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| [Libre] Rémission | |
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Lœthwil
Ancien
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| Sujet: [Libre] Rémission Mar 19 Avr 2016 - 15:35 | |
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Camp Elfe, Eraïson Arcamenel de la Septième Ennéade 8e année du onzième cycle Ce serait mentir que de dire que tu n’as pas mal. Ce serait un plus gros mensonge encore que de dire que la douleur ne t’est pas supportable. La gêne lorsque tu tires un peu trop sur tes muscles est réelle, mais elle n’est plus rien à côté de ce que tu as connu il y a quelques jours entre les mains d’Anorn. Il était temps maintenant de laisser le temps au temps et de laisser faire la nature… quelle plaie. Tu ne saurais même pas décrire le degré de frustration auquel tu es exposé. La bataille est finie depuis un temps, mais tu continues de voir défiler les soldats blessés, tu repenses à ceux qui ont continué de se battre alors que tu étais déjà hors-jeu et ça te met hors de toi. Tu as dû abdiquer trop vite. Te retrouver impuissant alors que les vies de camarades d’armes étaient toujours en jeu… ce n’était pas dans cette optique que tu avais rejoint le front. Mais la vie est ainsi faite, les événements prennent plus souvent une tournure inattendue qu’ils ne se passent comme prévu. La frustration est réelle, mais c’est une leçon de la vie. S’il fallait en arriver là pour t’apprendre à reconnaître lorsque tu ne peux pas, alors ainsi soit-il. Le campement n’est plus que l’ombre de ce qu’il était auparavant. Les soldats font leurs au-revoir aux civils qui s’évadent petit à petit. L’heure du retour vers Alëandir approche. Chanceux que tu es, tu auras l’occasion de revoir ton père, et sa promesse honorée, Anorn pourra fièrement bomber le torse face à Lòmion. Tu reviendrais même avec de nouveaux sortilèges dans ta manche… du moins en théorie. Tu n’as jamais eu l’occasion d’essayer à nouveau de prendre forme élémentaire. Non pas que l’envie t’en manque, mais tu n’en as pas le droit. Tes chairs sont encore trop sensibles, tu n’as pas encore assez récupéré pour te lancer dans le moindre petit tour, alors un sortilège de ce niveau. Peut-être finalement seul l’instinct pourrait te pousser à recréer la chose, et jamais tu ne réussirais à la perpétrer de ta propre volonté. Peut-être aussi que c’est la surcharge de magie au travers de ton corps qui te l’aura permis et que jamais en conditions normales tu ne te retrouveras en possibilité de le refaire. Peut-être que tu ne retrouverais jamais les mêmes sensations sans le soutien de la magie de vie d’Anorn. L’expérience était fascinante, la technique ressemblait tellement à ce que l’on décrit de la magie de la Vie, les flux courant à l’intérieur même du corps, l’éther modifiant les tissu à sa guise… que tu te demandes si ce n’est finalement pas le guérisseur qui en est à l’origine plutôt que toi. Qui sait ? L’avenir nous le dira. En attendant, il fallait que tu t’occupes. À défaut de magie, tu avais toujours la possibilité de te livrer à l’exercice physique. Anorn t’a déconseillé l’effort, et la jeune mage chargé de te surveiller semble paniqué à l’idée même que tu bouges le petit doigt, mais c’est ton corps et ce sont tes besoins. Ton physique parle de lui-même. Tu as été habitué à le pousser dans ses retranchements, et après ces quelques jours de quasi sommeil, il te faut un minimum d’effort pour stimuler ta reconstruction. - Tu es bien sûr de toi ? De quoi est-ce que j’aurai l’air devant le régent s’il t’arrive quoi que ce soit ?- Pas… d’inquiétude… Je… vais… bien. Tu pousses avec difficulté sur tes bras pour écarter ta poitrine du sol. Tes épaules et tes pectoraux te brûlent de manière exagérée par rapport à la simplicité de l’exercice, mais tu reconnais là la bonne brûlure. Celle qui naît des déchirures nécessaires au renforcement du corps. Tu finis, après un nombre pathétique de répétitions par te laisser choir au sol, avant de prendre, avec la fortunée aide de ton infirmière, une position assise. - Pourquoi est-ce que tu t’acharnes à te faire du mal comme ça. Tu as le droit d’attendre tu sais.- Pour les mêmes raisons pour lesquelles tu t’acharnes à m’en empêcher. Ma vie n’est plus en danger, tu as le droit de me laisser faire. - C’est juste que j’ai…- Envie de faire ce que tu penses être le mieux. Je comprends parfaitement. Mais tu vois, je fais ce que je ressens être le mieux pour moi.- Ça n’a pas l’air de toujours te faire que du bien cette histoire.- Je suis certain qu’il t’est toi aussi arrivé de te faire violence pour une quelconque raison. Mieux, je suis certain qu’il t’est déjà arrivé de travailler ta magie à t’en rendre malade. Je suis certain que ton entourage a essayé de te dissuader d’aller plus loin, et je suis aussi certain qu’aujourd’hui les avoir ignoré est le dernier de tes regrets.- Touché. Suis-je à ce point un livre ouvert ?- Non, mais tu es mage de Vie. Déjà que la majorité des mages passent par cette étape, la nature même de la magie de la Vie enseignée chez nous les elfes vous y rend encore plus sensible. - Et puis, difficile de faire autrement en temps de guerre. Même Anorndellon est épuisé. Voir de grands mages comme vous deux dans un tel état, il faut bien avouer que ça a été un coup pour nous tous aux dispensaires.- Je t’arrête tout de suite, je suis encore loin d’avoir le niveau du régent.- Ce n’est pas l’impression qu’il m’a donné lorsqu’il m’a confié ta garde.- Il est plus émotionnel qu’il n’y paraît. Il connaît bien mon père. Je pense sincèrement que c’est ça plus que mes aptitudes qui a joué dans sa décision.- Emotionnel peut-être, mais à en voir comment il a géré les mouroirs pendant ces derniers jours, je doute fortement qu’un quelconque lien affectif ait été suffisant. Décidément, vous les vieux mages êtes tous les mêmes. À croire que cultiver la fausse modestie est un prérequis pour dépasser les 700 ans.- Ce n’est pas de la fausse modestie. Je suis convaincu d’être un excellent mage, seulement je vois encore tout le chemin qu’il me reste à faire avant d’atteindre le niveau que j’attends de moi-même. En regardant la canopée plutôt que l’herbe, on se sent tout de suite plus petit.- Tu viens de me traiter d’herbe là ?- Une très jolie jeune pousse qui n’attend que le bon moment pour fleurir, voilà ce que je vois.- J’aime bien, bien rattrapé. Tu apprécie le tempérament de la jeune Sylvaine. D'agréables échanges en perspective. Si Anorn n'avait pas choisi ton ange gardien en connaissance de cause, c'est que le hasard fait bien les choses.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 21 Avr 2016 - 1:14 | |
| Alentours de la cité d'Eraïson Calimehtarus de la Septième ennéade 8e année du Onzième Cycle Là où semblait se dessiner une évidente victoire s’écrivait aussi l’introduction d’une tragédie. La grande majorité des forces Noirelfiques anciennement présente sur Eraïson a choisi d’abandonner le navire avant que leurs cousins ne viennent le saborder. Beaucoup ont fui à travers les veines taillées dans la Terre avant qu’elles ne se colmatent, mais il en est certains qui n’ont eu d’autre solution que de s’enfoncer dans la forêt, là où la mort était plus incertaine. Durant les jours entourant l’attaque, les Noss parcourant la forêt autour de la cité tombée redoublent de vigilance, car ils savent. Ils savent qu’il est de leur devoir d’empêcher les sombres de s’échapper d’entre les entrelacs de racines et de branches de la forêt. Parce que ces créatures démoniaques ont tenté de briser leur foyer, il était temps pour les habitants de les briser à leur tour. Les protecteurs de ce jour ne sont pas des guerriers, ce ne sont pas des combattants qui ont été choisis, mais ceux ayant la plus grande connaissance de ce monde végétal. Il n’est pas question de bataille. Les sabots frappant le sol ne viennent pas de rangs d’animaux. Ce sont des êtres isolés qui attendent, précautionneusement dissimulés dans leur élément, que leurs proies s’engouffrent dans le piège. Comme le feraient des araignées. Allongée sur le dos de son cerf, caressant l’animal aussi anxieux qu’elle pour le calmer tant qu’elle le peux, Uìnen porte sa main libre vers les aiguilles qui lui servent habituellement à créer, dans l’intention de pratiquer une toute autre forme d’art. L’immense bête à cornes se déplace avec une discrétion et une aisance surprenante, répondant aux commandes silencieuses de sa cavalière. Un pas de plus, le temps d’une cambrure, l’animal baisse la tête. Ce n’est pas du tissu que l’aiguille a filé cette fois. ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~
Alentours des Camps Elfes Tariho de la Septième ennéade 8e année du Onzième Cycle Tu as réussi aujourd’hui, enfin, à convaincre Helinquë de te laisser un peu de marge. L’application de la jeune mage de Vie à sa tâche était tout à son honneur, et le temps qu’elle prenait à développer une véritable relation d’égal à égal avec toi plutôt que de ne te voir que comme une corvée était même assez touchant ; mais la passion avec laquelle elle considérait son travail en devenait souvent... écrasante. Pas une seconde tu n’arrivais à échapper à son regard, pas une seconde tu ne pouvais échapper à son oreille. En tant qu’individu, être à ce point coupé du moindre espoir d’intimité devenait pesant. En tant qu’elfe millénaire, être à ce point materné par une Taledhel dont tu pourrais être l’ancêtre sur plusieurs générations, en particulier lorsque tu n’en avais pas toujours besoin devenait humiliant. Heureusement Helinquë n’était pas l’une de ces folles femmes dont l’oreille n’accepte pas la critique, et si elle n’a pas réussi à en prendre conscience d’elle-même, il t’aura suffi de lui faire part de ton malaise pour qu’elle le comprenne. Elle s’en est voulu pendant quelques minutes, tu t’es culpabilisé de lui avoir fait de la peine pendant les minutes suivantes, et puis finalement vous en avez ri. Ensembles. Et elle s’en est allé, jusqu’à l’heure où elle jugera ta liberté trop dangereuse… heure qui vu son tempérament risque d’arriver plus vite que tu ne l’espères. Au mieux pouvais-tu espérer une demi-journée seul avec ta propre conscience. Tu souris. Il aurait été hors de question de descendre le cours d’eau bordant le campement à la recherche d’un bassin si ton escorte avait été avec toi. Tu l’entends d’ici « Tu sais, s’éloigner du campement n’est sûrement pas une bonne idée. Je suis pas la plus grande des mages de vie, je ne sais même pas si je pourrais te maintenir en vie le temps d’aller chercher de l’aide si tu faisais une rechute ! Parce que oui, c’est possible une rechute, et après presque 1000 ans j’imagine que tu le sais déjà.» Ah… Helinquë. L’elfe avec le don de te faire sentir Grand-Père alors que tu n’as pas d’enfants. C’est en rêvassant à l’idée de ce à quoi pourraient ressembler tes enfants que tu te glisses dans le tant attendu plan d’eau ; te réjouissant du contact de l’onde contre ta peau. Ça t’avait tellement manqué… - Et dire qu’enfant déjà, quand tu entrais dans l’eau, ton expression était exactement la même. Je me sens bête maintenant de ne pas avoir réalisé ta vocation d'élémentaliste plus tôt. - Mère ?- Fils ? Tu te lèves, elle descend de sa monture et la berge se fait le théâtre des heureuses retrouvailles d’une mère et de son enfant. C’est avec le plus grand naturel que, fusses-tu nu, fusses-tu trempé, tu l’as tendrement prise dans tes bras. L’étreinte maternelle est l’une des plus belles choses que puisse connaître un enfant. Quel que soit son âge, quelle que soit son origine, quelle que soit sa taille, entre les bras de sa mère l’enfant est invincible. Uìnen te serre contre elle avec la bienveillante chaleur dont elle a le secret, et se faisant grande, debout sur la pointe des pieds, elle te dépose une bise sur le front. - Depuis quand est-ce que tu me veillais ?- Depuis ta naissance Ulitta ! En vérité cela va faire plusieurs heures déjà que je t’observe dans ton bain, mais je sais à quel point l’eau t’est reposante et après ce que tu as du vivre, j’ai préféré te laisser en profiter un instant.- Et à présent nous sommes tous les deux trempés ! C’est bien notre veine.- Et bien prenons cela comme une invitation à partager un moment le temps que mes habits ne soient secs.Et Uìnen quittait ses drapés de soie pour te suivre et profiter de la fraîcheur du ruisseau. Un visage d’une agréable finesse. Des yeux espiègles fermés dans ce moment de détente. Une bouche aux lèvres marquée, dessinées d’une tentatrice teinte rosée. Une peau dorée sur laquelle se croisent des entrelacs de lianes et de racines, de chatoyantes plumes et des ailes couvertes de poussière d’étoile ; mille et une couleurs de pétales pour autant de formes de fleurs et une araignée. Un arachnide trônant invisible aux yeux des profanes en pièce maîtresse du chef d’œuvre. La ressemblance avec ta génitrice se prolonge jusque dans les marques qui vous couvrent le corps. Sauf que là où la sienne n’est que douceur et élégance, la tienne voit discrètement en son sein naître des épines, à ses abords se dessiner des angles menaçants et de ses branches se former une égide. Et ta mère, elle y trouve sa fierté. Son fils a accepté le flambeau en plus de s’être fait l’un des champions de l’Anaëh. - Mère, on dirait que tu as oublié de faire les présentations. Comment s’appelle ta nouvelle compagne ?La biche s’approche timidement de sa maîtresse, hésitante devant l’eau avant que les mains d’Uìnen de vienne lui flatter le cou. Toujours méfiante devant toi, elle ose toute de même fermer les yeux et laper à la surface, toute tremblante qu’elle soit. - Elle s’appelle Tundaheri. C’était l’une des filles des Bask’Eret. Lorsque les elfes des Noss se sont réunis pour faire face aux sentinelles Sombres, ceux du Bask’Eret ont accepté de présenter à certains d’entre nous les cerfs avec lesquels ils se sont liés. La nature a fait d’elle une femelle avec un forte taille et avec un riche ramage. Malheureusement, c’est ce qui l’a empêché de proprement s’intégrer parmi les autres femelles qui la reconnaissaient en tant que mâle. Les autres mâles de leur côté la reconnaissent comme l’un des leurs, mais elle n’appréciait pas la permanence de leurs luttes pour la place d’alpha. - Elle est magnifique.- À vrai dire, à la voir peiner à trouver sa place, j’ai été profondément touchée parce que…- Elle t’a fait penser à moi n’est-ce pas ?- Et c’est sûrement pour ça que nous nous sommes si bien entendues. J’ai pensé que vous deux vous comprendriez bien. Tu te lèves, doucement, pour t’approcher de l’animal. Instinctivement, ta mère tend le bras vers le cou de Tundaheri pour apaiser la bête pendant ton approche. Si elle ne fuit pas, la grande biche frémit quand tes mains se posent contre sa robe. C’est d’abord retenue par le contact des mains de ta mère qu’elle accepte ton toucher, puis avec le temps qui passe tu espères qu’elle comprenne. Qu’elle comprenne l’empathie que tu peux ressentir pour son histoire, qu’elle comprenne que tu ne lui veux pas de mal. Rien ne saurait te dire si elle comprend, mais elle se calme et semble commencer à apprécier tes caresses. Preuve que même les plus farouches des animaux ont eux aussi parfois besoin de douceur.
- Spoiler:
Ulitta = petit monstre
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Ven 22 Avr 2016 - 11:30 | |
| Marcher sans but et parler sans mots est devenu votre moyen de communiquer. Tu ne sais pas où tu vas, mais elle te suit, attendant patiemment que la situation se délie d’elle-même. C’est la tension qui noue ta gorge et ça ta mère l’a remarqué bien assez tôt. Tant que l’instant était à la détente, porté par l’eau, il était facile de le dissimuler, mais une fois sur terre et soumis à la gravité, impossible pour toi de cacher les dommages subis en début de cette ennéade. Ta marche est lente, lourde et précautionneuse. Tu t’économises, chose que tu n’as pas l’habitude de faire, même lorsque tout le monde t’en prie. Facile pour elle de se rendre compte à quel point te t’étais donné, et plus facile encore de deviner la lourdeur des soins que tu avais dû subir. Un demi-regard coupable, main gauche faisant l’amour à coude droit, tête baissée et mèches devant les yeux… tu attends que la remarque vienne percer l’abcès.
- Je vois où tu veux en venir. Alors, qui dois-je remercier ? - S’il fallait être exhaustif, la liste serait bien trop longue. - Allons bon, il doit bien y avoir une personne en particulier.
