Il y a onze ans... [Renaud]

Kÿrianos, Ie ennéade de Favriüs, An XX, Cycle XI
Palais des Dômes, Diantra, Péninsule

Elle le voyait partout. Dans chaque coucher de soleil, dans chaque objet, dans chaque expression de son fils. Peu importe où elle était, elle avait besoin de se rappeler de lui. Se rappeler de ses paroles.


Bats-toi pour ce qui compte. Il est facile d'avoir de l'espoir par une belle journée et il y aura des jours sombres devant toi mon amour. Bats-toi pour notre fils.


Qu’est-ce que le deuil si ce n’est que l’amour qui persévère ? Il serait difficile à oublier, mais elle respecterait la demande de son mari. Se battre, se battre pour l'espoir, pour leur fils. Pour leur donner la meilleure chance possible et pour lui rappeler l'héritage qui lui revenait. D'ailleurs, cela faisait bien quelques jours qu’elle attendait un quelconque signe de vie du conseil de régence et elle se disait que cela prendrait bien quelque temps pour rassembler les témoins. Du moins, si ces derniers tentaient réellement de faire une quelconque enquête. Il fallait croire que le fait que le Marquis de Langehack soit son mari était plus dérangeant que le fait qu’un parricide aient était commis. Mais les péninsulaires étaient de pathétiques, petites créatures qui cherchaient plus à dorer leurs images qu’à comprendre réellement ce qui se passait sous le tapis. Néanmoins, la balle était dans leurs camps. Libre à eux de décider le reste de l’histoire, mais d’une façon ou d’une autre, Maralina aurait sa vengeance, mais en attendant, elle était invitée d’honneur du Roy, attendant avec impatience la suite. Il fallait dire que son fils profitait définitivement de l’invitation du conseil de régence. Explorant chaque parcelle du château qui leur était accessible, dévorant quelques ouvrages de la bibliothèque et observant les chevaliers et garde qui se pratiquait dans la caserne. Mais en cette belle journée ensoleillée, le duo de vaanis, entouré de quelques gardes, décidèrent de visiter les jardins de la reine. Maralina y avait déjà mis les pieds lors de sa première rencontre avec le régent, mais les revoir sans ce dernier serait définitivement une bénédiction.


Maralina observait son fils qui explorait les alentours, le suivant en retrait, un sourire aimant aux lèvres. Au moins le voir lui, semblait lui donner un instant de bonheur. Le regard azuré balaya ensuite le jardin, puis la princesse s’arrêta net lorsqu’elle aperçut un homme qui s’avançait vers elle. Un homme qu’elle ne connaissait que trop bien. On aurait presque pu penser que cela était une vision du passé, et pourtant, il avait un air qu’elle voyait tous les jours depuis près de onze ans. Une idée sembla alors germer dans son esprit, une idée qu’elle avait tenté d’enterrer, d’oublier, et voilà qu’elle resurgissait comme la plus violente des tempêtes. Peut-être qu’elle avait eu tort, ou peut-être que les airs de famille lointains étaient ressortis. Et si elle s’était trompée ? Et si Griffon n’était pas réellement le…? Elle eut l’impression de s’étrangler alors que cette pensée lui effleurait l’esprit. Elle avait toujours pensé que toutes les douleurs de la séparation périssaient lors des retrouvailles. Mais ces retrouvailles-ci, elle les aurait bien évitées. Néanmoins, la demie-elfe releva la tête, fixant l’humain qui s’était maintenant arrêté devant elle. Silencieuse, elle le regarda pendant quelques moments détaillant son visage. Il avait définitivement changé, contrairement à elle, le temps l’avait définitivement rattrapé. Pas en mal cela dit, mais on voyait bien que la vingtaine l’avait quitté.


« Votre Altesse. » Dit-elle avant d’incliner légèrement la tête, saluant le Duc d’Erac. « C’est un plaisir de vous revoir après toutes ces années. » Un mensonge ? Bien évidemment, et le Duc pourrait facilement voir que quelque chose la troublait, et pourtant la Princesse restait stoïque, contrôlait la peine et l’inquiétude qui s’emparait d’elle.

Il courrait partout, entre le couronnement qui venait d'avoir lieu et son mariage qui arrivait, le temps défile à une vitesse qui n'est pas permise. Il désire une entrevue avec le Roy, et il est donc venu au Palais Royal pour la demander. Il aurait pu envoyer un héraut à sa place, mais trainer en ce lieu lui plait, afin de prendre la température, d'essayer d’attraper une rumeur quelconque au vol, ou encore pourquoi pas, voir une personne à laquelle il n'aurait pas pensé forcément. Il faut dire que le Palais est en ébullition aussi même si le couronnement est passé, la fine fleur de la noblesse se trouve à Diantra, et avec le mariage qui se profile, les gens sont restés bien entendu. Les préparatifs n'en finissant plus aussi, c'est une pause qu'il se permet de prendre, sous couvert de devoir ducal, une excuse qui lui fait bien plaisir en ce moment même s'il est on ne peut plus ravis d'épouser Louise, cela n'est absolument pas remis en question, mais le stress est à son apogée, le rongeant de l'intérieur, et pouvoir l'évacuer n'est pas négligeable.

