[C'nros] Affaires de famille | Haldren, Halystra, Aureane

Aureane suivit Haldren bien gentiment, quittant la Lanterne Noire sans un regret ni la moindre expression de soulagement. Elle s’en allait, c’était tout. Avec qui ? Apparemment, cela lui importait peu aussi. Elle n’avait pas l’air d’avoir peur, mais elle suivait docilement comme si cela tombait sous le sens. Un légume, à première vue.

Et pourtant… la jeune fille ne paraissait pas non plus tout à fait enfermée dans une bulle, car elle regardait autour d’elle. Elle dévisageait même parfois les gens, avec un drôle de regard qui mettait franchement mal à l’aise. Certes, les drows ne se laissaient pas facilement impressionner, surtout de prime abord par une petite humaine pas bien épaisse qui portait bracelets et collier d'esclave. Mais elle vous regardait comme si elle vous connaissait depuis très longtemps et comme si vous n’étiez pas vous. « Tu es quelqu’un d’autre » voilà ce qu’elle affirmait à chaque fois qu’elle posait ses yeux sur quelqu’un, totalement indifférente à la réaction de l’intéressé. Ca ne donnait vraiment pas envie d’avoir affaire à elle, son expression était plutôt dérangeante.

Enfin, la plupart du temps, elle observait surtout les lieux où ils passaient, de l’air du touriste qui a pris un gros coup de soleil sur la tête et oublie qu’il est en train de regarder quelque chose. Elle ne se pressait pas beaucoup, d’ailleurs, même si apparemment elle n’avait pas été trop mal traitée et semblait en relative bonne forme physique. Mais elle avançait tranquillement, indifférente au fait que le drow marchait plus vite qu’elle.

De temps en temps, elle rattrapait son retard en quelques petits pas rapides, comme font les enfants qui oublient qu'ils suivent un adulte pressé.

Ils arrivèrent dans un bureau et elle s’immobilisa, regardant autour d’elle comme si elle voyait autre chose. Difficile de savoir quoi étant donné qu'elle n'affichait toujours aucune expression.

" C’est joli. " conclut-elle finalement d’un air impassible.

Elle ne parlait pas au drow, ni à l’esclave, ni même à elle-même, mais elle parlait à voix haute quoique tout doucement, ce qui ajoutait un peu à l’étrange impression qu’elle dégageait. Et puis, franchement, le bureau d’Haldren n’avait rien de joli. Il était peut-être meublé et décoré avec bon goût, mais il n’était pas "joli" !

" Fais venir Nicolaï, j’ai à lui parler. "

Aureane tourna la tête vers le drow, sans expression, comme si elle prenait note de la remarque mais pensait qu’elle venait de quelqu’un d’autre. Puis elle se dirigea vers la porte comme si tout à coup il lui paraissait normal qu’on la laisse s’en aller. Elle agissait même comme si on venait de le lui demander. Mais elle se retourna d’un coup, échangea un regard avec les dieux seuls savaient qui, haussa les épaules et finalement retourna où elle était.

Elle attendit. La porte se rouvrit, laissant passer Nicolaï et Halystra. Aureane regarda dans leur direction avec cette drôle de façon de sembler voir quelqu’un d’autre. Son regard glissa rapidement sur eux deux, revint admirer la décoration… avant de revenir se fixer sur Nicolaï. Elle hésita un instant, secoua la tête comme pour en chasser une drôle d’idée et revint à la décoration. C’était joli.

" Aur... Aur... "

Aureane regarda Nicolaï à nouveau, d'un air un peu absent, comme s'il n'avait pas beaucoup d'importance... jusqu'à ce que les yeux du jeune homme se remplissent de larmes. Elle sembla un peu intriguée puis vaguement embêtée pour lui. Avait-il des problèmes ? Elle jeta un coup d'œil à Haldren de l'air de lui demander ce qui se passait, sauf qu'elle ne le regardait pas tout à fait et qu'on ne pouvait décemment pas aller chercher une aide auprès du drow spontanément.

Puis Nicolaï la prit dans ses bras et elle se laissa faire, comme une poupée de chiffon. Elle sentait ses larmes et ses baisers mais réagit lentement, peu à peu, simplement en ouvrant de grands yeux sans pour autant faire quoi que ce soit d'autre. Elle avait l'air partagée entre deux sentiments, sans qu'on puisse parvenir à savoir lesquels.

