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 [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.

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Arichis d'Anoszia
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MessageSujet: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeMar 23 Aoû 2016 - 23:57

L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. 180129mmorablesouvenir



D'autres Rps liés à l'intrigue :






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3ème jour de la sixième ennéade.

La procession qui arriva aux portes de la Sérénissime Capitale était composés de seigneurs soltarii dont la tête de file était Ponitii et Corellii, les deux familles proches  des Soltariel qui leur fournissaient épouses et soutiens. En ce jour, ils avaient récupérés d’importantes charges et menaient avec eux les principales familles de Soltariel qui avaient reconnus le couple ducale, soit le deux tiers des seigneurs de la lande. Les plus farouches à s’opposer à eux et qui avaient brillés par leur absence étaient les seigneurs du Bétis, ceux qui étaient voisin avec les Valancourt, une branche de Soltariel avec un lien assez proche pour prétendre au trône du Soleil-Blanc.

La procession s’arrêta à une centaine de mètres des murailles de la ville aux milles-canaux. Une certaine tension s’installa, on jetait des coups d’œil à Arichis et Tibéria sur leurs chevaux à la robe appareillé et aux murs infranchissables ainsi que la porte fermée. L’Anoszia avait demandé à ses soutiens d’amener avec eux le plus de monde possible, des hommes-liges, des reîtres et des condottieres qui formaient la fin de la procession tandis que des éclaireurs parcouraient la plaine pour prévenir de toutes fâcheuses surprises. Arichis tandis la main à un seigneur à sa droite, un Lambruzzia, qui lui remit une longue-vue. Il l’étira et la porta à son œil droit pour espionner les murailles, il y vit des soldats en armure portant d’énormes rouleaux qu’ils portèrent au rempart encadrant la porte. Il comprit aussitôt et sourit en redonnant la longue-vue à son vassal.    


« Voyons voir. » Dit-il en s’adressant plus à son épouse qu’aux autres.

A peine eut-il terminé sa phrase que deux immenses bannières furent déroulées de part et d’autres de la grande porte. Une représentant le soleil rayonnant des Soltarii-Berontii et l’autre le dragon d’or des Anoszia. Du fin fond de la file jusqu’à la tête, des hourra furent poussés et des chapeaux jetés en l’air. La herse fût levée à la porte et une procession de dignitaires sortis menée par Ergrico di Marzo, appelé l’Aspic des Mers. Ils allèrent à sa rencontre avec Tibéria, aussitôt suivi par les autres seigneurs.


« Vos Altesses, voici les clés de la ville. » Salua-t-il en présentant sur un coussin un collier avec une grosse clé au bout.

Le seigneur sembla hésiter à qui la remettre d’Arichis et de Tibéria et cela se vit. Souriant l’Anoszia tapota le popotin de la monture de sa femme pour que celle-ci s’avance par rapport à lui devant le seigneur Marzo afin de recevoir la clé.


« La capitale est à vous ma dame. » Conclut-il en s’inclinant bien bas devant le cheval de Tibéria avant de les inviter à les suivre dans la ville même.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeMer 24 Aoû 2016 - 21:44

Ils y étaient presque. Soltariel serait bientôt en vue et Tibéria sentait son cœur dans sa poitrine faire des bonds vertigineux à simplement imaginer le moment où ils y seront enfin. Arichis chevauchait à ses côtés, affichant un visage parfaitement calme alors que Tibéria savait qu’en réalité, il devait être aussi excité qu’elle. Le mariage, le couronnement et les serments ne signifieraient plus rien s’ils ne prenaient pas Soltariel. Pour l’occasion, ils étaient bien entourés avec les familles venues les appuyer ainsi que des hommes armés pour les protéger en cas d’une attaque. Tibéria craignait réellement que cela arrive. Jusqu’à présent, tout s’était passé rondement sans aucun problème. Pour la jeune femme, ça ne pouvait pas aller aussi facilement sans qu’un intense revers finisse par arriver. Dans l’immédiat, tout semblait calme même si l’inquiétude était palpable. Tibéria regardait droit devant elle, refusant catégoriquement de laisser paraître un quelconque malaise. Sa fierté en dépendait.

Lorsque la ville fut enfin en vue, Tibéria eut l’impression d’enfin rentrer chez elle. Elle connaissait bien cette ville pour l’avoir souvent visitée et même habitée pendant un temps. Elle n’avait pas l’impression d’être une inconnue venant prendre quelque chose qui ne lui revenait pas. Elle ne faisait pas tout ça dans le but de faire du mal ou de nuit à quelqu’un. Elle espérait pouvoir le prouver rapidement. Il ne lui suffisait pas de mettre au monde un enfant pour assoir son pouvoir. Tibéria voulait gagner le cœur de la population, cette majorité silencieuse qui vivra les impacts des décisions qu’elle prendra à l’avenir. Beaucoup avaient souffert pendant le règne de sa sœur. Jamais plus cela ne devait se reproduire de son vivant.

La cohorte s’arrêta non loin des murs et tout le monde retenait son souffle, y compris Tibéria. Si quelque chose devait arriver, c’était maintenant. Pendant un moment, rien ne se passa. Elle vit son époux s’emparer d’une longue-vue afin d’y voir un peu mieux, mais Tibéria distinguait à peine un subtil mouvement sur les remparts. Elle allait lui demander s’il avait vu quelque chose d’anormal lorsqu’elle vit les banderoles se déployer de chaque côté de la grande porte. Tibéria sourit. En fait, elle aurait éclaté de rire tant la joie qu’elle éprouvait était intense. On les accueillait officiellement. La ville était à eux. Derrière le couple, les expressions de joie fusaient de tous les côtés.

Un groupe de dignitaire quitta la ville pour venir à leur rencontre. Sans s’arrêter de sourire, Tibéria retrouva un air un peu plus digne en se redressant sur la selle de son cheval pour paraître bien droite et peut-être un peu plus grande qu’elle ne l’était réellement. L’homme à la tête du groupe s’approcha pour les saluer. Il avait avec lui les clefs de la ville. Dans l’esprit de Tibéria, c’était à elle de prendre la clef, mais elle hésita. Finalement, son cheval s’avança, aidé par Arichis. La duchesse cacha sa surprise et prit la clef avec un sourire gracieux.

— Je vous en remercie, mais la ville n’est pas seulement à moi. Elle est à nous.

Elle jeta un regard à Arichis, lui faisant signe de s’avancer pour marcher à ses côtés jusqu’à l’intérieur de la ville. Il était clair à l’esprit de Tibéria qu’Arichis et elle allaient gouverner à égalité. Elle espérait que son époux envisageait ce règne de la même façon. Pour l’instant, la jeune femme n’avait pas à se plaindre. Néanmoins, leur mariage tout comme leur règne débutaient à peine. Beaucoup de choses pouvaient encore arriver.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeVen 26 Aoû 2016 - 14:58


Soltariel et ses clefs. Soltariel et son palais Ducal. Soltariel et sa cour du Roi. Mais Soltariel n’était pas que cela. Soltariel est aussi une cité de vingt-quatre mille habitants. Le peuple Soltari en avait assez de voir leurs trône volage. Ils en avaient assez d’être gouverné que par des étrangers... Et certains partisans s'en assurait avec tout le zèle dont ils étaient capable. Le vent apportait des murmures ; une résistance était en train de se lever. Une résistance qui voulait se faire connaître parmi ceux à qui on ne demandait que trop peu leurs avis malgré leur responsabilité et leur culture indéniable. Les Vrais Soltaris voulaient un Duc Soltari, plus un étranger.

Les clefs de la cité furent remises par les quelques nobles sur place mais tous n’étaient pas de cet avis. A faire la sourde oreille, on risque des retours de bâton... Dans les salons des bourgeois, on murmurait des mots qui auraient sûrement coûté cher à la gorge de laquelle ils étaient nés... Mais comment rivaliser lorsqu’on attaque un adversaire plus fort que soi ? Il fallait y aller prudemment et intelligemment.

Des soirées mondaines emplies de noms à particules jusqu'aux salles combles des tavernes en passant par les coins sombres des théâtres, on chuchotait. Les étrangers, déjà regardés de hauts, pouvaient voir le dédain et la morgue sur les traits de plus en plus d'habitants... Et bientôt, vint l’heure fatidique…

A peine deux jours après l’arrivée du couple ducal, la ville commença a hurler. On entendait les voix des femmes et des hommes menés par des habitants du cru. Mais même cela avait du mal à se faire entendre au dessus des cris des bêtes apeurées qui avaient été lâchées dans le marché. Empruntant rues et ruelles dans une course effrénée, effrayées et conduites par on-ne-sait-quoi, ce troupeau étrange transformait la ville en un gigantesque capharnaüm dû aux étales, charrettes, et tout autre objets qui se trouvaient sur le chemin, renversés, cassés, entrainés... Tout comme certains badauds qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment.

Quelques dizaines de portes de familles récemment installées et d'autres qui avaient ostensiblement montré leur appui au nouveau couple ducal furent souillées d'inscriptions et placardées de rats.



Non aux étrangers !

Retourne en exil !

Soltariel aux Soltaris !



C’est à ce moment que d’autres problèmes survirent cette fois-ci en visant le palais directement et indirectement. Malgré l'imperméabilité des esclaves de la cour à la Cause, le ravitaillement en nourriture fut échangé avec un chargement d'oignons et de racines. Du sang et du vinaigre furent jeté sur des nobles. Quelques jours de plus et les cuisines prirent feu.

Certains nobles victimes de ses sabotages décidèrent de quitter la cour Ducal, tous outrés par ce qu’il venait de leurs arriver. Le couple ducal n’était pas le bienvenu, et certains voulaient que le message soit passé au détriment du palais, au détriment de ses occupants.

En dehors de ses villes, le calme semblait être remplacé petit à petit par des heurts. Nombreux sont les étrangers de passage à se faire dépouiller. Nombreux sont les nobliaux en villégiature à recevoir des demandes de plus en plus véhémente pour quitter les terres de Soltariel.

Une chose semblait pourtant clair: Soltariel ne serait plus une terre d’accueil tant que le trône ducal n'accueillerait pas un véritable Soltari... Les partisans des Vrais-Soltaris mettraient tout en œuvre pour cela.

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Dernière édition par Entité le Lun 29 Aoû 2016 - 16:07, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeVen 26 Aoû 2016 - 23:53


4ème jour de la sixième ennéade, Karfias.

Les gardes Anoszia, ceux qu’on appelés les manteaux rouges étaient reconnaissable parmi tous. Leurs capes rouges déjà, mais plus particulièrement leur cimier à tête de dragon. Ils ne sortaient pas en ville et s’occuper exclusivement du palais. Ils étaient les seuls en qui le duc avait confiance pour le moment tant la situation ne semblait pas sous contrôle. La milice, le guet et les casernes étaient pourtant sous son autorité. Le patriarche, avec l’accord de son épouse, s’était empressé de nommer son ami Ponitii capitaine du guet et chargé d’héberger les soldats des différents seigneurs loyaux dans les casernes et forts de la cité aux milles ponts. Ainsi, les gardes Ponitii résidaient au Fortè Magnus, les gardes Corellii au Fortè Léandre, les gardes Mirabelo au Fortè Isidore tandis que les autres gardes occupaient les casernes du sud. Des lits en plus avaient dû être amenés dans les dortoirs.  

Les gardes Anoszia, ceux qu’on surnommé les Dracaenas, résidaient au palais où ils avaient remplacés les eunuques tués dans la fuite de la famille de Tibéria. Mais lorsque le feu prit dans les cuisines, l’Anoszia ne punis pas les esclaves comme il aurait fait en d’autres temps. Il en commanda même d’autres afin de remplacer tous les serviteurs que ses hommes jugeaient suspect. Mais lorsque le feu éclata, Arichis prit cela comme excuse pour sécuriser le roi par ses propres hommes, menés par son neveu aux prouesses vérifiés, Gildério. Le jeune Anoszia fût chargé de mettre le roi en lieu sûr, c'est-à-dire dans le donjon d’Arichis où les Anoszia veilleraient à sa sécurité. Ses nourrices furent changées pour des ydriaines et des ysaroises à la réputation connue de l’entourage du duc, les précepteurs en charge de l’éveil de l’enfant-roi étaient en tout temps sous surveillance d’un Dracaena.

Lorsqu’on demandait à l’Anoszia ce que l’Angleroy en penserait, Arichis se contentait de répondre nonchalamment « Nous voulons tous ici la sécurité du roi. » avant de rebondir sur un sujet plus gai. Les patrouilles dans les ailes plus « populaires » du palais doublèrent, les étrangers n’étaient plus permis dans l’enceinte de la demeure ducale et les portes fermées la nuit tombée. On changea de fournisseur pour les livraisons de nourritures, les seigneurs fidèles au duc et à son épouse se faisaient une joie de récupérer les affaires mercantiles des seigneurs félons et agrandissant leur large clientèle.

