[vers les coulisses] Quelques croquis

Le "je vais bien" de Nicolaï n'était pas du tout convainquant mais la jeune fille se garda bien de le lui faire remarquer. Il n'eut pas besoin d'avouer qu'il n'était pas si bien que ça pour qu'elle s'approche et le prenne doucement par un bras pour le soutenir.

" vous devriez vous asseoir. " conseilla-t-elle en le guidant vers la paillasse. ou l'art de donner des ordres comme de simples suggestions.

Cling blang, en armure, ce n'était sans doute pas très pratique, mais s'il s'effondrait avec plus de trente kilos de ferraille sur le dos, elle serait incapable de le retenir. Et puis, si elle voulait pouvoir l'aider à enlever son armure, il fallait qu'il se baisse un minimum, sans quoi, étant plus petite que lui, elle aurait du mal à enlever les lanières situées au niveau des épaules. Elle l'aida donc à s'installer et suivit ses indications avec une certaine nervosité par crainte de mal faire, commençant par les bras... certaines lanières de cuir faisaient de vilains nœuds mais ses doigts fins finirent par en venir à bout. Elle passa ensuite au plastron et enfin aux jambes, libérant le chevalier. Comment pouvait-on porter un équipement pareil ? Elle avait soupesé chaque pièce d'armure indépendamment pour les poser soigneusement sur la pièce de tissu prévue pour les recevoir, et les trouvait déjà affreusement lourdes.

S'occuper l'avait un peu empêchée de s'inquiéter mais, à présent, elle regardait à nouveau Nicolaï avec anxiété... avant de se dire que, quoi qu'on lui ait donné pour le soigner, il allait sans doute avoir mal à la tête, et pas seulement. Elle se morigéna intérieurement : au lieu de faire les cent pas un instant plutôt, elle eut mieux fait de se rendre utile ! Il ne devait plus avoir besoin d'elle dans l'immédiat et elle demanda rapidement :

" Puis-je vous laisser un instant, messire ? "

Elle devait aller chercher quelque chose et son absence lui permettrait aussi de se mette à l'aise et de se changer s'il le souhaitait. Aureane agissait toujours dans un souci de faire le plus possible sans déranger et on voyait que ça ne datait pas d'hier. S'étant assurée qu'il ne risquait pas de s'évanouir en son absence, elle sortit dans l'idée d'aller faire chauffer de l'eau. Quand elle revint, une dizaine de minutes plus tard, elle portait un récipient contenant une boisson chaude à l'odeur sucrée qu'elle déposa sur l'étagère improvisée.

" Voilà qui pourra calmer la douleur, si vous en ressentez le besoin. "

C'était le genre de petit remède tout simple, peu puissant mais efficace qu'elle utilisait régulièrement. Sa tisane valait aussi bien contre un mal de tête, que pour un rhume ou contre la fièvre. Elle la lui avait proposé de façon à lui laisser le choix, sous-entendant qu'il n'en avait pas forcément besoin : s'il était fier et refusait de reconnaitre la moindre faiblesse, elle ne voulait pas le froisser. Elle doutait que ce soit le genre de Nicolaï, mais elle était habituée à faire de la sorte pour son père, alors elle continuait. Elle prépara donc un gobelet, mais lui laissa le loisir de lui faire signe de le lui donner ou non.

En tous cas, être allée préparer la tisane avait évité à Aureane de rester là à dévisager le jeune homme avec inquiétude ce qui n'aurait pu que l'agacer. Elle lui fit un petit sourire désolé et ajouta finalement :

" Si je peux faire quoi que ce soit... "

Elle ne savait pas trop à quel point il pouvait être déçu... Pour sa part, elle n'accordait que peu d'importance au tournoi, mais elle savait que Nicolaï aurait été heureux d'aller en finale et pour cela, elle regrettait que ce soit terminé. Mais en même temps, elle trouvait qu'il avait déjà pris suffisamment de risques pour un spectacle. Il lui avait dit au début des joutes ne pas savoir pour quoi se battre et elle le comprenait très bien tant le tournoi lui paraissait absurde. Pour sa part, elle trouvait qu'il s'en était déjà remarquablement tiré et espérait qu'il s'en rendait compte.

Nicolaï avait accepté la tisane ce qui soulagea un peu Aureane, même si elle n'en montra rien. Elle pensait qu'il allait demander à rester tranquille et elle se voyait déjà aller tromper son ennui en flânant dans la ville, mais il reprit la parole, l'arrêtant dans son élan.

" Non Aureane. Je ne vois pas se que vous pourriez faire d’autre pour moi. A part me tenir compagnie si vous acceptez. "

La jeune fille lui jeta un coup d'œil un peu surpris, n'ayant toujours pas bien intégré l'idée qu'il puisse apprécier sa présence. Après tout, c'était un chevalier... mais elle acquiesça volontiers et s'assit sur sa paillasse, même si elle se demandait un peu en quoi consistait le fait de lui tenir compagnie : elle n'avait jamais été très douée pour faire la conversation à quiconque.

" Je suis désolé. Vous avez dû vous faire du souci en me voyant tomber de ma monture. Désolé aussi de ne pas avoir remporté le tournoi pour vous. "

Aureane resta un instant à le dévisager avant de se reprendre et de secouer la tête en souriant, comme si elle trouvait l'idée amusante et profondément absurde, même si elle faisait son possible pour le cacher :

" Pour moi ? Mais... "

Pas franchement habituée à s'expliquer, elle chercha ses mots un instant, un peu gênée. Mais elle voulait quand même répondre, elle ne pouvait tout de même pas le laisser s'inquiéter pour ça !

" Vous n'avez pas à être désolé pour cela, voyons... Et puis... Vous êtes déjà allé très loin dans la compétition. A ce stade, il faut bien que certains soient éliminés et c'est déjà très bien, vous... avez été impressionnant... je ne parle pas de la chute. "

Elle s'empourpra un peu, pas davantage habituée à faire des compliments et se tut. d'ailleurs, elle se fit la remarque qu'elle était bien bavarde. Certes, Nicolaï faisait tout pour qu'elle se sente à l'aise, mais ce n'était pas une raison pour se comporter de la sorte : elle décida qu'il allait falloir qu'elle se reprenne un peu. Enfin quoi ! Si maintenant elle se permettait de complimenter un chevalier ! De quoi se mêlait-elle, elle qui ne connaissait rien aux tournois ?

Ce fut donc l'esprit bien embrouillé qu'Aureane se leva pour prendre sa sacoche. lorsqu'elle se rassit, elle avait un morceau de tissu dans les mains qu'elle entreprit de ravauder. Les dieux seuls savaient ce que c'était, mais visiblement, elle n'aimait pas rester à ne rien faire. S'occuper les mains lui évitait de se torturer l'esprit et étant donné les questions compliquées qu'elle se posait sans cesse sur ce qui se faisait ou non, ce n'était pas plus mal. En revanche, même si elle ne savait pas vraiment quoi dire, elle était prête à écouter et même à participer à la conversation pour peu que Nicolaï lui donne un point de départ. Lui tenir compagnie ne lui posait aucun problème, bien au contraire, même si elle se disait qu'elle n'était pas douée pour ça.


[hrp : voilà, pas très long, donc on arrête là où on poursuit si tu te sens malgré tout inspiré, c'est comme tu veux. :)]