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| Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] | |
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Heracle Ypsilantis
Humain
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| Sujet: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Sam 15 Juin 2024 - 4:53 | |
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Quatrième jour de la 8ème ennéade de Verimios - Hiver An 21 du XIème cycle
L’heure du manger était échue depuis belle lurette et dans l’âtre de sa chambrée, crépitait un feu bien avenant, prompt à chasser la froidure de l’hiver désormais bien installé. Cette nuitée, nulle âme autre que la sienne n’arpentait ses appartements : sa plume allait et embrassait les vélins de sa pointe en y laissant rondement le passage de l’encre en son sillage. Bien que nombres en aurait cru impossible la chose, Héracle aimait à s’affairer à ce genre d’ouvrage, plus propre et serein que les basses besognes auxquelles il se confrontait au jour. Mais la solitude restait toujours aussi aigre, ainsi donc avec le temps, il avait développé quelques astuces pour rendre sa solitude moins aigre. Comme par exemple : encourager la venue à son chevet de donzelles charitables, dont le cœur se devaient d’être pour lui aussi ouvert que leurs jambons. Mais là! Ce soir n’avait rien de ceux-là, les épistoles s’étaient massées sur son pupitre et il se devait de faire montre d’efficacité, or deux bidasses tenaient la porte de sorte à ce que personne n’en vienne à perturber la quiétude du prince. Pourtant, bien qu’elles fussent armées de lames bien émorfilées, les bleusailles avaient laissées le portail de sa chambre se faire toquer à quelques répétitions. Las, il soupira sans retenue, laissant ce râle cuisant d’agacement enterrer le crépitement des moult rondins incandescents.
Et sitôt qu’il s’en alla incendier des pires calomnies le pauvre hère qui aurait osé violer sa quiétude, il se retint en apercevant le pas prudent de sa cadette de sœur. Calme, posée, à l’abri de la fureur latente qui vrombissait au sein de son frère, elle s’approcha de son bureau, un vélin décacheté à la patte.
« Un vélin nous est parvenu ce matin, Héracle. Celui-ci portait le sceau de l'Asharite et je me suis permise de l'ouvrir, mais... son contenu t'était adressé personnellement. Elle souhaiterait s'entretenir de quelques sujets avec toi. Je pense qu'il serait judicieux de ne point négliger cet appel qui pourrait être une main tendue en notre direction, alors... mets de côté tes griefs à son sujet dont nous avons déjà si longuement parlé et revêt ton manteau de Prince. Tu en auras peut-être bien plus l'utilité que ces braies perforées par les lames de tes maîtres d'armes » Empreinte de sagesse, d’un ton de voix prompt aux bons échanges, elle lui prodiguât aussitôt ses recommandations, comme si elle s’était attendue de se buter contre l’obstination de son commensal.
« De m'inviter en ses geôles salées pour me provoquer derechef, voilà bien aussi de quoi elle serait capable! Et ce mantel princier ne saurait endiguer mon animosité si telle chose venait à se réaliser. De quoi peut-elle vraiment vouloir discutailler, elle qui se targue si fort de la portée de son succès ? N’a-t-elle pas d’autres hommes sous la main à picorer, cette vilaine harpie de mes deux couillons ? »
« Nous nous connaissons désormais, elle et moi, et je la sais plus soucieuse que tu ne le crois. Elle porte en son cœur le désir de nous entendre, quand bien même n'est-elle point encore rompue à la possibilité d'être contrariée par un "non". Alors, Héracle, n'y va pas en pensant que tu réussiras à la changer pour en faire l'une de celles que tu as l'habitude de croiser. Apprends tout ce qu'il y a à apprendre et cherche à savoir tout ce dont elle pourrait t'offrir en échange de ton amitié. Celle-ci n'est point dupe et ne saurait omettre que l'on ne peut rien recevoir sans donner. A cela, laisse-là se poudrer d'ambition et contente-toi surtout d'écouter en te faisant cette promesse que rien ne sera jamais oublié, quand bien même cela ne saurait empêcher une "amitié" »
« La changer oui, j’ai bien rêvé à deux ou trois reprises de lui suggérer d’embrasser la pointe de mon coutelas, que je puisse lui creuser un deuxième fondement au niveau du crâne. Elle aurait fière allure, la salée! L’image de son dernier phrasé le séduisant, Héracle ne sut retenir un rictus rêveur, qui tôt fût abrégé par le raclement de gorge de sa sœur qui ne partageait pour le coup, rien de son sens de l’humour. C’est entendu ; j’irai en ses pénates et me conformerai à la bienséance, quoi qu’il m’en coûte. Mais s’il fallait que notre entrevue s’envenime de trop, il se peut ma sœur, j’aime mieux te prévenir à l’avance, que tes judicieux conseils ne trouvent plus chez moi l’oreille attentive qu’ils méritent. »
Quelques jours plus tard, en heure et date attendue par son hôte …
Assujettis à son ombre, Héracle se présenta aux devant du palais de l’illustre Shaheem accompagné d’une poignée de reîtres, tous aussi lourdement harnachés les uns que les autres. D’entre eux, l’intendant dépassa son maître et alla faire annoncer la présence de son riche débiteur.
« Qu’on en finisse céans, par le saint chibre biscornu d’Arcam. » chuchota à lui-même le Prince des mers, dans une ultime harangue de courage et de motivation.
Dernière édition par Heracle Ypsilantis le Mer 24 Juil 2024 - 2:11, édité 1 fois |
| | | Shaheem Angharad Sang-mêlé
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Jeu 4 Juil 2024 - 16:43 | |
| Ce jour-là était une journée affreuse, avec d’épais nuages laissant échapper une pluie froide, qui eut tôt fait de faire frissonner la Princesse de Sel. Elle avait beau se tenir tout prêt d’un poêlon plein de chardons ardents, il lui semblait que la froidure prenait possession jusqu’à ses os. L’hiver qui s’annonçait au dehors allait être parfaitement horrible et il tardait déjà de retrouver les douces chaleurs du printemps. Parfois, elle regrettait de ne pas pouvoir hiberner, comme ces animaux plus malins, qui fuyant la mauvaise saison, passait deux beaux mois à roupiller insouciamment dans leur caverne. La sienne de caverne était peut-être moins rudimentaire cela étant ; le palais Asharite, niché au creux des Soieries, était à l’aune de la beauté raffinée de sa cité natale. Il n’était ni trop ni trop peu, et elle regrettait de n’avoir sous les yeux que de pâles copies des bas-reliefs qui ornaient la ville côtière. Ces dessins finement ciselés étaient le fier héritage nisétien qui subsistait ; le même qui nourrissait son esprit revêche et sa soif de liberté elle en était convaincue. Comme si, au travers de ses velléités personnelles, c’était l’esprit puissant de ceux qui furent qui s’exprimait.
