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Sujet: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Dim 4 Juin 2023 - 22:11
Milieu de la 4e ennéade de Verimios 20e année du Onzième Cycle Aux abords de l’Oliya
Depuis votre départ des terres naines, Sû était tendu. Plus vous aviez approché la frontière d’Anaëh, plus le corps de l’oiseau semblait crispé. Vos arrêts n’étaient plus l’occasion d’aucun jeu, et quand l’aigle venait chercher ton contact, ce n’était non plus parce qu’il voulait ton affection, mais parce qu’il avait besoin de réconfort. Mais au fur et à mesure qu’il aura dévié de la route d’Alëandir pour t’emmener vers le Sud, les raisons en étaient devenues de plus en plus évidentes.
Un vague à lame étreignait ton cœur. Comme un sourire fuyant, un bonheur de surface, une quiétude qui se savait trop belle pour être entière. Tu n’en étais pas étonné. Du moins, tu ne l’aurais pas été, si la sensation était moins prégnante. Depuis que tu Entendais, tu avais compris la Sylve des abords d’Oliya être capricieuse et inconstante. Car ici la Sylve lutte. Si ce n’est contre le Silence, contre la Dissonance. Seulement il semblait que pour la première fois depuis quelques années, la situation s’était inversée. Là où l’Hymne à la victoire d’Anaëh face à sa sœur blessée prenait lentement des airs de Complainte.
Si elles étaient loin d’être suffisante à directement en menacer l’intégrité, les « attaques » de Porte-La-Peste sur la Sylve commençaient au moins à en perturber la sérénité. Seulement c’est ainsi que la forêt se viciait. En étant privée de sa paix. C’est qu’il avait bien choisi son moment le vieux sorcier, parce qu’avec l’Anaëh devenue imprévisible à nouveau, mobiliser les ressources nécessaires pour lui régler son compte n’était plus mince affaire. Pas que ça l’ait été auparavant, mais là… pour l’instant, il semblerait que vous soyez contraints de vous contenter de repousser ses offensives.
L’aigle plonge. Ton sceptre tire les aurores contre l’heure. L’animal rase le sol ; la pointe du bâton tranche l’air, et les arcanes déferlent sur la créature de Tourmente avec une exceptionnelle férocité. Face à l’horreur de la non-vie, la larme, l’écaille et la Pierre de Yutar s’insurgent de concert. Et sous ton assaut, séparée de son maître, la masse de chair mouvante s’écroule, pour être cueillie par ceux qui l’affrontaient à ton arrivée.
D’un sec battement d’aile, l’aigle reprend de l’altitude, et reprend sa course folle au-dessus du fleuve. Puis d’un long cri aigu, il te prévient. Si tu n’avais eu ni yeux pour voir, ni oreilles pour entendre l’oiseau, tu l’aurais au moins sentie. La créature que vous survoliez n’avait rien à voir avec la précédente. Celle-ci faisait ployer la trame comme un fruit mûr au bout d’une jeune branche. Et sa pulse – puissante comme si elle avait véritablement été en vie – battait à t’en faire vibrer les entrailles. Tu serres les dents. L’Aigle focalise son attention sur la chose monstrueuse, traçant de larges cercles autour d’elle. Et toi, toi t’apprêtes à commencer cette danse.
Les cercles tracés par l’animal se font de plus en plus serrés. Pressé contre le dos de l’oiseau par la vitesse, tu appelles les aurores. Ton sceptre sonne la première heure, et la première lueur va embrasse l’engeance.
Tétanie
Ton sceptre sonne la deuxième heure, et trois lucioles jumelles plongent dans ses chairs.
Faiblesse
Ton sceptre marque la dernière heure. Ainsi tu sonnes le glas pour la monstrueuse créature. L’oiseau s’arrête dans sa course et s’immobilise dans les cieux. De ta main droite tu cueilles une part des lueurs dansant autour de ton sceptre et du bout du doigt, tu les pointes en direction du monstre. Les étoiles d’éther s’envole avec une trompeuse mollesse, et se posent contre la créature avec une perfide douceur.
Le Baiser d’Aluthen
Comme dévorées par les flammes, les chairs de la créature se pétrifient, se désagrègent, et le monstre fait poussière est soufflé par le vent.
Le rythme des battements d’ailes de Sû se tempère. Le sol se rapproche. L’oiseau se pose. Tu poses pied à terre. Tu accuses le poids de l’effort, mais tu gardes la tête haute. D’un hochement du menton, tu salues les soldats ayant commencé cette bataille.
