Retrouvailles [PV Mathilde]

Spoiler:

Guillaume était à Etherna en ce mois de Barkios, il était sur son destrier et il arpentait la campagne, seul, sa monture au pas. Il se rappelait cette charge, une belle chevauchée au devant de l'ennemi comme toutes les autres. Du moins c'est ce qu'il s'était dit avant que cela ne tourne mal. Il se rappelait la douleur qu'il avait ressentit lorsqu'un coup d'épée s'était abattu sur ses côtes. Sa cotte de maille avait cédé sous le choc et les anneaux ébréchés avaient pénétré la chair en même temps que la lame sur son flanc gauche. Il avait eu de la chance qu'elle ait tout de même fait son office un minimum, empêchant qu'un organe vital ne soit touché. Toutefois il avait eu deux côtes cassées en plus de l'ouverture d'où son sang s'écoulait. De nouveau la chance avait été avec lui car sa monture n'avait pas souffert et dans le choc qui était survenu, elle avait continué, emmenant son cavalier plus loin, à distance. Ses troupes l'avaient ramené et il avait été soigné par les guérisseurs. La blessure s'était finalement infectée et c'était un miracle de Néera qu'il n'ait pas trépassé. D'abord intransportable, dès que ce fut possible, on le ramena à Etherna ou il continua sa convalescence durant plusieurs ennéades avant d'avoir l'autorisation de se lever de nouveau. Il commença par de petites promenades dans les jardins du château, il cherchait la solitude mais ce n'était pas évident de la trouver dans un endroit qui grouillait de serviteurs et de profiteurs de la cours qui était vide étant donné que Jérôme était à Bastylle et qu'il n'avait pas d'épouse, ni d'enfant. Leur pauvre mère devait passer de bien mauvaises nuits avec Mathilde qui s'était enfuie et était introuvable et ses deux fils qui guerroyaient alors qu'ils n'avaient pas de descendance. Le pisteur qui devait retrouver la sœur benjamine donnait des nouvelles régulière par courrier. Le délai entre la fuite et le début des recherches n'avait rien facilité mais il pensait être sur sa trace. Bien entendu, c'était une présomption et rien n'était sure que ce soit la bonne piste, il en avait d'ailleurs déjà suivit plusieurs autres qui s'étaient révélées infructueuses.

Dès que Guillaume avait pu remonter à cheval, il était partit pour de longues balades, insistants lourdement pour ne pas être accompagné et répétant que ce n'était pas une partie de chasse mais juste pour prendre l'air. Au fur et à mesure que le temps avançait, il était plus difficile de refuser d'être accompagné, même si Etherna était épargné par les bandits. La chasse qui leur avait été donné en compagnie d'Odélian sur les deux terres afin de purger de leur engeance les environs avait porté ces fruits. Certains jours, il ne coupait pas à l'accompagnement d'un ou deux serviteurs ou nobles désireux de se mettre dans les bonnes grâces. Il était étonnant de voir certains seigneurs, pas des plus haut placés, laisser leur ost partir sans eux à leur tête ou n'en envoyer qu'une poignée et attendre de la reconnaissance en retour. Ce jour en tout cas, Guillaume avait réussit à être seul et il se trouvait dans la campagne, au nord-est de la ville lorsque sa monture marqua un arrêt alors qu'il traversait un petit bois. Quelqu'un se trouvait à proximité.

Le chemin de retour vers Etherna avait été long et plus compliqué que le départ. L’hiver venait, il faisait froid et chaque soir il fallait trouver une auberge pour dormir. A Thaar Mathilde avait acheté de nouveaux habits, ceux de Lyse devenait trop courts et il fallait s’habiller chaudement. La jeune fille s’embellissait chaque jour et elle semblait parfaitement heureuse dans cette vie de voyageuse, seulement voilà Mathilde était parfaitement consciente que ce n’était pas un endroit pour elle et il avait fallu que Cérya installe le doute en elle pour qu’elle s’en rende vraiment compte. Le vrai déclic elle l’avait eu quelques ennéades plus tôt à Thaar. Elle avait décidé de prendre des nouvelles de la Péninsule une dernière fois. L’aubergiste lui avait rapporté des détails sur des choses futiles, elle avait fait glisser la discussion sur Serramire. Là il était devenu plus bavard, apparemment on ne comptait plus les exploits du De Clairssac, même si le deuil qui avait frappé sa famille devait l’avoir profondément bouleversé. Mathilde avait cru mal comprendre mais l’imposant bonhomme lui avait répété qu’on disait le frère cadet sur son lit de mort. Il aurait été gravement blessé lors d’un combat et devait probablement déjà être mort.
Le choc qu’elle avait éprouvé l’avait laissé tétanisé un long moment. Pendant un jour entier elle refusa de parler, elle resta murer dans le silence, fixant un point invisible de sa chambre. Le lendemain matin lorsqu’elle était enfin sortie de son silence, elle avait rassemblé toutes leurs affaires dans leur sac et avait annoncé à Lyse qu’elles rentraient à Etherna. La fillette n’avait d’abord pas compris, mais elle n’était pas mécontente de retourner en Péninsule, les gens à Thaar l’effrayait.