Renaud déambule donc au sein de l'édifice, passant par les jardins de la Reine, que Bohémond devrait se trouver à un moment ou à un autre. Chemin faisant, le Duc aperçoit deux personnes, dont une silhouette qui lui dit quelque chose. Il s'approche promptement avant que son cœur ne manque un battement, chose qu'il dissimule naturellement, tout en continuant d'avancer, mais moins rapidement. Il l'a reconnu cette silhouette, et il s'agit ni plus, ni moins, que de celle de Maralina Irohivrah, la Princesse Marchande. Combien de temps cela fait il qu'il ne l'a pas vu ? dix bonnes années, onze même. L'instant qu'il a partagé avec elle est resté gravé dans son esprit malgré tout ce temps. Il avait eu la chance de la prendre, et il serait mensonge que de dire qu'il n'avait pas apprécié le moment. Malheureusement, la lettre qu'il avait reçu plus tard l'avait douché. La belle, qui est toujours aussi exquise en la regardant, lui avait envoyé une belle lettre lui annonçant qu'elle portait son enfant. Le moment d’égarement qu'ils avaient eut été tout de suite devenu moins agréable.

Au début, Renaud avait voulu en savoir plus sur cet enfant, il avait envoyé des espions pour le renseigner sur ce garçon, puisque c'était un gars qui était né. Il en avait eu un peu, mais plusieurs hommes de l'ombre avaient disparu. Et puis la trace de Lukas avait disparu. Les années passants, et ne pouvant plus avoir de nouvelles, en plus de tous les tracas qu'il avait sur le dos avait enfuit cette information, mais il ne l'avait pas oublié. La personne qui accompagne Maralina est d'ailleurs un garçon qui semble avoir l'âge qu'aurait l'enfant, se peut il que ce soit lui ?

Renaud est maintenant tout proche, il ne peut pas esquiver la rencontre. Et d'ailleurs, elle ne l'a jamais embêté, respectant le "pacte" qu'ils avaient passé. Il lui doit aussi tout l'argent qu'elle a fournit à Erac, et qui a aidé à payer les sanctions qu'Aymeric avait mise sur son Duché, jusqu'à ce qu'il ne négocie la fin lors de l'invasion des gobelins. Le Duc n'a aucune idée de ce qu'elle pense de lui, et lui même n'a pas trop d'avis, en bien comme en mal. Une chose est certaine, c'est que le temps n'a pas eu d'emprise sur elle, sa beauté est toujours aussi envoutante. Heureusement qu'aujourd'hui, Louise s'est accaparée son cœur, sinon il aurait encore succombé à son charme, bien qu'il ait murit suffisamment pour ne plus se laisser aller à ses bas instincts. Il faut dire qu'elle l'avait aussi bien cherché, faisant comprendre qu'elle le désirait aussi.

Elle le salue mais il semble que quelque chose n'aille pas, et de ce qu'il sait, il est rarissime que Maralina laisse entrevoir une faille. Y a t il donc un soucis avec lui ? est il possible qu'elle ne soit pas contente de le revoir de son côté. Peu importe, l'occasion de lui demander se présentera peut-être de lui demander si elle à un soucis. Il s'incline à son tour aussi bien devant Maralina que le garçon qui l'accompagne.

"Bien le bonjour, Princesse, le plaisir est partagé. Les années se sont écoulées rapidement, c'est indéniable, mais elles n'ont eu aucune emprise sur vous, vous êtes toujours aussi ravissante que la première fois ou je vous ai vu."

Une entrée en matière tout à fait banale

"Mais dites moi, qu'est ce qui vous amène si loin de chez vous ? surtout en cette saison où le temps n'est pas le meilleur pour vous, qui êtes habitué à plus de chaleurs la ou la fraicheur est toujours présente en péninsule."

Pour sur qu'elle devait avoir froid en comparaison à Thaar, même s'il faisait beau en ce début de printemps.