- J’imagine que ce sera ça de moins à expliquer dans le prochain rapport.
Dernière édition par Artiön Laergûl le Jeu 13 Juil 2023 - 1:30, édité 1 fois
Árólindë Yuitë
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Mar 20 Juin 2023 - 20:41
L’aube avait dissipé la brume qui rampait sur la surface de l’Oliya, révélant, au loin, les berges d’Aduram. Leur rive – celle de l’Œuvre, non pervertie par la folie du Linoïn – était détrempée et boueuse. La nuit estivale, et pourtant pluvieuse, avait été de celles qui éprouvent durement le moral. Mais les quatre Aigles étaient restés en faction, alertes. Quand les fourrés, en amont, bruissèrent, il étaient prêts.
Les engeances émergeaient de l’eau avant que l’arc taledhel ne puisse tous les abattre. Ils posaient un pied mal assuré sur la terre et avançaient, compensant leur démarche incertaine par l’endurance que leur prodiguait la magie impie du Sorcier Nécromant. Ils étaient cueillis par une épée et des lances, brûlés par le feu et repoussés par la terre et l’eau collaborant sous la main d’Árólindë, mais revenaient en nombre toujours plus grand ; jamais assez pour submerger les quatre elfes, sur qui ils convergeaient, mais suffisamment pour maintenir une pression constante sur les soldats.
Engoncé dans une demi-armure mordorée, le lieutenant jouait du fer à travers les chairs, arrachant à la non-vie les corps relevés par Aduram. Son heaume, finement ciselé pour capturer fidèlement les traits d’un aigle, laissait entrevoir ses yeux à l’éclat froid, gris et or. Il parlait peu, prévenant à l’occasion d’une cible qui s’était faite discrète, ou amorçant de la voix une manœuvre complexe. L’essentiel de la danse contre les radicules du vice, cependant, était silencieuse, les quatre citadins se connaissant tous assez pour que leurs mouvements de chacun s’accordent d’instinct à ceux des autres.
L’assaut atteignit son zénith avec le soleil. Ils ruisselaient de sueur et respiraient désormais bruyamment. Tenir était un devoir qu’ils tenaient pour sacré, aussi, aucun ne cédait. Les créatures s’amoncelaient autour d’eux et des corps chutaient, inanimés, dans les flots bouillonnant du fleuve. Mais les tombés se relevaient et reprenaient leur attaques.
Árólindë opposa son bouclier à une charge désespérée. Son épée perça le cuir d’un autre rejeton du Nécromant. Il retira sa lame et, d’une torsion du poignet, décapita la créature aux aspects humanoïdes, la libérant d’une vie dont elle n’aurait pas dû souffrir. La première engeance chargea à nouveau, mais s’embrasa avec un cri strident lorsqu’une orbe enflammée le percuta. Du coin de l’œil, il l’éclair de l’empennage d’une flèche qui partait du dessus de son épaule pour se planter dans l’orbite vide d’un non-mort à quelques pas de lui. Son épée fendit une clavicule et frappa une patte au poil gris, alors que son feu dévorait un thorax que son égide avait frappé.
Un cri lointain s’immisça soudain dans la clameur du fer et des chairs. Plongeant des cieux, un Dolwen Rainadion survola avec une majesté flamboyante les flots de l’Oliya. Chevauché par une silhouette auréolée de lumière, il s’approcha de la berge puis remonta dans les airs, laissant dans son sillage un cadavre inanimé.
Dans la Trame, un fléchissement fut perceptible.
Emergeant des flots, une engeance monstrueuse fit face aux elfes. Difforme à ne plus être assimilable à autre chose qu’une manifestation de la malfaisance de l’ennemi, elle s’avança. La terre, devant Árólindë, s’hérissa de saillies. Il raffermit sa prise sur son arme et mobilisa l’éther.
Mais l’Aigle fut sur la créature avant qu’elle ne fut sur eux. Des lucioles ardentes s’abattirent sur elles, la stupéfiant puis l’arrachant à la nécromancie du Sorcier d’Aduram. Elle se désagrégea sans bruit.
Le rapace, en quelques battements d’ailes gracieux, se posa. Un elfe à la stature impressionnante descendit de son dos et salua les quatre soldats. Árólindë enjamba les corps étêtés et calcinés qu’ils avaient laissés devant eux, rengaina son épée, dégagea sa tête du heaume et alla posa un genou devant le Roi et l’Aigle providentiel.