Une douce histoire qu’elle aimât se raconter pour se donner davantage de crédit. En réalité, elle n’était pas certaine de croire à ce genre de choses ; elle abordait ce genre de questionnement avec prudence, de peur que cela soit vrai sans être pleinement convaincue, à l’image de la fée Tüss qui hantait les marais. En outre, faute de preuves, elle faisait montre de mesure ce qui était assez rare pour être noté. Sûrement d’ailleurs qu’elle ne ferait pas preuve de la même indulgence quand s’annoncerait à sa porte le protagoniste du jour. Shaheem ne trépignait vraiment pas d’impatience à l’idée de son entrevue, mais c’était la seule chose raisonnable à faire. Après son dernier rendez-vous avec l’épais Hippopotame, il lui était apparu qu’elle devait s’efforcer de mettre dans sa poche ses positions les plus butées. De toute façon, pour mettre à bien leur œuvre, ils se devaient d’allier leurs forces avec les gens les plus propices. Et au conseil, il n’y avait pas cinquante bonhommes digne du peu d’intérêt qu’elle était capable de porter à quelqu’un d’autre qu’elle-même. Alors, bon gré malgré, elle allait composer avec la seconde moitié de l’Hydre du Port.
L’entremise entre Héracle et elle était plutôt mauvaise ; le garçon tout engoncé dans ses prérogatives masculines s’était fait un devoir à rendre la conversation sinon difficile, au moins inutile. Il lui avait fait l’effet d’une coquille vide, pleine d’orgueil et pétrie de convictions qu’aucune parole censée n’aurait su pénétrée. Bref, il lui avait fait l’effet d’un bulot. Ou mieux ! D’une moule. Ce qui, en l’essence, était peu flatteur pour le pauvre mollusque. Cependant elle s’était laissée dire qu’il s’agissait surtout d’une colère testostéronnée, d’une profonde tristesse d’un enfant esseulé à qui incombait désormais toutes les charges quand, de sa vie, il n’avait connu que la douceur de la paresse. Cela l’avait d’ailleurs étonnée ; la Salée connaissait plutôt bien la génitrice – une femme vive et forte. Elle l’imaginait mal si mal élever son garçon. Cela ne pouvait donc être que de la faute du père : c’était eux qui portaient les tares de la débilité masculine. D’ailleurs, elle était presque certaine qu’un jour, son oncle s’était félicité qu’elle ne soit pas un mâle. Ces derniers étaient plus revêches, plus à même à la fureur et surtout, avait une sensibilité démesurée quand la moindre chose touchait à leur virilité.
Une tête rousse passa le seuil de son bureau d’affaire. Elle n’avait pas pris la peine de frapper, et si cela l’agaça, elle n’en fit aucune remarque. Avec Mihai, c’était comme pisser dans un violon ; elle gardait sa salive pour son invité. Sa compagne lui offrit un sourire vague, de ceux qu’on ne distinguait que peu sur ces lèvres toujours closes. Shaheem sentit l’espace d’une respire son pouls s’emballer, avant que ne sonne le glas dans cette bouche trop belle pour être mortelle :
« — Il est arrivé, où dois-je le faire mener ? — Fais-le venir ici, nous y serons parfaitement à notre aise.
Si elle aurait installé un Ozkûn dans un petit salon non loin des cuisines, elle était persuadée que le bureau était le lieu le plus propice pour converser avec Héracle. Il lui semblait, en réalité, que cet homme ne comprenait et ne respectait que deux choses : sa sœur et les affaires. N’étant pas aveugle et moins chiante que la première, la seconde option laissait à penser qu’il lui octroierait un peu de crédit s’ils venaient à communiquer dans le seul langage qu’ils parlaient tous les deux ; le commerce. La pièce était spartiate : sur une large table centrale s’étalait une immense carte du continent, sur laquelle avait été habilement enfoncés quelques clous de couleurs, et des lignes tracées. Sous la fenêtre, son bureau regorgeait de plis en tout genre. Aucun n’était d’une importance capitale, mais à eux tous, ils représentaient sa puissance et son occupation principale. Il régnait dans l’air une odeur étrange de poussière, de liqueur, de cuir et d’encre qui l’apaisait. Une odeur familière, celle du travail, celle d’un empire ; le sien. Et il ne fallut pas plus de cinq minutes pour qu’on introduise le Prince dans les formes.
« — Votre Altesse, je suis enchantée de vous voir ici aujourd’hui. Installez-vous je vous prie.
Lentement, elle tira d’un placard une carafe fermée, dans laquelle brillait un liquide ambré, qu’elle versa sans attendre dans deux verres de cristal. Il leur faudrait au moins ça, pour la bataille à venir.
— Tenez je vous prie, de quoi faire passer la désagréable marche jusqu’ici, ainsi que l’attente. Une liqueur naine, de premier choix. Elle glissa jusqu’à lui, tendant le contenant en vidant une gorgée du sien. Je gage que cet entretien aura au moins cela de réussi. »
La pique était trop belle, et le sourire honnête. Il valait mieux ironiser de leur dernière rencontre que de faire semblant pour le reste de la réunion. Ils ne s’étaient guère entendus, mais était-ce une fatalité ? Au moins, ils ne perdraient plus de temps en banalité. Après tout, elle n’en avait rien à faire de savoir comment il se portait depuis la dernière fois, et sûrement que lui non plus n’en avait rien à ciré. Ils pourraient donc en venir plus rapidement aux faits et à ce qui était essentiel.
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| | | Heracle Ypsilantis
Humain
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Sam 6 Juil 2024 - 4:08 | |
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Les courtoisies semblèrent, pour une fois, avoir été respectées. Il n’eût à patienter outre mesure avant qu’une crinière de feu, au faciès avenant et aux yeux de biche se présente à lui en bonne et due forme. Charmante en tout point, autant dans les manières que les allures, Mihai sollicita le Prince des Mers pour qu’il l’accompagne dans une bambée nécessaire, de sorte à le guider jusqu’au cœur du palais ; là où patientait sagement la Reine des lieux. Obtempérant en silence, l’Ypsilantis laissa couler ses billes chocolatées ainsi que son attention sur les décorations des lieux. Lui qui avait en sa possession autant d’intérêt pour l’architecture ou l’agencement des bibelots que de considération pour le petit peuple, dût avouer pour l’occasion qu’il y avait ici quelque chose de plaisant à l’œil. Non pas qu’il remarqua les largesses et les richesses des ornementations murales, mais plutôt qu’il semblait, pour le temps de ses pérégrinations dans les couloirs, s’être éloigné la sublime Thaar. Oui, il agréa et appréciât à ce que l’Asharite ait apporté un peu de ses chères pénates jusqu’ici. Lui-même avait encore quelques pensées pour ses premiers amours, de ses tendres années de jeunesse passées à moissonner les richesses des bas-fonds marins de Feldorn.
Enfin, ils arrivèrent à destination et après qu’on l’ait annoncé, Héracle se présenta aux devants de la Salée et inclina le chef avec déférence. Son faciès n’était guère pourvu de joie, ni même de faux semblants, de ceux que l’on réserve aux indésirables convives qu’on ne chercherait à blesser, par exemple. Tout de même, sur les traits de son visage ne planait nulle animosité, point plus de cette aigreur qui en avait terni les engageants reliefs lors de leur dernier coudoiement. Non, les airs qu’il arborait étaient ceux du devoir, des affaires qui se devaient d’être dites et bien dites.
- Le plaisir est ma foi, bien partagé, votre Altesse, soutint Héracle poliment en de premiers échanges. Il accueillit le calice d’une patte tendue et alla, à la suite de sa comparse, y tremper les lèvres. Fort heureusement que sa bouille en fût masquée par le godet, car il ne sut réprimer un sourire à la pique lancée! Le premier en son genre, miraculé qu’il était, de naître après si âpre impression d’elle!
