Escorte de nuit... YEAH !! [ TERMINE ]

=> En provenance des Tavernes

Haize tire presque Morgane vers l'extérieur, voulant visiblement s'éloigner de ce Westblade le plus rapidement possible. L'air sérieux, il fait quelques pas dans la rue avant de se souvenir qu'il n'a aucune idée d'où la belle peut habiter. Il s'arrête, regarde à droite et à gauche, puis jette un coup d'oeil à Morgane, avant de lui servir un sourire rayonnant, même si c'est la nuit.

- Désolé, mais Westblade et sa bande de déchets, c'est le genre de trucs qu'on essaie d'éviter le plus possible. Erreur de jeunesse que je regrette amèrement aujourd'hui.

Aujourd'hui en particulier, parce que Westblade était de loin la créature vivante la plus répugnante qui existe. Et quand il se retrouvait en plus avec sa bande de sales... frissons de dégoût avant de reporter son attention sur Morgane. Encore une fois, il regarde à gauche et à droite.

- Quelle direction, mademoiselle Morgane ?

Sourire haizien, dont lui seul a le secret.

Était-ce un frisson ? Il n'en était pas certain. Il ne faisait pas bien froid, quoique lui, il portait sa chaude redingote. Une vieille amie, celle-là. Elle était un peu élimée, elle était recousue à quelques endroits, mais il aimait cette redingote.

- Ne vous inquiétez pas pour cela , j'ai peur d'y être dangereusement habitué... Votre... ami est un modèle de gentillesse comparé à certains hommes qui trainent dans la taverne... Ce Westblade n'est sans doute pas méchant... juste un peu... limité.
- C'est malheureusement le contraire, Westblade est sans limites. Disons qu'il est dans ses bonnes nuits et qu'il a cru que je lui faisait une faveur.

Un autre sourire, quand un ivrogne débouche dans la rue. Au départ, il ne chante qu'une banale chanson grivoise, mais peu à peu, ses paroles s'adressent directement à Morgane. L'air joyeux de Sepiida se durcit. Non, mais quel grossier personnage. Comment osait-il s'adresser ainsi à la douce Morgane ! Il allait s'en souvenir demain, fois de Sepiida ! Et la douce Morgane qui prend cet affront à sa dignité avec tant de légèreté. Quelle jeune femme magnifique !

- Et voilà , je vais encore devoir en giffler un ! Moi qui ne voulais pas être violente ce soir !
- Nul ne vous y oblige, Douce Morgane, dit-il en retirant sa redingote, qu'il pose rapidement sur les épaules de la jeune femme. Une pierre deux coups, il la protège du froid et va tabasser ce connard d'ivrogne. Un autre sourire. Je reviens dans une petite minute, informe-t-il en marchant droit vers l'ivrogne.

L'ivrogne en question a à peine le temps de le voir approcher qu'il se fait saisir par le collet et traîner vers une ruelle transversale. Le grossier personnage est propulsé sans pitié dans la dite ruelle, puis Sépiida y entre à son tour, les dissimulant tout deux Morgane. Quelques bruits de coups, puis quelques mots menaçant, mais incompréhensible, suivi immédiatement d'un gémissement de douleur fusent de la ruelle, puis des pas et Sepiida revient, en ajustant son collet. Le regard d'été de l'homme est aussi dur et impitoyable que le sol qu'on voit approcher trop rapidement quand on vient de perdre pied. Rrevenu près de Morgane, par contre, ce n'est plus qu'un mauvais souvenir. Il sourit.

- Il ne vous importunera plus, même une fois réveillé et dégrisé. Il ne fait aucun geste pour reprendre sa redingote, mais offre à nouveau son bras à la jolie Morgane. Avez-vous mis pied à terre depuis longtemps ? demande-t-il comme s'il ne s'était rien passé.

En moins de cinq minutes , Morgane fut couverte de tous les noms grossiers possibles et imaginables. Ah non , mais quelle grossiereté ! C'était bel et bien décidé , Morgane ne fréquenterait que des pirates amoureux d'elle et non pas du rhum. Avec un soupir agacé , la jeune femme posa ses mains sur ses hanches. Elle se demandait déjà dans quel état terminerait l'ivrogne à la fin de la soirée. Non mais franchement... Morgane savait d'avance qu'elle ne dégainerait pas son sabre. De toute façon , l'homme était dans l'incapacité de se battre au sabre. Déjà qu'il avait du mal à aligner un pied devant l'autre... Par contre la partie de son cerveau réservée à la perversité était plus qu'active ! Que s'imaginait-il ? Que Morgane était un vulgaire jouet ou un morceau de viande ? Et puis quoi encore ? C'est qu'il se croit séduisant en plus ! Mais oui , charmant. Il empeste le rhum et d'autres alcools , il est plus sale qu'un rat mort et franchement , il n'est vraiment pas le genre de la jeune femme. Mais alors pas du tout. Même ivre , elle n'oserait pas s'approcher d'un type pareil. En même temps Morgane faisait rarement des excès au niveau de l'alcool. Elle n'avait été vraiment saoûle en réalité. Etrange pour une pirate , non?

Oh non , pitié ! Et bien finalement , Morgane n'est pas tombé sur un charmeur , mais sur un homme qui veut jouer les chevaliers. La jeune femme commence alors à douter que l'ivrogne s'en sorte avec une simple giffle. Avec un soupir rageur , Morgane serre les poings. Et voilà , elle se retrouve avec sa redingote sur les épaules , comme si elle avait été une demoiselle en détresse. Il le faisait exprès ? Elle lui avait pourtant bien dit qu'elle n'était pas une femme à la recherche d'un protecteur ! Elle savait très bien se débrouiller toute seule. La jeune femme meurt d'envie de le retenir d'aller réfler son compte à l'ivrogne , mais elle sait que si elle craque , c'est plus Haize que l'ivrogne qui risque de se prendre une giffle. Alors voilà , elle reste sur place , aussi muette et immobile qu'une statue de marbre. Oh , mais évidemment , il ne veut pas choquer ses pauvres yeux , alors il emmène l'ivroge dans une petite ruelle. La jeune femme ne peut s'empêcher de jurer à haute voix. Pestant de colère , elle croise les bras , regarde à gauche , puis à droite et jure de nouveau. Quand elle croiserait Er'ril , elle lui demanderait pourquoi il avait engagé ce beau parleur à bord de son navire. A cette époque , Morgane n'avait pas prêté à cet individu , trop occupée à embrasser et enlacer William... Elle frissonna en y songeant. Son esprit refoula très rapidement ces mauvais souvenirs...

Alors voilà , Morgane attendait plus ou moins bien que le pirate revienne de son petit "massacre". Quand il revint , il était tout souriant , comme il l'avait habitué au cours de la soirée. Et il lui offre son bras. Morgane lui lance un regard dur , et plutôt que son bras , elle lui redonne sa redingote. Elle préfère avoir froid finalement. Elle secoue la tête , agacée par tant de... de quoi ? Soit disant galanterie ? Et puis quoi encore ? Morgane est furieuse , vraiment.

- Vous n'aviez pas besoin de faire ça ! J'étais très bien capable de m'en sortir seule ! Je croise des hommes comme lui tout les soirs ! Et jusqu'à ce que vous me prouviez le contraire , j'ai l'impression de pouvoir m'en sortir très bien toute seule ! Je ne suis ni une gamine effrayée , ni une demoiselle en détresse ! Je n'ai en aucun cas besoin de votre soit disant protection. Vous croyez peut-être que je vous attendais pour pouvoir rentrer chez moi ? Non mais vraiment !

Et voilà Morgane , tu t'énèrves. La jeune femme était à bout , elle n'en pouvait plus. Elle était à bout de force , à bout de nerfs. Elle était fatiguée en plus. Malheureusement pour lui , Haize venait de briser ses dernières barrière contre la colère. La jeune femme serrait les poings , complètement vidée. Des larmes de rages se mirent à couler sur ses joues , la rendant encore plus vulnérable à la morsure du froid printannier. Elle soupira , se remettant en route , n'accordant pas un regard au pirate. Elle sentait ses jambes trembler , mais jamais , au grand jamais elle ne les laisserait céder sous elle. Soudain , elle se retournant , essuyant ses larmes d'un revers de manche. Lorsqu'elle parla , sa voix était tremblante et brisée par de gros sanglots.

- Maintenant , vous allez gentiment faire demi-tour et me ficher la paix ! Allez donc vous saoûler ! Et oubliez moi !

Aussitôt qu'il reçu sa redingote plutôt que le bras de Morgane, il sut qu'il avait déplut à la demoiselle. Avant même qu'elle ne s'exprime, rageuse, il se doutait déjà pourquoi. Encore une autre qui refusait la gentillesse parce qu'elle se disait capable toute seule. C'était pareil dans les rixe de taverne. En pleine bagarre générale, on aidait un homme à se débarrasser d'un autre, on était remercié d'un sourire, et, pourquoi pas, d'un verre ensuite. Mais en pleine hécatombe, si on osait aider une femme à se débarrasser de quoique ce soit, non seulement on n'avait pas de merci, mais en plus on risquait à tout moment de s'en prendre plein la gueule. C'était agaçant... Haize n'était pas un grossier personnage. Même en étant né sur Meca, avec la pire racaille de tous les temps, Efles noirs exceptés, sa mère lui avait donné une bonne éducation et le respect qui étaient dû aux individus, peu importe ce qu'ils sont. Avec le temps, il s'était rendu compte que c'était beaucoup plus facile d'être un parfait salaud qu'un gentleman. Qu'on pardonnait facilement aux parfaits salauds mais pas aux gentilshommes.

