent. Pas qu’elle détestait, mais c’était quelque chose à laquelle elle n’avait jamais réellement pensé avant. Elle sentit un léger frisson parcourir son échine alors qu’elle se répétait à nouveau ce nom. Puis un léger sourire vint orner son visage alors qu’elle murmurait à son nouvel époux; « Si tu savais depuis combien de temps que j’attends qu’on m’appelle ainsi… »


La princesse attrapa doucement la main du Marquis, se laissant guider à l’intérieur de l’énorme navire. Il fallait dire que ce dernier n’avait pas lésiné sur les dépenses! Le navire était tout à fait exceptionnel! Partout où le regard azuré de la Princesse se posait, un détail important lui sautait aux yeux. Griffon avait fait d’énormes efforts pour elle, beaucoup plus qu’elle aurait imaginé et tout cela la rendait… heureuse. Oui heureuse… elle avait l’impression d’être dans un rêve. C’était trop beau pour être vraie. Elle tourna légèrement la tête vers Griffon et remarqua que ce dernier fixait le lit de coussin entouré de plats décadents. Sourire aux lèvres, elle remonta la main de son mari vers ses lèvres, embrassant ses doigts pour attirer son attention avant de reprendre la parole; « Je n’ai pas voyagé aussi longtemps pour m’endormir tout de suite dans les bras de mon mari. »


Sans attendre, elle l’entraina doucement vers le lit de coussins, s’installant confortablement avec son mari. Un serviteur s’approcha doucement des nouveaux mariés, leurs tendant deux couples remplis de vin. Maralina prit les couples, en tendant une à son mari avant de plonger son regard dans le sien. « Tout cela me parait comme le plus beau des rêves. »  Maralina lui sourit, avant de passer doucement sa main sur la joue de son mari; « Et peu importe ce que l’avenir nous apporte; je t’ai choisi; dans cent vies, dans cent mondes, dans n'importe quelle version de la réalité, je te trouverais et te choisirais. » Sans attendre, la demie-elfe vola un baiser à son mari, comme pour sceller de nouveau cette promesse. À ce moment précis, elle était submergée de bonheur, et rien ne semblait l’arrêter.

« Ça tombes bien, ça fait longtemps que j’attends de t’appeler comme ça. » Ils montèrent via un pont qui fut rapidement retiré puis disparut dans le ventre du navire une fois que le couple posa le pied sur la galère avec les deux serviteurs qui l’avait posé là pour permettre aux époux de monter. Ledit marquis se laissa ensuite entraîner vers les coussins mais avant de s’y installer il s’arrêta devant pour retirer sa cuirasse qu’il déposa sur la mer de roses qui entouraient les îlots de coussins placés un peu partout sur le pont. Il rejoignit ensuite Maralina et attrapa la coupe de vin qu’elle lui tendait, laissant son regard s’égarer dans les yeux pers de la demi-elfe. « Je peux t’assurer que ce n’en est pas un. »

Un sourire amusé passa sur ses lèvres alors qu’il s’apprêtait à lever sa coupe en l’honneur de leur mariage. Il aurait aimé que tout cela puisse être plus… officiel mais il ne pouvait pas se le permettre. Il était né pour être marquis, la DameDieu l’avait fait naître dans cette famille, dont c’était le devoir depuis des cycles, pour une raison et il ne se voyait pas aller contre la volonté de la déesse. Il ferma les yeux au contact de la main de sa bienaimée et pencha la tête sur le côté, bloquant ladite main entre sa joue et son épaule dans l’espoir qu’elle ne parte jamais, profitant de la douce sensation, bien qu’il fût au courant que tout ça n’était que temporaire. La voix de la princesse marchande lui fit rouvrir les yeux et après le baisé il leva finalement sa coupe.