- Maintenant que j’y goûte, votre Altesse, vos mots m’apparaissent comme abondants de justesse et ne pourraient être plus vrais. Il redressa la coupe avec légèreté en sa direction, de sorte à la gracier d’un remerciement pour cette première politesse alcoolisée. Une fois fait, il pinça les lèvres quelques secondes, plissa le regard et détourna ce dernier comme si l’hésitation lui avait soudainement empoigné les tripes. Il eût souvenance, mémoire des mots encore frais de sa jeune sœur, de ces paroles opulentes de sagesse et de pondération … Il ravala sa fierté, rapporta ses billes marrons vers la Salée, puis enchaîna d’un ton de voix solennel.
- Notre dernier entretient m’a laissé sur la langue un goût bien amer, il est vrai. Il se peut que des circonstances défavorables aillent rendu coulantes les sentes sur lesquelles nous nous étions engagés et pour cela, Shaheem, je m’en désole très sincèrement. Tous deux nichés sur le promontoire de la sublime Thaar, il m’apparaît nécessaire, voir même primordial, que nous ayons la décence d’écarter nos différents, cela autant au profit de nos affaires que de la prospérité de la cité. Or je tiens à vous témoigner mes excuses les plus plates, qu'elles aient ou non valeur à vos yeux.
Oui, il avait conchié son orgueil et s’était assis dessus. C’est que sa deuxième tête, celle de sa cadette de sœur, soufflait inlassablement à son esgourde et même lorsque ses instincts les plus sanguins cherchaient à prendre le pas sur le bon sens et le devoir, elle était là, fidèle au poste, à ramener cette épave en devenir sur le droit cap. Adonia, alliée à son amour de l’or et des affaires bien brassées, pouvaient venir à bout de son animosité pour l’Asharite, maintenant il en était certain. Du moins, jusqu’à preuve du contraire …
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| | | Shaheem Angharad Sang-mêlé
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Lun 8 Juil 2024 - 15:36 | |
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Si elle n’avait été élevée convenablement, nul doute que sa tête se serait muée en un sot étonnement tant l’Espadon la pris au dépourvu. Voilà donc que l’homme viril en proie aux affres de sa condition trouvait soudainement le chemin du bon sens et de la mesure ! Là, quelle douce nouvelle que celle-ci ! Elle se douta un peu que la seconde tête avait dû faire ses recommandations au préalable, mais qu’il les suivirent si précisément et avec autant d’application l’impressionna grandement. Peut-être que malgré son atrophie cérébrale dû à l’utilisation prolongée de son pénis pour toute défense n’était-il pas qu’un idiot ; voilà qui avait de quoi rasséréner la Princesse, qui avait elle aussi mis de l’eau dans son vin pour s’assurer de la bonne tenue de la suite de ses projets. Adonc, aux derniers mots de son invité, elle sourit à nouveau, s’installant d’un geste fluide face à lui. Les choses ne seraient pas si pénibles que cela s’il se tenait non plus comme un goujat mais comme un homme civilisé.
« — Chacun de vos mots a de la valeur Messire, soyez-en certain. Et ce lieu ne fait pas exception ; j’apprécie sincèrement votre application à faire de notre précédente entrevue un souvenir lointain.
Elle sirota une nouvelle gorgée, profitant de la sensation chaude qui succédait à l’alcool. Pour sûr que sa parole était d’or, il était à présent Prince-Marchand de la cité. Une tâche ô combien ingrate qu’elle partageait avec lui, et qui les obligeait céans à faire preuve d’opiniâtreté. Toute les relations ne commençaient pas par une franche réussite, mais il était indispensable pour Thaar que la leur s’améliore par la suite. Les Ypsilantis avaient été éduqués tout comme elle pour accomplir cette tâche, et malgré leur dissidence, il demeurait ce elle-ne-savait-trop-quoi qu’elle comptait bien exploiter. Avec Ozkûn, ils incarnaient une nouvelle génération prometteuse, qu’elle espérait prompt à faire changer les choses durablement. L’Asharite avait déjà commencé les tractations avec la cadette de l’Hydre, restait donc maintenant à convaincre l’Aîné. Ainsi, il rejoindrait cette ligue inédite et ils pourraient enfin apparaitre comme un contrepouvoir viable. Car elle n’était pas sotte : tant qu’ils n’auraient pas les arguments nécessaires, les indécis et les mous du bulbe continueraient à octroyer à Maralina une place qu’elle ne méritait pas.
— J’ai d’ailleurs moi-même, un objectif similaire. Je vous avais promis une audience pour que nous puissions parler affaire dans des conditions, disons, plus favorables, et nous voici.
Lentement, elle fit tourner le liquide ambré dans son verre, laissant traîner un regard appréciateur dans le vortex formé par le mouvement. C’était maintenant qu’arrivait sa partie préférée. Les mondanités avaient tôt fait de l’ennuyer ; si cela faisait partie de sa caste, elle était bien meilleure en commerce – et d’aucun à présent douterait de son implication politique. Elle avait de grandes ambitions, pour elle-même mais surtout pour Thaar dans son ensemble. Il lui faudrait indéniablement soutiens et appuis, des gens sûrs, qui partageaient sa vision du monde nouveau. Mais l’Asharite devait se montrer prudente ; plus le poisson est gros, et plus il peut nous faire passer par-dessus bord si l’on n’y prend pas gare. Elle ne goûtait que peu à la pêche à l’espadon, mais quelque chose lui intimait que toute chose devait être avisée avec justesse. Si elle avait déjà l’assentiment de la soeurette, elle restait sceptique sur la capacité intellectuelle de son commensal ; elle pariait simplement qu’il partageait les mêmes vélléités intrinsèques de faire bouger les choses dans le bon sens – c’est-à-dire, le sien.
— Dîtes moi, comment se portent vote entreprise ? L’hiver qui s’annonce ne présage rien de bon, et je crains que nous ne soyons tous les obligés du temps capricieux. J’espère que la mer vous restera favorable autant que faire ce peu. Vous portez assez de malheur pour la saison, votre Altesse. Mais je crois que les intempéries ont cela de bon : ils nous cloitrent dans la ville, et nous avons donc bien plus de temps à accorder à la politique quand nos commerces s’essoufflent. Je crois d’ailleurs qu’il serait de bon ton d’organiser une séance du Conseil bientôt. Nous n’avons guère eu l’occasion de vous introduire, ni vous ni le successeur des Milles-Caves.
Elle se redressa un peu, sondant les pupilles noisettes de son invité. Jusqu’où pouvait-elle aller ?
— L’arrivée de nouveaux conseillers est toujours salutaire, cela permet d’enrichir la cité par de nouveaux projets. Avec votre expertise du port, nul doute que tous voudront entendre ce que vous avez a proposer. L’exercice n’est jamais aisé lorsqu’on débute, mais je crois que vous vous en sortirez à merveille. Même si, trois fois hélas !, seul l’avis d’une seule personne ne compte réellement aujourd’hui. Elle soupira. Au moins sachez que je me fais fort de partager avec votre famille une entente pérenne. Et si le Conseil reste sourd à vos propositions, vous trouverez ici quelqu’un tout à fait prête à vous aider autant que faire ce peu ».
