Coucou me revoilou (pv Nakor)

Nakor était au sommet de sa tour, il avait eut un petit entretien avec le nain Kiran qui venait du nord. Du grand nord même et qui intéressait donc brillamment le vieux magicien. Il avait même obtenu qu'ils partiraient tous les deux en direction de la cité naine survivante afin d'en apprendre plus et de peut-être renouer les liens avec le peuple barbu à petites jambes. Le nain était évidemment épuisé par son voyage et la découverte de la cité humaine de Diantra. Nakor avait tenu à ce qu'il puisse aller dormir dans une bonne taverne qu'il lui avait indiqué. Ils ne partiraient tous les deux que le lendemain, afin que le nain puisse se délasser une journée entière et donc disposer de deux bonnes nuits de sommeils dans les beaux quartiers de la ville. L'or provenait de la bourse même de Nakor, il lui avait offert son passe droit et c'était la moindre des choses avec le chemin retour qui s'annonçait une fois de plus fastidieux. Les routes pour le pays des nains étaient bien souvent froides, arides et caillouteuses. Il faudrait s'y faire, mais Nakor adorait marcher. Le vieux magicien était ensuite remonté dans sa tour et avait vaqué à ses occupations. Il venait de rédiger ses propres rapport de voyage dans le sud quand il se rendit compte que ... diable d'enfer, il ne trouvait plus son sceau de conseiller royal. Il se mit alors à farfouiller dans un grand coffre contre le mur droit de la pièce, à côté d'une grande armoire sur laquelle il avait entreposé entre autre, sa propre boule de cristal magique. Il avait mit prés de dix ans à la fabriquer et elle n'était pas d'une efficacité absolu. Mais depuis quatre cents ans qu'il l'avait fabriqué, il n'avait même jamais pensé à se renseigner plus profondément sur le sujet afin d'améliorer son artefact. Il fonctionnait et cela suffisait. Nakor était donc en train de chercher dans son coffre, jambe tendues et le dos courbé, la tête engouffrée dans le grand contenant quand quelqu'un frappa à la porte de son bureau. Nakor releva la tête un brin surpris, se disant qu'il était bien rare qu'il ait de la visite. Mais grognon de ne pas trouver son sceaux immédiatement, il marmonna dans sa barbe, se replongea dans le coffre et lança un ordre d'entrée d'une voix éreintée par l'âge et les siècles, ce qui était bien rare pour Nakor.

Il entendit la porte s'ouvrir et surtout cette petite chanson, ce léger son qu'il connaissait si bien. Il cessa de fouiller et se releva d'aussi sec, tapant par là même son front contre le couvercle solide et épais du vieux coffre. Il poussa une longue onomatopée de douleur en se tenant fortement la tête des deux mains et se retourna en disant, un très grand sourire douloureux sur les lèvres

"Adria!"

Puis Nakor explosa de rire et se précipita vers elle, bras ouvert. Voilà bien deux mois qu'ils ne s'étaient vu l'un l'autre et la jeune elfe avait manqué au grand père gâteau qu'était le vieux magicien. Il la serra de force dans ses bras tout en riant aux éclats. Il relâcha un peu la pression et ajouta

"Ha que je suis content de te voir ... laisse moi donc te regarder un peu! Ho tu es en un seul morceau ... tu progresses mon enfant!"

Puis se mettant encore à rire, il déposa un baiser sonore sur la joue de la jeune apprentie en magie. Puis il se calma un peu et s'écarta d'elle. Il redevint un peu sérieux et se mit même à étrécir son regard. Il ajouta alors sur un ton neutre mais étrangement bas

"Oui ... j'ai eu ... vent ... de certains de tes exploits dans le monde des hommes ma fille. J'aimerai entendre de ta propre bouche l'usage que tu fais de la magie que je t'ai enseigné Adria!"