Mathilde se montrait cette fois bien plus prudente qu’à son départ, elle quittait les routes principales, ne faisant que les longer pour éviter de croiser des personnes mal intentionnés. Ces mois passés sur les routes l’avaient profondément changé. Elle n’était plus la jeune noble habituée au tricot et aux conversations de Dames. Cette Mathilde là avait grandi. Sa peau anciennement pâle portait les marques du soleil, faisant ainsi ressortir la couleur si particulière de ses yeux. Mais ses derniers étaient rougis par les larmes qu’elle versait depuis plusieurs jours. La mort de son frère lui faisait si mal qu’elle ne parvenait même plus à sourire à son fils.
Ce matin elles traversaient une forêt à proximité d’Etherna, par chance elles n’avaient croisé personne depuis leur entrée dans la baronnie. Dans le silence de la forêt, elles entendirent bientôt les bruits de sabots et aussitôt Mathilde confia Kiel à la jeune fille.

« - Ne te montre pas, reste là derrière ce bouquet d’arbre. Je reviens vous chercher d’accord. »

Lyse lui demanda d’être prudente et cette remarque fit sourire la jeune femme. Et dire que c’était à elle de s’inquiéter pour ses enfants… La fillette grandissait tellement vite…
S’avançant entre les arbres, Mathilde vit bientôt le cavalier. Le cheval s’arrêta et l’homme regarda autour de lui. Mathilde plissa les yeux pour distinguer la silhouette et… elle crut que son cœur allait cesser de battre. Guillaume… Guillaume était sur le cheval. Lui qu’elle pleurait depuis des jours étaient bel et bien vivant.

Avançant un peu plus, elle apparut bientôt devant le cavalier. Levant son visage vers son frère, elle sentit les larmes couler sur ses joues et encadrer l’immense sourire qu’elle lui adressait. Il devait être furieux contre elle, tout comme Jérôme. Mais elle se fichait bien de ça, elle ne regrettait pas d’être partie, elle avait appris tant de chose pendant son voyage. Mais à l’instant ce qui la frappait c’était cet amour inconditionnel qu’elle éprouvait pour ses frères.

« - Par les dieux … Guillaume… je te croyais mort… »

Bien que sachant pertinemment que les alentours étaient sécurisés du brigandage, Guillaume était nerveux, tous ses muscles étaient tendus et cela tirait sur sa cicatrice, l'élançant douloureusement. Il n'était pas à l’abri d'une mauvaise rencontre avec un sanglier ou autre et il n'était pas en état de se défendre. Lorsqu'une silhouette sortit de derrière un arbre, il fit reculer sa monture afin de garder une certaine distance et il dévisagea la nouvelle venue. Mathilde avait bien changé, son teint était halé et elle n'était pas habillée des robes habituelles pour une dame de sa prestance, aussi il ne la reconnu pas immédiatement. Pourtant il ne fallu pas non plus très longtemps avant que, du sourire que lui lançait la voyageuse et du regard identique au sien qui lui faisait face, il ne reconnaisse sa sœur benjamine, avant même qu'elle ne lui parle expliquant qu'elle le croyait mort. Elle avait des larmes qui lui coulaient le long des joues.