Il ne fallait guère être une lumière pour entendre que derrière la plainte se cachait une réelle critique de l’institution que représentait aujourd’hui, la politique Thaarie. Endormie sous les bons conseils de la Princesse en guenilles, la ville s’était laissée attendrir par les deux grosses mamelles de l’Uldal’Rhiz. Mais Shaheem n’en démordait pas : sa commensale était un danger pour leur nation, et l’indépendance de leur territoire. Elle avait mis bas d’affreux batards qui, tôt ou tard, finirait par ouvrir grand les portes de la cité Eternelle. L’Ithri’Vaan avait assez soupé de la domination eldéenne, et des demi-mesures. Il était temps de rebâtir un territoire fort, et même plus encore… Il était temps de faire renaître l’empire perdu.
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| | | Heracle Ypsilantis
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Mar 9 Juil 2024 - 17:30 | |
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Bientôt viendrait le moment où la guenaude de sel se départira de son si joli et avenant mantel de mondanités mielleuses. Alors ses vraies couleurs s’afficheront et viendront ternir les douces lueurs du jour, car malgré le bonheur que lui procura les lampées d’alcool ingérées, il ne pouvait en oublier la réelle nature de l’Asharite. Griffes et crocs acérées, le rapace cherchera fort évidemment à le ponctionner jusqu’à la moelle ; il n’en restait qu’à lui de rester sur ses gardes. Et pour se faire, certains sentiers lui apparaissaient plus sauf. Il pouvait, d’abord, chercher à se hérisser plus ardemment qu’elle, chercher à l’effrayer pour qu’elle reparte d’où elle vienne. Ou encore il pouvait lui lancer une proie sur laquelle se faire les dents, détourner son attention pour qu’ils aient, au moins jusqu’au conseil, un semblant de bonne entente.
- Imparable est l’hiver et les affaires doivent se courber face à sa venue, cela est et a toujours été ainsi. En cette prime jactance, il se douta ne rien lui apprendre, elle qui aussi, était très certainement sous le joug des intempéries. Aussi ais-je à cœur de concentrer mon attention sur ce dont je peux avoir influence. Les affrètements se doivent de voir leur cargaison allégée de peur d’être freiné dans leur acheminement par des amoncellements glaciaux. Leurs prix sont vus à la hausse, évidemment, de sorte à couvrir autant les honoraires des équipages que le risque encouru lors de leur passe dans l’Olienne. L’expérience apporte au moins cela de bon : elles nous apparaissent comme plus évidentes les choses dont l’emprise nous est à portée de main. Il avait marqué une pause pour retourner tremper ses lèvres dans la liqueur, ne pouvant feinter le déplaisir de sa dégustation. Il me semble, aussi, que dans la mesure où pareil conseil viendrait à voir jour, nous puissions nous entendre sur la manière de son approche. Nous avons là, malgré l’hiver et je le mentionnais, possible emprise sur le cours de son déroulement.
Peu de temps s’en fallut pour que de ses affaires, le vif du sujet vienne se poser sur la table. Le cœur de leur rencontre, au-delà des possibles avenues commerciales entre leurs deux maisons, résidait très certainement dans le développement de cette rencontre au sommet. Au vrai, il savait que son intronisation, ainsi que celle de son pansu semblable, allait faire partie des politesses préambulaires. Aussi bien discuter franchement entre eux, tandis qu’ils étaient à huis clos et que d’autres oreilles ne chercheraient pas à capitaliser sur leurs ambitions les plus chères.
- Il se peut que l’auto proclamée Reine de la chair se peine de constater la portée de sa voix, si de bonne fortune les nôtres venaient à s’accorder au même diapason. Une fois que l’auguste portail de la salle se sera clos, ses richesses ou ses influences ne viendront pas ajouter poids à ses avis : elle ne sera pas plus princesse que vous ne l’êtes, Shaheem. Et j’y veillerai, quitte à en sortir le dos peinturluré de cibles, rajouta le Prince, faisant suite aux prompts engagements de sa commensale. Il y avait dans sa voix, ce je-ne-sais-quoi de détermination, laissant à belle vue de l'Asharite preuve de sa détermination. Ou de son aliénation, c'est selon. Quant à savoir si l’assemblée cherchera à lever le nez à mes propositions, l’avenir nous le dira très certainement. Je pourrais d’ailleurs, me voir fort aise d’entendre vos avis à ce sujet. Mais plus avant, dites-moi … Il dessécha son calice de son contenu dans une dernière gorgée, reposant ce dernier sur la table qui le jouxtait. Comment s’est déroulé votre expédition avec le petit peuple ? L’aile blanche aurait-elle poussée ou lancée en vous des idées nouvelles, de celles dont nous pourrions, par exemple, tirer intérêt commun ?
De cette aventure pittoresque, il n’en avait odit que quelques échos de sa cadette, dont elle-même avait été mise au courant après son départ, lors de la visite de la Salée. S’informant et cherchant à connaître les avenants et aboutissements de sa quête aux pégus, il espérait qu’elle donne suite à cette idée, charmante à souhait, dont elle fit mention lors de leur dernier et bien trop court échange. Celle, par exemple, qui concernait la protection des si chers et précieux habitants de Thaar la Sublime.
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| | | Shaheem Angharad Sang-mêlé
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Mer 17 Juil 2024 - 13:34 | |
| Shaheem ne boudait pas son plaisir. Cette conversation était décidemment de meilleure augure que la précédente, et bien qu’il lui paraissait encore un peu vert dans la pratique, nul doute que le petit poisson du Port deviendrait bien assez tôt un de ceux sur lesquels il faudrait compter. Parce qu’outre sa verve, il avait à son oreille le souffle chaud d’une cadette plus dangereuse encore. Sous ses airs d’érudite élevée en sainteté, elle avait passé une journée assez éclairante sur le curieux duo fraternel ; elle pourrait bien se défendre de velléités politiques, Adonia n’était guère mieux que son aîné, et contrairement à ce dernier, rien avec elle n’était du fait du hasard. Elle était bien trop ennuyeusement intelligente pour cela. La seule parade face à l’Hydre du Phare Céladon restait donc de prévoir au mieux leurs intérêts et de s’y intéresser juste assez pour paraitre amical. Et puis, avec un peu de chance, Héracle disait vrai : ils avaient bien plus à partager qu’il n’y paraissait de prime abord et alors les tractations se passeraient bien mieux. Mais n’ayant encore le don de voyance, il lui faudrait faire preuve de la pire des choses ; la patience, cette vertu douloureuse qui faisait défaut à tant de leurs commensaux. Il lui faudrait bien se forcer un peu. C’était là toute la complexité et la rudesse de leur métier, après tout. Toujours dans ce même sourire torve, amusée, elle bu une pleine lampée profitant de la douce brûlure, les yeux figés dans les siens.
« — Oui-da, Héracle, cette visite n’était pas dénuée d’intérêt, mais je gage que votre sœur vous en a fait le détail. C’est une femme vive, qui ne semble pas dénuée d’idéaux. Je respecte cela, et je gage qu’elle ferait pour vous une conseillère toute choisie. Son intelligence surpasse sûrement la vôtre comme la mienne, et celui qui refuserait de l’entendre serait un sot. Mais voyez, je crois que vous et moi sommes plus proches encore.
