Retour au pays

Une troupe s'avançait au nord de la frontière oësgardienne, des hommes en arme accoutrés de façon étrange puisqu'ils ne semblaient pas du tout discipliné. Une force hétéroclite et diversifiée ou l'on pouvait voir des lances, des épées, des marteaux, des haches portés par des hommes à pied mais aussi quelques arcs et à l'avant et à l'arrière, des cavaliers. A la tête de ce groupe, un homme, monté sur un cheval, accoutré d'une armure de plate sur la torse, d'un grand bouclier rond attaché à sa monture et un marteau qui bougeait au rythme de la lente chevauchée à sa ceinture, du côté gauche et enfin une cape rouge le protégeait du temps froid du nord. A côté de lui, un autre cavalier portait une bannière jaune qui semblait être les couleurs de cette troupe, un aigle était brodé dessus, noir avec les ailes déployées comme s'il s'était préparé avant de fondre sur sa proie.

Décidé à revenir sur le droit chemin après les errements survenues, Arne avait réunit tous ceux qu'il avait sous ses ordres et il avait décrété que le brigandage était terminé, du moins tant que leur nouvelle vocation les nourrissait et subvenait à leurs besoins. Ils avaient franchit la frontière depuis peu, des rumeurs couraient naturellement et il semblait que Norman le Terrible voulait s'évertuait à reprendre le contrôle de toute la baronnie et de contrer ses nombreux opposants. C'était une occasion en or pour débuter cette nouvelle carrière et le chef de la troupe de mercenaires ne voulait pas la laisser passer.

Après une longue marche depuis leur ancien campement dissimulé derrière la frontière, ils furent enfin en vue de la cité et du château d'Oësgard. Cette vision ramena dans l'esprit d'Arne de nombreux souvenirs du temps où il officiait dans l'armée ainsi que toutes les trahisons qui l'avaient mené à quitté ces rangs, emmenant avec lui une poignée d'hommes.

Entrer en ville avec toute sa troupe était impossible, aussi il fit dresser un petit campement en dehors de la route alors qu'il se rendait à l'intérieur, accompagné de deux de ses hommes les plus précieux, lui servant de gardes du corps mais aussi d'officiers, si l'on pouvait donner ce titre dans une bande de mercenaires. Les trois hommes étaient silencieux alors qu'ils franchissaient les lourdes portes et que les gardes les regardaient de travers, ils étaient jeune et aucun de ceux-la ne les reconnurent, eux qui avaient servit sous les même couleurs quelques années auparavant.

Dès qu'ils furent à l'intérieur, les mercenaires regardèrent les habitations, les tavernes et tous les commerces qu'ils avaient connus par le passé. Les échanges ne s’arrêtaient jamais complètement sauf en cas de siège mais il était évident que les années de chaos qu'Oësgard connaissait n'avait pas enrichit la cité comme elle l'aurait dû

Arne décida qu'il se rendrait dans une taverne louer une chambre puis qu'ils se rendraient au château afin de demander une audience. Vouloir entamer une nouvelle carrière était une chose, trouver du travail une autre, il était temps pour ses hommes de trouver et de gagner leur pitance à la force de leurs bras.

Il est toujours délicat pour une compagnie en armes de s'installer discrètement aux abords d'une cité comme Oësgard. Aussi, la rumeur selon laquelle des reîtres aux figures diaboliques, iconoclastes et conspuant impunément la Damedieu campaient non loin se répandit bien vite au sein des faubourgs de la capitale, faisant resurgir le spectre des fameuses chevauchées des Merciers et du siège infâme. Quand trois ladres à l'évidence affiliés aux coquins établis dans le pays Sgardien vinrent à se pavaner mauvaisement dans les tripots, menaçant d'arracher la vertu des moukères et l'or des citadins, rares étaient les personnes de qualité à l'ignorer.