« – Heru Aran. »
La révérence, néanmoins, n’était pas pour lui.
« – Lassörn Árólindë. Voici Ëfeanis, Lilthwë et Haloïsé. La Mère bénisse votre arrivée. »
Le lieutenant se releva. Son casque tenu sous le bras, il fixait l’Aigle Géant avec une admiration manifeste.
« – Je n’ai eu que rarement l’occasion d’observer un Dolwen Rainadion, et jamais l’opportunité d’en approcher. Ton aide fut précieuse et nous t’en sommes reconnaissants, Hellëndil. »
Elfique:
Hellëndil : Ami du Ciel
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Jeu 22 Juin 2023 - 20:48
Les complaintes de la Sylves semblaient s’être calmées. Les boucles tracées à travers la trame quant à elles se dénouaient lentement. Le Sorcier d’Aduram en avait eu assez pour cette fois il semblerait. Les soldats venaient de gagner le temps – l’espace d’un instant – de reprendre haleine. Mais au lieu d’être soulagé, cette tranquillité nouvelle avait soufflé un frisson au travers de tes chairs. Ton sourire était resté égal à lui-même, bastion d’assurance et d’optimisme dans lequel tu avais pris l’habitude de te réfugier, en ces temps troubles tout particulièrement ; mais ce que tu venais de voir n’en était pas moins inquiétant.
Ce sont des marionnettes. Construites et modelées avec attention, certes, mais des marionnettes tout de même. Tu reconnaîtrais ce genre de sortilèges entre mille. Mais comment ? Tu savais Porte-La-Peste puissant. Celui qui siège au centre d’Aduram était avec le temps rapidement presque devenu créature de légende… mais à ce point ? Ce n’était tout simplement pas possible. Aucun elfe n’a jamais été capable de ce genre de choses. Aucun nécromant ne devrait pouvoir manipuler autant de pantins, de si loin, et si continuellement. Il devait avoir trouvé quelque-chose, avoir découvert quelque-chose qui l’autorisait à accomplir cela. Et en soi, cette idée t’effrayant presque même plus que d’imaginer que tout cela ne vienne que de lui.
- Le meilleur moyen de lui dire merci… tu flattes le flanc de l’animal ...c’est de lui offrir à manger. tu soupires Surtout qu’après tout ça le pauvre risque de ne pas avoir l’énergie de chasser aujourd’hui.
Tu roules les épaules en arrière, pour t’étirer un peu. Sû n’était pas le seul à avoir beaucoup donné. Mais tu récupérerais vite. Il faut croire que face à des temps mettant à l’épreuve ton Art, ton corps avait fini par se résoudre à accepter d’être ainsi poussé. Probablement en était-il d’ailleurs de même pour Árólindë, dont les talents avaient dû être rudement mis à l’épreuve depuis cette dernière virée dans le bois maudit. Ton regard se tourne vers le mage et tes sourcils se plissent. À le regarder, quelque chose te gêne. Sa pulse est lente et irrégulière, comme le sont celles d’Ëfeanis, Lithwë et Haloïsé. Rien de plus logique quand l’adrénaline retombe et que la fatigue s’installe. Seulement à son arythmie semblait s’ajouter un léger vacillement. Presque insignifiant, mais inquiétant tout de même.
- On ne devrait pas traîner ici. Ce serait plus sage de se diriger vers le fort.
Une approbation silencieuse répond à tes propos. Et la marche est lancée. Tu te rapproches du lieutenant, lui pose une main sur l’épaule, et ralentissant le rythme de tes pas, le retient légèrement en arrière du groupe. Toujours à portée d’ouïe de vos pairs, tu sais cependant que ton geste est compris. Ce petit écart vous aura gagné un peu d’intimité.
- Et toi ? tu lui secoues amicalement l’épaule Tout va comme tu veux ?
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Sam 1 Juil 2023 - 8:09
L’ Aran prit l’initiative de la retraite, ce que tous approuvèrent, sachant leurs limites proches. La descente solaire entamée, la rotation de garde sur cette section de la berge ne tarderai pas, et la vague principale passée, il n’y aurait probablement plus d’affrontement avec les rejetons du Sorcier Nécromant avant quelques heures, voire quelques jours. Ensemble, il prirent le chemin de Wyslena.