Le parfait exemple de bougonnerie donc Nakor était capable et même usurier : il passait du rire à la colère sans jamais crier gare et attention à ceux qui dans ces instants là, disaient ou faisaient n'importe quoi. Il était évidemment réellement heureux de voir la jeune elfe, mais il se disait aussi qu'elle n'était pas passée loin d'un jugement auprès de cet imbécile heureux d'Aetius d'Ivrey. Alors il voulait, en bon grand père, quelques explications de la jeune femme avant qu'elle ne lui dise vraiment ce qui l'amenait ici, mis à part le fait qu'elle avait envie de le voir, ce qui le touchait déjà par avance.

La petite gourgandine que voilà, elle retourna le petit trait d'humour à Nakor et il le méritait bien lui aussi, après tout, il avait de nombreuses fois au cours de sa longue vie, risqué de mourir. Cela le fit sourire et l'amusa réellement. Il hocha même vigoureusement la tête, se recula un peu et tourna sur lui même comme une petite fille voulant montrer sa belle robe en un seul morceau. Il ricana un peu et se calma avant de se souvenir des informations dont il avait eut vent. Et comme un souffle, il balaya la pièce de sa tirade. Ce qui fit entrer la jolie fille de l'air dans une phase de réflexion profonde et mécontente. Nakor savait que l'impatiente et changeant Adria n'aimait pas se prendre une bourrasque en pleine figure et n'en faisait qu'à sa tête. Mais le vieux magicien avait gagné suffisamment de place dans son cœur pour qu'elle ne s'offusque pas trop fort tout de suite. Surtout que les rumeurs qui lui étaient parvenues n'étaient que de lamentables bruits de couloirs, en réalité il ne connaissait rien de la véritable version. Elle donna une première réponse, comme un faible alizé, pas tout à fait sur de son effet. Nakor croisa alors les bras et força sa moue de mécontentement. Mais voilà que dans la lueur de regard de sa chère petite élève une idée émergea. Une idée qui bientôt telle une forte bises glaciale, s'imposa sur le reste de ses idées. Elle se défendit d'abord de n'avoir rien fait puis précisa sa pensée. Elle prononça des mots que Nakor reprit, horrifié, les mains sur les pans de son chapeau, l'écrasant sur sa tête à chaque fois un peu plus en montant dans les aigus au niveau sonore

"Aetius d'Ivrey ... Le Comte ... un tapis volant ... te laisser faire .... hoooooo mais par ma fichu foutu barbe infernale"

Nakor s'écrasa tellement son chapeau sur la tête qu'on ne voyait plus ses yeux et son nez. Il le remit alors en place correctement et leva les yeux aux ciels ainsi que les bras et poussa un long soupir épuisé. Il alla alors s'asseoir, complètement débité de tout ce qu'il venait d'entendre. Il releva alors la tête et prit la parole, d'un ton neutre mais clair et direct

"Adria que t'ai-je donc appris ... si on me posait la question je répondrai sans hésiter de l'esprit! De l'esprit Adria ... et de la magie ensuite. Et voilà qu'en sortant de cette tour, tu pars chez le pire des Comte de tout le royaume quand il est question de jolie femme et tu lui enseignes l'art de faire un tapis volant ... un tapis volant Adria. Alors que tu débute à peine le maniement de ce sort complexe. Avoue qu'il y a moins risqué et un peu plus réfléchit dans la vie non?"

Puis Nakor se leva, voyant que même si elle écoutait, Adria était boudeuse. Il alla à son côté et lui mit la main gauche sur l'épaule tout en reprenant son ton de papy gâteau

"Mon enfant, tu sais à quel point je me fais du mouron pour pas grand chose quand il est question des gens que j'aime. Et tu en fais partie ... alors quand tu me confirmes là, comme ça, qu'en effet Aetius a tenté certaines choses avec toi ... ho par les dieux ... mon sang ne fait qu'un tour! Et en plus tu tente déjà de devenir le professeur d'un autre ... et en ne faisant pas n'importe quel sort et encore moins avec le premier venu! Un Comte. Te rends tu comptes qu'il aurait put t'enfermer jusqu'à la fin de tes jours et pire que tout, le sort aurait put mal tourner, mais vraiment mal tourner et vous vous seriez rompu le cou tous les deux."