« Aux quatre-dix-neuf autres vies alors. » Un sourire amusé passa un instant sur ses lèvres alors qu’il réfléchissait. « Est-ce que tu sais à quoi ressemblera notre prochaine vie commune ? »

La Princesse ne put s’empêcher de sourire, avant d’entouré le coup de Griffon de ses bras, alors que leurs lèvres se touchèrent. Au bout de quelques secondes, la vaanie mit fin au baiser avant de laisser doucement son front tomber contre celui du langecin. « Disons que c’est un nom que je ne suis guère habituée. Mais faisons un marché. Dans la vie de tous les jours, appelle-moi Mara ou Maralina, et lorsque tu seras complètement, parfaitement et indéniablement heureux, tu pourras m’appeler Maralina de Langehack. » Elle eut un sourire amusé, avant d’embrasser doucement le marquis pour finalement l’entraîner à l’intérieur du navire. Tout était parfait, entre son mari qui profitait de la plus humble des caresses, aux moindres recoins du navire décoré. Maralina ne put s’empêcher qu’elle avait réellement prise la bonne décision.


« À quoi va ressembler notre vie? » Elle s’arrêta un moment, avant de déposer doucement sa coupe sur le côté, prenant celle des mains du Marquis pour la déposer doucement à côté de la sienne. Puis, elle le poussa doucement sur le dos, le forçant à se laisser tomber sur le tas de coussin alors qu’elle le suivit, mettant sa main de chaque côté de sa tête. « C’est pourtant bien simple. Je serais la première chose qui envahira tes pensées lorsque tu ouvriras les yeux le matin et la dernière pensée que tu auras avant de sombrer dans le sommeil. » Maralina passa doucement la main sur le torse de son mari, caressant doucement l’étoffe qui le recouvrait, alors que son regard était planté dans le sien. « Nous serons toujours là l’un pour l’autre. Je t’épaulerais dans tes décisions comme tu m’épauleras dans les miennes. » Elle laissa son souffle caresser le cou du marquis alors qu’elle s’approchait dangereusement de son oreille; « Tes malheurs sont les miens, tes intérêts sont les miens et même si un océan nous sépare cela ne changera rien à la promesse que je t’ai fait. » Elle mordilla doucement son oreille; avant de reculer légèrement la tête, fixant son mari avec un sourire aux lèvres; « Et il n’y a pas une seule personne sur cette terre qui pourra détruire cette promesse. Et qui sait? » La demie-elfe embrassa de nouveau le langecin avant de lui murmurer; « Peut-être que la Damedieu nous bénira d’un nouvel enfant. » Maralina s’arrêta soudainement, avant de se reculer, un sourire amusé aux lèvres; « Ou tu peux faire comme la première fois que l’on s’est rencontrés et m’enchaîner pour me garder près de toi. » Le sourire de la demie-elfe sembla s’agrandir alors qu’elle se rappelait leur première rencontre. Il avait été si arrogant! Et pourtant les voilà, des années plus tard, dans les bras l’un de l’autre, marié. Décidément les dieux avaient un curieux sens de l’humour…

La réponse le fit sourire, du moins le début, il semblait qu’elle n’avait pas vraiment compris sa question ou du moins qu’elle en avait loupé une partie. Toutefois il devait admettre que ladite réponse n’était pas dénue d’intérêt mais pour le moment il n’avait pas envie de penser à ce que serait leur vie dans les ennéades à venir, il préférait profiter de l’instant, de ce moment où ils pouvaient être ensemble car il savait que ça ne durerait pas.

« Je lui demanderais de nous accorder un nouvel enfant. » Une telle demande n’avait pas souvent sa place dans ses prières, surtout maintenant, mais peut-être que c’était une chose qui lui manquait. Maintenant que ses enfants avaient bien grandis il ne les voyait plus beaucoup, mis à part Lukas, mais le problème était qu’il ne pouvait pas le traiter comme son fils en public. Le marquis devait bien admettre, qu’au fond, une vie de famille lui manquait. « Ne me tentes pas. »

C’était plus une demande qu’autre chose, enfermer la princesse marchande aurait pu régler un problème ou deux, notamment celui de l’éloignement, mais il en créerait tant d’autres que cela ne valait finalement pas le coup. Alors pourquoi Griffon y pensait si sérieusement tandis que son regard ne quittait pas celui de Maralina ? Il secoua lentement la tête, c’était tentant mais il devait y renoncer.

