Une prise de pouvoir

En cette fraîche soirée de printemps, l’atmosphère était bien sinistre au palais des barons de Missédes. Les portes s’ouvraient uniquement pour les dignitaires de la baronnie et les gardes faisaient les plus tristes mines. En ville les milices urbaines sur ordre des échevins se positionnèrent à l’entrée de la ville et aux principaux carrefours de la ville. Par ailleurs, le président du  conseil des échevins, Eude,  accompagnait en ce moment même Archibald en direction du palais.  

Les deux hommes avaient appris ensemble la nouvelle. Un messager était venu interrompre le conseil des échevins de Missédes, auquel Archibald faisait office de représentant de la baronnie. Le coursier, essoufflé, annonça  la nouvelle à la noble assemblée :   le baron était gravement blessé, la chasse de la journée s’était mal passée. Par malchance, le cheval du jeune garçon s’était emballé et avait chuté, le baron n’avait pas eu le temps de se dégager et s’était retrouvé écrasé sous le cheval. Les échevins et Archibald  se félicitèrent de la robustesse du garçon et prirent rapidement leurs dispositions afin d’assurer l’ordre dans la ville. Non pas que Missède sois sujette au désordre, mais si il devait arriver malheur au jeune baron la succession devrait s’imposer en douceur.

Arrivé au sein du palais, des valets se précipitèrent auprès d’Archibald et de son escorte.  Les quelques hommes de Meizac restèrent dans la cours ou partirent se réchauffer en cuisine, Archibald et Eude s’en allèrent s’enquérir de la santé du baron accompagné d’un seul page. Lorsque qu’il les croisait, Archibald saluait rapidement les nobles et dignitaires présents en cours.  Au vue des murmures rapidement échangés et des visages de beaucoup, Archibald se douta de la gravité de la situation. Il finit par abandonner l’échevin pour se précipiter vers l’antichambre du baron.

Le garde chasse seigneurial  se précipita vers Archibald lorsque ce derniers entra dans l’antichambre du baron. Les quelques autres personnes présentent cessèrent aussitôt de parler

« Messire, j’ai suivi vos instructions, je ne comprends pas ce qui... »

« C’est bon Lancelin, personne ici ne doute de vos compétences, un animal reste dangereux quelque soit les circonstances. Et personne ici ne l’ignore. »

Agréablement surpris par la réaction du sir de Maizac, le garde chasse finit par laisser sa place au trésorier royal ,Baudouin d’Ethin :

Archibald, fort heureusement le baron est en vie ! Tibérias est à ses cotés afin de s’assurer que tout se passe bien. 


C’est à ce  moment que la porte de la chambre du baron s’ouvrit et que Le capitaine des gardes de la bibliothèques,Tibérias de Roch, en sortie. Les deux hommes échangèrent un bref regard, le capitaine réprima difficilement un bref sourire puis saisi rapidement le bras du seigneur de Maizac :

Le baron est mort ! Vive le baron Archibald premier du nom ! 

Les gardes et quelques hauts officiers reprirent d’abord en cœurs la phrase de Tibérias puis ce fut tout le palais qui la reprit. Il ne s’agissait là que d’une formalité d’usage pour faire comprendre aux personnes peu avertis qui était le nouveau maître de la baronnie. Des messagers allaient maintenant rependre la nouvelle sur tout le territoire, en prévenant en priorité les alliés du baron.

Des années de sapes et d'alliance politique portèrent enfin leurs fruits. Archibald avait réussi à devenir l’un des personnages incontournable de la baronnie. Il avait réussi à monter en grâce auprès de l’ancien baron et à prendre de l’importance au sein de la cour. Il termina bailli de la baronnie et de cette place pût grandement influencer la vie politique missédoise. Ses sœurs avaient été mariées aux autres maisons influentes de Misséde, notamment les Ethin, et les bourgeois des bonnes villes de Missède soutenaient depuis longtemps Archibald. Et l’argent tiré des plantations des Maizac permis de s’attirer quelques fidélités bien placées dans l’entourage proche du baron. C’est entre autres pourquoi les milices de la ville de Misséde contrôlaient la ville afin d’assurer une transition en douceur.

   

Voici une énéade qu’Archibald était baron. Il fût couronné rapidement devant une assemblée regroupant la noblesse locale ainsi que les représentants des grandes villes de la baronnie. Avec les festivités qui suivirent, les devisions de justice à rendre et la tournée de la baronnie à préparer, Archibald avait à peine eu le temps de traiter les affaires courantes. Mais il était pour lui temps d’exprimer sa vision de la baronnie auprès de son conseil restreint, vision qu’il devrait ensuite diffuser dans toute la baronnie.

