Le dragon & le rokvenha [Caleb]

Oglicos, Veme ennéade de Favriüs, An XX, Cycle XI
Palais Irohivrah, Les soieries, Thaar, Ithri’Vaan

Thaar. La Princesse Marchande aurait dû être excitée de revoir sa ville natale, et pourtant… Un goût de cendre lui était venu à la bouche lorsqu’elle avait vu le dôme du joyau. Lui rappelant un pouvoir qui n’était pas sien. Lui rappelant que ses plans étaient loin d’être terminés. Si on la décrivait comme l’une des plus puissantes figures de la principauté, cela ne voulait pas dire qu’elle n’accumulait pas les échecs. D’ailleurs, son dernier coup avait été loin d’être un succès et la péninsule venait de se faire un ennemis des plus brutaux. Des cibles s’étaient rajoutées pendant ce long voyage, mais un plan avait mûri. Un plan qui ferait définitivement plus d’éclat que la première entente qu’elle leur avait proposée. Mais le Roy et son contingent de sous-fifres avaient choisi une autre voix. À eux d’accepter les conséquences de leurs actions.


La princesse ne perdit pas son temps, se frayant rapidement un chemin à travers tard avec ses miliciens pour son fils, avant de rejoindre son palais Thaari. Une maisonnette comparativement à celui d’Uldal’Rhiz, mais cela ne changeait guère que c’était la maison. Elle arrêta son étalon au bas des marches qui menaient à son imposante demeure alors que son second l’attendait, l’air étrangement nerveux. Il se racla la gorge avant de replacer le foulard qui ornait son cou, comme si la pièce de tissus s’était soudainement mis à se resserrer alors que ses yeux se posèrent sur la reine de la chair. « Votre Majesté. » Commença-t-il avant de s’incliner bien bas, alors que la Thaarie mettait pied à terre. Elle jeta les rennes au palefrenier avant de se mettre à marcher vers sa demeure, suivit de près par son fils aîné. Maralina ne répondit rien, se contentant de faire son chemin en enlevant ses gants d’équitation. Son expression n’aurait guère pu être plus glaciale, ce qui n’aida certainement pas la nervosité de l’elfe qui mit de nouveau son doigt entre son foulard et son cou, ayant l’impression qu’une bouffée de chaleur venait de l’atteindre. Khaled se racla de nouveau la gorge avant de reprendre la parole ;


« Comment s’est passé votre rencontre avec le conseil du Roy? »


Comme réponse, il n’eut qu’un seul regard et il se tut rapidement. Inutile d’aller plus loin, cela ne s’était pas bien passé. Chose qu’ils s’attendaient tous les deux, mais la Princesse Marchande n’était définitivement pas douée à accepter les échecs et il ne savait que trop bien que cela annonçait un plan encore plus sombre. Encore plus déviant. La route facile n’avait pas marché ? La prochaine étape serait loin d’être une partie de plaisir, autant pour lui que pour la cible de Maralina.


« Quelles sont les nouvelles importantes ? »


Khaled avala difficilement sa salive avant de suivre prestement sa maîtresse dans les escaliers.


« Pour le moment, tout va bien. Le conseil des comices se tient tranquille, mais dans les prochaines ennéades, ils devront certainement élire un nouveau Prince Marchand. Sinon, nous avons reçu votre message d’Arétria, et nous avons envoyé notre réseau pour commencer à prendre ce que vous avez négocier. Les rénovations du Colisée d’Uldal’Rhiz seront fait à temps, et nous pourrons certainement commencer à organiser les jeux pour la ville. J’ai déjà contacté Maisara pour l’organisation, elle a déjà quelques gladiateurs en tête. Ah! Et nous avons attrapé le Rokvenha! »


La Princesse Marchande haussa un sourcil en attendant la dernière partie, ce qui convint son second de lui donner une explication supplémentaire, de peur que cette dernière avait oublié les troubles qui avaient secoué ses établissements. Enfin, un trouble…


« Vous savez, le capitaine pirate qui n’arrêtait pas de s’en prendre à vos filles ? Il en a encore tabassé deux le mois dernier, et nous avons réussi à mettre la main au collet. Il est dans les geôles en ce moment, on l’exécutera tout à l’heure si…. »
« Cela ne sera pas nécessaire. Je m’en occuperais personnellement. » Le coupa-t-elle, toujours sans lui accorder un regard.


Khaled s’arrêta net, regardant la Princesse qui entra dans son palais sans même lui jeter un coup d’œil. Décidément, elle était réellement de mauvaise humeur, il ne voudrait pas être la prochaine victime qui passerait devant elle…

***

Cela faisait plusieurs jours qu’il était prisonnier, enfin, c’est ce qu’on lui avait fait croire. Ses mains avaient été liées à l’aide de chaîne. La pièce dans laquelle il se tenait était sale, sombre, qu’un mince filet de lumière venant de la porte s’infiltrait dans sa prison de pierre. On lui avait apporté qu’un morceau de pain depuis quelques jours, semblant volontairement vouloir le punir pour les innombrables crimes qu’ils avaient commis. Enfin, ceux qui avaient réellement une importance pour son tortionnaire. Soudainement, des bruits de clés dans la serrure se firent entendre, avant que trois miliciens entrent dans la pièce. L’un d’eux, le plus baraqué de la bande, vint rapidement donner un violent coup de poing au ventre du prisonnier déjà amoché. L’un mit rapidement un sac sur sa tête, l’empêchant de voir quoi que ce soit, alors que deux autres l’encadrèrent avant de le soulever. Le trajet dura bien quelques minutes, avant que le prisonnier ne se fasse agenouiller de nouveau au sol. Le cliquetis de ses chaînes résonnant dans la pièce, alors qu’on l’entravait de nouveau. Cette fois, il ne pourrait guère se relever. Ses entraves ayant trouvé un point fixe au sol. Il put entendre les pas des miliciens s’éloigner de lui, alors qu’un autre lui enleva rapidement son sac, puis il alla rejoindre ses acolytes près du mur.


« Je dois dire que je m’attendais à autre chose… Mais je suis déçue. »


Elle lui laissa le temps de s’habituer à la noirceur des lieux, attendant que son regard ne joigne le sien. Assise devant lui, les jambes croisées, dénudées malgré la soie qui devrait les recouvrir, la Princesse d’Uldal’Rhiz regardait d’un air las le pirate qui lui faisait face. Sa tenue était un étrange contraste avec l’ambiance de ses geôles. Sa robe de soie bleutée mettait ses courbes en valeur tandis que les deux bijoux qui ornaient ses tempes auraient pu nourrir le capitaine et son équipage pendant de nombreuses ennéades. Ses deux mains se posèrent sur le banc de pierre, faisant cliqueter les nombreux bracelets dorés qui ornaient ses poignets, alors qu’elle s’avança un peu vers l’avant. Son regard bleuté planté dans celui de son prisonnier. « Une autre preuve que les rumeurs sont souvent que de vains mensonges. » La Princesse fit un rapide signe de tête à ses gardes, qui s’approcha rapidement du prisonnier afin de lui assener un violent coup de poing au visage.


Puis un autre.

Et un autre.


Ce fut qu’au bout d’une minute que la Princesse Marchande laissa s’échapper un claquement de langue, que le milicien arrêta les coups, avant de retourner à sa place dans l’un des coins de la pièce. Ce dernier essuya ses gants maintenant tâchés du sang de sa victime alors que Maralina s’étira comme si elle venait d’assister à la scène la plus banale au monde. Ensuite, elle décida finalement de s’approcher de son pas félin vers le Rokvenha. Elle l’observa un moment, remarquant sa lèvre fendue, et le sang qui commençait à perler sur son visage. D’un mouvement presque gracile, elle posa son doigt sous son menton, le forçant à remonter son regard dans le sien. Il était évident qu’elle prenait un malin plaisir à le voir ainsi. Après tout, ce dernier avait mis plusieurs de ses filles hors service et il fallait dire qu’elle n’était pas de la meilleure humeur en ce moment. Le voir souffrir était un plaisir pervers, lui rappelant qu’elle sorte de pouvoir elle avait, et ce qu’elle pouvait faire à ceux qui osaient lui tenir tête. Dommage que ce n’était pas Prudence de Langehack devant elle, mais bon, le moment arrivera bien assez vite.


« Comment on se sent quand les rôles sont inversés ? » Dit-elle avec un sourire amusé.

Comme le temps s’écoule lentement quand on se retrouve privé de liberté. Caleb ne le savait que trop bien. Le Mecan chérissait au plus haut point sa liberté et, ironiquement, il avait passé un certain temps dans ces cachots froids et sombres à voir le temps filer et sa liberté lui échapper.
Cette fois-ci n’était guère différente des précédentes. Pieds et mains liées par de lourdes chaînes rouillées, il se tenait au centre d’une pièce sombre et humide de laquelle aucune lumière ne filtrait. Pour seul repas, du pain rassis qui ne donnait pas plus envie aux mouettes des côtes.

Il ne saurait dire combien de temps il avait passé là, mais il savait que cela ne durerait pas éternellement. Il avait osé défier quelqu’un qui n’aimait pas l’être et qui ne faisait guère de cadeaux à ceux qui se dressaient sur son chemin. Maintenant ce n’était qu’une question de temps avant d’être fixé sur son sort, même si la mise à mort lui semblait peu probable, elle n’était pas impossible pour autant, pour peu que l’offensé soit de mauvaise humeur.