« Je pensais surtout à notre prochaine vie, car comme tu l’as si bien dit nous nous retrouverons, et je me demandes à quoi elle pourrait bien ressembler. D’ailleurs, qui sait, peut-être qu’il n’y aura qu’une seule autre vie, peut-être que nous serons un couple d’elfes qui vivront ensemble pour l’éternité. » L’idée n’était pas pour lui déplaire bien que pour ça il faudrait qu’il renaisse dans la peau d’un elfe, ce dont il n’avait pas trop envie, mais c’était un prix qu’il était plus que prêt à payer. « Ou bien un couple de dragons, après tout ils sont revenus. Qu’en penses-tu ? »

Après avoir posé sa question il attrapa un raison dans un des bols de fruits posé à côté du tapis de coussins avant de se rappeler d’une chose.

« En parlant de couple… » il se tourna pour faire signe à un serviteur, ce dernier ne tarda pas à comprendre de quoi il était question et s’en alla dans la cabine principale pour y récupérer une cage dans laquelle se trouvait un couple de mérials. Les oiseaux au plumage d’un bleu qui n’était pas sans rappeler au marquis la couleur des yeux de son épouse, voletèrent dans leur cage quelques instants avant de se calmer. « Je sais que ce n’est pas forcément très impressionnant comme cadeau mais je me suis dit que ça serait mieux qu’un anneau. »

Maralina eut un léger sourire en attendant la réponse de son mari, elle l’embrassa passionnément, laissant ses mains glisser doucement sur son torse pour remonter sur ses épaules. « Je suis si près d’un de mes buts, cela serait dommage de me faire enfermer comme cela. » Son regard se plongea dans celui du marquis alors qu’un sourire vint orner ses lèvres, voilà des années qu’elle travaillait dans ce sens, et voilà qu’elle venait de prendre le contrôle du conseil. Il aurait été dommage de tout abandonner alors qu’elle se trouvait si près de son but. Maralina eut un léger rire alors que ce dernier lui parlait de leurs prochaines vies; « Des elfes…? Réellement? » La vaanie se laissa tomber aux côtés de son mari, déposant doucement sa tête dans le creux de son bras, non sans détourner son regard; « Tu es trop grognon pour être un elfe. Par contre les dragons me semblent plus appropriés… » Elle donna un léger baiser sur le nez de Griffon, comme pour sceller ses mots avant de se replacer dans le creux de son épaule. « J’ai plus envie de profiter du moment qui est là, devant moi. Que de penser à un futur lointain. » Cela faisait trop longtemps qu’elle l’attendait, trop longtemps qu’il hantait ses nuits et qu’elle ne pouvait rien faire pour l’approcher… et voila qu’elle était maintenant sa femme… Près de sept longues années plus tard…


Soudainement le marquis fit un léger signe à un serviteur qui sortit rapidement de la pièce, avant de revenir avec un couple d’oiseaux. Sans attendre, la demie-elfe jeta un regard amusé à son mari avant de se relever d’un bond presque félin. Elle s’approcha doucement de la cage, et observa attentivement les deux oiseaux qui ne semblait pas apprécier le mouvement brusque du serviteur. La vaanie observa doucement les deux volatiles qui se trouvaient côte à côte, sourire aux lèvres. Elle savait à quel point un couple de mériales était un présent de valeur en péninsule, et le romantisme du Marquis était définitivement sans failles. Elle passa délicatement son doigt dans la cage, effleurant du bout des doigts le plumage bleuté de l’oiseau, en souriant. Puis, retournant près de son mari, cette dernière s’agenouilla à ses côtés, avant de prendre sa main pour l’embrasser doucement. « Il se trouve, que j’ai aussi un cadeau. Peut-être pas d’aussi grande valeur que le tiens, mais qui représente quelques choses de bien important pour moi. » La demie-elfe sortit doucement une petite bourse en velours violet avant de la tendre à Griffon, lui donnant l’occasion d’ouvrir son présent. À l’intérieur, se trouvait une bague finement ouvragée, une Andradite dominait la pièce, alors que les éclats dorés semblaient capter la moindre lumière. « C’était la bague de mon grand-père… Il a été le premier à se lancer en affaires, et je suppose que sans lui, je n’aurais jamais osé te rencontrer. » Elle observa la bague pendant un moment, l’air distraite, semblant se rappeler de précieux moment qu’elle avait eu avec ce dernier avant de retourner son regard dans celui du Marquis, avant d’hausser les épaules. « Un petit rappel que je serais toujours là près de toi en quelque sorte… »