- Vous n'aviez pas besoin de faire ça ! J'étais très bien capable de m'en sortir seule ! Je croise des hommes comme lui tout les soirs ! Et jusqu'à ce que vous me prouviez le contraire , j'ai l'impression de pouvoir m'en sortir très bien toute seule ! Je ne suis ni une gamine effrayée , ni une demoiselle en détresse ! Je n'ai en aucun cas besoin de votre soit disant protection. Vous croyez peut-être que je vous attendais pour pouvoir rentrer chez moi ? Non mais vraiment !

Pas vraiment indifférent, mais sérieux, Haize observe la montée colérique de Morgane. Tout sourire a disparu, mais il ne dégage aucune agressivité, ni malveillance. A-t-il dit, ni même prétendu quelque chose du genre ? Il ne le croit pas. Les larmes qui s'échappent ensuite lui en apprennent beaucoup plus que sa colère sur le jeune femme.

Visiblement, Morgane avait quelque chose à prouver, mais pas nécessairement à lui. Sauf qu'il était probablement le seul crétin assez stupide pour croire qu'une femme pouvait effectivement se débrouiller seule et qu'il pouvait agir avec elles comme avec n'importe qui. Si elle lui avait presque reproché d'être si peux remarquable, elle n'avait pas été très observatrice non plus. Il avait toujours été le premier à se porter volontaire, le premier à tout faire, quoi. Mais bon, pour c'que ça changeait au fond.

- Maintenant , vous allez gentiment faire demi-tour et me ficher la paix ! Allez donc vous saoûler ! Et oubliez moi !
- Non, répond-il avec un calme déconcertant.

Sans broncher, ni même bouger, Haize avait encaisser tout le débordement de Morgane, placide. Si elle explosait ainsi, c'est qu'elle devait en avoir besoin. Et un tel excès, qui provoque sanglots et tremblements, était épuisant. En mer, y'avait pas que les femmes qui craquaient. En fait, il avait vu beaucoup plus souvent d'hommes craquer que de femmes. Ratio oblige. Bref, faire demi-tour, lui ficher la paix et l'oublier, pas question. Non.

- Non, pas question. Pas avant de vous avoir reconduit chez vous, de vous avoir préparé une boisson chaude pour vous relaxer un brin, parce que vous êtes visiblement exténuée. Et maintenant, vous allez mettre ça sur vos épaules, dit-il en lui passant la redingote sur les épaules et en la maintenant fermement, et si vous la retirez, j'vous jure que j'vous attache dedans, que j'vous trimballe sur mon épaule jusque chez vous, peu importe le temps que ça prendra avant que je trouve votre chez vous et en arrivant, j'vous déshabille et je vous borde comme une gamine. Est-ce que c'est bien clair ?

Non, mais y'avait toujours bien des limites à se faire rabrouer quand on était gentil... tsss...

De grosses larmes dégoulinaient sur ses joues , certaines se glissant sur ses lèvres , lui mettant un goût salé désagréable dans la bouche. Morgane avait retenu ses larmes depuis trop longtemps , trop de choses s'étaient accumulées en elle , et voilà qu'elle avait fini par craquer. Quoi de plus normal , après tout ? Elle était humaine , voilà tout. Elle voulait toujours parraître forte , sans faille. Elle avait voulu se forger une carapace aussi dure que le diamant. Sauf qu'elle n'avait réussi à fabriquer que du verre fragile , qui venait de se briser. Non , c'était pire que du verre , c'était du cristal. Magnifique , mas plus fragile que n'importe quoi. La jeune femme se retrouvait nue , à la merci de tout et de rien. Elle pleurait , son coeur battait à un rythme effreiné , frappant contre contre sa poitrine serrée. Morgane était secouée par de puissants sanglots , qui la secouait de toute part. Pendant une seconde , elle crut qu'elle allait s'effondrer. Ses jambes tremblaient , mais sans vraiment qu'elle sache pourquoi , elle resta debout. Tremblante , certes , mais sur ses deux pieds.

A force de vouloir passer pour une femme forte , Morgane avait brisé sa carapace protectrice et s'était révelée aussi fragile qu'une rose. Elle avait l'impression d'être vulnérable , privée de sa force comme la fleur serait privée de ses épines. Même si elle refusait de se l'avouer , Morgane était une fleur déracinée. Elle se voulait forte , et pourtant , elle avait un besoin vital d'être protégée , aimée. Elle était trop sensible , trop fragile pour une pirate. Sa duretée était une façade. Une façade qu'elle montrait à la plupart des gens pour un temps. Le soir , par exemple. Une fois chez elle , bien qur rarement , elle se donnait le droit de craquer , le droit de pleurer... Mais ce soir là , une goutte d'eau nommée Haize avait fait débordé le vase et elle avait finit par tout laisser sortir. Tous ces sentiments refoulés s'exprimaient librement. De plus , Haize ne semblait pas vouloir la laisser tranquille. Morgane ne savait pas vraiment ce qu'il voulait. Souhaitait-il vraiment l'aider , ou avait-il d'autres idées derrière la tête ? La jeune femme n'en avait aucune idée , elle n'arrivait pas à mettre ses idées au clair. Elle était incapable de penser ou de réfléchir convenablement. Sa vision était brouillée par ses larmes salées.

- Je vous en prie , laissez moi tranquille...

Toujours brutalement secouée par ses sanglots , Morgane regarda Haize s'approcher d'elle. Il insistait , s'accrochait. Il voulait vraiment la ramener chez elle. Morgane ne se sentait même plus capable de le rabrouer. Elle était sincèrement à bouts de forces , à bout de nerfs , incapable de faire un pas. Elle se sentait complètement incapable , inutile. Pas digne d'être une fille de Capitaine pirate. Son père voulait d'une fille forte , mais Morgane était faible et bien trop fragile. La jeune femme ne put que lui jeter un regard dur lorsqu'une nouvelle foit , il lui passa sa redingote sur les épaules. Voilà qu'il la menaçait de carrément l'attacher avec ! Non mais là , cela prenait des tournures des plus désagréables. En entendant le verbe "déshabiller" , Morgane devint d'une pâleur cadavérique. Dévoilait-il ses idées , ou plaisantait-il ? Morgane n'en savait rien , elle n'arrivait vraiment plus à réfléchir correctement. Une nouvelle larme roula sur sa joue , brillant dans la nuit fraiche. La jeune femme ouvrit la bouche pour répliquer , mais les mots restèrent bloqués dans sa gorge nouée. Elle frissonna , faible comme tout. La vision de Morgane se troubla un instant , et la jeune femme tangua légèrement. Elle cligna des yeux , croyant qu'elle allait perdre l'équilibre. La jeune femme eut la vison définitivement brouillée , lorsqu'elle eunt un vertige. Elle gémit tout bas , se sentant basculer. Elle bascula en arrière , vidée. Elle ferma les yeux , puis elle sombra dans l'inconscience totale.

- Je vous en prie , laissez moi tranquille... La jolie Morgane était de toute évidence épuisée. La voir si désemparée provoque un élan d'affection à son égard.
- Vous êtes épuisé, dit-il, mais elle ne l'écoute pas.[/color]

Il la voit pâlir à vue d'oeil, puis tanguer. Non, elle ne voit pas bien. Il n'a pas le temps de le lui demander. De toute façon, il aurait sans doute écopé d'un "va te faire foutre" ou quelque chose d'encore moins élogieux. Quand elle vacille, il n'a le temps que de l'attraper avant qu'elle ne se se retrouve sur le sol.

Une flopée de jurons colorés, digne des grands pirates s'envole vers la nuit étoilé. Il avait bien besoin de ça... lui qui voulait se la couler douce cette nuit... bah, tant pis.

Mais bon, maintenant, que faire. Il se trouve dans une situation où il a l'air un peu con. Par chance, personne ne le voit. Ou alors, si quelqu'un le voit, il se garde bien de le montrer. Le problème, c'est qu'il hésite... il aurait préféré la ramener chez elle, mais y'a un problème... il ne sait pas où c'était et, à cette heure, il ne peut pas frapper à toutes les portes pour demander. Il fera donc la seule chose qui lui semble adéquate à ce moment.

°°°°°°°°°°°°°

BANG BANG BANG !

Un bruit de mouvement à l'intérieur, puis les serrures qu'un déverrouille et la porte s'entrouvre, laissant apparaître un oeil bleu sombre.