Enfin, brisant alors le lourd silence dans un cliquetis bruyant, la porte s’ouvrit lourdement, mais lentement. Caleb releva la tête vers les hommes qui entrèrent rapidement pour l’encercler. Il ne leur offrit aucune résistance, et encaissa les coups dans des râles de douleurs, s’étouffant presque. Quand on lui mit le sac sur la tête il se laissa encore faire, après tout, il avait été dans le noir un long moment, quelques minutes, heures de plus, ne le dérangeait pas.

Il sentit qu’on le porta à moitié, ses pieds trainant alors sur le sol, il s’efforça de marcher un peu pour suivre la cadence difficilement, puis il arriva à sa destination. On le força à s’agenouiller et on l’attacha de nouveau à de lourdes chaînes. Etrangement, il laissa échapper un bref rire durant ce temps, sans réellement poursuivre. Puis tout à coup, on lui retira la capuche. Il plissa les sourcils et cligna plusieurs fois des yeux comme pour s’habituer à cette obscurité et ne pu d’abord remarquer qui se tenait devant lui à cet instant, mais la voix douce et délicate le ramena à lui.
C’était elle, la Lamia Noyée, cette femme qui ne fallait pas approcher sous peine de s’y perdre. Il ne la connaissait pas personnellement, mais il avait entendu de nombreux racontars sur elle et quand elle signala sa déception à l’égard du mecan ce dernier se mit à nouveau à rire.

« Navré… de vous décevoir… » Les quelques mots lui paraissaient telle une souffrance, tant il était faible à cet instant, mais il ne pouvait réprimer son sourire narquois et moqueur aux coins de ses lèvres.

Il planta alors son regard dans celui de la Vaani quand elle s’approcha et n’eut pas le temps de répondre que les coups plurent lourdement sur lui. Il ne pu résister ni se protéger et ne fit qu’encaisser chacun des coups à tour de rôle. Il cracha du sang, le temps de brièvement reprendre son souffle que tout reprit aussitôt avant de finalement s’arrêter à la demande de la Princesse.

Caleb était dans un sale état, le visage tuméfié, l’arcade et les lèvres ouvertes, le sang coulait le long son visage et venait s’engouffrer aux coins de sa bouche. Etrangement, porté par la douleur et la peur, il s’efforça de ne rien laisser paraître, peut-être pensa-t-il que c’était la solution, quoi qu’il en soit, il fallait être un fin observateur pour s’imaginer savoir ce qu’il éprouvait à cet instant. Lui-même ne saurait le décrire, il s’agissait d’un subtil mélange de peur, de douleur et d’excitation, tout ceci lui donnait un semblant d’adrénaline qui lui permet de rester conscient et même de rétorquer à la Vaanir qui lui faisait face et qui observait la scène avec délectation.

« L’violence… par l’… l’… violence … héhé… » Il toussa bruyamment et laissa sortir un lourd crachat duquel était mélangé à la salive une bonne quantité de sang, il le déposa non loin des pieds de Maralina. Il s’efforça de reprendre, relevant la tête vers la femme. « … Vous avez tout faux… » Il chercha alors sa respiration pendant un moment, les coups avaient probablement déplacées ou cassées plusieurs choses en lui. « … Je vous pensez plus… intelligente que ça… KOF KOF ! … J’vous aide… Qu’on finisse rapid’ment… »

Caleb était-il en train d’essayer de tromper sa tortionnaire ou simplement de faire aveu de sa faiblesse ne pouvant pas supporter davantage les coups et la prison ? Quoi qu’il en soit, il fixa Maralina sans sourciller, plantant ses yeux clairs dans ceux de la sang-mêlé et son visage abîmé n’était plus marqué de son rictus moqueur.

Ce qu’elle aimait cette vision. Un homme à ses pieds, encaissant la moindre torture, se pliant à sa volonté. Elle en éprouvait un plaisir des plus particulier et se demanda un moment, si Athanase de Cley aurait la même attitude lorsqu’il se retrouverait dans cette position. La Vaanie eut un sourire amusé, presque cruelle lorsqu’elle entendit la dernière réplique du Mecan. « Mais c’est qu’il a du culot celui-là. » Elle lâcha le menton du pirate en l’observant, non sans éclater de rire. Un rire cristallin, presque innocent. Les gardes, quant à eux, ne bougèrent pas. Leur regard fixé sur le pirate, comme s’ils craignaient que ce dernier ne tente quoi que ce soit. Maralina reprit finalement son calme avant de lui lancer un léger sourire amusé, reprenant ensuite la parole ; « Tant mieux. Ils sont encore plus amusant à briser. » Maralina le regarda un moment de la tête au pied, analysant la moindre parcelle de la créature qui lui faisait face, puis elle commença à marcher de son pas félin. Ses mains se joignant dans son dos, alors qu’elle tournait autour de son prisonnier, continuant son observation. « Insulter mon intelligence, alors qu’on ne fait preuve d’aucune en attaquant mes filles. Combien en as-tu amoché ? » Elle prit une pause alors qu’elle se retrouvait dans son dos, avant de s’avancer vers ce dernier, se penchant doucement vers ce dernier. Elle laissa son parfum embaumé l’air avant de poser délicatement ses mains sur ses épaules, joueuse. Avant qu’elle ne se mette à murmurer à son oreille « Deux de trop… » Maralina laissa son souffle glisser sur son cou, aguicheuse, joueuse comme la plus parfaite des amantes. Puis au bout de quelques secondes, elle se recula avant de reprendre sa marche, avant de rejoindre son siège, s’assoyant devant ce dernier. Elle croisa de nouveau ses jambes, replaçant la soie de sa robe, comme si une poussière avait altéré la douceur de cette dernière.



L’air nonchalante, la Princesse reprit finalement la parole. « Ces deux dernières années, j’ai eu une collaboration avec les Seigneurs Mecan des plus fructueuses. J’avais un problème, ils s'occupaient des navires de mes ennemis, je les payais. Cette notion de service et de généreux paiement a fonctionné sans entache depuis deux ans. Cela serait malheureux qu’une seule personne ne vienne briser cette entente, ô combien fructueuse. » Il devait certainement être au courant pour le marché qu’elle et Marzaban avait passé avec un représentant des seigneurs pirates. Après tout, les deux Princes leur avaient laissé mains-libre pour exercer une vengeance et en plus, ils les avaient même payés pour. Depuis, de nombreux navires Yssois avaient été coulés, affaiblissant considérablement le pouvoir de la treizième. Ce qui avait définitivement amusé la Princesse d’Uldal’Rhiz. Peut-être qu’elle prendrait une pause du Langehack pour s’occuper de la Princesse d’Ys… « Je suis sûr que je pourrais te tuer. Après tout une vie contre une vie non? Et tu as pris celle de deux des miennes. » Bon, elles n’étaient pas mortes, mais considérablement amochées. Les blessures des deux jeunes femmes n’étaient pas très jolies à voir et les cicatrices qu’elle causerait n’aiderais en rien leur retour au travail. C’était une perte de revenu considérable minime. Mais si la Princesse le laissait faire sans le punir, d’autres ferait la même chose et bientôt elle perdrait le contrôle, ce qui était hors de question. « Mais je me sens d’humeur généreuse ce soir. » L’un des gardes lança un discret regard vers la Princesse, avant de retourner ce dernier vers le prisonnier. Par chance pour lui, Maralina était totalement absorbé par son nouveau jouet. « Je pourrais te forcer à l’esclavage. Faire en sorte de t’envoyer dans la pire maison possible. Peut-être en Elda où tu serviras de souffre-douleur. » Son sourire sembla s’agrandir avant qu’elle ne se relève pour s’approcher à nouveau du pirate. « Ou je pourrais te garder pour moi. » Sa main vint rejoindre la joue du Rokvenha, essuyant doucement le sang et la poussière de sa joue alors qu’un sourire amusé vint orner ses lèvres. « Te priver de ta liberté en faisant de toi mon jouet. Répondant au moindre de mes désirs.» Son regard se planta dans le sien, observant sa réaction. « A moins que tu aies quoique ce soit à me proposer? »

Combien de fois avait-il connu ça ? Il ne l’avait pas vraiment compté à dire vrai, mais cette sensation ne lui était pas étrangère ; Il en avait pris des coups depuis sa jeunesse, des coups auxquels il n’avait pas toujours pu répondre, étant dans l’incapacité moral ou physique, comme à cet instant. Il connaissait bien ce subtil mélange de peur et de douleur qui lui nouait le cœur et l’esprit ; Un plaisir.
Caleb ressentait à cet instant précis un plaisir étrange, une excitation enfouie, à chaque fois que son corps meurtri le rappelait à l’ordre. Il ne savait pas si cela était dû à l’approche de l’évanouissement causé par les coups, ou s’il s’agissait là encore d’une pulsion inavouée et inexplorée.