Il fit un léger haussement d’épaule, principalement limité qu’il était par la demi-elfe qui s’était placé au creux de son bras. Si l’idée d’être un elfe ne lui plaisait pas plus que ça, au moins avaient-ils la chance d’être immortels et, donc, de pouvoir passer une vie infinie avec la personne qu’ils aimaient. Au final c’était bien la seule chose qu’il leur enviait.

« Comment ça je suis trop grognon pour être un elfe? » Demada-t-il d’un air faussement indigné, la phrase qui suivitl e fit sourire, si ce n’est pas un peu rire. Oui, peut-être qu’un dragon lui irait davantage, un dragon d’or, pour garder un lien avec son ancienne vie. Bien qu’il ne soit pas forcément certain de vouloir garder un tel lien, il imaginait cependant que ça dépendait comment ladite vie allait évoluer et, finalement, se terminer. Mais comme son épouse venait de le dire : mieux valait profiter du moment présent plutôt que de penser à une hypothétique nouvelle vie. Il l’observa la réception de son cadeau avec un amusement comblé de tendresse, le sourire de sa chère et tendre étant le seul remerciement dont il avait besoin. Alors, lorsqu’elle mentionna un présent, il se redressa, s’asseyant sur le tapis de coussins, retrouvant soudainement sérieux. L’anneau était magnifique et la pierre lui semblait étrange, alien même, il n’en avait jamais vu de telle et il se demandait bien ou est-ce que la princesse marchande avait pu la trouver. Il allait lui poser la question mais il se ravisa, se disant que le mystère la rendait bien plus précieuse. Il écouta attentivement ce qu’elle avait à dire au sujet de la bague, se disant qu’en effet il pouvait être reconnaissant envers le grand-père Irohivrah sans doute prierait-il pour son Souffle ce soir, de toute façon vu qu’ils se trouvaient sur des flots, même s’ils n’étaient pas aussi impressionnants que ceux de l’Olienne ou que ceux de l’Eris, une prière en l’honneur de Tyra était de bon aloi. « C’est… merci, ça me touche. »

Il la prit du bout des doigts, solennellement, pour la mettre à son annulaire droit. Il comptait bien en profiter tant qu’il le pouvait encore. En effet il savait qu’il ne pourrait pas la garder bien longtemps au doigt avant qu’elle n’attire d’attention non voulue mais il ne comptait pas laisser le bel anneau dans un coin de ses appartements, à prendre la poussière, bien au contraire. S’il ne pourrait pas le garder au doigt, il comptait bien l’avoir tout de même sur lui.

« Comme tu t’en doutes peut-être je ne pourrais pas l’avoir au doigt mais je comptes bien la porter, la bague de ton grand-père et, parce que le couple de mérial ne sera jamais un présent suffisant, je vais t’en faire un autre. Une fois de retour à Langehack j’irais voir Maître Delreaux pour qu’il ajoute l’anneau à une chaîne d’or ornée de mes armoiries puis je ferais du collier un symbole du marquisat que les futurs marquis porteront. Ils ne le sauront sûrement jamais mais ils devront leur légitimité aux Irohivrah et, plus particulièrement, à ton grand-père et toi. En d’autres circonstances je t’aurais fait don de ma broche mais… » un sourire amusé passa sur ses lèvres avant qu’il n’embrasse son épouse. « Malheureusement tu l’as déjà. »