Mais plus important encore, fût le dédoublement des patrouilles dans le quartier huppé de la capitale. Les petits manoirs et les hôtels des particuliers ayant une demeure en dehors du palais furent sous surveillance des Ponitii. A la nuit du quatrième jour, on surprit un Gentili taché de la peinture blanche servant à écrire les ignominies sur les murs de la ville. Son hôtel fût saisi et une vente aux enchères fût programmée pour la fin de l’ennéade tandis que le seigneur rebelle fût mis aux fers. Le Dragon ne plaisantait pas, et de ce chaos, il comptait bien profiter.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeDim 28 Aoû 2016 - 18:54

HRP:


Les gardes se déplaçaient en grand nombre dans l'enceinte de la ville. Au départ regardés avec surprise et intérêt, les yeux s'étaient rapidement fait plus sombre au fur et à mesure des changements jusqu'à ce qu'on commence à cracher derrière le dos de ces tabars à la solde d'un Duc qui venait de pousser dans un coin sombre les hommes qui depuis des années donnaient leur sang pour la sécurité des citadins.

Des lames. Toujours plus de lames. Des lames étrangères.

L'ancien capitaine du Guet serra les dent en ramassant sa pipe tombée au sol. Voilà... Il avait tout. Jusqu'au dernier effet personnel qu'il avait put apporté dans ce bureau qui était désormais celui d'un autre. Et bah grand bien lui fasse à ce vieux queutard vendu et à sa catin de rombière qui s'était sûrement faite ramoner par tous les estréventiens du monde !

Il ne lui restait plus qu'à saluer son successeur pour reprendre son service... Mais une fois devant ce visage... devant ce... Il sut qu'il n'y parviendrait pas.

La démission du Capitaine du Guet fit le tour de la ville en quelques heures.

Il faut dire qu'il n'y était pas allé de main morte... Sur les derniers chants de la cérémonie du matin, il était arrivé sur la place du temple de Néera dans la Haute-Ville. Seul cavalier à la ronde et en uniforme impeccable, il avait mis pied à terre pour se placer juste devant les portes ; et alors que les bourgeois et nobliaux sortaient les uns après les autres, il avait ôté méticuleusement chaque symbole de son appartenance au Guet pour les laisser tomber dans la poussière. En caleçon long, armé du dernier bout de tissus qu'il avait enlevé, il était enfin entré dans le temple pour s'emparer d'une bougie.

De retour à son emplacement initial, son manège avait créé une masse plus que conséquente. Alors il avait parlé. Il savait que les soldats ne tarderait pas, alors il avait été bref, racontant ce qui venait de se produire dans les rangs armés de Soltariel. Il insulta le duc et la duchesse haut et clair. Il n'eut pourtant pas le temps de finir sa diatribe. Pas plus qu'il n'eut le temps d'inciter ces gens à prendre parti ou de les prévenir de l'horreur qu'il voyait arriver. Sur la place venaient d'arriver les soldats, poussant sans ménagement les spectateur. Mais l'ancien capitaine ne tenta pas de s'enfuir. Au lieu de cela, il enflamma la tunique qu'il avait toujours à la main, la lâcha ainsi qui sa bougie sur le tas d'affaire qui gisait à ses pieds et prononça la phrase qui devait faire le tour de la ville bien plus vite qu'un cheval au galop.

« MOURIR LA TETE HAUTE PLUTÔT QUE VIVRE AU CUL DE CES INDIGNES USURPATEURS ! »

Une langue de flamme claqua dans l'air avant que les gardes ne le ceinturent.

En quelques jours, ce ne fut plus seulement le capitaine, plus seulement quelques gardes, quelques suspects qui étaient arrêtés après avoir provoquer des combats ou proférer des menaces envers le couple ducal sous le regard surpris et quelque peu indifférent de la masse. Non. Les murmures gagnaient en force et en ampleur, donnant une rengaine bien différente de celle encore assez calme qui avait accueilli le nouveau couple ducal deux ennéades plus tôt.

Des serviteurs étaient congédiés par poignées sous des prétextes idiots. Tous savaient qu'après le feu dans les cuisines, la paranoïa s'était emparée du palais. On murmurait que le petit roi était emprisonné dans ses propres murs. Le nombre de partisans à la Cause ne cessait d'augmenter... Et même ceux qui ne voyaient dans les Vrai-Soltaris qu'une tête de plus avide de pouvoirs, les actes du nouveau duc trouvaient leurs opposants.

Mais les hommes et les femmes loyaux à ce couple que beaucoup réprouvaient recevaient affaires, biens et titres... Comment ne pas faire passer le bien de sa famille, l'assurance d'avoir de quoi vivre bien jusqu'à sa mort ? Après tout, les contestations existeraient toujours... les problèmes politiques existaient quoi que l'on fasse, non ?

De jour en jour, les tensions grandissaient. Après les premières vagues d'arrestation, les protestations se firent plus discrète. Les dessins et insultes peintes sur les murs furent réduites de moitié en l'espace de deux jours. Les prises de parole poussant à la révolte disparurent presque entièrement. Si bien que dénicher les véritables fauteurs de trouble sans se laisser avoir par les fausses pistes et les accusations montées de toute pièce devenait complexe. Qui était réellement coupable ? Qui était victime d'un complots ? Des dessins injurieux, des sabotages sous le couvert de la nuit, des attaques à l'arraché jusque dans les rues les plus en vue de la ville. La frontière entre réalité et fiction se gommait de plus en plus, autant dans les hautes sphères de la bourgeoisie et de la noblesse que dans la masse du peuple. Qui était fidèle et qui ne l'était pas... ?


Dans les murs du palais, dans les ailes qui étaient de plus en plus fréquemment parcouru par des soldats acquis au duc plus qu'à la duchesse, les sourcils aussi se levaient derrière les mouchoirs en soie. Trois jours après l'incendie de la cuisine, ce ne fut pas de la manière la plus chaleureuse qui soit qu'une délégation Scyléenne sous les traits de Michaelo Marissi, membre de la cour royale, soutenu par la quasi-totalité des nobles non Ydrilotes du palais, demanda une audience à la Duchesse en personne.

Un salut à peine esquissé, un visage sévère, voilà tout ce qui eut l'honneur de faire face à la duchesse.

« Votre Altesse, je n'irai pas par quatre chemins. Les actes de votre époux sont intolérables. Qu'il place en premier plan la sécurité de notre Roi, nous pouvons tous les comprendre. Mais qu'il le place sous sa seule garde sans en référer à la cour, qu'il refuse l'avis de quiconque, qu'il chasse sans ménagement les nourrices de cet enfant et traite ses précepteurs comme des traîtres, nous ne pouvons le tolérer. Son titre de Grand Argentier ne lui confère nullement une prérogative pareille. 

Nous savons que sa sécurité est préoccupante dans le climat de troubles qui agite la ville... Mais nous n'oublions pas que c'est votre cour et vos personnes qui sont visées par ces actes de rébellions et c'est pour cela que je viens vous voir en votre qualité de duchesse mais également d'épouse avant que tout cela n'éclate de façon plus... Visible. Il est absurde de penser que c'est en vous confiant l'enfant qu'il sera davantage protégé. »


La cour royale et la cour ducale avait beau cohabiter dans le même palais, le pouvoir du couple ducal, s'arrêtait ici à celui que lui conférait son titre. Ce n'était point en vassale que cet homme venait lui parler. Et ce n'était pas non plus en vassale que les personnes qui le soutenaient feraient valoir leur avis et leurs droits.

« Que l'enfant sorte immédiatement de votre donjon, qu'il soit remis à la cour royale et que sa garde ne soit plus unilatéralement assurée. Si sa Majesté n'est pas de retour parmi nous avant ce soir, je ne pourrai plus rien pour vous... Et je suis aussi chargé de vous dire que, si la paix n'est pas rapidement rétablie, nous songerons à trouver une ville bien plus sûre pour protéger la personne de sa Majesté. »

Le Scyléen resté debout s'inclina sèchement au bout de sa tirade, marquant ainsi que le messager avait fini son oeuvre.

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MessageSujet: Reste du RP de la prise de Bohémond   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeDim 28 Aoû 2016 - 23:45

Comment dire? La lune de miel ne dura pas bien longtemps. Deux jours à peine après leur arrivée, les troubles commencèrent. D’abord comme une rumeur, les incidents se multiplièrent rapidement au point d’en perdre pratiquement le contrôle. Même si la majorité était derrière eux, cette minorité qui se trouvait derrière ces actes de vandalisme semblait prendre toute la place. Tibéria avait probablement été trop optimiste en s’imaginant que les choses iraient sans problèmes. Ça lui brisait le cœur de voir autant de colère alors que Tibéria avait les meilleures intentions du monde. Alors que la jeune duchesse tentait de trouver une solution qui satisferait tout le monde, Arichis décida d’agir. Elle faisait confiance à sa grande expérience, mais elle fut forcée d’admettre que ses dispositions étaient trop agressives à son goût. Elle avait accepté en se disant qu’il devait savoir ce qu’il faisait, mais les contrecoups de ses décisions se firent rapidement sentir ce qui fâcha Tibéria. Elle aurait dû écouter son instinct. Le manque d’expérience l’avait fait douter. Néanmoins, elle était décidée à arranger les choses, même si c’était plus compliqué maintenant. Il lui fallait organiser une rencontre et discuter. Voilà, discuter était la solution. Si l’on pouvait arriver à négocier comme des adultes responsables, ça serait déjà une grande amélioration. Elle décida donc d’envoyer des missives aux familles à la tête de ce chaos : Pasi, Celini et Camarata. Le message était le même pour tout le monde : une invitation à venir discuter au palais. Elle assura également que personne ne sera inquiété dans le processus et que c’était plutôt l’occasion de trouver des solutions qui feront plaisir à tout le monde… Enfin, autant que ce soit possible.

Quelques jours après que les cuisines aient flambés, une délégation se présenta à la cour soltarienne dans le but de discuter. Ce n’était pas vraiment le meilleur moment pour recevoir, mais Tibéria était prête à remplir son devoir. Ainsi, lorsqu’on lui demanda audience, elle accepta aussitôt. Michaelo Marissi se présenta donc devant une jeune duchesse aux traits tirés de fatigue, mais à l’air aussi digne qu’on pouvait s’y attendre d’une femme occupant une si haute fonction. Évidemment, l’inquiétude liée à la révolte l’avait gardé éveillé durant la nuit. Ce que lui réclama le noble n’avait rien de surprenant. Arichis avait renvoyé tous les hommes et les femmes au service du roi pour les remplacer par ses propres hommes pour assurer sa sécurité, mais Tibéria savait qu’aux yeux de tout le monde, ça ressemblait plus à un noble s’accaparant le roi pour avoir le pouvoir sur lui.

— Je suis parfaitement au courant de la situation. Répondit Tibéria en réfléchissant bien aux mots qu’elle devait employer. Nous voulons tous la sécurité du roi, mais soyons sincère… Est-ce qu’il y a présentement un endroit sur la Péninsule où l’enfant roi sera réellement en sécurité? Avec la guerre qui menace d’éclater à tout moment, avec les troubles qui agitent présentement Soltariel…

Tibéria regarda Michaelo dans les yeux. Elle voulait vraiment trouver une solution qui plairait à tout le monde, mais elle commençait à comprendre que ce n’était pas possible. Il y aura toujours des gens contre elle pour de bonnes ou de mauvaises raisons. Elle pensa surtout à son époux… Si elle laissait cet homme partir avec le roi, il ne serait certainement pas ravi de cette situation. Le faire participer aux négociations n’avancerait à rien non plus. Il était nettement plus tranché que Tibéria qui donnait l’impression de toujours marcher sur des œufs à côté de lui. Il était également le responsable de ce bourbier.

— Très bien… Donc le réel problème est que l’enfant est exclusivement sous la garde des hommes de mon époux, non? Vu le contexte politique dans lequel nous sommes, celui qui détient le roi détient également le pouvoir, vous ne pensez pas? Donc, qu’il soit ici à Soltariel ou peu importe à l’endroit où il ira et sous quelle garde il sera, le problème sera le même, non? Il s’agit d’un enfant après tout qui ne sait même pas parler encore. Je crois que le mieux serait de parvenir à un compromis. Désigner d’un commun accord un groupe d’hommes et de femmes chargé de le protéger dont l’allégeance sera au roi et non pas à une famille en particulier. Quant à l’endroit où il sera logé… L’enfant vit ici depuis un moment déjà et son jeune âge le rend particulièrement vulnérable à de multiples déplacements sur les routes. Nous serions bien avancés s’il devait mourir de maladie. Il a besoin de stabilité et d’un endroit sain pour grandir, s’épanouir et devenir un grand roi. Je suis d’accord avec vous que la situation est actuellement délicate, mais j’ai ouvert la porte à des discussions, j’attends maintenant qu’ils se manifestent autrement qu’en hurlant dans les rues. Donc, tant que ça ne sera pas réglé, même si vous me menacez, je ne pourrais pas vous aider et j’en suis désolé.