Nakor souffla longuement, cherchant à évacuer la colère qu'il avait en lui et c'était chose faite. Il en rajouta tout de même une couche avant de passer à autre chose

"Je te l'ai déjà dit, un grand magicien n'est pas forcément celui qui connait le plus de sortilège, c'est aussi et surtout, celui qui détient une capacité incroyable de réflexion, d'analyse d'une situation nouvelle et bien évidemment la possibilité d'agir quasi immédiatement de la bonne façon. Reçoit une boule de feu vive et rapide comme ceci"

Nakor leva la main et projeta en direction de la fenêtre de son bureau une flamme énorme et très rapide

"Et réagit!"

Nakor leva l'autre main dans la même direction que la première et il transforma l'humidité de l'air en mur de glace qui prit de plein fouet la boule de feu et la fit disparaitre dans un torrent de vapeur. Et voilà que le cours de magie allait sans doute reprendre sans qu'il n'ait fait attention à ce qu'il faisait. Nul doute qu'Adria allait enchainer un torrent de mot, de remarques, d'envie et qu'elle allait partir dans tous les sens, comme la chère petite Adria qu'il aimait tant. Des petites explications sur la rencontre avec Aetius seraient tout de même les bienvenus. Mais ça ... c'était le nirvana.

Ho la petite gourgandine de bas étage. Il parlait et elle lui donnait du haussement d'épaule, des regards qui partaient vers le ciel, des interruptions à haute voix, et des c'est pas moi, j'ai rien fais, c'est pas ma faute, c'est pas vrai et nianiani et nianiania non mais ho! Et depuis quand on coupait la parole, depuis quand on répondait, depuis quand on coupait la parole, depuis quand on répondait, depuis quand on coupait la parole, depuis quand on répondait, depuis quand?????????????? Nakor, au lieu de déverser sur elle des torrents de foudre ravageurs, continua, garda son cap et n'arrêta pas de parler même s'il lançait un regard glaçant pendant qu'il terminait tant bien que mal de parler. Le très vieil homme se retint de hurler, de vociférer et de frapper dans la tête de cette petite pioche. Il se calma, fit son tour de magie sans trop y penser et voilà qu'elle revenait à la charge, poings sur les hanches, comme si rien n'était de sa faute, que tout était normale et qu'elle n'aurait rien put faire pour éviter un peu ça. Nakor ouvrit de grands yeux outrés et stupéfait en même temps, ce qui n'était pas peu dire. Et ne trouvant rien d'autre à faire il explosa de rire. Un rire tonitruant et libérateur, un rire déstressant et comme contrit, déployant d'un seul coup l'ensemble de l'air qu'il avait dans les poumons. Une fois calmé, il reprit

"Je n'ai JA-MAIS entendu une telle fadaise! JA ... MAIS! Jamais jamais jamais jamais jamais jamais jamais JAAAAAAAAAAAMAIS!"

Puis il continua à rire sous cloche, dans sa barbe avant de reprendre, en soufflant longuement