La Princesse haussa un sourcil, clairement amusé alors que ce dernier eut son air faussement indigné. « Dois-je te rappeler que tu voulais m’enfermer dans tes cachots lors de notre première rencontre? » Elle leva les yeux aux ciels, l’air légèrement ennuyée avant de les retourner vers son mari; « Bon d’accord, je l’ai peut-être mérité en essayant de te tuer, mais c’est quelque part un honneur d’être encore en vie après s’en être prise à moi. Je ne pourrais pas dire la même chose des autres… » L’air amusée, la demie-elfe se rappelait que trop bien les premiers événements qui s’étaient passé dans cette clairière… Griffon qui voulait la mettre au fer… Lars qui l’avait fait marcher… Définitivement la plus romantique des rencontres! Mais au final, c’est ce qu’elle avait aimé chez lui. Il lui avait tenu tête, il l’avait poussé à se dépasser pour survivre, et c’était probablement la raison qui l’avait attiré à lui. « Je n’ose même pas imaginer comment tu vas traiter des futurs beaux-enfants. Essaie de ne pas les mettre dans les geôles… Ça t’évitera au moins quelques problèmes diplomatiques. »


Maralina ne manqua pas l’air curieux de son mari alors que ce dernier observait la bague. « C’est une Andradite, un joyau unique à l’Anaëh. Je ne crois pas l’avoir vu ailleurs en Ithri’Vaan et à voir ta réaction, cela doit être rare en péninsule aussi. » Elle eut un sourire, se rappelant la fierté que son grand-père avait avec cet anneau à sa main. Puis, Griffon reprit finalement la parole, lui faisant un nouveau cadeau. Ce cadeau ne fit qu’agrandir son sourire. Qui aurait cru, qu’une simple demie-elfe venant de l’autre côté de la mer Olienne aurait un si grand impact sur un Marquisat péninsulaire. Maralina eut un léger sourire avant de répondre au baiser passionné de son mari. « … et je ne m’en séparerais jamais.» Mettant doucement sa main sous l’encolure de sa robe, elle fit quelques mouvements du bout des doigts avant de révéler ladite broche. Si elle la portait tous les jours sur son cœur, cette dernière était toujours hors de la vue des gens, mais Maralina se plaisait à sentir la pièce métallique contre elle, cela lui rappelait qu’il y avait quelqu’un qui l’aimait réellement dans ce monde. « Il n’y a pas un moment où je ne l’ai pas près de moi. Pas un moment où je ne pense pas à toi… »  Refermant ses doigts sur cette dernière, elle la remit rapidement à sa place, sourire aux lèvres. « Il faudra venir passer quelques vacances à Uldal’Rhiz après les célébrations pour le Roi. » D’un mouvement agile, la demie-elfe enjamba l’humain, s’assisant sur ses cuisses, le dominant légèrement alors que ses mains encadrèrent doucement son visage. « Je ne me plaindrais pas de passer quelques ennéades avec mon mari dans mon palais. » La Princesse embrassa doucement le Marquis, laissant ses mains glisser doucement sur sa tunique, détachant doucement les lanières qui retenaient les vêtements du Marquis.

Le souvenir le fit sourire. Oui, il avait voulu l’enfermer mais il semblait que Maralina oubliait les circonstances qui avait mené à ce souhait de sa part. En soit il ne doutait pas, aujourd’hui encore, qu’elle l’avait bien mérité, son petit séjour dans les geôles de Sorault, porter atteinte à l’intégrité physique du maître des lieux ne devait pas rester sans conséquences. Toutefois des conséquences il y en avait eu, pas forcément celles auxquelles il pensait au départ mais elles étaient bien là au final, des années plus tard, un anneau au doigt. Si jamais on lui avait dit le matin même qu’il finirait par épouser l’estréventine qu’il allait rencontrer alors sa nouvelle épouse aurait eu un compagnon de cellule pour lui tenir compagnie. Finalement les dieux ont bien un sens de l’humour tordu mais qui, au final, pour le moment, allait fort bien à Griffon. Qu’ils rient pourvu qu’il ait ce qu’il désirait.


