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| Le prix de la paix. | |
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| Sujet: Le prix de la paix. Lun 15 Nov 2021 - 17:20 | |
| Quatrième jour de la Deuxième ennéade de Favrius, An Dix-Neuf du Cycle XI, Diantra, Palais Royal
Les incertitudes et instabilités de ces temps troubles faisaient chanceler le Royaume tout entier. Les crises étaient religieuses, économique et politiques. Les dissensions de l’extérieur rouvraient de vieilles blessures de l’intérieur, appuyaient sur les inimitiés encore récentes et forçaient la résurgence des rancunes à peine calmées de la dernière décennie.
Les pairs, parmi les plus puissants et les moins importants, la gente de cour et même quelques grands noms de la bourgeoisie avaient leur attention toute entière tournée vers la Couronne en ce jour décisif. Car au cœur du palais s’était réunis des pontes du Royaume accompagnés des plus éminentes figures du clergé néérite. Le procès s’ouvrait après plusieurs jours passés à recueillir et consigner témoignages, suppositions et hypothèses. Ascilin lui-même avait mis quelques-uns de ses meilleurs éléments de l’Arcanum à la disposition des enquêteurs. Rien ne fut laissé au hasard.
- Mes seigneurs, mes dames, bonnes gens de Péninsule, témoins des tumultes qui secouèrent notre bon Royaume… Nous voici réunis en ce jour afin que soit faite toute la lumière sur l’affaire qui nous atterre. Déclama le Grand Chancelier, debout au centre de cette pièce où les puissances du Royaume sont réunies. Les enquêtes diligentées par la Couronne sauront se faire le faisceau déliant l’ombre. Sous Son regard, la DameDieu nous guidera au travers de ces difficultés.
Le Langecin fut appelé à rejoindre le centre de la pièce. Le temps était venu, une fois encore, d’entendre les paroles du suderon.
- Marquis de Langehack, vous nous aviez, quelques ennéades auparavant, explicité la tournure des événements survenus au cœur de votre domaine. Souhaitez-vous maintenir ces propos ? Auquel cas, sauriez-vous les réitérer ?
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| | | Griffon de Langehack
Humain
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| Sujet: Re: Le prix de la paix. Mar 30 Nov 2021 - 8:58 | |
| La façon de faire de la couronne avait laissé à Griffon un goût de cendre qu’ils avait resassé tout le chemin jusqu’à la capitale.
« Venir chez moi en pleine nuit, sans même un mot, pour fouiller l’endroit comme si j’étais un vulgaire voleur ! » S’était-il écrié en enfourchant sa monture avant de donner un coup d’éperons rageur dans les flancs de l’animal. « C’est le fait des nordiens ça. »
Ruminait-il en passant la porte de Brevise alors qu’Almaury de Brevise, le gardien de ladite porte, se tenait sur le côté, observant le frère du marquis rire à grand cœur, ce qui ne fit rien pour apaiser Griffon.
« Pas forcément… » toutefois il n’eut pas le temps de terminer sa phrase, étant rapidement interrompue. « Mon cousin le roi n’aurait pas fait preuve d’autant d’incivilité ! » Il agita un index accusateur dans la vague direction de Diantra et si Galyn allait lui dire qu’il ne pouvait pas le savoir étant donné que sa majesté était morte dans son enfance précoce mais il n’en fit rien. Il savait que le marquis n’entendrait pas raison dans cet état alors il le laissa parler. « Qu’une bande de sauvages, pas si éloigné des wandrais qu’ils gardent. »
Sur cette remarque ils s’élancèrent sur la Route d’Or à brides abattues pour arriver le plus rapidement jusqu’à la capitale, ne s’arrêtant que le temps de s’abreuver ou de manger un bout puis de changer de montures aux relais le long du chemin. Ce fut un petit groupe de langecins éprouvés par les rigeurs d’un voyage mouvementé qui arriva au palais royal la veille du procès, le jour d’avant ils l’avaient passé au haut temple néerite, à se recueillir pour demander à la DameDieu que justice soit faite et qu’elle guide les juges pour que la vérité n’éclate au grand jour.