Une douleur enserra le cœur du fier guerrier, non qu'il avait une attaque mais tout l'amour qu'il portait à sa sœur ainsi que la tension qui disparue. Que ce soit celle de la crainte de la rencontre ou encore celle accumulée depuis la disparition de Mathilde, il fut submergé par toutes les émotions qui se déversèrent en lui. Cela le paralysa et d'une certaine manière, aux yeux de la benjamine, cela pourrait être perçu comme de la froideur. Guillaume n'avait pas voulu avoir cette réaction mais un sentiment remonta, c'était celui de la colère. Il ne détestait pas sa sœur, comment l'aurait il pu alors qu'il l'adorait depuis son plus jeune âge et ils étaient plus proche que ne l'était Jérôme. Mais les actes qu'elle avait entreprit depuis son engrossement, jusqu'à la fuite après tout ce que l'ainé avait fait pour elle, c'en était de trop. Heureusement pour la famille, le faquin qui était responsable de nombreux tracas avait disparu en même temps qu'il avait perdu sa guerre à Oësgard, cela avait retiré un poids et un peu d'amertume. Il fit passer son devoir avant son lien familial et un voile de froideur se posa sur ses yeux bleusavant qu'il ne réponde. Toutefois, il ne réussit pas à empêcher totalement le ton d'être hésitant et il n'eut pas l'effet escompté, surtout que ses paroles furent hésitantes également

"Ma....Mathilde ? c'est...toi ?"

Il fit avancer sa monture vers sa sœur. Il ne pouvait pas descendre de lui même et encore moins remonter avec sa blessure. Allait elle comprendre cet état de fait ou allait elle penser qu'il la détestait tellement qu'il ne descendrait pas pour la prendre dans ses bras comme il l'aurait voulu. Cela l'aida donc dans son rôle du méchant

"Que fais tu ici ? cela fait des semaines que Jérôme à ordonné de te rechercher et les meilleurs limiers ont bien du mal à suivre tes pérégrinations."

Il remarqua aussi que les deux enfants qu'elle avait emmené avec elle, l'un légitime, l'autre adopté, n'étaient pas avec elle

"Où sont donc passés les enfants ?"

Avec tout cela il n'avait pas répondu à sa soeur concernant le fait qu'il ne soit pas mort cela viendrait surement après

Le ton de Guillaume était distant, presque froid et sa posture tendue. Il ne quitta pas la selle de son cheval mais s’approcha néanmoins. Alors qu’il la dévisageait de haut, Mathilde hésita. Avait-elle fait le bon choix ? Avait-elle eu raison de faire demi-tour ? La relation qu’elle avait avec Guillaume était toute particulière, elle pouvait comprendre sa colère, mais sa réaction actuelle la blessait tellement qu’elle se surprit à penser qu’il valait mieux pour elle rebrousser chemin. Si lui ne pardonnait pas, alors qu’en serait-il de Jérôme. Oh et puis zut, elle n’en avait que faire de leur pardon. Les semaines qu’elle venait de passer sur les routes avaient été les meilleures de sa vie. Elle avait vu tant de chose, rencontré des gens particuliers… Sans cette fuite elle n’aurait jamais rencontré Arthur, elle n’aurait jamais su l’affection qu’elle portait à son amie Cérya… Elle n’aurait jamais pu s’occuper de son fils comme elle l’avait fait.

Prenant un ton aussi dur que celui de son frère, Mathilde se campa les bras sur les hanches devant son frère.

« - Et bien tu diras à Jérôme qu’il peut changer de limiers. »

La jeune femme croisa le regard de son frère et ne le lâcha pas pendant de longues secondes, comme s’ils se défiaient silencieusement. Elle l’avait cru mort, elle avait cru ne jamais le revoir et la joie qu’elle avait éprouvé à le revoir était ternie par son attitude si froide. Pouvait-elle réellement lui en vouloir ?

« - A Thaar on murmurait que tu étais mort pendant un combat… J’ai laissé tous mes rêves de voyage derrière moi pour venir soutenir Jérôme, pour venir prier pour toi. Je vois que tu vas bien j’en suis heureuse… »

L’atmosphère était indéniablement tendue entre eux. Mais Mathilde céda la première, après tout elle n’était pas venue pour se battre avec ses frères. Elle adressa un sourire à Guillaume et leva sa main pour la poser sur la cuisse de son frère. Un simple contact qui lui noua le ventre, lui rappelant toute la peine qu’elle avait eu à les laisser derrière elle.

« - Tu m’as énormément manqué Guillaume. Te voir sain et sauf me rassure. Je suis navrée que ce soit si…. Tendu entre nous. Tu sais… je suis tellement heureuse aujourd’hui, je ne regretterais jamais ce voyage et si je ne suis plus la bienvenue à Etherna je le comprendrais parfaitement. Je suis même prête à reprendre la route maintenant… les enfants m’attendent plus loin. »

Mathilde retira sa main et fit quelques pas en arrière pour mieux voir son frère. Rajustant sa cape autour d’elle pour se protéger du vent frais automnal, la jeune femme releva sa capuche pour masquer ses cheveux blonds.