" Je t'aime... Je t'aime... Je t'aime... Aureane. Je t'aime. "

La jeune fille fronça légèrement les sourcils, dévisageant Nicolaï. Elle baissa la tête et la secoua à nouveau comme si elle voulait en chasser une pensée dérangeante.

" Non non non, expliqua-t-elle d'un ton patient. Non. "

Enfin, non, quoi. Pas possible, il y a erreur... Pour autant, elle ne le repoussait pas, restant serrée contre lui parce qu'il l'avait prise dans ses bras. Elle lui expliquait juste que... ben non, il ne l'aimait pas, il devait se tromper. Elle continua à le dévisager un instant, mais finit par détourner le regard, gênée. Tiens, un sentiment étrange que celui-là. Du coup, il eut droit à un coup d'œil intrigué dans la foulée.

" Aureane ? "

Elle ouvrit la bouche, hésita en le regardant de nouveau comme si tout-à-coup elle venait de l'apercevoir. Visiblement, ça n'éveillait rien de spécial en elle mais au moins elle avait l'air d'avoir pris conscience qu'il était là. Enfin... que quelqu'un était là. Aureane ? C'était son prénom ça. Il la connaissait s'il se rappelait comment elle s'appelait. Fadl, c'était lui Fadl, non ? Peut-être pas.

" Oui... c'est moi... "

Elle jeta des coups d'œil nerveux autour d'elle, presque comme s'il lui faisait peur et s'écarta un peu. Elle n'avait montré aucune crainte devant les drows, mais lui... C'était Fadl ? Fadl était inquiet, il reprit la parole, l'air bouleversé :

" Aureane. Comment... Comment est-ce que je m'appelle ? "

La jeune fille se figea, un éclair de panique dans le regard. Elle réfléchissait, et à toute allure. C'était difficile, après tout ça... Elle ne voulait pas, d'ailleurs, elle se sentait comme prise au piège et recula d'un pas, apeurée.

" Fadl ? " hasarda-t-elle finalement après un temps d'arrêt angoissé.

Elle secoua aussitôt la tête, perdit toute expression inquiète, haussa les épaules soudain comme si c'était une bonne plaisanterie et eut un sourire à donner des frissons.

" Non non, pas lui. "

Puis regardant un point dans le vide, à quelques pas, elle conclut d'un air entendu :

" Ah. Ben non. "

Forcément, impossible. Ah, il lui avait posé une question, celui qui n'était pas là. Elle soupira. Il pleurait ?

" Pas Damien. Il ne pleure pas lui. "

Sursautant légèrement comme si elle venait de prendre conscience de quelque chose, elle eut soudain l'air tout triste et ajouta gentiment, comme on parlerait à un enfant qui vient de perdre son doudou :

" Ne pleurez pas, on va retrouver votre nom. Il ne peut pas être perdu. "

Le pauvre. Pas étonnant qu'il soit malheureux si il ne se rappelait plus qui il était. Ça ne devait pas être facile. elle n'aurait pas aimé être à sa place. Elle avait bien failli y être, alors elle comprenait un peu. Non, ce ne devait pas être évident à vivre. Elle jeta un coup d'œil derrière elle, expliquant au vide :

" Il a perdu son nom, le pauvre. "

Puis son regard changea, perdant toute trace de compassion. Pas de nom. Rien. Elle conclut durement sans état d'âme, lui lançant au visage ce qui était visiblement une évidence pour elle et qui aurait dû l'être pour le monde entier :

" Il n'existe pas. Il ne peut pas exister. "

Sur ce, comme si elle n'avait rien dit, elle retrouva un air parfaitement neutre et s'éloigna, regardant à nouveau autour d'elle. C'était joli, ici.

Ce ne fut pas vraiment le claquement de main qui fit réagir Aureane, mais la voix du jeune homme. Il avait un nom... Elle lui accorda à nouveau son attention, mais comme si elle hésitait sur la marche à suivre. Un instant, elle parut complètement perdue mais à nouveau consciente du monde qui l'entourait. Secouant frénétiquement la tête, elle se recula en fermant les yeux. Non, non... Enfin, si, il était là, mais pas lui, pas lui... Elle le regarda à la dérobée, comme si elle n'osait pas trop, puis sembla prendre une décision.