Tundaheri se rapproche, ose un contact de ses bois dans ton dos. Tu es en situation de gêne, et la mesquine en profite pour prendre le meilleur sur toi. C’est que les mâles lui auront bien appris à la bougresse.
- Tout ceux avec qui je me suis battu ont énormément donné de leur personne. Ce serait injuste d’ignorer les efforts de ne serait-ce que l’un d’entre eux. - Mais…? - … mais je pense que s’il y a que quelques personnes à qui je devais faire mes remerciements, je pense que ce serait Halyalindë et Neraën, les protecteurs d’Ardamir et d’Eteniril avec qui le me suis battu ; Ardar, Talin et Ealistera, les limiers qui m’ont ouvert la route… et qui malheureusement n’en sont pas revenus, et Anorndellon, celui qui m’a guéri après la bataille. J’aurais aussi aimé pouvoir te nommer les elfes de l’équipe qui a ramené nos carcasses au dispensaire, mais ceux-là, je n’étais pas en état de voir leurs visages. - Pauvres hommes. Avec tout ce que Velicënor s’est appliqué à t’enlever du crâne pour te le mettre dans les bras, tu n’as pas dû leur faciliter la tâche. Qu’en est-il des autres survivants de ton petit groupe ? - Halyalindë a bien failli nous échapper, mais elle s’est finalement prouvée être la moins touchée d’entre nous.Les guérisseurs s'étant retrouvés entre ses griffes peuvent le certifier Je n’ai pas revu Neraën depuis l’après-bataille, mais j’ai confiance. Anorndellon est un merveilleux guérisseur. N’importe qui d’autre nous aurait probablement suivi entre les griffes de Tari. Je lui fais confiance, le Protecteur ne peut pas être mort entre ses mains.
Inconsciemment, tu tournes autour du camp plutôt que de t’y engouffrer. Tu meurs d’envie de présenter au regard de ta mère la fine équipe qui t’a accueilli pendant tout ce temps, mais quelque chose te retient de rentrer en contact avec ceux qui lui sont inconnus. Pas Uìnen, puisqu’elle n’est pas farouche ; ce sont les signes de Tundaheri, peu encline à côtoyer d’autres que les Bask’Eret qui vous empêchent de rejoindre le centre d’activité. Les cercles décrits au cours de votre promenade pourtant se resserrent lentement, et c’est finalement à la faveur d’une bienheureuse courbe que vous croisez l’un des implicites objectifs du voyage.
- Anorn a l’air d’être dans sa tente… après l’activité des derniers jours, le pauvre doit être épuisé. - Et il n’en est que plus honorable. Attends-moi ici mon fils.
Tu restes en compagnie de la biche, flattant son flanc pour qu’elle reste calme, en profitant pour tenter de tisser un semblant de lien avec elle, tandis que ta mère s’engouffre sous la tente d’un Anorndellon probablement endormi. Qu’il veille ou sommeille, elle ne s’en formalisera pas, l’elfe grâce auquel son fils est encore en vie mérite son infinie gratitude, et si elle doit l’offrir une fois pendant qu’il dort avant de pouvoir remercier l’homme éveillé, ainsi sera-t-il fait.
Déroulant l’un des nombreux foulards qui lui entourent taille et bras gauche, la belle dépose le tissu en présent sur la poitrine du guérisseur endormi. De ses mains elle prend délicatement celle du régent, prenant garde à être assez douce pour ne pas sortir du monde des songes celui qui l’a mérité. Et disant en son cœur mille prières, elle dépose la paume d’Anorndellon sur le sien, et dans la soie. Elle attendra, l’espiègle pendant quelques minutes. Pour l’observer. Espérant que depuis la réalité, elle aura su lui faire cadeau d’un rêve plus beau.
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 28 Avr 2016 - 10:43 | |
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Quand pour la première fois depuis trop longtemps, il sentit la douceur de l'oreiller accueillir le poids de sa tête, Anorn s'endormit. Il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour que son esprit semble quitter son corps, pour se plonger dans des rêves qui n'avaient plus aucun rapport avec la réalité. Il avait cette sensation étrange d'être à nouveau chez lui, d'être à nouveau aimé, et surtout, la douleur, la fatigue et l'angoisse avaient disparues. Il n'avait plus ce fardeau sur ses épaules, plus cette pression, et ces obligations qui l'étouffaient parfois. Il était libre de s'exprimer sans craindre de n'être pas à sa place, et de demander sans craindre d'offenser. L'Anaëh entière paraissait plus tendre, et plus paisible. Et si au loin grondait l'orage, il profitait tout de même pleinement des quelques instants de bonheur. Au creux de sa main, il avait sentit la main chaude d'Aldartha se faufiler. Ses doigts s'étaient refermés sur les siens, son simple contact le comblant. Simplement, un bras vint se glisser autour de sa taille et, au parfum, il reconnut Glauriel. Posant son menton sur le haut de son crâne, passant un bras autour des épaules de son jumeau, Anorn sourit. Il sourit à ses parents qui les regardaient, fiers et la tête haute. Il crut même voir une larme perler le long de la joue de sa mère. La gouttelette cristalline brilla un instant sur sa joue, avant que les rayons du soleil ne happent son regard. Les silhouettes s'évanouirent, le vent se fit sentir un instant, puis le néant. Il n'y avait plus rien, plus personne. Plus de rêve ni de réalité. Plus de cauchemars ni de blessés. Seulement sa conscience, et le bruit sourd que faisait son cœur à chaque battement. Et peu à peu, il put le sentir vibre sous sa paume. Avant que la fraîcheur d'une peu étrangère contre la sienne ne lui fasse reprendre conscience, avant que la peur s'instaure subitement en son sein pour disparaître tout aussi rapidement.
Une elfe était agenouillée à bas de lit et avait manifestement posé un foulard sur son torse, désormais au creux de sa paume. Ses yeux encore embués de sommeil, il eut du mal à réaliser que quelqu'un avait pu entrer dans sa tente, sans qu'on s'y oppose ne serait-ce que quelques instant. Alors, sans qu'il ne le veuille vraiment, un grondement naquit dans sa poitrine pour mourir rapidement dans sa gorge. Se relevant péniblement et s’asseyant sur le bord de son matelas sommaire, il regarda sa visiteuse droit dans les yeux et demanda d'une voix claire et audible :
- Excuse moi, on se connait ? Je ne reconnais pas ton visage, j'en suis désolé si je devrais.
Avec son réveil assez soudain, sa main toujours posé dans celle de l'inconnue, refermée sur un tissu dont il ne connaissait pas la provenance, il avait du mal à reprendre pieds. Il savait qu'il était dans sa tente, à Eraïson, qu'il avait du dormir quelques temps, mais il savait aussi qu'Aldartha n'était pas loin et que Glauriel devait l'attendre. Il ne pouvait pas les laisser seuls, parce qu'ils devaient aller quelque part. Dans un endroit dont il ne se rappelait pas bien, mais il savait que son sang le lui rappellerait. Alors n'attendant pas la réponse à sa question, il se leva tant bien que mal, prit sa tête dans ses mains le temps que sa vue s'éclaircisse et ajouta le plus gentiment possible :
- Je ne vais pas pouvoir rester discuter, je dois aller retrouver ma famille, ils m'attendent et... Je dois les retrouver, encore désolé.
Mais avant qu'il ne puisse franchir la toile qui servait de porte, ses jambes tremblèrent et cédèrent sous son poids. Le régent s'écroula sans qu'il ne puisse rien y faire et, abasourdi par ce qui venait de se passer, il mit un moment à se redresser. Le monde était bien trop différent de ce qu'il connaissait et la panique l'envahit alors. Elle brillait explicitement dans ses yeux, tandis qu'il essayait de trouver un nouveau repère. De trouver Aldartha. Aldartha et Glauriel.
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| | | Lœthwil
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 28 Avr 2016 - 15:30 | |
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La délicate elfe sauvage ne put retenir un léger sursaut quand elle sentit le subtil mouvement de la main de l’ancien Protecteur contre la sienne. La culpabilité de l’avoir sorti de ses rêveries vint rejoindre le bonheur d’avoir l’occasion de remercier l’un des Sylvain grâce à qui son fils foulait encore cette Terre et ce faisant, cœur et raison eurent un instant toutes les peines du monde à s’accorder vers une même direction. La Serindë baissa finalement simplement la tête en direction de l’ensommeillé assis face à elle en signe de salut. Les mots du régent ne trouvèrent pas immédiatement réponse des lèvres d’Uìnen, chose dont il ne sembla pas se formaliser. Au sortir du sommeil, Anorndellon n’en semblait pas moins épuisé et c’est pourquoi la sagesse de l’ancienne lui conseilla de ne pas se faire trop entreprenante. Il fallait qu’il émerge de lui-même, pas que le monde empirique ne vienne l’arracher à celui des songes.
Toujours enveloppé des brumes de Morphée, il se leva tout de même, lâchant au passage la main et le présent de la tisseuse, à sa grande tristesse. Quelque peu déçue, l’elfe des Noss ne pris cependant aucunement offense du comportement de son vis-à-vis. Un tendre sourire se peint sur le visage de la matriarche Faerin en face d’un Archimage millénaire paraissant revenu plusieurs centaines d’années en arrière, aussi vulnérable et innocent dans son nuage que le serait un enfant. Uìnen ne connait rien de la famille du guérisseur, et ne peut donc que le suivre en silence sur l’hypothétique chemin qui le mènerait vers eux. En tant que mère, ses instincts la poussent à porter sa protectrice attention sur celui qui se livre en tant qu’être fragile et à l’accompagner de près, jusqu’à ce qu’elle soit convaincue de son aptitude à avancer en solitaire. Le Protecteur lui donna raison. Les fins bras de la tisseuse suffirent à peine à freiner la chute d’Anorndellon. Au moins lui évita-t-elle un trop douloureux contact avec le sol, mais le choc émotionnel n’en fut pas amoindri. Quelque chose semblait étrange, quelque chose n’allait pas. Les yeux de la femme plongeant dans ceux de l’homme n’y trouvèrent que le vide, un regard à la fois fixe et désespérément fuyant, un œil perdu. Il voyait l’ici, mais il était ailleurs, et inconnue qu’elle était, elle ne saurait lui prêter main forte. Loin d’être résolue à sonner fausse alerte au grand nombre, Uìnen resta plongée dans son mutisme, profitant de la proximité du voile servant de porte à la tente pour parler. Parler sans mots, lorsque l’on est initié à communiquer avec les arachnides est chose triviale. Ainsi, d’un bras la Dame Faerin soutint le régent tandis que l’autre main tapotait le tissu à la recherche de ton aide.
Les pupilles attirées par un mouvement au coin de ton champ de vision, tu détaches ton front de celui de la biche. Perplexe quant à son origine, il te faut quelques longues secondes avant de t’intéresser au message que les vibrations tentaient de faire passer. Il ne t’aura par contre pas fallu beaucoup de temps pour faire un triste au-revoir à Tundaheri avant de t’enfouir sous la tente à la suite de ta mère.
- Estiam, sais-tu s’il est un membre de sa famille quelque part sur les camps. Il semble désespérément les chercher. - Je ne connais pas la famille d’Anorndellon, mais je doute fortement que le moindre de ses membres soit plus proches de nous que ne l’est Alëandir.
Tu prends le relai en tant que support d’Anorn, soulageant ta mère du poids de l’archimage, et à ton tour tu l’observes. Comme la première fois, comme lorsqu’il s’est occupé de tes blessures, ses yeux parlent. Comme la première fois que ses yeux ont parlé, tu t’en retrouves complètement décontenancé. Anorndellon ne s’en rend probablement pas compte, mais lorsqu’il laisse faire, son visage possède un pouvoir expressif comme l’on n’en voit rarement… ou alors n’étais-ce que le contraste avec son habituelle impassibilité qui le rendait si touchant. Il était perdu, et dans un étrange retournement de situation, c’était à ton tour cette fois de le ramener.
- Je suis désolé Anorndellon, mais ta famille est loin. Je comprends qu’ils te manquent et tu leur manque probablement tout autant, mais on a encore besoin de toi ici. Ta main vient fermement prendre la sienne. Je suis là Anorn. Je sais que je ne peux remplacer ta famille de sang, mais quoi qu’il arrive, je suis là.
Loin… loin… si seulement tu savais à quel point la famille qu’il recherche est loin…
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Sam 30 Avr 2016 - 10:43 | |
| Il sentait qu'on s'agitait autour de lui, qu'on essayait de l'aider, ou de lui dire des choses. Mais à vrai dire, il n'en avait cure. Qu'on lui dise, ou qu'on lui demande simplement, ce qu'il devait faire n'était pas quelque chose dont il se soucier. Répondre n'avait pas d'intérêt immédiat, parce que ce qu'il voulait, maintenant, était retrouver Glauriel et Aldartha. Il les avait vu il n'y avait pas longtemps, ils ne devaient pas être loin. Mais plus il prenait de temps, plus il attendait pour sortir et courir après eux, plus ils risquaient de s'éloigner. Et Anorn n'avait aucune idée de la direction qu'ils avaient bien pu prendre. Quand une main se glisse contre la sienne, quand une voix qu'il sait connaître cette fois, retentit à ses oreilles, il essaye de comprendre, d'entendre ce qu'on lui dit. Il est là et son sang est loin. Voilà ce qu'il lui dit. Mais comment pourrait-il vouloir rester à ses côtés, plutôt qu'à ceux de sa fratrie ? C'était impensable, il le savait, il devait être dans un rêve. Un rêve désagréable, l'un de ceux où on avait beau se débattre, où on avait beau hurler à plein poumons, on ne se réveillait pas. Peut-être que s'il se concentrait suffisamment, peut-être que s'il gémissait dans son sommeil, on viendrait le réveiller ? Aldartha peut-être. A vrai dire, il ne savait plus où il s'était endormi, il n'arrivait pas à le savoir.
- Je te connais. Je sais que je te connais. Je n'arrive pas à savoir comment, ni qui tu es, mais je te connais, j'en suis certain. Alors tu devrais savoir où est Glauriel, non ? Elle est peut-être sortie de la tente, avant que tu n'entre, ou alors elle m'attend quelque part. Aide moi, s'il te plait. Aide moi à la retrouver.
Sa voix devait sonner étrangement aux oreilles d'Estiam. Plus vivante, plus chaleureuse, plus expressive. Comme elle l'avait été des siècles auparavant. Comme elle avait su chanter avant qu'on ne la bride, et qu'on ne la contienne. Qu'on ne la refroidisse pour qu'elle ne puisse être quelque chose qu'on pouvait retourner contre lui. Mais de ça, évidemment, il n'en avait aucun souvenir. Il faisait cette fixette sur sa sœur, comme s'il devait la retrouver à tout prix, comme s'il devait se précipiter à son secours avant qu'elle ne disparaisse. Il était convaincu, en son fort intérieur, que s'il ne la trouvait pas bientôt, il lui arriverait malheur. Alors se relevant à l'aide de celui qu'il savait connaître, il voulu sortir de cette tente, mais arrêta sa main juste avant de tirer le pan de tissu. Pris d'un sentiment de panique qu'il ne pouvait expliquer, il se tourna vers l'elfe qui était à ses côtés, et le regardant sans réellement le voir, demanda :
- Qu'y a-t-il dehors ? Quelque chose que je ne veux pas voir, n'est-ce pas ? Quelque chose qui va me détruire ?
Sa respiration s'était accélérée, et il sentait son cœur battre un peu plus fort dans sa poitrine. L'angoisse comprimait peu à peu sa gorge, et son estomac était parcouru de crampes de plus en plus violentes. S'il ne faisait pas quelque chose rapidement, il allait avoir du mal à se calmer, et à revenir à un état normal. Peut-être que celui qui se tenait à ses côtés était un de ses camarades de l'Académie ? Qu'il était un apprenti, engagé dans la voie de la vie, et qu'il pourrait faire quelque chose à son propos ? Agrippant son bras plus fort qu'il ne l'aurait voulu, il le tira contre lui et, serrant les dents, le pria de faire quelque chose, de soulager la douleur, ou même seulement d'essayer de faire disparaître les spasmes qui secouaient son estomac. Mais avant qu'il n'ait pu lui répondre, une image apparue sous ses paupières closes et il reconnut le visage si apaisant de son jumeau. Ne lui suffisait-il donc que de fermer les yeux pour le retrouver ? C'était insensé. Complètement absurde. Mais après tout, ce n'était qu'un rêve. Et les rêves n'avaient aucune logique, il le savait. Alors son corps se calma presque instantanément et un sourire apparut sur ses lèvres.
- Maintenant que tu es là, allons trouver Glauriel.