« - Lyse adore les voyages, elle monte maintenant comme une vraie cavalière et Kiel…. Il est tellement adorable. Tu… tu veux les voir ? »

Mathilde se rapprocha et posa ses mains sur ses hanches, la même habitude qu'elle a depuis qu'elle est petite et qu'elle se mutine. Cela amena une vague de chaleur dans le corps de Guillaume. Elle lâcha une tirade on ne peut plus acerbe sur les limiers de son baron de frère ainé avant de croiser le regard du cadet et de le soutenir. Un silence s'installa avant qu'elle ne reprenne, parlant de la nouvelle de sa mort qui était arrivée jusqu'à Tharr. Voila un miracle qui risque de marquer les chroniques si les nouvelles d'Etherna arrivait jusque la bas et que l'on apprenait qu'il était ressuscité...

Guillaume ne voulait plus être sévère avec sa sœur, heureux de l'avoir enfin retrouvé après tous les tracas qu'elle avait causé mais il ne savait pas comment faire marche arrière. Ce fut Mathilde qui fit le premier pas, comme à l'accoutumé, elle sourit et posa une main réconfortante sur la cuisse du chevalier. Elle partit d'une explication sur son geste qu'elle referait s'il le fallait et de la tension entre eux ainsi que du fait qu'elle était prête à repartir immédiatement. Elle termina par les enfants qui étaient plus loin, reculant de quelques pas en parlant d'eux et demandant à Guillaume s'il voulait les voir.

Enfin un sourire se posa sur les lèvres du deuxième Clairssac

"Mathilde, cesse de dire des bêtises à tout va comme tu le fais si bien. Etherna ne possède pas les meilleurs limiers, c'est un fait mais ils ne sont pas non plus les derniers. Tu as fais un exploit en les perdants aussi longtemps.

Tu nous as manqué aussi petite sœur, pas une seule journée sans que Jérôme ne demande s'il y avait une trace et si on t'avait retrouvé. Il a été fort occupé, sinon je suis presque certain qu'il serait partit lui même à ta recherche."

Il marqua une brève pause, son visage se marquant, preuve qu'il n'était pas tout à fait remit de sa blessure. De même que sa déception de ne pas avoir pu épauler son frère jusqu'au bout

"Comme tu le vois, je ne suis pas mort mais il s'en est fallu de peu. J'ai été blessé lors d'une bataille et la fièvre a suivit. Je suis convalescent et je dois déjà batailler, ne serait ce que pour sortir du château. C'est aussi la raison qui m'empêche de descendre pour te prendre dans mes bras, je serais incapable de remonter en selle sinon"

Il sourit de nouveau avant de reprendre un air sérieux, presque fâché

"Je te préviens, si tu dis encore que tu n'es pas la bienvenue ou que tu veux repartir, je descends de ma monture, même si je ne pourrais pas remonter et je te ligote au pommeau de ce pas"

Il éclata ensuite de rire

"As tu si peu appris de père et du sens de la famille pour toujours remettre en cause ta présence ?

Tu peux appeler ta fille, il n'est pas bon pour eux de rester seuls, mais par pitié, rentrons d'abord au château, nous pourrons parler en route, j'ai encore besoin de repos"

Il attendit qu'elle aille les chercher

"Et bien, le grand air t'a fais grandir, petite fille. Ta mère dit que tu es bonne cavalière, je suis navré mais tu devras te contenter d'être derrière moi pour l'instant. J'espère que tu me feras une démonstration plus tard, lorsque nous serons de retour à Etherna"

Il fit monter la petite fille qui prit le bébé dans ses bras. Mathilde dut se contenter de suivre à pied, Guillaume n'ayant pas la force de marcher. Chemin faisant, ils continuèrent la discussion

"Désolé de te faire marcher, petite sœur, mais je suis certain que tu as l'habitude maintenant"

Une petite boutade jeté sur le ton de l'humour

"Raconte moi donc ou tes pas t'ont portés et quels terribles dangers tu as traversés ?"

La curiosité l'emporta, guillaume avait lui même déjà beaucoup voyagé et il savait comme les routes étaient dangereuses, encore plus pour une femme avec deux enfants. Il se demandait donc sincèrement comment elle avait fait.