"Adria ... Adria, enfin, calmons nous tous les deux et tentons de réfléchir de façon un peu plus ouverte veux-tu? C'est pas vrai, c'est pas moi, c'est faux, non ... d'accord, d'accord, mais avoue tout de même que dans la pièce où vous étiez toi et Aetius, il n'y avait que vous deux, par conséquent, quoi qu'il arrive, vous êtes responsable des choses qui se passent entre vous deux. Que ce soit un conseil qui entraine une catastrophe ou un bon moment vous êtes lui comme toi responsable. Tu savais que tu ne manipulais pas correctement le tour du tapis volant, il te faut encore un peu de pratique avant d'être au point définitivement, alors en tant que personne responsable, tu aurais dû t'abstenir, totalement! La magie donne à son magicien un fardeau supplémentaire, une responsabilité plus grande. Finalement c'est une bonne chose que tout finisse bien et que tu aies pu en tirer de très bonne conclusion. Il faut tout de même que tu comprennes ton rôle dans cette affaire, pas pour t'accabler, pas pour te faire une remontrance, mais pour te guider sur le long chemin qui fera de toi une magicienne. Je n'ai donc jamais dis qu'il fallait rester enfermé chez toi, dans la peur de ce qui pourrait arriver, mais plutôt d'utiliser ton inventivité pour prévoir justement les choses les plus incroyables qui pourraient se produire et agir de sorte à ce que la moins pire de toute advienne!"

Puis devenant espiègle, Nakor ajouta

"Et pour répondre à ta question crois moi, Aetius fait certainement partie des humains qui réfléchissent le plus."

Puis Nakor ouvrit les yeux un peu plus grand, comme pour indiquer qu'il y avait là une ironie folle et entendu envers le reste de la race humaine. Enfin il retourna s'asseoir et invita Adria à faire de même par un geste nonchalant de la main. Confortablement installé, Nakor fronça le sourcil gauche en relevant le droit et termina là-dessus

"D'ailleurs ... ce tapis volant Adria! J'aimerai voir un peu ce qu'il reste de nos cours."

Puis il attendit, ayant clairement donné le signal suivant : Nakor voulait un peu savoir ce que devenait l'elfe et sa magie.

Nakor venait de préciser sa pensée, de compléter la formation d'Adria et petit à petit de construire le grand édifice de connaissances et d'expériences qui permettraient à la jeune elfe de se comporter en personne responsable : responsable de sa magie, de ses effets, de ses actes et des aléas de la vie. Le chemin était long, il l'était déjà pour les humains, qui ne devenaient pleinement responsable de leur art que tardivement, alors chez les elfes. Puis pensant que cela ne demandait pas plus de profondeur, il parla de magie, afin de revenir vers des choses plus intéressantes, mais ce fut comme si elle n'avait pas entendu. Le vieux magicien venait de prendre place sur son siège et d'inviter Adria à prendre place qu'elle prit la parole, assez chamboulé par ce qu'elle venait d'entendre. Elle prit la parole, montant en intensité sonore, en gesticulation et en verbe. Nakor se passa la main sur son menton et sa longue barbe. Bien, cette expérience avait plus fortement chamboulé cette pauvre enfant qu'elle n'y paraissait et sans trop faire attention et exprès, le vieux fou avait mit le doigt sur là où cela faisait mal. Il venait de libérer les flots trop longtemps retenu d'un barrage prêt à céder. Elle se calma un peu, sembla entrer dans une profonde réflexion ce qui était rare et alla proche de la fenêtre. Un courant d'air se fit sentir et la porte s'entre-ouvrit alors que l'elfe donna ses dernières réponses. Puis ses derniers mots qui tombèrent comme une sentence impossible. Le vieux magicien intérieurement reçu un puissant choc émotionnel et ouvrit de grands yeux alors qu'il faisait pivoter son siège pour se retrouver face à face avec Adria. Etrangement et comme si la nature avait perçu les intentions de l'elfe, cette maudite porte s'était ouverte. Le vieux fou lâcha un long soupir et perfora son apprentie d'un regard scrutateur profond, comme s'il parvenait à voir à l'intérieur même de l'elfe. Et ce fut sans doute pour la première fois de sa vie que la jeune Adria verrait Nakor en colère. Cela se lisait dans ses yeux, dans son expression, dans l'énergie qui émanait de lui, dans la position de son corps et donc dans tout son être. C'était même assez déstabilisant de voir ce petit bonhomme véritablement en colère, pas bougon comme à son habitude et finalement jovial quoi qu'il arrive. Non réellement énervé. Il fit un geste excessivement brusque de la main, en levant son bras droit. La porte fut alors très brutalement fermée magiquement. Si fortement que le bois craqua de toute part et qu'elle manqua de céder. Le magicien prit alors glacialement la parole

"Est-ce la réellement ce que tu penses Adria?"