Elle se pencha en avant, les avant-bras posés sur ses cuisses, tandis que tournait le liquide ambré entre ses genoux. Il était temps qu’ils se mettent à parler la même langue. Et pour son invité, cela impliquait qu’il accepte, quelque part, qu’une femme puisse être son égal – quoique l’idée lui déplut au plus haut point. Après tout, la Princesse de Sel était plus charmante et sûrement bien plus subtile qu’il ne serait jamais. Cependant, on ne pouvait faire de gâteau sans casser des œufs : la perte d’un peu de sa dignité ce n’était pas si cher payé si, in fine, les deux familles s’accordaient enfin. La responsabilité de sa charge, en somme, indiquait qu’il fallait parfois faire preuve de concessions.
— Vous êtes pragmatique, et c’est là tout ce que l’on demande à un Conseiller. Les idéaux sont bons pour les libres penseurs, les artistes et ceux qui ont à cœur un avenir trop lointain. Nous, nous avons je le crois le poids de l’urgence et de l’inéluctable. Et je vous crois tout à fait capable de comprendre ce qui m’a poussé au bain de foule. N’avez-vous pas vous-même dit que vous n’accorderiez à la Princesse de Chair que la place qui lui est dû, et non celle qu’elle doit avoir ?
Ses lèvres bougeaient avec fluidité, et il y avait quelque chose de félin alors qu’elle se tenait, voutée, comme l’aurait fait n’importe quel homme qui voulait tenir son ami dans la confidence. Elle est était presque certaine, l’air ambiant s’était mué, et son souffle enivré par la liqueur rendait l’ensemble plus chaud, plus tendu, et bien plus criant de vérité. La tête la plus stupide du dragon bicéphale se tenait là devant elle, et elle s’essayait à un tout autre genre d’exercice qu’avec le gros Ozkûn. Non, l’Ypsilantis n'était pas un homme qui aimait la causette, il était dans le sang comme les meilleurs des chevaux de course. Il lui fallait juste le bon cavalier pour que le bougre s’engouffre dans la course. C’était exactement cela ! Elle devait le motiver par des choses qu’il serait à même de comprendre sans détour, des choses qui feraient vibrer jusqu’à son âme ; car à présent, elle se baignait dans la certitude que le pauvre n’était pas le plus prompt à la raison. Rompant le contact visuel, elle se leva gracieusement, et se laissa porter jusqu’au carreau vitré non loin, regardant au travers la ville qui s’étendait à ses pieds.
— C’est là que réside le vrai pouvoir, Héracle. Il n’est ni au le plus riche, ni au plus belliqueux, ni à celui qui porte un titre. C’est un concept aussi abstrait que les courants philosophiques qu’étudie votre sœur, inventé de toute pièce. Mais il repose sur un fondement puissant, bien plus puissant que toute les autres choses sur cette terre. C’est la croyance qui octroie le pouvoir.
Elle se détacha non sans regret du paysage, gardant en mémoire les toits qui se découpaient sous la pluie d’hiver, avant de faire volteface pour retourner à son observation polie de l’Espadon.
— Nous sommes ce que nous sommes uniquement parce que là, dehors, les gens s’imaginent que nous possédons quelque chose qui leur fait défaut. Mais il arrivera un temps, bientôt, où lassés de leurs œillères, ils placeront cette foi en quelqu’un d’autre que nous. En quelque chose de plus dangereux je le crains. Héracle, il est temps que la Haute-Ville se rappelle de pourquoi ils sont là où ils sont. Nous devons protéger notre peuple de la menace à nos frontières, et pour cela, nous devons les protéger d’eux-mêmes, en leur ôtant plus tôt que tard toute cette détestation de ce que nous représentons. »
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| | | Heracle Ypsilantis
Humain
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Jeu 18 Juil 2024 - 4:35 | |
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À cet instant précis, à cet exacte moment où elle fit mention de sa cadette, comme quoi elle aurait en sa possession les plus menus détails de sa singulière sortie, sa mâchoire voulue se décrocher. La bouche légèrement entre-ouverte de stupéfaction, une salve de clignements de paupières le ramener à la réalité. Je m’en vais lui rappeler quelle est sa place, à cette bigleuse dinde, pensa-t-il amèrement. Pour le coup, sa jeune sœur s’était bien gardée de lui faire la narration de ses péripéties et s’en était tenue au secret quant à son implication dans les étranges desseins de la Salée. Une saillie qui lui épargnait à coup certain les avis furibonds du prince qui ne portaient en son cœur que bien peu d’espace pour le grouillot moyen. L’Espadon de l’Olienne se contenta d’acquiescer mollement en ce qui attrayait les jolies proses dictées en faveur d’Adonia. En arrière-pensée toutefois, il préféra pour l’heure s’imaginer de quoi seraient faites les invectives qu’il réserva à sa parente. Enfin, il prit ses aises et conquit d’un bras tendu le cruchon de liqueur pour s’en verser à nouveau ; n’était-ce pas façon de faire dans la famille que de noyer ses soucis, fussent-ils fait de pensées tourmenteuses que de corps indésirables? Il étancha sa soif et tourna net la page dont les lignes lui faisaient tant grincer la dentition.
Puis, dans la chancellerie, par quelques degrés l’endroit semblait s’être avivé.
Son menton se froissa légèrement. Il passa une main contre sa barbe bien taillée d’un geste perplexe. Son regard pers se plissa également, tant l’incrédulité l’avait gagné. Lui faisait-elle du charme ou commençait-il à apprécier la princesse saumurée ? C’est qu’auparavant elle lui avait semblé tout sauf avenante, encore moins attirante! La bougresse s’était bien débrouillée pour qu’Héracle n’ait pour toute émotion que de dégoût envers elle. Il l’avait trouvée petite, mesquine et dotée d’une tête si incommensurablement grande, que sous aucun prétexte il ne put lui prêter quelconques qualités. Pourtant, à mesure que s’enchaînèrent les échanges, il dût constater qu’au moins, elle restait fidèlement campée sur ses idées. De l’âpre entretient qu’ils s’étaient échangés, s’il est bien une chose dont il avait ce jour’dhui souvenance et dont elle ne démordait guère, ce fût bel et bien son grand intérêt pour les petites genses. Par maintes occasions la Princesse s’était faite point d’honneur à taper sur ce même clou, comme quoi elle avait à cœur les intérêts du petit peuple et à fortiori leur protection. Passait-elle sur ses épaules une chappe de bienveillance, dont elle espérait jouir du confort que lui apporterait les hourras des gueux ? Ou bardait-elle ses réelles intentions derrière les louables intentions dont elle faisait si fièrement l’étalage ? Qu’à cela ne tienne, de sa logorrhée, qu’elle fût motivée d’une raison ou d’une autre, il préserva le seul et unique passage qui piqua son intérêt : la défense du peuple et, par conséquent, de son propre cul.