La bonne humeur soudaine de Guillaume fit hausser les sourcils de Mathilde. Elle ne s’était certes pas attendue à cette réaction, ni à le voir si loquasse ! Mais c’était un réel bonheur et elle répondit à chacun de ses rires par un sourire. Guillaume lui expliqua sa blessure et les raisons qui l’empêchaient de descendre de cheval. Cette dernière information finie de rassurer la jeune femme qu pensait toujours que son frère lui en voulait trop pour venir la prendre dans ses bras. Il lui adressa néanmoins une petite pique qui fit mouche au sujet de leur père et de son sens de la famille qu’il avait tenté de leur inculqué. Le visage de Mathilde se ferma brusquement, Guillaume ne l’avait probablement jamais vu avec cet air si sérieux, sévère presque.

« - Je n’ai rien oublié des leçons de notre Père et c’est par amour pour Jérôme que je suis partie. En revanche s’il y a une personne à qui tu devrais le rappeler c’est bien à Aurore. »

Aurore ? Pas Maman ou Mère ? Non ces termes-là, Mathilde les avait oubliés depuis longtemps, depuis le jour où Aurore de Clairssac lui avait écrit qu’elle n’était plus sa fille. Guillaume émit le souhait de retourner au château, il devait encore être fatigué et Mathilde ne voulait en autant cas l’empêcher de se rétablir complètement.
Elle retourna donc chercher les enfants et prit Kiel dans ses bras. Lyse salua son « oncle » d’un hochement de tête et d’un sourire. Bon il faudrait lui remontrer les façons convenables de s’adresser aux gens de la Cour mais elle gardait tout de même cette tenue étonnante pour une fillette de son âge.

« - Lorsque vous irez mieux je vous accompagnerais en balade si vous voulez, ça doit être un peu triste de sortir tout seul. »

Malgré la dernière phrase, Mathilde fut surprise par la retenue de Lyse. Elle s’était adressée à Guillaume en prenant une voix posée, pas sa voix de petite fille.
Mathilde regarda ensuite son frère qui lui adressa une boutade à laquelle elle répondit par un petit rire.

« - En effet, j’ai voyagé à pied plus que tu ne pourrais l’imaginer ! Nous sommes d’abord allés à Ancenis, puis nous avons marché jusqu’à rejoindre Sharas et embarqué pour Thaar. Nous étions bien accompagnés pendant ce voyage, et nous n’avons rencontré quasiment aucun danger ! »

« - A part ta blessure, tu étais toute pâle et pendant un jour tu as dormi… j’ai cru que tu allais mourir »

« C’était juste un accident stupide. Un prêtre de Néera a soigné ma blessure à Sharas. »

Un regard vers Lyse suffit à calmer son désir de raconter tout notre voyage. J’avais passé un accord avec la fillette pendant notre trajet de retour. Nous devions parler le moins possible de nos aventures, ne jamais prononcer le nom d’Arthur, ne pas parler non plus de Cérya et ne rien dire sur le dräke. Je savais que je demandais à Lyse de faire un effort surhumain mais elle connaissait l’importance de tous ces secrets.

Le chemin n’était pas très long mais étant à pis il fallut une bonne heure pour être en vue d’Etherna. En voyant le château se dessiner Mathilde sentit son ventre se nouer. Elle n’aimait pas cet endroit parce qu’elle avait vécu trop de chose bouleversante entre ces murs. Dans la conversation du retour la jeune femme avait demandé si Jérôme était là, mais apparemment il s’était rendu aux funérailles du roi, Guillaume lui promit d’envoyer une missive pour le prévenir… Mais voulait-elle vraiment qu’il soit prévenu ? Elle n’avait pas l’intention de reprendre son rôle, assise sur une chaise à broder toute la journée avec les Dames d’Etherna. Elle voulait retrouver le grand air, voyager, voir du pays comme elle l’avait fait ces derniers mois. Pourtant l’une des raisons qui l’avait poussé à faire demi-tour s’était l’hiver approchant et le jeune âge de son fils. Elle devait trouver un endroit où passer l’hiver, certes elle n’avait jamais pensé que ce puisse être à Etherna… mais cela lui permettrait peut-être de passer du temps avec ses frères…

« - Nous arrivons… »murmura-t-elle soudain glacée jusqu’aux os.

Lorsque Mathilde utilisa le prénom de leur mère, Guillaume sourcilla, interloqué. Il avait lu la lettre envoyée par Aurore et il pouvait donc comprendre les griefs de sa sœur envers celle qui l'avait enfanté. Toutefois, il avait espéré que les choses se tasseraient, ce qui ne semblait pas le cas, du moins pour l'instant.