Puis comme si c'était encore possible, Nakor étrécit plus fortement ses yeux et se recula, afin de se retrouver derrière son bureau et de mettre un peu de distance entre lui et elle. Comme s'il avait peur de perdre le contrôle de ses émotions et de blesser la jeune elfe. Il souffla longuement et faiblement, afin de se calmer et reprit la parole

"Magicien est un statut, qui se gagne à la sueur du front. Il faut beaucoup de temps, plus que tu ne pourras jamais le penser, pour devenir un véritable mage. Aucun ne parvient à un tel statut en quelques mois, ou en quelques années, dans le monde des hommes. Je ne te parle même pas du temps qu'il faut aux elfes, élevé dans une considération du temps et de son écoulement encore différente. La maitrise des flux magiques naturels du monde et leur osmose avec les forces internes du sorcier prenne à la fois du temps, de l'entrainement et des efforts. Chacun de ces trois termes demande par eux même, des sacrifices, impliquent des difficultés et appellent sans impasse le temps! Tu n'es pas une magicienne Adria tu es une apprentie magicienne. Ton statut a été gagné par le déploiement de tes efforts combinés aux miens. Tu es donc passé d'un statut de non pratiquante à celui supérieur sur la route de la magie. Si tu t'arrête ici et maintenant, en plus d'avoir déployée des efforts pour rien, d'abandonner une nouvelle fois et de cantonner ta vie à une suite d'échec, tu seras malgré toi un danger pour le monde entier. Tu penseras pouvoir utiliser la magie correctement alors que ce n'est pas le cas et tu te mettras en danger constamment, tu mettras aussi en danger les autres et tu finiras par devenir ce que tu redoutes le plus : une elfe qui devra rester chez elle, apeurée de savoir ce qui pourrait arriver si elle mettait les pieds dehors."

Le discours faisait froid dans le dos : il mettait Adria au pied du mur. Soit elle abandonnait encore une fois, et elle ferait par ce choix, et d'elle même, un échec de sa vie entière. Elle avait trop profondément pénétré le chemin de la magie pour s'arrêter maintenant, elle n'en savait pas assez et trop en même temps. Elle ne pouvait donc plus reculer, soit elle arrêtait son apprentissage et devenait un fléau pour le monde et pour elle, soit elle avait encore un peu de courage, elle persévérait, elle faisait confiance en Nakor et elle terminait son apprentissage correctement. De plus le vieux magicien lui avait souvent dit que lorsqu'un sorcier apprenait à un débutant, le danger était toujours présent, les risques, les blessures et les accidents étaient un quotidien auquel il fallait s'habituer, car ce n'était que passager. Voir cette petite elfe abandonner ses forces, son courage et son entrain pour si peu avait rendu fou de colère le vieillard. Il ne supportait pas qu'elle soit dans cet état et d'un nouveau coup sec défonça la porte en bois, qui explosa littéralement et cria presque

"Alors si c'est vraiment ça que tu veux, si tu n'a aucune confiance en moi et en toi, alors la porte est ouverte!"

Puis parvenant enfin à prendre le dessus, Nakor termina ainsi

"Si par contre tu veux continuer, tu veux apprendre, tu veux devenir responsable, magicienne et experte, si tu veux changer les choses, affronter ta vie et la changer, si tu veux faire en sorte que les échecs ne soient qu'un mauvais souvenir et si donc tu as assez de courage en toi alors reste et je t'apprendrai à reconstruire cette porte, je t'apprendrai à soigner des blessures, à déplacer des objets, à voler dans les airs et invoquer des forces impensable de notre monde, je t'apprendrai à te défendre, à attaquer, à protéger et à réfléchir comme la plus sage des magiciennes de notre monde! Le choix t'appartient!"