Il n'aurait su dire s'il avait prononcé ces mots à voix haute ou non. Mais peu importait. Là était leur impératif. Et qu'il le crie au monde entier ou le murmure uniquement à Aldartha ne faisait que peu de différence.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Sam 30 Avr 2016 - 14:55 | |
| Il se perd, tu cherches et elle observe. Vous voilà tous les trois lancés dans la course à la Reine Rouge, chacun espérant rattraper le précédent sachant pertinemment que le temps court trop vite pour que vous ne soyez pas en retard. Au tout début du cortège, un gai-luron d’Anorn fuit en riant à gorge déployée, l’œil comme une folle toupie qu’aurait lancé le chapelier, dans un état de bonheur extatique qu’il regretterait une fois revenu à la réalité. Le sang et l’épuisement sont l’une des plus puissantes drogues connues à ce jour, mais plus puissante est la drogue, plus terrible en est son contrecoup.
Soulagement, il te sait être de son entourage. Déception, il ne te reconnait pas. Pire encore, il te prend pour un autre. Tu n’as aucune idée de qui est Glauriel, mais à la chaleur se dégageant de sa voix lorsqu’il parle d’elle, tu sais qu’elle est quelqu’un d’extrêmement précieux à ses yeux. Précieux au point de te donner envie de la chercher. Même s’il semblait perdu dans le temps et l’espace, même s’il semblait être à des lieues de la personne qu’il est habituellement, Glauriel pouvait être tout près. Elle pouvait être l’une des mages l’ayant suivi jusqu’à Eraïson, elle pouvait être une elfe soldat avec qui il avait tissé de forts liens, que ce soit avant ou après son arrivée au front. Elle pouvait être l’un des guerriers qu’il retrouvait de la bataille d’Uraal… si seulement il ne l’espérait pas sortie de sa propre tente. Parce qu’en dehors de la surveillance qui lui est affrétée, Anorn est seul dans sa propre tente… ou l’était-il ? L’habituel calme s’impatiente et s’agite, avance avec l’idée de reculer pour finalement s’arrêter devant la porte de sortie vers la dure réalité. C’est lui l’enfant et toi l’adulte maintenant, et sous les yeux attentifs d’une mère se demandant quelle seront tes réactions, tu poses une main rassurante sur le crâne du Régent.
- Il se passent des choses difficile là dehors, mais le pire est passé. Tu es en sécurité maintenant.
Des choses difficiles… ce n’était qu’un euphémisme, mais il n’était pas encore temps de brusquer le régent. Tu ne sais pas ce qu’il se passera si tu brises sa rêverie. Il pourrait simplement vous revenir, comme il pourrait ne pas le supporter. Cela pourrait ne pas l’écorcher comme cela pourrait le détruire. Il cherche quelqu’un qu’il aime, et plutôt que de violemment lui arracher un être possiblement disparu une fois de plus, tu préfères le laisser lentement comprendre. Lorsque la douleur prend le temps de maturer, oui l’inconfort est de plus longue durée, mais au moins apprend-t-on à vivre avec. En l’absence de Glauriel, il te semblait que l’affection d’Anorndellon se rapporte de plus en plus sur toi, d’une manière dont tu ne l’imaginais pas capable avec qui que ce soit si ce n’est peut-être sa femme. Sa femme… peut-être Glauriel était-elle sa femme ? Mais c’était impossible. L’épouse d’Anorn est elle, bel et bien restée en Alëandir, et si tu dois en croire ce qu’en dit le monde, c’est Arwain que serait son nom.
Un simple geste et toute réflexion fut de toute façon coupée. Anorn, désespérément accroché à ton bras te présenta un sourire à t’en fendre le cœur, auquel tu ne pus répondre que par un rictus plus tendre encore.
- Fais attention à lui, fils. Il est épuisé, simplement se retrouver là dehors pourrait être trop pour son cœur et son corps.
Tu hoches la tête, intimant à ta mère que tu comprenais, puis te rapproche un peu plus de l’ancien protecteur. Si seulement un jour on t’avait dit que tu te retrouverais dans cette situation. Te voilà à la fois devenu sa figure protectrice, celui en qui il compte pour avancer et celui qui l’amènera à la désillusion.
- Tu ne devrais pas trop forcer dans ton état et c’est toi qui le disais Laisse-moi faire, je vais t’aider.
Tu passes un bras derrière les genoux d’Anorn tandis que l’autre vient s’ourler autour de son torse, sous ses bras. Tu soulèves ton frère moyennant bien plus d’efforts que tu ne l’aurais imaginé, te prouvant au passage que ta récupération à toi aussi est loin d’être terminée. C’est ta mère qui vous ouvre la voie, prête à intervenir à tout moment. Parce qu’une mère est la mieux placée pour savoir ce dont a besoin un enfant. Anorn dans tes bras, ta mère montée sur Tundaheri, votre fantasmagorique cortège entame sa marche dans les campements.
- Es-tu sûr Anorn, que Glauriel est ici ? sans attendre la réponse, tu continues sur ta lancée. Tu as une idée de là où elle pourrait être ?
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Dim 1 Mai 2016 - 9:36 | |
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Sûr que Glauriel était là ? Evidemment. Elle était sortie de sa tente, un peu plutôt, ne lui avait-il pas déjà dit ? Ou peut-être ne l'avait-il pas entendu quand il le lui avait dit. Les yeux encore dans le vague, ils cherchaient, hagards, la silhouette de sa sœur parmi les passants. C'était étrange, parce qu'ils n'étaient pas là où il était quelques instants plus tôt. Ils étaient complètement ailleurs, dans un camp qui ressemblait fort à...
- Uraal ? On est à Uraal ?
L'odeur de la mort, celle du sang et les cris qu'il pouvait entendre ça et là l'avaient frappé de plein fouet. Il avait cherché à se remettre sur ses pieds et on ne l'avait pas empêché. On le soitenait toujours, certes, parce qu'il savait ses jambes ne le soutenir que partiellement, mais on ne le portait plus. Ses souvenirs se brouillaient, au même rythme que sa vue et il eut du mal à savoir ce qui se passait réellement, à cet instant. Glauriel, Uraal, Aldartha... Cela n'avait aucun sens. Son jumeau n'avait jamais posé les pieds au bord du lac, parce qu'il ne le pouvait tout simplement pas. Quant à sa sœur...
- Tari l'a prise. Elle ne peut pas être là, Tari l'a prise. On est à Uraal, n'est-ce pas?Qui es-tu ? Dis moi, qui es-tu ? Je suis désolé, je n'arrive pas à m'en rappeler, je reconnais ta voix, mais je ne peux pas mettre de nom dessus.
Le vacarme qui émanait du camp devenait de moins en moins supportable et, bientôt, ses mains vinrent recouvrir ses oreilles, tandis que son front se plissait dans une expression de gêne difficilement supportable. Il avait cette impression d'être entre le rêve et la réalité, ne sachant plus réellement ce qu'il pouvait faire ou ce qu'il ne pouvait pas. Il fallait qu'il retourne aux mouroirs, s'il était à Uraal, parce que son absence allait être remarquée et sans aucun doute sanctionnée. Ses supérieurs allaient sans aucun doute le faire culpabiliser quant à la pause qu'il avait pris, parce qu'il fallait qu'il sauve le plus de vies possible et que ce n'était pas en dormant qu'il allait faire avancer les choses. Mais quand il voulu s'ouvrir au flux, quelque chose d'étrange parcourut son corps, comme une violente décharge, et le vacarme disparut entièrement. Laissant place à des murmures et des passages bien trop longs de silence. A coté de lui, il sentait une énergie impressionnante, mieux encore, une empreinte qu'il n'avait cette fois ci aucun mal à identifier. Estiam. C'était Estiam. Il n'était pas à Uraal, il était à Eraïson. Et il était parti se reposer parce qu'il s'était donné corps et âme les jours précédents. Il ne savait pas pourquoi on l'avait réveillé, ni pourquoi il s'était retrouvé là, au milieu du camp, flanqué du noss et d'une elfe qu'il ne connaissait pas et il fut un instant décontenancé. Se tournant vers celui qui le soutenait un instant auparavant, il demanda, calmement :
- Pourquoi je suis ici ? Et qui est cette charmante elfe qui nous accompagne ?
A son habitude, il ne fit aucune allusion à ce qui le dérangeait réellement. A vrai dire, il ne savait pas ce qu'il avait pu dire ou non, ce qu'il avait rêvé complètement, ou ce qu'il avait pu partager dans un état de demie-conscience. Et il espéra de tout son cœur qu'Estiam l'éclairerait rapidement à ce propos, sans qu'il ait à le demander. Son cœur se serra à l'idée qu'il ait pu évoquer Aldartha, sans y prêter attention. Comme il l'aurait fait des siècles auparavant, naturellement. Neraën était déjà malheureusement au courant de l'existence de son jumeau, ou plutôt de son état actuel, et il était hors de question qu'il ait à s'expliquer à ce propos auprès d'Estiam. En attendant les réponses à ses questions, il essaya de reprendre un peu de contenance, et commençant par lâcher l'épaule du mage élémentaire. Il pouvait désormais tenir debout tout seul et il entreprit de lisser légèrement le tissu de sa tunique sur son torse. Instinctivement, il s'arrêta au niveau de son focalisateur, posant le plat de sa main sur la bague qui pendait au bout de sa chaîne. Se laissant un instant guider par ce dernier, il se referma au flux, n'ayant aucunement besoin de se fatiguer pour rien. Il n'en avait actuellement aucune utilité et il n'en aurait certainement pas besoin non plus dans les instants qui suivraient.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Dim 1 Mai 2016 - 18:51 | |
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Rêve et réalité au départ deux pôles opposés se mélangent comme des acryliques sous les mouvements du pinceau. Rien n’est plus blanc, rien n’est plus noir, les teintes se spiralent l’une dans l’autre, donnant naissance au gris de la réalité. Les souvenirs des siècles passés lui reviennent, il trie, cherche, compare et se replace. L’Anaëh est en guerre, en conflit contre les sombres et de ceux mobilisés pour se battre il fait partie. Loin de la capitale, vous êtes dans un camp, un camp qu’il ne reconnaît pas encore, mais cela ne saurait tarder.
Les réminiscences se heurtent à sa mémoire comme autant de pierres jetées à sa face. Jamais sa famille ne l’a suivi à la guerre. Jamais sa sœur n’a même connu les temps de guerre. Anorn se réveille, se grandit, te quitte. Prenant en âge, en assurance mais aussi en peine. Il marche sur ses propres jambes, mais se repose encore sur ton bras. Situation ironique quand tu y penses du blessé soutenant le guérisseur. Mais il en a besoin, parce que les souvenirs sont aussi durs que l’épuisement. Tu ne sais pas plus qu’avant qui est Glauriel, mais au moins sais-tu qu’il ne sert à rien de la chercher, parce qu’Anorn s’est rappelé de sa mort. Il est celui qu’il fut il y a plusieurs siècles de cela, il navigue à toute allure à travers son être, mais dans le monde dans lequel il se replace encore, tu n’existes pas. Tu existes à ses yeux puisqu’il t’a déjà vu, mais tu n’existes pas à son esprit puisqu’il est revenu aux temps d’avant que ses yeux t’aient vu.
Tu te retrouves peut-être plus affecté par la déclaration que lui ne l’est. Il vient par ses mots de tuer une personne qu’il venait à peine de faire naître dans ta mémoire. Il a commencé son deuil, toi tu ne pourras jamais faire le tien. Dans sa folie, il joue sans le vouloir avec tes sentiments. Les siens sont troublés par la perte de repères, et en essayant de le suivre, en voulant faire preuve d’empathie, tu empruntes des chemins dangereux, menant à des sensations contradictoires. Anorn t’angoisse, mais pour lui, tu continues de sourire et tu tiens bon. Toi qui parlais de faire tomber les fausses façades il y a quelques ennéades de cela, te voilà fait hypocrite.
- Pas l’Uraal Anorn, pas l’Uraal. Moi, je suis simplement un ami.
Le temps file, file file devant les yeux du régent, et sa stature même change au fur et à mesure qu’il emprunte les us de sa personne de l’instant. Et puis il se met en pause, le temps de faire ce qu’il fait de mieux, et de s’ouvrir. La magie appelée par ton ami chantonne à tes oreilles, et elle te tente, en désirable sirène qu’elle est. Tu as encore du mal à te refermer, et tant que tu as du mal à te refermer, c’est que la pratique t’es dangereuse t’a-t-il dit. Tu prends ton mal en patience donc, espérant que le chant qui t’es source de souffrance lui apporte des réponses.
Tu reconnais le ton, le phrasé, le regard, l’attitude de l’elfe millénaire lorsque la question lui traverse les lèvres, et tu ne peux t’empêcher avant de lui répondre de le prendre dans tes bras une fois de plus, et dans ton soulagement, d’arracher la plante des pieds du Régent revenu parmi vous à la terre.
- Anorn ! Enfin ! Pendant un temps tu as été… ailleurs.
Ailleurs dans le temps, et pas dans l'espace ; et quelque part, tu aurais aimé qu’il le reste, retrouver la chaleur de la rayonnante personnalité qu’il avait avant que ne disparaisse Glauriel. Avant que… tu savais maintenant. Voilà le pourquoi du comment, ou du moins tu le penses. Si le guérisseur a perdu de sa superbe, c’est en grande partie dans le décès de la dénommée Glauriel que s’en trouve la cause. Ta mère vient mettre un terme à votre échange à sens unique, te faisant comprendre d’un regard qu’une telle démonstration, bien que louable, ne serait bonne ni pour ta musculature encore fébrile, ni pour le pauvre squelette d’Anorndellon… auquel elle avait enfin la possibilité de se présenter.
- Enchanté, frère. Elle laisse doucement échapper un rire, l’œil oscillant entre le régent et toi. J’aurais pensé que c’était évident pourtant. La ressemblance, pour peu qu’on y porte la moindre attention était frappante. Les dessins ouvertement apparent sur la peau de la tisseuse, faisant écho aux tiens autant que le faisaient les traits de vos visage. Je suis Uìnen Faerin, la mère d’Estiam. Mon fils vous tient en haute estime, sentiment que je me vois forcée de partager, face à l’elfe qui lui a sauvé la vie. Elle descend de sa monture, pour faire révérence à celui que tu venais de redéposer. Vous êtes un homme bon, et si je puis me le permettre, je vous souhaite sincèrement de retrouver la part de vous que les épreuves vous ont forcé à cacher. Vous méritez d’être heureux.
Vous méritez de sourire à nouveau, comme le faisait celui que vous étiez il y a des siècles de cela.
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Lun 2 Mai 2016 - 13:48 | |
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L'étreinte délivrée par Estiam le soulagea légèrement. Parce qu'il n'avait pas du raconter quelque chose de trop lourd, il n'avait pas du parlé d'événements dont personne n'avait eu vent. Il n'avait pas du mentionner Aldartha. Et quand la mère de celui qui avait du l'aider traverser cette épreuve se présenta, il se sentit idiot. Il était évident qu'il y avait un lien du sang entre eux et pas des moindres. Les paroles qui franchirent ses lèvres le frappèrent tout de même en plein cœur, lui rappelant qu'il venait de divaguer devant des étrangers. Ou une étrangère, plutôt.
- C'est un plaisir de faire votre connaissance, Uìnen Faerin. Je ne peux que trop grossièrement imaginer la femme que vous devez être, à travers ce que je connais de votre fils et à travers l'amour que peut vous porter le Doyen de l'Académie. Veuillez excuser mon attitude précédente, qui n'a pas du être décente. Je me sens profondément gêné et j'espère que vous ne garderez pas cette image en tête, n'étant pas celle qui reflète celui que je suis aujourd'hui.
Il était vrai qu'elle était peut-être plus plaisante, cette personnalité qu'il avait pu exprimer. Peut-être plus douce, plus naïve et plus expressive. Mais ce n'était certainement plus celui qu'il était désormais, du moins s'il en croyait les paroles de l'elfe. Elle pensait qu'il se cachait. Pire, qu'il n'était pas heureux. Et c'était quelque chose d'incroyablement difficile à entendre, surtout venant d'une étrangère. Lui demander de changer, de redevenir une version précédente de lui, qui semblait meilleure à ses yeux était une chose qu'il avait du mal à digérer. Mais comme à son habitude il n'en fit pas la remarque. N'en laissa rien paraître. Il n'en avait certainement pas envie et il décida de ne pas en tenir rigueur.
- Je suis surpris de savoir que vous m'estimez sans même me connaître. Mais j'imagine que c'est loin d'être une mauvaise chose. Et si Estiam me porte une si grande estime, ce n'est sans doute que parce que je n'ai pas échoué dans ma tête et que je n'ai pas brisé la promesse que j'ai faite à son père. Enfin, assez parlé de moi, vous êtes sans aucun doute venue ici pour vous assurer de la bonne santé de votre enfant, je ne voudrais pas gâcher de tels moments. En tout cas, pas plus que je n'ai déjà pu le faire.