- Ce sont là des paroles fortes de sens, qui relatent un problème à la solution on ne peut plus complexe. Nous représentons tout ce qu’ils n’auront jamais, pas même dans leurs rêves les plus fous. Vous aurez beau leur jeter du pain et du raisin tant que vous le voulez, vous ne les délivrerez pas leur misère, qui les tire chaque jour un peu plus dans la jalousie et la haine des images que nous projetons. Que vos esclaves soient les mieux traités, ils ne verront que les entraves de fer qui ligotent leurs poignets meurtris. Vous pouvez dilapider votre fortune, à même mesure que les rats, ils reviendront quêter leur fromage dans l’espoir que quotidiennement leur morceau voir plus généreux. Nous pouvons juguler l’hémorragie de la mauvaise presse qui nous oppresse, certes, mais obtenir l’approbation, voir même l’amour du peuple me semble aussi chimérique que de voir le Vatna exploser et emporter avec lui les peaux noires qui en peuple le cœur.
Il avait rejeté la première partie des déclarations de sa commensale, mais cette fois-ci, à l’inverse de leur prime rencontre, dans un respect certain. Son timbre de voix relatait qu’il la considéra comme son égal, bien que la teneur de ses propos ne semblât guère emprunter la même sente.
- Par contre, comme vous dites, s’il venait à échos que les Princes aient mêmement à cœur la protection de leurs ménages, il n’est guère impossible que savoir leur demain certain, suffise à redonner aux Princes leurs lettres d’or. La peur n’est-elle pas après tout, la mère de l’anarchie et du chaos ? En offrant aux petites genses l’égide qu’elle mérite, un pavois derrière qui Thaar pourrait trouver refuge, oui, je crois que nous pourrions endiguer la grogne qui secoue les fondations fragilisées de notre mère patrie.
L’idée simple que pourrait voir naître pareil projet que celui de la défense de Thaar fit briller plus que jamais les mires du Prince. Fort de sa queue d’homme, comme elle le penserait certainement, Héracle s’enhardissait séance tenante lorsque de sujets martiaux venaient à propos. Sa poigne s’était raffermie contre l’accoudoir de sa dextre, impatient de savoir si elle allait abonder en son sens où tuer dans l’œuf l’intérêt qui le semblait tant le faire vibrer.
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| | | Shaheem Angharad Sang-mêlé
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Mar 23 Juil 2024 - 13:35 | |
| Un petit rire s’échappa de ses lèvres orphelines, laissant à sa main le soin de la liqueur et à son esprit l’étroitesse de l’Ypsilantis. Adossée au cadre de la fenestration, elle le regardait avec l’intérêt d’un rapace pour un lapereau ; Dieux que cet homme manquait de vision. Elle ne pouvait l’en blâmer, sa mère ne l’avait guère mêlé à la politique, laissant sûrement les subtilités de son langage à la cadette. Mais aujourd’hui, Héracle ne pouvait plus se dédouaner de son titre. Et il serait bon pour lui et les affaires familiales qu’il apprenne les choses plus vite. Il n’y avait guère de Prince qui subsistait en négligeant la piétaille. Les gueux reprenaient toujours leur dû, d’une façon ou d’une autre, et bien qu’il lui était pénible de l’admettre, cela attristerait sûrement Shaheem si le Phare Céladon venait à tomber. Non pas qu’elle prêta quelconque intérêt à leurs affaires pour l’heure, mais parce qu’elle restait convaincue qu’ils seraient capables de grandes choses pour peu qu’ils marchent dans le même sens. Même le gros Hippopotame l’avait compris : c’est que par chance l’animal avait les jambes plus courtes que ses idées.
Et quant à son brave invité, elle ne s’y était pas trompée. Le bougre était à l’image de tous les hommes ; il n’entendait que la violence et la peur. Mais au moins, il entendait et c’était déjà bien assez. Elle se fichait pas mal des moyens, pour peu que les résultats portent leurs fruits. Et cette récolte-ci, la Princesse de Sel l’imaginait salée pour leurs ennemis. Il faudrait bien entendu ménager les ardeurs de l’Espadon, mais pour le moment, seul un possible accord l’intéressait. Comme pour les mules, il valait mieux y aller avec une seule information à la fois, pour ne pas frustrer le bestiau de trop. Et s’il n’était pas complètement idiot – ce qu’elle aimait à penser à présent -, il irait chercher conseil auprès de la plus avisée de tous. La moule aveugle était une putain d’opportunité pour le conseil, et tout à la fois un fardeau qu’ils devraient gérer avec parcimonie. Il était certain que se servir des capacités philosophico-cognitives de la Perle serait un atout, pour peu qu’on ne lui donna pas trop à manger, ni aucune raison de se désintéresser de la cause. Car il lui avait semblé que la bougresse était aussi têtue que son aîné, et que si une chose venait à l’ennuyer, elle balayait de la main tout intérêt. Shaheem irait même plus loin, en imaginant fort bien Adonia s’en donner à cœur joie pour mettre des bâtons dans les roues par simple esprit de vindicte.
« — Je crois, Héracle, que vous prenez le problème à l’envers. Nous nous accordons sur l’importance du retour d’un état uni, fort et stable. Et cela commence bien sûr par une capacité accrue à défendre ses ouailles. Mais là où nos philosophie divergent, c’est que contrairement à vous, je ne crois pas possible d’imposer de si larges changements au peuple sans que cela ne nous retombe sur la gueule.
Elle avait laissé tomber le langage polissé pour des termes qu’il serait mieux à même de comprendre. Pour autant, elle demeurait calme, sur le ton de la confidence. Elle n’était point en colère ou confrontée à l’Ypsilantis, bien au contraire. Elle commençait simplement à dérouler le fil de ses pensées – du moins, juste ce qui lui serait utile pour la suite.
— Vous avez raison en une chose : la peur est un moteur puissant. Toutefois, il serait bien mal avisé de croire que nos ennemis ne puissent l’utiliser tout autant que nous ; si bien que pour que votre principe fonctionne, il vous faut une chose plus importante encore. Nous devons instaurer une ère de loyauté. Voyez-vous où je veux en venir Héracle ?
Elle lui offrit un large sourire carnassier, qui aurait tôt fait de rappeler au monde entier qui elle était vraiment : la Princesse de Sel, héritière d’un territoire clef, et d’une fortune certaine. Elle était Shaheem Misara El’Angharad, nièce de Brahem El’Angharad, élevée pour diriger. Il semblait naturel de ne pas mentionner qu’elle ne faisait guère la charité pour la charité. Tout avait un dessein, et elle connaissait sa place en ce monde, comme elle reconnaissait la place de son commensal, confortablement installé devant elle. L’Asharite avait attendu toute sa jeune vie pour en arriver à ce moment, où elle pourrait enfin explorer le plein potentiel de ses capacités et imposer les changements adéquat pour faire de l’Itrhi’Vaan autre chose que la serpillère du Continent. Il adviendrait un jour, tout bientôt, où on ne regarderait plus sa terre avec pitié ou amusement. Elle voulait l’hégémonie parfaite, celle de la politique et de la culture. Un état solide qu’on ne pourrait plus violer impunément. Une nation où les habitant, fiers, seraient protégés et instruits, de sorte à ce que tous participe au rayonnement infini des terres batardes. L’Empire sinon rien.
— Aidez-moi à unir les Princes et Princesses, à uniformiser les pratiques sociales, les mœurs, de sorte qu’on accède à cette loyauté de la Basse-Ville qui nous fait défaut. Quand chacun des hommes foulant cette terre ne voudra plus contester notre pouvoir, alors le chantier auquel vous aspirez ne sera qu’une formalité. »
Laissez-moi devenir la Princesse de la Charité.
