Le rêve brisé | Solo

Hiver, Karfias 20:XI
Début du mois

Un petit chant sifflé me fait relever la tête de mon ouvrage. Je regarde mes deux oiseaux dans leur cage qui s'activent alors que la journée touche à sa fin. Depuis presque un mois, ils sont ma bouffée d'air frais et ma seule échappatoire. Parfois, je rêve d'être l'un d'eux, volant librement au dehors, observant la terre depuis des hauteurs improbables. Tout ce qui se trouve si bas doit paraître tellement dérisoire vu de là-haut...
Je laisse mes mains se reposer sur mes jambes pour permettre à mon Souffle de mieux vagabonder. Si je vais un peu mieux, c'est grâce à eux. Ils me permettent de me concentrer sur autre chose, ils perturbent ces moments où mes cauchemars reviennent sans même que je ferme les yeux. Ils me font me sentir moins seule alors qu'ils s'apprivoisent lentement. Tout ce que marc-Aurèle m'a refusée...

Dès notre retour à Terrefière, j'ai demandé à pouvoir réinvestir ma chambre, celle-là même que j'occupais avant notre mariage. Vivre auprès de lui me fait souffrir... Je fais de mon mieux pour ne pas montrer comme j'ai vais mal mais tous ont forcément remarqué que mon visage doux et avenant est devenu terne et impassible. Je me tiens aux côtés de mon époux lorsque mon devoir l'exige mais je ne le regarde pas et ne lui adresse la parole que si nécessaire. Puisqu'il ne veut pas m'aider -sous prétexte que cela ne fait pas partie de son caractère-, je lui épargne ma compagnie souffreteuse. Puisqu'il ne m'aime pas assez pour faire le moindre petit effort, mes contacts avec lui sont froids et distants. Je lui en veux... Je lui en veux de m'avoir enfin fait cette déclaration d'amour pour m'en refuser aussitôt toute preuve. J'aurais préféré qu'il ne m'aime pas et se contente de simplement faire son devoir. Cela m'aurait évité d'attendre quoi que ce soit de sa part, d'espérer qu'il me tende la main lorsque j'en ai besoin... J'en viens à douter de l'intérêt des sentiments dans un mariage... Cela ne fait-il pas plus de mal qu'autre chose ? J'en viens à le penser...
A présent, ce rêve que j'ai cru un temps devenu réalité s'est brisé. Il viendra un jour où l'on attendra de nous que nous concevions un enfant. Cela aura le mérite de me donner une occupation, un but dans la vie... et quelqu'un a aimer qui ne me rejettera pas. Mais, pour l'instant, j'ai besoin de cicatriser de ces plaies qui ont lacéré mon cœur. Celle de la mort d'une part, et du rejet de l'autre.