Ravalant sa salive, la princesse de la chair releva la tête. Reprenant le contrôle d’elle. Ce n’était pas le moment de se laisser envahir par de tels doutes. Pas le moment de perdre la face devant le Duc ou quiconque en péninsule. Elle savait qui était le père de Lukas. Elle savait qui l’avait élever, qui avait été présent pour lui. Lukas avait eu deux hommes dans sa vie, mais ces deux personnages l’avaient éduqué, former pour devenir le dirigeant qu’il serait un jour. Tandis que Renaud, n’avait rien fait. Bon, il avait envoyé quelques espions, Maralina n’était pas sotte. Certains avaient évidemment disparu, mais la Princesse savait que d’autres avaient probablement passé au travers du filet qu’elle avait construit pour la protection de son fils. Enfin, si le Duc s’attendait à une réunion émouvante, il n’avait pas rencontré la bonne personne pour. Relevant la tête alors que ses mains se joignirent pour se déposer sur son bas-ventre, alors que la vaanie reprit l’air que les gens connaissaient tous : un demi-sourire, un regard espiègle, comme si elle participait au plus intéressant des jeux. « J’aimerais vous dire la même chose, mais cela serait un odieux mensonge. Par contre, je peux voir que vous êtes toujours aussi flatteur. » Ce n’était pas une insulte en soi, qu’une constatation. Si la Princesse n’avait pas changé, le Duc lui avait définitivement changé. Et qui aurait pu le blâmer ? C’était la nature des hommes après tout. Le temps était leur plus cruel ennemi et c’était peut-être pour cela que ces derniers étaient tout le temps à se disputer ou à prétendre être meilleur que les autres. Ils avaient tellement peu de temps pour prouver ce qu’ils valaient qu’utiliser le moindre stratagème semblait nécessaire…


Soudainement, un jeune garçon s’approcha de la princesse marchande avant de l’interpeller. « Maman ? » Demanda le jeune garçon dans la langue vaanie. Maralina porta son regard vers son fils, et la ressemblance la frappa de nouveau. Elle lui fit un léger sourire, reprenant contenance, avant de reporter son regard vers le Duc. « Votre Altesse, puis-je vous présenter mon fils aîné. Lukas. Lukas, voici son Altesse, Renaud d’Erac. » Lukas salua l’inconnu à la langecine, comme il l’avait appris. « Enchanté » Dit-il rapidement avant que sa mère l’incite à retourner à son exploration d’un sourire, mettant fin à la demande que sa progéniture était venue quérir. Le jeune homme ne se fit guère prier, et retourna à l’exploration des jardins. Elle lança un regard à l’un de ses gardes qui s’inclina avant de suivre le petit qui s’était déjà lancé à la découverte des richesses des jardins de la reine. Une fois que Lukas soit assez loin, la vaanie retourna son regard vers Renaud avant de reprendre la parole ; « En effet, c’est un voyage que j’aurais aimé ne pas avoir à faire pour être complétement honnête. Mais je suis venu réclamer justice pour le meurtre de mon mari. Chose qui semble être difficile à donner apparemment. » La Princesse se mit à marcher, contournant légèrement le Duc, laissant volontairement son parfum embaumé l’air alors qu’elle allait s’asseoir sur l’un des bancs. « Ou peut-être que le fait que la Princesse de la Chair choisisse de s’offrir à quelqu’un est difficile à comprendre. Vous pourriez me le dire, n’est-ce pas ? Vous qui avez si gentiment cédé à mes avances. » Maralina pencha légèrement la tête sur le côté, regardant le Duc avec un air moqueur, observant sa réaction. Sa langue frappa son palais, laissant s’échapper un son, alors qu’elle eut un air faussement triste ; « Mais, rumeur est que vous allez unir votre vie bientôt, vous aussi. » Elle espérait franchement pour lui que la mariée n’était pas réellement celle qu’elle pensait. Sinon ça serait quelque peu…. Inadéquat. Elle qui avait toujours pensé que le Duc tentait d’être un tant soit peu stratégique, à croire qu’elle s’était peut-être trompée dans l’évaluation qu’elle avait fait de ce dernier.  

Cinglante, c'est le mot qui vient en tête lorsque la Princesse Marchande assène un coup sur la tête du pauvre Duc. Il ne relève toutefois pas

"Il n'y a nulle flatterie à révéler la vérité, vous savez !"

Renaud à un sourire avenant, personne ne peut nier la beauté de Maralina. Peut-être que lors de leur première rencontre, s'il n'avait pas été tout jeune Duc, autant en âge qu'en ancienneté dans la fonction, qu'il n'avait pas eu une guerre sur les bras et des vassaux à faire rentrer dans le rang, avec le regard des autres pairs sur son dos, il l'aurait demandé en mariage. Elle lui aurait sans aucun doute rit au nez, du haut de sa puissance financière, résidente de Thaar qui n'avait rien à faire de la Péninsule si ce n'est lui soutirer son argent. Ou peut-être pas, s'il décidait de rester rêveur. Enfin, il n'a pas plus le temps que cela d'y réfléchir puisqu'elle lui présente l'enfant qui l'accompagne, et comme il le pensait, il s'agit bien de son ainé, donc du fils qu'elle lui a dit porter dans sa lettre. Renaud le regarde, voyant les yeux verts qu'il reconnait, comme un miroir aux siens. Bien entendu, il ne dit rien et se contente de le scruter gentiment, s'inclinant avec amusement