- T'avais dit que tu rentrais pas cette nuit.
- Je suis tombé sur une demoiselle en détresse.
- Qu'est-ce que tu lui a fait ? questionne la dame, en plissant des yeux et en ouvrant la porte pour le faire entrer... lui et la demoiselle.
- J'ai voulu la raccompagner.
- C'est pas la petite serveuse de la Sirène ?
- Oui, tu la connais, m'man ?
- Non, jamais vu avant.
- Alors comment tu...
- Les mamans savent des tas de choses.
- Terrifiant.
- Allez, va la déposer dans ton lit.

De toute façon, il n'est pas question d'être autrement. Il dormirait dans le vieux fauteuil de sa mère. De toute façon, n'importe quoi était plus confortable que les hamacs en mer. Et les hamacs, c'était quand on avait de la chance... ou dans les jupes du capitaine.

Il n'eut pas besoin de faire un long trajet avec Morgane dans les bras à l'intérieur de la maison. C'était une toute petite maison avec une seule pièce et une mezzanine plus haute. Y'avait un minuscule escalier, étroit et apique qui menait en haut. En haut, y'avais de la place que pour les deux petits lits. Simple, évidemment. Minuscule. Haize devait presque dépasser du lit où il dépose Morgane. Un lit fraîchement lavé, les draps qui sentent bon le savon. Haize n'aura pas la chance d'y dormir ce soir.

- Retire-lui ses bottes, ordonne la maman en s'occupant de retirer le surplus qui pourrait empêcher Morgane de bien dormir. Elle la laisse en dessous, prenant bien soin de la cacher aux yeux de son fils... à son grand dam d'ailleurs... et elle la borde soigneusement. Elle ira mieux après avoir bien dormi. Allez, toi, en bas. Et t'avise pas de monter ici cette nuit, sinon tu vas redescendre assez vite.

Haize obéit, docilement. Fallait pas désobéir à sa mère. Sa mère était un petit bout de femme énergique et qui ne s'en laissait pas imposer par personne. Les yeux bleus et les cheveux sombres comme son fils, ils étaient parsemés de fils d'argents. Enserré dans un amalgame de robes rustres sur une quantité indéterminée de jupons, elle avait l'attitude de ceux qu'il ne vaut mieux pas énerver. On la disait voyante. Enfin, diseuse de bonne aventure serait plus exact. Escroc, personne ne le savait vraiment, mais elle racontait aux gens ce qu'ils voulaient entendre autour d'une tasse de thé, ou tisane, bref, une infusion chaude, contre quelques écus, ou une platée de ragoût. Alors, ils étaient heureux. À Meca, on l'appelait Ingrid la Vaticinatrice. La plupart ne savaient pas ce que vaticinatrice signifiait, mais ils savaient ce qu'elle faisait. On disait aussi qu'elle connaissait tous les cancans de Meca... et qu'elle alimentait souvent elle-même. Bref, jamais on n'oubliait de la saluer quand elle traversait les rues de Meca... sinon qui sait ce qu'on pourrait savoir sur soi-même dès le lendemain matin. D'ailleurs, le passé d'Ingrid la Vaticinatrice était aussi flou que son présent. Des fois pirate, des fois mercenaire à la retraite, c'est ce flou justement qui empêchait les gens de vraiment poser des questions. Elle était là, depuis de longues années, c'est tout.

Bref, quand Morgane se réveille, elle n'est certes pas chez elle. Et sa voisine de lit est déjà réveillée et volte entre son fourneau et son comptoir, escorté de bruits de vaisselle. Pas de traces d'Haize, sauf une vieille couverture épaisse jeté sur un fauteuil et sa redingote accrochée à un crochet derrière la porte.

Ingrid vaque à ses occupations quotidiennes, pendant que Haize fait son boulot d'homme, à savoir rentrer du bois. C'est le printemps, certes, et même si les journées sont chaudes, les nuits sont encore froides.

Un froissement de tissus et un subtile craquement des escaliers indique à la dame de maison que son hôte est réveillée. Elle se retourne d'un bloc, avec un sourire, dont Haize est le digne héritier.

- Qu'est ce que... qu'est ce que je fais ici ? Qui... qui êtes vous ?
- Par les Vagues de fond, va t'habiller ! Vive comme l'éclair, la dame vient se poster aux côtés de Morgane et la pousse vers les escaliers. Couvre toi avant que Haize revienne. J'lui ai pas interdit de regarder pour qu'il te voit dans cette tenue. Faut pas lui donne tout cuit dans le bec, des trucs comme ça, ça se mérite, lui dit-elle avec un sourire entendu en la laissant monter.

Ingrid s'éclipse quelques secondes, puis monte à son tous les escaliers, avec une bassinette d'eau chaude et des serviettes sur le bras. Elle pose la bassinette sur une petite table et donne une serviette à Morgane. Elle s'éloigne un peu et tend ses vêtements de la veille à la jeune femme. Propres ? Difficile à dire, mais ils n'ont certes pas cette odeur alcoolisée de la veille. Tout est soigneusement plié. Visiblement, elle est debout depuis une éternité.

- Mon nom à moi, c'est Ingrid. Ingrid Teleostei... mais tout le monde ici m'appelle Ingrid... la Vaticinatrice, mais peu importe. Tiens, après une nuit pareille, faut se rafraîchir un peu. Il est allé chercher du bois, y doit en avoir encore pour un moment. alors comme ça t'es la fille d'Anarel ? J'savais pas qu'il avait une fille. Remarque, j'l'ai pas vu depuis longtemps. M'enfin, je sais c'que c'est. Y'a toujours eu des pirates... et des filles de pirates sur Meca. Je sais c'que c'est être une fille de pirate, mais passons. Allez, lave-toi, habille-toi et descend, on va manger.

Ingrid est une grande bavarde. Elle l'avait toujours été. Et elle le serait sans doute jusqu'à ce qu'on lui coupe la langue ou, plus probablement, jusqu'à sa mort. Ayant laissé tout ce qui pouvait être utile à la jeune femme, Ingrid tourne les talons et redescend l'étage en-dessous. Un bruit de pas provenant de l'extérieur, puis Haize entre dans la maisonnette, avec un pile de bûches de bois en équilibre dans ses bas, tandis que de l'autre, il ouvre et referme la porte. En botte, pantalon et simple chemise de lin écru, il va jeter le tout près du poêle.

- Voilà.
- Bien, lave-toi les mains, et met la table, pour trois. Elle est réveillée ET NE REGARDE PAS EN HAUT OÙ T'AURAS PAS DE DESSERT !

Le ton autoritaire de Ingrid suffit à obliger Haize à se faire violence pour ne pas regarder en haut. Visiblement, Ingrid sait mener ses hommes... enfin, son homme, même s'il s'agit de son fils. Et, étrangement, ça marche, parce que Haize ne lève pas les yeux une seule fois, il se lave les mains et met la table, tandis que Ingrid met la main aux dernier préparatifs du repas.

Il entend distinctement le grincement des escaliers, mais il ne relève pas la tête. Ingrid lui a dit de ne pas regarder en haut. Il fait le décompte de marches qu'elle doit descendre, puis lève la tête lorsqu'elle les salue. Un sourire parfaitement haizien vient éclairer son visage et il inspire.

- ...
- Bon matin, Morgane. Allez, viens t'assoir, c'est presque prêt. Je sais pas c'que t'aime, mais bon, j'vais pas préparer trois repas différents. Tu t'assois-là, dit-elle en lui pointant la place en face d'elle sur la table carrée.
- Bon matin, Morgane, dit Haize qui profite d'une respiration de sa mère pour en placer une. Il se lève aussitôt pour venir galamment tirer la chaise de Morgane.
- Ah, bien, j'l'ai bien éduqué, mon Haize, hein ?

Une maman fière de son fils comme ça, pour ce simple petit geste, c'était chose rare. Ingrid était une femme fière. Fière d'elle, fière de ce qu'elle faisait. Elle était très orgueilleuse et elle ne supportait pas l'échec. L'échec à sa manière, évidemment.

Elle sert le déjeuner à Morgane. Le genre de déjeuner fait pour soutenir au minimum trois jours... métaphoriquement parlant. Pain noir et autre trucs très soutenant. Y'avait pas à dire, Ingrid savait cuisiner. Et pas pour les petites natures.

- Alors, comme ça, vous travaillez à la Sirène Argentée ? questionne la dame sur le ton de la conversation. Ça doit pas être facile, avec tous ces marins d'eau douce qui viennent prendre un coup. Pas étonnant de craquer de temps en temps. Allez, mangez avant que ça refroidisse.
- Laisse-la tranquille, m'man... elle a eu une grosse soirée, hier... Un bref regard à Morgane, l'air de s'excuser pour l'enthousiasme de sa mère. Mais celle-ci ne l'entend pas de cette oreille.
- Si tu voulais pas j'm'en mêle, fallait pas la ramener ici. C'est chez-moi, quand même.
- Où tu voulais j'l'a ramène ?
- Nul part ailleurs, justement, réplique Ingrid, avec fierté. Haize décide de lasiser tomber. Le combat est inégal...