La Vaani le fixait et soutenait son regard avant de s’éloigner de lui dans sa démarche féline et gracieuse. Le Mecan se surprit à se laisser penser un bref instant que cette femme devant lui pouvait être belle et agréable à l’œil, puis un sourire se redessina sur son visage songeur.
Belle, c’était inévitable, la sang-mêlé avait hérité des meilleurs côtés de son mélange pour le physique, mais là ou elle l’intéressait c’est qu’elle savait y faire ; Démarche lente, déhanché marqué à chacun de ses pas, même sa voix et son souffle chaud étaient maîtrisés afin de charmer, séduire et enivrer les hommes qui étaient face à elle. « Foutue Lamia noyée… » murmura le Rokvenha dans un rire dissimulé. Il ne le savait que trop bien, malgré les apparences Maralina était dangereuse, froide et calculatrice, si tant est qu’elle charmait, c’était avant tout pour mieux contrôler, ou obtenir ce qu’elle désirait, à l’image de ces créatures qui noient les pauvres hommes qu’elles attirent dans leurs bras.

Il ne quitta cependant pas des yeux la jeune femme, toujours à genoux devant elle, ayant reprit un peu plus ses esprits, bien que toujours amoché. La Vaanie vint alors lui parler de femme qu’il aurait amoché, voir tué, et soudainement Caleb pencha la tête l’air de ne pas saisir les propos de sa tortionnaire. Il sembla alors réfléchir en fouillant dans sa mémoire quelle femme aurait pu mériter pareille action de la part d’une princesse marchande, aucune ne lui venait à l’esprit, aucune à part peut-être de simples prostitués. Cette idée arracha un rire de satisfaction au mercenaire qui répondit alors.

« On… On parle bien… d’catins là ? Mmh … ? Si c’est l’cas… J’suis là d’vant vous… pour… pour ça ? » Visiblement il n’avait pas l’air de saisir l’importance que pouvait avoir Maralina au sujet de ces filles qui avaient été battues presque à mort. « J’pensais que c’était plus grave qu’ça, M’dame… Vraiment. » Il secoua la tête, cherchant alors à retrouver le visage de Maralina, reprenant peu à peu davantage sa respiration. « Si ça peut vous enchanter… J’voulais pas forcément qu’ça se passe comme ça, mais y’a des fois ou… pfffiou » De ses mains attachées il mima comme une explosion qui sortie de sa tête. « … J’avais payé suffisamment cher pour pas qu’j’lui foute où ça m’plaisait et ça… ça m’a mis en rogne pour sûr. J'sais bien qu'ça excuse pas tout, mais merde... l'client c'est l'roi, non ? »

Caleb s’arrêta soudainement comme s’il s’apercevait que ce n’était pas le moment pour de tels propos. Il suivit la princesse du regard, instinctivement ses doigts pianotaient sur la pierre froide et son air songeur reprit le dessus, pensif et rêveur. Il s’imaginait probablement là, dans cette même pièce et à cet instant, sans être attaché et face à elle, il ne savait pas ce qu’il aurait pu faire, mais cela concernait la sang-mêlé et ses rêves se stoppèrent subitement quand elle lui rappela l’accord passé.

Il est vrai que Maralina avait un accord avec les Seigneurs Mecans, si tant est que Caleb en avait quelque chose à faire de ça. Il le savait car il s’agissait pour une rare fois, de pouvoir piller en pleine mer et se faire de l’or en étant presque dans la légalité, le reste ne le concernait pas plus que ça. « Aye, j’sais bien qu’vous avez ça… d’ailleurs vous m’en devez deux, si j’ai bonne mémoire… C’était six cents dorées par rafiot… J’vous laisse compter. »  L’idée de ces pièces d’or arracha un énième sourire aux lèvres ensanglantée du pirate qui visiblement avait dissimulé sa peur et sa douleur derrière un sarcasme et un humour faisant penser qu’il ne prenait pas au sérieux l’instant.

« Vous m’tuerez pas, j’pense pas… t-t-t-t Pourquoi ça ? Mmh ? Parce que toutes aussi puissante qu’vous êtes, car vous l’êtes, aye… Vous n’voulez pas vous attirer l’foudre d’meca ou juste d’mes gars, c’est p’t’être pas les plus futés mais s’ils doivent vous mener la vie dure jusqu’au dernier d’leurs jours, soyez en sûr, M’dame, qu’ils le feront. » Caleb la fixa alors, il n’avait pas pris un ton menaçant, et faisait pourtant preuve d’une confiance assez marquée aux vues de sa situation. Il faut dire qu’il connaissait bien les hommes et femmes de son équipage et il savait tout aussi bien que chacun d’entre eux lui étaient fidèle et paré à tout pour lui. Il savait alors ses arrières assurés en quelque sorte.

« M’priver d’ma liberté serait peut-être l’plus cruelle des punitions, mais si c’est pour être l’jouet d’vos désir…héhé » Encore une fois, il marqua un temps d’arrêt, réalisant un peu la teneur de ses propos et reprit aussitôt. « J’doute que quoi qu’ce soit que j’ai à vous proposer puisse trouver intérêt à vos yeux, M’dame. Vous avez tout et si vous n’l’avez pas encore, vous l’achetez ou l’arrachez … D’ailleurs vous et moi on est pareil » Il avait osé. « On est l’même sur c’point-là, on prend c’qu’on veut donc, on sait tout deux comment ça va s’finir, coupons court, qu’est-ce qu’voulez ? »

Caleb le savait, Maralina aurait ce qu’elle désirait de lui, que ce soit sa mort, un morceau, un paiement ou tout autre, il était inutile de négocier avec elle et il préférait éviter de tourner autour du pot inutilement. Après tout, le Dragon et le Rokvenha n’était pas si différent l’un de l’autre.

La vaanie le laissa parler alors qu’il tentait avec de vaine parole de justifier ses actions. Elle se demanda réellement si ce dernier se foutait d’elle ou il était réellement stupide. Quoiqu’elle doutât fermement de la deuxième option. Non... Il savait à qui il avait affaire et il avait peur. Personne ne s’attaquait à la Princesse de la Chair pour s’en sortir indemne. Que vous soyez le plus petit ou le plus grand de ce monde. Combien de personnes avait essayer ? Combien de personne la craignait? Elle le voyait bien à chaque fois qu’elle sortait du palais. Elle la voyait bien cette crainte, cette terreur sur le visage de ceux qu’elle passait. Tous savaient qu’elle était Thaar. Tous savaient qu’elle pouvait vous faire monter comme elle pouvait vous exterminer en une seconde. Et ce sont ces sentiments même qui plaisait à la Irohivrah. Personne n’était à sa taille et tous pouvaient faire comme lui et babiller pour trouver un quelconque salut. Car c’est ce qu’il faisait, n’est-ce pas ? Tenter de parler le plus possible pour tenter de s’en sortir. Il faut dire que le début ne la fit guère sourciller. Du moins, jusqu’à ce qu’elle entende la fin… On aurait presque dit que ce dernier avait fait par exprès pour la provoquer et cela sembla fonctionné. D’un geste brusque, elle attrapa sa gorge, serrant alors que ses ongles semblaient creuser sa chair. Elle le força à s’avancer vers elle, autant que ses chaînes lui permirent avant d’approcher son visage du sien. « Catin ou non. C’était MA propriété. Tu sais ce qui arrive à ceux qui leur touche? » Elle ne s’attendait guère à une réponse, il n’était pas assez idiot pour lui répondre de toute façon. « Crois-tu réellement que les Seigneurs Pirate vont venir pour toi ? Pour quelqu’un qui s’est attaqué à la personne qui les rend riches, qui leur ont permit d’exercer leurs vengeances sans conséquences ? » La Princesse eut un sourire amusé avant de lâcher la gorge de l’humain. « Tu ne seras jamais roi ici. » Il ne put guère voir venir la suite, alors qu’un poing ganté de fer vint se heurter violemment à sa joue. Le mettant hors-jeu. « Nous ne serons jamais pareils… » Conclua-t-elle, avec un air dégoûté alors qu’elle regardait le corps inerte du pirate.



Sans attendre, les miliciens encadrèrent le pirate, avant d’enlever les chaînes qui l’entravaient. Puis, ils le traînèrent dans une autre pièce, non sans grogner sous l’effort alors que la Princesse Marchande suivait d’un pas lent. Khaled arriva à ce moment, interrogeant du regard sa maîtresse avant qu’elle ne lui fasse un signe de le suivre. « Viens. Le plaisir ne fait que commencer. » Le groupe avança rapidement dans les geôles, avant de rejoindre une pièce isolée. Cette dernière, encore plus exiguë que la précédente, était orné d’innombrables outils en métal de toute sorte. Une chaise longue, curieusement immaculée était dans un coin de la pièce, là, ou la Princesse admirait les nombreux spectacles qui s’y jouaient. Les miliciens laissèrent choir le pirate au sol, avant que l’un deux ne jettent le contenu d’un seau d’eau à la figure du pirate, ce qui réveilla assez brutalement le Rokvenha. Maralina lui laissa quelques secondes pour qu’il reprenne ses sens avant de reprendre la parole. « Puisque l’on se sent si joueur, je me suis dit que l’on pourrait tenter un jeu à deux… »



L’un des miliciens ouvrit rapidement une trappe, là où un feu crépitait brutalement, et y laissa choir une tige de métal. Inutile de préciser à quoi cette dernière allait servir… Le pirate reconnaîtrait bien assez vite le symbole qui ornait le fer. La Princesse se laissa choir sur la chaise longue, comme si la scène devant elle était des plus banales. Son attention se porta alors sur le pirate, alors qu’elle reprit finalement la parole.