"Le plaisir est pour moi"

Il n'a guère le temps de continuer son inspection que déjà, Maralina le congédie, envoyant un garde derrière lui pour le surveiller

"Un beau garçon qui doit faire votre fierté, je n'en doute pas"

Il écoute le motif de la présence de Maralina en péninsule, mais il doit bien avouer qu'il ne comprends pas tout, n'ayant pas les éléments.

"Justice pour votre mari ? en péninsule ?"

Il n'était pas au courant qu'elle était mariée, il ne connaissait donc assurément pas le nom de celui qui avait eu la chance de l'avoir à ses côtés

"Est-ce donc un péninsulaire qui a tué ou précipité la mort de votre époux ? Vous m'en voyez navré, et pour ce que cela vaut à vos yeux, je vous présente mes sincères condoléances. En quoi est-ce difficile d'avoir justice ?"

Il est presque sincère dans ses mots. Ne connaissant pas le malheureux défunt, il ne peut le regretter, mais il sait que perdre un être cher n'est jamais une chose facile, et il ne le souhaite à personne, même pas à ses ennemis. Il s'agit donc plus d'une certaine empathie envers la semi-elfe qu'une réelle peine. Elle se met à marcher et son parfum embaume l'air pendant qu'elle s'assoit. Plus jeune, et moins expérimenté, il serait encore tombé sous son charme sans aucun doute, mais il sourit à tous les gestes calculés qu'elle prodigue avec tellement d'aisance. Il n'est pas difficile de penser qu'elle arrive très souvent à ses fins.

"Il n'y a aucune difficulté à croire que vous ayez trouvé une personne à aimer. Malgré tout ce que vous représenter, je ne doute pas qu'un cœur bat dans votre poitrine. Dès lors, l'amour peut frapper comme de tout un chacun. Je ne vois pas en quoi vous en serriez privé."

L'attitude de Maralina lui fait penser qu'elle lui en veut, et qu'elle cherche à le prendre en défaut. Provocatrice, mutine, triste, tout y passe dans ses expressions. Puis elle fait allusion à son mariage prochain. Renaud rayonne alors, un sourire aux lèvres ne mentant pas sur ses sentiments à l'égard de sa future compagne

"La rumeur dit vrai, dans quelques jours, je serais marié à Louise de Fernel, une rencontre étrange qui fera, je n'en doute pas, mon bonheur, car pour une fois il s'agit d'un mariage d'amour, et non politique, bien que les deux peuvent se marier se combiner également."

Le prestige que Louise avait acquis en devenant ambassadrice royale était notable, avec un rayonnement possible à la cours de sa Majesté, ce qui n'était pas à négliger, même si Louise n'était pas de celles à en profiter.

« En effet, je ne pourrais être plus fier. Lukas grandit vite, beaucoup plus que je l’aurais espéré. Mais il sera un fier dirigeant quand le temps viendra. » Elle ne saurait dire si cela serait du Langehack ou de l’Ithri’Vaan, mais il aurait définitivement un rôle bien important à jouer. Cependant, le sourire du Duc, lui fit rapidement perdre son sourire. « Ne vous faites pas d’idée… » Dit-elle tout simplement, alors que son regard sembla s’obscurcirent. Une phrase qui avait plusieurs sens en soit. Ne pensez pas qu’il est le vôtre… Ne pensez pas que vous aurez quoi que ce soit à faire avec lui. C’était son fils, à elle. La chair de sa chair pour laquelle elle avait travaillé si fort ces dernières années pour lui donner une vie. Pour lui donner le monde si elle pouvait. Quant à la difficulté de croire que Maralina était marié, la vaanie n’avait qu’un commentaire à faire ; « Parce que contrairement à vous, le conseil de régence, semble trouver cela inadmissible qu’une vaanie ne marie un péninsulaire. Mais ne vous inquiétez pas, mes motifs ne vous concernent guère, et je ne voudrais pas ruiner votre humeur quelques jours avant votre mariage avec des idées de deuil. » Oh, elle se retint de dire quoique se soit d’autres. Disons, qu’elle n’avait pas réellement envie de discuter de l’homme qu’elle aimait avec celui qui mariait la dame qui l’avait condamnée. Néanmoins, la confirmation qu’elle entendit arriva rapidement. Un goût de cendre sembla de prendre possession de sa bouche, alors que la Princesse de la Chair se crispa.