Elle espérait ne pas apparaître comme une duchesse faible et sans pouvoir, même si c’était le cas présentement. Son plus gros problème, c’est qu’avec les hommes d’Arichis, Tibéria ne pouvait rien faire. Il fallait absolument qu’Arichis soit là pour discuter et peut-être arriver à un compromis. Il n’était pas totalement dénué de raison de toute façon.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeLun 29 Aoû 2016 - 17:03




Bien que les paroles de la duchesses firent frémir le représentant Scyléen de colère, notamment car elle agissait comme si elle avait ma moindre autorité pour discuter de qui ou non devait avoir la garde du roi alors même que son mari l'avait enlevé aux bon soins de son tuteur légitime, elle avait au moins la décence de se montrer moins obtuse que son époux... Et de montrer un intérêt pour le bien être du roi... Si seulement il avait la moindre autorité sur les hommes qui avaient laissés le roi être emmener sans escorte, ils auraient tous été jetés au trou !

Mais comme tout acte diplomatique inclus des sacrifices, il ravala sa hargne, souffla un bon coup et fit son possible pour adopter un ton plus courtois.

« Vous n'avez certes pas totalement tort sur le contexte, votre Altesse... et je dois même avouer que certains de vos arguments font tout à fait sens. Cet enfant a à peine plus d'un an et il ne serait pas sage de lui imposer de nouveaux voyages alors qu'il commence à s'habituer aux lieux... Et celui qui a la garde du roi peut certes en obtenir des pouvoirs non négligeables... Il faudra exposer cela en réunion du conseil de régence... Mais vous avez tort sur vos prérogatives. »

Il fit deux pas pour essayer d'oublier définitivement la position explosive qu'il allait devoir gérer au retour également avant de reprendre, aussi calmement que le lui permettait la grosse veine qui palpitait sur sa tempe.

« Cet enfant à un tuteur. Un tuteur légal et reconnu. En l'enlevant de la garde de Cléophas d'Angleroy, aux yeux de toute la cour votre mari n'a pas agi différemment que s'il l'avait enlevé aux soins de ses parents, comprenez-vous ? Ni vous, ni votre mari n'avez le droit de discuter son retour parmi sa cour. Si discussion sur la répartition d'une nouvelle garde ou sur toute autre modalité de son éducation il doit y avoir, cela ne pourra se faire que lorsque l'enfant sera de nouveau auprès de son tuteur et non tant que la plupart d'entre nous auront l'impression que vous faites pression sur la cour pour obtenir ce que vous voulez au détriment du bien-être de sa Majesté.

Si vous ne pensiez réellement qu'à la sécurité de cet enfant, vous le rendrez rapidement et nous pourrons tous en rester là sans vous en tenir rigueur. Je suis moi même partisan d'une garde royale composée de ressortissant de différents fief et je serai content de pouvoir vous compter parmi nous lorsque cette discussion sera amenée sur la table. Mais si vous vous entêtez pour quelque motif que ce soit, cela prouvera les craintes de tous les sujets de sa Majesté... »


Cette fois, une réelle étincelle de compassion s'alluma dans le regard de cet homme alors qu'il regardait un peu plus posément la duchesse. Elle semblait non seulement affectée, mais également soumise à une grande fatigue... Et il se demanda soudain à quel point elle subissait le joug des décisions de ce mari qui avait tant fait parlé de lui jusque là.

« Je suis navré que votre charge se soit trouvée alourdie en si peu de temps... Je sais que le désordre ambiant n'est pas réellement de votre fait, mais la cour royale en est encore moins responsable. Comme je vous l'ai dit, votre Altesse, c'est une affaire très épineuse dans laquelle vous vous êtes engagée et j'aimerai, pour le bien de tous, qu'elle puisse en rester là. Pour cela, l'enfant doit être ramené dans notre aile du palais, dans la chambre qu'il connaît depuis son arrivé. Il doit retrouver une garde approuvée par la cour royale, il doit être confié de nouveau à ses nourrisses et ses précepteurs ne doivent plus lui apparaître comme dangereux au point de devoir être gardé en permanence par des hommes en arme. Des missives sont déjà prêtes à partir aux quatre coins du royaume pour dénoncer les agissements de votre mari et donner l'alarme... Je peux peut-être vous obtenir un jour de plus pour faire changer votre mari d'idée, reprendre les hommes de votre garde en main ou que sais-je encore... Mais c'est là tout ce que je peux faire tant que l'enfant ne sera pas de retour là où est sa place... »





HRP

En parlant avec les différents partis, il est apparu qu'une partie de ce RP était fondé sur une incohérence.

Alors que nous le pensions absent, Cléophas était présent au Palais lors des événements décrits dans les postes précédents et ce depuis plusieurs ennéades.

Ce personnage ayant la garde de Bohémond et étant un PJ, il aurait été normal de lui laisser jouer le déroulement de la tentative d' ''enlèvement'' du jeune Roi plutôt que d'autoriser le fait que ses PNJs soient joués par un autre et se rangent forcément du côté d'Arichis d'Anoszia.

Cependant, Cléophas a renoncé à jouer la situation initiale de l'enlèvement du roi et, bien qu'il soit toujours le bienvenu pour reprendre le jeu de la cour royale s'il le souhaite, nous laisserons le RP en l'état.
Ce qui a été joué dans les Rps précédents au sujet de Bohémond est définitivement entériné.

Bon jeu à tous.

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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeLun 29 Aoû 2016 - 17:09

-          A L’ASSASSIN ! AU MEURTRE ! LE ROY !
 
La clameur venait d’un courtisan ysarain déboulant en trombe dans la salle où Arichis recevait le rapport du capitaine du guet sur les possessions des familles Camarata, Pasi et Celini en ville et leurs clients. Les familles n’ayant pas rendu hommage étaient connus, et leurs tentatives de protestations étaient mal vu pour ceux souhaitant continuer à exercer leurs commerces et affaires en toute tranquillité. Mais la protestation était là, et Arichis ne pouvait pas le nier. Angelina devait d’ailleurs rencontrer le patriarche Giovanelli pour le convaincre d’un retour au calme tandis que Tibéria avait envoyé des missives à la bande de félons se faisant appelés les Vrais Soltaris. Le couple ducal avait la loyauté des deux tiers des seigneurs, et seuls les seigneurs du Bétis avec le port de Boniverdi leur tenaient tête.
 
« Les Vrais Soltaris ? »  Demanda le duc en se levant de sa chaise, main sur le pommeau de son épée offerte par la cousine de la duchesse. L’épée des Soltariels.
 
Un garde entra dans la pièce aussitôt ne laissant pas le temps au courtisan de répondre. L’épée de celui-ci était tachée de sang.
 
-          Non Votre Altesse, enfin pas directement… Mais il s’agissait de la nourrice du roi, l’ancienne que vous avez congédiée.
 
Arichis contourna son bureau et fit signe au capitaine de le suivre. Ils marchèrent vite en direction du donjon du roi, le garde à leur hauteur.
 
-          Elle a essayé de stranguler le roi, elle était là sur autorisation du Chancelier, nous l’avons laissé passer car c’est le Chancelier quand même… Un carreau d’arbalète à l’épaule l’a éloigné du roi.
 
L’Anoszia jeta un coup d’œil au Poniti qui avait un air grave et qui les accompagnait sans un mot. Puis reporta son attention sur le garde qui continua de déblatérer son rapport alors qu’ils s’approchaient du donjon.
 
-          Nous l’avons soumise à la question avant qu’elle ne rende l’âme Altesse. Je crains que l’Angleroy ait noué une alliance contre nature avec les Vrais Soltaris…
-          C’est si bête et désespéré. Le roi n’étant plus sous sa garde, le Princillon a prit peur de perdre tout ce qu’il avait si vilement acquis et pour saper votre autorité Altesse, il a préféré éliminer le roi, se reposer sur sa principauté, garder son indépendance, et tirerait profit vis-à-vis du chaos qu’il aurait alors instauré partout en péninsule. C’est à la fois de la folie… et du génie… Déclara le Poniti en prenant la parole pour la première fois.
 
Arichis restait l’air grave. Il avait apprit depuis très longtemps à cacher ses émotions et il ne devait pas crier victoire déjà. Ils accélèrent tous les pas pour arriver devant les appartements de Bohémond qui reposait dans son berceau tranquillement, entouré d’une vingtaine de gardes dans sa chambre. Tous des Dracaenas. Alors que devant le bâtiment entier, les gardes de l’Anoszia maintenaient un cordon de sécurité.
 
« Où est Cléophas maintenant ? »
-          Votre neveu, Gildério est parti l’arrêter accompagnés de gardes. Le palais a été verrouillé messire, et il serait sage de faire de même avec la ville.
-          Je m’en charge messire.  
     
Le capitaine remit son heaume et s’en alla donner ses ordres afin que la capitale subisse le même sort que le palais. Cléophas était entre ces murs et allaient se faire arrêter par les gardes du duc, plus nombreux. La ville était occupée par les différents corps armés sans que la milice ne soit appelée en renfort.
 
« Très bien. Ne laissez personne s’approcher du roi, je suis le seul à être autoriser à entrer ici, m’avez-vous compris ? Aujourd’hui vous avez sauvé le roi mes sieurs. Continuez. » Félicita Arichis en s’adressant à la fin à tous les gardes présents dont les familles allaient être récompensés.
 
Descendant du donjon pour se rendre à la salle d’audience où son épouse recevait une délégation scylléenne. Arichis appela cette fois-ci en renfort les gardes ysarois qui l’avait accompagné jusqu’à la capitale et décida de rentrer en la salle, interrompant les discussions alors que Tibéria venait tout juste d’émettre une proposition au Marissi.
 
« Votre Altesse. Mes seigneurs. Pardonnez-moi de vous interrompre mais j’ai une nouvelle grave. On a attenté au roi. » Il leur laissa le temps de digérer la nouvelle avant de reprendre. « Comme vous le voyez, j’ai bien fait de le mettre sous ma garde car aujourd’hui nous ne savons même plus qui sont nos alliés de nos ennemis. L’Angleroy nous a tous trahi en envoyant son assassin, à l’heure où je vous parle il est en état d’arrestation pour son odieuse tentative. Il nous a amputé de Merval, il a souhaité nous amputé de notre roi pour ne pas perdre son maigre pouvoir. Rassurez-vous mes seigneurs, le roi est sauf. Quant à vos inquiétudes, ne vous inquiétez pas le roi ne restera plus sous ma garde. Comme vous le savez, avec l’aide de ma belle-fille Méliane de Langehack, Diantra a été pacifiée et c’est la Capitale des Hommes qui doit abriter le Roi des Hommes. Quant à l’Angleroy, il sera jugé par un conseil de ses pairs pour son crime. »     
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeMer 31 Aoû 2016 - 1:38

HRP:


Tibéria voyait bien que le Scyléen était dans un grand état d’agitation. Il avait du mal à tenir en place, son visage s’empourprait et une grosse veine battait à ses temples. S’il ne se calmait pas rapidement, il risquait une crise d’apoplexie. La duchesse craignait qu’il n’explose de colère, mais certains de ses arguments semblaient avoir fait mouche et il se voyait forcer de le reconnaître. En même temps, il aurait pu difficilement la contredire sur le fait que celui qui aurait sous sa responsabilité le jeune roi se retrouverait en position de force et qu’il serait facile d’en abuser. Du même coup, elle venait de mettre en lumière les possibles motivations derrière les agissements de son époux lorsqu’il avait renvoyé Cléophas et changé tout l’entourage du jeune roi pour des gens relevant seulement de lui. Tibéria était raisonnablement certaine que ce n’était pas la réelle intention d’Arichis, mais qu’en savait-elle réellement? Après tout, elle ne connaissait pas si bien son époux, mais elle le savait dévorer d’ambition… Non, il avait surement une bonne raison derrière tout cela, mais il n’avait tout simplement pas eu l’occasion de lui en parler encore. Durant ces derniers jours, ils avaient passé très peu de temps ensemble, trop occupés chacun de leur côté à régler les problèmes, à apaiser les inquiétudes des gens qui les soutenaient et à faire en sorte que le palais ne flambe pas complètement suite à l’épisode de la cuisine. Non, il devait y avoir une explication. Arichis ne pouvait pas être assez stupide pour risquer de se mettre à dos les nobles de la cour royale, non?