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| | | Heracle Ypsilantis
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Mar 23 Juil 2024 - 19:13 | |
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Il se peut, en finalité, qu’elle cultive un réel intérêt pour la roture, pensât l’Ypsilantis, tout en décrivant du regard la bien menue silhouette de son hôte éclairée par le contre-jour de la fenestration. L’idée qu’elle fût réellement entichée, par intérêt ou nenni, l’embêtait tout de même. Tandis que du haut de son illustre Phare doré il faisait pleuvoir sur le petit peuple la mouscaille de son plus fumant désintérêt, sa commensale cherchait à acheter non pas l’aval du peuple envers l’ensemble des Princes, mais bien envers elle. Pour sûr, l’homoncule salé œuvrait sur le plancher des porcs et par son intrépide pérambulation l’avait d’ores et déjà prouvé! À chercher si avidement aval de la gueusaille, elle mettait ses pairs dans une situation fort déplaisante : celle de tiédir pour le bas peuple son indifférence la plus verveuse. Bientôt même! Il se pouvait que sous la popularité fleurissante de la ragotine il se doive lui aussi de débourser de ses poches quelques moyens pour s’offrir le sourire des édentés. Non pas que la vue du bouseux lui faisait de l’aérophagie ou entrainait quelques levées de cœur, mais il y avait dans la foulée tant d’abrutis et d’esprits rétifs au bon labeur, que l’avenue simple de débourser pour eux un peu de ses fortunes lui donnait des envies là, de conchier ses braies. Pourtant, dans la faconde de sa commensale, elle semblait inévitable la sente où ils se devaient de conquérir l’amour des genses de Thaar. Et cela passait par quelques gestes généreux, aux allures désintéressées, fussent-ils onéreux de valeur ou d’efforts.
Il ne chercha guère à farder tout cet agacement. Son soupire était long, sa mine elle, déconfite. Il avait laissé à son arrivée ses faux semblants et s’était mit en tête belle idée qu’elle le voit sous ses vrais jours ; quitte à en perdre la face définitivement. Ainsi affublé, il avait espéré qu’au détour de leur conversation, ils aient assemblé les premières brique de leur collaboration, voir même de leur amitié. Et Héracle n’avait guère pour renom amour et estime pour les bouseux ; aussi bien était de l’assumer pleinement. Enfin, il se redressa à son tour, de sorte à venir la rejoindre près de la fenêtre pour partager mêmement cette vue de la Sublissime. Arrivé à son niveau (ou à peu près, vu l’écart de grandeur), à épier le cœur grouillant de Thaar, il se rendit bien compte de sa méconnaissance du sujet. Si aujourd’hui il était souhaitable, voir même requis que le peuple fasse le panégyrique des Princes, notre bon Prince devait bien se rendre à l’évidence ; il n’avait fichtre aucune idée du sentier à emprunter pour y parvenir. Cela lui coûta, encore, mais sachant désormais qu’ils avaient tous deux pour dessein même destination, il lui tint ces quelques mots :
- Je ne redoute pas les ambuches qui pourraient au conseil, venir faire obstacle à nos ambitions. Je donnerai poids à votre voix, du moment que vous en faites de même pour la mienne si elle venait à être contestée. J’ôterai les œillères de ceux qui oseront me regarder en face et soutenir que Thaar n’est pas à risque. Les dangers sont réels, qu’ils soient à l’intérieur de ses enceintes ou par-delà l’horizon. Il marqua une pause, car ce fût à cet instant qu’il allait mettre à l’essai la robustesse de leurs nouvelles fondations. Je n’ai jamais été habile avec la gueusaille, Shaheem. J’ai longuement côtoyé des hommes de peu de valeur, mais qui avaient cœur à l’ouvrage ; ces gens ont acquis mon respect. Mais le grouillot moyen, j’ai… des difficultés à concevoir comment m’y prendre pour accéder à leur loyauté, continuât-il en empruntant les mêmes mots que sa voisine. Devrais-je faire pleuvoir de la farine sur leurs têtes ? Inonder leurs venelles de fruits ? Je crois ne jamais être à même d’avoir semblable considération pour eux que la vôtre, mais je n’épouse guère envie d’être roche dans la botte de leur opinion pour nous. Lui qui n’avait pas affronté son regard depuis, s’était enfin retourné vers elle. Comment puis-je vous être serviable, Shaheem ? Ce ne fût guère erreur que d'avoir soulevé vouloir lui être personnellement utile, car au fond, il savait que s'il était une tête princière capable de s'attirer les bonnes faveurs du peuple, ce n'était autre que la Salée.
Dernière édition par Heracle Ypsilantis le Mer 24 Juil 2024 - 14:59, édité 1 fois |
| | | Shaheem Angharad Sang-mêlé
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Mar 23 Juil 2024 - 20:32 | |
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Il lui fallait lever le menton pour pouvoir continuer à lui parler plutôt qu’à son torse ; elle n’aurait sûrement pas fait cet effort s’il avait eu moins de barbe et une belle paire de loches. C’était en soit, un signe de respect non-négligeable envers le Pêcheur. D’ailleurs, tandis qu’elle l’écoutait toujours adossée, elle lui trouva un charme certain. Pas de ceux qu’elle appréciait dans sa couche, mais quelque chose de plus touchant, humain même, alors qu’enfin il se défaisait de la chape princière qui abimait ses épaules. Pour la première fois, elle le voyait comme un homme, rien de plus. Qui plus est, un homme capable d’affirmer ses doutes et ses faiblesses ; une qualité remarquable et appréciable. Elle se rappelait les paroles de sa tantine à ce propos : les vantards ne font jamais de vieux os. Il y avait aussi cette vieille phrase sur la roue qui tourne, mais impossible de remettre les bons mots dessus. Le plus important c’était finalement de se souvenir de l’enseignement derrière les maximes surannées. En l’occurrence, pour les gens de leur espèce, il était tout aussi primordial de connaitre ses faiblesses que ses forces, car elles étaient la source de leur défaite. En agissant de sorte à renforcer ces incapacités, en se blindant, nul ne pouvait plus nous atteindre. Et il était clair que l’Ypsilantis ferait un partenaire idéal en ce sens. Il lui prêtait sa force, elle lui offrait les moyens de son ambition. Simple comme bonjour !
Par les deux couilles d’Othar, tout cela lui paraissait bien trop beau pour être vrai. Pourquoi avait-il fallut autant de temps pour qu’enfin un ordre nouveau se mette en branle ? Ce n’était pourtant pas le manque d’appétence des membres du conseil qui manquait… Peut-être que tout cela n’était affaire que de volonté et d’une petite dose de courage. Trois fois rien, juste ce qu’il fallait pour envoyer celle qui se pensait Reine se prendre une pine au cul et retrouver une liberté de paroles et d’actes jusqu’alors muselés par ces grosses mamelles. A trois, la Princesse de Sel ne doutait plus du contre-pouvoir qu’ils représentaient. Ce n’était certes pas encore assez pour chambouler l’ensemble de la politique établie, mais sûrement assez pour commencer à soudoyer les plus fébriles d’entre eux. Bientôt, il ne resterait plus aucun lèche-cul pour essuyer la merde du fondement de sa Majesté de la Chair. Mais là ! Elle se devait d’être patiente, au moins encore un peu. Thaar ne s’était pas construite en une nuit, et elle ne pourrait prétendre à la changer en si peu de temps. Là-dessus, le Kébab avait raison : la tempérance serait leur alliée la plus fidèle. La Sainte Mère savait que ce serait une tâche bien ardue, pour eux tous. Ils avaient après tout, tout à y gagner.