"Tant mieux si tu n'as rien oublié des leçons que père t'a inculqué. Tu aurais du savoir que Jérôme privilégierait toujours sa famille, même si cela devait lui couter en honneur. Il est comme père, il a tout assimilé et il fait toujours passer les intérêts des membres de sa famille avant tout. Il était mort d'inquiétude suite à ta disparition et heureusement qu'il a été fort occupé sinon je suis certain qu'il aurait prit un cheval et qu'il serait partit à ta recherche lui même. De même, je peux comprendre ton ressentiment mais n'oublie jamais que c'est elle qui t'a donné la vie et qui t'a donné tout son amour. Il serait bon de penser à pardonner et à faire la paix"

Il se doutait que ce serait difficile mais c'était ce qu'il pensait lorsqu'il s'en remettait à Néera. Lyse proposa de voyager avec Guillaume lors de ses prochaines chevauchées, il sourit en se tournant vers la petite fille

"C'est une excellente idée, je suis certain que tu es de meilleure compagnie que beaucoup de nobles du château. Tu me montreras ce que tu sais faire sur un cheval et je te donnerais quelques conseils en retour."

Mathilde débuta son périple, elle était allé d'abord à Ancenis puis elle avait prit la direction de Sharas avant d'embarquer pour Thaar. Guillaume connaissait les lieux pour y avoir guerroyé et il savait que la ville n'était pas forcément le meilleur endroit pour une dame, qui plus est de noble descendance et sans protection. La benjamine expliqua qu'ils n'avaient quasiment pas rencontré de problème, ce qui étonna le chevalier qui savait qu'il y en avait un à chaque coin de rue ou chaque arbre si on était à l'extérieur. Il n'eut pas le temps de lui faire remarquer la chance qu'elle avait eut, à moins qu'elle ne mente, avant que Lise parle d'une blessure qui semblait d'importance. La benjamine des Clairssac répondit immédiatement que c'était un accident et qu'un prêtre l'avait soigné

"Quel genre d'accident ? raconte moi. Et ou as tu été blessé ? tu as eu beaucoup de chances d'avoir un prêtre de Néera pour te soigner."

Piqué au vif de sa curiosité, il ne manqua pas le regard que sa soeur échangea avec sa fille adoptive. Nul doute qu'elle lui mentait, ou à défaut, ne disait pas toute la vérité. Cela l'attrista qu'elle ne lui fasse pas confiance mais il fit comme s'il n'avait rien vu. Il espérait qu'il n'y avait pas quelque chose qui s'était rompu entre Mathilde et ses frères suite aux expériences qu'elle avait enduré. Le lien familiale avait toujours été fort et il serait dommage qu'il se désagrège. Un silence s'installa, comme jamais il n'y en avait eut auparavant entre Mathilde et Guillaume, il y avait un malaise c'était certain et il fallait espérer que l’abcès soit percé rapidement pour éviter que la gangrène ne fasse son office. Ils échangèrent quelques mots durant le retour mais rien de palpitant. Elle demanda des nouvelles de Jérôme

"Je pense que tu es au courant que le régent est décédé ainsi que le roi et sa sœur ? Je ne m'y suis pas rendu en raison de ma blessure mais Jérôme devait y être, cela aurait été une insulte que de ne pas s'y rendre. Je lui ferais parvenir une missive dès que nous serons au château afin de l'avertir que tu es de retour. Je ne doute pas qu'il sera très heureux de l'apprendre"

Il reprit son souffle et continua

"Je ne sais pas quelles informations tu as ou pas mais sais tu que Jérôme à réussit à réunifier Serramire ? Brochant est devenu marquis et il a offert Bastylle à notre frère qui en est dorénavant le châtelain."

La château fut en vu et Mathilde indiqua qu'ils arrivait, elle grelotait de froid et son regard était fixé sur la ville

"Nous demanderons qu'un bon feu soit allumé pour que tu te réchauffe avec les deux enfants. Tu ne semble pas joyeuse de te retrouver ici, quelque chose ne va pas ?"

Sujet: Re: Retrouvailles [PV Mathilde] Mer 25 Sep 2013 - 9:22

Mathilde écoutait son frère sans jamais l'interrompre... et sans jamais répondre à ses questions. Guillaume devait être surpris de retrouver sa petite sœur, autrefois si loquace, aussi silencieuse. La vue du château d'Etherna ne lui rappelait pas de bons souvenirs et le fait de se retrouver ici signifiait pour elle la fin de cette liberté qu'elle avait tant apprécié le mois passé. Certes le voyage jusqu'à Thaar n'avait pas été tous les jours faciles, certes elle avait eu beaucoup de chance de ne rencontrer aucun problème, elle savait qu'elle devait sa survie à Arthur, mais les jours passaient loin de la coupe de sa famille, loin des conventions et de toutes ses choses qu'on attendait d'elle lui avaient fait tellement de bien...
Comment aurait-elle pu revenir un grand sourire aux lèvres ?
Guillaume lui parla de la guerre en Serramire, du nouveau statut de Jérôme à Bastylle, mais tout cela lui semblait si loin... Sa dernière question resta un moment en suspens avant qu'elle ne lève les yeux vers lui pour lui répondre.