Puis il resta là. Prêt à prendre Adria dans les bras tout autant qu'à la jeter dehors comme une malpropre.

La pièce était remplit d'une atmosphère tendu. Le magicien avait été à ça de perdre son propre contrôle et d'exploser sur place en faisant sauter tout son bureau, la pauvre petite Adria et tout ce qu'il y avait dans la pièce. Mais il n'en fut rien, il se calma, en usant de tout ce qu'il pouvait. Sa propre patience, sa connaissance de la magie, ses nombreuses années auprès d'apprenties en tout genre et par dessus tout son amour pour Adria. La pauvre enfant sursauta à chaque fois que Nakor déclencha un de ses tours, cherchant à évacuer son émotion négative afin de ne pas tuer l'elfe sur le coup. Elle l'avait écouté puis se mit en marche, cela se voyait qu'elle était touchée de plein fouet par tout ça et que la situation lui échappait un peu. Des larmes qui étaient refoulées durement et une marche, droit vers la porte défoncée. Puis Nakor sortit sa dernière arme et Adria s'immobilisa, elle se retourna et finit d'écouter. Puis elle reprit la parole. Elle usa d'arguments qui frappèrent le cœur du vieillard avec force. Presque avec autant de force que la proposition de départ de son élève et donc elle aurait put le mettre en colère, comme jamais, le plonger dans une rage folle. Mais au lieu de ça, cela l'assomma avec force et dépit. Comment pouvait-elle dire ça! N'avait-elle rien comprit? C'est en chancelant qu'il alla jusqu'à sa fenêtre et s'appuya dessus comme un véritable vieillard qui ne tenait que difficilement debout à cause de ces nombreuses années de vie. Il laissa la jeune elfe finir ses interrogations et resta là, sans rien dire, à regarder dehors. Puis au moment où Adria allait sans doute, soit hurler, soit partir, Nakor prit la parole

"Comment peux-tu penser une telle chose Adria?"

Puis il se retourna, les mains tremblantes, marqués par un peu plus de six siècles épuisants. Il planta un regard qui aurait fait fondre la pire des harpies, tant il était plein de cœur et de tristesse

"Tu penses vraiment que je t'ai fais cette proposition en l'air, que je ne pensais pas chacun de mes mots, que je t'ai dis ça uniquement pour m'assurer que tu allais étudier la magie. Tu penses que je ne te vois que par la magie? Mais mon enfant, ce n'est pas la magie qui me lie à toi, c'est justement mon envie de t'aider à avancer sur le long chemin de la vie, mon envie de t'aider à grandir, à former ton esprit, à pouvoir affronter la vie, à dispenser quelques conseils afin de voir sa petite fille devenir une grande personne, dans tous les sens du terme et pouvoir te laisser un jour voler par tes propres ailes tout en restant pour toi un refuge, un point de sécurité, un ancrage. La magie est juste le moyen d'y parvenir, certainement pas la raison."

Les mains tremblant toujours fortement était une marque inquiétante. Le puissant Archimage n'était pas un faible vieillard cacochyme, le voir ainsi, affaiblie et dévasté par les épreuves et la souffrance était difficile. Il avait adopté de façon symbolique un grand nombre d'enfants, il les avait enterré de ses propres mains et avait pleuré pendant des siècles toutes les larmes de son corps. Et voilà que la petite Adria pensait que son cœur pouvait être faux, orienté et qu'il ne voyait que par la magie. Ce n'était pas le cas et avec ce que le vieillard venait de dire tout devenait logiquement clair. Si elle décidait d'arrêter d'apprendre la magie, ce n'était pas juste l'arrêt d'une sommes de connaissances dans les sortilèges, non certainement pas, c'était l'abandon d'une vie future meilleure, la méprise de la relation qu'elle avait avec Nakor, la marque qu'elle était sûre qu'il était incapable d'élever quelqu'un et que finalement il n'était rien d'autre qu'un vieil imbécile inutile. Sa main droite, tremblante plus que jamais monta jusqu'à son œil et sécha une larme qui était sur le point de tomber. Tiens donc, il y avait encore un peu d'eau à verser dans ce corps usé par le temps.