« Khaled. Rappelle-moi le nom du navire ? »
« Le Wagyl Noir, Votre Majesté »
« Et où est-il amarré ? »
« Dans le port de Thaar. Il attend toujours son capitaine.»
« Oh. Surprenant. » Dit-elle d’un ton sarcastique. « C’est d’ailleurs un des nombreux groupes qui a participé à la guerre de Qyriah? »
« Oui, Princesse. Et au trouble d’Hanning aussi.»
Le sourire de la Princesse sembla s'agrandir alors qu’elle laissa sa tête se pencher légèrement sur le côté, déplaçant finalement son regard vers le capitaine.
« Ah le groupe criminel qui a mis la ville à feu et à sang. Dis-moi, Khaled, est-ce que le guet est au courant ? .»
« Non. Mais elle pourrait l’être dans les prochaines minutes et arrêter les criminels. Nous savons tout ce qui s’est passé là-bas. »



Le regard azuré ne s’était pas déplacé de sa victime, souriante, elle le jaugeait, tentait de voir sa réaction. « Cela serait dommage de perdre un si bon combattant… » Elle s’étira sur sa chaise longue, déposant sa tête sur le dossier avant de regarder le plafond. « Prendre la liberté de pas une seule personne, mais de tous ceux auxquels tu tiens. Détruire ce qui te tient réellement à cœur. » Elle fit un léger claquement de langue avant de finalement porter son attention vers le pirate. Maralina fit un léger signe à un de ses gardes qui attrapa le Rokvenha pour l’avancer un peu plus vers elle. Le faisant s’agenouiller au bord de la chaise. Il recula d’un pas, s’assurant qu’il puisse attraper le pirate avant qu’il ne tente quoi que ce soit sur la Princesse alors que cette dernière passait doucement le bout de ses doigts sur ses joues rugueuses. « C’est la différence entre toi et moi. J’ai du pouvoir et tu n’est rien. Par contre, tu as raison sur un point. Je prends toujours ce que je veux. » Ce qui n’était pas faux en soit, si elle voulait le détruire elle pourrait le faire en levant le petit doigt. Mais où était le plaisir la dedans ? La Princesse se redressa doucement, se tournant pour faire face au pirate. Gracieusement, elle se croisa les jambes, observant le pirate qui était à genoux devant elle. Il était si près. S’il s'étirait, il aurait presque pu la toucher, sentir la douceur de sa peau hâlée, enfouir son visage dans ses longs cheveux bruns. Elle pencha légèrement le menton alors que ses bras se croisèrent nonchalamment sur ses genoux. « Maintenant, que nous avons mis cela au clair. Voilà ce qui va se passer. Les deux filles que tu as tabassées ne pourront pas travailler pendant de nombreux mois. Rajoute le prix des guérisseurs, les cicatrices etc… Elles ne feront jamais ce qu’elle faisait avant ta venue. Tout cela est une perte de revenu que tu me dois. Alors pour les prochains mois, tu vas répondre au moindre de mes besoins. Si j’ai envie que tu laves mes planchers, tu le fais. J’ai quelqu’un à me débarrasser, tu t’en occupes sans broncher et si j’ai envie que tu sois dans le lit de la plus dégueulasse des créatures de Thaar…» Elle lui releva le menton, approchant son visage du tiens. « Tu dis Oui, Princesse et tu te rends dans son lit. » Son sourire s’étira doucement alors que son regard sembla briller d’un éclat peu rassurant. « On s’est bien compris? »

La princesse de la Chair était puissante c’était indéniable, son emprise s’étendait sur des lieux à la ronde et dans de nombreux coins de la région, mais il n’en avait que faire. Il était mécan et il avait choisit la vie de sans allégeance, de ce fait ni roi ni dieux n’avaient de pouvoir sur lui et il ne les reconnaissait aucunement.
Du moins, c’est ce qu’il pensait jusqu’à maintenant, alors qu’l était enchaîné, face à Maralina, dans une position de faiblesse et de soumissions. Caleb le savait que trop bien, il avait piqué au vif la vaanie, elle ne comptait pas laisser cet affront impuni.

Quand Maralina se saisit de sa gorge, il sentit les ongles de la femme se planter dans sa chair. Il était la proie face à son prédateur aux griffes acérés, les rôles avaient changé et c’était une des premières fois qu’il se retrouvait dans pareille situation. Un frisson parcouru sa peau, redescendant le long de son dos, il en trembla, non pas de frisson, mais d’une excitation palpable et comme pour couronner le tout, il soutint le regard de la princesse à cet instant, silencieux, semblant savourer l’instant.
Lui qui d’habitude parcourait les mers tel le prédateur marin qu’il était, le Rokvenha, à la recherche de proie sur lesquelles il jetterait son dévolu, il était maintenant à leur place. Fragile, en ce moment, il pouvait presque s’imaginer ne jamais quitter l’endroit dans lequel il était retenue. Aucun remords, aucune tristesse s’empara de son cœur, non, il attendait, impatient, de voir la suite, trépignant presque sur les genoux, un sourire narquois aux lèvres.

Il n’eut pas le temp de l’apprécier davantage qu’un lourd poing s’écrasa sur son visage et ce fut la nuit. Il sentit qu’on le saisit et le releva pour le mener dans un nouvel endroit, mais son corps ne réagissait plus, inerte, comme un pantin désarticulé.
On le jeta dans cette pièce sombre et l’eau fraîche le ramena à la réalité il se releva aussitôt, surprit cherchant tout autour de lui à retrouver un semblant de contrôle.

Il reconnu la pièce, sans difficulté, une salle de torture. Il secoua la tête avant de le porter sur le mouvement non loin de lui, de là, il vit le tison et le symbole qui l’ornait. Caleb grimaça et essaya de s’en éloigner quelque peu, avant d’entendre les propos qu’échangèrent Maralina et son conseiller, ce qui arracha un bref rire, sortit de nulle part aux vues de la situation dans laquelle il était.

« Ahah… Une femme si puissante entourée… par c’genre d’incapable qui lui ment ? » Il s’étouffa presque, rappelé par la douleur de son corps, encore sonné par le coup aussi porté à sa tête. « Pensez-vous … que j’suis stupide à amarrer mon navire dans l’port d’Thaar ? … » Il ria de nouveau, mais il se fit saisit par le mercenaire qui le mena alors auprès de la princesse.

Il était si proche d’elle qu’il aurait pu la saisir dans un mouvement rapide, les caresses de la femme arrachèrent un nouveau frisson, une douce sensation après ce qu’il avait enduré. Se pourrait-il qu’il se laisse imaginer dans les bras de cette dragonne, après tout elle avait ce que beaucoup d’autres n’avaient pas et il ne pouvait que l’admettre, elle était forte, c’était elle aussi un prédateur.
Il ne fit rien, fermant les yeux sous la caresse, se laissant enivrer par le parfum de la vaanie, ses mains se resserrèrent dans un spasme musculaire comme pour retenir un quelconque geste, ou pulsion qui aurait pu le traverser à cet instant.

Enfin, la dragonne devint sérieuse et lui présenta ses plans. Il devait payer pour les filles qu’il avait amoché, il devait répondre au moindre des désirs de la princesse. Elle avait toujours eu l’habitude que ce soit le cas, que ce qu’elle demandait soit exécuté sans oser lui répondre, elle pensait que ça serait tout aussi simple avec le Rokvenha qui l’écoutait toujours en silence, ne la quittant pas du regard. Quand elle eut fini, il prit alors la parole et brisa son silence.

Sa voix était presque monotone, aucune once de moquerie ni de menace pouvait se lire, impossible de savoir ce qu’il avait en tête à cet instant. « … C’est tout ? Mmh … ? Allons… Princesse de la Chair, j’suis p’t’être pas en mesure d’négocier, mais… vous pensez réellement que j’vais juste vous dire oui d’la sorte ? » Il pencha sa tête sur un côté, comme pour marquer son questionnement. « Si vous avez b’soin d’un chien qui r’pond aux moindres d’vos désirs, il s’trouve là » Il désigna Khaleb d’un signe de menton. « Et tant d’aut’ qui sont dans les rues d’Thaar et qui baisse les yeux d’vant vous. » Il eu un mouvement de sa main, qu’il leva doucement pour ne pas alarmer les mercenaires et il vint se masser le menton en grimaçant de douleur, poursuivant. « Ça s’passera pas comme ça, naye, navré M’dame.  Ça va s’passer aut’ment. » Il marqua un long silence, l’air de peser ses prochains mots en dodelinant de la tête. « … J’me suis fait attraper, j’payerai l’prix d’vos catin… On retire les mille deux cents dorées pour l’deux navires que vous m’devez déjà… Ca devrait vous aider à payer d’nombreux frais… Eeeeet… Si vous avez besoin d’mes services, aye, j’peux m’laisser tenter mais ça s’ra pas comme vous l’entendez. C’pas d’la sorte que vous aurez ce que vous voulez d’moi, car j’pourrai tout aussi bien r’prendre la mer une fois dehors. » Il étira alors un sourire amusé, venant de lui donner sa porte de sortie si tout venait à s’envenimer. « J’suis d’bonne volonté, voyez ? J’vous dis même comment s’assurer que j’bosse pour vous, sans risquer d’me voir vous quitter un beau matin… Ca pourrait vous briser l’cœur. » Il s’y risqua et tendit alors sa main ornée de nombreuses bagues en direction de Maralina, paume tendue comme pour sceller un accord. « … On s’est compris ? »

Dure que le rire du pirate ne l’avait pas surpris aurait été un odieux mensonge. La Princesse se redressa, avant de hausser un sourcil, puis lorsqu’il lui avoue que les informations étaient fausses. Son regard bleuté se déplaça vers Khaled qui sembla passablement paniquer. Il se gratta la tête, semblant trouvé la pierre du sol particulièrement intéressante à regarder alors qu’il tentait de se remémorer l’information.