« Que sa Majesté saches que je suis conscient de l’insigne honneur qui me fut fait. » Répondit-il avec un sérieux mordant, comme s’il s’était trouvé devant le roy. Il avait du mal à le feindre, ce sérieux, un coin de sa bouche était remonté, Griffon n’ayant pas réussit à complétement à se retenir de sourire. Toutefois son sourire disparut bien vite et il arrêta de jouer la comédie après ce qui suivit. Un sourcil haussé, il regarda son épouse en se demandant si elle se moquait de lui. « Comment ça, de futurs beaux-enfants? Qu’est-ce que tu entends par futur ? »


Maralina fronça les sourcils avant de lâcher un rire. Il fallait croire que son péninsulaire n’était pas tout à fait parfait. Se redressant légèrement, posant son coude au sol, la princesse eut un air amusé avant de rétorqué « Ne commence pas à faire ton jaloux. Nous sommes mariés que depuis une journée. » Griffon fronça les sourcils, n’aimant pas du tout la tournure que prenait la conversation. Elle passa doucement ses doigts sur la joue de Griffon, le regardant tendrement, cherchant le bon mot pour décrire ce qu’elle voulait dire. « Tes enfants sont en âge de se marier non? Comment appellez-vous leurs époux en péninsulaire? »


Au fur et à mesure que son épouse expliquait ce qu’elle avait voulu dire, son expression s’adoucissait jusqu’à ce qu’il se retrouve un peu gêné, ce qui sembla amusé la vaanie.


« C’est… oui on peut les appeler comme ça. »


Elle lui fit un léger sourire pour détendre l’atmosphère, avant de caresser une nouvelle fois son visage. « J’ai fais un serment devant les dieux que je me dédiais à toi Griffon, je ne compte pas briser cette promesse. » Elle lui donna un léger baiser, avant de se laisser tomber doucement sur le torse du Marquis, plongeant son regard dans le sien; « Cela fais longtemps que je sais que je ne peux me passer de toi. »


« Ça l’est, oui, en tout cas c’est la première fois que j’en vois une. » Reprit-il en jetant un coup d’œil à l’anneau à son doigt.


Il observa sa broche qui refléta un rayon de soleil alors qu’autour d’eux, sans qu’ils ne puissent le voir d’où ils étaient, les rames de la galère sortaient par les lucarnes qui leur étaient attribuées et plongèrent dans l’eau, la chiourme faisant ensuite avancer le navire au rythme lent qu’imposaient les musiciens sur le pont, leur mélodie reprise par un joueur de lyre à l’étage du dessous. Maralina eut un léger sourire, avant de déposer doucement sa tête dans le creux de l’épaule de son mari;   «Une pierre spéciale pour un homme spécial... »


« La proposition est tentante. » Répondit-il avant d’observer son épouse se déplacer en se demandant ce qu’elle avait en tête. « Tu n’as pas peur que quelqu’un se doute de quelque chose ? » La princesse marchande fronça des sourcils alors qu’elle se trouvait sur lui. Un léger sourire vint orner ses lèvres avant qu’elle ne reprenne la parole;   « Ils peuvent bien se douter de quelque chose, il n’y en a pas un dans le conseil qui osera se lever contre moi. » Contre toi, peut-être pas, voulu rétorquer Griffon qui s’abstint pourtant. Ce n’était pas faux en soi, Maralina dominait le conseil de Thaar, et après la chute du Prince de Qiryah, pas un seul de ses homologues tenteraient de s’approcher trop d’elle. Tous semblaient avoir peur d’elle - et ce - avec raison. Déposant doucement les mains sur le torse de son mari, écartant légèrement les doigts alors que son sourire sembla devenir un peu plus serein.   « Néanmoins, si tu es inquiet, nous pouvons toujours arranger une visite en secret, quitte à être à Uldal’Rhiz.  »


« Pas besoin, je trouverais bien un prétexte pour venir, en mon nom cette fois. »
Tel un félin, la demie-elfe s’étira légèrement avant de se pencher doucement vers le Marquis, approchant ses lèvres de son oreille avant de murmurer;   « Il faut dire que la ville est bien moins amusantes lorsque tu n’est pas dans les parages… »


Se relevant légèrement en s’appuyant sur ses coudes, Griffon embrassa son épouse.