Lorsque Griffon fut appelé il s’exécuta, se tenant droit, fier, sa main droite attrapant son poignet droit dans son dos. Les émeraudes qui lui servait d’yeux embrassèrent la pièce du regard avant qu’il n’acquiesce à la demande du grand chancelier.
« Je les maintiens et les répéterais volontiers. » Il prit une longue inspiration, ferma brièvement les yeux avant de les rouvrir pour commencer son récit. « Le mois dernier j’ai présenté devant certains princes les faits qui se sont déroulés en mon palais : pour ceux qui n’y étaient pas, laissez-moi répéter ce qui fut dit. »
Il se tourna alors vers le reste de la pièce et renforça sa voix d’un raclement de gorge puis laissa la pause s’étirer une seconde de plus. Lorsqu’il reprit la parole sa voix avait gagnée en force, en clarté alors qu’il épousait l’aisance et la portance de l’orateur consommé.
« J’ai reçu en ma demeure des nains du nord qui voulaient, j’ai cru en premiers lieux, commencer un rapprochement commercial entre nos deux peuples. Une telle venue, d’abord porteuse d’espoir, a, vous l’imaginez bien, attiré le reste de ma cour pour voir de quoi il retournait. Ce fut tout proche des portes principales que deux des attendant se querellèrent. » Il s’arrêta un instant pour fouiller dans sa mémoire le nom des deux imbéciles qui avaient tiré l’épée ce jour-là ; leurs prénoms lui échappaient encore, préférant visiblement rester pendus au bout de sa langue, mais au moins les noms de leurs familles lui étaient revenus, ceux-là, il ne risquait pas de les oublier de sitôt. « Sir d’Allard et sir d’Accora entreprirent un duel au point d’honneur pour résoudre une dispute de préséance. Ashal d’Amderran, le capitaine des Aigles de Sang, un chevalier aussi digne du nom que ceux qui ont eu la lourde tâche d’unifier notre bon royaume, a alors prit avec lui deux de ses hommes pour mettre fin à la querelle. C’est à ce moment que les envoyés des nains passèrent à l’action et en appelèrent à leur sorcellerie. »
Il poussa un soupire désolé, secouant tristement la tête alors que les souvenirs de cette journée fatidiquement tragique lui revenait en tête. Lorsqu’il releva l’échine il entreprit de faire quelques pas alors qu’il relatait les évènements.
« A ceux qui, comme moi, ont croisé le fer avec les noirelfes, je n’aurai pas besoin d’en décrire ni d’en expliquer les périls. » Il s’arrêta et son regard passa sur la foule à la recherche d’hommes d’environ son âge ou plus vieux qui avaient l’air d’avoir une certaine expérience du combat et probablement été présent pour repousser l’invasion eldéenne, à ceux là il adressa un respectueux signe de tête avant de reprendre ses quelques pas. « Pour les autres, laissez-moi vous conter le vaillant sacrifice de cette poignée d’hommes exemplaires qui n’ont pas hésité à donner leur vie pour protéger celle de leur seigneur, sauvant ainsi non seulement ma personne mais également leur honneur.»
Il fit une nouvelle pause et, se perdant à nouveau dans ses souvenirs, il se reprit rapidement, refusant de se laisser aller, il leva un poing tremblant d’émotion.
« Que les ambassadeurs furent motivés par la tromperie ou la crainte, la peur, n’a plus vraiment d’importance pour sir Lorin Beaumont, sir Nicol de Rodier, sir Guerinet de Beaulne et enfin sir Ashal d’Amderran ; ces quatre représentant de la fine fleur chevaleresque de Langehack, de dignes otharites et de pieux néerites, ont été fauché par la roche en fusion des petits. Au moins sir Guerinet fut tué sur le coup, les autres n’eurent pas cette chance. J’aimerais d’ailleurs observer une minute de prière en l’honneur de sir d’Amderran et ses braves compagnons, un tel sacrifice ne devant pas être ignoré. Sir d’Amderran qui, lui, survécut pendant des minutes qui semblèrent s’étirer pour tendre vers l’infini, ne faisant plus qu’un avec son armure fondue, une prière à la Voilée sur les lèvres tandis que les goûtes de métal lui coulaient dans la bouche, le réduisant définitivement à un silence glacé. »
Reprenant sa posture initiale, les mains dans le dos, Griffon entreprit de s’agenouiller, de joindre les mains en coupe, de fermer les yeux, et de prier. Si ses lèvres remuèrent, aucun son ne sortit de sa bouche, s’ils voulaient l’entendre ils auraient l’occasion de le faire dans quelques instants. Après avoir prié pour que le repos des chevaliers ne soit point troublé et aussi doux que possible, il se releva avant de se racler la gorge. Son regard passa à nouveau sur l’assemblée avant qu’il ne reprenne.