« — J’ai rencontré ceux que l’on appelle l’Aile Blanche pour une raison simple : ils ont le capital sympathie qui nous fait défaut. Il est donc d’intérêt de se pencher plus avant sur les causes de cet engouement et de faire de ces causes notre priorité. Et voyez-vous, il semblerait qu’outre la misère pour laquelle nous pourront toujours agir matériellement, la condition d’esclave soit au cœur de notre impopularité. Trop de largesses ont été accordées à Maralina, qui s’est bâtie un empire puant qui nous éclate aujourd’hui à la tronche sans même qu’on ait eu à mettre les mains dedans. Pire encore ! Tandis qu’elle jouit des avantages pécuniers de son affaire, nous n’en retirons que la merde qui nous empêche de faire front commun.
Elle sirota de nouveau le liquide ambré. Maintenant qu’elle avait ferré le poisson, elle devait passer de la théorie à la pratique ; et elle n’avait aucune putain d’idée de ce qu’elle faisait réellement. Personne n’avait été aussi loin dans la réformation de leur politique, du moins, pas depuis des décennies. Elle devait donc passer le baptême du feu et espérer ne pas se brûler de trop – ou à défaut, précipiter quelqu’un dans les flammes à sa place. Le temps n’était plus aux doutes et aux demi-mesures de toute façon.
— Surtout que ses petites… Accointances avec l’Elda ont bien vite été balayées par les pairs. Je crois Héracle, qu’il est temps que la Princesse des putes retourne bien sagement à sa place et qu’on mette enfin une muselière à sa jolie gueule. Et cela doit se passer avec une réforme de notre système. Je vais proposer un légiféré sur l’ensemble des territoires, donnant aux esclaves le droit de racheter leur liberté et obligeant donc chaque maitre à leur verser un salaire. C'est pour cela que j'ai également besoin de votre soeur »
Si l’arrêté serait sans aucun doute acclamé par le peuple, la pilule risquait de piquer autant pour la Chienne Irohivrah que pour tous les notables qui jusque-là profitait de la main d’œuvre gratuite. C’était un système qui avait le mérite de fonctionner à Ashaï, et qui nourrissait un sentiment bien plus fort que la peur : l’espoir. Les maîtres étaient libres de fixer la somme de dette à rembourser, et tout aussi libre de juger du salaire que méritait leurs possessions. En vérité, Shaheem prévoyait simplement une mesure écran de fumée pour qui saurait lire entre les lignes. Et fort heureusement pour l’Asharite, le petit peuple était majoritairement analphabète.
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| | | Heracle Ypsilantis
Humain
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| Sujet: Re: Le purgatoire saumuré [ Shaheem ] Jeu 25 Juil 2024 - 2:18 | |
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Oui, il avait été porté à ses oreilles pareille nouvelle que celle de l’Irohivrah et de ses rapports riverains avec l’Elda. A leur unique rencontre il n’avait sur elle point humé d’odeur de soufre (chronique parfum des rejetons du Vatna) ni dénoté quelconques détails qui saurait donner crédit à cette bien laide allégation. Pourtant, les faits étaient là et ne pouvaient être niés : gourmande, elle était friande de viande grise et même, avait pondu des œufs de même teinte. Il eut souvenance, tout à coup, comme la chose en avait teinté ses avis sur la donzelle. Égayée pourtant d’atours lovelaces, sa relation contiguë avec les noirelfes avait affadit le charmant tableau de sa féminité, duquel, normalement, Héracle eût été fort aise d’en reluquer les reliefs. Mais là! Qu’avait-elle à invectiver sa consœur avec tant de cœur et d’hardiesse! N’avait-elle pas conscience qu’insulter de manière si soutenue était là le langage de l’amour de notre bon Prince? - Vraiment ? Les asservis ? questionna le Prince, un brin interloqué. L’ire de la gueusaille doit certainement s’abecquer de leur pain rance, de leur aigre vinasse, de leur hygiène de chien mouillé, ou encore de l’odeur de pissat qui embaume leurs ménages! Mais des ilotes, venues d’ailleurs de surcroît, vraiment ? Il avait bien conscience que la vue de poignets et de chevilles entravées jusqu’aux sangs par les fers pouvait en choquer plus d’un, mais de là à s’ulcérer pour si peu ? Ne voyaient-ils pas la bonne fortune de ces pauvres genses, qui souventefois meurt-la-faim et malades se faisaient acheter à rabais et donc, pouvaient espérer avoir toit sous lequel dormir ? Destinés à crever dans leurs cages rouillées, c’était faveur que donner autre sens à leur misérable vie! Non, Héracle ne comprenait rien de ces simplets et dût pour le coup s’en remettre totalement à l’Asharite : une perspective qu’il rebuta hélas bien amèrement. - Du reste … Il s’octroya une énième lampée de liqueur, se complaisant toujours de la fiévreuse descente du liquide dans sa gargue. Je n’irai pas m’objecter à pareille décret. Ma sœur qui comme vous le savez, est munie d’un cœur bon, a toujours su trouver les mots justes pour fertiliser la bonté de ma parentèle. Tout particulièrement à propos de la main d’œuvre achetée, dont elle déplore l’obligation de son utilisation. Forte de raison, elle supputa les enjeux qui entourent l’assujettissement de ces ouvriers, et tint mordicus que leur sort ne soit scellé dans le marbre de nos affaires. À force de ténacité, elle réussit à faire entendre raison à nos deux parents et depuis, la question est désormais réglée et s’apparente à toute chose près à votre idée. Formés par des gabiers idoines, les obligés doivent essuyer cinq à dix ans de service en mer avant de pouvoir espérer obtenir leur blanc-seing, termina l’Ypsilantis, le visage assez détaché pour qu’elle en saisisse la relative indifférence qui l’habitat. Si ce que vous affirmez est véridique, que la gueusaille lève le poing contre l’esclavagisme, alors oui, cela me semble tout à fait seyant de leur faire miroiter chance de voir poindre un avenir meilleur que le leur. En seulement, poursuivit-il calmement, les plus juteux acheteurs, ceux dont la fortune s’élève au-delà de la fange, n’est-il point à propos de croire qu’ils pourraient palier à ce capital de sympathie durement acquis? Me glisserais-je à leur place que je ne saurais trouver sommeil avant d’avoir décelé l’irrécusable moyen de faire entendre ma hargne envers votre légiféré! La vie paraissait bien plus simple lorsque juché sur son perron, il n’avait à se soucier de savoir sur la gueule de qui son crachat allait s’écraser. Un soupire las franchit le cap de ses lèvres encore humides d’alcool, puis se retourna vers la vue de la cité, un panorama duquel lui, ne saurait jamais se lasser. Et puis merde, trouva-t-il à répondre à lui-même après avoir si longuement jacté. Nous les enculerons, si à leur tour ces galetteux viennent à lever le poing, conclut-il dans son dialecte préféré, loin de ceux des genthilhommes mais qui se voulu ô combien limpide.
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