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 La rosée et le fenouil [solo]

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Wakadimandagu Kukirfilaï
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MessageSujet: La rosée et le fenouil [solo]   La rosée et le fenouil [solo] I_icon_minitimeVen 19 Avr 2024 - 12:21

La rosée et le fenouil [solo] 4mqt


1er jour de la 2ème ennéade de Verimios d'Hiver, an 21 du XIème cycle
A Napamassa, cité-capitale du peuple de Brââ

Il flottait dans l'air comme une curieuse odeur de fenouil. Celle-ci enveloppait la fraîcheur des Jardins Silencieux, qui n'avaient, en ce jour, de silencieux que le nom. L'endroit était consacré au culte des Ancêtres, mais le lieu saint était envahi ce matin-là d'une horde de Tandjalems, la caste supérieure des Hommes de Brââ.

Des religieux et des guerriers s'entassaient aux pieds des oliviers et des grands lauriers roses. Par l'œuvre de quelque magie, la floraison des parterres de roses, jasmins et lys semblait indifférence au froid hivernal, mais le vent soufflait malgré tout sa bise glaciale au travers des feuillages, faisant grelotter plus d'un membre de l'assistance. Comme à son habitude, cette élite guerrière, si prompte à sillonner le désert pour razzier les peuples voisins, peinait à se discipliner dans les espaces clos. Les guerriers dissipés bavardaient entre eux, ayant à peine la décence de le faire à voix basse ; ce chahut n'échappa pas à la reine Abakala, qui procédait aux rites et lisait les prières. Une ride de colère agitait la veine de sa tempe, mais elle ne s'interrompit pas pour les rappeler à l'ordre.

- Fait froid cette année, quand même.
- Ah ça, pour sûr. Ca caille tellement que j'en ai les baloches qui se resserrent, j'ai l'impression qu'elles veulent rentrer à l'intérieur.
- Je t'ai déjà dit, tu portes des pantalons beaucoup trop serrés. Je sais pas comment tu fais pour porter ça et chevaucher toute une journée, ça doit vachement t'irriter.
- C'est un vieux futal que j'ai hérité du grand frère, mais il était plus petit que moi. Il est mort dedans, ce con.
- Dis donc, c'est la reine qui sent le fenouil comme ça ?
- Fais gaffe, Kushek, pas si fort.

Avachi dans un fauteuil à droite de la souveraine, engoncé dans un plaid en fourrure de léopard, le Shiladar de la Porte considérait le relâchement de ses hommes avec un certain flegme. Les célébrations de Zumsibel étaient l'événement religieux de l'année pour le peuple de Brââ ; célébré par les puissants comme par les faibles - même si seuls les Tandjalems étaient admis dans l'enceinte sacrée des Jardins - il attirait à Napamassa les fidèles venus de toute la palmeraie. N'empêche ; on s'ennuyait ferme à écouter la reine Abakala lire les psaumes et faire les jérémiades d'usage. Un jour, il faudrait moderniser tout cela ; Wakadimandagu songeait souvent au fanatisme religieux des drows eldéens, dont les Hommes de Brââ auraient matière à s’inspirer. La foi vous cimente une civilisation de façon plus durable que la force des armes. Mais les religieux n'étaient pas prêts à voir le Shiladar se mêler de leurs usages ; les prières et les rites, le protocole cérémoniel, tout ça était la chasse gardée du clergé. En attendant, la reine poursuivait, mais l'agacement de la souveraine était de plus en plus palpable à mesure que l'on entendait certains s’esclaffer dans l’assistance. Elle va finir par faire une syncope, s'inquiétait Wakadimandagu. Vieille et obèse, la reine n'était plus au sommet de sa forme, même si elle s'efforçait de donner le change. Le maquillage dont elle abusait ne faisait que mettre plus en évidence les rides qui zébraient sa peau grasse, et les parfums mêlés à son odeur corporelle produisaient de curieux mélanges. Il jugea bon d'intervenir entre deux prières pour rappeler les siens à l'ordre ; se redressant sur son fauteuil, il tança sévèrement le plus dissipé d'entre eux :

- Kuçek, ç’est toi qui braille comme un gros phacoçère ? Boucle-la ou ze t’en colle une.