« J’ordonna alors aux camarades des valeureux de se saisir des ambassadeurs pour éviter que tout autre Souffle n’ait à souffrir. Alors que j’étais dépourvu de protecteurs, un assassin en profita pour sortir des ombres et s’en prendre à ma personne. J’ai alors lutté contre l’individus et malgré des blessures douloureuses bien que non mortelles il fut mis hors d’état de nuire. Désormais hors de danger je pus me remettre sur mes pieds et voir que la garde palatiale avait remis de l’ordre dans la salle d’audience, à mon plus grand soulagement ; la seule menace sérieuse restait les nains et leur infâme sorcellerie. La suite est simple : j’ai demandé aux émissaires de lâcher leurs armes mais le sorcier a refusé, mes autres demandes, bien que répétées maintes fois, n’ont pas porté leurs fruits. Pour éviter toute récidive j’ai jugé prudent de lui ôter la vie. »
Griffon s’arrêta finalement dans sa marche et poussa un dernier soupir. C’était une bien triste histoire mais le royaume s’était bâtis sur de bien tristes histoires et au final, une de plus ou de moins ne changerait pas beaucoup l’ordre des choses dans son ensemble.
« Voilà, messires, exposée, étalée devant vous la vérité. » Une fois son discours terminé, le marquis fit un demi-tour pour faire face au grand chancelier. « Voilà, comme demandé, le récit des faits, comme vous l’avez demandé. »
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| Sujet: Re: Le prix de la paix. Jeu 9 Déc 2021 - 18:30 | |
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Le Grand Chancelier écoutait patiement, les yeux rivés sur le langecin. Aucun des mots prononcés n'ééchappaient à son oreille de chat, aucune des mimiques ne se dérobait à son regard d'aigle.
- En effet, ces nains venus du Zagazorn étaient en quête de commerces. Ils n’entendaient pas commencer un rapprochement entre nos peuples, mais plutôt continuer de bâtir sur cette lancée initiée il y a déjà quelques années. À dire vrai, leur présence consistait en l’entretien de ces relations aux bases déjà solides.
Athanase fit quelques pas, observant l’assemblée dans un silence pesant. Son habituel visage de marbre ne laissait rien transparaître.
- Par sorcellerie, vous voulez parler de cette magie dont ils ont les secrets j’imagine ? Et si le terme peut en faire sourire certains, j’ose espérer tout de même que vos contacts avec la magie ne se résument pas à vos mémoires du sombresang. Après tout, le Sud connait bien la magie. Très bien même, elle y est utilisée souvent, au cœur de Langehack comme dans les contrées voisines les plus proches. Si ce n’était l’accent, je vous aurais pris pour un homme du Nord. Quoiqu’un nordien, connaissant leur trempe, aurait réussi à éviter une telle bévue. Souffla le Grand Chancelier en se tournant à nouveau vers le Marquis. Car voyez-vous, des témoins de ce triste événement affirment avoir vu et entendu l’ambassadeur se rendre, lui et les siens d’ailleurs. Ils affirment l’avoir vu et entendu vous supplier vous, après s’être rendu, alors que vous faisiez exécuter des nains désarmés et déjà à votre merci.
Le Grand Chancelier désigna Ascilin, le Maître de l’Arcanuum, de la main, paume ouverte vers le plafond.
- Grâce aux compétences de ses mages les plus qualifiés et de la bonne volonté de ces témoins, mon confrère ici présent saura certifier de la véracité de leurs propos. Aussi, compte tenu de la teneur de cet événement, je ne saurais si l’infamie réside en la « sorcellerie » comme vous l’appelez, où en l’acte d’exécuter des combattants ayant d’ores et déjà déposé les armes tout en ignorant leurs suppliques ? Car quel chevalier, quel homme ayant prêté serment sous le regard de la Déesse peut ne serait-ce qu'imaginer s'abaisser à une telle vilénie ?