« Louise de Fernel… » Répéta-t-elle de nouveau, alors que la confirmation s’ancrait dans son esprit.



Elle eut l’impression d’avoir reçu une douche d’eau glacée, et pour être honnête son expression révéla ce qu’elle pensait. Son regard sembla s’obscurcirent alors que son expression devenait glaciale. C’était pathétique… Tellement pathétique… « L’amie des nains… Celle qui a enquêté sur Griffon de Langehack… » Renaud venait réellement de prouver qui il était réellement… Un sot… Où était passé l’homme qu’elle avait rencontré voilà onze ans? L’homme qui semblait un tant soit peu ambitieux ? Apparemment, elle s’était trompée de personne… Quel gâchis. « C’est le mieux que vous pouviez faire ? » Elle aurait peut-être dû faire une grimace dégoûtée, mais en réalité elle était trop en colère pour jouer de ses expressions. « La supposée enquête qu’elle a fait était au mieux médiocre. Parfois, je m’étonne que j’aie pu faire mieux qu’elle, alors que j’étais des milliers de kilomètres de distance. Pathétique. » Maralina se releva, faisant face au Duc. « Condamner Griffon de Langehack à mort alors qu’il était victime d’un coup. J’espère qu’elle aura au moins l’humilité de reconnaître son incompétence et se cacher derrière son supposé titre de duchesse. Elle qui a envoyé mon mari à la mort. » C’était franchement impressionnant la stupidité qui régnait en péninsule. Eux, qui se cachaient derrière leur Damedieu alors que l’idiotie prônait. Ils pouvaient tous cracher sur les vaanis comme ils voulaient, au moins, en Ithri’Vaan, l’intelligence prônait. Pour réussir, on devait contrôler, planifier sinon l’on tombait comme l’animal le plus niais devant ses prédateurs. « J’espère qu’elle sait sa place. Elle a attiré l’attention des mauvaises personnes et ces personnes ne jouent pas au jeu, elles créent les règles… Souhaitez-lui bonne chance de ma part. J’observerais la situation avec attention. » Ses mots n’avaient été aucunement chaleureux. Après tout, la dame de Fernel avait attiré l’attention de la mauvaise personne. Si elle n’était pas la première cible de la princesse de la chair, elle était définitivement une des personnes responsables de la chute du Marquis. Si elle avait mieux enquêté, elle l’aurait su, mais maintenant, elle venait de créer une guerre de succession, et Maralina dominait ce jeu. Se retournant vers son fils, elle lui fit un signe de la main, lui signifiant qu’ils partaient.

Alors que la conversation est cordiale, faussement ou pas, elle prend soudain un tournant inattendue que Renaud ne comprends pas tout de suite. Le "Ne vous faites pas d'idée" lance les hostilités, alors qu'il se demande la raison de ses mots, pourquoi est ce qu'il ne devait pas se faire d'idée ? d'idée sur quoi ? c'est elle même qui lui a écrit qu'il était son fils et même si les yeux verts ne sont pas rare, quelqu'un qui aurait connaissance de leur parenté verrait des signes de ressemblance. Maralina continue de parler et chaque mot qu'elle prononce complique les réflexions du Duc. Il finit donc par comprendre qu'elle était mariée à un péninsulaire, ce qui le surprend grandement, puis il croit comprendre qu'il s'agissait du Marquis de Langehack, Griffon, et la la surprise s'affiche clairement sur son visage. Il imagine dorénavant pleinement le scepticisme du Conseil de Régence.

C'est maintenant une furie qu'il a devant lui, et même s'il ne peut clairement pas dire qu'il la connait, ne l'ayant vu qu'à une seule reprise, et malgré leur ébat amoureux, il a toujours entendu d'elle que c'est une manipulatrice qui ne perd jamais son calme. Ce n'est clairement pas le cas ici, alors qu'elle se déchaine, et la personne de son courroux n'est autre que sa future épouse. Renaud est des plus déçu, maintenant que toutes les pièces du puzzle s'assemblent dans sa tête. Lui même, bien que paranoïaque, reste imperturbable autant qu'il le peut quand il n'est pas seul, mais il ne peut pas laisser dire cela contre Louise, pas devant lui, et pas d'aussi ridicules accusations. Il sort donc lui aussi les crocs

"Vous étiez marié à Griffon de Langehack ? avait-il aussi peu d'estime pour vous, ou avait-il honte ? qu'un Marquis, pair du Royaume, se marie en catimini et en secret ? je comprends mieux la réserve du Conseil."