Il ne se sentait pas à l'aise, ici, à la vue de tous et sous le regard d'une mère. Il sentait dans ses yeux qu'elle ne le voyait pas comme elle le devrait. Qu'elle ne le regardait pas seulement comme un elfe, mais aussi comme l'enfant qu'il avait pu être. Et il n'aimait pas ça, non. Pas du tout. Son fils était à ses côtés, mais lui n'était pas son enfant. Cette lueur au fond de ses yeux ne voulait pas s'éteindre et il ne voulut pas soutenir son regard plus longtemps. Alors se tournant vers Estiam, posant une main sur son avant-bras, il plongea dans le sien. Là où il svaait qu'il ne trouverait rien d'étrange, rien de dérangeant, rien qui ne le chasserait violemment.
- Je pense que tu t'en doutes, mais nous allons devoir avoir une discussion seul à seul très prochainement. Avant que je retourne aux mouroirs.
Il y avait de nouveau dans sa voix ce ton impératif, sans appel, dont il savait user subtilement. Le doute n'était plus à l'ordre du jour et il avait besoin de savoir. Bientôt. Maintenant, si c'était possible. Et ce n'était que la politesse et la courtoisie qu'il se devait de montrer vis à vis d'Uìnen qui le retenait de ne pas prendre Estiam à part sur le champ. Après tout, si elle était venue le trouver, c'était peut-être pour quelque chose de bien particulier et il devait lui laisser l'opportunité de s'exprimer pleinement. Alors sans vraiment entendre la potentielle réponse du mage élémentaire, il se tourna vers sa mère pour écouter ce qu'elle avait à lui dire.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Lun 2 Mai 2016 - 17:53 | |
| Les éternelles justifications d’Anorndellon ne manquent pas de t’amuser. Il devrait le savoir pourtant, l’importance que tu lui accordes remonte depuis bien avant la bataille d’Eraïson, depuis bien avant votre rencontre à Alëandir même. Il ne te connaissait pas, il n’était qu’un nom à ton oreille, mais un nom auquel étaient associées des qualités que tu miroitais déjà très jeune. Il était l’un de tes notables prédécesseurs entre les couloirs du Chapitre Blanc et dès lors avait gagné ton respect. Vos dernières expériences n’auront fait que contribuer à l’appréciation que tu lui portes en tant que personne. Aujourd’hui tu peux dire que tu connais Anorndellon, mais cela fait bien longtemps que tu peux dire que tu l’estimes.
Uìnen, elle, ne connait rien de lui sinon les différentes facettes de caractère qu’elle a pu lui découvrir durant cette journée. Elle ne le sait pas marié, elle ne le sait pas régent, elle ne sait pas la passion qu’il est encore capable de déployer. Elle ne juge que de ce qu’elle a vu, et ce qu’elle a vu, c’est un Sylvain s’étant refermé en l’espace de quelques dizaines de minutes, un homme chaleureux soudainement devenu étrangement froid. Uìnen a toujours associé la froideur à la peine et à la tristesse, ce qui ne semblait visiblement pas avoir plu au guérisseur. Le regard trop insistant de la matriarche Faerin, trop plein d’une affection dont ne pouvait que vouloir se détacher un elfe déjà millénaire n’ayant aucun lien du sang avec elle avait fini de chasser celui de dormeur éveillé.
- Je ne peux qu’apprécier un homme que mon fils semble tant apprécier. Elle baisse légèrement les yeux quand ceux du Taledhel fuient Désolée si je vous ai incommodé, vous savez ce que l’on dit, une mère ne peut s’empêcher d’être une mère, que l’enfant soit sien ou pas. Mais il serait déplacé maintenant pour moi de continuer de vous voir en tant que jeune elfe maintenant que vous avez repris vos esprits et que votre prestance me dit que nos âges ne sont pas si éloignés l’un de l’autre.
La tisseuse encore une fois, détache cérémonieusement la pièce de tissu qu’elle semble être la seule à ne pas avoir oublié après ces courtes péripéties. Après tout, ils avaient eu d’autres préoccupations, personne n’avait pu faire attention au moment où elle récupérait son présent sur le sol, sous la tente. Cette fois Anorndellon était bel et bien réveillé, et c’est aussi cérémonieusement qu’elle l’avait détaché d’autour de son bras qu’elle entourait le cou du destinataire de la fine écharpe aux dessins ésotériques.
- Je tenais à vous l’offrir. Elle symbolise la beauté qu’il y a dans la lutte pour la vie. Elle était destinée à mon fils au départ, mais il aurait certainement tenu à ce que vous l’ayez.
Et au vu de ton hochement de tête, elle avait parfaitement raison.
- Et à vrai dire, si je suis venue, c’est avant tout pour moi. Mon fils me manque, mais plus que lui encore, ma moitié me manque. La mort a été assez distribuée autour de moi ces derniers temps pour me faire réaliser que je ne voulais pas disparaître sans m’être blottie dans les bras de Lòmion au moins une fois encore. Uìnen se confie, la voix tremblante de sincérité, se demandant presque à haute voix s’il la reconnaîtra, s’il l’aimera encore. J’ai pensé profiter de la présence d’Estiam à Eraïson pour le rejoindre sur la route d’Alëandir, pour que notre famille soit réunie pour plus de quelques instants. - Maman…
À défaut de ceux de ton père, Uìnen avait tes bras, et comme son fils est grand maintenant, elle pouvait profiter de ton soutien. Passé un certain âge, c’est aussi au tour des enfants de s’occuper de leurs parents.
- Mais s’il y a une chose dont vous devez discuter, ne vous gênez pas. Elle te pousse vers Anorn, puis retourne vers Tundaheri Je suis là pour quelques temps encore après tout.
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Ven 20 Mai 2016 - 12:48 | |
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Anorn fut quelque peu soulagé de voir que l'elfe en face d'elle avait adapté son discours en fonction de son état, puisque être traité comme un enfant ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Il avait perdu ses parents assez tôt et leur amour plus encore. Ils n'avaient plus été capables de donner quoique ce soit quand Glauriel avait rejoint le royaume de Tari et c'était douloureusement qu'il avait dû intégrer le soudain manque d'affection de leur part. Il avait tout perdu en l'espace de si peu de temps et avait donc du grandir plus vite qu'il ne l'aurait voulu. Il avait du se montrer présent pour ses géniteurs et surtout pour Aldartha. Et finalement, il avait eu l'impression de devoir faire un choix. S'occuper de son frère, ou essayer de ramener ses parents. Les relever suite à la chute considérable qu'avait provoqué la perte d'un enfant était une chose dont il ne se sentait pas capable. Alors qu'il savait pouvoir gérer son jumeau. Celui qu'il connaissait par cœur, celui qui n'était rien de moins qu'une moitié de lui. Il avait la cruelle impression d'avoir abandonné ses parents, de ne leur avoir pas rendu ce qu'il leur devait et le regard maternel qu'avait posé la mère d'Estiam sur lui l'avait dérangé au plus haut point. Parce qu'il ne le méritait pas, avant toute question d'âge. Parce qu'il n'était pas de ceux sur qui on devait veiller, mais de ceux qui veillaient. Il avait cette aptitude et cette force de caractère qui lui permettait de soutenir les autres, de les élever vers quelque chose de meilleur. Et la seule personne dont il acceptait un amour protecteur était sa femme. Quand on passa autour de son cou une étoffe aussi légère que solide, finement ouvragée et resplendissante, il posa un instant une main sur le tissu, profitant de la sensation qu'il lui procurait sous les doigts.
- Elle est magnifique, merci beaucoup.
Pour une fois, il était à court de mots. Mais elle ne s'en formalisa pas, puisqu'elle reprit de plus belle. Estiam et Lòmion. Les revoir avant de partir. Au creux d'Anaëh. Elle lui racontait ses espoirs et ses envies. Ses rêves qu'elle avait du chérir si longtemps et qui allaient devenir réalité. Si personne ne venait se mettre en travers de leur chemin. Elle avait dans la voix cette chaleur qui laissait transparaître sa joie, chose qu'il n'avait pas entendu depuis longtemps. Pas venant d'un elfe millénaire. Et malgré elle, elle le renvoyait toujours plus à sa propre solitude, à l'écho que formait l'absence de sa famille. Des êtres aimés et chéris, qui auraient du lui vouer une loyauté sans borne et pour qui il aurait du être prêt à tout. Ses mots touchent indéniablement Estiam, alors qu'Anorn reste froid. Comme à son habitude, il camoufle et écoute.
- Je dois discuter avec votre fils, oui. Je m'excuse de ne pas pouvoir vous offrir plus de temps, mais j'en manque cruellement. Dans d'autres circonstances, nous aurions pu discuter plus amplement mais la situation me presse. Ravi d'avoir fait votre connaissance, Uìnen.
Il inclina légèrement le buste, avant de prendre Estiam à part. Il le ramena dans sa tente, là où les oreilles indiscrètes ne pourraient l'entendre. Lui proposant de s'asseoir, lui resta cependant debout, les mains jointes dans son dos. Il n'avait pas idée de comment débuter la conversation, mais il savait que ce n'était là qu'une ruse de son inconscient pour repousser la discussion. N'ayant aucune idée de ce qu'il avait pu dire, il allait devoir être prudent. Eviter d'évoquer Aldartha le plus longtemps possible. En espérant qu'il n'ait pas à s'expliquer à son sujet. Ou que le mensonge qu'il servait à ceux qui l'avaient connu serait crédible.
- Je pense que tu me connais assez pour savoir que je n'aurais pas été à mon aise pour mener cette discussion devant ta mère, je ne lui suis pas même maintenant. J'espère ne pas te retenir trop longtemps, mais j'aimerais qu'on éclaircisse ce qui vient de se passer.
C'était là plus un ordre qu'une requête. Il en avait conscience mais ne s'en formalisa pas. Il n'avait pas à quémander, il le savait pertinemment. Anorn prit un instant avant de reprendre la parole, cherchant les mots qui décriraient au mieux ses intentions et ses pensées.
- Tout d'abord, je m'excuse d'avoir été pris par mon rêve, au point de ne plus pouvoir le discerner de la réalité. Et je te remercie d'avoir été présent. Quoi que j'ai pu dire, tu es l'un des rares dont je supporterais qu'il puisse savoir. Je sais avoir rêvé de ma famille. Pourrais-tu me dire les noms que j'ai pu évoquer ? Ou les situations peut-être ?
Alors qu'il formulait ses questions, ses doigts allaient et venaient le long de sa paume, refermant et rouvrant les rides qui y étaient creusées. Il avait pour habitude de le faire quand il réfléchissait énormément, quand il était stressé ou angoissé. Et pour une fois, il n'avait cure de le faire en face de son interlocuteur.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Mar 24 Mai 2016 - 23:05 | |
| En temps normal tu serais resté debout. Par respect pour lui, pour lui faire face quand il dirait ce qui semble lui être si préoccupant plutôt que de donner l’air de ne pas y trouver grande importance ; mais dans les conditions actuelles, une assise était toujours la bienvenue, et tout particulièrement après que tu aies dû supporter le poids de l’ancien Protecteur de la Quatrième Saison. Tu acceptes avec un léger pincement au cœur sa proposition et prends place, prenant le temps d’observer depuis ton siège un Archimage à l’air quelque peu confus. Tu imagines déjà ses divagations comme étant la source de son malaise, mais tu attends sans broncher qu’il fasse le premier pas, et ose poser la question fatidique. Il hésite, ce qui ne lui ressemble pas, mais après tout, qui se sentirait à l’aise se sachant avoir été perdu pendant de longues minutes, et seul à ne pas connaître la portée qu’ont eu ses propres actes et paroles ?
- Prends le temps qu’il faudra Anorn, je ne suis pas pressé.
Et puis la question tombait enfin, noyée par les excuses, les remerciements et les regrets. Voilà donc ce que c’était que d’être une figure d’autorité. Plus le droit à l’erreur, plus le droit à la faiblesse. Quand on se sait devoir être fort pour tout un peuple, on devient souvent le premier à s’en vouloir d’avoir flanché, et Anorn ne dérogeait pas à la règle. Il l’embrassait probablement plus que quiconque, lui dont la droiture est l’une des plus grandes vertus. Il avait peur de ses propres souvenirs au point de faire de sa requête un ordre. Et cet ordre ne prenait pas naissance de fermeté, mais d’anxiété.
- Tu t’es réveillé pressé de retrouver une certaine Glauriël. Pendant un instant tu as eu peur de quitter la tente, parce que quelque chose à l’extérieur aurait été susceptible de te détruire. Puis finalement, pour une raison quelconque, tu m’as associé avec une quelconque personne en laquelle tu aurais confiance ; mais qui n’était pas moi ; et tu as accepté, parce que te pensant en compagnie de ladite personne, de sortir. Ma mère et moi t’avons accompagné à travers le campement, tu semblais d’ailleurs le reconnaître comme étant celui de l’Uraal plutôt que celui d’Eraïson. Tu prends une lente respiration, en calme le rythme. Dans le doute, j’ai fini par arrêter de suivre et te demander si tu avais une idée d’où était Glauriël, ce à quoi tu m’as répondu qu’elle était morte.
Tu marques une pause. Dans le fond cherchant à laisser à Anorndellon le temps d’ingurgiter et d’accepter cette histoire, mais dans les faits plongeant un regard accusateur droit dans celui du guérisseur. Tu ne veux pas lui en tenir rigueur, tu ne peux pas lui en tenir rigueur, mais le mettre en parole ne faisait qu’exacerber le mal-être né de cette aventure. Il t’a envoyé à la recherche d’une morte. Il t’a fait subir son propre ascenseur émotionnel et t’a fendu le ventre de la peur de le détruire lui au moindre geste, au moindre mot de travers.
- Et au moment où tu as reconnu ma voix, c’en est devenu trop et tu es passé par une phase de surmenage avant de finalement te réveiller.
Ton regard s’adoucit enfin, et d’un geste de la main tu envoies balader des problèmes dont tu ne penses pas nécessaire de t’encombrer. Anorn ne le voudrait pas. Tu te surprends à ne trouver aucun intérêt à cette histoire, oubliant l’espace de quelques instants ta maladive curiosité et tes instincts empathiques pour jouer la carte du politiquement correct. Ces problèmes sont sa vie privée après tout. S’il ne choisissait pas lui-même d’en parler, aucune raison de te proposer en tant qu’épaule sur laquelle se proposer.
- Ne t’inquiètes pas Anorn, je ne parlerai à personne de ce qui s’est passé, et si tu le souhaites, je serai le premier à accepter de faire comme si rien n’était arrivé. Je pense sincèrement que cette histoire est l’une des choses qu’il vaut mieux pour moi ne pas comprendre.
En voilà une. L’une des rares choses qu’il ne t’intéresse pas de comprendre.
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Mer 25 Mai 2016 - 21:01 | |
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La réponse qu'Estiam lui fournit fut des plus douces à ses oreilles. Ses mots sonnèrent comme une délivrance et l'inquiétude quitta son cœur. Il avait certes mentionné sa sœur, mais n'avait pas évoqué son frère. Le nom d'Aldartha n'avait pas été prononcé. Il n'avait pas à sentir mal, dans ce cas, si ce n'était pour la gêne occasionnée. Il avait faibli un instant, chose qui était quelque peu difficile à concevoir. Mais regretter n'avait rien de bon, alors il préférait accepter la chose. Comme l'acceptait visiblement Estiam. Dans tout son discours, pas une pointe d'accusation, pas une pointe de déception. Il relatait seulement les fait, mais quelque chose l'avait touché. Quelque chose l'avait gêné, l'avait presque blessé. La mort de Glauriel. Pourquoi était-ce si important à ses yeux, pourquoi cela le touchait-il tant ? Il n'y avait pas de raison, elle était aux côtés de Tari depuis bien des siècles maintenant et il ne l'avait jamais connue, jamais rencontrée. Ce n'était pas comme s'il lui avait soudainement appris une mauvaise nouvelle, comme s'il avait apporté une information sensible sans y mettre les formes. Il en fut si surpris qu'il n'écouta pas réellement lorsqu'il lui proposa de ne plus y penser, de ne plus revenir sur cet épisode. D'effacer l'instant et faire comme s'il ne s'était rien passé.