« - Je suis désolée Guillaume...Si tu n'as toujours pas compris la raison de mon départ, tu ne comprendras pas non plus pourquoi revenir m'enchante si peu... J'aurais du naître garçon pour que le mois que je viens de vivre paraisse normal aux yeux de tous... J'aurais alors pu venir te saluer, prendre de tes nouvelles et repartir vers de nouvelles aventures. Mais je ne suis pas un homme et une fois que j'aurais mis les pieds à Etherna je devrais me comporter comme avant...Parce que Jérôme ne me laissera plus partir. Je ne me fais pas d'illusion Guillaume... »

A peine sa phrase terminée, ils arrivaient devant les portes de la cité. Les gardes les regardèrent passés avec étonnement. Aucun n'oublia de saluer Guillaume d'un signe de tête mais ils avaient tous reconnu la jeune femme qui marchait en tenant la bride de son cheval. Le mois passé sur les routes avaient doré sa peau et ses cheveux n'étaient plus aussi soigneusement attachée, mais il était difficile de ne pas reconnaître une De Clairssac. Evidemment la surprise des gardes n'étaient que le début. Il en fut de même une fois dans le château. Bientôt le bruit se répandit dans les cuisines, dans les couloirs et on vit un vrai ballet de domestique passer et repasser pour apercevoir celle qu'on recherchait depuis de nombreuses ennéade. Mathilde fit mine de ne pas voir toute cette agitation, elle suivit son frère jusqu'au salon dans lequel ils avaient coutume de manger ensemble. Elle resta silencieuse pendant qu'elle berçait doucement contre elle Kiel.

« - Je vais voir aux cuisines si on peut nous faire monter un peu d'eau chaude pour qu'il prenne un bain. »

Lyse s'éclipsa après avoir reçu l'autorisation de sa mère. La jeune fille avait gagné en assurance et la voir aussi à l'aise aujourd'hui faisait sourire Mathilde. Guillaume s'installa dans le fauteuil près de la cheminée, visiblement il n'était pas encore tout à fait remis de sa blessure. Maintenant qu'elle était dans les murs d'Etherna, la jeune femme retrouva les angoisses qui l'avaient poussé à s'enfuir. Elle s'approcha de son frère, s'installa sur le fauteuil à côté du sien et cala un Kiel tout amusé sur ses genoux. Il s'amusait à attraper ses doigts et à les serrer dans ses petits poings, mais Mathilde avait les yeux rivés dans ceux de son frère.

« - Guillaume... Je sais ce qui m'attend ici, c'est le sort de toutes les Dames de bonne famille. On m'a toujours dit que ça se passerait ainsi et même si j'ai été éduqué dans ce but cela ne rend pas la chose plus facile. Je sais que Jérôme... du moins je pense qu'il ne me marierait pas avec un homme contre mon gré mais.... dans sa position et avec tous les troubles politiques de la Péninsule... je.. Guillaume, promets moi que je ne serais pas vendue au plus offrant... »

Dès son retour en Péninsule, Mathilde avait appris les fiançailles d'une de ses cousines. Laquelle, elle n'en savait rien mais d'après les « on-dits » Jérôme avait dû sceller une alliance par le mariage... Si elle s'était trouvée à Etherna... Ca aurait pu être le sien. Cette seule pensée la fit légèrement frisonner.

Sujet: Re: Retrouvailles [PV Mathilde] Lun 30 Sep 2013 - 11:46

Mathilde semblait devenu avare de réponses, elle ne parlait quasiment pas. Elle était plus taciturne et sombre que par le passé ou elle était si enjouée et heureuse de vivre. Guillaume se demanda donc ce qu'il avait bien pu lui arriver. Certes les voyages forgeaient le caractère et c'était une évidence mais il espérait qu'elle n'avait pas eu une lourde épreuve lors de ses périples. Elle n'écoutait qu'à peine voir pas lorsqu'il parla et il fut frappé par la douleur que lui inspirait cet éloignement avec sa sœur. Il ne remua pourtant pas le couteau dans la plaie, se disant que le temps ferait son office et qu'il devait garder l'espoir qu'elle se livre et redevienne comme par le passé. Enfin elle prit la parole et les mots qu'elle prononça devaient sans doute être l'une des raisons de son humeur. Il semblait en fait qu'elle avait pris gout à ses mésaventures. Guillaume l'écouta et fronça les sourcils