Il fait un pas vers Maralina

"Quand à vos mots à l'encontre de ma future épouse, permettez moi de vous dire ceci. Vous vous vantez  d'être si forte en enquête, permettez moi d'en douter si vous en savez si peu sur Louise de Fernel. Elle n'a servit que de pion pour le Conseil en raison de son titre d'ami des nains pour avoir une entrevue avec le Roi du Zagazorn, et d'enquête il n'y a pas eu. Jamais ils ne lui ont donné la latitude d'en faire une, elle n'a servie que de scribe pour recueillir les déclarations des gens présents. Elle même était dégoutée de la manière dont elle a été manipulé, mais si vous connaissez la péninsule aussi bien que vous semblez le penser, alors vous devez savoir comment cela fonctionne non ?" il fait encore un pas en avant "Louise responsable de la condamnation de Griffon, vous ne venez pas chercher justice, mais juste vengeance, alors permettez moi de vous donner un conseil. Si vous voulez justice, ne laissez pas votre soif de vengeance vous aveugler, et ne vous éparpillez pas à chasser les gens qui ne sont en rien dans sa condamnation, restez focalisée sur ceux qui ont mit en place les engrenages ayant conduit à sa mort"

Le regard de Renaud pourrait foudroyer sur place s'il avait de la magie en lui, la fureur y est présente alors qu'on menace devant lui, un Pair du Royaume, son épouse, qui n'a absolument rien fait. Une colère froide inspirant de la méfiance .

"Savez vous qu'elle a faillit y perdre la vie d'avoir utilisé son titre d'ami des nains pour éviter rien de moins qu'une guerre ?"

Il reste un dernier argument qu'il a gardé pour lui jusque la, n'en ayant parlé à personne

"Saviez vous donc que votre mari était mon cousin ? et que s'il était à la tête du Marquisat, c'était en grande parti grâce à moi ? et vous pensez que sa mort me fait plaisir ? les régents et le Conseil ont la mauvaise habitude de mettre bien souvent leur nez dans les affaires des Pairs, et de les écarter un peu trop à mon gout. Je suis heureux que le Roy prenne la suite, et j'espère qu'il aura plus de bon sens, doublé d'une inspiration divine pour diriger son Royaume."

C'est la première fois qu'il parle à l'encontre du Conseil de Régence, qui n'a pas tous les tords. Cela avait débuté avec Roderick de Wenden et Tibéria de Soltariel, mais ils ont continué sur la même ligne, se moquant des titres, aussi prestigieux soient-ils. Renaud avait été dégouté d'ailleurs que son cousin soit livré en pâture, alors que le premier coup avait été porté par les nains. Et même s'il était content qu'une guerre ne soit pas déclarée, il déplore la manière dont tout cela s'est passé, sans aucune consultation.

"Vous feriez peut être aussi bien de chercher des alliés, plutôt que de vous faire des ennemis, ou d'en voir la ou il n'y en a pas."

Maralina éclata de rire alors qu’elle entendit la première réplique du Duc. Et l’on ne pouvait pas dire que ce fut un rire particulièrement contagieux. Était-ce réellement tout ce qu’il avait ? Le pauvre. Il n’avait véritablement aucune chance si la discussion se continuait… Ça en était presque pathétique. « Je ne crois pas que vous êtes en position de critiquer les choix de mon époux. » Elle s’avança d’un pas, plongeant son regard dans le sien. « Après tout, VOUS êtes la personne qui n’a pas reconnu son fils aîné venant de la même Princesse Marchande. » Elle eut un rictus moqueur. « On se demande bien pourquoi. Vous pouvez parler comme vous voulez Renaud, vous êtes loin d’être la meilleure personne pour me faire la leçon. Je vais vous donner un conseil. Lorsque vous tentez de détruire un adversaire, soyez rapide et surtout meilleur. » La Princesse redressa de nouveau la tête, son expression soudainement bien sérieuse avant de continuer ; « Je n’ai guère besoin d’en savoir plus sur Louise de Fernel. Elle a déjà prouvé qu’elle n’était qu’un pion. Un pion inutile. Alors si elle le savait, pourquoi ne s’est-elle pas relevée pour dire qu’il y avait un problème? Qui lui manquait des informations? Est-elle si prône à se satisfaire dans la médiocrité qu’elle s’est contenté d’une enquête bâclée? » Maralina secoua légèrement la tête, « Ruiner ainsi la vie d’un pair. » Maralina eut une grimace de dégoût, avant de regarder le Duc de la tête au pied. « J’ose espérer qu’elle saura mieux faire avec vous. Cela serait dommage de faire une nouvelle fois une erreur aussi stupide. » C’était assez clair, que les mots du Duc ne fonctionnaient pas. Cherchait-il réellement à récolter une quelconque pitié de la part de la Princesse de la Chair? On parlait de Maralina Irohivrah, pas de la plus douce des nobles péninsulaire. Elle avait détruit des gens pour des erreurs encore plus minimes que celles qu’avaient commit Louise. « Tous les jours, nous avons des décisions à prendre. Et notre vie, elle-même est une réflection de ce que nous avons fait. Si elle voulait un résultat différent, c’était à elle de prendre des décisions différentes. Faire semblant d’être innocent prend beaucoup trop de temps… Seuls les résultats comptent, et malheureusement, l’on ne peut éviter les conséquences de ces dernières. Maintenant, qu’elle vive avec ce qu’elle a décidé de faire. Je n’ai aucun respect pour les gens qui se complaisent dans la médiocrité sans faire un quelconque effort pour remonter à la surface. »



