Abal Dull fendait la foule derrière Gothral, se faisant bousculer, sans oublier de rendre la pareille avec rage, arrachant des rires surpris aux nains plus grands, plus épais qu'elle. Elle répondait à ses ricanements avec un petit sourire charmeur et enfantin, laissant les nains la regarder ensuite à deux fois avant de disparaître complètement dans la foule dense. Le couple traversa ainsi le marché, puis arriva soudain dans une galerie sombre, humide et presque vide. Les murs merveilleusement travaillés et polis par les nains arrivaient tout de même à renvoyer la faible lumière des torches éclairant le tunnel. Abal sourit tranquillement, fière d'appartenir à une race si douée en architecture. Gothral avait l'air de savoir parfaitement où il allait, la voyageuse en fut rassurée. Elle connaissait montagnes, forêts et plaines absolument par coeur, mais avait de grosses lacunes sur les plans des villes, à part celui d'Almis bien entendu. Les deux nains parlaient de tout de rien, s'échangeaint quelques savoirs de forge, quelques anectodes d'enclume, qui faisaient rire la naine toujours plus gaiement.
Un bruit de chaîne. Un pas lourd, mais assuré, complété par des allures plus courtes et hâtives. Un sentiment glacé traversa la naine de part en part quand elle s'aperçut que deux yeux d'argent l'incendièrent, avant de poser le regard sur d'autres nains. Le Drow, prisonnier, la peau bleutée et terne, les doigts serrés sur ses chaines, passait dans le tunnel tristement, entouré de ses geôliers. Il était réellement magnifique. A chaque mouvement, ses muscles durs et saillants roulaient sous une peau ferme, tendue sur des os robustes. Les lèvres pincées, le regard perçant, le guerrier fusillait chaque être qu'il croisait de ses pupilles abyssales. Parfois, les nains qui l'entouraient tiraient violemment sur la chaine reliée au cou droit du Drow, ce qui lui arrachait des grognements las et impuissants.
Abal Dull, prise de panique à la vue de cette terrible créature, poussa un cri en saisissant violemment le poignet de son compagnon. Des larmes roulèrent précipitemment de ses yeux équarquillés à ses joues pour retomber sur le sol humide. La forgeronne tremblait comme une feuille et tentait de se cacher maladroitement derrière Gothral. Ces mouvements semblaient vide de toute volonté, guidé seulement par une peur incontrôlable. Attiré par cet évènement, le prisonnier tourna à nouveau la tête vers la naine et afficha un sourire vainqueur et conquérant...suivi d'un grognement, à cause de la douleur provoquée à nouveau par une chaîne.
Attention ! Attention ! chuchota la naine dans l'oreille de son compagnon, encore frémissante de frayeur.