Le problème n’en sachant pas avec certitudes les raisons derrière les agissements d’Arichis, c’est que Tibéria avait tout intérêt à ne pas laisser voir qu’elle était dans l’ignorance. Elle n’était duchesse que depuis quelques jours et elle était déjà forcée de mentir. Décidément, rien n’allait comme prévu, mais Tibéria était prête à faire ce qu’il fallait. Elle devait protéger les intérêts de Soltariel et ceux de son époux. Ses propres intérêts devenaient très secondaires dans cette histoire et elle était prête à faire de grands sacrifices pour la pérennité du duché. Son dévouement et sa sincérité semblèrent toucher Michaelo Marissi dont le regard trahissait une réelle compassion. Il était prêt à lui faire gagner un peu de temps pour ramener Arichis à la raison, mais que la situation était très épineuse et qu’elle devait être réglée au plus vite pour éviter des conséquences plus fâcheuses encore.

— Je vous remercie pour votre compréhension. Croyez-moi, je suis parfaitement consciente de l’image que provoque une telle décision prise par mon époux et je m’en serais passé. Néanmoins, je peux vous assurer…

Tibéria n’eut pas le temps de terminer sa phrase. Sur ces mots, Arichis entra dans la salle accompagnée de quelques hommes. Elle le regarda d’abord sans comprendre et lorsqu’il annonça qu’on avait attenté à la vie du petit roi, son visage se vida de toute couleur, donnant l’impression qu’elle allait tourner de l’œil. On avait attenté à la vie du roi sous son toit… Et puis quoi encore!? Est-ce que tous les dieux s’étaient soudainement retournés contre elle? Malgré l’urgence de la situation, Arichis avait pris les choses en main et le petit garçon avait eu une grosse frayeur, mais il allait bien. Soulagée par le sort de l’enfant, mais toujours ébranlée, Tibéria regarda le Scyléen qui devait certainement être lui-même sur le point de tourner de l’œil avant autant d’assurance qu’elle le pouvait. La nouvelle était si choquante que personne n’allait lui reprocher un léger tremblement dans la voix, surtout qu’elle était toujours aussi pâle qu’un drap.

— Il dit vrai. Mon époux a eu vent d’un probable attentat contre la vie du jeune roi. Malheureusement, le temps jouait cruellement contre nous. Nous devions absolument prendre une décision rapidement et très peu d’options se présentaient à nous. Nous avons donc pris le risque de ternir notre image auprès de la cour du roi en changeant son entourage et en assurant personnellement sa garde tout en l’abritant dans notre donjon plutôt que de l’envoyer ailleurs où il aurait été exposé sur les routes. Nous pensions que ce serait suffisant pour assurer sa protection où nous ferait au moins gagner un peu de temps pour poursuivre nos investigations, car les pistes étaient minces. En plus, les troubles à Soltariel depuis notre arrivée n’ont fait que compliquer encore plus les choses, nous forçant à multiplier les mesures radicales ce qui était loin de me plaire. Quant à avertir la cour de nos soupçons, nous avions toutes les raisons de croire que si l’information se rendait jusqu’à lui, le traitre risquait de prendre peur. Il aurait pu faire profile-bas pendant un temps avant de trouver un moment plus opportun pour frapper lorsque notre vigilance aurait diminuée. Mon cher monsieur, remerciez mon époux et louangez son sang-froid, car grâce à lui l’enfant-roi est toujours vivant. Pardonnez-nous d’avoir si odieusement omis la vérité, mais tout cela était dans le but de le protéger. L’enfant sera rendu à Diantra tel que vous le souhaitez.

Elle jeta un regard à Arichis, lui intimant silencieusement d’appuyer ce qu’elle venait de dire sans sourciller.

— Cléophas d’Angleroy, vraiment? Oser s’attaquer à un enfant… Tibéria serra le poing, le choc ayant laissé place à la fureur. Elle pouvait accepter beaucoup de choses, mais pas que l'on s’en prenne à un enfant. J’espère que le courroux de la cour sera à la hauteur de l’ignominie de l’acte.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeJeu 1 Sep 2016 - 3:24

Je ne dirais pas que les jours se ressemblent à Soltariel. Ce n’est pas exactement ce qu’on attendrait d’une ville suderonne : suffisamment animée pour qu’on y ait quelque chose à faire, calme pour qu’on puisse n’y rien foutre. Il y a toujours un truc à faire dans cette foutue cité, quelqu’un à surveiller, à intercepter, à garder –puisque personne ne piffe personne, évidemment, le Sud reste le Sud. Etre garde du Palais à Merval, c’est tellement, tellement plus simple. Déjà, personne ne peut entrer dans l’enceinte du Palais avec ne serait-ce qu’une dague –autant dire que ça allège la charge de travail- et comme le silence y est obligatoire, on sait obligatoirement dès qu’il y a un problème. C’est-à-dire que si quelqu’un crie, au risque d’y perdre la vie, on se dit qu’il se passe quelque chose d’urgent. Un homme une fois, enfin ce n’est pas moi qui l’ait vécu, c’est un camarade, s’était mis à crier derrière une prostituée qui, apparemment –mais on n’est pas très sûrs de ça- l’aurait envoûté, je ne sais quoi. Eh beh le type : zigouillé. C’est simple. Du coup tout le monde reste plutôt sage. Mais Soltariel…On n’ose même pas raser les murs de peur que quelqu’un s’y soit caché pour nous poignarder dans le dos. Et les derniers jours ont été horribles…

Pour commencer il y a eu l’enlèvement du Roy –disons ce qui est, c’est un enlèvement. Je n’ai jamais vu qui que ce soit aller tuer trois gardes, frapper une nourrice et lui arracher le gosse des mains pour le protéger, ou alors on n’a pas exactement la même notion de protection de ce côté du petit golfe. Si je dis ça c’est parce que je l’ai vu. Le gamin, enfin Sa Majesté pardon, se promenait sur les murs, comme souvent. Et comme Serafein l’a ordonné, pendant que le gamin – le Roi, le Roi, enfin pendant qu’il est sur les murs, tous les autres gardes s’éloignent, pour qu’il soit bien certain que personne ne puisse attenter à sa vie. Je n’ai jamais été à Diantra mais apparemment les couloirs sont tellement étroits et il y a tellement de monde là-bas que le Roi ne sortait jamais des appartements de sa mère. Enfin c’est ce qu’on m’a dit, après je n’y étais pas, mais c’est un de mes camarades qui est un des gardes de Serafein qui l’a vu.  Et ce jour-là donc, j’étais dans une des cours du Palais, je faisais ma ronde tranquillement quand j’ai vu un tas de gardes se précipiter vers le Roi. Vu qu’ils étaient de la livrée de l’Anozsia, je n’ai pas réagi. Sauf qu’ils se sont mis à trucider les gardes de Serafein. La nourrice est devenue hystérique évidemment, en même temps c’est une femme il ne faut pas s’attendre à du sang-froid de sa part, elle a essayé de taper quelques-uns des gardes et de retenir le droit et elle s’est faite frapper au visage par un des gardes. Ça a été tellement rapide que personne ne s’en est rendu compte.

Evidemment, qu’est-ce que je me dis dans ce cas-là : je fonce ! Je m’apprêtais à partir mais un de mes camarades, Photion, m’a retenu et m’a dit que ce serait encore pire si je le faisais. Je lui ai dit qu’ils venaient de tuer nos frères, il m’a dit « Je sais, je sais, mais si on s’implique encore plus, ce sera une vraie boucherie »  alors moi je lui ai dit « Boucherie ! Mais c’est déjà une boucherie » et là il me répond « Ce n’est pas notre décision, va voir Serafein et dis-lui ce qu’il s’est passé » alors là j’ai un peu gueulé, forcément, mais au final, il avait raison le gars. Je suis allé voir Nissa avec eux, j’ai vu les corps encore chauds de mes camarades morts en martyrs et la pauvre bonne femme, toute frêle, elle ressemblait un peu à la mère du petit, c’est peut-être pour ça qu’il l’appréciait. Même carrure, mêmes cheveux, je ne sais pas si Serafein avait fait exprès de la choisir pour ça. En la ramenant à la Chancellerie j’ai parlé avec elle, elle m’a tout expliqué – de toute façon j’avais déjà tout vu- en sanglotant. Après ça j’ai couru dans la Chancellerie pour trouver Serafein.  

Là j’entre, les genoux en compote, je suais…mais je suais comme un porc dans une forge, au moins ça oui. Je passe les cloîtres, je monte les escaliers, à la fin j’étais encore plus suant, j’avance vers les quartiers du Chancelier, forcément je dois me justifier devant les frumentaires. C’est les grands avec les hauts cimiers là, les gardes personnels de Serafein, ils sont en noir et rouge. Donc je montre patte blanche, enfin patte noire et rouge…non ? C’est une petite blague…non, personne ? Bon…ça ne peut pas toujours marcher…Ahem ! Donc là, j’arrive dans le corridor qui donne sur l’appartement de Serafein et je l’entendais parler avec quelqu’un, ça devait être le Protasécretis. Normalement je ne devrais pas mais je me suis quand même arrêté avant, pour écouter ce qu’ils disaient et ils parlaient d’une chrysobulle, je n’ai pas trop compris. Serafein a dit quelque chose comme « Versez l’or, Théo… » je ne sais plus comment il s’appelle, Théopylès je crois ? Non ? Théophylacte ? D’accord. Donc Serafein disait « Versez l’or, Théophylacte » et Théophylacte a répondu « Vous êtes sûr, Serafein ? Une fois qu’elle sera scellée… » « Elle sera irrévocable, oui. Je sais encore ce qu’est une chryso…chryso »  Je suis désolé je ne sais plus comment ça se dit non plus ça. Chrysobulle ! Donc Serafein répond ça : « Je sais pas ce qu’est » enfin non «Je sais ce qu’est une chrysobulle, Théophylacte »  plutôt et l’autre a soupiré. Sur ce, je me suis présenté aux deux, le Protasécrétis –ça je sais le dire- m’a lancé un regard noir…il n’avait pas l’air très heureux de me retrouver. Serafein, lui, souriait comme souvent quand il nous reçoit et il m’a dit très avenant « Qu’y a-t-il Théodite ? » . Moi, évidemment, je ne réponds rien…En même temps j’étais choqué ! Donc le Protasécrétis s’impatiente et me dit « Si ce n’est pas important, vous n’aviez rien à faire ici, dégagez ! »  et là, Serafein lui prend le bras et lui dit « Théophylacte, laissez, il n’y a aucun problème »  et là je réponds « En fait Serafein, si, il y en a un » , lui me dit « Lequel ? »  et là je lui explique tout.

Théophylacte a laissé choir ce qu’il tenait et s’est retourné vers Serafein. Gros, gros, gros silence. Et là, Serafein s’est levé, très calmement et m’a dit « Amenez-moi Nissa, ils risqueraient de s’y prendre à elle. Mettez-là ici, sous bonne garde. Et apportez aussi les corps, je veux être présent pour les embaumer. »  puis il s’est retourné vers l’autre et lui lance « Théophylacte, allez prévenir les membres des cours, royale et ducale, et faites revenir tous les mervalois, du simple page au capitaine de garde. » qui lui dit « Et vous, Serafein ? » « Je dois envoyer une lettre à Sainte Berthilde… »  il dit. Moi, forcément, je m’exécute. Entretemps je raconte aux gardes du Palais ce qui s’est passé, les gars n’étaient pas au courant de grand-chose forcément. Déjà qu’ils n’ont pas supporté que tous les ydrilotes je ne sais quoi débarquent et essaient de faire régner leur loi alors quand je leur ai dit ça, d’abord ils ne m’ont pas cru, puis quand ils ont vu les corps…les faces qu’ils tiraient je vous jure. C’était marrant à voir mais l’occasion l’était moins alors je n’ai pas rigolé, forcément –il faut être digne à un moment.

A partir de là ça a été un foutoir monstre ! Entre les soldats ydrilites, ydrilotes je ne sais plus, qui commençaient à patrouiller un peu partout, la garde ducale qui ne savait pas trop quoi faire et qui à défaut bah…se laissait faire et nous qui essayions de réunir tout le monde à la chancellerie tout en patrouillant un minimum quand même. Entretemps, il y a des scylléens qui ont débarqué avec leur garde et toute la suite, comme on s’y attend. Le Chancelier les a reçus un temps, il leur a expliqué la situation enfin j’imagine, je n’y étais pas je devais garder les écuries. Non parce que les vrais soltaris, je n’ai rien contre eux, ce n’est pas mon problème, mais ils ont commencé à faire un bordel monstre aussi ceux-là. On se réveille, plus de carottes ; le lendemain, tous les draps du palais sont tâchés ; le jour d’après c’est pire – il y a même un de mes gars qui a abandonné la garde pour rejoindre le culte de Nééra parce qu’il a cru que c’était des démons et qu’il fallait s’en protéger. Ce n’est pas inclus dans l’entraînement tout ça ! Moi je suis garde, donc je garde, je ne dois pas lutter contre des marivaudeurs qui s’amusent à nous voler nos poireaux et nos patates. Bon, cela dit, à Merval je ne faisais pas grand-chose non plus mais là…et puis gérer tous ceux qui deviennent tarés comme l’autre. Je ne suis pas hospitalier quoi !