"Comme tu es dur avec Jérôme. Dis moi, outre les raisons inhabituelles d'avant ton départ, à quel moment est ce qu'il t'a cloitré et empêché de sortir ? il me semble que la réponse est jamais. Tu parle d'aventures mais sais tu exactement ce que ce mot veut dire ? oui tu en a vécu une dernièrement je te l'accorde mais chaque fois que tu décide de partir "à l'aventure" comme tu le dis, tu n'es jamais certaine de revenir vivante. Ce mot est lourd de signification. Etre une femme n'aide pas, tu as raison et il certain que je ne peux pas comprendre mais si au moins tu laissais une chance à notre frère avant de le condamner alors qu'il a tant fait pour toi ?"

Ils franchirent les portes et les gardes saluèrent comme il se devait le frère du baron et seigneur des lieux, même si ce dernier n'était pas présent depuis un certain temps. Tout le monde était bien entendu au courant qu'il avait conquit les terres de Bastylle et qu'il devait rester la bas afin de pérenniser tout cela. L'étonnement fut de mise lorsque les gardes comprirent l'identité de la femme qui l'accompagnait. Cela faisait maintenant un certain temps qu'elle avait disparu et qu'elle était activement recherché. Dès qu'ils furent rentrés au château et ayant comprit l'état de son sœur, Guillaume l'amena directement dans le salon qu'elle connaissait si bien. Elle reprit la conversation et la résignation perçait dans sa voix. le cadet se souvenait des efforts de la benjamine pour échapper aux prétendants que sa mère lui présentait. Il ne put s'empêcher d'esquisser un bref sourire qu'il réprima immédiatement. La situation était grave et il n'était pas l'heure de plaisanter. Les mots étaient dur aussi lorsqu'elle parlait de la vendre. Une de leur cousine s'était vue mariée il était vrai mais c'était avec l'accord de son ainé. Cela revenait sans doute au même pour Mathilde mais il devait avouer qu'il ne pensait pas que Jérôme serait ainsi. Non pas qu'il pourrait proposer une telle chose mais si le membre de sa famille, car Guillaume n'était pas exempt non plus, ne voulait pas, Jérôme ne le forcerait surement pas

"Il est connu que tu es plutôt rebelle dès qu'il s'agit de te marier. Je ne peux pas t'assurer que Jérôme ne le fera pas mais honnêtement, je ne crois pas qu'il serait capable de le faire. Et si on lui proposait un mariage, je suis presque certain qu'il te demanderait si tu es d'accord et qu'en cas de refus, il ne t'imposerait pas cela. Tu dois lui faire plus confiance, même s'il est partit faire son apprentissage plus tôt et qu'il était moins présent, tu sais qu'il t'aime et que son principal soucis, c'est de garder la famille unie."

Cela au moins il en était certain. La famille avant toute chose, c'était ce que leurs parents leur avaient inculqué. La soirée passa et ils tentèrent de discuter comme c'était possible, Mathilde restant sur la réserve. Guillaume se demandait s'il avait réussit à la convaincre et il l'espérait. Dès qu'il eut le temps, soit immédiatement après avoir quitté sa sœur, il s'empressa d'écrire une lettre à son ainé afin de l'avertir que Mathilde était de retour. Il lui expliqua aussi les craintes et le changement du comportement de la benjamine de la famille ainsi que le fait qu'il ne savait plus tôt quoi faire.

Le temps passa doucement jusqu'au jour ou une réponse arriva de Bastylle. Jérôme expliquait qu'il était enchanté de la nouvelle et qu'il pouvait de nouveau respirer plus librement. Il écrivit aussi dans sa lettre qu'il aimerait qu'elle le rejoigne à Bastylle afin de la changer d'air. Une deuxième lettre était adressée à Mathilde directement. Jérôme disait à sa sœur comme il était content de la savoir à nouveau en sécurité et d'avoir de ses nouvelles. Il lui demandait si elle était d'accord pour le rejoindre à Bastylle car il voulait la voir rapidement mais qu'il était dans l'impossibilité de se rendre lui même à Etherna pour le moment.

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» La solitude, c'est parfois relatif. [ Mathilde ]
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