Bon. On respire.

La jeune fille se calma d'un coup, mais perdit en même temps l'expression à peu près sensée qu'elle avait eu un instant plus tôt.

" Tu es... un petit peu... là... " murmura-t-elle comme si elle faisait une concession, sans trop être sûre de ce qu'il en était vraiment.

Qui pouvait savoir ce qui existait ? C'était beaucoup trop flou pour en être sûr, n'est-ce pas ? Ce n'était pas parce qu'il disait qu'il existait qu'il était là et il y en avait qui ne disaient rien et qui restaient toujours là, toujours, toujours...

" Toujours... "

Elle ne s'adressait à personne en particulier. La voix du jeune homme la fit sursauter comme si elle s'était assoupie par mégarde.

" Qui sont Fadl et Damien ? "

Nicolaï eut soudain toute son attention et visiblement la question faisait plaisir à Aureane qui répondit avec un grand sourire comme s'il avait demandé une évidence :

" Mes frères, bien-sûr ! Et Adelphe et Beaudoin et le petit Isaac ! "

Toute la famille au grand complet. Elle était heureuse qu'il lui en parle. Elle aurait put en discuter des heures. De ses frères, mais de ses sœurs aussi. Elle aimait beaucoup sa famille.

" Même Fald, si il crie beaucoup. " précisa-t-elle sans se rendre compte qu'elle ne disait à voix haute qu'une partie de ce qu'elle pensait et qu'elle perdait en cohérence.

Elle se figea tout à coup, perdit son sourire en regardant Nicolaï et parut réfléchir. Elle l'avait dit... déjà dit... Elle finit par hasarder, troublée :

" J'ai dit que... je... te les présenterai... tous... ? Ma famille... ? J'ai déjà dit... ça ? "

Elle fronça les sourcils, perturbée par cette idée. Puis elle haussa soudain les épaules et finit par se détourner pour faire quelques pas, reprenant sur le ton de la conversation :

" Ils vont bientôt rentrer... Il n'y a qu'Elvira qui est là. "

Elle fit un geste vague vers Halystra et faillit sur le point de retomber dans sa contemplation du mobilier quand le mouchoir que tenait Nicolaï attira son attention. Elle resta un instant à observer le petit morceau de tissu, puis alla lui prendre la main pour le voir de plus près et resta un instant à le détailler. Ce mouchoir... Comme Nicolaï l'avait fait un instant plus tôt, elle passa un doigt sur les initiales avant de relever les yeux vers le jeune homme. Elle hésitait, à nouveau l'air complètement perdu et finit par murmurer :

" C'est à moi mais... mais je n'en ai plus... je... l'ai donné... "

Elle baissa les yeux, désolée, semblant sur le point de se mettre à pleurer et fit un pas en arrière en lui laissant le mouchoir entre les mains. Elle l'avait donné... un jour...

" Je l'ai donné... " répéta-t-elle en secouant la tête.

Elle était accablée mais comme un coup de vent qui chasserait un nuage, elle retrouva soudain une expression plus neutre, voir légèrement souriante. Son regard fuyant à nouveau celui de Nicolaï, elle regarda autour d'elle comme pour y chercher quelque chose. Chose qu'elle dut trouver car elle eut un petit sourire en regardant vers le sol.

" Isaac est rentré, annonça-t-elle à Haldren comme si elle venait de découvrir la présence du drow. Je vais lui laver les mains. "

Elle avait une attitude presque normale, bizarrement, qui sonnait tout à fait juste. Sauf qu'évidemment la décision était hors propos. Mais on lui aurait mit un enfant près d'elle, on aurait pu jurer qu'elle était parfaitement saine d'esprit. Sauf qu'elle fit deux pas vers la sortie et s'arrêta, le nez en l'air.

Aureane ne fit pas vraiment à attention à Nicolaï lorsqu'il lui bloqua le passage, s'étant de toute façon arrêtée d'elle-même. La première phrase ne parut pas vraiment l'atteindre si ce n'est qu'elle attendit passivement la suite sans plus prêter attention au mouchoir.

" Tu me l'a donné lors du Tournoi Royal de Diantra. Tu t'en rappelles ? C'est là-bas que nous nous sommes rencontrés. Tu étais en train de dessiner devant ma tente. "

Son regard se posa à nouveau sur le mouchoir et elle resta pensive un instant avant de murmurer :

" C'était des histoires... "

... que racontait sa grand-mère. Des chevaliers qui joutaient sous le regard des princesses. Les contes de fées se terminaient toujours bien, mais c'était des histoires... des histoires...