Passons. Bordel, bordel, chacun essaie de ne pas se faire crever par l’autre. Serafein étrangement n’a pas réagi. Certains gars n’ont pas compris et sont allés demander des explications et il leur a simplement répondu que l’heure n’était pas venue. Allez comprendre. Moi, je n’ai pas douté. Enfin personne n’a vraiment douté, on lui fait confiance depuis le temps. Il a échappé à l’incendie de Diantra, il a réussi à retrouver le Roi, à le sauver, il a rendu sa gloire au pays. Ce n’est peut-être pas le type le plus gentil de la péninsule mais bon…il faut voir ceux qu’il se paye. Que des guignols ! Ce n’est pas contre vous, mais que des guignols ! Quand ce ne sont pas tout simplement des meurtriers de sang froid comme l’autre baron là, celui qui a massacré tout le monde à Chrystabel. Je n’y étais pas, aucun de nous n’y était. Nous on est juste partis à Diantra puis quand l’incendie s’est déclaré on a escorté une bonne partie des réfugiés à Merval – d’ailleurs ça a été un bordel ça aussi. Ce n’est pas la question je sais, mais je contextualise les choses. Sinon personne n’y comprend plus rien. Déjà que j’ai du mal.

Non, là où on a commencé à avoir sérieusement peur c’était…eh beh c’était hier. On sentait déjà que l’ambiance puait – les ydrilasiens nous regardaient très bizarrement, tous retranchés dans le donjon du vieux, pardon du duc - ah ça non plus ? Du quoi alors ? Archonte ? Bon, de l’archonte –je ne sais pas ce que c’est mais passons. Disons qu’il fallait vraiment être demeuré pour ne pas se rendre compte que quelque chose n’allait pas. D’habitude, même si on ne se piffait pas trop, les gardes ydrifigassiens patrouillaient aussi…dans un rayon de trois cent mètres autour du donjon, certes, mais ça restait de la patrouille. Là ils avaient plutôt l’air de se préparer à quelque chose. Pas un chat. Pas un. Enfin pas un que j’aie croisé. Et puis ce matin, enfin tout à l’heure il y a une heure à peine on était tous à la Chancellerie comme toujours quand un type de la garde ducale est venu nous voir, essoufflé et a essayé de tout nous expliquer. Ce n’était pas très claire, il a dit « La nourrice a tué le Roy, ils veulent votre peau » , c’était assez brouillon. D’instinct, on se poste devant les portes et moi, comme je cours vite, on m’a envoyé passer le mot à Serafein. Et là, croyez-moi, j’ai couru – mais couru comme jamais. Je me repaie les cloîtres, les escaliers, je retourne dans le même couloir –là les frumentaires, je les ai envoyés paître- et je tombe dans l’appartement de Serafein qui n’était pas avec Théophylacte mais avec cet homme très étrange, celui qui a des cheveux très longs noirs, tellement menaçant qu’on dirait qu’il n’y a pas de lumière autour de lui…Le mage, oui. En revanche, cette fois-là je n’ai rien entendu. Le mage lui chuchotait dans je ne sais quelle langue et Serafein répondait, toujours aussi impassible.

Quand il me vit dans l’ombre de la porte, il me fit signe d’entrer, ce que je fis et là j’ai expliqué que des gardes allaient arriver, le temps de traverser tout le Palais. Ils se regardèrent tous deux, parlèrent encore en je ne sais quoi et…je ne sais pas, c’est comme s’ils étaient au courant. Je veux dire, Serafein était si serein, ils se sont contentés d’un signe de tête et Serafein alla enfiler la tunique sacrée de Clavel…C’est la première fois que je la voyais…C’est impressionnant vous savez. Depuis que je suis petit on me parle de cette tunique, c’est la relique mervaloise par excellence. Elle date de plus d’un cycle et elle est toujours aussi blanche, toujours aussi parfaite. La légende dit qu’elle aurait été tissée dans du poil de gryffon et c’est ce qui expliquerait sa longévité. Personnellement je ne sais pas si c’est possible mais la voir en vrai, d’aussi près…et de voir Serafein l’enfiler avec autant de respect, de lenteur, aussi cérémonieux alors que dehors on était à deux doigts de la guerre totale. Il y avait quelque chose de liturgique, vraiment, à ce moment, j’avoue que je me suis senti comme quand j’étais petit et que j’entrais dans le temple des Cinq sur le port…je n’avais rien à dire tellement c’était silencieux. Quand il vit que j’étais toujours là, il me dit « L’ami, va prévenir la cour, dis-leur de tous rejoindre nos amis scylléens dans la salle d’audience où Son Altesse Impérialissime et Illustrissime doit les attendre. ».

Ni une, ni deux, j’obtempère et je fais passer le mot. Dans la minute, il y a bien deux à trois cent personnes qui se précipitent hors de la Chancellerie, pendant que dans le même temps le mage, qui sortait de je ne sais où, distribue à certains gardes des pots en terre cuite. Etrangement, j’y ai eu droit, sans trop comprendre puis je l’ai senti et croyez-moi, ce n’est pas le genre de chose qu’on aimerait avoir en main. C’est là que j’ai compris que ça allait chier des bulles. Je n’ai pas eu le temps de tourner la tête que Serafein arrivait, en vêtement de gloire, sa tunique immaculée qui lui descendait jusqu’aux pieds et l’enveloppait entièrement, au point qu’on ne voyait plus ses bras. Sa couronne ceignait son front admirablement, sa fibule ornée d’un rubis brillait comme une braise ardente sur son vêtement, son collier d’office paraissait taillée par des fées tellement il était fin – il avait de la gueule quoi. Autour de lui on était une quoi…une quinzaine, une vingtaine peut-être –le reste étant parti avec la cour- et il nous explique que le Palais, comme tous les palais suderons, regorge de raccourcis, de fausses cloisons plein de termes architecturaux incompréhensibles. Tout ce que j’ai compris, c’est que nous allions contourner toutes les cours, passer d’escalier en souterrain, de souterrain en escalier, un petit périple pour nous éviter l’inconvénient de croiser les sicaires qui nous cherchaient – et qui seraient trop occupés sans doute à passer au crible toute la cour pour penser chercher ailleurs.
J
e comprenais ce qu’était venu faire le mage : c’est lui qui connaissait le chemin. En bon mervalois, Serafein avait le sens des choses cachées. Il devait avoir demandé à son acolyte de lui trouver toutes les passes anciennes, secrètes, pour se prémunir d’une intrusion indésirable. Je doute qu’il se soit imaginé qu’il s’en serve pour s’échapper. Disons d’emblée que nous étions très loin de ce qu’on peut s’imaginer des passages secrets. La plupart consistaient en des petits espaces entre les murs des différentes époques, le reste du temps, on s’amusait à chercher les moyens les plus détournés dans le Palais pour éviter les cours intérieures. Une fois le tout passé, nous n’étions pas très embêtés. Le mot n’était pas passé à toute la garde ydriphasienne que Serafein était recherché, nous on se contentait de dire qu’on rejoignait la cour à la salle d’audience et le Serafein étant Régent, ils n’osaient pas vraiment bouger le petit doigt. Quant à la garde ducale, ils n’étaient pas vraiment plus rassurés que nous…

Après ça n’a été qu’une question de minutes. Nous étions à peine en retard par rapport à la cour qui venait d’arriver dans la salle –bondée d’ailleurs. Les portes étaient grandes ouvertes, on entendait tout ce qui se disait notamment cet empaffé d’Anozsia qui accusait Serafein d’avoir tué le Roy ou je ne sais plus. Honnêtement, je ne sais pas ce qui m’a empêché de lui lancer ma lance à la gorge. Enfin si, le mage. Cet homme était tellement…enfin, il ne renvoie pas une énergie normale. Il a senti que je n’étais pas très partisan de la paix, il m’a touché le bras et d’un coup j’ai été pris d’un frisson qui m’a calmé. Comme nous entendions tout, Serafein a préféré tout écouter, caché dans le couloir – même le discours de la femme de l’Anozsia qui, comme toute femme qui se respecte, prenait le parti de son époux. Et là elle venait à peine de finir de parler que Serafein débarqua dans la salle en disant :

« Eh bien, eh bien, eh bien ! Regardez ce que je viens de trouver. Un traître. Un traître qui demande pardon, ce qui, mes bons amis, est fort rare ! Dites-moi Arichis, j’ai croisé quelques uns des membres de la garde en arrivant, enfin croiser est un grand mot. Tout au plus les ai-je aperçus, de loin, ce palais est un tel labyrinthe que pour s'y retrouver face à face…Dites-moi, cela vous prend souvent d’arrêter le Régent et Grand Chancelier du Royaume ? Loin de moi l’idée de mettre fin à cette farce burlesque mais il va falloir quelques explications…»


Ca m’a fait rire. Je n’étais apparemment pas le seul. Pendant ce temps nous avions reçu l’ordre de bloquer toutes les portes. Comme il n’y en avait que deux, ça n’a pas été très compliqué. Je ne pense pas qu’il ait pu se passer quoi que ce soit avec la presque totalité de la cour présente, mais Serafein était prudent. Une fois que nous étions tous positionnés, le reste des gardes et nous, je me suis permis d’écouter.

« Eh bien Arichis, que se passe-t-il ? Je sais bien que nous avons eu des hauts et des bas et que la communication peut être difficile entre nous – ce qui est manifestement le commun des péninsulaires, mais de là à proférer de telles inanités…nous vivons tout de même sous le même toit, même si la cohabitation risque de s’avérer mal aisée, ce qui me rend marri. Mais enfin, j’ai entendu parler de justice alors : me voici ! Cela tombe bien pour un Chancelier, puisque sans moi aucun jugement de cour ne peut être déclaré valide. J’admire votre recherche si sincère de vérité, Arichis, vraiment, c’en est presque louable, et la cour sera d’accord avec moi sur cela. Si vous aviez montré un tel zèle à défendre le Roy quand ses territoires étaient attaqués par votre fils, il aurait été en bien meilleure position. »


A ce moment, les scylléens dans la salle commencèrent à grommeler entre eux. C’était évident. Je n’étais pas scylléen mais enfin l’humiliation qu’ils avaient subie fit trembler toute la côte.

« Néanmoins, Arichis, permettez-moi de remettre quelques petites choses au clair. Il ne vous appartient pas d’ouvrir un procès, ni d’arrêter qui que ce soit en dehors de votre seul château, qui est à Ydril jusqu’à preuve du contraire. Il vous appartient encore moins de me faire comparaître devant un tribunal en tant que pair du Royaume, ce que je ne suis pas. Et si vous le faites en tant que je suis Régent et Chancelier, permettez-moi de vous dire que cela ne fonctionne pas dans ce sens-là. Mais enfin je serai bon joueur : vous désirez un procès ? Eh bien allons-y ! »


Serafein nous fit un signe, à ce moment tous les gardes se mirent à bloquer les portes. Ce qu’il y a bien dans les châteaux suderons c’est que les seigneurs y sont si froussards que chaque salle est barricadée.

« Eh bien quoi ? Nous sommes tous deux membres du Conseil de Régence et selon les lois du Royaume, ils ne peuvent se juger qu’entre eux. Fort heureusement, je vois que nous avons là nos deux membres manquants, les seigneurs Athénodore le Nélénite et le Diradour de la Garnaad. Cela dit je pense qu’il serait de bon ton que la cour assiste à ce procès et voie par elle-même qui ici est intègre et qui ne l’est pas. »


Serafein fit de la place autour de lui, gardant ses gardes à proximité. Et il enchaîna.