Bien entendu, l'attitude du Duc ne l’effrayait guère, il pouvait bien lui lancer le regard le plus colérique qui soit, rien ne pourrait réellement calmer la Princesse de la Chair. « Vous ne m'apprenez rien Renaud. Cela fait onze ans qu’il est dans ma vie. Onze longues années à être à ses côtés, à attendre mon moment… J’ai attendu plus de onze ans d’avoir mon mari à mes côtés. Je l’ai laissé tranquille et l’ai aidé dans son ambition. Tout comme vous l’avez fait. » Griffon lui avait mentionné plusieurs fois que son cousin l’avait aidé, et si elle lui en était reconnaissante d’avoir appuyé l’ambition de son mari, cela ne changeait pas réellement la fureur qui grondait en elle. « Bien sûr que je cherche une vengeance ! Vous croyez que je laisserais Prudence de Langehack respirer alors qu’elle est responsable de la mort de son père ? Que je laisserais ces incapables diriger un royaume pour leur bien personnel ? Tout le monde sait ce que les nains voulaient, et ils leur ont donné sans problème sur un plateau d’argent. Ruinant votre autorité, mais aussi en vous laissant un message assez clair sur ce qui vous attend. J’ose espérer que vous saurez au moins vous protéger contre cela. » Après tout, les nains avaient besoin des péninsulaires. Pourquoi tenteraient-ils de faire autant de rapprochement avec eux si ce n’était pas le cas ? Semblant soudainement s’être calmé, le regard rageur de la Vaanie se planta à nouveau dans celui de Renaud avant de conclure ; « J’ai tout ce que j’ai besoin, Renaud. Je n’ai jamais été très patiente, et je vais m’assurer que la Marquise paie pour ce qu’elle a commis. » Oh oui, elle allait s’occuper de Prudence de Langehack. D’une façon ou d’une autre, cette dernière tomberait. La seule chose qui lui restait à faire était de courir. Ne lui laissant le temps de réagir , la Princesse Marchande se retourna, avant de partir avec son fils. Elle n’avait plus rien à dire au Duc, et cette conversation n’irait nulle part.

Si le rire de Maralina n'est pas contagieux, Renaud n'a, de toute façon, pas envie de rire. Il écoute, et les mots que prononcent la Princesse Marchande sont décousue de logique. Elle passe d'une idée à une autre, crachant son venin sur tout et n'importe quoi, reprochant des choses dont elle avait été elle même l'instigatrice. Il apparait clair que son désir de vengeance l'aveugle, comme le Duc l'a dit juste avant, et qu'elle mélange tout. Cela l'attriste, même s'il ne le montre pas, sa colère toujours bien présente. Que vient donc faire son fils et le choix qu'ils ont fait "ensemble" dans cette conversation ? Elle a donc tant de ressentie que cela ?

"Ai je dis à un moment que j'étais meilleur que les autres ? vous en savez si peu sur moi Maralina, ho oui si peu. Vous me parlez de mon fils aussi longtemps après ? Vous saviez très bien quelle était ma situation à l'époque et que mes mains étaient liées, c'est même vous qui aviez déjà en main une proposition avant même de savoir ce que j'allais faire, car vous saviez que je ne POUVAIS pas le reconnaitre, même si je l'avais désiré ardemment. Dans le cas contraire, je vous aurais sans doute demandé en mariage, mais qu'en aviez vous à faire de moi à part me rire au nez ? je n'ai été qu'un simple pion sur votre échiquier. Mais j'ai appris et grandis, vieillis si vous voulez, et la situation n'est absolument plus la même aujourd'hui"

Tout juste Duc, fougueux et n'ayant pas encore pris la juste mesure de son titre à l'époque, mais avec un Duché à remettre dans le droit chemin, et ses trois vassaux rebelles, il n'avait absolument aucune marge de manœuvre à cette époque. Son propre mariage avec Neyrelles a été forcé par Aymeric, l'obligeant à l'accepter s'il désirait récupérer la suzeraineté sur Hautval et Ancenis, sans parler des sanctions qui ont frappé, heureusement très courte grâce à l'invasion des gobelins. Il n'était alors Duc que par le titre, et rien d'autre, avec tout à prouver et à faire, avec juste le prestige lié à son nom comme prétention à diriger Erac. Aymeric et Neyrelles mortes, et maintenant bien implanté à Erac, reconnu et même avec la plus grande ancienneté au titre de pair, tout est différent, et la puissance d'Erac a retrouvé son unité.