Le front transpirant et le heaume tenu contre sa hanche, Árólindë emboita le pas à ses soldats en basculant son bouclier dans son dos. La tête nue, il prit conscience de la fraicheur de la brise qui soufflaient depuis l’amont de l’Oliya et qui séchait quelques mèches brunes sur ses tempes trempées de sueur. Il replaça ses cheveux derrière son oreille et posa la main sur le pommeau de son épée, à sa taille. L’ardeur du combat retombait et avec elle leur souffle retrouvaient de leur calme et de leur régularité. Néanmoins, tous étaient encore alertes face aux dangers que l’Œuvre pouvait leur opposer. La vitalité renouvelée de la Prime Forêt imposait une vigilance accrue de ce côté-ci du fleuve et ici, comme partout ailleurs, les Noss fourmillaient.
La main du Roi se posa sur l’épaule du lieutenant et le retint. Il se laissa distancer de quelques pas en rejoignant le Daranovan à la carrure si forte que le soldat ne lui arrivait qu’à la poitrine. Le Roi engagea la conversation, celle-ci se portant immédiatement sur l’état d’esprit de l’Aigle. Depuis quand tout n’avait pas été comme il le voulait ? Rien n’avait été comme il l’entendait depuis qu’ils étaient Séparés. La camaraderie de leur service entre les murs de la caserne de leur Cité natale avait été les dernières esquisses d’un bonheur qu’ils avaient construit pour être conjoint. Le soldat haussa les épaules.
« – Les choses suivent leur cours, Heru Aran. »
On ne pouvait lutter contre les fatalités. Que les choses aillent comme il l’entendait ou non n’importait pas ; tout ce qui échappait à leur contrôle ne méritait pas que l’on y attarde des lamentations. Il faisait ce qu’il fallait pour réagir à ce qui se présentait, sans se demander s’il aurait préféré que les choses soient autrement que ce qu’elles étaient. Le temps des regrets et des remords était bien loin derrière lui, quoique paradoxalement, il pendait à son cou.
Jetant un coup d’œil en arrière, Árólindë avisa l’aigle géant qui, les ayant suivis quelques temps, déploya ses ailes et prit les airs avec une majesté émouvante.
« – Tu t’es attiré l’amitié d’un puissant Fils, Artiön. »
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Sam 1 Juil 2023 - 23:07
Tu aurais dû te douter du genre de réponse qu’offrirait Árólindë à une question pareille. Pour autant, tu n’en étais pas moins agacé. D’abord tes foulées s’était ralenties, puis ton visage s’était refermé, et lorsque finalement il avait encore renvoyé le sujet de discussion à Sû, tu t’étais arrêté. Tu t’étais interposé sur son chemin, face à lui, et tu t’étais arrêté, te pinçant le nez d’exaspération.
- Árólindë…
Un silence valait mille mots. Ton silence en disait bien assez, mais un silence, c’était donner l’occasion à l’Aigle de continuer à faire comme si de rien n’était. Et ce n’était pas bon. Ni pour lui, ni pour ceux qui le suivaient.
- Pas la peine de faire semblant, je sais qu’il y a un souci. tu roules des yeux avant de froncer les sourcils Je te rappelle que je suis Vitaliste. Je sais reconnaître quelqu’un dont le corps commence à flancher. tu croises les bras sous ta poitrine et lèves légèrement le menton Que tu te refuses à abandonner ta charge de travail à d’autre je veux bien comprendre. Lâcher du lest quand on se sent responsable n’est évident pour personne, mais se laisser mourir au labeur quand on a les moyens de l’éviter n’a rien d’honorable.
Tu te gardes de le lui pointer du doigt, car tu sais ces propos déjà largement assez durs. Mais au contraire, dans la chose, il y a même une forme de lâcheté. Une forme de laisser-aller tout particulier. Celui de ceux qui n’assument pas ne plus avoir la volonté de faire l’effort de vivre. Celui de ceux qui ont abandonné l’espoir d’un futur meilleur que leur présent, car à leurs yeux, il ne sera jamais aussi beau que le passé qu’ils ont depuis longtemps perdu.
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Dim 2 Juil 2023 - 13:29
Artiön s’avança pour lui barrer la route. Les trois Aigles, quelques pas en avant sur la Sente, s’arrêtèrent eux aussi. Ils savaient probablement déjà ce qu’ils pourraient entendre de l’échange et ils tenaient, à raison, à ne pas séparer le petit groupe.