« Comme je suis encore Grand Chancelier et Régent de ce Royaume, que vous le vouliez ou non puisque cette décision n'incombe qu'au Roi, que vous n'êtes pas encore Arichis, vous me permettrez de me défendre de vos accusations. Oh, vous me pardonnerez d’avoir fermé les portes, il y a tellement de monde déjà que pour des raisons de sécurité je ne peux me permettre de laisser entrer d’autres gens. Comme nous sommes civilisés, je gage que nous n’aurons pas besoin de plus de mes gardes pour que l’ordre soit tenu…

Dame Tibéria, il me serait aisé comme vous de lever le ton et froncer le sourcil mais restons calmes et prenons ceci avec sérieux, pour ce que ça l’est. Vous savez, dame Tibéria, comme vous j’ai eu vent de beaucoup de choses, n’est-ce pas la merveille du commérage me direz-vous ? J’ai entendu dire que le mage Nakor cachait des enfants momifiés dans sa barbe blanche. J’ai entendu dire que le Roy Trystan s’était crevé les yeux pour ne pas regarder sa femme, qu’il trouvait trop laide et bourrée de capitons. J’ai entendu dire que du feu coulait dans mes veines, dites-vous ! J’ai même entendu dire que tous les Anozsia étaient mi humains-mi dragons…j’attends encore de voir vos ailes. J’ai entendu dire aussi que les Wandrais n’avaient pas de tête et que leur visage était au niveau de leur poitrine. Et que les femelles nains n’existent pas – encore que cette dernière est sans doute vraie. Ma chère, si je devais citer le nombre d’idioties que j’ai entendues dans ma vie, nous ne dormirions pas de l’ennéade.

Je vous concède ceci toutefois : la rumeur d’un attentat est autrement plus grave que celle disant que le sire de Velteroc est un sodomite. Ce que je peine encore à comprendre c’est que, dans la précipitation, vous avez décidé d’agir et d’aller protéger un Roy qui était déjà sous bonne garde. Tous les membres de la cour ici présents pourront témoigner du soin que j’ai toujours mis à protéger le Roy, entouré sans cesse de gardes, veillant à ce que personne ne puisse s’approcher à moins de dix pas de lui. Dans ce cas-là, Tibéria, dites-moi, pourquoi vous être tant inquiétée pour la sauvegarde d’un Roy pourtant si bien protégé et vous être, par excès de zèle, attribué une mission qui ne vous incombait pas ?

Pour être zélés, vous l’avez été. En sont témoins les dépouilles des gardes massacrés par vos propres gardes. Je conçois que dans la précipitation certains gestes puissent être brusques, ma Dame, mais enfin, de là à percer tempes et carotides…vous en conviendrez que cela demande de l’adresse. Vous voyez, c’est là que je commence à avoir du mal à comprendre et peut-être vous tous, mes frères scylléens, diantrais, mervalois pourrez m’aider car je ne suis qu’un homme et quelque chose m’échappe sans doute mais à quel moment la protection d’un homme passe par le massacre de ses gardes ? »


Personne ne mouftait.

« Je vois que vous êtes aussi perplexes que moi, cela me rassure. Vous dites n’avoir eu d’autre option ? Pourquoi ne pas m’avoir informé de cette rumeur, moi le tuteur personnel du Roy, chargé de sa sécurité ? Pourquoi ne pas en avoir informé ma garde ? Ou la garde ducale, plutôt que de perpétrer le massacre par vos propres sbires ? J’ai beau essayer d’y voir plus clair, cela ne colle pas. Ce que je vois, c’est que des hommes de main de votre époux voulant s’emparer du Roy, trouvant une résistance en la personne de mes gardes, chargés de la sécurité du Roy, décidèrent de les massacrer et d’enlever l’enfant –qui se répandait en cris et en pleurs, ce qui est rarement gage de confiance venant d’un bambin- en esquintant sa nourrice au passage.

Mais ne tirons pas de conclusions hâtives. Je devrais plutôt vous remercier, chère amie. Eh oui ! En enlevant le Roy, vous m’avez donné suffisamment de temps pour mener ma petite enquête car, appelez-ça de la déformation professionnelle mais, lorsque je sens que quelque chose ne tourne pas rond, je creuse. Et il ne m’a pas fallu creuser profondément. Vous dites que les rumeurs se propagent jusque votre donjon, ma chère ? Figurez-vous que par le truchement de la Déesse des Airs, elles se propagent aussi dans l’autre sens mais je garderai cela pour plus tard, si vous le voulez bien.

Alors évidemment nous sommes du Sud, nous aimons le drame et l’épique et tout de suite nous parlons d’assassinat ! Si encore vous aviez accusé un sbire de Nimmio, un sbire du fils Anozsia qui s’est acharné à détruire l’entier héritage du Roy…cela aurait pu être plausible, mais enfin…moi, régicide ? Rendez-vous au moins compte, l’un et l’autre, de l’absurdité de cette affirmation ? Si j’avais voulu tuer le Roy mes bons amis, je l’aurais fait depuis longtemps. J’en suis le tuteur depuis la mort d’Aetius – c’est vous dire si je connais le bambin et il me connaît plus que sa propre mère. Tous ici présents, ma cour comme celle du duc défunt comme celle du Roy pourront témoigner des soins que j’ai prodigués à l’enfant, à quel point je le traitais comme mon propre enfant. Pas un jour que je passe sans me promener avec lui. Possédant sa propre nourrice, ses propres gardes, toujours amusé, jamais épuisé ni lassé. Je vois dans l’assemblée tellement de seigneurs, de courtisans qui nous virent ensemble dans les jardins, qui virent l’affection que je donnais au Roy et qu’il me rendait. Ne vous y détrompez guère, Tibéria, je pense comme vous : oser faire ce qui a été fait à un enfant est d’une profonde lâcheté et j’espère que la cour rendra un jugement à la hauteur de cet acte profondément terrible.

Mais enfin, moi, régicide ? Par les Dieux, qui est allé récupérer l’enfant sur les rivages d’Olyssëa, qui lui a fourni une garde pour traverser la Péninsule et rejoindre Soltariel ? Etait-ce vous, Tibéria, vous Arichis ? Qui lui a fourni amour, charité, affection ; qui lui a fourni une foule de gardes, des goûteurs pour chacun de ses plats, une seule nourrice qu’il chérissait comme sa mère ? Etait-ce vous encore ? Vous me répondrez que je n’avais pas d’occasion de le tuer alors ? Ce serait mal connaître l’histoire…A Diantra déjà j’aurais pu assassiner l’enfant si je l’avais voulu, dans un de ces moments où Arsinoé plongeait dans ses léthargies mélancoliques. Et quand elle prit la fuite pour Sharas, j’aurais pu ne rien faire, laisser l’enfant mourir sur une plage et être dévoré par les monstres marins. Et quand encore il descendit la Péninsule, j’aurais pu ordonner qu’il soit assassiné sur le chemin, mettant cela sur le compte des bandits qui essaimaient l’Eraçon. Et quand encore Kahina prit la fuite, j’aurais pu assassiner Bohémond – si je l’avais voulu mais, devinez quoi chers amis, je ne l’ai jamais voulu.

Vous direz que je n’avais alors aucun motif ? Croyez-vous que la situation ait changé depuis la fuite d’Arsinoé ? A l’époque, j’étais déjà tuteur du Roy et Grand Chancelier, autant qu’aujourd’hui. Vous me direz que j’attendais que soit signée par le Roy l’indépendance de Merval ? Dans ce cas, pourquoi ne l’ai-je pas tué dès le départ de Kahina ? Vous prétendrez que je souhaitais initier le chaos dans la Péninsule ? Mais enfin mes seigneurs, seriez-vous aveugles au point de ne pas voir que le seul à causer des problèmes ici, ce n’est pas moi, mais bien Arichis. L’embrasement de Soltariel que nous vivons chère Tibéria n’est pas qu’un concours de circonstances. Il ne s’est pas produit en même temps que votre arrivée mais à cause même de votre arrivée. Qui a causé le remous et l’insécurité du Palais ? Etait-ce ma présence ? Dois-je dans ce cas vous rappeler la paix régnant ici avant que ne débarquassent les sbires de votre époux ? Et à l’échelle de la Péninsule, je pourrais encore continuer...là encore, permettez-moi de garder cela pour plus tard. »


Serafein se frotta les mains avant de marcher en petits cercles, sondant ceux qui l’entouraient. Il se retourna vers l’Anozsia et lui dit.

« Maintenant, répondons à vos accusations, sire. Pour l’assassinat, ma réponse est déjà donnée, en partie. Nous avons conclu que je n’avais ni motif, ni profil pour assassiner l’enfant. Quant à être disponible, il y a là une centaine de personnes pouvant témoigner qu’au moment de cette prétendue tentative d’assassinat, j’étais dans mes quartiers, travaillant sur ma correspondance. Que m’imputez-vous donc, Arichis ? D’avoir trahi le Roy, d’avoir tenté de l’assassiner tant mon pouvoir était maigre ?

Vous savez quoi, Arichis ? Je pense que l’histoire est bien différente de la vôtre. Regardons, mes frères, objectivement et considérons lequel d’Arichis ou de moi aurait trahi son Roy. Serait-ce moi, qui l’ai sauvé d’une mort certaine à Olyssëa, serait-ce moi encore qui ai insisté auprès de Kahina pour qu’il trouve refuge ici, et reste le Roy ? Serait-ce moi qui ai supporté l’opprobre, les insultes, la division même de la Péninsule plutôt que le renier ? Serait-ce moi qui il y a quelques temps encore défendait sa légitimité auprès du sieur de Saint Aimé ? Serait-ce moi qui n’ait pas lancé mes soldats contre les vôtres afin qu’il soit toujours en paix ? Moi, le semeur de chaos, je serais donc ici à vous offrir le procès que vous demandez pour éviter de semer une panique plus grande encore ?

Serait-ce moi, le traître, ou vous Arichis ? Mes seigneurs, ouvrez bien vos oreilles car l’affaire est longue et aussi tortueuse que l’esprit de l’Anozsia est vicieux. Rappelez-vous de ces conversations que j’eus avec vous, Arichis, durant lesquelles je vous admonestais et vous ordonnais de régler l’épineuse question de votre fils, Oschide d’Anozsia ? Quelles furent vos réponses ? Un silence total. Qui était le traître alors, Arichis ? Qui a laissé son propre fils attaquer la flotte du Roy et ses propres côtes en terres de Scylla, d’Edelys et de Nelen, coûtant la vie à de nombreux marins, dont votre fils, sire Athénadore, je me souviens vous avoir reçu les yeux voilés de deuil. Pendant que votre fils ravageait des côtes portant votre nom, je recevais les pères des hommes qu’il coulait ? Je vous ai expressément ordonné de ramener votre fils à la raison et je n’ai eu droit qu’à votre mépris et à votre insubordination.

Vous aviez parlé de rumeurs, ma chère Tibéria ? En voici une pour vous. Non content de couvrir les exactions de son fils, Arichis lui aurait offert à lui et à son épouse, outrepassant les droits de son office, la paix du Roy, sans aucune condition. Dans un pseudo-secret, cet homme a usurpé le nom du Roy et mon propre nom pour octroyer à son fils, le destructeur et traître Oschide d’Anozsia, la paix complète du Roy et le retour dans la communion des pairs. »


A ce moment, je vis les visages de beaucoup se ternir. La délégation de scylléens, qui avaient été le plus lésés par les attaques d’Oschide serrait les mâchoires.

« Vous croyez que ce soit tout ? Qui encore faisant fi de mes ordres a occupé la cité de Diantra, répandant la terreur dans ses rues, au nom du Roy ? Qui a élevé des gibets, qui a crucifié au nom du Roy des hommes qui s’étaient battus pour lui, avaient résisté au siège pour lui ? Je parle bien de vos frères mes seigneurs de Diantra, de votre famille sire Diradour, vous qui êtes rescapé des champs pourpres ; vos frères, vos seigneurs les pauvres, ceux qui n’eurent pas le temps de fuir l’avancée du Boucher ! Ayant subi les affres de sa guerre, ils durent aussi subir les tortures et la tyrannie de ce seigneur qui se prétend ami du Roy et qui terrorise ses enfants ? Vous me dites que je n’ai pas tenté de récupérer Diantra ? Et vous avez bien raison, je n’ai pas tenté de la reprendre par la force pour ce que je suis un homme de paix – le même homme qui proposa la paix au Boucher, celui avec qui vous avez implicitement pactisé en acceptant le cadeau que vous fit votre fils !

Vous voyez mes seigneurs, je crois que l’histoire diffère de ce que l’on veut nous faire croire. Je crois que cette cour n’a pas été gangrénée par un mais deux traîtres et là a été mon erreur : de penser que Kahina agissait seule. Mes seigneurs, il vous souvient je crois de ce temps encore proche où le sire d’Anozsia croupissait dans des geôles pour sa perfidie et de l’inaction de votre regretté Duc à son égard ? Il vous souvient du peu d’estime que Maciste avait à l’égard d’Arichis – comme nous tous d’ailleurs. Maintenant, demandez-vous, mes frères ? Qui a libéré Arichis de sa prison ? Kahina. Et qui lui a donné la dignité de Grand Argentier du Royaume ? Kahina, encore une fois. N’est-il pas étrange qu’Arichis soit rentré dans la grâce de votre duc au moment même où celui, étrangement était cloué dans sa couche ? Pensez donc, mes frères : Arichis et Kahina partageaient un trait, une ambition insatiable. L’un comme l’autre n’ont désiré qu’une chose, grandir en pouvoir et en puissance. Ils n’ont jamais eu le Royaume à cœur, moins encore le Roy. Lorsque Kahina me proposa de trouver refuge en votre terre, j’acceptai pensant avant tout à la survie du Roy. Pour elle, cette peste estréventine, notre venue était du pain bénit – s’accaparant le Roy elle s’assurait une légitimité et devenait la Régente de toute la péninsule. Elle me crut insouciant, tenta de m’éloigner de la cour et des affaires de l’Etat, me confiant d’inutiles missions voulant m’anesthésier comme elle le faisait du Duc.