Décidément , la mère de son "sauveur" était une femme... étonnante. Elle semblair fière , forte. En gros , tout ce que Morgane était certaine de ne jamais devenir. Lorsqu'elle lui intima l'ordre , en quelque sorte , de s'asseoir , Morgane ne réfléchit même pas et elle se laissa tomber sur la chaise qu'Haize lui tire. Elle n'était pas habituée à de pareilles femmes. Celles qu'elle croisait à la taverne étaient soient soumises , soient... soit il ne valait mieux pas prononcer ou même penser un mot pouvant leur correspondre. Rien que ce simple geste sembla attiser le feu de fierté d'Ingrid. Pas étonnant , des hommes respectueux des femmes , il y en avait peu sur Meca. Très peu même. Morgane répond à sa question par un léger sourire. Elle est gênée d'être ainsi présente. Si seulement elle ne s'était pas évanouie... A présent , son instant de faiblesse lui paraissait être stupide... Désormais , elle aurait dû être habituée à la fatigue. Mais il n'en était rien. Et c'était la même chose pour n'importe quel être humain. La faiblesse du corps l'emportait malheureusement toujours sur la faiblesse de l'esprit. Le corps cédait toujours le premier. Et par moment , c'était une chose franchement embarassante , il fallait bien l'avouer...

Morgane garda alors les yeux baissées , ne sachant pas quoi dire ou faire. Elle ne s'était jamais retrouvée dans pareille situation , à vrai dire. La jeune femme ouvrit la bouche pour parler , mais elle se mordit la lèvre inférieure , se ravisant. Morgane ne savait vraiment pas quoi dire. Sans doute devrait-elle commencer par remercier Haize de ne pas l'avoir abandonnée en pleine rue. Et ensuite remercier sa mère pour ses...charmantes attentions. Mais non , elle n'a pas le temps , déjà la mère du pirate lui sert son petit déjeuner. Gênée , elle bredouille deux ou trois mots de remerciements. Mais la voilà déjà bombardée de questions. La jeune femme tenta d'enregistrer les questions que la vieille femme débitait à un ryhme... assez hallucinant , il faut dire...!

- Oui , vous avez raison... Ce n'est vraiment pas facile. Certains soirs , je dois avouer que certains hommes sont parfois un peu... brutaux. Et par moment , un trop ivres , ça aussi il faut l'avouer...

...Elle ne finit pas sa phrase qu'Ingrid lui conseille déjà de manger. Elle n'ose pas le dire , mais en réalité , elle n'a pas vraiment faim. Elle se sentait... comment dire... un peu lourde en fait. La soirée de la veille pèse encore sur ses fines épaules. Sa fragilité est de plus en plus mise à nue. Et Morgane n'aime pas ça du tout. Vraiment pas. Elle sursaute légèrement lorsque la mère remet gentiment le fils à sa place. Non , vraiment , être la cause d'une dispute , c'était la dernière chose dont elle avait besoin. Si elle se retient de partir en courant , c'est surtout par politesse pour Haize et sa mère. De plus cela ne se faisait pas , mais alors pas du tout. Et tout de même , Er'ril avait merveilleusement bien élevée sa fille. Sans doute un peu trop pour un pirate , même.

Morgane se force à inspirer à fond , et résultat , elle manque de s'étouffer. Heureusement pour elle , cela passe inaperçu. C'est un timide et surtout discret soupir de soulagement qui s'échappe de ses lèvre entr'ouvertes. Elle cherche une excuse pour s'en aller , mais elle n'est pas brillante. Forcément , elle n'avait jamais dû dire un mensonge de toute sa vie de jeune femme. Evidemment , cela ne l'aide pas en pareille situation. Elle réfléchit mais ne trouve rien. En même temps , elle hésite à fuir ainsi , alors que ces deux personnes l'aident. Mais voilà , elle ne veut pas céder à nouveau , et pas encore devant témoins. Ce serait trop embarassant , une fois encore. Mais bon , pour une fois , une fois dans sa vie , elle va tenter d'être lâche.

- Pardonnez moi... Je... J'ai vraiment besoin de rentrer chez moi... Je vous remercie , vraiment pour tous , personne n'aurait fait ça sur Meca... Mais je me sens de trop... Je devrais rentrer chez moi.

Ingrid écoute avec compassion les propos de Morgane. Effectivement, c'est pas facile. elle avait parfaitement raison. Mais les hommes, c'étaient des gamins.

- Les hommes, sont tous des gamins, dit-elle, puis elle jette un regard rapide à son fils qui hausse un sourcil, visiblement amusé. Mais comme tous les gamins, certains sont mieux élevés que d'autres, ajoute-t-il en souriant.
- Je suis très bien élevé, lance-t-il, mi-blagueur, à Morgane.
- J'espère bien, t'es jamais à terre ! Faut qu'au moins tu sois quelqu'un durant le court laps de temps que t'est ici.
- Je suis quelqu,un même en mer, tu sais, m'man.
- Ouais, ben j'sais pas, j'ai jamais quitté cette foutue île après ta naissance. Allez, bouffez avant qu'ça r'froidisse.
- Pardonnez moi... Je... J'ai vraiment besoin de rentrer chez moi... Je vous remercie , vraiment pour tous , personne n'aurait fait ça sur Meca... Mais je me sens de trop... Je devrais rentrer chez moi. Y a un instant de silence entre les paroles de Morgane et la réaction d'Ingrid. Haize, lui, se contente de se mordre la lèvre.
- J'ai fait de la bouffe pour trois, faut pas gaspiller, se contente-t-elle de dire, en s'assoyant, royale même si elle est loin d'être une reine. Haize regarde Morgane, puis hoche la tête.
- Ma mère a... hum... raison... vous devriez manger... je vous raccompagnerai chez vous ensuite...
- Ouais, et j'suppose que tu vas en profiter pour aller te faire recruter ? Haize hoche la tête. Visiblement, c'est son intention. Une semaine, comme d'habitude, hein ?
- Une semaine. J'vais nuire à ton commerce de toute façon si je reste plus longtemps.
- Pfffff... boude Ingrid, avant d'hocher la tête et de froncer les sourcils. Ça c'est bien vrai. Ma belle Morgane, quand t'auras choisit un mari, assure-toi que c'est un marin. T'auras que les avantages. Foi d'Ingrid.
- Arrête, tu vas lui faire peur...
- Ah ah !

Le déjeuner de la mère et du fils est déjà bien entamé et ils discutent un peu, ayant visiblement oublié... ou passé outre le fait que Morgane a visiblement tenté de prendre la tangente.

Morgane ne put s'empêcher de sourire lorsqu'Ingrid assura que tous les hommes étaient des gamins. Des gamins oui , mais qui appréçiaient de jouer à la poupée de temps en temps... Souvent , même. Et , comme elle disait , certains étaient mieux élevés que d'autres. Morgane avaient vu des exemples de bonnes ou mauvaises éducations partout sur Meca. Et particulièrement à la Sirène Argentée. Enfin , après tout , elle avait l'habitude. Trop l'habitude. Après tout , être serveuse à Meca , c'est tout un art. Il faut savoir jouer avec les plateaux , zigzaguer entre les tables et par dessus tout , savoir éviter les mains baladeuses des pirates.Bon , évidemment , cela marchait plus ou moins bien en fonction du nombres de pirates à l'affut de son passage entre les tables. Dans ces cas là ; Morgane jurait tout bas , et dans le pire des cas , elle gifflait le fautif. Et comme la nuit passée , elle avait brisé un poignet...

Bon , jeune femme , sors de ta rêverie et concentre toi sur la situation. Morgane déglutit en silence. !le combat était perdu d'avance , elle allait devoir prendre son petit déjeuner chez Haize. Elle s'avoua alors vaincu et , à grand peine se força à manger. Elle n'avait vraiment pas faim. Mais , politesse avant tout , elle mange. Et manque toutefois de s'étouffer quand la conversation vire brusquemment au choix du futur mari de Morgane. Seigneur. Qu'allait-elle pouvoir répondre à cela ? La jeune femme rougit légèrement , encore un peu plus gênée par la conversation. trouver un époux... Quel miracle ce serait !

- Un mari... je dois dire que... ma dernière histoire de coeur fut désastreuse. Alors trouver un époux... ce n'est pas ma préoccupation principale.

C'est vrai en plus. Avoir un compagnon est la dernière chose dont elle se préoccupait actuellement. On lui avait fendu le coeur et elle ne cherchait pas la personne qui lui briserait ou lui arracherait. Evidemment , toute personne doit mourir un jour. Mais à vrai dire , si Morgane pouvait éviter de succomber à l'amour , cela l'arrangerait fortement. Elle préférait sincèrement mourir aimée et amoureuse. Elle souhaitait sincèrement trouver l'amour de sa vie. Même si elle savait qu'elle aurait du mal à trouver l'homme de sa vie. Surtout sur Meca.Heureusement qu'elle avait dans l'idée de voyager...

- Marin ou pas , du moment que l'amour est présent , cela ne change rien pour moi...