- Non, non. Ce n'est pas nécessaire. Glauriel est ma petite sœur, elle a été prise par Tari à l'aube de ses cent quarante ans. Je rêve souvent d'elle, sans doute parce que je me sens coupable quelque fois. Je n'étais pas là quand c'est arrivé alors je me suis souvent refait la scène encore et encore, jusqu'à accepter partiellement mon impuissance. Elle me hante encore parfois, comme tout à l'heure. Je ne comprends pas que cela ait pu te peiner, mais j'en suis désolé, si c'est le cas. Cela fait des siècles qu'elle n'est plus parmi nous, peut-être avais-tu eu vent de cette disparition. Quoi que tu es un peu jeune, c'est vrai. Il n'est pas nécessaire que cela reste tu. Je pense que tu as prouvé que je pouvais te faire confiance, alors certes je ne souhaite pas que cela s'ébruite. Mais si tu as des questions à propos, je ne tairai pas les réponses.
Ou peut-être une seule. Parce qu'il ne parlerait pas de son frère, pour rien au monde il ne l'exposerait aux autres. Pour rien au monde il ne le mettrait en danger. Il était encore persuadé que de révéler son existence, du moins comme elle était réellement, ne lui apporterait que du négatif. Il craignait qu'on puisse le prendre pour cible, qu'on puisse chercher à l'atteindre pour lui faire indirectement du mal. Bien que soit quelque chose qui le toucherait bien plus profondément qu'on pourrait ne serait-ce que le soupçonner. Planter une lame dans le corps de son frère était aussi douloureux pour lui que de transpercer son propre cœur. Il avait bien trop souffert, tant physiquement qu'émotionnellement, qu'il ne pouvait rajouter à sa peine. Plus maintenant, plus alors qu'il était relativement stable. Certes garder son état sous silence était risqué, parce que lorsqu'on le découvrait, les états d'âme étaient bien plus violents, les actions bien plus entières. Il en avait fait les frais, avec Neraën. Il avait vu sa réaction, il avait entendu, ses propos. Même s'ils n'avaient pas été réellement dérangeants, ils avaient été suffisamment clairs pour qu'il comprenne. Il ne savait pas pourquoi il gardait le secret, pourquoi il cherchait à tout prix à le protéger.
- Avant que je ne te laisse prendre la parole, j'aimerais rajouter une chose. Cette histoire, c'est celle de ma vie. Je ne fais que la revivre souvent, différemment, mais ce ne sont que des souvenirs qui s'assemblent chaque fois d'une manière dont je n'avais pas connaissance. Si elle ne t'intéresse pas, soit, je peux l'entendre. Après tout, elle n'est pas passionnante, je ne prétendrai pas le contraire. Seulement avant que tu ne décides de ce que tu veux savoir ou non, je voulais que tu en sois conscient. Beaucoup connaissent vaguement mon passé, peu connaissent la vérité. A toi de voir si tu veux continuer cette discussion, ou si nous pouvons retourner aux mouroirs.
Il ne savait pas s'il allait s'engouffrer dans la brèche, s'il allait chercher à creuser, encore et encore, ou seulement à éclaircir certains points, certaines rumeurs populaires. Il lui donnait l'occasion de savoir, chose qui ne se représenterai plus avant un long moment. Parce que l'instant s'y prêtait, parce qu'il savait pouvoir partager son passé, en partie, avec l'elfe qui était assis devant lui. Attrapant un tabouret, il se mit en face d'Estiam, plongeant son regard dans le sien, attendant tout simplement la réponse du mage. Il avait quelque peu quitté ses manières froides, son visage figé et dans ses gestes, ainsi qu'au fond de ses yeux, on pouvait sentir une certaine bienveillance. Tourné sans nul doute vers son interlocuteur.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 26 Mai 2016 - 3:36 | |
| - J’imagine tout de même que même vivre la plus ennuyeuse des éternités n’est pas une raison d’avoir envie d’en revivre les moments les plus difficiles.
Il ne semblait pas totalement comprendre ni le pourquoi de tes sentiments ni la véritable direction de tes intérêts et à vrai dire… tu ne saurais pas expliquer cette seconde partie toi-même. Tu as préféré chasser ta curiosité plutôt que de mettre l’Archimage mal à l’aise, et maintenant qu’il accepte de se livrer à toi, voilà qu’elle ne revient qu’à petits pas. Tu aimerais savoir, avoir l’occasion de partager une tranche du récit de vie de ton aîné, mais un mauvais pressentiment, le même qu’alors qu’il dormait encore, te prends au ventre. La sensation d’être avec lui au bord du précipice, et au moindre mot de risquer de l’y envoyer.
- J’ai eu peur Anorn, voilà tout.
Tes yeux se perdent dans le vague, et tes doigts s’emberlificotent en des nœuds approximatifs. Tu souris d’un rictus las, hésitant à prononcer les mots qui te démangent la gorge, mais poussé par ton honnêteté parfois trop crue à simplement les vomir sans la moindre épice les rendant plus digestes. Tu laisses planer un pesant silence avant de baisser la tête à nouveau, incapable de tenir tête à ton vis-à-vis.
- Je ne sais pas si la guerre me rendra Halyalindë. Les démons de son passé l’ont reprise, et ils sont plus forts que jamais. Son esprit est en souffrance, et la fatigue ne fait que l’y plonger plus profond. J’ai eu peur d’être celui à cause de qui il aurait pu t’arriver la même chose. Tu soupires, désabusé. Et si cela avait été plus qu’un rêve ? Et si toi aussi les fantômes de tes jeunes années avaient décidé de se faire plus pressant qu’ils ne le sont à travers un simple songe ? Et finalement tu confies. J’ai eu plus peur encore quand tu m’as reconnu que lorsque tu m’as annoncé la mort de Glauriel… parce que l’espace d’un instant j’ai eu peur d’être celui qui te volerait une nouvelle fois ton frère.
Et à ces mots, tu sens bien que la tension monte.
- Je ne savais pas pour ta sœur, et bien que je constate que tu sembles en avoir fait le deuil, je suis désolé qu’elle soit partie si jeune. Tu marques une courte pause. Mais je sais que tu avais un frère, qui lui aussi fréquentait Alëandir. Je ne connais que peu de choses de lui, petit je m’étais plus attaché à ton nom qu’au sien, parce que je me reconnaissais mieux dans ton parcours. Mais je sais que vous étiez très complices, et que sa disparition t’a beaucoup changé. J’ai vu comme tu m’as regardé, et j'ai eu mal de t'enlever Aldartha une seconde fois.
Sans le savoir, tu venais de prononcer le seul et unique mot que l’oreille d’Anorn refusait d’entendre, mais la tension déjà lourde, l’atmosphère déjà épuisante des camps t’empêchait de comprendre qu’il était temps de te taire maintenant.
- J’admire ta force Anorn. Etant enfant, j’ai souvent entendu plaindre le drame qu’était la mort de tes parents alors que tu quittais à peine le Chapitre Blanc. J’ai aussi souvent entendu l’histoire de ton jumeau assoiffé de connaissance que l’on n’a pourtant jamais revu après le drame. Je ne connais pas l’entière réalité, et je comprends que ce soit sûrement trop de douleur pour être ainsi nonchalamment conté. Et tu te perds dans d'inutiles jeux de noires suppositions Mais tu as été assez fort pour non seulement survivre à ta propre vie mais en plus prendre celle des autres sur tes épaules… Qu’aurais-je fait si par ma faute, l'équilibre avait été brisée ?
Le rictus se transforme en soubresauts de rires nerveux. Cela fait bien un moment que tu ne réfléchis plus à ce que tu dis. Tu parles avec ton cœur plutôt qu’avec ta tête, voilà tout.
- Des centaines d’elfes souffrent, Olöriel souffre, même le Protecteur d’Eteniril souffre, alors que ce n’est qu’une question de temps avant que moi je ne sois totalement rétabli… et je suis totalement impuissant face à ce qui leur arrive. Ce sont en grande partie mes échecs qui les ont menés là, et c’est toi maintenant qui corrige le tir. Qu’aurais-je fait si un autre de mes échecs t’avait conduit au même point ?
Si seulement tu avais su qui était Glauriel, alors tu n’aurais pas pris de risque, tu ne l’aurais pas emmené en dehors de cette tente. Anorn va bien, il est en face de toi pour le prouver, mais il suffit parfois de si pour être rongé de culpabilité.
- En gros:
En gros, dans la tête d'Estiam, les parents d'Anorn sont morts peu après son retour d'Alëandir et Aldartha ne l'a pas supporté et est parti avec. Du coup en rajoutant Glauriel à l'équation, ça fait un cocktail bien fucked up dans lequel il est assez beaucoup désolé d'avoir retrempé Anorn.
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 26 Mai 2016 - 15:12 | |
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La confession qu'il lui fit l'étonna légèrement. Ainsi donc, il avait peur. Et c'était cette peur qui avait déclenché l'angoisse et la colère qu'il avait pu déceler à un moment dans sa voix. Il fuit son regard, avant de trouver la force de s'expliquer. Il fallait dire que c'était certainement compliqué de l'avouer, compliqué de mettre des mots sur le pourquoi. Quand il le fit, ce fut en parlant d'Halyalindë, de Neraën, de ceux qui étaient pourchassés par leurs craintes, par leurs angoisses. Leur passé qui refaisait surface et qui s'exprimait si violemment qu'ils ne pouvaient le refouler. Puis vint l'évocation de son frère. Il disait avoir eu peur de le lui voler à nouveau. De le lui arracher une fois encore, de lui reprendre ce qu'il avait peut-être cru ne jamais perdre. S'il eu envie d'intervenir, il n'en fit rien. Parce qu'il sentait qu'il ne le devait pas, parce qu'il savait qu'une fois freiné il aurait du mal à reprendre. S'il arrivait à reprendre. Alors sans broncher, il écouta. Jusqu'au bout. Essayant de suivre tant bien que mal ses égarements, ses pérégrinations. Ses suppositions toutes plus étranges les unes que les autres. Il repassait rapidement sur les rumeurs, les faits connus de tous. Le décès de ses parents, la disparition d'Aldartha. La perte d'un elfe assoiffé de connaissance et plus doué que n'importe quel autre pour transmettre son savoir. Avant de parler de ses échecs, de leurs répercutions. Mais quels échecs ? Pourquoi prenait-il sur ses épaules le poids du malheur des autres ? Pourquoi tenait-il tant à être responsable, voire même seulement à désigner un responsable ?
- Doucement, doucement. Ne te précipite pas, il n'y a pas d'urgence. Calme toi.Tu n'as aucune raison de te sentir responsable de quoi que ce soit. Je ne sais pas par quel miracle tu penses être à l'origine de l'état de la protectrice d'Ardamir, ou du protecteur d'Eteniril, mais laisse moi te dire que ce n'est pas le cas. Tu n'es pas la cause de leurs démences. Tu n'es pas à la source de la manière dont ils les laissent s'exprimer. Je connais l'état d'Halyalindë. Et trop bien celui de Neraën. Il va de soit que ce n'est pas glorieux, que ce n'est pas là quelque chose de plaisant à voir. Je peux comprendre que n'aies pas réellement envie que ça se répande, que je me retrouve dans un état aussi déplorable. Laisse moi te rassurer. Regarde moi.
Ses yeux n'avaient pas rencontré les siens depuis qu'il s'était mis à parler. Depuis qu'il avait repris la parole et qu'il s'était expliqué. Alors cette fois, il voulait plonger son regard dans le sien. Parce que ce qu'il allait lui dire était important, et parce qu'il ne pouvait risquer qu'il n'écoute pas. Ou du moins, pas correctement. Une fois que l'argent rencontra l'or, il reprit, doucement. Calmement.
- Tu ne pourras pas me briser. Tu ne pourras pas me faire sombrer. J'ai certes mes angoisses et mes peurs. Mon passé est en grande partie responsable de ce qui peut me torturer parfois. Seulement j'ai appris. J'ai appris à le maîtriser, j'ai appris à m'en détacher. A accepter. Certes j'ai perdu beaucoup. Mais j'en ai fait le deuil depuis bien longtemps. Si je suis capable de supporter le poids d'autres vies, le poids d'autres soucis et d'autres remords, c'est uniquement parce que les miens ne sont plus un souci. Plus assez pour me faire du mal. S'ils me préoccupent parfois, c'est uniquement parce que je suis humain. Parce que les souvenirs de mon passé se refusent à s'effacer totalement. Me rappellent, encore et encore, qu'ils ont existé. Et qu'ils n'existent plus qu'à travers ma mémoire, à travers celle de ceux qui les ont connus et côtoyés. Il n'y a pas d'équilibre à briser. Pas de point sensible qui pourrait me détruire si quelqu'un décidait d'appuyer dessus.
Mensonge. Enorme mensonge. Mais il ne le sait pas, il ne le voit pas. Parce qu'il a été sincère tout du long, qu'il ne lui a suffit que de garder la face. Chose aisée pour lui, qui maîtrise ses expressions faciales avec une facilité non feinte. Espérant que ces paroles auraient au moins rassuré partiellement, si ce n'était entièrement, Estiam, il reprit la parole.
- Quant à mon frère, il était certes à Alëandir en même temps que moi. Il était assez renommé, je sais que nos noms étaient associés, que l'un ne se prononçait que très rarement sans être suivi de l'autre.
Attention, la pente était glissante. Il savait qu'au moindre faux pas, le sol se déroberait sous ses pieds et la chute serait douloureuse. Plus douloureuse que n'importe quoi d'autre. Il devait s'en tenir à la version officielle, celle connue de tous, celle qui servait chaque fois qu'on lui demandait des nouvelles d'Aldartha. Chose de plus en plus rare, puisqu'il ne croisait que très peu ceux qui l'avaient connu, ceux qui étaient encore en vie.
- Il a disparu de l'Académie avant la mort de nos parents. Il s'occupait d'eux, les aidait à rester debout, à faire face à la perte de leur enfant. Il les soutenait comme il pouvait, avant que Tari ne les emporte finalement. A leur disparition, il a décide de rester en Quatrième Saison. De prendre de soin du protectorat de son enfance. Des enfants qui auraient pu être les siens, qu'il considérait comme tel d'ailleurs. Il gérait l'organisation des petites classes, préparait les programmes, recrutait les enseignants. Une partie de ce qu'il faisait à l'Académie donc, mais à plus petite échelle. Aldartha ne m'a pas été enlevé. Il l'a seulement été à une partie du monde. Et je ne comprends pas pourquoi tu aurais pu être à l'origine d'un soudain retrait. Tu n'as pas à te sentir coupable, ni même responsable. Laisse moi l'être. Laisse moi prendre le relais, tu le dis si bien d'ailleurs. Vous vous êtes battus, vous avez défendu les nôtres, vous avez repris ce qui nous appartenait. Peu importait les conséquences, vous y êtes allés. Maintenant, c'est mon combat. Ainsi que celui de nombreux autres guérisseurs. Le vôtre est fini, pour l'instant.
Il ne savait pas s'il l'écouterait réellement, il ne savait pas si ces mots trouvaient réellement écho dans l'esprit d'Estiam, mais il l'espérait de tout son cœur.
- En acceptant le rôle de Régent, j'ai aussi accepté la responsabilité de vos actes, la responsabilité de vos erreurs. J'ai accepté que vous puissiez vous reposer sur moi, j'ai accepté d'être une référence, d'être celui vers qui on se tourne quand on ne sait pas. Quand on a peur, quand on se retrouve impuissant. Alors je vais me répéter. Laisse moi prendre la responsabilité de l'état d'Halyalindë, de Neraën, de tous nos frères et de toutes nos sœurs. Non seulement tu n'as aucune raison de penser que tu es à l'origine de ces derniers, mais en plus je te demande de ne pas en trouver. De ne pas en inventer. Et de ne pas essayer de corriger un quelconque échec. Tu te sens impuissant face à la situation, mais tu as été là pour moi. Tu sais ne pouvoir rien changer au sort de ceux qui fuient leur passé, mais tu te mets à leur disposition. Aucun miracle ne t'es demandé. Tu t'investis bien plus que nécessaire. Continue si ça peut te faire du bien, mais arrête toi lorsque cela commence à te détruire. Entendu ?
Qu'il s'égare sur le noir sentier des remords et de la culpabilité n'était vraiment pas ce dont ils avaient besoin. Et ce n'était certainement pas ce qu'il méritait.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Sam 28 Mai 2016 - 23:23 | |
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Aux oreilles de certains, une telle déclaration passerait pour de l’orgueil ou même de l’égocentrisme. Quand l’Archimage se déclare comme impossible à briser, tu n’y vois finalement qu’une évidence que tu t’en voudrais presque d’avoir mise de côté. Accepter de t’entendre disculper de tes responsabilités t’es cependant plus difficile. Non, tu n’es pas le seul responsable de l’état d’Halyalindë et de Neraën. Tu n’es pas non plus le seul responsable de la vague de mort qui a touché les armées elfiques, mais tu as joué une part dans tout ce cirque. Tu aurais pu mieux faire, tu aurais dû mieux faire, mieux penser, mieux agir… c’est tellement facile d’imaginer toutes les autres ouvertures et les autres possibilités maintenant que tout était passé. - Entendu.