"Ne me parlez pas de justice, alors, si vous êtes d'accord sur le fait qu'il ne s'agit que de vengeance. Mais encore une fois, ne vous laissez pas aveugler par ce que vous semblez savoir. Bien sur que Louise n'a été qu'un pion dans cette histoire, et vous savez parfaitement qu'à part les plus puissants, ce qui n'était absolument pas le cas de Louise, l'on est tous le pion de quelqu'un, non ? vous qui manœuvrez tellement de pions à votre profit, plus que quiconque vous le savez. Elle a fait ce qu'on lui a demandé, et elle n'a eut aucune latitude à prendre une décision, mais de toute façon vous vous en moquez puisque vous avez déjà fait vos choix."

Puis vient les accusations à l'encontre de Prudence, la fille de Griffon, et de nouveau elle le perd. Et les nains qui apparaissent, et le souvenir de Renaud lorsque Louise lui a raconté ce qu'il s'était passé quand la Couronne l'avait emmené pour recueillir les mots de ceux qui étaient présents lors des évènements survenus à Langehack. Lui même avait essayé de tisser des liens avec les nains, et il s'était heurté à Harald, et il avait été déçu, encore plus après le récit de Louise. tout cela couplé à ce qui était arrivé suite à l'incident de Langehack avait alors changé les pensées du Duc d'Erac

"Je ne suis pas né de la dernière pluie, les nains ne s’intéressent qu'à notre argent, et rien d'autre. Ils restent enfermés chez eux, refusant même que l'on vienne fouler leurs terres, et ne partageant absolument rien avec les autres races tout en cherchant à récupérer tout ce qu'ils peuvent. Ils restent un énigme tout de même, mais je ferais tout pour me protéger, sachez le"

Louise a invité le roi des nains à son mariage et bien qu'il se méfie grandement d'eux depuis ce qu'il s'est passé au Marquisat, il a bien du mal à les cerner.

"Pourquoi dites vous que Prudence à fait tuer son père ? expliquez moi donc cela !"

Il réfléchit en même temps qu'il parle et écoute, et une phrase le perturbe. Maralina dit que cela fait onze ans qu'elle attend d'être aux côtés de Griffon, et cela fait onze ans également qu'ils ont fait l'amour ensemble. Un doute s'instille soudain dans son esprit

"Onze ans que vous attendez d'être aux cotés de mon cousin ? j'ai bien entendu ? et Lukas en a dix, quelles déductions dois-je en faire ?"

Il est déstabilisé par ce qu'il vient d'entendre, il doit bien l'admettre, et bien que n'ayant lâché du regard la Princesse à aucun moment, celui qu'il lui lance est plein de questions et de défis mélangés

Maralina s’arrêta un moment avant de se retourner, haussant même un sourcil, se demandant s'il était sérieux. Doutait-il réellement de la paternité de son fils ? Puis, ne pouvant se contenir plus, un sourire amusé vint orner ses lèvres. « Qu’en plus d’être illogique. Vous êtes aveugle… » Répondit-elle tout simplement. Il n’y avait besoin que de poser un seul regard sur ce dernier pour le voir. La ressemblance l’avait, à son grand regret, frappé. La même moue, le même regard émeraude. Elle qui s’était convaincue toutes ces années, elle avait eu un dur retour à la réalité. Une réalité qu’elle avait elle-même crée. « Et que votre cousin a été une meilleure figure paternelle pour votre fils que vous. » Maralina secoua doucement la tête pendant une seconde, se disant que c’était la conversation la plus surréaliste qu’elle avait eu. Elle ne le connaissait pas ? Oui définitivement et à l’entendre, il venait de lui donner une bonne raison. « Et puisque vous semblez savoir ce que je fais de mes pions, alors vous devez savoir que je ne laisserais pas mon fils sans surveillance. » Maralina s’approcha de nouveau de Renaud, plantant son regard azurée dans le sien. « Attendez assez longtemps, et un jour les craques commencent à apparaître sur les murs… Portez attention, Renaud. Peut-être qu’un jour, vous l’aurez du premier coup… » Maralina fit un pas de reculons, s’apprêtant à partir, mais leva le doigt comme si elle venait de se rappeler de quelque chose ; « Quant à la faveur que vous me devez. Oubliez qu’il est votre fils. Cela nous évitera de nous adresser à nouveau la parole. » Sans attendre plus longtemps, la Princesse se retourna pour partir. Cette discussion était terminée, et elle en avait assez de la sottise de son pion.