« Je… Non enfin, c’est l’information que j’ai reçue. À moins que j’aie mal lu le rapport. Je... Je… »
« Incapable… » Siffla-t-elle entre ses dents, alors qu’elle dévisageait l’elfe qui semblait vouloir disparaître.
« Je vous assure, Votre Majesté. Je vais aller revérifier. »



Maralina le dévisagea un moment, son expression trahissant la colère qui grondait en elle. Cela faisait plusieurs années que l’elfe était à son service. Combien de fois lui avait-il mentit ? Combien de fois avait-il fait des erreurs ? Peut-être était-ce sa première, peut-être que ce n’était pas le cas. Et aussitôt que le doute commençait à germer dans l’esprit de la Vaanie, ce n’était définitivement pas bon signe. Mais la scène qui se déroulait devant lui, ne sembla guère affecter le pirate, qui continua sa rengaine, insultant même au passage le pauvre Khaled qui semblait être totalement déboussolé. Le Rohvenka lui fit même une contre-offre, levant la main pour sceller un marché qu’il croyait juste .



Il avait du cran. Elle devait l’admettre. Rare était ceux qui lui faisaient tête, et rare était ceux qui survivait. Elle eut un léger sourire, avant d’avancer son visage vers le sien. Son doigt toujours sous le menton du pirate, le guidant vers elle. Maralina pouvait sentir son souffle chaud sur son visage, alors que leurs lèvres n’étaient qu’à quelques centimètres l’un de l’autre. « Il faut faire attention… Si j’avais été de mauvaise humeur, peut-être que je t’aurais fait arracher la langue pour ce que tu viens de me dire. » La princesse de la chair plongea son regard dans le sien, leur nez se touchant. Sa main se déplaça pour aller derrière sa tête, agrippant la chevelure mouillée du pirate. Elle se mordilla la lèvre inférieure, regardant les lèvres du Rohvenka avant de rencontrer de nouveau son regard. Un sourire moqueur éclaira ses lèvres, alors que cette dernière s’avança, bifurquant au dernier moment pour s’arrêter près de l’oreille de ce dernier. Elle se mit à chuchoter afin qu’il soit le seul à l’entendre. « Mais peut-être que je lui ai trouvé une autre utilité plus amusante. » Il était évident qu’il la voulait. Elle pouvait le voir, le sentir. Sentir le tremblement de son corps alors qu’elle s’était approchée de lui. L’éclair de désir qui avait frappé son regard. Personne n’aurait pu le blâmer. Après tout, il n’était pas le premier ni même le dernier à être envoûtée par la princesse de la chair. Presque tous les hommes, qu’ils soient frappés par l’attrait d’un faux bien ou d’une vaine gloire se laissaient séduire par celle qui en réalité méritait plus le mépris que la louange. « Peut-être devrions-nous continuer ce jeu de douleur et de caresses. Puisque cela semble être la seule chose qui attire ton attention. » Elle se recula, savourant apprécier de voir l’homme à genou devant elle, avant de claquer les doigts. Un des miliciens approcha avant de donner ce qui semblait être les clés des liens qui retenaient le pirate. « Sortez. » Khaled ouvrit la bouche, comme pour intervenir, mais il se tut en voyant le regard que lui lança la Princesse Marchande. Disons qu’il ne voulait guère attirer encore plus sa colère. Sans attendre, les quatre hommes sortirent de la pièce, et ce ne fut qu’une fois la porte refermée que la Princesse Marchande reprit la parole. « Je garde mes mille deux cents souverains. Tu ne t’approches plus des bordels où étaient ces filles et tu me dois un service. » Dit-elle en faisant un mouvement de ses doigts finement manucurés. Sa main se retourna ensuite vers la joue du pirate, plongeant son regard dans le sien. « Crois-moi, je récompense généreusement ceux qui travaillent pour moi. » Puis, elle s’approcha de nouveau de son oreille, avant de mordre doucement cette dernière, s’amusant à le faire frissonner de nouveau ; « Comme je punis ceux qui se mettent à nouveau sur mon chemin. »

Caleb assista à la discussion entre Maralina et son conseiller non sans une certaine fierté apparente, son sourire narquois toujours vissé aux coins de ses lèvres. Il le savait, il venait de faire planer le doute dans le cœur de la princesse et peut-être avait-il trouvé là son salut, jouant à la fois la carte de la bonne volonté et de l’efficacité, après tout, qui savait si Khaleb n’avait pas mentit plus d’une fois à sa maîtresse en pensant la satisfaire ? Il se délecta de cette scène, toujours agenouillé et trempé, il avait gagné ainsi quelques instants de répit afin de reprendre un peu son souffle et d’essayer de faire passer sa douleur.

Caleb s’agita un peu sur ses genoux, l’air impatient ou mal à l’aise dans cette position. Le pirate vit alors s’approcher la princesse de la chair et le saisir par le menton une nouvelle fois, encore une fois elle était si proche de lui. Il se laissa mener par le bout des doigts et des caresses, cette fois-ci il ne se sentait plus en proie à la colère de Maralina, mais à son nouveau petit jeu de charme, qui fonctionnait tout de même.

Une certaine envie s’empara de nouveau de lui, quand leurs visages se rapprochèrent, le faux espoir que lui fit la princesse lui arracha un sourire amusé, il s’était fait avoir, ayant tendu légèrement ses lèvres pour recevoir celle de la sang-mêlé, mais les propos ainsi chuchotés à son oreille le stoppèrent net dans son amusement. Elle savait y faire c’était indéniable, et ce qu’elle lui avait proposé ne pouvait que plaire à celui qui aimait les femmes et qui par-dessus tout apprécié les plaisirs de la chair. Enfin, c’est ce qu’il avait visiblement comprit des propos lâchaient à voix basse.

Ainsi quand la Vaanie fit sortir ses hommes, le Rokvenha les regarda en n’oubliant pas d’envoyer un énième pique à ces derniers « Allez bon vent et merci d’l’accueil fort agréab’. » il revint alors aussitôt à la femme avec qui il était maintenant seul, toujours attaché, mais seul.

Quand Maralina lui proposa une contre-offre, il la jugea juste, bien qu’il ne dit rien à ce sujet. Visiblement, il était plongé dans d’autres idées et son regard fixé sur la Vaanie en disait long. Son regard habituellement pétillant et moqueur était devenu plus sombre et contrarié, sa mâchoire se crispa sous l’effet d’une colère ou d’une pulsion passagère et il inspira profondément plusieurs fois, comme pour tenter de se calmer. Il laissa jouer la Princesse de la chair avec lui, ainsi, silencieux, mais continua d’inspirer et d’expirer à plusieurs reprises lentement et fortement.

Maralina verrait là une réception de ses charmes, ce qui en soit n’était pas faux en grande partie, mais la réalité était tout autre. Caleb venait de laisser mûrir en son cœur des envies peu recommandables, il se voyait ainsi libérer, seul avec la princesse à reprendre les commandes de cet échange et de lui faire payer tout ce qu’il avait subit depuis quelques jours. Il se voyait là, à laisser parler ses pulsions les plus violente sur le corps qui paraissait si frêle et délicat de la Vaanie, voulant probablement à la fois la briser et prendre ce que lui désirait d’elle. A cet instant, il essaya de se contrôler et de faire taire ses pulsions les plus sombres, car il savait très bien que ça ne serait que plus problématique pour lui. Ainsi, il laissa Maralina s’amuser comme un chat joue avec sa proie, profiter que pour l’heure elle ne soit pas la frêle bicoque qui rencontrerait la tempête en plein mer qui était en train de s’emparer de lui.

« … J’accepte vot’ offre. » Souffla t’il lentement. « … Mais j’irai là où bon m’semble… Sur terre comme en mer, Princesse d’la chair. Et je ne r’viens pas dessus. » Il se crispa encore une fois, ses poings se serrèrent à plusieurs reprises, continuant de lutter. En vain…

Dans un mouvement brusque et rapide, la main du Rokvenha vint saisir le cou de Maralina dans une étreinte à la fois forte et mesurée. Il ne cherchait pas à l’étouffer pour la tuer, mais elle pouvait sentir que sa respiration était légèrement coupée comme une poigne se voulant dominante. Ainsi il l’attrapa et serra quelque peu en la fixant. « Jouez tant qu’vous voulez… Aye, mais il faudra en assumer les conséquences un jour… Si vous pensez m’faire comme aux aut’, j’vous l’ai déjà dit… Vous vous trompez. » Sa voix était calme et posée bien qu’une pointe d’agressivité et de rancœur pouvait se faire entendre. « J’veux bien êt’ vot’ chien d’guerre et mes hommes vous serviront… Mais n’oubliez pas que même si puissante qu’vous êtes et qu’pour vous je n’suis rien, j’reste tout comme vous un prédateur en ces mers et terres… Alors jouons, j’suis assez joueur, moi aussi. » Il sourit alors, relâchant doucement sa poigne du cou de Maralina en ne la quittant pas du regard.