Le sourire de Kushek, qui exhibait ses dents immenses - ce n'était pas pour rien qu'on le surnommait le Crocodile de Tikelesset - se figea avant de disparaître peu à peu, sa figure se mouvant en l'expression la plus sérieuse qu'il soit capable de feindre. Kushek savait qu'il avait intérêt à faire profil bas, ces temps-ci. Deux ennéades plus tôt, il avait bien failli tout faire rater lors de l'attaque du convoi marchand des Mille Caves.

Wakadimandagu se laissa retomber dans son fauteuil. Tout en écoutant poursuivre la reine, le Shiladar laissait courir distraitement ses doigts sur la lame de son poignard sacrificiel. Il avait beau l'avoir nettoyée, on distinguait encore l'empreinte du sang séché de Marzaban Ambreroc sur le métal forgé. Il avait reçu pour ce forfait des gages considérables, qu'il allait à présent falloir employer à bon escient.

Les défis du Shiladar étaient nombreux. Dans la palmeraie, la croissance des trois cités brâânies atteignait son point de rupture. Il devait souvent tempérer les ardeurs des autres Sandjakbeys qui le pressaient de mener la conquête des territoires des autres peuples du désert ; il était ardu d’expliquer à ces idiots que les Hommes de Brââ avaient tout intérêt à laisser perdurer ces peuples pour mieux continuer à les exploiter, les piller et les rançonner. De toute façon, Brââ possédait déjà les meilleurs espaces cultivables de Zurthanie. Régner sur des étendues stériles de sable et de roche n'avait guère de sens si l’on n'y pouvait rien bâtir.
Il n'y avait pas que les guerriers avec qui il devait composer. Les Kiryas - la caste des commerçants et artisans - se plaignaient régulièrement de la pression fiscale à Esion, l'enclave sous contrôle drow qui gardait l’embouchure du fleuve Brââ sur la mer Olienne. Par Esion transitait l'essentiel du commerce des cités brâânies, mais Esion était sous le contrôle des drows eldéens. On n'y échappait qu'en empruntant la voie terrestre, à travers le désert, mais les trajets étaient infiniment plus longs, sans parler des dangers qui guettaient les caravanes, entre les pillards et les tempêtes de sable. Pour couronner le tout, son revendeur Mdlani l'avait informé d'un esclandre survenu sur la place du marché de Thaar, où l'on écoulait le produit des rapts et des pillages. Il semblait que la vente d'esclaves à Thaar se heurtât depuis peu à de petits mouvements populaires abolitionnistes. Le monde devenait fou.

Le Shiladar n'avait pas la solution à ces problèmes. Si son peuple avait vocation à faire la loi dans le désert, il lui fallait jouer le jeu de ses deux géants de voisins : les principautés de Thaar à l'ouest, le Puy d'Elda à l'est. Brââ n’avait pas les reins assez solides pour s'imposer devant de telles puissances. Pas encore, songeait le Léopard Astral, et probablement pas de son vivant. Il fallait savoir se montrer réaliste. En attendant, il se devait de ménager la chèvre et le chou et mener sa barque à travers les méandres sinueux d'un destin capricieux. Ainsi allait la destinée des peuples, et Wakadimandagu avait l'intime conviction qu'aujourd'hui, la survie et l'avenir de la civilisaion de Brââ se jouait davantage sur ce qui se passait en-dehors du désert qu'à l'intérieur.

Il plissa le nez alors qu'une odeur désagréable et passagère s'insinuait sous ses narines. Elle se mêlait à la fraîcheur et à la rosée du matin qui perlait sous les feuillages des Jardins. Comme une odeur de fenouil...
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