Si le regard de l’Aran s’était fait réprobateur, les yeux du lieutenant lui rendirent une dureté plus ferme encore. Les mots étaient durs, mais les sous-entendus les rendaient d’autant plus amers, cachés derrière une feinte innocence à s’enquérir si tout allait bien. Que savait-il de la Dissonance ? Que savait-il de son deuil, de sa propre Tourmente que les Chants torturés avaient ravivés ? Que savait-il des combats qu’il avait dû tenir contre lui-même pour se construire un Equilibre, sans son frère de sang ? Pouvait-il comprendre que dans l’acte originel de prendre les armes, puis dans tous ceux qui avaient suivi, il y avait eu la résolution de mener les combats qu’Histraxë aurait dû mener lui-même ?
Affronter le Linoïn vicié avait été rude. L’Ebène avait abrogé sa promesse d’Eternité. Le cristal du Faën Ornë grandissait en lui et à terme, le condamnait. Dans le temps qu’il lui était donné, fusse en sursis, il comptait honorer les serments faits au Souffle d’Histraxë. Car c’était ce dont il avait besoin. Car toute bouleversante qu’avait été l’expédition, elle n’avait en rien égalé le traumatisme de la perte de son jumeau.
« – Ce n’est pas un secret. J’ai été blessé par le Faën Ornë que nous avons affronté sur les rives d’Aduram. Ses racines sont en moi et finiront par me tuer. J’ai déjà pris une retraite, car elle m’était nécessaire. J’ai consulté les prêtres de la Voilée et me suis laissé examiner par les Guides de la Mère et par nos Televin, mais ils se sont avoués impuissants à totalement résorber le cristal. Que devrais-je faire alors, Heru Aran ? »
Árólindë, roidement planté devant le Roi, avait la tête levée, les yeux vissés dans les prunelles roses d’Artiön. S’il se tenait là, c’est qu’il se savait plus utile à se consacrer à ses tâches qu’à se morfondre dans les temples de la Gardienne. Il était debout, à son poste, résolu à – et pour – ne pas flancher.
« – Les Aigles qui sont venus le savent, et ils m’ont suivi librement. Protéger l’Œuvre est notre devoir et je suis capable d’en assumer ma part. »
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Dim 2 Juil 2023 - 15:44
L’Aigle te répond avec au moins autant d’aplomb que celui avec lequel tu l’avais confronté. Et tu es forcé de baisser les yeux et de te résigner. Pour cette fois tu t’es mépris. Mais pas entièrement, tu ne penses pas. Si tu ne peux te blâmer que toi-même pour avoir ignoré les origines de son affliction physique, tu es probablement le seul ici à ne serait-ce qu’imaginer celle qui touche à son Souffle. Seulement s’il s’accrochera à cette dernière jusqu’à ce qu’elle le perde, seul le temps le dira.
- Dans ce cas… tu baisses la tête et poses les mains contre tes hanches ...pardonne-moi, je me suis mépris. tu te dégages de son chemin et l’invite à reprendre le pas Mais pour autant, je ne penses pas que simplement abandonner l’idée d’une guérison complète soit la solution. Si jusque-là les Anedhels ont réussi à éliminer tous les maux que les Drows ont expressément inventé pour nous détruire, il n’y a pas de raison que ce soit un simple Faën Ornë notre limite.
Tu défourailles ton sceptre, et en présente la tête – ou du moins le petit objet doré à l’aura tout à fait singulière qui y est accroché en pendentif – à ton camarade. Tu inspires, te plongeant de manière plus consciente à travers les flux. Et en réponse, une légère brillance se partage entre l’écaille à ton focaliseur, et les écailles dessinant le visage du Doré dans ton dos.
- Si tu veux bien me laisser essayer, je peux peut-être aider.
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Lun 10 Juil 2023 - 19:45
Árólindë acquiesça et son regard perdit de sa froideur. Sans un mot pour le signifier, le pardon n’en était pas moins accordé. Suivant l’invitation d’Artiön, il prit les devants sur la sente et reprit la marche.