Mais pas nécessairement accepté comme tel.
- Je regrette simplement ne pas avoir pu en faire plus. Si j’étais un meilleur mage, probablement aurais-je pu affronter le sorcier Noirelfe d’égal à égal et épargner à nos troupes de tels dégâts. J’ai beau progresser en tant que mage, j’ai toujours l’impression que le bout du chemin est encore bien trop loin tu souris timidement, les yeux posés sur tes doigts dansants et ce serait mentir que de te dire que ça ne m’est pas source de frustration.
Les elfes sont réputés pour leur patience parait-il ; visiblement, certains le sont tout de même plus que d’autres. Mais tu n’es pas le centre du monde, et la part du conte d’Anorn qui ne t’était pas source de légères frustrations t’était des plus rassurantes. Voilà l’un des moments où l’on peut s’enjoyer de la fausseté des rumeurs. Le frère d’Anorn était encore en vie. C’est vrai que tu l’apprenais veuf d’une sœur, mais au moins l’un des membres de cette fratrie, et celui dont le nom portait le plus de signification à ton oreille était toujours en vie.
- Au moins, tu me vois rassuré de te savoir toujours pouvoir compter sur la présence d’Aldartha. Et ce n’est que là que la chose te frappe Régent ? Tu as été promulgué régent ? Excuses mon ignorance des affaires politiques de mon propre foyer et laisse-moi te féliciter tant qu’il en est encore temps. Tu baisses la tête, faisant révérence depuis ta position dos enroulé déjà manquant d’altitude Au vu de l’éloge qu’en faisaient les professeurs du Chapitre Blanc, ton frère fera un excellent conseiller.
Ton regard se connecte finalement à celui d’Anorndellon, dans lequel il était déjà plus noyé que plongé. En peu de temps, lire l’émotion sur le visage du guérisseur habituellement stoïque t’es devenu habituel, et le sincère intérêt qu’il semblait porter à ton bien-être psychologique n’en était que plus touchant. Lui qui il y a quelques temps avait du mal à ne serait-ce que supporter tes discours, tes mimiques, et la quantité d’énergie que tu déployais dans un futile jeu de zygomatiques. Qu’il se l’avoue ou pas, tu te doutais de ce qu’il aurait pu advenir d’une telle rencontre bien avant qu’elle ait lieu. La vision utopique que tu avais du mage de Vie Nedi Lucannui alors que tu cherchais encore à faire un semblant de clan des membres de l’Académie d’Alëandir.
- Finalement, toi et moi auront fini par devenir aussi proche que je me le décrivais dans ma jeunesse, quand je faisais de tous ceux dont l’histoire me plaisait mon clan imaginaire des cités. De ce que tu as dit à ma mère, j’imagine que tu penses l’affection que je te porte née de ce que l’on a partagé quand j’étais au bord de l’océan de Tari, mais tu… ou du moins ton nom m’est cher depuis bien longtemps Anorn.
Tu te lèves, t’étire de toute ta hauteur, et te tiens fermement debout pour la première fois depuis le début de ta rémission. Poitrine haute, et épaules droitement maintenue, finalement libérée du poids qui les écrasaient réapparaissaient ta détermination et avec elle, ta carrure. Tu te veux l’air grand, protecteur, et surtout digne de confiance, car sans cela ta requête ne trouverait probablement pas validation.
- Mais tu as raison. Il est trop tard maintenant pour larmoyer. ton expression se fait à travers la mélancolie, plus ferme.J’aimerais que tu me prennes sous ton aile dans les mouroirs. Comme tu le dis si bien toi-même, j’ai besoin de m’impliquer, et j’ai l’impression que beaucoup des réponses aux questions que je me suis posées dernièrement reposent dans ton usage de la magie de la vie. Tu me verrais honoré d’être autorisé à être ton ombre pour quelques temps… et même si je ne peux pas user de mon art, j’imagine tu poses ta main gauche sur ton biceps droit, fièrement contracté que deux bras de plus seront toujours bienvenus.
Tu te vois forcé de quitter la pose après que la douleur t’ait rappelé ce que tes tissus musculaires viennent d’endurer.
- Même s’ils ne sont pas les plus endurants.
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 2 Juin 2016 - 19:16 | |
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Son frère, un excellent conseiller. Certes. Il l'était déjà. Avait été bien meilleur auparavant, bien plus présentable aussi. Il avait été beaucoup et s'il restait beaucoup aux yeux d'Anorn, ce ne pouvait être le cas aux yeux des autres. Pas actuellement, pas dans son état. Pas alors qu'il était cloué dans un fauteuil, ou dans son lit, apathique et attendant la fin, attendant que Tari le prenne. Qu'on ait pitié de lui, peut-être, qu'on lui ôte la seule chose qui lui restait avec certitude. Parce qu'il pouvait peut-être encore se rappeler, se remémorer. Revivre son passé. Mais ce n'était pas certain, il ne savait pas s'il avait encore la capacité de le faire. Et Estiam se blâmait, encore et encore, en essayant de refaire ce qui ne pouvait être défait. En rejouant des scenarii en boucle dans sa tête, espérant qu'il puisse trouver le meilleur pour pouvoir peut-être l'appliquer. Impossible. Personne ne pouvait changer ce qui était déjà fait, personne ne pouvait remonter le temps pour le distordre et changer l'avenir.
- Tu ne peux pas te morfondre ainsi Estiam. Tu as fait ce que tu pouvais faire, ce que tu devais faire. Et je te conseille de t'en contenter, sans quoi les remords te rongeront sans raison et bien plus profondément que tu ne pourrais même te l'imaginer. Le passé ne peut être défait. Y vivre n'a aucun intérêt. Quant à Aldartha, il d'ors et déjà un conseiller hors pair. Je ne peux qu'espérer pouvoir l'intégrer au sein d'Alëandir prochainement.
Sincèrement, il l'espérait. Parce qu'il espérait de plus en plus pouvoir le ramener parmi eux. Lui redonner vie, lui redonner ce qu'il avait abandonné voilà bien des années. Maintenant, c'était possible, il le sentait. Maintenant, il devait essayer. Une dernière fois. Si jamais on n'y arrivait pas, si jamais son état ne s'améliorait pas, alors il abandonnerait l'idée de le retrouver réellement. Il abandonnerait le fol espoir de revivre à ses côtés, de le réintégrer au sein des siens, au sein de son peuple. Mais ces pensées sont rapidement chassées par Estiam qui se relève, après lui avoir avoué combien ce qu'il représentait était source d'affection chez lui. Chose qu'il trouvait relativement étrange, surtout à cet instant. Il le connaissait, maintenant. Il savait qu'il n'était pas celui qu'il paraissait être. Ou qu'il était il y avait de cela bien des décennies. L'elfe qu'il était devenu était complètement différent de celui qu'il était. Cet elfe avait perdu sa famille. Et ses illusions, ses espoirs. Il avait perdu un temps l'amour qu'il portait à sa femme, il avait perdu l'envie d'avoir une descendance. Il avait perdu jusqu'à l'envie de vivre. Et s'il avait regagné certaines choses aujourd'hui, ces pertes avaient laissé des traces. Beaucoup trop profondes pour être comblées en un instant, voire même en quelques décennies. Il ne saurait dire si un jour elles s'estomperaient. S'il voulait même qu'elles soient estompées.
- Je sais pertinemment d'où vient cette étrange affection que tu me portes. Mais je ne la comprends que partiellement, en user lors d'une conversation me paraissait très peu correct et extrêmment vaniteux de ma part. Il est préférable pour moi de dire qu'elle vient sans doute de ce que nous avons vécu dans les mouroirs que de me targuer d'être l'un de ceux que tu admires. Même si cela me touche beaucoup, ne vas pas penser le contraire.
C'était certain qu'il était toujours gratifiant de recevoir ainsi sans demander, sans s'en douter, sans même parfois le savoir. Cela réchauffait son coeur d'une manière qu'il n'expliquait pas, laissant une impression douce et réconfortante, l'idée qu'on pouvait l'aimer, là, dehors, pour la personne qu'il était. Qu'il n'y avait pas que ceux qu'il avait connu avant, il y avait longtemps, qui étaient capables d'affection envers lui. La demande qu'il lui fit ensuite ne le surprit guère, mais l'enchanta fortement. Qu'il soit à ses côtés pour l'aider, qu'il se tienne à sa disposition pour l'assister dans les tâches qu'il lui restait à accomplir n'était pas quelque chose de déplaisant, loin de là.
- Deux bras supplémentaires sont effectivement les bien venus. Tu ne peux pas utiliser ton art, pas encore, c'est beaucoup trop dangereux. Mais si me voir à l'oeuvre te suffit, alors je pense que je peux t'apporter quelques réponses aux questions que tu te poses sans doute. Je ne crois pas que tu sois de ceux qui seront plus un poids qu'un soutien, alors c'est avec plaisir que j'accepte ta requête. Quant à tes bras, ils sont sans doute actuellement aussi vaillants que ceux qui servent depuis la première vague de blessés. Alors ne t'en fais pas. Ce sera suffisant.
Il était vrai que beaucoup commençaient à être fatigués, voire même épuisés. Les sollicitations incessantes les avaient usés, tant et si bien que certains avaient craqué. Que ceux qui étaient encore debout se comptaient bien trop rapidement et la motivation avait subit une baisse générale impressionnante, dont il était peu fier. Comment ceux de son peuple avaient pu ainsi baisser les bras, abandonner l'idée qu'ils pourraient peut-être en sauver plus qu'ils ne le pensaient, qu'ils pourraient même les sauver tous ? Leur foi et leur amour pour leur frère ou leur sœur n'avait donc pas réussi à surpasser de noires pensées ? Encore comprenait-il lorsque cela venait d'apprentis. Ils étaient encore jeunes, peu habitués à une telle situation, peu habitués à manier l'Art. Mais les autres n'avaient pas d'excuses. Les autres auraient du se battre jusqu'au bout, devraient actuellement continuer de ses battre. Et d'espérer aussi fort qu'au premier jour, essayer de changer les choses, d'imposer leur volonté à Tari. Se lever face à elle, prier Kÿria. Implorer sa pitié s'ils n'étaient plus certains de pouvoir faire quoi que ce soit avec le flux.
- Tu peux être fier de toi. Excuse moi de me répéter, mais j'aimerais que tu intègres cela comme une vérité, parce que c'en est une.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Ven 3 Juin 2016 - 12:45 | |
| Début 8e ennéade de Verimios 8e année du Onzième Cycle Les campements baignent toujours dans la fraîcheur de l’aube, il en faudrait beaucoup plus pour en arriver aux limites de ta tolérance à la chaleur. La sueur qui perle sur ton front, c’est l’effort qui en est l’origine. Tous muscles engagés dans la besogne, tu remercies en pensées celui qui a fait de ton corps ce qu’il est actuellement. Anorndellon ne mentait pas quand il disait que des bras supplémentaires seraient les bienvenus, même si tu n’imaginais pas que ce serait là leur utilité princpale. Tu savais les réactions que peuvent avoir les blessés durant les soins et ce que tu faisais tu avais bien imaginé avoir à le faire à l’occasion… tu ne pensais simplement pas que ce serait si systématique. Même dans la guérison, les guerriers se battent, te forçant finalement à passer plus de temps à tenter de les maintenir au sol qu’à les aider à se relever. Anorn s’occupe de la majorité de ses patients avec une rapidité déconcertante et une quasi nonchalence. Les gestes lui sont devenus habituels, il l’a fait il y a des siècles de cela, il l’a fait hier, il le fait encore aujourd’hui. L’expérience lui a bien appris quand, comment et à qui donner en priorité. Parfois il laisse des plaies ouvertes, parfois il laisse des articulations chancelantes, pour s’économiser lui, et leur donner plus à eux. Anorn n’est pas le seul guérisseur en lice, mais il est le plus compétent, alors il s’occupe des désagréments les plus graves, passant le flambeau aux apprentis et aux arcanistes ayant la capacité de terminer son travail. Anorn s’occupe des plus profonds traumas, et c’est pour cela que ta présence lui est si précieuse. Les plus grands maux sont les plus douloureux à faire taire, et les cris de rage, les convulsions et même les tentatives d’agression par des souffreteux aveuglés par la douleur étaient légion. Même blessé toi-même, tu restais un elfe de forte constitution, et ainsi pouvais te trouver plus efficace pour les maintenir à toi seul que même deux des infirmiers épuisés par l’incessant flot d’estropiés. Ça et le fait que ta carrure avait au moins le mérite d’en intimider certains. - Moi j’entends le flux Anorn. Tes phrases sont entrecoupés de lourdes respirations. Quand j’utilise ma magie, j’en redirige les accords à l’image des sons de la nature. Différents éléments ont différents cortèges Symphoniques, et différentes formes résonnent chacune à leur manière. Mais avec ta magie, je n’arrive pas à faire les mêmes analogies. Tu tends l’oreille vers le patient dont s’occupe en ce moment même l’Archimage et resserre par le même temps ta poigne à la recherche d’une vibration autre que celle émise par ses tressautements. La magie de la Vie est une véritable cacophonie organisée, et si la mélodie en est presque hypnotique, il t’est aussi extrêmement difficile d’en tirer la logique. - Tu déformes leur mélodie, mais j’ai du mal à comprendre exactement dans quel sens. Trop de choses se déroulent en même temps. Tu quittes un instant le combattant du regard pour apostropher le régent. Toi, quelle est ta vision des choses ? Tes mains se déplacent en fonction des réactions du blessé au quart conscient. Un coup pour mieux le maintenir ; la seconde d’après pour soulager, même de si peu, la douleur ; ensuite pour le réconforter. Tu parles plus à Anorn que tu ne lui parles à lui, mais ce n’est pas pour autant que tu l’ignores. Quelque part, tu remercies cet homme, et c’est le moins que tu puisses faire, puisque c’est à travers sa souffrance que tu fais ton apprentissage. - Tenez bon soldat, l’hémorragie est contenue, il ne reste plus qu'à nettoyer le sang vicié pour ne pas que l'infection gagne du terrain.Ces choses, tu te surprends depuis quelques temps à les dire sans que le guérisseur n'ait à t'expliquer ses procédés. Tu te surprends à entendre les blessures cachées, et à y trouver les échos des corps intrus. Mais après tout, est-ce si étonnant ? L'eau et le métal ne sont-ils pas omniprésents dans un corps ?
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| | | Anorn
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Ven 3 Juin 2016 - 18:14 | |
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Un défilé de patients, encore et toujours. Mais cette fois ci, Estiam était à ses côtés et c'était un soutien non négligeable. Il comprenait vite, s'adaptait encore plus rapidement. Et c'était une chose des plus agréable. Parce que bientôt, il n'eut plus à se soucier de sa place, de la manière dont il tenait les blessés, de l'endroit où il pouvait se positionner. Il le faisait automatiquement, sans qu'il n'ait besoin de demander quoi que ce soit. Il sentait parfois l'elfe trembler sous l'effort, il sentait que lorsque ses muscles se bandaient un peu trop, la douleur revenait indéniablement, mais jamais il ne se plaignait. Jamais il ne reculait, jamais il n'abandonnait sa place pour reprendre son souffle. Il avait cette détermination qui suscitait l'admiration de beaucoup, parce qu'il était parfois bien plus présent que ceux qui étaient désignés à la base pour cette tâche. Anorn était fier, de ne pas s'être trompé, d'avoir su voir en lui ce qui était réellement. De le savoir effectivement prêt à donner sans compter pour autrui et pour apprendre. Il avait cette soif de savoir, de connaître, qui lui rappelait à bien des égards Aldartha. Il ne lui avait d'ailleurs pas encore posé de question précise, se laissant sans doute le temps de se faire à la tâche, de prendre le pli avant de s'autoriser un quelconque égarement. Mais cette dernière vint bientôt, accompagnée de sa vision du flux. Ainsi donc, il était succession de son, mélodie étrange et entêtante, dont l'elfe s'appropriait les accords. Souriant légèrement à cette déclaration, il prit son temps pour répondre. Il rassura le soldat avant que le régent ne se décide à prendre la parole.
- Je ne devrais pas être étonné de cette vision, si tu aimes particulièrement la musique, si tu aimes jouer de ta voix, moduler des sons pour former quelque chose de plus complet et de plus mélodieux, alors il semble parfaitement normal que tu ressentes le flux de cette manière. S'il est compliqué pour toi de démêler ce qui se joue chaque fois que je le manie, c'est en partie parce que tu ne peux pas t'ouvrir à lui. Tu ne peux pas le laisser t'envahir, tu ne peux pas le laisser t'incarner, te posséder. Et l'autre partie, je pense que tu la connais déjà, tu n'es pas un mage de la vie alors tu peux difficilement comprendre son fonctionnement. Peut-être que le maniement d'un débutant serait plus aisé à entendre pour toi. Je suis bourré de tics et d'habitudes, mon empreinte est très forte et tu la ressens plus que tu ne ressens le flux en lui même, je pense.