La vaanie ne manqua guère son expression. Sa respiration qui ralentissait, sa mâchoire crispée… Ce n’était qu’une question de temps avant que ce dernier ne montre réellement qui il était. Maralina aurait parié que ce dernier craquerait, qu’il tenterait de dominer à nouveau et le moment arriva rapidement. Il se saisit rapidement de la gorge de la princesse, la serrant afin de couper sa respiration. Comme réponse, il n’eut qu’un sourire, un sourire amusé alors que la demie-elfe plongeait son regard dans le sien, sa main gauche vint sur la sienne, insérant un doigt sous sa poigne pour lui laisser un peu plus d’air. C’était tellement prévisible… Ce n’était pas la première fois qu’elle testait ainsi les hommes qu’elle côtoyait, et le malheureux avait définitivement échoué. Il était comme tous les autres… « Être gentil est si fastidieux, n’est-ce pas ? » Dit-elle un sourire aux lèvres. Croyait-il réellement être le premier à lever la main contre elle ? Sa main droite se leva, s'arrêtant à ses côtés avant qu’elle ne découvre sa paume. Une longue cicatrice ornait cette dernière signe qu’une lame avait laissé une très profonde marque. « Parfois, les cicatrices sont les plus raffinées des vêtements que quelqu’un peut porter. » Ce ne fut que quelques secondes plus tard que le pirate la relâcha, si cette dernière ne se plaignait guère de retrouver une respiration complète, elle ne le montra pas au pirate devant elle, au contraire, son sourire sembla s'agrandir alors qu’elle reprit de nouveau la parole. « J’aime comme les gens comme toi croient avoir tout compris. Crois qu’ils menaient la situation alors que vous être les plus prévisibles possible. » Elle releva le menton, fixant toujours le pirate de son regard azurée, avant de reprendre la parole ;



« Je crois que tu surestimes ton importance. Peu importe ce qui va se passer. Je vais gagner. Ne crois pas que tu es le plus grand prédateur dans cette pièce, Rokenha et cela serait dommage que tu trouves quelque chose que tu ne voulait point. » Sans attendre la Princesse mis la main sur le torse du pirate pour le pousser légèrement, rien de violent en soi, mais juste assez pour se relever. Elle contourna l’homme agenouillé, la soie de sa robe flottant derrière elle, avant de continuer ; « Tu n’es pas le premier à travailler pour moi, et probablement pas le dernier. Mais il y a une chose qui est certaine, c’est que je me suis toujours montré très généreuse avec mes collaborateurs. » Ce n’était pas un secret pour personne en Ithri’Vaan. La Princesse avait d’innombrables compagnies de mercenaire qui n’attendaient qu’a répondre à son appel. Pas qu’ils étaient fidèles en soi, mais parce que la Princesse de la Chair payait bien. Très bien. Son assassin personnel s’était fait une énorme fortune depuis qu’il avait travaillé avec elle, ayant maintenant son propre manoir à Thaar et il n’était pas le seul dans cette position. Maralina se retourna vers ce dernier, l’observant pendant une seconde. Oh, elle avait plusieurs choses en tête, peut-être devrait-elle l’envoyer à Qyriah pour se débarrasser du conseil des comices. À moins qu’il n’aille faire une livraison spéciale à Langehack… « Quelle est ta prochaine destination ? » Demanda-t-elle l’air soudainement sérieux. Sa tête se pencha sur le côté, alors que son regard perçant se fixait sur le pirate. « Pour le moment, il n’y a rien à Thaar qui demande ton assistance. Par contre, si tu vas ailleurs. » Elle cogna sur la porte qui s’ouvrit. Khaled donna une bourse à la Princesse avant de jeter un regard mauvais au pirate. Décidément, la rencontre avec ce dernier ne l’avait guère plu. Qui aurait pu le blâmer ? Khaled avait beaucoup plus à perdre que le prisonnier. Puis, il referma la porte aussi prestement qu’il l’avait ouverte, évitant le regard de sa patronne comme la peste. Maralina, elle, s’avança vers le Rokvenha de son pas félin, s’arrêtant de nouveau près de ce dernier. « Mais si j’étais toi, j’essayerais de revenir à Thaar le mois prochain. Il y aura de l’action. Après tout…» La Vaanie se pencha devant ce dernier, avant de relever le menton de l’homme de son index. « Certaines opportunités récompensent ceux qui savent attendre. »

Après s’être laissé emporté par une partie de ses émotions, il relâcha la pression sur le cou de la vaanie. Cette dernière n’avait guère cillé et n’avait visiblement pas prit au sérieux le mecan. Il devait l’admettre, elle était quelqu’un et il ne pouvait que s’incliner devant ça, ainsi, le Rokvenha s’avoua vaincu en silence et se tut en écoutant la Princesse de la Chair refaire son numéro.

Toujours à genoux, la pression redescendu, Caleb se surprit à regarder autour de lui, comme si la pièce l’avait à cet instant intéressé. Son regard alla de droite à gauche et de bas en haut, semblant davantage attentif à son environnement qu’aux propos de son interlocutrice sur l’instant, ne posant plus son regard dans celui de la Princesse, comme pour s’il l’évitait. Il l’entendait bien cependant et tout ceci ne faisait que confirmer ce qu’il savait depuis le début de leur douloureuse rencontre et qu’il avait apprit par la suite. Maralina détenait tout et ne reculait devient rien pour obtenir les peu de choses qu’elle ne possédait pas.

Elle lui parla des mercenaires grassement payées qui venaient trouver du travail auprès d’elle. Parler d’or avait toujours plu au mécan, mais cette fois-ci, peut-être par envie de se jouer de son interlocutrice ou non, il ne marqua aucun intérêt à ces propos. Il faut dire qu’il ne s’imaginait pas faire la queue après de nombreux autres mercenaires afin d’obtenir sa bourse remplie pour travail rendu, comme s’il était l’esclave d’une maîtresse qui se voulait généreuse. Non, il ne voulait pas de ça, alors quand elle lui demanda sa prochaine destination, il eu un rictus amusé aux coins des lèvres et avant de répondre, il fut coupé pour l’arrivée de Khaled.

Le Rokvenha ramena sa tête, qui était tourné vers le plafond, en direction du conseiller qui donna une bourse à Maralina. Il attendit que l’homme reparte et écouta de nouveau la Vaanie. Une fois finit il reporta enfin son attention sur elle et brisa son silence. « J’sais pas où j’vais aller, j’dirai bien où l’vent me mènera, mais vous s’rez capable d’faire en sorte qu’il me foute droit dans la gueule d’un wagyl… Bien que j’vois pas trop où vous voulez en v’nir, j’vais tâcher d’êt’ là l’mois prochain, aye, ça pourrait-êt’ intéressant comme vous l’dites, j’voudrai pas manquer ça. »

Il lui sourit, gardant cet air espiègle et un brin moqueur au visage malgré les bleus et les entailles.

Il était dangereux.



Elle le savait, elle le voyait et en avait été témoin. Sa main se porta à son cou pendant une seconde, elle aurait définitivement du mal à oublier sa poigne, surtout avec les ecchymoses qui s'annonçaient. Il prônait sa liberté, mais il se laissait entraîner par ses sentiments, par sa colère, par son envie. Un homme comme lui pouvait autant détruire ses ennemis que ses propres alliés. Maralina connaissait que trop bien cette façon de faire, au cours des nombreuses années de son existence elle en avait vu plus d’un tombé dû à un excès de colère. Par contre, utiliser un homme tel que oui, pouvait être utile, si seulement il réalisait ce qu’elle tentait de faire. Silencieuse, la Vaanie l’observa pendant quelques secondes, se demandant si avoir le Rokvenha près d’elle était réellement un avantage. Elle aurait besoin de bras dans les prochains mois, voir années, et avoir quelqu’un qui n’avait pas froid aux yeux avait ses avantages. Surtout avec ses prochaines victimes…



