Ce que les flammes emporterons [Solo]

-Ren ?
Deux adolescents se trouvent au sein d’un appartement minuscule. Il n’y a que deux pièces, et un balcon pas plus grand. Dans la pièce principale une table ronde prend quasiment tout l’espace. C'est un environnement très sobre, il n'y aucun bibelot, absolument aucun objet ou meuble superflu.

Les deux jeunes gens qui l'occupent ne semblent pas avoir plus de dix-sept ans. L’un se tient appuyé contre le balcon, observant le ciel complètement noir au-dessus de la cité, à l’exception de cet astre étrange et immense apparu quelques ennéades plus tôt. A l’intérieur, assit sur une chaise le compagnon de celui qui se penche vers l'extérieur semble beaucoup plus nerveux. Sa jambe droite ne cesse de tambouriner le sol alors que ses doigts tournent et retournent une petite broche métallique. D'ailleurs, un épais bandage serre l’un de ses poignets. Il porte un foulard autour de son cou, dissimulant mal une marque au fer rouge. Là où son compagnon semble en bonne forme, son propre visage est encore pâle et émacié.

-Tu restera toujours avec moi n’est-ce pas ?
-Toujours Viliam. Répond alors l’autre, un air profondément triste qu’il en doute encore, sur son élégant visage. Il est facile d’y détecter une franche fatigue mue par l'inquiétude qu'il porte à l'égard du fugitif convalescent.
-Même s’ils nous rattrapent ? Si...tout ça finit mal?
-Toujours.

8ième énnéade de Vérimios 20:XI
Thaar

L’ambiance était étrange ce soir là. Il y avait peu de monde au seint de la taverne dont l'Aile Blanche se servait souvent, et pour une raison étrange, personne ne semblait vouloir élever la voix. Les conversation allaient à voix basse, créant une atmosphère bruissante un peu lourde.
Viliam supposait qu’il ne s’agissait que d’une soirée un peu vide… Rien d’étonnant, pas mal de ses camarades étaient dispersés, dans la Plaine, ou d’autres endroits de Thaar. Alors, plutôt tranquille pour une fois, il croisa ses pieds sur un coin de la table, fumant quelques feuilles séchées. Du coin de l’œil, il aperçut son meilleur ami flirter avec un homme qu’il ne connaissait pas et celui lui tira un léger rictus d’amusement. Ren ne changerait jamais.

Mais alors que les deux hommes s’apprêtaient à s’embrasser, Viliam détourna son regard vers un mouvement à l’entrée de l’établissement qui capta son attention. Une silhouette floutée par une épaisse cape s’éclipsait discrètement. Quelque chose sembla soudain étrange au bandit. Personne n'avait besoin de dissimuler sa présence ici.

En se relevant alors, il aperçut une bouteille renversée près de la porte, dont l’alcool coulait près d’une lampe à huile.
La flamme vacilla. Viliam lança un cris d’alerte. L’atmosphère se déchira.
Il y eut une détonation brutale et un souffle.

Viliam sentit le feu lécher ses bras tandis que la violence de l’explosion le projeta en arrière. Avec brutalité son dos frappa une colonne.

En quelques secondes le chaos régna en maitre dans la salle en flammes. Certains fuyaient, déboussolés, d’autres étaient morts sur le coup. On hurlait, on se battait contre les soldats qui venaient de débarquer sans une alerte. Celui qui aurait dû siffler l'alerte était probablement déjà mort lui aussi.

Incapable de bouger parmi les décombres, Viliam porta une main poussiéreuse à son abdomen traversé d’un morceau de bois éclaté. Sa voix n’était qu’un râle rauque de douleur et de sang.

Quelque part, au-delà des flammes il entendit la voix de Ren qui hurlait son nom. De ses dernières forces, entre deux ahanements de douleur, il porta deux doigts ensanglantés à ses lèvres et siffla la fuite et l'abandon. Des solerets de fer retentirent à ses oreilles en des pas lents, puis un dernier coup à sa tempe éteignit définitivement sa vue déjà brouillée pour l'envoyer dans les ténèbres.