Très peu de temps s'était écoulé depuis la fin de son discours, peut-être deux secondes au grand maximum. Il termina alors, la voix montant dans les aigus et le tremblotement des hommes âgés.

"Ai-je dis que tu prenais du plaisir à être sur la voie de la découverte? Pour avancer nous avons tous besoin de nous rendre compte de nos erreurs. Tu es entrée ici en disant sans cesse que tu n'avais rien fait, que ce n'était pas ta faute, et maintenant tu t'en prends à moi en me demandant si je pense que tu n'as rien fais. Je ne cherchais qu'à te faire comprendre que tu étais en partie fautive, toi autant que cet imbécile d'Aetius. Pour pouvoir faire un pas en avant, il faut dans un premier temps comprendre pourquoi nous aurions mieux fait de marcher à côté! Ca n'a jamais marché jusque là ... mais peut-on comparer les situations Adria? Jusque là, selon tes propres dire, tu étais seule, alors que maintenant tu ne l'es plus, voilà la différence, voilà pourquoi cela pourrait marcher ... enfin ... c'est ce que j'avais la fierté de penser!"

Puis de main droite il alla sécher son œil gauche cette fois, parce que la jeune elfe remettait tout cela en question, elle remettait le fait que Nakor était son grand père non pas par magie mais pour le cœur et l'envie de la faire aller de l'avant. Décidemment, cette journée était un crève-cœur pour le vieil homme dont l'âme était labourée par une jeune personne qui préférait à priori abandonner que de persévérer pour aller jusqu'au bout de ses propres épreuves.

Hein? Pardon? Comment? Elle n'avait rien écouté? Elle se bouchait les oreilles et fermait les yeux. Adria était donc de ce genre de personne qui pensait que si ses yeux et ses oreilles étaient coupés du monde, alors le monde autour d'elle verrait disparaitre ses problèmes. Non elle n'était pas tout à fait comme cela, elle avait plutôt l'habitude de fuir et cette fois il se passait quelque chose d'horrible pour elle : ce n'était pas quelqu'un qui la chassait, bien au contraire, il y avait quelqu'un qui faisait tout pour qu'elle reste. Jusqu'à présent les gens la chassaient, elle ne pouvait donc pas être responsable de ses échecs, mais là elle était confrontée à autre chose et son esprit semblait ne pas comprendre ce qui lui arrivait. Nakor senti ses larmes se sécher. Il venait de comprendre ce qui clochait : Adria mélangeait tout et créait elle-même son monde et les raisons de ses échecs multiples. En réalité c'était une experte en échec, elle faisait tout pour et avait peur de réussir puisque Nakor n'avait jamais dit à Adria de partir, il lui avait dit qu'elle pouvait s'en aller si elle en avait vraiment envie et qu'elle voulait rester dans son échec, en étant très peu formé, trop peu et en étant donc devenu un danger pour elle même et pour les autres. Il avait ensuite développé tout un argumentaire qui devait faire s'effondrer son envie de partir et voilà qu'elle résumé tout cela en disant qu'il avait lui même dit à Adria de partir. Il referma son visage, qui redevint dur et dit simplement

"Non, c'est faux!"