La réunion du conseil avait lieu dans le salon du premier étage. Quatre gardes étaient placés devant la porte afin de s’assurer du bon déroulement de la séance. Tous les conseillers étaient présents autour de la table et se levèrent à l’entrée d’Archibald. Le baron salua le conseil et s’installa sur sa chaise placée en bout de table, suivit par tous. Juste à sa droite se trouvait le chef des gardes de la bibliothèque, Tibérias de Roch. Du même coté on trouvait le sénéchal Karl de Hautbois, ainsi que l’Amiral Gerolf de Vieuport    A la gauche de Théobald  se trouvaient le chancelier Dankrad de Montmuraille, suivit de l’intendant Baudouin d’Ethin et  du bailli Wolf de Champant.

En ce jour et avec ce conseil restreint je vous fait part des ma vision quand à l’avenir de Missède. La plupart d’entre vous connaissent mon opinion à ce sujet, mais je vais le définir officiellement devant vous. Vous êtes les grands de cette baronnie et je compte sur vous pour me soutenir et faire de Missède une terre centrale dans ce royaume. Je ferai part de la plupart de ces points lors des rencontres avec les échevins de nos bonnes villes ainsi qu’avec les nobles et chevaliers des autres seigneuries.

Misséde possède de nombreux atouts, nous sommes un lien entre le nord et le sud du royaume. Nous devons renforcer ce lien et je compte bien me baser sur le commerce et notre flotte pour cela. Je n’apprécie guerre la présence de comptoirs nains sur nos terres mais nous ferons avec, cependant il est nécessaire de nous renforcer face à eux. Je souhaite donc la création de la Compagnie du Golfe du Médian qui aura son siége en la ville de Chiard. Les marchands Missédois se doivent de parler d’une seule voie pour peser face à ces nains et face aux grandes compagnies de Langehack. Je compte sur eux pour me fournir une charte dans les plus brefs délais, en retour je m’engage à défendre les intérêts de la compagnie face à ses concurrents et à négocier des contrats en leur faveur. Le nord peux être intéressé par cet accord et nous essaierons d’en tirer profit, et les seigneurs nordiques aussi je suppose. Si nous arrivons à un accord sur les taxes qui transitent par Isgaard avec l’Alonna et l’Odelian les gains pourraient être importants.

Ensuite Misséde possède la plus grande bibliothèque du royaume, il nous faut pouvoir continuer sur cette voie là et en tirer partie. Je souhaite donc la développer pour que nos copistes soient capables de répondre aux besoins des grands du royaume en matière de livre, mais surtout de la nouvelle université Missédoise. Ces connaissances se doivent de servir le royaume et je compte faire de Misséde le centre du savoir en cette péninsule. Y seront enseignés les arts libéraux dans leur entièreté, c’est à dire la grammaire, la rhétorique et la dialectique, la musique, arithmétique, l’astronomie et la géométrie. Seront aussi étudiés la médecine, je comprends dedans la chirurgie, et le droit civil. Je laisse le droit canon aux prêtres de Neera. Des enseignants seront ainsi recrutés et un doyen nommé d’un commun accord avec l’université et le baron. Une charte sera écrite sous peu et je compte bien sur l’aide des échevins de la ville de Misséde. Je vous assure qu’ils sont très intéressés par ce projet.

Pour cela nous continuerons l’achat d’ouvrages que nos scribes recopieront pour pouvoir les vendre ou les louer aux étudiants ainsi qu’à la petit noblesse. Nul besoin d’enluminures sur ces ouvrages. Ce dynamisme futur devrait être favorable aussi bien à la ville qu’à la baronnie, et encore plus au royaume. Notre position centrale, non loin de Diantra et de Langeack, avec nos ports et nos fleuves devrait soutenir ces deux projets.

Enfin le dernier point n’est pas des moindres, et je compte sur votre discrétion à ce sujet.

Je souhaite renforcer les frontières de notre baronnie, autant en Isgaard que vers Edelys. Je considère ce territoire comme nécessaire à la sécurité de notre baronnie et nous nous devons de le récupérer ou de récupérer des garanties. Concernant l’Isgaard il nous est fort possible avec de bons soutiens de la reprendre. Mais je ne le souhaite pas, trop peu de Missédois s’y sont installés. Mais nous pouvons négocier un bel accord avec l’Odelian si nous y mettons les moyens.

Le nouveau baron laissa les débats se lancer. Beaucoup de ses conseillers étaient encore plein de rancœur suite à la perte de ces territoires. Mais bien vite l’intendant Baudouin réussit à convaincre tout le monde de sa position : les déconvenues militaires d‘autrefois se doivent de servir de leçon, si Missède pouvait obtenir des garanties sans conflit cela ne pourrait être que profitable à tous. Archibald mit fin au débat en se rangeant du coté de son intendant.

Je me dois de rapidement prêter serment à notre Marquis, mais une invitation au mariage de Solange d’Escault nous a été envoyée. Nous pouvons commencer à mettre en place notre politique aussi bien à Langehack qu’à Diantra en peu de temps…. Mais je ne souhaites pas la guerre, négocions d’abord. Mais amiral, préparons notre flotte.