Tout aurait pu fonctionner, la paix revenant dans le Sud du Royaume et Kahina n’étant pas de nature particulièrement belliqueuse. Elle avait tout prévu, à la perfection, tout sauf une chose : ma pugnacité. Ami des lettres, j’ai secrètement intercepté toutes celles qu’elle envoyait confirmant mes soupçons. Voulant trouver votre duc, Maciste, je le vis à moitié endormi dans la mort, incapable de répondre. Je lui avouai la vérité sur son épouse qu’il chérissait tant, sur cette ignoble monstre qui l’empoisonnait à petit feu – il ne voulut pas me croire mais je vis combien il en fut touché. Quant à elle, lorsqu’elle se rendit compte que je savais et que j’allais comme aujourd’hui d’Arichis, la traduire en justice devant la cour, craignant la disgrâce et la perte de tous ses titres et de sa gloire, elle avorta son œuvre, assassina cet homme qu’elle n’aimait que pour son nom et s’enfuit avec la seule chose chère à son cœur : son enfant.
Jamais elle ne fit mention d’Arichis dans ces courriers malheureusement et je ne pris pas garde. Pourtant tout est limpide !

La chute de Kahina vint de ce qu’elle refusait plus que tout de récupérer Diantra, ce qui nous est apparu comme une folie et cela causa sa chute. Qui en aurait profité le plus, si je n’avais pas été présent ? Arichis. Ce que ne voient pas les orgueilleux c’est l’orgueil de ceux dont ils s’entourent et cette peste était si ambitieuse qu’elle en oublia l’ambition d’Arichis qui ne réside pas dans la gloire du Royaume mais celle de sa famille. Pourquoi aurait-il couvert ses traîtres d’enfants autrement ? Aussi quand la question de Diantra fut soulevée, Kahina ne dit rien pensant trouver du soutien en Arichis – elle savait ! Elle savait qu’Arichis collaborerait avec son fils et récupérerait pour lui la cité ! Ils seraient apparus comme des sauveurs, leurs positions en auraient été consolidées, et le sang Anozsia n’aurait pas été versé. Or, c’est ce jour-là que tout bascula. Arichis vit une occasion de se débarrasser de l’estréventine et il ne la manqua pas, se mettant dans le rang de ses accusateurs, de ceux qui désiraient la capitale du Roi car il savait bien qu’elle tomberait entre ses mains.

N’est-ce pas ce qui s’est produit ? Que vous propose-t-il, cet Arichis ? Que le Roi retourne dans sa capitale, à Diantra, sans préciser que cette capitale est actuellement tenue par ses hommes et ceux de son traître d’enfant ! Ne voyez-vous pas comme il tente de faire rentrer en grâce cet homme, présentant la capitale comme un cadeau que nous offre Langehack –qui manque bien de nous rendre et Nelen et Edelys- alors que cette cité est sous son contrôle. Le Roi doit être dans sa capitale dit-il ? Et qu’y-a-t-il fait ? Gibets, pals, crucifix, famine, terreur ! En déplaçant le Roi à Diantra mes seigneurs, vous ne feriez que le retirer de la chambre de l’Anozsia pour le placer dans son débarras.

Le problème n’est pas Soltariel, Arichis, le problème c’est bien vous. Les scylléens n’ont rien contre la cité mais c’est bien pour éviter que vous ne preniez en otage le Roi dans ce qu’il reste de son palais –autant vous dire presque rien- qu’ils désirent le rapatrier dans le seul pays qui appartienne encore au Roi et qui n’ait pas été attaqué par votre enfant : Scylla. Vous voudriez que l’enfant vive au milieu des ruines, de la suie, dans un palais à la toiture trouée et vous dites être inquiet quant à sa santé ?

Mes frères, si aujourd’hui le sire d’Anozsia s’acharne tant à accumuler autant d’absurdités à mon acontre, allant jusqu’à envoyer ses soldats me chercher dans ma Chancellerie pour m’arrêter, ce n’est pas car j’ai fait mal mais car je lui ai fait du mal. Kahina comme lui ont compris que tant que je serais là, ils ne pourraient se hisser en haut de l’échelle et réclamer la Couronne. Aussi maintenant il invente cette histoire de tentative d’assassinat, pensant pouvoir me retirer mes pouvoirs, lui qui n’est plus rien et je peux vous jurer qu’une fois mes pouvoirs retirés si vous le jugez, mes frères, il trouvera un moyen de sacrifier l’enfant pour devenir régent. Car cet homme, vous le voyez tous, ne recule devant rien pour assouvir sa soif de pouvoir. Il prétend se soucier du sort d’un enfant quand il martyrise une cité et s’apprête à faire de même à Soltariel ? Est-ce là un homme que vous qualifieriez de bon, de charitable, est-ce le père que vous désirez vraiment pour votre duché ?

Alors pourquoi maintenant ? Parce qu’il lui fallait ce mariage avec Tibéria pour justifier l’invasion de Soltariel par ses troupes, lui qui pare la capitale du Royaume de ses couleurs en ôtant celles du Roy…est-ce là ce que vous attendez d’un homme qui prétend agir pour le bien dudit Roy ? Sans ses gardes ydrilotes, jamais il n’aurait pu massacrer mes hommes et enfermer le Roy, il savait bien que j’aurais répliqué et il savait aussi que je ne le soutiendrais pas dans cette lutte qui vous oppose à lui en ce qu’étant Prince de Merval, les affaires de Royaume ne me concernent pas ; et étant Chancelier et Gardien du Royaume, je ne m’implique que dans ce qui concerne la sécurité du Roy et l’application juste des lois de la Couronne dans ce Royaume, lois qu’il n’a cessé de bafouer non pour le bien du Roy ou de la Couronne mais dans l’intérêt de sa famille.

Voilà, mes frères, le visage de ce tyran qui se prétend duc. Je dis bien prétend car, en vertu des lois organiques du Royaume qu’il prétend servir, tant qu’il n’aura pas prêté serment devant le Roy, aucune autorité ne lui sera reconnue sur le duché de Soltariel. Aussi mes chers gardes, ne vous sentez pas forcés de le servir sous prétexte qu’il est votre suzerain – il ne l’est pas et je gage que par respect pour l’héritage du défunt Maciste et la gloire de Soltariel, vous serez aussi neutre en ce sujet que je le suis. Cet homme qui aujourd’hui se prétend rogue et puissant est l’archonte du petit comté d’Ydril. Rien d’autre. Pas même Grand Argentier puisque, le Roy en vertu des pouvoirs qui sont naturellement les siens, avant sa captivité a jugé bon de lui ôter cette dignité. »


En disant cela, Serafein fit signe à Théophylacte qui lui remit un rouleau. Le dépliant, on vit pendre un sceau en or. Ah ! C’était ça la chrysobulle !

« Voyez-vous Arichis, en enlevant le Roy comme vous venez de le faire, bien loin de m’ôter mon pouvoir, vous venez de le renforcer. Il ne tiendrait qu’à moi en tant que pleinement Régent, maintenant que le Roy est dans l’incapacité de suivre l’avis de son Conseil et dans l’incapacité de régner, de vous retirer nom, titres et dignités. Néanmoins, j’invite tous les seigneurs à vérifier par eux-mêmes que ceci est bien le sceau du Roy, scellé dans l’or, gage d’immuabilité et d’éternité et que ceci est antérieur de quelques jours à l’odieux enlèvement. Quant au reste de ce qui est mentionné, je me garde de le divulguer préférant voir ce que décideront les seigneurs du conseil afin que justice soit faite. »


Théophylacte tendit en grand la bulle. Certains seigneurs s’approchèrent pour vérifier que le sceau était celui du Roy. De toute façon il n’y avait que le Roy qui puisse sceller à l’or, l’opinion était vite fixée sur l’origine du papier.

« Si je puis conclure…la rumeur court encore que l’assassin aurait été la nourrice de Bohémond ? Maintenant expliquez-moi comment la nourrice, frappée par vos gardes, aurait voulu se représenter devant votre donjon et comment vos gardes l’auraient laissée passer, elle qu’ils venaient de violenter. Comment encore serait-elle parvenue à rester seule avec l’enfant si vous dites si bien le protéger ? Quand encore l’enfant m’était confié personne ne restait seul avec le Roy, mesure basique. Et vous tenteriez de nous faire croire qu’une femme seule, haïssant vos hommes et haïe d’eux, aimant le Roy plus que tout, aurait cherché à le tuer ? Et qu’elle s’en serait sortie ? Enfin, rien ne me dit qu’elle en sortie d’ailleurs, je pense bien que vous aurez tout fait pour châtier cette vilaine pécheresse. J’aimerais tout de même m’arrêter sur quelque chose qui me dérange…

Nous n’avons pas tous une fibre paternelle mais enfin, pour avoir vu vos bambins à deux ans passés, vous savez bien qu’on ne peut les laisser seuls dans une pièce car un accident est vite arrivé. Dans un donjon qui plus est, aussi humide que celui de Soltariel. Entre les pierres mouilles, les cheminées leurs suies, leurs tisons, entre les meubles et les bestioles qui rôdent, sans compter les marches trop nombreuses…pardonnez-moi mais laisser un enfant seul dans un pareil environnement quand ils trottent avec autant de maladresse et s’agrippent à tout ce qu’ils tiennent c’est soit de la méconnaissance, soit de la malveillance et comme nous savons que vos enfants ont tous bien grandi –physiquement j’entends- on ne peut mettre cela sur le coup de la méconnaissance.

Cela me rappelle une affaire lorsque j’étais alors justiciaire de Diantra. Entre les querelles de marchands me surprenaient parfois quelques affaires sordides comme la capitale sait en provoquer. Un homme reprochait à son épouse, tous deux de bonne extraction, le meurtre de son fils et unique héritier, qui porterait l’honneur de sa famille, son héritage…vous connaissez l’histoire. La femme tenait un discours très clair qui ne souffrait aucune faille – l’enfant avait fait une mauvaise chute. L’homme l’accusait de l’avoir écrasé le crâne à l’aide d’une pierre. Comme ses affaires traînent en longueur, je trouvai un homme digne de me trouver le corps et me l’apporter. L’enfant n’était plus dans un état très digne, mais son crâne ne portait aucune marque de blessure bien violente. L’affaire aurait pu s’arrêter là pourtant je ne pouvais me résoudre à passer à autre chose. L’homme n’avait rien à gagner à perdre son fils mais il ne lâchait pas le morceau. Je fis venir toute la maisonnée pour en apprendre plus, quand je découvris que la maîtresse de maison ordonna à la nourrice qu’elle laisse l’enfant seul quelques heures. Il n’en fallut pas plus pour que l’enfant se prenne les pieds dans un tapis, trébuche et se fracasse le crâne contre le sol.

De même que l’époux ne gagnait rien à perdre son fils et accuser sa femme dites-moi : que gagnerais-je à assassiner le Roy et à vous accuser ? Ai-je jamais eu peur de votre influence ? Dans ce cas pourquoi vous aurais-je conservé jusqu’au conseil, hésitant jusqu’à maintenant pour vous en expulser ? Que gagnerais-je encore à ce que meure le Roy ? J’ai combattu pour lui, pour son nom, son trône, sa Couronne – il est la seule raison pour laquelle je suis encore là. Le Roy mort, un conclave des pairs aurait été organisé, un nouveau Roy élu et il aurait été libre à lui de me choisir à ses côtés ou non. Vous en revanche, vous gagneriez tout à ce que cette accusation ridicule soit prise au sérieux : sans moi, rien ne vous empêcherait plus d’être Régent, puis un autre accident serait très vite arrivé. S’il n’est pas déjà arrivé, cela étant.

Vous voyez, là où je ne peux me résoudre à vous croire, c’est que le Roy n’a jamais eu qu’une seule nourrice, la douce Nissa au blanc visage que plus d’un ici ont connue et croisée. Et voici que cette femme aurait soit disant réussi à pénétrer dans le donjon le plus gardé de la Péninsule pour aller visiter un Roy qui lui avait été arraché et serait décédée par la suite des tortures qui vous auraient permis d’en venir à cette conclusion que je serais l’instigateur de ces  chimères ? Le problème, mes bons amis, est que Nissa n’a jamais cherché à entrer dans ce donjon et qu’elle est encore moins décédée… »


Serafein fit signe à une personne dans l’assistance. Elle s’avança devant tout le monde – c’était elle. Son visage était encore tuméfié des coups qu’elle avait reçus.