[ archi nul , pardon >< ]

- Un mari... je dois dire que... ma dernière histoire de coeur fut désastreuse. Alors trouver un époux... ce n'est pas ma préoccupation principale.
- Ma pauvre enfant. C'est pas facile être si jeune, dit-elle sur un ton qu'elle aurait voulu plus doux.
- J'en suis désolé... mais ça sonne un brin faux...
- Marin ou pas , du moment que l'amour est présent , cela ne change rien pour moi...
La réponse de Morgane provoque un rictus mauvais de la part de la mère d'Haize.
- L'amour est une illusion, ma chère enfant. Si tu veux t'amouracher d'un homme, faudra te tenir loin des marins. Ils n'aiment que la mer, dit-elle, fin connaisseur de la chose.
- M'man...
- Pour l'amour, faut se tenir le plus loin de la mer possible, car la mer se plait à briser les amours. Les épaves ne se retrouvent pas qu'au fond des mers... dans les tavernes aussi, comme la Sirène.
- Je crois que ça ira, m'man, elle a saisit le principe... elle le connaissait déjà en fait... je crois...

Il y a un silence, durant lequel ils mangent tous en silence, chacun ne sachant pas trop quoi ajouter, jusqu'à ce que Ingrid se lève et commence à déservir la table. Puis, elle romps le silence.

- Je suppose que t'iras aujourd'hui au port, Haize ?
- Oui, je vais raccompagner Morgane chez elle et y aller ensuite.
- Jamais plus d'une semaine, hein ?
- Rarement...
- Fils ingrat... t'vois, Morgane, c'est ça un p'tain d'marin ! Alors à moins de vouloir vivre en mer, garde ton coeur loin des marins.
- Ça suffit, Ingrid. Laisse-la tranquille avec ça. Et puis, si je reste plus longtemps, tu te plains que je fais fuir ta clientèle.
- ... Hum... c'est bien vrai, ça.
- Tu vois, Morgane, ma mère est une vile manipulatrice.
- Et toi t'es aussi con que ton père, lance-t-elle, son sourire revenu. Haize hausse les épaules, il n'a pas connu son père. Et ça ne lui manque pas vraiment.

Haize aide sa mère à déservir la table, puis il monte à l'étage, question de prendre quelques trucs avant d'aller au port. Il redescend, puis rejoint Morgane.

- Je vous raccompagne.

Morgane ne put s'empêcher de ravaler sa salive bruyemment. L'amour ne serait qu'une illusion ? Si c'était bel et bien le cas , Morgane n'avait pluq qu'à aller se noyer au port. Même si elle ne s'en rendait pas forcément compte tous les jours , l'amour était au centre de sa vie. Etant trop fragile , Morgane avait sans cesse besoin de l'amour d'une autre personne. Deux personnes en particulier comblaient une partie du vide dans son coeur. Er'ril et Isabaut. Son père et sa meilleure amie. Quoiqu'il advienne , elle savaitqu'elle pourrait toujours compter sur ces deux là. Mais voilà , ce vide n'était même pas à moitié comblé. Il y avait en son coeur une partie vide , qui attendait avec désespoir d'être comblée. Mais en même temps , Morgane redoutait le moment où un homme viendrait remplir ce vide. Pourquoi ? Parce qu'elle avait déjà été brisée une fois. Une fois de trop. Elle ne supporterait pas de l'être une seconde fois. Sans l'ombre d'un doute , cela la tuerait. Et pourtant... Et pourtant , elle cherchait , certes inconsciemment , l'être sur qui elle pourrait compter , celui qui veillerait sur elle... Ou qui juste lui offrirait ses bras protecteurs pour les nuits froides. Oui , même inconsciemment , Morgane recherchait l'amour.

Malheureusement pour elle , comme le disait si bien Ingrid , l'appel de la mer est parfois plus fort que celui de l'amour. Bien des femmes en avaient fait la douloureuse expérience auu cours de leur vie. Être pirate représentait tellement d'avantages... et à la fois tant d'inconvéniants , songeait Morgane. La mer pouvait à la fois être la plus douce et la plus cruelle des amantes. Elle pouvait être symbole de vie tout comme elle pouvait à la fois symboliser la mort. Dangereuse tentatrice liquide qu'elle était. Cependant , il fallait les comprendre , les marins. Elle était aussi un symbole de liberté totale. Un pirate est libre de naviguer où il le désire. Tout comme il peut choisir de passer sa vie à se soûler au rhum dans une quelconque taverne. Seigneur , ceux là étaient bien trop nombreux ! C'était à se demander comment ils avaient réussi à atteindre Meca sans se perdre en chemin. Une bonnr question à poser , tiens !

Il y eu un silence pesant , durant lequel se força à manger. Elle n'avait vraiment pas faim , et si elle acceptait de manger , c'était bien pour faire plaisir à la mère d'Haize. C'était un silence assez lourd , mais Morgane ne savait vraiment pas quoi dire pour détendre l'atmosphère. La jeune femme n'était pas des plus bavardes. Et son père s'en félicitait d'ailleurs. Morgane ne faisait pas parti de ces commères qui vous inventent une nouvelle vie chaque jour. Parfois , les nouvelles étaient à pleurer de rire. Par exemple , elle fut ravie d'apprendre qu'elle avait eu cinq amants la même nuit. Charmant , me direz vous... Quoiqu'elle fut moins ravie lorsqu'elle vint à apprendre qui seraient ces cinq hommes en question. C'était beaucoup moins charmant tout d'un coup... Enfin , la demoiselle ne faisait pas plus que cela attention aux commérages. En fait , elle s'en fichait royalement. Il en faut pour tous les goûts après tout !

La jeune femme sursaute presque lorsque Haize et sa mère se remirent à parler. Ayant fini son assiette , elle écouta la conversation mère , fils d'une oreille qui ne se veut qu'à moitié attentive. La jeune femme , bien qu'invitée , ne voudrait pas ce faire indiscrète. Elle respire pronfondément , se passant une main dans les cheveux. Cependant , elle ne peut s'empêcher de rire doucement aux dernières paroles de ses hôtes. Visiblement , ces deux là s'entendait... merveilleusement bien. Elle n'a d'ailleurs pas le temps de faire un geste que la table est déjà débarassé. Quelle rapidité ! Elle dû avouer n'avoir rien vu venir. Morgane se lève alors , étrangement gênée. Elle regarde attentivement Haize monter à l'étage , puis redescendre , quelques affaires au bras. La demoiselle se sent toute chose lorsqu'il annonce , enfin ? , qu'il la raccompagne chez elle. Elle laissa échapper un soupir contenant une pointe de soulagement , puis elle se tourne vers Ingrid , bredouillant quelques paroles de remerciements :

- Je vous suis reconnaissante de m'avoir acceuillie chez vous... Et je suis désolée de vous avoir dérangé...

Elle ésquissa ensuite un faible sourire , puis ell se tourna vers Haize , qui avait déjà ouvert la porte. La jeune femme salua encore une fois la mère d'Haize , puis elle mit un pied dehors. L'air frais la fit presque instantanément frissonner. Elle soupira doucement , puis elle adressa un sourire ravissant à Haize , puis elle se mit en route , les bras croisés autour de sa taille. Il devait être assez tôt , Meca était encore déserte. La jeune femme femme ne savait pas quoi dire au pirate. Franchement , la conversation n'était pas son fort. Morgane n'était décidément pas douée avec les hommes. Et elle espérait trouver l'amour ainsi , avec tant de timidité ? Et bien , ce n'était pas gagné du tout. Surtout avec les pirates se trouvant sur cette île la ! Enfin... Au bout d'un moment , ils arrivent devant la demeure de Morgane. La jeune femme se tourne alors vers le pirate , un sourire timide sur les lèvres.

- Et bien... je dois avouer m'être trompé sur votre compte. Je vous ai mal jugé , j'en suis sincèrement navrée. C'est que... j'ai tellement l'habitude d'avoir affaire à des imbéciles... Je suis désolée. Bien des hommes ne m'auraient pas gentiment ramenée chez eux sans arrière pensée... Après m'être évanouie , hier soir , vous auriez pu faire ce que vous vouliez... Vous ne l'avait pas fait... Je vous en suis réellement reconnaissante. Merci Haize , vraiment.

Juste avant de partir, Morgane va voir Ingrid, et la remercie.

- Je vous suis reconnaissante de m'avoir acceuillie chez vous... Et je suis désolée de vous avoir dérangé...
- Pas de quoi, ma jolie, tu n'as pas dérangée du tout. Repasse quand tu veux quand t'es sur Meca, ça m'fait plaisir.

Des adieux bien sympathique et Haize et Morgane quittent la toute petite maison d'Ingrid. Le chemin jusque chez Morgane se fait en silence. Bien qu'elle lui ait franchement sourit pour la première fois depuis la veille. C'est uniquement à ce moment là qu'il eut le sentiment d'un devoir bien accompli. Il lui sourit en retour, puis retourne à son silence.

Après un moment de marche silencieuse, Morgane s'arrête. Haize regarde autour, comprenant aisément que c'est chez elle.