« – Je n’y ai pas renoncé. Seulement, je n’ai pas voulu écumer les Protectorats en quête d’un remède ou d’un savoir qui aurait manqué aux guérisseurs daranovans, avec l’espoir fou qu’un jour, je puisse être totalement soigné. Dans le temps qui m’est imparti, j’ai mieux à faire. »
Aux premiers élans de la Trame, incités par le Vitaliste, l’Aigle s’arrêta à nouveau. Sous ses yeux, le sceptre du Roi s’illumina des mêmes lueurs qui avaient terrassé les engeances du Nécromant. Enchaîné à l’extrémité du focalisateur, un éclat doré brillait de concert et faisait ployer la Trame avec une intensité qui rendait possible, à cette distance, d’en distinguer nettement l’influence. Au bout de la chaine, la forme et les stries caractéristiques faisait écho à ce qui se racontait au sujet des voyages de l’Aran.
« – Tu te fais décidément beaucoup d’alliés puissants, Artiön. »
Derrière l’aura du vitaliste, les flux s’agitaient.
« – Je t’en prie, fais. »
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Mar 11 Juil 2023 - 21:43
- L’Aînée me guidera tant que je resterai fidèle à son peuple.
Tu réponds du tac au tac. Tu aurais aimé simplement dire que tu as de la chance, mais ce que tu possèdes est bien plus précieux que de la chance. La Mère veille sur ses Enfants. La Mère si l’on daigne l’écouter sait conduire ses Enfants là où ils sont utiles. Après près d’une décennie à tâtonner, tu commences enfin à proprement te concevoir comme étant l’Aran dont Anaëh a besoin, et cela, jusque-là, Kÿria te le rend bien.Ta mission est difficile, Elle le sait, mais avec le temps, et apprenant à les voir, tu constates toutes les mains qu’à travers son Œuvre elle a tendu vers toi.
- Attendons d’être en sécurité et d’avoir pris un peu de repos pour ça. tu te places derrière Árólindë et relances le pas Je pense qu’on a tous mérités un bon bain.
Aussi puissante soit ta magie, et aussi puissants soient tes alliés, tu viens de donner beaucoup de toi-même. Même si tu penses pouvoir aider Árólindë, maintenant n’est pas le moment. D’abord il te fait un peu de repos, le temps de récupérer. Seulement ensuite tu pourras t’attaquer à ce que personne d’autre jusqu’ici n’a réussi à soigner.
Débarrasser ta peau de la crasse du voyage. Laisser la fraîcheur de l’eau te détendre les nerfs. Prendre le temps de te délier les muscles. Souffler. Prendre un bain n’était jamais aussi agréable que lorsque l’on revenait de loin. Tu t’étais donc attardé autant que faire se peut, et autant que la raison te l’autorise lorsque l’on est entouré de soldats pressés de se tenir prêts à faire face à un danger imprévisible.
C’est forcé à reprendre conscience de ta masse par la fatigue accumulée que tu finis par te lever, par t’extirper du bain, et par passer des collants propres avant de rejoindre celui à qui tu avais promis un espoir de guérison. Ta démarche normalement chaloupée devenue lourde et ta chevelure encore humide, mollement écrasée contre ta peau ont rapidement retiré à ta présence sa prestance habituelle ; mais ton calme sourire presque paternel, toujours présent, compense ton manque d’élégance par une chaleur ô combien précieuse.
- C’est bon. tu poses une large main droite sur l’épaule de l’Aigle Je suis prêt si tu es prêt.
Árólindë acquiesce, et preuve qu’il a l’habitude de passer entre les mains des Vitalistes, se relâche quasi instantanément. Ta respiration prend un rythme lent et mesuré. Les étoiles se décrochent de l’anneau d’or de tes iris pour danser autour de tes pupilles. Ton pouls s’aligne avec la pulse de ton patient. L’iridescence des volutes arcaniques commence à danser autour de ton sceptre. Tu observes, tu réfléchis, tu sondes le corps du mage de guerre à la recherche d’une solution. Et rapidement, tu comprends ce à quoi les guérisseurs précédents s’étaient heurtés. Les racines du Faern Ornë ont l’air de bien peu de choses, mais leur pouvoir est insidieux. Ancrées dans les chairs de leur hôte, elles l’utilisent pour continuer de vivre, elles l’utilisent pour croître, jusqu’à ce qu’éventuellement, comme le parasite qu’elles sont, elles ne le détruisent pour arriver au terme de leur renaissance.
- Accroche-toi, ça risque d’être douloureux.