La question était intéressante, la blessure qu'il soignait l'était beaucoup moins. Il soignait automatiquement, sans réellement prêter d'attention au soldat. Il répétait sans cesse les mêmes gestes, les mêmes actions. Il maniait le flux d'une manière qui ne différait pas tellement d'un elfe à l'autre, alors il entrait dans une sorte d'ennuyeuse routine, qu'il finissait par exécuter sans même y penser. L'ennui le gagnait parfois, mais pour peu de temps, parce qu'il y avait toujours quelque chose d'inattendu qui venait interrompre sa solitude ou son exercice. Et c'était en partie pour qu'il était content d'avoir Estiam à ses côtés, parce que sa curiosité, sa langue parfois trop utilisé ne le laissaient pas sombrer dans la monotonie de sa tâche.
- Ma vision est colorée. A vrai dire, le flux n'est pas unique, il se décompose à mes yeux en plusieurs mouvements, en plusieurs énergies. Qui possèdent chacune leur particularité, leur définition. Leur utilité. Elles sont plus ou moins colorées, plus ou moins mouvantes. Elles se regroupent ou s'isolent, selon ce que je demande, selon ce que je veux en faire. Disons que je mélange jusqu'à obtenir la bonne texture et la bonne couleur. Tout un art, je dirais !
Un léger rire franchit ses lèvres, mais mourut presque aussitôt. Il n'avait pas pour habitude de laisser déborder ainsi ces émotions, mais c'était facile, avec Estiam. Bien plus facile qu'il n'aurait pu le penser au départ. Et cela en devenait presque normal, instinctif. Il ne pouvait l'atteindre à travers ces émotions, à travers ses sentiments. Il en était pratiquement persuadé. Alors parfois, il se laissait aller. La fatigue et l'intimité paradoxale que leur proférait le bruit de fond constant l'y aidaient considérablement.
- Mais par dessus tout, il y a mon empreinte, qui est me reflet de ma vision, sans doute, ce que je verrais comme la signature de chacun. Chaque mage manie le flux à sa façon, chaque mage le tort, le mélange, l'imprègne. Et c'est ce qui me permet de reconnaître un mage parmi d'autre. C'est ce qui me permet d'identifier le travail de tel ou tel Artisan. Et si ce n'est pas ce qui t'intéresse, c'est ce que tu perçois fortement je pense. La manière dont je façonne, la façon dont je m'exprime. Je peux essayer de réduire son impact, mais je dois t'avouer que je n'ai jamais fait une telle chose.
Réduire son empreinte, c'était réduire sans doute son efficacité, son aisance, pour revenir aux bases. A ce qu'on leur enseignait au début de leur cursus, ce qu'on essayait de leur inculquer avant qu'ils ne prennent des initiatives, avant qu'ils ne soient capables de découvrir d'eux mêmes les subtilités de l'Art. Revenir à cette instant était quelque chose qui lui paraissait réellement fou. Une chose qu'il mourrait d'envie d'essayer.
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| | | Lœthwil
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Sam 4 Juin 2016 - 14:41 | |
| Tu vois le résultat sans comprendre la manière, tu constates la disparition des intrusions, la purification de la lymphe et des métaux dissouts, sans pouvoir comprendre le phénomène en jeu. Anorn a raison, tu n’es pas mage de vie et tu n’es pas en état de pleinement t’ouvrir aux flux. Voilà la raison de tant de confusion. Seulement dans toute cette confusion se trouve probablement la solution à l’équation de ta déconstruction de la fois dernière. Non ce n’était pas de la magie de la vie, puisque c’était ta magie, mais tu serais prêt à parier la vie de ta mère, et elle n’était qu’à un pas, sur le fait que le sortilège reprenait les codes de la magie de la Vie. Il te faut comprendre quelle pourrait être ton application de ces codes pour avancer.
- Des couleurs et des énergies… En imaginant qu’il puisse y avoir une correspondance entre les courants que nous deux percevons, chaque teinte devrait plus ou moins être parallèle à l’une de mes lignes mélodiques. Ce qui expliquerait en partie la cacophonie. Si tu déplaces les énergies, alors tu altères les harmonies. Ton œil brille comme si tu venais d’avoir une illumination et alors effectivement, tu changes le temps du retour à l’équilibre la mélodie caractéristique de l’être sur lequel tu as influé !
Mais il faisait tout aussi bien de mentionner son empreinte, ce qui le démarquait des autres sorciers, car la manière qu’avait Anorn de déplacer les flux n’était pas celle d’un autre mage de Vie, et encore moins la tienne en tant qu’élémentaliste. Pour tout ce que tu sais, ton hypothèse pourrait n’être que les élucubrations du maître-mage non initié à cette forme de l’art. Ses couleurs pourraient bien correspondre chacune à plusieurs lignes mélodiques comme à une seule note. Les analogies sont une science difficilement applicable en magie, et c’est en partie ce qui rend son apprentissage une tâche aussi titanesque que formidable.
- Si tu avais été de n’importe quelle autre école et dans d’autres conditions, je t’aurais probablement demandé de faire la tentative pour observer la différence avec et sans ton empreinte, mais on ne peut pas se payer le luxe de perdre en efficacité ici. Les gens comptent sur toi, et je peux attendre. De toute façon, tu t’occupais de moi lorsque le phénomène que je tente d’élucider s’est produit, et ton empreinte a du fortement influencer ma réaction. S’il faut le réitérer, au moins pour les premières fois, ce sera avec toi.
Votre patient semblant maintenant, après le travail du guérisseur, dans de meilleures dispositions s’autorise un sourire face à vos discussions. Alors c’était vrai, quelles que soient les conditions, les mages continueraient de discourir sur des choses qu’eux seuls sont capables de comprendre… décidément, tous incorrigibles ces artistes des arcanes. Bras sous les épaules, bras sous le genou, tu rends son sourire au blessé quand tu le soulèves pour l’emmener au lit de fortune qui lui a été désigné. Le merci qu’adresse les yeux d’un elfe se sachant la vie sauve est l’un des cadeaux les plus précieux que l’on puisse faire, et alors qu’une nouvelle âme en peine arrive au chevet d’Anorn, tu comprends encore un peu mieux la fierté qu’a le Régent à jouer son rôle ici. Les convulsions te tirent rapidement de tes rêveries pour te ramener à la dure réalité. À vrai dire, la férocité avec laquelle cette patiente en particulier tentais de se débattre te fait réaliser une seconde chose. Là où l’influence d’Anorndellon avait pu jouer un rôle, ton instinct de survie en a pour sur joué un plus grand encore. Tu avais besoin de brûler de l’éther pour arrêter la douleur et pour ouvrir la voie au guérisseur. Il y avait toujours l’option de…
- Ou alors ça n’aura été qu’un pur mécanisme de défense, et dans ce cas je n’aurais aucun indice pour le réitérer sans me mettre en danger de mort. Tu roules les yeux Ce que je préférerais éviter dans l’absolu pour quelques temps si possible.
C’est une question posée sur un ton tout à fait différent, presque enfantin, que tu lui adresses ensuite. Elle n’est pas importante, loin de là, mais elle te tient à cœur, depuis bien longtemps déjà.
- Je sais que ça peut paraître étrange comme question ; mais à partir de quand est-ce que l’on réfère à un thaumaturge en tant qu’Archimage ? Je ne crois pas qu’il y ait le moindre test ou le moindre examen qui permette d’en juger, si ? tu soupires Archimage… ça laisse rêveur…
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| | | Anorn
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Mar 7 Juin 2016 - 17:32 | |
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Il semblait comprendre, il semblait réussir à associer son univers au sien. A les mélanger pour les faire correspondre. C'était beau, la façon dont il parlait de l'Art. Dont il parlait de sa manière d'influencer le flux. On sentait la passion, on sentait l'envie. Il y avait dans sa voix cette note, cette fêlure qui lui signifiait que là était sa vie. Que là était son dévouement. Il sentit à cet instant que de ne pouvoir sentir par lui même était douloureux. Une gêne qu'il avait du mal à faire taire. Un fourmillement peut-être, qu'il devait sentir se propager dans son corps. L'envie de s'ouvrir, l'envie de le rejoindre, au sein du flux. L'envie de façonner. Mais bien vite il le ramena à la réalité, les blessés ne suffisant plus à garder entièrement le régent concentré. Parce que la tâche était devenue mécanique, parce qu'elle ne lui demandait plus tellement d'effort, maintenant. La routine devenait trop omniprésente. Alors il s'évadait rapidement. Divaguait sur des sujets qui n'avaient pas forcément leur place ici, au campement. Au sein des mouroirs, au chevet des mutilés. Il ne pouvait pas faire de telles expériences. Pas maintenant, pas alors qu'on avait besoin qu'il soit efficace. L'efficacité, oui. C'était tout ce qui comptait actuellement. Elle passait tant par de la concentration, par des faits, que par de l'organisation. Chaque soir, il devait retravailler cette dernière, chaque soir il la remettait entièrement en question. De plus en plus, il n'attendait plus la tombée de la nuit et il la repensait au bout de quelques heures. Parce qu'il avait énormément de novices. Énormément d'elfes qui avaient besoin d'être encadrés, d'être dirigés. Certes plus ou moins, mais ils se reposaient pour la plupart sur lui, ou sur les quelques autres mages et archimages qui approchaient le millénaire. Ceux qui avaient connu l'enfer d'Uraal n'étaient pas nombreux, mais ils sortaient réellement du lot, parce qu'ils étaient totalement autonomes. Ce qui était fortement appréciable.
- Pardonne moi, tu as raison. Ce n'est pas un lieu ni un instant approprié pour ce genre d'expérience. Mais je m'ennuie Estiam. Je m'ennuie réellement. Je suis coincé dans une routine des plus ennuyantes. La plupart des vies sont sauvées, ne restent que les syndromes post traumatiques, qui ne sont pas vraiment dans mes cordes, et les traumas qui se déclarent avec un peu de retard. Sans cela, ce n'est que des elfes à surveiller, des blessures à refermer, des cicatrices à effacer. De la rééducation, comme dans ton cas. Non, sincèrement, j'ai hâte que tout cela se termine. J'ai hâte de rentrer à Alëandir, de retrouver mon épouse et des tâches qui nourriront réellement mon esprit.
Il était en effet pressé de quitter cette ambiance pesante et totalement surréaliste, pour retrouver Arwain. Et retrouver un semblant d'activités intéressantes. Il ne restait pas énormément de temps à tenir, bientôt viendrait le moment de tout remballer. Mais ce n'était pas aujourd'hui et cela paraissait si lointain. Parce qu'il avait pris l'habitude de réfléchir au jour le jour, de ne jamais se projeter au lendemain. Cela était insensé de prévoir l'avenir, quand le présent même était incertain. Il fallait qu'il s'adapte, qu'il change ses habitudes pour qu'elles soient en accord avec les besoins actuels. C'était purement et simplement de l'instantané. Rien de plus, rien de moins.
- Archimage ? Je ne savais pas que les titres te faisaient tant rêver, Estiam. Souvent, quand un maître devient archimage, c'est tout d'abord parce que ses pairs le reconnaissent comme tel. Disons que pour que ce soit le cas, l'Art doit être quelque chose qu'on pratique sans effort, sans parfois même y penser. Les limites sont celles que t'offre le flux, non plus celles que t'impose ton corps et ta technique. Il est probable qu'alors, la pratique te paraisse de moins en moins vitale, plus si primordiale qu'elle peut l'être au début de ton initiation. Que tu te tournes de plus en plus vers la théorie, que tu cherches à comprendre plus de choses, plus précisément. Que tu te poses des questions de plus en plus pointues, que tu prennes plaisir à découvrir d'autres techniques. Mais il n'y a pas de test, non. Et peu importe le titre qu'on te donne, à vrai dire. Si tu cherches à tout prix à devenir aux yeux des autres un archimage de la magie élémentaire, alors tu ne le seras jamais réellement. L'appellation n'a que peu d'importance, elle n'est que le reflet de l'impression que les autres ont de toi. Cherche à évoluer pour toi même. Cherche a grandir en nourrissant toujours un peu plus ton esprit. En faisant grandir ton cœur, parce que cela te plaît. Parce que c'est là ta véritable vocation, ce qui te motive au plus profond de toi. Et non parce qu'un titre te fait rêver. Non parce que tu voudrais incarner un personnage, qui finalement ne serait pas toi.
Cette question l'avait quelque peu déstabilisé, venant de lui. Il ne pensait pas, ne savait pas, qu'il était de ceux qui rêvaient du sommet. Qui étaient plus motivés par leurs rêves et leurs espoirs que par leur passion. Ou du moins, autant. Cette manière de penser l'ennuya un instant, mais pas tant pour l'élémentaliste que pour lui même. Il s'était forgé une mauvaise image, alors il se devait de la corriger rapidement. Il connaissait, ce genre de question. Il connaissait la réponse adéquate. Ou plutôt, le panel de réponses qui trouvaient généralement écho chez son interlocuteur. Mais elle venait généralement d'un apprenti, ou d'un arcaniste. Pas d'un maître de la carrure d'Estiam. Avait-il donc si peu d'estime pour lui même ? N'était-il pas capable de reconnaître sa réelle valeur ? Il avait pourtant passé un bon moment à l'Académie, où il s'était sans doute comparé encore et encore à ses pairs. Où il avait pu évaluer son niveau, ses capacités. Se placer dans la pyramide sans trop se tromper et sans faire énormément d'effort. Mais visiblement, cela n'avait pas été le cas. Et ses yeux brillaient, de la même lueur que celle qui brillait au fond de l'oeil d'un enfant à qui on parlait de magie. Ou de religion.
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| | | Lœthwil
Ancien
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| Sujet: Re: [Libre] Rémission Mer 8 Juin 2016 - 12:37 | |
| Tu aurais dû t’y attendre. Ce qui t’a poussé à croire que la sérénade ne viendrait pas ? Le vain espoir qu’il comprenne les raisons profondes de ton questionnement, espoir stupide, puisque contrairement à l’impression que pouvait donner votre efficace tandem, Anorndellon et toi étiez loin de parfaitement vous connaître. Ta mine s’est tirée durant sa plaidoirie, et par plusieurs fois il t’est venu le désir de le couper. Tu n’es plus un enfant, et ce depuis bien longtemps. Les beaux discours sur la passion et la réalisation de soi-même, tu ne t’estimes plus en âge de les écouter les étoiles dans les yeux. Malgré tout tu le laisses aller, tu l’écoutes attentivement même, attendant un instant de répit, un moment de pseudo seul à seul, sans témoin silencieux. Et au vu de la rapidité d’Anorn pour refermer les moins graves des blessures, cela ne saurait tarder.
Instinctivement, vous vous asseyez, les regards l’un dans l’autre, le tien presque réprobateur quand le sien cherchait des réponses. Le long silence que tu avais imposé ne pouvait vouloir dire qu’une chose. Tu avais à dire. Mais tu attendais le bon moment.
- Je suis un enfant illégitime Anorn.
Et cette phrase à elle seule était pleine de signification. Cinq mots pour tout dire. Cinq mots qui devraient suffire à lui faire comprendre ta réalité et la raison de ton attachement à ce titre. Mais parce que l’on est jamais trop sûr, tu ne te prives pas de développer ta pensée.
- Je n'existe pas. Tu soupires, ennuyé J’ai commencé les enseignements d’Alëandir avec plusieurs décades de retard. Lòmion n’était pas encore le doyen en ce temps, mais il était déjà respecté. Les enfants d’Archimages voient souvent placé en eux de grands espoirs, parfois au point d’être écrasés par les attentes qu’ont leur entourage. Pour moi c’était différent. J’étais un enfant bâtard et un retardataire. Particulièrement pour l’enfant de Lòmion, une déception. J’étais d’autant plus une déception que je n’arrivais à rien.
Tu t’attendais à une réplique de sa part, mais rien n’en fut. Alors avec un sourire nostalgique aux lèvres, tu continues de conter le récit de tes jeunes années.
- Mais déjà alors que je n’y comprenais absolument rien, j’aimais la magie. J’y mettais d’ailleurs probablement bien trop de zèle. Ma motivation et mon manque de calme ont joué contre moi. Je le reconnais, j’ai été un enfant turbulent durant mes premières classes… mais jamais un professeur ne m’a repris, jamais on ne m’a remis sur les rails, parce qu’à leurs yeux j’étais une cause perdue et malheureusement, j’ai fini par les croire.
La faible natalité chez les elfes les pousse à aimer leurs enfants plus que de raison, mais l’apprentissage chez les Sylvains n’en est pas moins difficile, strict, et parfois injuste. Victime des préjugés, même l’enfant innocent tant aimé par son peuple n’en aura pas forcément la sympathie.