« Où je veux en venir ? » Dit-elle avant de hausser un sourcil. « C’est pourtant très clair. » La Vaanie fit un nouveau pas pour combler le vide entre elle et l’homme agenouillé, avant de l’observer pendant quelques secondes. Elle lui fit un signe de lui montrer ses poignets ornés de fer, un ordre silencieux certes, mais qu’il ne regretterait point. Une fois que ce fut fait, elle entreprit de détacher ses liens. « Tu dis vouloir la liberté. De pouvoir choisir où tu voulais aller, ce que tu as envie de faire. Je te donne cette chance. Mes affaires s’étendent autant dans l’Ithri’Vaan que dans la péninsule. Peu importe où tu as envie d’aller, je suis certaine que je pourrais trouver une tâche. » Les liens tombèrent finalement sur le sol, laissant s’échapper un cliquetis métallique libérant ainsi le pirate. Puis, elle prit le poignet du pirate, pour lui tourner délicatement la main, le forçant doucement à lui offrir sa paume. Une fois, que ce fut fait, elle déposa la clé qui libérerait ses chevilles, avant de se reculer de quelques pas, allant s’accoter sur l’une des colonnes qui ornait la pièce. Elle croisa ses bras sur son ventre regardant délibérément le pirate de la tête au pied, comme si elle inspectait une quelconque marchandise. « Je te l’ai dit. Tu n’es pas le premier à travailler avec moi. Beaucoup essaient, peu réussissent à attirer mon attention ou à même la garder. Tout dépend de ce qu’ils veulent ou peuvent faire. Je crois que tu as les capacités rares, qui pourraient m’être utiles, c’est pourquoi je t’offre la possibilité d’un marché, là, maintenant. » La princesse observa ce dernier alors qu’il se relevait finalement, conservant une certaine distance avec ce dernier. Il était inutile de préciser ou même de cacher qu’elle ne lui faisait pas confiance. Le pirate lui avait montré sa vraie nature, elle avait vu son tempérament, ses désirs, et un homme sans contrôle comme lui était dangereux. « Autrement dit, prouve-moi que tu es différent, que je peux te faire confiance et je ferais de toi un homme riche. » La Vaanie haussa des épaules, d’un air las. « Enfin, si c’est réellement ce que tu veux.» D’un mouvement, elle lui lança la bourse, le cliquetis qui s’y trouvait ne laissaient rien au hasard au sujet de son contenu. De nombreuses pierres précieuses plus scintillantes les unes que les autres reflétaient les faibles lumières qui se trouvaient dans la pièce. « Une avance pour ta prochaine tâche. Alors, laisse-moi te reposer ma question. Quelle est ta prochaine destination? » Elle espérait avoir été assez claire, l’offre était fait et libre à lui de tenter de mettre ses conditions s'il le désirait. Mais il n’aurait définitivement pas tout cru dans le bec.

Les prunelles azurées fixaient le pirate alors que ce dernier se libérait finalement de ses liens. Il semblait que sa proposition avait fait effet, puisque ce dernier semblait beaucoup plus bavard maintenant qu’il était libre. Maralina le regarda tourner en rond dans la cellule. Elle n’était pas dupe, elle savait pertinemment qu’elle ne pouvait réellement lui faire confiance. Il était un pirate, un être dangereux sans honneur et sans lien. Le tenir en laisse serait impossible, du moins, pas avec des richesses. Il avait probablement une faiblesse, et elle le trouverait bien en temps et en heure, mais pour le moment, des précautions étaient nécessaire. « Alors, nous nous entendrons bien. Puisqu’il n’y a personne qui paie mieux. » Elle le laissa néanmoins s’approcher alors qu’il jouait avec l’énorme diamant qu’il avait dans ses mains, lui révélant par la même occasion ses prochains projets. Cette révolution la fit sourire. Alonna… Et bien, il fallait croire que les dieux avaient entendus ses prières. C’était une occasion qu’elle ne pouvait guère laisser passer. « Alonna… Ma foi, vous n’avez guère froid aux yeux. Vous enfoncez aussi loin dans le Nord… Première visite, je suppose ? » Elle eut un sourire alors que ce dernier arrivait derrière elle. « Ce que tu fais de tes affaires m'importe peu. Après tout, je n’ai rien à voir avec cet arrangement. » Maralina ne bougea guère alors qu’il mettait son bras autour d’elle. Ses yeux se fermèrent un moment alors qu’elle pouvait sentir son souffle sur sa nuque. Cela faisait beaucoup trop longtemps… La princesse eut un léger soupir avant d’ouvrir les yeux à nouveau. Il fallait qu’elle reste alerte, après tout, il y avait du travail à faire et le pirate venait de lui donner une occasion en or. Durant son séjour à Diantra, elle avait appris la mort de Théodoric de Langehack. Un bien curieux accident auquel elle n’avait rien à voir avec, étonnamment. Mais avec la mort de ce dernier cela mettait Lukas en ligne pour être héritier, ce qui était une fantastique opportunité. Mariage annulé ou non, cela lui donnait une occasion en or, du moins, si son ancienne belle-fille n’avait pas de plan elle-même. Apparemment, que cette dernière était ambitieuse… Mais elle savait ne pas se fier aux ragots. Ils étaient beaucoup trop souvent décevant.



La Vaanie se tourna, faisant face au pirate, avant de planter son regard dans le sien. Un sourire amusé vint orner ses lèvres alors qu’elle posa ses mains sur son torse. « Tout à moi ? » Sa main remonta doucement, caressant doucement son torse avant de rejoindre son cou pour terminer sa course sur sa nuque, l’attirant un peu plus vers elle. Son visage s’approcha du sien, avant de ne s'arrêter qu’à un souffle de ce dernier. Son front rejoignit le sien. Elle pouvait sentir sa respiration sur son visage, et il aurait presque pu l’embrasser, mais Maralina reprit la parole ; « Intéressant. Peut-être que je devrais prendre ce que j’ai envie alors. » Elle avança ses lèvres vers ce dernier, sa respiration semblant saccadée avant que son sourire ne s’agrandisse un peu plus. Soudainement, la princesse se recula, balayant la main du pirate de ses épaules avant se mettre à marcher loin de ce dernier. Elle répondait définitivement au jeu que venait de lui proposer le pirate. Après tout, là, maintenant, il semblait avoir autant envie d’elle que de la tuer. Maralina rejoignit la chaise longue, avant de s’y asseoir comme s’ils avaient la conversation la plus bénigne qui soit. Elle croisa ses longues jambes hâlées, les dévoilant volontairement au Rokvenha. Ses mains se déplacèrent derrière elle, alors que sa tête se penchait vers la gauche. Elle observa le pirate de la tête au pied, sans aucune gêne, se mordant légèrement l'intérieur de la lèvre, comme pour montrer son envie, avant de le fixer de nouveau. « Puisque c’est déjà sur ton trajet. Peut-être que tu pourrais en apprendre un peu plus sur la baronne pour moi. » Elle pencha la tête vers l’arrière, non sans lâcher son regard, alors que ses longues boucles brunes tombaient dans son dos. « Je suis sûre que l’on peut négocier une prime dépendamment de ce que tu me ramènes… »

Sa main reposée sur l’épaule de Maralina tenait toujours la pierre précieuse, objet de convoitise. Caleb faisait tourner le diamant entre ses doigts, eux-mêmes porteurs de plusieurs bijoux et pierre, tout en écoutant les propos de la vaanie. Il sourit, satisfait, à l’idée que Maralina se disait être celle qui payait le mieux sans possible concurrence. Si telle était réellement le cas, alors, le Rokvenha venait de trouver la bonne personne auprès de qui faire affaire. Si ce n’était qu’un mensonge, Maralina sentirait alors le goût amer de son propre jeu.

Quand elle se tourna et lui fit face, il plongea son regard dans celui de la femme. Un bref instant il s’arrêta ainsi, suspendu aux lèvres de la vaanie. Allait-elle le faire ? Allait-elle l’embrasser ? Pas encore, la Princesse de la chair s’extirpa de l’emprise du mécan dans un sourire amusé et s’éloigna de sa démarche féline pour s’installer plus loin. Le mécan la regarda faire, gardant son sourire aux coins des lèvres, à la fois charmeur et charmé.

Mais ce petit jeu n’était pas au goût de tout le monde, celles qui auparavant s’étaient faites bien silencieuse, quand il avait eu le plus besoin de compagnie, refirent surface aux creux de son esprit, balayant alors toute conscience et réflexion saine. Caleb en était habitué, cela faisait maintenant des années qu’il en était ainsi. Elles étaient là, aux creux de sa tête et il avait décidé de les écouter, de leur laisser prendre toute la place qu’elles désiraient. Ainsi, pendant un bref instant, tout en fixant Maralina, ces vieilles compagnes prirent le dessus.

Héééé… Toi là ! Hép !
Dangereux…
Un jeu très dangereux…
Oui oui oui !
Non ! C’est un jeu…
Qu’un jeu…
ON NE JOUE PAS !!
Ahahahahahah…
Hééééé psssst !
Tu es si faible, tu le sais ?
Si faible face à une si petite femme…
Elle va t’écraser…
Tu devrais prendre ce que tu désires plus que tout.
NON NON LE FAIS PAS !
Tu en as tant envie…
FAIS-LE !

Caleb secoua la tête un bref instant et reprit ses esprits en gardant son regard sur celle qui lui faisait maintenant face, assise. Ses yeux firent miroir à ceux de Maralina et lui aussi ne se gêna pas pour la contempler de bas en haut, profitant alors de ses jambes dénudées. Il vint alors s’adosser au pilier sur lequel était son interlocutrice auparavant.

« La Baronne ? Mmh… Ca risque d’êt’ assez compliqué d’l’approcher et d’en apprendre un peu plus sur elle, mais ma foi, j’suis aucunement perdant à l’faire. Dans l’pire des cas ça change rien à mes plans… Au mieux… » Il étira un large sourire, reprenant alors les derniers propos de Maralina comme s’il était lui-même d’accord sur ce point. « J’aurai de quoi négocier davantage auprès d’vous, aye. »

Il finit par ranger la pierre dans la bourse et en piocha une autre, différente qu’il examina avec le même intérêt. Continuant de parler sans lever les yeux de ceux qui était, sur l’instant, le bien le plus précieux dans la salle.