L’index du Grand Chancelier se dressa en direction du Langecin. Si son visage n’en laissait rien paraître, il avait en mémoire ce fameux moment où il s’était retrouvé le bec dans l’eau face au Roi nain.
- Et, pour quelqu’un semblant avoir tant d’aversion pour la… « Sorcellerie », vous saurez sans nul doute étaler un peu plus de vérité et de faits concernant la tablette du runiste. Celle-là même qui souffrit un message on peut plus intéressé. Il claqua des doigts et dans l'instant trois jeunes pages vinrent distribuer des vélins à l’auditoire. Sous vos yeux, messires et mesdames, le message transmis aux nains, réclament le savoir de leurs runes en l’échange d’une paix maintenue. Alors oui, je sais ce que vous vous demandez : « Par quelle sorcellerie ce message s’est-il retrouvé sur cette tablette rendue aux nains ? ». Car pour l’heure, des ambassadeurs nains venus commercer et solidifier des relations pacifiques déjà bien établies ont été massacrés après s’être rendus, et les décisions prises ce jour-là mettent en péril ces relations que les provinces du Royaume ont laborieusement construites avec le Zagazorn. En ce jour, mes Seigneurs, cette paix durement acquise est mise en péril par les décisions d’un seul et dont la vérité et les faits souffrent bien des contradictions.
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| Sujet: Re: Le prix de la paix. Jeu 6 Jan 2022 - 20:56 | |
| Les traits sereinement froids, les doigts entrelacés posés sur la table surélevée par rapport au centre de la pièce, Athanase de Cley écoutait la diatribe de défense du marquis. N’était son assurance ostentatoire dont il se targuait même en pareil moment, son discours n’était que pathétiques balbutiements ; louvoiements entre semi-vérités et omissions. Les accusations portées par la tablette, criantes de culpabilité, ne trouvèrent nulles véritable explications. Nulles, en tout cas, qui puissent écarter les forfaits du seigneur de Langehack.
Quelques passes rhétoriques s’échangèrent encore avant que les deux hommes ne se turent définitivement et que le Chancelier ne mit fin aux débats, convoquant le conciliabule. Dans un silence de plomb que ne troublaient que quelques chuchotements des nobles dans l’expectative du jugement qui serait rendu, Athanase se leva, mettant fin aux rumeurs. Théâtralement, il déclama la sentence.
- Nous, membres du conseil de Régence, sous la garde de l’Aile de Néera et sa férule morale, au nom de la Couronne du sang Phiiram, allons rendre la justice à l’égard de Son Excellence Griffon de Langehack, Marquis de Langehack et Seigneur de Sorault.
Les yeux du chancelier balayèrent la pièce, s’arrêtant un instant pour soutenir les prunelles d’émeraude flamboyantes de Griffon. À la Dame de Fernel, placée aux côtés de l’émissaire nain, il eut une œillade appuyée.
- D’avoir agi contre les intérêts du Royaume de Péninsule, contre les lois de la DameDieu et contre son devoir de seigneurs, Sire Griffon de Langehack est coupable. Pour ces crimes, la sentence est la mort. Que dans une ennéade, à l’heure et de la manière choisie par le condamné, cette sentence soit appliquée. Comme l’enseigne la DameDieu, les fils ne sauraient être jugés à l’aune des crimes du père et la succession du trône marquisal ira à l’héritière légitime. En guise de réparation pour les leurs tués, l’arme ayant exécuté l’ordre du marquis sera remise aux nains, enveloppée dans la cape de Sire de Langehack, témoignage de paix entre nos deux royaumes et de compassion à l’égard des victimes.
Athanase inspira profondément.
- Puissiez-vous, Griffon de Langehack, trouver dans la prière la paix et mettre vos affaires en bon ordre. Ainsi a parlé la Régence du Royaume.
Avant de se retourner et de quitter la pièce, une lueur de commisération trouva le regard du marquis, fendillant le masque de dureté.
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