- Et bien... je dois avouer m'être trompé sur votre compte. Je vous ai mal jugé , j'en suis sincèrement navrée. C'est que... j'ai tellement l'habitude d'avoir affaire à des imbéciles... Je suis désolée. Bien des hommes ne m'auraient pas gentiment ramenée chez eux sans arrière pensée... Après m'être évanouie , hier soir , vous auriez pu faire ce que vous vouliez... Vous ne l'avait pas fait... Je vous en suis réellement reconnaissante. Merci Haize , vraiment.
- Y'a pas de quoi, c'est tout naturel... Enfin, pour lui c'était parfaitement naturel. Pour les autres, ça reste à voir, mais Haize se moque pas mal des autres. Y a un bref silence, qu'il s'assure de ne pas éterniser. Eh bien... vous voilà enfin chez vous... je... je suis ravi... tout de même... de vous avoir rencontré. Bah quoi, ça avait pas été facile comme rencontre. Très contrariant par moment, mais bon, c'était ce genre de moments qui restaient gravé dans la mémoire. Il baisse un peu les yeux.Ma mère était sincère lorsqu'elle vous a invité à revenir la voir quand vous voudrez... si vous en avez envie, n'hésitez pas, ça lui fera plaisir... et ça le rassurera lui de savoir que sa mère n'est pas complètement toute seule. Je suis marin, je ne supporte pas longtemps la terre ferme... j'espère avoir le plaisir de vous revoir un jour...

Et il était sincère. Ça se reflétait dans l'esquisse de son sourire, dans le bleu ciel de ses yeux.

La jeune femme passa nerveusement une main dans ses cheveux roux , signe qu'elle était gênée. Sil il y avait une chose qu'il ne fallait pas dire , c'était que l'avoir aidé était quelque chose de naturel. Pourquoi ? Parce que c'était tout le contraire. Il y avait tant de chosesqui s'étaient passées la veille qui n'étaient pas "naturelles". A commencer par le fait qu'il l'ait aidé à ne pas finir à moitié nue dans une taverne remplie d'ivrognes. Là , elle aurait sans aucun doute était victime de... Elle n'osait même pas y penser. Elle ne souhait pas vraiment penser aux conséquences de ce malheureux geste. la jeune femme l'avait décidé , plus de corset les soirs de travail. Travail qu'elle comptait arrêter dans peu de temps. Embarquée sur un navire ou pas , elle ne supporterait pas plus longtemps d'être prise pour un jouet vivant. Comme elle avait tendance à le penser de plus en plus souvent , des putains , il y en avaient assez sur l'île. Et , pour être franche , elle ne comptait pas , mais alors vraiment pas venir grossir leurs rangs. Être une poupée , non merci ! Et certainement pas entre les mains de n'importe qui. Ou n'importe quoi , par moment... En bref , Morgane avait eu beaucoup , voire énormément , de chance la veille au soir...

- Non , ce... enfin , pour beaucoup , ce n'est pas naturel. Je me suis effondrée dans vos bras... Vous auriez pu faire ce que vous vouliez... Je le sais , les femmes ne sont pas très présentes sur l'île... Beaucoup... Soyons crus , beaucoup m'aurait violé à votre place.

La jeune femme soupira , levant un instant vers le ciel. De gros nuages gris venaient de l'Ouest , et ils ne tarderaient pas à répandre leurs eaux sur l'île pirate. Le vent soufflait déjà assez fort , faisant virevolter les longs cheveux de Morgane devant son visage. Elle tenta , geste vain de les remettre en place. Mais l'instant d'après , le vent reprenait sa douce emprise sur eux. Morgane soupira tout bas , baissant ses yeux verts sur Haize. Elle ne savait pas vraiment quoi dire. Brusquemment , elle s'empourpra. Il était ravi de l'avoir rencontrée... Un sourire toujours aussi timide que le précédant naquit sur ses lèvres.

- J'en suis... ravie aussi , Haize.

C'était vrai. Qui sait ce qu'il serait arrivé sans son , sans ses , interventions ? Et puis , il était vraiment symphatique en fait. Plus qu'elle ne l'airaut pensait au premier abord. En réalité , il était différent des hommes qu'elle croisait. Sa mère avait raison , elle l'avait bien élevé , comme elle disait. Bon évidemment , Morgane n'était pas certaine qu'il n'ait pas eu d'idées déplacées au cours de la soirée , mais si c'était le cas , il n'en avait pas parlé et il n'avait pas tenté d'agir. Heureusement... pour lui ! Fragile , mais pas sans défenses la Morgane. Elle pouvait faire bien plus que briser un simple poignet ! Bon , encore heureusement , Haize resterait entier. Il s'était bien comporté , que ce soit au début , à la moitié ou à la fin de cette très longue soirée. La jeune femme reculait vers sa porte lorsque Haize avoua que sa mère serait vraiment contente de ma revoir. Elle eut un nouveau sourire , amusé celui là.

- Cela sera avec plaisir que je lui rendrai visite. Et je serai aussi... ravie de vous revoir.

Un éclair traversa le ciel , et un coup de tonnerre retentit , violent , dans le ciel. L'instant d'après , la pluis se mettait à tomber. La pluie du printemps , la pluie de Karfïas. En moins d'une minute , minute silencieuse , Morgane était trempée. A présent , ses cheveux étaient plaqués contre son visage. Elle recula d'un pas , se plaquant à la porte avec un léger sursaut. Morgane jura , puis elle se décida finalement à ouvrir. A peine eut-elle ouvert qu'un chat , au moins aussi roux qu'elle se glissa en ronronant entre ses jambes. Elle sourit , puis se pencha pour le prendre dans ses bras. Elle se retourna vers Haize , souriante. Elle était frigorifiée , et déjà elle se languissait d'un bon feu brûlant dans sa cheminée. Elle soupira , reposant l'animal au sol humide.

- Je... Vous voulez entrer un instant ?

Le vent se lève, y'aura pluie. C'était un vent frais et humide. Implacable signe de la nature. Un rapide regard vers les nuages qui s'amoncèlent rapidement.

Elle est ravie aussi ? C'est pas ça qu'elle disait hier. Au contraire, elle disait exactement le contraire. Comme quoi les choses pouvaient changer pour un petit rien. Il sourit. Ça, il ne lui en fera pas la remarque. elle était de bonne humeur, mieux valait ne pas la contrarier. Elle avait brisé un poignet. Et un poignet brisé, c'était mal parti pour se faire embarquer sur un bateau. Mieux valait être ne parfaite possession de tous ses membres. Il se contente de sourire encore.

Morgane était surprenante. Elle voulait le revoir maintenant. Quoique d'un autre côté, elle pouvait dire n'importe quoi. Il allait quitté Meca d'ici quelque jours et peut-être ne jamais revenir. Qui sait ce qui pouvait se passer en mer...

Un éclair traversa le ciel , et un coup de tonnerre retentit, aussi soudain qu'en pleine mer. Bah... Meca était en pleine mer, donc, fallait que ça serve. Il remonte soigneusement le collet de sa redingote. Sa redingote et lui, c'était une grande histoire d'amour. Elle le gardait du froid, de l'humidité en pleine mer depuis des années. En échange pour les bons services rendus, il faisait bien attention à ne pas la déchirer, en prenait un soin jaloux et la recousait minutieusement à chaque accroc . Une fidèle amie, quoi.

Elle recule et ouvre la porte. Un gros chat orange sort et vient se frotter aux pieds de Morgane. Image charmante. Il déteste les chats. Enfin, pas une haine des chats, mais il ne les aime pas. Sauf ceux qui bouffent les rats sur les bateaux, là, ils sont utiles. M'enfin, bref...

- Je... Vous voulez entrer un instant ?

Quoi ? Elle L'invitait à entrer quand la veille elle n'avait que réclamer le contraire ? Il a un subtile mouvement de recul. Est-ce que ça cachait quelque chose ?

- C'est que... je... Bah oui, il ferait mieux de descendre au port... Je... Haize, t'es con. C'est le déluge et t'hésite ? Mais... Allez, grouille avant qu'elle change d'idée. D'accord... Enfin... pauvre cloche... Le temps qu'il cesse de pleuvoir... Bon, on peut dire que ça va... vraiment, Haize... tu me déprime parfois... Merci, c'est gentil.

Haize suit Morgane et entre chez elle. Curieux, il passe les premières secondes à graver l'espace dans sa tête.

Avec un léger grincement la porte accepte de s'ouvrir en entier. Morgane poussa doucement le chat dehors. En réalité , il n'est pas à elle. En fait , il n'est à personne. C'était juste un animal prit en affection par les habitants du quartier. Il allait ou bon lui semblait , quand il voulait. Il n' était à personne , mais il était à tout le monde. La jeune femme le trouvait souvent chez elle , sans vraiment savoir comment il était rentré. Elle avait beau chercher , cela restait et resterait un mystère pour elle. Quoiqu'en même temps , ce n'était pas vraiment sa préoccupation principale. Et puis , c'état toujours agréable d'avoir quelqu'un quand on s'attendait à être seul. Ca faisait toujours plaisir. Même si cela n'était qu'un chat. C'était toujours quelqu'un à qui parler... Bon évidemment , la bête ne lui répondait pas. Morgane monologuait , même si , dans ses moments de fragilité , elle avait l'impression que le chat lui répondait. Certes , c'était idiot. Mais bon , ne voulant pas se trouver encore plus folle , la jeune femme n'y réfléchissait pas. N'y réfléchissait plus , plutôt.