Aussi, c'est tout naturellement qu'un homme à la sinistre allure emboîta le pas aux aigles noirs dont on parlait tant. Nombreux étaient les puissants à rechercher des glaives à vendre en ces temps de troubles, à l'affût de méchants désoeuvrés, de patibulaires oisifs. Gros et de culottes bariolées vêtu, trois lames à la ceinture et un chapeau exquis de mauvais goût vissé sur la tête, ce nouveau venu ne risquait pas de se faire remarquer. Il fit forte impression auprès des assoiffés de céans, qui plongèrent tous leur figure sur leurs pattes épaisses de crainte de croiser son regard. Notre énorme monsieur exigea que le meilleur brouet soit concocté pour les sergents harassés peuplant le lieu.

Sûr ainsi de jouir de l'attention des compères en armes, il désigna plein d'allant une grande table à laquelle soupaient quelques bélîtres du cru, hâves et timides comme des pucelles Serramites. Saisis par l'envergure et les gestes brutaux de la barrique, ceux-ci déguerpirent la queue basse et firent grand'place. Une souillon disposa incessamment une nappe à dentelles -sans doute tissée par les couturières de grande adresse du pays Dormmelin-, des bougies brunes en digne arroi et mêmes des petites fleurs dans l'espoir de s'attirer la bienveillance de ses hôtes. Le titanesque chapeauté prit place sur l'un des bancs

" Hourra compagnons. Joignez-vous à moi, je vous offre grande et bonne souperie et gueuze goubeteuse ! " nul, pas même l'homme le plus débile du médian, l'abstème le plus scrupuleux et le mieux nourri des bourgeois ne savait résister à pareille invite !

Arne et ses deux compères se décidèrent pour une taverne un peu en retrait car ils n'avaient pas forcément déjà les moyens de s'en payer une luxueuse. Lorsqu'ils entrèrent, il fut indéniable qu'il y avait par ici pas mal de personnes qui recherchaient la tranquillité et pas forcément des plus honnêtes (un peu patibulaire quoi). Cela ne dérangeait pas outre mesure les trois compagnons qui savaient fort bien se défendre et même apprécieraient un peu d'exercice.

Avançant sous le regard discret des clients, ils s’avancèrent vers le tenancier de l'établissement et ils se préparèrent à demander une chambre et de quoi se restaurer. Un mouvement fit se retourner Arne qui vit un homme d'une corpulence assez conséquente derrière eux. Ce dernier était...dissuasif et il semblait savoir ce qu'il désirait. Le nouveau venu fit rapidement le ménage autour de lui, effrayant les moins aguerris de part son équipement et faisant partir sans demander leur reste une tablée ou il voulait s'installer. Ce faisant, il s'installa et il offrit la ripaille.

Les trois mercenaires n'étant ni apeurés, ni rassasiés, ils n'hésitèrent guère longtemps avant de sauter sur l'occasion d'un repas offert. Arne et ses complices prirent place, s'installant sur les chaises autours de la table, ils firent un bref signe de tête pouvant passer pour un merci et Arne prit la parole pour le petit groupe

"C'est pas de refus, c'est pas tous les jours qu'on nous offre à boire et à manger alors on va pas se faire prier, merci l'ami"

Oui il était facile de dire "l'ami" à quelqu'un mais lorsqu'on ne le connait pas, surtout pour quelqu'un qui n'avait pas d'état d'âme à l'occire dans la seconde en cas de soucis. Ils s'attablèrent donc avec l'inconnu et commandèrent à boire et à manger. Les deux compères surveillaient les alentours pendant que leur chef faisait la causette

"Dis moi mon brave, qu'est ce que tu peux nous dire de la situation alentour ? j'ai amené avec moi des gars et nous cherchons une embauche, il semble que toute la région est aussi tendu qu'une corde d'arbalète et que tout va s'embraser"

Voila, Arne était la pour trouver du travail et il ne se cacherait pas de son statut de mercenaire, il n'avait rien à se reprocher, du moins pour l'instant et un petit topo était bon à prendre, surtout avant de trouver un employeur.