Tu poses la paume de ta main droite contre son torse, et ton sceptre commence à compter les heures. Tes doigts danse autour de la poignée du focaliseur, les aurores dansent autour de sa hampe, puis ton front se plisse, et les lueurs fusent autour du corps de l’Aigle. Détruire et reconstruire. Détruire pour soustraire à la racine son substrat. Reconstruire lorsque le corps étranger s’est étiolé. Un travail en finesse que tu ne peux te targuer d’être capable de réaliser que parce que l’écaille et ce qu’elle offre à ton pouvoir régénérateur t’autorise à être plus généreux que de raison quant à ce que tu acceptes de détruire. Mais c’est aussi cette générosité dans la destruction qui fait de toi le bon candidat pour l’aider. Car la majorité n’aurait ni osé, ni été capable de jouer avec cet état d’instabilité de la même manière que tu l’étais, non seulement en tant que mage de guerre, mais en tant que Vitaliste de guerre.
Tu fermes les yeux. Tu souffles. Tu retires ta main de sur son torse. Une goutte de sueur te coule sur la tempe. Ton regard revient à son rosé naturel, et les arcanes retombent.
- Ce serait trop dangereux de continuer. tu prends un pas de recul Et je pense qu’il vaut mieux pour toi que tu ailles soit demander un tonifiant à un alchimiste, soit voir un autre Vitaliste pour qu’il te restabilise complètement. tu poses ta main contre ta hanche Mais en une ennéade de cette routine, je devrais largement pouvoir complètement te remettre d’aplomb.
Ce serait une épuisante ennéade pour vous deux, certes, mais si ce devait être là le prix pour écarter un danger pour l’éternité… c’était bien peu cher payé.
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Sam 15 Juil 2023 - 17:10
Après l’affrontement, les quelques ablutions qu’Árólindë s’accorda furent bienvenues. Dans l’austérité fonctionnelle d’un dortoir de la Citadelle, il épongea les sueurs des combats et effaça de sa peau les miasmes des engeances qu’ils avaient abattues. Sous la caresse du linge humide, ses muscles se délièrent et la fatigue s’apaisa.
Les mots de l’Aran avaient réveillé un espoir qu’il s’était, inconsciemment, efforcé de faire taire. La fatalité de sa mort, il l’avait accepté dès le diagnostic des guérisseurs daranovans. S’ils ne pouvaient le soigner totalement sans mettre sa vie en péril à court terme, il ne lutterait pas et accepterait le sort auquel conduisait ses actes en Aduram. Il n’en tirait aucun remords, alors il n’en regrettait pas plus les conséquences. Dans l’intervalle le séparant de sa mort, il avait beaucoup à faire pour laver son Souffle de ses Tourmentes. Pourtant, alors que se profilait la possibilité d’un rétablissement complet, une vérité s’imposait.
Il ne désirait pas mourir.
La possibilité de se laisser tomber entre les bras de la Voilée s’était offerte en de nombreuses occasions, depuis le départ de son frère pour les landes d’Emeraude, mais il les avait toujours refusées. Il ne choisirait de rejoindre son jumeau que lorsque le temps serait venu, lorsque ses serments seraient accomplis, lorsque son rôle serait joué dans la défense de l’Œuvre et des Cités. Mais la perspective de la mort comme d’un dénouement s’imposant à lui avait semblé être rassurant. La fatalité lui aurait retiré la charge de faire le Choix de se donner la mort. C’était une lâcheté, un aveu de faiblesse de son Souffle, qu’il se reprochait. Mais à présent que l’espoir était de nouveau permis… Il se savait désireux que l’Eternité ne lui soit, finalement, pas refusée.
L’Aigle s’étira, chassant les dernières traces d’engourdissement de ses muscles. Il s’habilla rapidement, laçant un pantalon large et une chemise blanche, laquelle brillait d’une lueur bleue, derrière un renflement au niveau du plexus. Il rejoignit Artiön après avoir chaussé des bottes et le retrouva dans la pièce qui tenait lieu d’infirmerie au sein de la caserne de la Citadelle. Árólindë s’assit devant le Vitaliste, acquiesçant à ses instructions. Quand elle vint, il accueillit la douleur alors qu’elle déferlait en pulses, la magie venant s’attaquer aux racines du Faern Ornë en lui.
Quand les Flux se retirèrent de ses chairs, il tremblait. Sa peau ruisselait de l’effort qu’il avait passivement fourni. Il s’était empêché de se raccrocher à la Lueur de son frère, mais à présent qu’Artiön s’était arrêté, il la serrait frénétiquement.