« Vous voulez apprend’ quoi sur elle ? J’vais pas vous d’mander pourquoi, ça… Ca m’en touche une sans bouger l’aut’… Mais j’me dis que si j’vous ramène pas les bonnes infos, j’vais m’faire avoir en beauté. J’me doute bien qu’vous voulez pas savoir c’qu’elle manger au p’tit matin, donc dites-moi tout. »

Il releva à peine son regard, les sourcils haussés dans une expression de questionnement. Après tout, il lui faudrait bien plus d’informations que ça pour pouvoir agir et surtout voir si ce qu’on lui demandait n’était pas un piège dans lequel Maralina le jetterait sans remord.

L’homme le plus dangereux est celui qui pouvait gâcher ses potentielles idées. Le Rokvenha était comme cela. Il était instable, et à le voir ainsi, devant elle, cela ne faisait que confirmer ses doutes. C’était quelqu’un qui ne semblait pas être contrôlable au premier abord. Quoique, les hommes voulaient toujours deux choses : le danger et le jeu. C’est pourquoi il voulait généralement la princesse de la chair ; le jouet le plus dangereux qui soit. À voir son expression, il appréciait particulièrement le jeu qui se dévoilait dans cette cellule. Peut-être pourrait-elle en tirer un quelconque avantage. La Vaanie pencha la tête sur le côté, avant de lui lancer un sourire amusé ; « Si tu réussis à parler à la baronne, elle-même, je serais surprise et à la fois impressionnée. Elle n’a pas l’air du genre à se laisser approcher facilement. Mais si tu as besoin d’un défi… » Du moins, c’est ce qu’elle croyait, après tout, la fameuse rose de Lodiaker restait une nordienne. Elle avait peut-être marié un suderon, mais cela ne changeait pas qui elle était réellement et les nordiens n’était guère reconnu pour leur accueil chaleureux des étrangers. Maralina eut un léger sourire en coin, avant de reprendre la parole, tout en observant le petit jeu du Mécan. « J’aimerais en savoir plus sur elle personnellement. Qui elle est, comment ces gens la voient… Et si tu réussis à avoir des informations sur ses plans. Est-ce qu’une guerre se prépare ? Y a-t-il de puissants alliés qui se trouvent sur ses terres ? N’importe quoi qui semblerait être important. »



La Vaanie décroisa doucement ses jambes avant de se relever. Elle s'étira doucement d’un air nonchalant avant de s’approcher du Rokvenha de son pas félin. Son regard azuré se planta dans le sien, alors qu’elle s’approchait à nouveau de son - disons - prisonnier, profitant que ce dernier se soit adossé au pilier. « Quant aux raisons pour lesquelles je voudrais en savoir plus sur elle… Vois-tu cette dernière à perdu son mari d’un tragique accident il y a quelques ennéades. » Elle eut un faux air attristé alors qu’elle lui annonçait la mort de Théodoric de Langehack avant de prendre un sourire amusé, se rapprochant de plus belle du pirate avant de s’arrêter qu’à un souffle de ce dernier. En réalité, elle n’en avait que cure de ce dernier, elle avait toujours cru que ce dernier était faible et elle avait d’ailleurs réussi à le séduire assez aisément, au grand désespoir de son père d’ailleurs. Sa main se posa doucement sur son torse, alors qu’elle faisait de légers mouvements avec ses doigts sur le torse de l’homme, suivant d’ailleurs ses mains du regard. Son air devint soudainement plus sérieux, presque pensif avant de reprendre la parole ; « Je crois que cela est le prémices d’une guerre qui pourrait s’annoncer intéressante. Mais je n’ai aucun yeux là-haut. » Il n’avait guère besoin d’en savoir plus et en réalité la Princesse ne lui en aurait guère dit plus. Le pirate l’avait dit lui-même qu’elle ne pouvait lui faire confiance, elle n’irait certainement pas lui dire que son fils aîné était le prochain héritier du Langehack… Des plans pour que ce dernier aille voir la Marquise pour lui revendre son demi-frère sur un plateau d’argent. Maralina s’arrêta soudainement, avant de relever de nouveau le menton vers ce dernier, soutenant de nouveau son regard ; « Je suis certaine que dépendamment de ce que tu me rapportes, nous pourrions s’entendre sur une prime.» Lui murmura-t-elle. Avant de s’approcher de nouveau de son oreille alors que sa main rejoignait sa nuque. Elle lui mordilla le lobe d’oreille avant de laisser s’échapper un soupir rempli d’envie. « Qu’en dis-tu ? » Murmura-t-elle alors que son front vint se poser contre le sien. Sa main caressant la joue rugueuse du Mécan alors qu’un sourire amusé vint orner ses lèvres.

La situation avait changé du tout au tout entre la dragonne et le rokvenha. Il y a peu encore, la princesse de la chair cherchait à lui faire payer ses affronts et se réjouissait de voir son sang couler, maintenant, elle lui offrait des sourires charmeurs et jouait avec lui à un petit jeu qu’il savait dangereux. Dangereux parce qu’elle pouvait tout aussi bien chercher à le piéger, l’amadouer et chercher à en faire le chien qu’elle désirait. Caleb le savait, du moins, gardait cette idée là en tête en plongeant corps et âme dans les charmes de la vaanie, répondant toujours et jouant davantage avec elle.

Maralina souhaitait des informations sur une certaine baronne. Ce n’était pas une mission impossible en soit, mais, Caleb réfléchissait déjà à comment il pourrait s’approcher d’un tel personnage, lui ou un autre membre de son équipage, après tout certains présentés bien mieux que lui. « Mmh… Une baronne, l’défi est d’taille… Vous v’doutez bien qu’un gars comme moi va en chier pour l’approcher et lui parler surtout sur c’que vous m’demandez. » Il fronça légèrement les sourcils quand une idée lui traversa l’esprit. « Vous cherchez tout d’même pas à m’faire disparaître en m’demandant ça mmh ? » Il la fixa alors, ayant complétement perdu son sourire à cet instant.


Il la regarda alors s’approcher d’elle, ne pouvant pas détacher son regard de son corps, son déhanché félin ne pouvait être là que pour être remarqué. Il la laissa approcher, toujours plus près, aucun espace vital ne semblait lui être défendu, après tout, elle se servait et prenait ce qu’elle désirait. Qu’il était faible face à une femme ayant de bons charmes et qui savait s’en servir. « Une guerre… Vous voulez ‘core me fout’ en plein milieu d’ce genre de chose ? » Il grimaça et soupira d’un air lassé avant de saisir Maralina par les hanches la rapprochant encore plus de lui, la serrant même contre lui. Sa main se posa dans une certaine possession aux creux des reins.

Quand elle lui chuchota à l’oreille ses doigts se crispèrent alors sur le dos de la Princesse, comme dévoré encore une fois de cette envie passagère. Il frissonna et sourit alors. « Aye… aye… J’vais m’débrouiller pour vous dégoter ça. » Il rendit le sourire, l’envie de l’embrasser lui brûler les entrailles à ce moment-là. Caleb releva simplement la tête, avant de reprendre sur un ton tout aussi confidentiel mais avec une pointe de moquerie et de déf dans la voix. « … J’aimerai toujours l’belles pierres à mon retour aye…. »

« Je crois que tu m’as mal compris » Répondit-elle lui lançant le plus charmeur des sourires. « Je veux des informations de source fiable. Pas nécessairement la baronne elle-même. Si tu réussis à t’approcher d’elle. Tant mieux, mais comme j’ai déjà dit, cela ne sera définitivement pas gagné. » Il pouvait toujours essayer, après tout avoir des informations de la baronne elle-même lui semblait presque surréaliste, mais ô combien attrayant. Sa main se posa finalement sur sa joue, caressant doucement cette dernière avant qu’elle ne reprenne la parole ; « Je n’ai jamais dit que je te demandais d’y participer. Mais si cela doit arriver, je veux avoir le plus d'informations possibles. » Ses mains glissèrent de nouveau sur son torse, caressant l’étoffe poussiéreuse et crasseuse de ces vêtements, alors que son nez se posait contre son cou, alors qu’elle laissait glisser sa respiration jusqu’à son oreille. « Je ne souhaite pas nécessairement y participer. Par contre, regarder le chaos se dévoiler devant nos yeux sera définitivement des plus distrayant. » Voir la péninsule brûler par son intervention serait définitivement une vengeance accomplie.



« Peut-être que tu auras d’autres choses que des pierres. » Elle lui lança un regard amusé avant de se détacher de ce dernier, se dirigeant vers la porte, avant de s’arrêter. La Princesse de la Chair se retourna légèrement vers le Mécan, avant de lui faire un sourire ; « La prochaine fois, prends une douche avant de venir me voir. Cela rendra les choses un peu plus intéressantes. » Son sourire sembla s'agrandir pendant un moment, alors qu’elle se mordillait la lèvre inférieure, non sans regarder le Mécan avec un certain appétit. « Bonne Chance, Rokvenha. » Sans dire quoi que ce soit d'autre, la Princesse se retourna pour sortir de la pièce, laissant ce dernier avec ses gardes. Après tout, elle avait d’autres chats à fouetter.