Elle sursauta violemment quand Nicolaï débuta sa chanson et sembla chercher autour d'elle d'où cela provenait. Elle voulait que ça s'arrête, tout de suite. Elle ne pouvait pas écouter ça. C'était... dérangeant. Elle finit par bredouiller en hésitant :

" Guilaine, arrête... "

Décidément, toute la famille y passait. Aureane, elle, restait où elle était mais regardait nerveusement autour d'elle en se mordant la lèvre à mesure que la chanson se poursuivait. Elle finit par se boucher les oreilles et fermer les yeux, au moment où l'air se terminait.

Elle ne les rouvrit qu'au moment où Nicolaï s'approcha d'elle.

" Je suis Nicolaï, Aureane. Nicolaï. Si j'ai réussi à gagner, c'est grâce à toi. Si j'ai survécu à mes blessures, c'est grâce à toi. Si j'ai tenu dans le navire, c'était parce que tu étais avec moi. "

La jeune fille baissa les yeux, silencieuse. Tout se bousculait dans sa tête, elle n'arrivait pu à réfléchir... Gagner, Nicolaï, navire, Nicolaï, blessures, Nicolaï, c'est grâce à toi... Nicolaï... Nicolaï, encore Nicolaï... elle avait l'impression que sa tête allait exploser. Elle ne voulait pas, ce serait désagréable. C'était déjà désagréable.

" Va-t-en, toi... " murmura-t-elle, la voix tremblante, comme on chasserait un mauvais esprit qui vient pour le plaisir de tourmenter sa victime.

Elle allait répéter son injonction, lorsque le jeune homme la prit de court, demandant simplement :

" Tu te rappelles ta promesse ? "

Aureane réagit aussitôt à ce mot et plongea son regard dans celui du jeune homme. Elle avait l'air en arrêt, comme si le temps s'était suspendu. Sa promesse. Elle avait fait bien des promesses... Une seule avait eu vraiment de l'importance parce que vitale... c'était... ça s'était passé... un jour... il y avait... elle avait dit... c'était important... vital... vital.

" Tu devais rester avec moi. Tu devais t'accrocher si on n'était pas séparés. "

Elle secoua la tête alors que ses yeux se remplissaient de larmes et s'exclama avec un accent de désespoir :

" C'est peut-être les derniers moments que nous passons ensemble. "

Exactement les mots qu'il lui avait dit. Elle n'avait pas l'air de savoir pourquoi elle les répétait, mais elle semblait touchée par cette idée. Elle parut s'affaisser et regarda à nouveau ailleurs d'un air absent sans se préoccuper des larmes qui coulaient. C'était trop dur... elle voulait rentrer. Il fallait préparer le repas. Les grands rentreraient bientôt des champs.

" Je suis là. Avec toi. "

Aureane garda le silence un instant, parut réfléchir, hésiter et murmura finalement tristement :

" Non... "

C'était plus une supplique qu'autre chose. Non... Non, par pitié. Elle recula à nouveau, ne pouvant continuer à l'écouter. Il fallait faire cuire la soupe pour tout le monde. Lui, il ne cadrait pas...

" Ne me laisse pas. "

Cela sembla faire un choc à la jeune fille qui se figea et accrocha instantanément son regard au sien. Elle semblait en arrêt, comme si elle était incapable d'accepter l'information. Pas de soupe... pas de repas... pas d'eau... la cale d'un bateau... le navire... Nicolaï... Elle finit par murmurer en écho :

" Ne me laisse pas. "

Difficile de savoir si elle ne faisait que répéter mécaniquement ou si elle pensait ce qu'elle disait. Elle ne bougeait plus et semblait un peu ailleurs, sauf qu'elle continuait à fixer le jeune homme comme si elle ne savait pas trop pourquoi.

" Je suis là. "

Aureane secoua lentement la tête, ne pouvant y croire. Ce n'était qu'une illusion, c'était impossible. Pourquoi fallait-il que tout soit si compliqué ? Il était là... qui était là ? Elle ne voulait pas y croire, c'était trop douloureux.