« – Merci, Heru Aran. »
Une ennéade. Un temps qui ne pesait pour rien s’il signifiait l’Eternité retrouvée. Mais un temps qu’il n’avait pas présentement.
« – J’y consentirai, Artiön, mais je ne peux pas sacrifier une ennéade de notre temps à tous les deux. Tu l’as vu de tes yeux. Le Nécromant harcèle l’Œuvre, et nous devons être là pour l’empêcher d’y prendre pied. Et plus que ça, puisque nous ne pourrons tenir indéfiniment sans payer un tribut trop lourd, il nous faut retourner en Aduram, avec la ferme intention d’éliminer la menace de manière pérenne. Cette opération, je veux la mener, et je ne peux pas attendre plus longtemps d’être soigné puis rétabli. »
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Les réalités du bord du gouffre [PV Árólindë] Sam 15 Juil 2023 - 21:30
- Soit. tu lui offres un hochement de tête entendu Je comprends.
Tu quittes ta place de guérisseur pour venir t’asseoir à côté du Daranovan. Un lourd craquement du bois du meuble t’arrache un sursaut alors que ton postérieur s’y pose, mais alors que tu laisses doucement reposer le reste de ton poids, il te semble bien que le lit de fortune puisse tenir.
- Tu as raison.
Tu parles d’une voix paisible et chaude, loin de ce que l’on pourrait attendre du Seigneur-Protecteur organisant avec l’un de ses lieutenants l’assaut de la forêt maudite. Et si tu parles ainsi, c’est parce que tu ne penses pas qu’Árólindë ait vraiment besoin d’échanger avec un « supérieur » ou même un autre « chef de guerre ». Árólindë sait très bien ce qu’il fait, ce qu’il fera, et ce qu’il doit faire pour le bien de l’Œuvre. Il est une chose cependant que ton Frère peine à faire pour son propre bien, c’est laisser d’autres prendre la relève du petit objet qu’il serre contre lui dès qu’il a besoin d’une béquille.
- Mais plutôt que de repartir à la hâte avec un nouveau groupe, je pense que tu devrais essayer de réunir ceux avec qui tu es parti lors de la dernière expédition. tu passes un bras autour des épaules du mage Aegden est assez pris en ce moment, donc je ne sais pas si j’arriverai à le convaincre d’y retourner, mais je pense que toi tu ne devrais pas avoir de mal à te faire entendre. tu lui offres un regard chaleureux, et un sourire fraternel, que quelque part, tu lui sais difficile à recevoir Donc ce que je te propose, c’est de remonter avec moi à Alëandir, de profiter autant que possible des ressources de la Capitale pour rassembler ton groupe et commencer à préparer le prochain départ, et de vous lancer dès que vous êtes prêts.
Une vérité à laquelle tu ne croyais pas totalement, mais que tu avais préféré avancer ainsi. Car certes, Aegden aurait certainement été difficile à arracher à ses responsabilités auprès des milices protectorales, mais si tu insistais pour que ce soit Árólindë qui l’invite à cette nouvelle sortie dans l’ancien Linoïn, c’était plus pour forcer le mage à prendre un temps loin de la ligne de front avant de plonger derrière que par peur de te voir refoulé par ton Mainyth.
Tu ne connais pas Árólindë, mais tu as connu son frère. Et si la ressemblance est frappante, elle l’est d’autant plus qu’il suffit d’observer le mage pour comprendre ce qui s’est brisé en lui quand sa moitié lui a été fauchée. Alors à le voir ainsi vivre une peine à peine dissimulée, tu as l’impression de leur avoir failli deux fois. Au premier parce que vous l’avez accueilli dans la petite famille qu’est votre milice des Monts Norn, mais que vous n’avez pas su lui donner l’occasion de vivre jusqu’à pleinement fleurir et voir sa famille de sang fleurir. Au second parce que lorsqu’il fut privé de la flamboyance de son frère, vous l’avez laissé s’éteindre loin de ceux qu’il aurait dû pouvoir appeler les siens.
Tu ne connais pas Árólindë, mais à le voir ainsi, tu ne peux t’empêcher de te sentir coupable, car tu as la sensation d’avoir abandonné un petit frère, pour lequel tu ne peux désormais plus que tendre une main sans l’appeler, en espérant non seulement qu’il la voie, mais en plus qu’il la prenne.