Trempée , Morgane referma la porte , ayant laissé entrer Haize. La demeure de Morgane , assez grande , il fallait le dire. Bon , après tout , elle était fille de Capitaine , et son père lui avait laissé plus de moyen que nécessaire. La première chose que l'on voyait en entrant , c'était un divan juste en face d'une cheminée sans feu. Normal , il s'était éteint. Au sol , un tapis rouge , richement décoré. La jeune femme n'appréçiaitpas particulièrement le tape à l'oeil , mais celui ci lui avait plu. Alors elle s'était laissée tenter. juste derrière , une grande fenêtre donnait accès à une petite cour. Au fond de la pièce se trouvait une cuisine , avec tout le nécessaire. La pièce comportait quelques meubles , mais elle n'était pas surchargée. Des éscaliers se trouvait à gauche de la cuisine , montant à l'étage , où se trouvaient plusieurs pièces. Morgane désigna le divan à Haize , puis elle entreprit d'allumer le feu. Elle s'agenouilla devant la cheminée. Elle ne s'en rendait pas vraiment compte , mais agenouillée ainsi , son haut remontait légèrement , faisant apparaître le papillon tatoué en bas de son dos. Non mais franchement , Morgane , tu ne te rends pas compte de l'effet que ça a sur un homme , un morceau de chair ? Visiblement non. Sincèrement , si tu te mets toujours dans de pareilles situations , c'est normal qui tu sois toujours entre deux ivrognes en manque !...

Ferme la , conscience inutile et inaudible. Le feu se mettant enfin à crépiter dans l'âtre , Morgane se redresse ; dissimulant ainsi son tatouage. Un violent coup de tonnerre retentit , tendit qu'elle allait ouvrir la bouche pour dire quelque chose. Elle n'avait eu aucune chance face à ce bruit féroce. Fragile demoiselle , vous dis-je... Enfin , finalement , elle a la possibilité d'ouvrir la bouche et de parler , alors elle le fait. Enfin , elle essaye... Timiditée...

- J'éspère que l'orage cessera vite. J'ai horreur du tonnerre , ça a le don de me rendre encore plus nerveuse...

Un léger rire , puis ça y est , elle ne sait déjà plus quoi dire. Pas bavarde pour un sou la demoiselle. Avec un sourire timide , elle se rent jusqu'à la cuisine. Elle ouvre un placard , prend deux verres qu'elle remplit de rhum. Du rhum , forcément. Elle revient , puis elle en tend un à Haize , avant de se planter debout devant la cheminée , face à Haize. Un peu ailleurs , elle baisse les yeux , ne sachant pas vraiment quoi dire. La possibilité qu'il ne s'arrête pas de pleuvoir avant un bon moment lui traverse l'esprit. Peut-être qu'Haize restera un peu plus longtemps que prévu. Peut-être que oui , peut-être que non...

En entrant, Haize retire sa redingote et la pose sur une chaise. Faut pas mouiller partout quand même. Il est bien élevé, Ingrid l'a dit. Même si elle lui désigne le divan, Haize ne s'assoit pas. Y a beaucoup trop de trucs à observer comme les murs, la décoration, etc. C'était en fait une incursion dans l'intimité de Morgane. Juste retour des choses quand on se rappelle qu'elle a dormi dans son lit, prit le petit déjeuner avec sa mère et s'est évanouie dans ses bras. Voyez le genre ?

Il apprécie la couleur du tapis, l'espace assez vaste pour une jeune femme seule et l'âtre du foyer qui doit procurer une très agréable chaleur. Visiblement, la fille du Capitaine Anarel est bien nantie et ne manque de rien. Il ne rate rien du spectacle involontaire qu'elle offre de la chute de ses reins. Le tatouage est remarquable et il a une brève pointe de jalousie envers le tatoueur qui a eu le plaisir de marquer sa peau. Il espère qu'il a su en profiter... quoiqu'avec le caractère qu'elle a, rien n'est moins sûr. Elle se relève, lui cachant l'agréable vue, puis vient pour dire quelque chose, mais le tonnerre lui coupe la parole. Quelle impoli ce tonnerre. Elle reprend.

- J'éspère que l'orage cessera vite. J'ai horreur du tonnerre, ça a le don de me rendre encore plus nerveuse...
- Certes, c'est assez effrayant. Mais à moins à terre, à part la foudre, on risque pas grand chose d'un orage. Et y a les paratonnerre pour réduite les risques. En mer, y a les éclairs, le vent, les vagues et les récifs. Ça, c'est terrifiant. Réplique spontanée, il n'a même pas songé que ça pourrait vexer la belle qu'il compare terre et mer. Ça rendait anodin sa crainte et il était bien placé pour savoir que les craintes ne sont jamais anodines. Je suis désolé, je ne voulais pas être désagréable.

Un peu mal-à-l'aise, il va chercher sa redingote et l'approche de la chaleur du feu. Pourquoi ne pas en profiter pour la faire sécher, hein ? Sa fidèle amie, bleu foncée, marine pourrait-on dire. Un vrai chef-d'oeuvre. Enfin, pas en apparence, mais en utilité et par son côté pratique. Une merveille camouflée.

- Pourquoi un papillon ? La liberté ? Ou les couleurs ?

Sourire Haizien.

La jeune femme vida son verre d'un trait , puis elle le posa sur une petite table basse juste à côté du divan. Elle s'asseoit ensuite. Elle frissonna légèrement , ramenant ses jambes contre sa poitrine. Elle lève les yeux vers Haize , qui ne désire visiblement pas s'asseoir. Ma foi , tant pis , il est libre de rester debout. La jeune femme soupira doucement , sentant toujours l'agréable brûlure du rhum dans sa gorge. Un deuxième verre ? Non. Les seules autres brûlures dont Morgane avait envie , c'étaient celles de l'amour. Brûlures qu'elle n'avait pas ressenties depuis bien trop longtemps. Mais malheureusement pour elle , l'amour ne brûlait pas qu'en bien. A jouer avec ce feu là , on finissait par ce brûler les doigts. Morgane ne le savait malheureusement que trop bien. Dans le coeur d'une femme qui aime , il y a le besoin de souffrir. A croire qu'amour doit rimer avec douleur. Mentale , j'entends bien. Ces douleurs là sont les pires qui existent. Elles vous brisent en moins de deux. Morgane connaissait très bien ce principe là. Et elle pouvait confirmer que c'était affreux. La jeune femme avait eu mal , et elle avait toujours mal. La plaie ne cicatrisait pas. Elle était mortellement vicieuse et par dessus tout mauvaise !

Morgane sursauta. Un papillon ? Quel papillon ? Elle met un moment à comprendre de quoi il parle. Puis son visage vire soudainement à l'écarlate. Avec tout le mal qu'elle s'était donné pour rester entièrement habillée , il avait fallu qu'un malheureux geste dévoile sa chute de reins , dévoilant de ce fait le papillon qui y était tatoué à l'encre verte. C'était gênant ,très peu de personnes connaissaient l'existence de ce papillon. C'était un cadeau , à vrai dire.

- Ce n'est ni la liberté , ni les couleurs. C'est autre chose. La fuite. La possibilité de pouvoir fuir le labyrinthe de la réalité... Il représente aussi le fait d'être éphémère. Nous ne sommes là que pour un court laps de temps , par rapport aux autres peuples. C'est peut-être ce qui noud rend plus libre , après tout... Ce tatouage est un cadeau de mon père , pour mes vingt ans.

Elle se tut , son regard dérivant dans le vide. D'entre ses deux tatouages , son papillon était son favori. Evidemment , elle appréçiait sa rose des vents. Mais son papillon représentait beaucoup plus de choses à ses yeux. Sa rose des vents , son père lui avait fait tatoué à ses quinze ans , à l'encre verte , elle aussi. Son père l'avait emmené chez un excellent tatoueur. Non , ses talents avaient peut-être été décuplés par l'avertissement d'Er'ril. S'il avait raté le tatouage de sa fille adorée , il aurait fini sans ses mains. Le tatouage avait été parfaitement réussi , sans une seule erreur. Heureusement d'ailleurs. Par souci d'intimité , Morgane avait voulu que ces deux tatouages soient à des endroits... privés. Ainsi , a l'exception toute nouvelle d'Haize , seuls les personnes avec qui Morgane serait particulièrement intime auraient le droit de voir ces précieuses oeuvres. En tout , seulement quatre personnes avaient pu les voir. La jeune femme soupira , puis elle reporta son attention sur Haize , toujours debout devant elle , son verre de rhum à la main.

- si quelqu'un apprend l'existence de ce tatouage , soyez assurez que vous le regretterez !

Elle sourit , puis éclata de rire , une fois de plus coupée par un coup de tonnerre.

Quand Morgane rougit à l'énoncé du papillon vert, il se dit qu'il a fait une gaffe et qu'il va se faire virer sans autre forme de procès, mais il se trompe. Elle ne le vire pas, au contraire, elle lui explique calmement. Morgane était surprenante.