" Aureane. Tu te rappelles ce que j'ai dit ? Ce que tu m'avais promis ? "

Elle lui renvoya un regard perdu. Non, elle ne savait pas de quoi il parlait, elle ne se souvenait pas... Il ne cadrait pas. Il ne cadrait pas du tout. Avec rien, avec plus rien du tout... C'était trop confus, mais suffisamment clair pour qu'elle se mette à pleurer doucement.

Elle tressaillit lorsqu'il posa une main sur son visage pour essuyer ses larmes, comme si elle prenait soudain conscience qu'il était là. Se laissant faire, elle essaya de comprendre ce qu'il voulait dire. Elle lui avait promis de rester avec lui...

" Tu m'avais dit que tu resterais avec moi. Tu me
l'avais promis. "

Il avait promis de rester avec elle... Ça n'était pas arrivé... tout se confondait dans sa tête, comme un rêve très ancien et très compliqué, un rêve qui se serait transformé en cauchemar. Elle ne voulait pas vivre de cauchemar, c'était trop difficile. Elle ne pouvait pas.

" Tu... "

Elle ne pouvait vraiment pas. Trop douloureux, elle n'y arriverait pas, elle deviendrait folle de chagrin... Nicolaï... il n'était plus là, elle voulait qu'il sorte de sa tête. Il marqua une pause, lui laissant le temps de se reprendre un peu. Elle soupira, hésita encore, ne sachant visiblement plus où elle en était.

" Tu m'as promis que si nous étions séparés, tu tiendrais une semaine. Puis, nous rejoindrions ensemble Tyra. Nous avons été séparés moins de deux jours. Reviens vers moi. "

Tout cela n'avait aucun sens... Elle ne savait pas quoi répondre, mais elle ne l'empêcha pas de lui caresser les cheveux, c'était même... réconfortant. Elle continuait à le regarder sans vraiment réagir mais il n'était plus question de frères et sœurs absents. Elle n'y arrivait pas...

" Je ne peux pas... " murmura-t-elle sans trop savoir de quoi elle parlait.

Mais Nicolaï n'avait pas dit son dernie rmot, sans doute encouragé par le fait qu'elle lui réponde un tant soit peu en lien avec ce qu'il lui disait.

" Aureane. J'ai besoin de toi. Reviens, je t'en prie. Je suis là. Il ne t'arrivera rien. Pas tant que je serai avec toi. Personne ne t'a jamais fait de mal lorsque j'étais avec toi. Ça ne commencera pas aujourd'hui. J'ai besoin de toi. Je ne pourrais pas continuer sans toi. "

Chacun des mots de Nicolaï faisait son chemin dans son esprit embrumé tandis que ses larmes séchaient. Cela devenait difficile de s'y retrouver. Elle ne réagit pas au moment où la drow quitta la pièce, mais inclina légèrement la tête lorsque Nicolaï glissa ses doigts dans ses cheveux. Un léger sourire flotta sur ses lèvres un instant... puis elle se recula doucement.

" Ne me laisse pas. "

La jeune fille regarda à nouveau le sol, perdue dans ses pensées. Elle ne savait pas vraiment quoi répondre. Y avait-il seulement quelque chose à répondre ? Elle n'en était pas sûre. Elle regarda Haldren d'un air absent puis fronça tout-à-coup les sourcils, comme si elle n'était pas contente de le voir. Le drow parlait, mais ses mots lui paraissaient obscurs. En revanche, ce qu'elle voyait très bien, c'était l'expression de Nicolaï, teintée de tristesse.

Elle attendit qu'Haldren se taise et alla prendre doucement la main du jeune homme, murmurant gentiment :

" Ne sois pas triste... ça me rend triste aussi. "

Certes, elle n'avait pas tout à fait l'air de savoir à qui elle parlait et elle n'était sûrement pas dans son état normal, mais elle ne l'ignorait plus et se souciait de lui... du moins pour le moment. Elle continua à lui tenir la main, ayant apparemment décidé de ne pas le lâcher.

" Je rajoute un couvert, " expliqua-t-elle consciencieusement au drow.

La déclaration ne fut suivie d'aucun mouvement, la jeune fille resta là, gardant la main de Nicolaï dans la sienne. Elle se sentait bien, là... mieux qu'habituellement. Elle lui sourit finalement de façon un petit peu plus naturelle et se remit à ignorer les drows.