Puis il laissa un silence gêner s'installer entre eux deux avant de continuer de façon brève mais vraie

"Et tu le sais très bien. Te boucher les oreilles et fermer les yeux, ne fera pas disparaitre le monde autour de nous Adria. C'est toi qui a dit que tu devais sans doute partir et arrêter d'apprendre la magie, puis tu n'as plus rien écouté de ce que j'ai dis et tu as résumé toute cette situation à : tu m'as dit de partir! Non je n'ai pas dis cela, je t'ai même expliqué pourquoi tu devais rester. Mais en réalité tu as peur de la réussite n'est-ce pas Adria. Habituellement ce sont les autres qui te chassent. Cette fois c'est toi qui te mets en position d'échec. Alors poses toi la bonne question : que veux-tu vraiment Adria? Apprendre la magie pour de bon ou penser une nouvelle fois que le monde autour de toi te repousse sans arrêt. Parce que si tu optes pour la deuxième solution, je t'informe mon enfant, que pour la première fois dans ta vie sans doute ce n'est pas le cas du tout! Comme au premier jour, je t'offre mon savoir, mon temps et mon amour ... en échange je ne demande qu'une seule chose : de la motivation! Ce qui n'est pas le cas chez les personnes qui se cherchent des raisons d'abandonner leur combat."

Il lui fallait ce petit mur à surmonter. Si Nakor la suppliait de rester, en se jetant à ses genoux que gagnerait le vieillard et surtout que gagnerait la jeune fille : rien! Et oui, car s'il faisait ça, il se retrouverait avec une élève qui n'apprenait la magie que pour faire plaisir à son grand père, et une petite fille qui n'avait pas retiré une leçon importante de la vie : rien n'était facile et il fallait persévérer. Pour un elfe persévérer cela voulait dire fournir des efforts non pas sur quelques mois voir une année mais sur plusieurs années. Après tout des êtres immortels prenaient toujours beaucoup plus de temps pour apprendre, il fallait juste laisser un peu faire les choses et s'accrocher. Sur ce point, Adria se comportait comme une humaine et non une elfe et Nakor faisait tout ce qu'il pouvait pour qu'elle apprenne la leçon seule. Cela faisait mal, c'était évident, cela était même difficile mais tellement nécessaire pour que la suite soit de bonne augure et sous le meilleur des éclairages. Le vieux fou resta donc là sans paraitre trop dur dans son visage ni trop accueillant. Adria réfléchissait et elle devait, la pauvre, se demander ce qui lui arrivait. Que ressortirait-il de tout cela? Allait elle encore se plaindre, allait-elle partir, allait-elle rester? Allait-elle se souvenir de tout ce que Nakor lui avait promit, en plus de son affection de grand père, toutes les grandes choses qu'elle finirait par savoir faire, en tant que magicienne. Les tapis volant n'étaient qu'une petite partie de ce qu'il pouvait transmettre et de son côté, Nakor savait pertinemment qu'elle avait la flamme de la passion et la curiosité ancrée en elle, qu'elle avait vraiment envie d'apprendre et que cela finirait par prendre le dessus. Pour lui donner un peu de réflexion, il fit un dernier tour, difficile et qui demandait beaucoup de concentration. Il leva la main et pointa du doigt la porte. Il fit appel aux forces du vent et aux pouvoirs du feu et de la terre. Les différents morceaux de la porte qu'il avait lui même fait exploser se soulevèrent dans les airs, il les replaça tant bien que mal chacun à peu prés au bon endroit. Ensuite il augmenta la pression pour que tout semble former un bloc et fit appel aux forces du feu et de la terre comme pour mieux faire fondre le bois et relier des racines entre elle, afin que la porte retrouve sa forme originel et sa solidité normale. Cette magie était difficile mais il venait de montrer à Adria que les choses brisée pouvaient aussi être reconstruite par la magie, une belle magie, pleine de vie et de grandeur, de construction et de fiabilité. Il attendait la suite avec anxiété en espérant qu'enfin elle prendrait sur elle et accepterait de tenter le coup une dernière fois au moins. Et finalement il espérait ne pas perdre sa petite fille elfique.