« Il ne nous reste plus qu’à réctifier ça. » Souffla-t-il.


La main de la demie-elfe remonta doucement sur la joue de l’humain, écartant légèrement les doigts alors que leurs regards se rencontraient. « Je t’attendrais avec impatience » murmura-t-elle avant de déposer doucement son front contre celui de son époux. Maralina l’embrassa de nouveau, cette fois passionnément, le forçant doucement à retomber sur son dos, alors qu’elle le suivait dans sa - disons - chute, s’abandonnant aux caresses de son mari.


Ce ne fut que quelques heures plus tard, que la vaanie, enroulée dans un drap de soie, la tête dans le creux de l’épaule de son mari.   « Je ne t’ai jamais demandé… mais je suis curieuse… De toutes les femmes sur Miradelphia… Pourquoi moi?  »


Allongé, un bras sous le coussin qui soutenait sa tête, l’autre autour de son épouse, Griffon regardait le ciel d’un bleu azuré. La question de Maralina lui fit tourner la tête dans sa direction, se demandant pourquoi est-ce qu’elle lui était venue maintenant. Mais il tourna à nouveau la tête pour observer de nouveau le ciel, son regard se perdant dans ses pensées.


« Quand j’avais vingt ans je t’aurais répondu que c’est ta beauté, peut-être ton exotisme, sûrement ton charme. » Il poussa un soupir. « Quand j’avais vingt ans je t’aurais mentis. En réalité, les dieux savent que j’ai essayé de te haïr, de t’en vouloir pour avoir tenté de me tuer, de t’en être prise à mon fils mais j’en étais incapable. Tu as réveillé quelque chose en moi que je pensais mort depuis bien des années, c’est peut-être pour ça que Lars t’apprécies autant. Et pour toi, qu’est-ce qui t’as décidé ? » Maralina haussa un sourcil alors qu’elle entendit la remarque sur Lars. Quel détestable individu! Il était chanceux que Griffon lui porte une si grande affection, car ce dernier aurait probablement disparu depuis un moment si ce n’était pas le cas. Soudain, un soupir alors qu’elle se redressa légèrement, observant son mari; « D’ailleurs, je m’excuse pour cela. C’était en effet un coup bas de tenter de manipuler ton fils. Je crois que j’aurais agi encore plus violemment si quelqu’un avait tenté la même chose avec les miens. » Elle regarda le sol, clairement honteuse, avant de remonter doucement son regard; « C’est une bonne question. J’étais tellement habitué aux hommes qui se prosternaient devant moi, se pliaient en deux pour s’offrir quelques heures en compagnie de la fameuse Princesse de la Chair… Mais toi… Toi, tu m’as tenu tête. Pas qu’une seule fois et après tu as eu le culot de venir me narguer dans ma ville. » Maralina eut un léger sourire en soufflant légèrement, alors que son regard retournait à nouveau vers le sol, semblant se remémorer le moment qu’elle avait vu Griffon dans ses habits poussiéreux à Uldal’Rhiz. « Il y a un lien, quelque chose entre nous deux que je n’ai jamais pu expliquer. Si cela m'a terrifié au premier abord, je me suis vite rendue compte que je ne pouvais pas me passer de toi.  » Un lien qui avait traversé le temps, toujours la, impossible à se débarrasser. Elle ne pouvait fuir, car qu’elle ne voulait ou non, ils étaient qu’un et Maralina savait que trop bien que cela ne pourrait changer.