- C’est mon père, quand il a compris ce qui n’allait pas, qui m’a pris sous son aile. C’est d’ailleurs une histoire presque à en rire. Quel élémentaliste peut se vanter d’avoir fait son éveil auprès d’un mage de l’esprit ? tu ris doucement Mais père était trop limité par la différence des domaines, et une fois qu’il se fut retrouvé incapable de m’emmener plus loin, j’ai dû reprendre les classes. Ton visage s’assombrit. Et je les ai reprises avec la rage de vaincre. Il fallait que je sois le meilleur. C’était ma vengeance.
Et la rage de vaincre, tu l’as toujours, parce que l’on efface pas ainsi la personne que l’on s’est forgé durant l’enfance. Ton éternelle avidité de savoir, ta curiosité insatiable, elle s’est traduite en magie par un jusqu’auboutisme sans précédent. L’art est ta passion première, et puisque tu t’y est plongé, maintenant, il fallait que tu en remonte la ficelle au point d’en défaire la bobine. Quitte à être sorcier, il fallait être le meilleur sorcier que tu puisses être. Et pour exister, quitte à te dépasser, il fallait aussi que tu dépasses les autres.
- Je ne penses pas me perdre en vantardises en disant que j’ai connu l’une des plus fulgurantes progressions parmi les élèves du Chapitre Blanc dans le temps. De parmi les derniers je me suis retrouvé parmi les premiers, j’ai rattrapé un retard de plusieurs décennies d’enseignements, et encore aujourd’hui, je pense être l’un des meilleurs maîtres élémentalistes d’Alëandir.
Et l’un des meilleurs maîtres-mages toutes disciplines confondues. Tu t’approches à pas feutrés, mais tu t’approches de ton point culminant. Tu es plus proches du jour où l’on t’appellera Archimage que du jour où l’on t’a appelé maître… et pourtant jamais, sinon de la bouche de ton père, ou de ceux qui ont en ce jour rejoint depuis bien longtemps le Royaume de Tari, ton nom ne fut évoqué entre les murs du Chapitre Blanc en des termes élogieux. Ça ce n’est qu’avec les yeux que tu l’as dit, mais tu n’en penses pourtant pas moins.
- Mais le jour où l’on m’appellera Archimage Anorn, alors ce jour, ni le Chapitre Blanc, ni les Cités de l’Anaëh ne pourront faire la sourde oreille à mes paroles. Ce jour enfin, je serai quelqu’un. Et je sais ce que tu vas me dire. Tu vas me dire que je n’en ai pas besoin. Tu vas me dire que j’ai une famille, des amis, un monde à moi pour lequel j’existe déjà, et tu auras raison. Mais peut-on véritablement interdire à un enfant de vouloir prendre sa revanche sur le monde ?
Mais il n’y a pas que cela. Il y a aussi tes écrits, tes dessins, et les savoirs que tu as accumulé durant ta vie d’errance et de voyage. Tous les manuscrits que tu t’es donné la peine de rendre compréhensibles aux autres plutôt que de les conserver égoïstement, et tous les manuscrits que presque jamais personne n’a daigné ouvrir… puisque tu n’es personne. Des manuscrits qui auraient pourtant probablement sauvé des vies, puisqu’à partir du jour où tu as décidé de leur forcer la main, tes recherches sur les plantes des Terres Stériles ont grandement participé à l’élaboration de l’antidote d’Uraal.
- J’évolue pour moi. Si j’ai autant envie de me dépasser, c’est parce que j’aime la magie. Mais j’ai besoin que mon évolution soit reconnue comme telle, que le monde voit ce que je suis devenu, parce que sinon, tout ce que je lui ai légué, je l’ai légué pour rien. Que ce soit mes recherches… ou mon image. Tu te lèves, écarte les bras, pour montrer l’évidence. Je suis un demi-sang Anorn. Je suis un demi-sang et je l’ai toujours revendiqué. Je suis un demi-sang qui s’est battu pour obtenir un semblant de respect de la part des Noss. Si seulement j’arrivais à obtenir le respect des Taledhels, alors imagine seulement la bouffée d’espoir que cela pourrait représenter. Pas seulement pour moi, mais pour tous les autres demi-sang peinant à gagner les faveurs de ne serait-ce qu’un de leurs mondes d’origines, pour tous les Citadins quittant la ville à la faveur des Noss, et pour le peu d’Ornedhels s’exilant entre les murs. Je pourrais peut-être faire comprendre quelque chose à mon peuple et là le ton monte, coupant le temps de quelques mots, à travers le bruit de fond des mouroirs. Si seulement mon peuple daignait m’écouter quand je parle !
Certains n’y verraient qu’un délire mégalomane, les séquelles sur l’adulte d’une enfance vécue en tant que marginal et il y a définitivement une part de cela. Mais il y a aussi et surtout, un fort désir de voir les choses changer. Un fort désir de concilier deux univers qui tentent de s’annihiler depuis la nuit des temps. Un fort désir de voir des rancoeurs injustifiées disparaître. Un fort désir de comprendre, et de faire comprendre. Parce qu’un jour ton père t’a dit que seuls les meilleurs ont le droit de savoir, et que ce jour tu l’as vécu comme la plus grande des injustices. Car pour toi qui veut tout savoir, tous ont le droit de savoir, car si tous savaient, si tous avaient une chance de comprendre, alors nombre de conflits seraient évités et nombre de vies seraient épargnées. Tu veux exister aux yeux du monde, simplement car tu es en peine d’être ignoré par un monde auquel tu veux du bien.
- Peut-être est-ce qu’après presque un cycle je rêve encore d’utopie, ou alors peut-être suis-je juste fou. Penses-en ce que tu veux. Mais s’il on essaie pas, alors comment peut-on jamais y arriver ?
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| | | Anorn
Ancien
Nombre de messages : 671 Âge : 28 Date d'inscription : 18/06/2015
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 1201 ans Taille : 1m93 Niveau Magique : Archimage.
| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 9 Juin 2016 - 12:48 | |
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S'il se tut un instant suite à sa réponse, les mots coulèrent à flot une fois la première phrase lancée. Anorn eut du mal à savoir où il voulait en venir, il eut du mal à entendre ce qu'Estiam lui racontait. Il était en quête de reconnaissance, et ? Son enfance avait été dure, parce qu'on n'avait pas voulu le reconnaître, parce qu'il n'avait pas réussi à trouver les siens, parce qu'il avait été dur pour lui de se faire une place dans la société. Et après ? Il avait sa place, actuellement. Il était utile, il servait son peuple. Aidait ses frères et ses sœurs. Il avait sa famille encore présente autour de lui et pour lui, des amis aussi. Il était proche d'Halyalindë, tout autant du Toer Tamindal semblait-il. Alors quelle reconnaissance aux yeux du monde pouvait-il bien vouloir ? N'était-ce pas suffisant d'être l'une des personnes les plus importantes aux yeux de ceux qu'on aimait ? Exister à travers des titres, à travers des posts, cela n'avait aucun sens si les personnes qu'on aimait ne les reconnaissaient pas. Ne les entendaient pas. Ne les reprenaient pas. Il n'y avait pas de raison de vouloir être aux yeux du peuple, si l'on n'était pas aux yeux de ceux qu'on aimait. C'était d'une évidence les plus totales pour le régent qu'il n'arrivait pas à retirer son attention de cette constatation. Mais on s'assura bien vite qu'il ne s'égare pas dans cette voie, qui finalement ne requérait pas tant d'attention. Ce n'était pas là le sujet principal. Ce n'était pas là ce qu'il fallait retenir, non. Parce que l'essentiel était la réconciliation. Cette utopique réunion des cités et des noss, dont il était le mélange surréaliste. A ces mots, Anorn acquiesça. Il avait compris. Ses motivations n'étaient pas loin des siennes, à vrai dire. Pour lui ce n'était qu'un sujet de discorde parmi tant d'autres, un problème à régler parmi cent. Mais pour Estiam, c'était le combat de sa vie. La chose qui importait réellement, celle pour quoi il continuait. Pour quoi il avançait.
- Fou ? Nous le sommes tous un peu. Mais ce n'est pas fou de penser pouvoir réunir notre peuple. J'espère du plus profond de mon cœur que l'union de l'Anaëh n'est pas une utopie. Il est parfois difficile de penser pouvoir réaliser ce rêve. Au moins l'avons-nous en commun. Alors je comprends mieux, maintenant. Je comprends que tu ais besoin de titre, pour pouvoir agir. Pour pouvoir faire passer des idées, faire entendre ton savoir. Excuse moi de m'être fourvoyé plus tôt sur tes réelles motivations. Je dois avouer que je t'ai répondu comme j'aurais répondu à un novice, ou à un apprenti. Même si je sais que tu n'en es plus un depuis bien longtemps, je n'ai pas l'habitude qu'un maître me pose une telle question. A vrai dire, je n'ai pas l'habitude qu'un maître me pose des questions. Souvent, ils sont de ceux qui pensent déjà tout savoir, de ceux qui sont persuadés de n'avoir plus besoin d'apprendre. Il est vrai que n'es pas comme eux, ce qui est entièrement à ton honneur.
La fatigue avait précipité ses mots, l'envie de s'évader avait enclenché un automatisme. Qu'il aurait du adapter, ou qu'il aurait du retenir. Mais il ne l'avait pas fait. Est-ce important ? Non. Définitivement pas. Il n'était pas en plein milieu d'une discussion politique, d'un débat dont dépendait l'avenir du peuple, ou d'un cité. Alors pourquoi s'en faire ? Pourquoi accorder une très haute importance à ce qui pouvait être rattrapé sans mal ? Et à ce qui pouvait éclaircir certain point. Cela n'avait pas de sens, il le savait. Pourtant, quelque part au fond de lui, il s'en voulait un peu, d'être aussi négligeant. D'user du prétexte de la fatigue et de l'exception des événements pour justifier un manque de rigueur. Il allait devoir se reprendre, quand il rentrerait à Alëandir. Mais pour ça, il savait pouvoir compter sur Arwain. Elle le recadrerait sans doute avant même qu'il ne lui demande quoi que ce soit.
- Quoi qu'il en soit, aucun test n'existe, aucune épreuve ne permet de définir le niveau que tu as. Peut-être est-ce une erreur, mais je ne pense pas. Comme je disais, si être archimage est certes le reflet de l'excellence dont tu fais preuve dans ton art, c'est aussi toute une attitude, un comportement. Chose qu'une épreuve ne peut juger. Mais bientôt viendra le jour où tu seras reconnu comme tel. Après ton exploit ici, à Eraïson, la reconnaissance ne saurait tarder. Et le titre d'Archimage avec. Débrouille toi seulement pour ne pas ressortir de la maigre lumière dans laquelle tu es entré. Et si cela sera plus dur pour toi que ce ne l'a été pour moi, je pense que ta place te seras attribuée plus vite que tu ne le penses.
Parce que quelque part, il y veillerait. Il ferait sans doute partie de ceux qui vanteraient ses talents et son mérite. Qui donneraient des raisons valables de l'élever plus haut qu'il ne l'était déjà, de lui donner les moyens de réaliser ce qu'il devait réaliser. Il le méritait sans doute bien plus que d'autres qui prétendaient depuis bien plus longtemps à ce titre.
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| | | Lœthwil
Ancien
Nombre de messages : 761 Âge : 27 Date d'inscription : 20/10/2015
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 966 ans Taille : 2m08 Niveau Magique : Archimage.
| Sujet: Re: [Libre] Rémission Jeu 9 Juin 2016 - 20:57 | |
| Plus de raisons de s’emporter, alors le ton s’est baissé aussi vite qu’il est monté. Ton interlocuteur ne s’en est pas plus formalisé, et ceux qui durant ton instant de flottement ont tourné la tête sont déjà de retour à leurs activités. Les éclats de voix sont pratique courante dans les mouroirs. Un de plus, un de moins… tant que la souffrance physique n’y était pas jointe, l’attention aura vite fait d’être reportée.
- Pas la peine de te fourvoyer. Après tout, le récit de ma vie n’est pas écrit dans les livres. Tu n’aurais pas pu comprendre le fond de ma pensée avant que je ne te l’expose. J’aurais simplement dû faire l’effort de trouver des mots plus adaptés.
Comme tu aurais peut-être dû être plus précis lorsque tu as parlé d’unité. Car chacun avait sa propre appréciation de ce qu’était un peuple soudé, et il est bien probable qu’Anorn et toi n’en ayez pas la même vision.
- Je ne me targue par contre pas capable de rallier les deux versants du peuple Sylvain sous une même coupe. Loin s’en faut. Même étant l’enfant d’un parent de chaque côté, et en ayant connu les deux faces, il m’apparaît évident que Taledhels et Ornedhels se sont trop éloignés pour à nouveau vivre ensembles comme un. Il est déjà impensable pour les différents clans Noss de se réunir en dehors des situations de crises, alors s’annexer aux Cités… Ce que je veux, c’est simplement rétablir le respect. Les rituels de certains clans peuvent sembler barbares aux yeux des habitants des Cités, et je le comprends puisque ces mêmes rituels semblent cruels aux yeux de certaines autres tribus de la forêt. La différence est que les Ornedhels les respectent, tentent au moins d’en comprendre la signification et acceptent, quand le commun des Taledhels s’en offusque. Dans le même sens, beaucoup de tribus voient les cités comme un affront à la mère et un désir de se retirer de sa création, alors que c’est loin d’être le cas. De ce que j’en ai vu, les cités sont de véritables joyaux d’union entre la technique acquise par les Sylvains au cours des cycles et la main de la Déesse. Voir un versant embrasser la culture de l’autre ne m’intéresse pas. Je veux simplement l’acceptation de la différence. Que l’on accepte d’abord la différence, et alors là seulement l’on pourra voir ce que peuvent nous apporter les autres.
Qu’impies et sauvages arrêtent de se renvoyer l’insulte, et les premiers verront peut-être ce qu’ils ont lentement perdu en s’isolant de la Symphonie quand les seconds verront qu’il est parfois judicieux de faire preuve de retenue. C’est là, tu en as la conviction sincère, le message du dernier voile. La mère rendant la Symphonie au cœur des villes tout en prenant garde de ne pas en tomber les murs. Il ne s’agit pas de se jeter bras le corps dans les lignées opposées. Il s’agit de faire un pas mesuré pour que les mains puissent se serrer.
- Ah... la relation entre Noss et Cités tu soupires Tu parles d’un problème complexe. J’ai beau en parler, je garde la ferme impression d’être à la fois en train de mentir et de dire la vérité. Le jour où les oreilles se tendront vers moi, j’aurai intérêt à avoir travailler mon verbe si je veux aborder ce sujet. Mais pour en revenir à ce que l’on disait avant que je ne me perde en généralités, je ne pense pas qu’un Mage puisse un jour finir d’apprendre. Je ne peux qu’attendre que mes pairs jugent que j’en ai appris assez pour mettre leur confiance en moi.
Et finalement, pour véritablement terminer de pourfendre le ton solennel de l’entrevue, et profiter de l’instant de détente qu’il vous était offert en l’absence de patient, rien ne valait un peu d’autodérision. Tu souris franchement, posant ta main sur l’épaule d’Anorn, tentant de lui faire comprendre sans parole que tu ne voulais pas être sérieux, et que c’était quelque part, ta manière de faire ton deuil de la situation qu’il appelle ton « exploit ».
- Mais je pense quand même que ce serait me rendre la tâche bien difficile que de réitérer des « exploits » comme celui d’Eraïson. Tu roules des yeux Je doute fortement que tous voient un héros dans celui qui a accompli la formidable tâche de retenir un Mage Sombre pour quelques minutes. Surtout s’il ne reste que deux témoins à l’esprit fragilisé pour en conter l’histoire.
Tu en ris pour ne pas en pleurer. Halya a failli mourir. Neraën a failli mourir. Les autres des participants de la bataille avaient il y a longtemps de cela rejoint Tari. C’est vrai, à en parler en ces mots, le combat que tu as mené n’avait rien d’un exploit, mais lorsque l’on savait la monstruosité du pouvoir de ton adversaire, lorsque l’on savait les enjeux de votre victoire… la résistance que tu as su opposé prenait toute sa valeur. Mais comment aurait-il su ? Comment Anorn aurait pu savoir les détails de ta véritable bataille au jour de l’assaut sans que ni Halya, ni Neraën, ni toi ne la lui aient décrite ? Peut-être parlait-il tout simplement de ta présence lors de l’ouverture des portes, des trouées que tes créatures ont percées à travers la barrière de macchabés et de l’ardeur que tu as mis au combat à ce moment-là. Ça, beaucoup avaient pu le voir, mais s’ils n’avaient vu que ça, alors ils n’avaient rien vu de toi.
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