Il écoute attentivement l'explication de la signification du papillon. Il saisit la nuance. Il hoche la tête, compréhensif. C'était bien le papillon. Représentatif de Morgane, ou du moins logique selon ce qu'elle avait expliqué. Lui, il préférait les cicatrices. Il trempe ses lèvres dans le rhum, en prend une toute petite gorgée. Il n'avait même pas finit son unique verre la veille. Troublant pour un pirate, hein ? C'était étrange comme cadeau, un tatouage, surtout de la part d'un père à sa fille. Il s'attendait plus à un ex-copain, ou quelque chose du genre. De toute façon, tant qu'il n'y avait pas de noms, tout était ok. Sinon, les noms, c'était gênant.

Morgane était surprenante. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle ait eu un tatouage. Surtout pas à cet endroit. Un gorgée de rhum, il fronce les sourcils, septique quant elle le menace des pires choses s'il oser dévoiler qu'elle a des tatouages. Il ne doutait pas qu'elle fut agile, mais elle semblait si délicate... de toute façon, il se laisserait volontiers torturer par ses soins. Un sourire Haizien apparaît à ces pensées, tandis que d'autres fusent devant ses yeux. Du pur fantasme. Mais bon, c'était pas bien méchant... au contraire, c'était trèèèèès gentil.

- Je garderai cette vision comme un précieux secret.

Mais bon, si quelqu'un en parlait de ce tatouage, il ne nierait pas non plus qu'il a pu y poser les yeux. Et en plus, elle éclate de rire, coupée par le tonnerre, mais elle rigole franchement. C'est fous ce que ça peut faire plaisir de la voir rire et sourire. Elle était encore plus belle. Anarel avait de la chance d'avoir une fille pareil. Mais garder les mauvais parti à distance devait être une tâche ardue et de tous les instants. Quoiqu'elle arrivait très bien à garder les distances. Il en avait lui-même fait les frais. Mais finalement, ça se poursuivait plutôt bien. Suffisait à ne pas trop faire de gaffe, pour ne pas la piquer au vif.

Durant quelques secondes, il la fixe, souriant, mais regard assez explicite de ses pensées du moment. Rien de bien méchant, mais pas vraiment chaste non plus. Saleté de papillon, hein ? Ça l'amuse, en fait. Cet espèce de jeu du chat et la souris, auquel il joue probablement seul, mais bon, peu importe. Il ne s'en cache pas, mais ne précipite rien. Étrangement, il ne serait pas trop contrarié, si l'orage s'éternisait. Mais bon, c'est certain que s'il continuait de la fixer comme ça, elle allait le foutre à la porte sans plus de cérémonies. Y'avait de quoi être troublé par l'intensité du bleu de ses yeux et il en était parfaitement conscient. Il baisse les yeux sur son verre, l'air un peu gêné, mais il n'en est rien.

- Comment se porte votre père ? Je ne l'ai pas recroisé depuis au moins 4 ans. Enfin, je crois une fois, mais c'était dans une foule, j'me souviens plus où exactement...

Il fronce les sourcils, affectant un air songeur, cherchant à se rappeler où il aurait pu croiser Anarel la dernière fois.

Un précieux secret. Oui , c'était exactement ce qu'était son tatouage. Un précieux secret très bien gardé par ses soins. Placé à un endroit stratégique , comme disait son père. Er'ril avait prit l'habitude de plaisanter à ce sujet. Endroit stratégique , parce qu'il disait qu'il fallait forcément la dévêtir pour avoir le plaisir de poser ses yeux dessus. Enfin , bon , ne nous étendons pas sur le sujet. La jeune femme posa un instant ces yeux verts sur Haize , avant de les détourner , gênée. Oui , elle était vraiment gênée en présence du sexe opposé. La jeune femme était de toute façon rarement à l'aise avec les hommes. Le seul avec qui elle avait vraiment été à l'aise... Elle allait le tuer. Oh , oui , William paierait pour ce qu'il lui avait fait. A elle , et surtout à leur enfant qui n'avait jamais pu voir le jour. Morgane sentait que son esprit dérivait. Pourtant , elle n'arrivait pas à éviter ce saut dans le passé. Sur le coup , elle avait tellement été heureuse d'être enceinte... Mais voilà , il avait fallu qu'il gâche tout en l'abandonnant. Et à cause de ça , elle avait fait une fausse couche. Ca l'avait complètement anéantie. Elle aurait voulu mourir. Mais ensuite , l'idée de vengeance avait été tellement tentatrice.Elle s'était juré de ne pas mourir avant de lui ôter la vie. Et bien évidemment , elle le ferait souffrir autant que lui l'avait fait. Elle en avait fait la promesse. Et elle la tiendrait.

Non , non , non. Cela suffisait pour l'heure. Il fallait qu'elle s'ôte ces idées morbides de l'esprit. Elle ne voulait pas recommencer à déprimer. Et certainement pas à déprimer en songeant à l'amour. C'était trop dur , et cela faisait trop mal. Alors , il lui fallait arrêtrer d'y songer. Et vite. La jeune femme tourna la tête vers Haize , puis elle lui sourit timidement , avant de poser ses yeux sur les flammes qui crépitaient dans l'âtre de la cheminée. La pièce c'était enfin réchauffée. Par moments , un éclair illuminait la pièce d'une étrange lumière , plutôt inquiétante , il fallait le dire. Un peu mal à l'aise , Morgane relâcha ses jambes , les reposant au sol. Puis elle tourna une fois de plus la tête vers Haize , surprise de croiser son regard. Elle fut quelque peu surprise par la couleur bleue , plutôt jolie d'ailleurs , de ses yeux. A sa grande surprise , ce fut lui qui baissa les yeux en premier. Un point pour toi , jolie pirate. La jeune femme baissa à son tour , les yeux , puis elle entreprit de répondre avec précision à la question de Haize à propos de son cher père.

- La dernière fois que j'ai croisé mon père , il allait très bien , merci. Bon , évidemment , la crise de la cinquantaine fait son petit effet. Mais là , cela fait presque six mois qu'il est en mer et que je n'ai pas de nouvelles de lui. Je suis inquiète , mais bon , comme à son habitude , il va débarquer au moment ou je m'y attends le moins... Même si c'est un excellent marin , je m'inquiète toujours... Mais j'imagine que c'est le lot de toute femme qui reste à terre...

Elle sourit , ne pouvant s'empêcher de penser à la mère d'Haize... Comme Er'ril lui daisait souvent , elle s'en fait toujours trop pour lui. Mais bon , elle est comme ça , elle ne peut pas s'empêcher de s'inquiéter pour lui et son équipage. Pirate sentimentale , vous dis-je... Oh , non. Tais toi , conscience.

- Haize , vous voudriez bien me tutoyer à partir de maintenant ? Ce "vous" me vieillit , je n'apprécit pas... Surtout que j'éspère ne pas ressembler à quelqu'un qu'il faut absolument vouvoyer... Enfin j'éspère !

- Oh, y a aussi tout ceux qui sont en mer, répond-il machinalement, avant de se rendre compte qu'il a effectivement répondu sans vraiment y penser. Bah oui, dit-il, pour s'expliquer, on a beau être en mer, on s'inquiète toujours pour ceux resté à terre. Le pire, c'est de se demander si la prochaine fois qu'on va revenir, ceux resté à terre seront encore les mêmes... ou vivant. Je m'inquiète toujours pour ma mère... mais je nuis à son commerce. C'est mauvais pour ses affaires d'avoir son le fils dans les pattes. Disons que ça fait mauvais karma.

Il sourit à cette idée. De toute façon, il ne tient pas en place. Quelques jours à peine à tarre, sans rien de précis à faire, il s'ennuie, il tourne en rond, devient insupportable, puis finit par descendre en ville et se trouver une place vite fait pour retourner en mer le plus rapidement possible. Il était marin, pour le meilleur et le pire.

Il hoche la tête quand elle lui demande de la tutoyer. Un gros défi en perspective. Il n'avait pas l'habitude.

- Si vous insistez, Morgane. Je ferai mon possible. J'ai été habitué à vouvoyer tout le monde... en particulier les dames et les personnes âgées... et mes supérieurs... presque tout le monde en fait... sauf ceux à qui je dois des écus... et ceux avec qui j'ai trop bu... en fait, je vouvoie de moins en moins en mer... mais sur terre... m'enfin... disons que ma mère, a reçu une éducation très poussée et que pour des raisons obscure, elle a finit par se retrouver à Meca... mais elle espère toujours que je devienne quelqu,un de bien et pas une racaille. Jamais compris pourquoi d'ailleurs... Pensif, il fixe le fond de son verre et fait tourner le liquide brûlant, avant d'en prendre une gorgée. Lubie de maman, je suppose.

Bah ouais, pourquoi elle voulait tant qu'il devienne quelqu'un et surtout pas "une racaille comme ton père", elle habitait Meca, c'était difficile de ne pas devenir une racaille dans ces conditions... et puis, sa mère était loin de connaître toutes les frasques de son fils et c'était mieux comme ça, pour tous les deux.