« Mes amis, je ne vous la présente pas. Personne parmi vous n’a vu le Roy sans la voir à ses côtés. Maintenant je vous demande à vous, chers seigneurs du Soltaar et du reste du Royaume, croyez-vous vraiment que cette femme ait pu être capable de ce dont on l’accuse ? Et croyez-vous aussi que je le sois ? A moins que vous ne croyiez que tout ceci, ces accusations, ces signes de coup d’état sont la vérité.»


Le silence remplissait la salle, on aurait pu le couper avec la lame d’un couteau. Serafein reprit, bien calmement. Il paraissait épuisé par sa diatribe, nous l’étions tous. On pouvait voir sur les visages la réflexion, la consternation, l’incompréhension – on voyait bien ceux qui avaient compris et ceux qui cherchaient encore à comprendre ; les dégoûtés et les enragés. Pour moi, je n’avais d’yeux que pour lui, morceau d’homme flottant dans sa chasuble couleur de neige :

« Maintenant que nous avons tous exposé notre cas et que j’ai répondu à l’accusation des seigneurs Arichis et Tibéria…mes frères, je ne puis que vous appeler au vote. Comme vous êtes tous présents, il serait dommage de se priver de vos voix à tous alors, nous n’aurons qu’à décider à main levée, selon les vieilles traditions de qui juge le sire d’Anozsia coupable de trahison, de conspiration, de sédition et de crime de lèse-majesté puis n’auront qu’à lever la main ceux qui me jugent coupable de trahison et de tentative de régicide…Quant à vous, dame Tibéria, il ne tiendra qu’à vous de décider si vous soutiendrez votre époux ou non, la cour vous laissera le choix et nous mettrons votre discours sur le coup de l’émotion et de la fidélité à votre mari, non de votre participation à ces activités. Sire Athénagore le Nélénite, Sire Diradour de la Garnaad : en tant qu’éminents membres du Conseil, l’un Grand Amiral, l’autre Grand Sénéchal, je crois qu’il est tout à fait digne que vous votiez les premiers, personne n’y verra d’objection. »


Les deux hommes s’avancèrent. L’Amiral, un scylléen, était un bonhomme grisonnant aux yeux bleus, le teint halé et les traits rudes. L’autre, le Sénéchal était beaucoup plus jeune. Ils allaient voter quand Serafein les stoppa et dit :

« Attendez ! Point de procès sans témoin. Arichis, vous avez eu le vôtre en la personne de votre épouse. Permettez-moi d’en prendre un au hasard parmi l’assemblée qui pourra témoigner que ce que je dis est véridique. »


Il parcourut toute la salle du regard et s’arrêta vers moi. Ses yeux transpercèrent les miens.

« - Toi il m’a dit.
- Moi ?
- Oui toi, approche-toi.
- D…devant ?
- Oui. Approche-toi et dis-leur ce que tu as vu. »


Alors je me suis approché tout penaud et j’ai commencé à dire :

« Je ne dirais pas que les jours se ressemblent à Soltariel… »
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeSam 3 Sep 2016 - 16:31

Il régnait une agitation monstrueuse dans la salle d'audience du palais de Soltariel. Elle avait été construite avec tout le faste, l'opulence et le gigantisme habituels des soltariis mais même ainsi, elle peinait à accueillir la majorité de la cour royale, sans compter les nombreux nobles et notables du palais qui dans un esprit très local c'étaient dis qu'il y avait de la lumière, des cris et qu'il leur fallait donc savoir de quoi il en retournait. Et si encore tout ces gens là avaient décidés d'être calme et réunis ici pour une quelconque cérémonie ennuyeuse, tout cela aurait été plus simple. Mais ils étaient réunis ici sous des circonstances exceptionnelles et par des intérêts dépassant leur simple personne. La salle était donc envahi par le bruit, les derniers arrivants essayant de comprendre de quoi il en retournait, certains criaient leur colère ou leur soutien et finalement peu de monde écoutait vraiment. Au moins jusqu'à ce que débarque Cléophas, qui était le centre de la majorité des conversations. Le brouhaha s'éteignit lentement et le silence se déploya depuis l'endroit où se tenait le Chancelier jusqu'à atteindre les bords les plus éloignés de la salle. Il était accompagné des quelques soldats mervalois qui essayaient d'aller bloquer les portes. La surprise permit à celui-ci de placer quelques mots qui furent aisément audibles par tous. Cela dura jusqu'à ce que l'archonte d'Ydril ne réclame à ses gardes d'arrêter celui qu'il accusait de trahison.

« Il suffit Arichis ! » C'était le seigneur Athénodore qui venait de parler : « Vous vouliez Cléophas, il est là et il n'essaie pas de s'échapper. Mais vous le laisserez dire ce qu'il a à dire. C'est ainsi que se passe un procès. »

Cela ne suffit pas à calmer l'archonte et tandis que le chef des soldats ydrilotes s'apprêtait à donner l'ordre fatidique, il croisa le regard de celui qui accompagnait l'Angleroy. Il n'y trouva pas la mine résolue de l'homme d'arme prêt à défendre son seigneur, ni celle effrayé du courtisan qui craignait pour sa vie, comme il s'y attendait. Non, malgré l'apparente neutralité de l'homme, le regard lui donnait la désagréable impression de sourire. D'un petit sourire confiant qui mettait l'ydrilote mal à l'aise. Lequel commença à réfléchir sans le vouloir.
Lui revint en tête que chaque noble, même dans le sud, recevait habituellement une formation aux armes. Il prit conscience du nombre très élevé de nobles dans la salle et, par conséquence, d'épées et de mains pour les manier. De la présence de la fière et ombrageuse délégation scylléenne, tendue par les récents événements. De celle des soltariis qui ne supportaient pas tous très bien la présence des gardes ydrilotes. De celles des anciens nobles des terres royales, qui voyaient d'un mauvais œil les agissements de son seigneur et tenaient en haute estime Cléophas.
Il vit du coin de l’œil la garde ducale qui s'approchait des portes sous la surveillance vigilante des mervalois, n'osant attaquer de peur que leur duchesse fut blessée dans la précipitation. Fut un temps où la garde aurait arrêté les mervalois en quelques minutes, connaissant chaque passages obscurs de ce palais. Mais depuis le massacre intégral de celle-ci lors de la rébellion contre Margot, et entre tous les incidents qui avaient agités le palais, elle n'avait pu regagner l'efficacité qu'elle avait perdue alors.
Tous ceux qui avaient l'habitude du combat se regardèrent en chien de faïence pendant quelques secondes, leur esprit traversés par la même pensée : dégainer l'épée mènerait au bain de sang.

Et puis, pensa l'ydrilote, ce qu'on lui avait demandé jusque là c'était de mener Cléophas au procès. Et il y était. Il lui semblait désormais beaucoup plus important de garantir la bonne sécurité de son seigneur que de déclencher un massacre. Aussi ne fit-il rien et ses hommes non plus, ce qui laissa Cléophas libre de continuer son discours aussi longuement qu'il le désirait. Bien sûr la tranquilité des débuts ne dura pas aussi longtemps, elle, et il ne fallut pas grand de temps pour que l'assemblée ne recommence son brouhaha, tandis que certains applaudissaient à l'occasion, que d'autres insultaient et que des débats très vifs se faisaient entendre en marge des principaux protagonistes de la scène. Mais de nombreuses oreilles, particulièrement celles des plus puissants et des plus influents, étaient encore toutes attentives à ce qui se disait entre le Chancelier et le Grand Argentier. On écoutait ce que chacun avait à dire, parfois on ponctuait une phrase bien sentie d'un hochement de tête ou d'un haussement de sourcil. On écouta jusqu'au témoin de Cléophas. Certains arguèrent qu'il s'agissait d'un des propres gardes du Chancelier mais après tout Arichis avait-il le moindre témoignage de gens n'étant pas entièrement acquis à sa cause ? On écarta rapidement cette objection.

Finalement, les seigneurs Athénodore et Diradour conversèrent à voix basse entre eux. Le silence se fit, à ce moment là, nettement plus profond. Chacun essayant d'avoir l'air serein et sûr de lui, avec plus ou moins de succès, tout en tendant l'oreille pour essayer de comprendre des mots ou pourquoi pas des phrases. Au terme de conciliabule, le seigneur Athénodore s'avança un peu au centre de tous.

« Au vu de ce qui a été amené devant nous et de ce qui a été dit, il nous apparaît que les accusations lancées à l'encontre du seigneur Cléophas sont sans fondements et qu'il n'y a aucune preuve valide pour étayer leur véracité. Nous jugeons donc qu'aucune sanction n'a à être prise contre le sieur d'Angleroy et qu'il peut conserver ses offices et sa liberté de déplacement.
En revanche, il nous est apparut que les actes à l'encontre du Roi et de certains de ses conseillers, tout comme les motivations derrières ces actes, du seigneur Arichis sont extrêmement suspects. Il sera privé de ces offices au Conseil de Régence et devra résider à demeure sous bonne garde en territoire royal jusqu'à ce que nous ayons pu examiner plus en détails ce dont il est ou n'est pas coupable. Il est également sommer d'ordonner sur-le-champ la libération du Roi et la remise de celui-ci à ses vassaux scylléens qui, pour l'heure, seront les nouveaux responsables de sa sécurité. 
»

Puis il se tourna vers celle qui était leur hôte et la femme de leur accusé, la duchesse de Soltariel.

« Madame, de par votre récent retour et mariage, nous sommes portés à croire que vous êtes innocente et non responsable des actes de votre époux. En tant que Duchesse de Soltariel, vassale du Roi et notre hôtesse, nous vous demandons de solliciter vos hommes pour permettre que justice soit faites en ces lieux. »

Et un instant, ceux qui étaient pendus aux lèvres d'Athénodore se retrouvait pendus à celles de Tibéria. Au dehors de la salle, les gardes soltariis attendaient avec un mélange d'impatience et d'anxiété de connaître la réponse de leur duchesse tandis que les mervalois face à eux n'osaient pas se retourner malgré la curiosité.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeSam 3 Sep 2016 - 19:47


Jamais de toute sa vie Tibéria de Soltariel aurait autant aimé être à un autre endroit que dans ce bureau. Elle aurait voulu être au bord de la mer devant un lever de soleil, savourant la quiétude matinale en regardant l’astre lumineux s’élever au-dessus de l’horizon mouvant avec les goélands volant paresseusement tout autour. Elle aurait aimé sentir les vagues venir mourir à ses pieds et la brise marine caresser sa peau. Tout aurait été si simple. Malheureusement, la réalité était toute autre. Même si la pièce était relativement vaste avec un haut plafond et de grandes fenêtres, Tibéria avait l’impression que les murs venaient de se refermer sur elle. Elle se sentait opprimée et avait du mal à respirer. Non… Elle devait se calmer. Dans la tempête, elle devait agir avec grâce et élégance même si ça devait être la dernière chose qu’elle fera dans cette vie. Tibéria comprenait mieux maintenant pourquoi sa sœur avait fait tout cela. Elle ne l’excusait pas, bien entendu, mais c’était facile de perdre la tête et d’agir stupidement quand on est bousculé de tous les côtés. Pour une personne normale, un homme du peuple par exemple, les choix qu’il fait chaque jour de sa vie n’ont qu’un impact très limité, souvent seulement sur lui et peut-être sa famille. Pour Tibéria, chaque décision pouvait avoir un impact en cascade totalement délirant et ce qui avait commencé par quelques mots pouvait se terminer par une guerre terrible. Elle comprenait l’ampleur de la situation. Elle apprenait à la dure ce que ça signifiait. Perdue et déboussolée, elle ne s’était pas réellement imposée jusqu’à maintenant, laissant le courant la porté en essayant de limiter les dégâts. Garder le silence était un choix en soi et ça s’était révélé être une grave erreur de sa part.

Tibéria avait tenté de protéger son époux de sa propre décision en inventant à la volée une histoire. Elle osait croire qu’il avait fait cela pour le bien-être du petit roi, mais était-ce réellement le cas? Qu’en savait-elle au final sur ses motivations? Ils n’avaient discuté de rien. Rien n’avait été clairement établi sur ce qu’ils envisageaient pour l’avenir de Soltariel. Il est normal pour un dirigeant de vouloir s’entourer d’hommes de confiance. Après tout, leur pouvoir n’était pas clairement établi et un assassin aurait pu se cacher parmi eux profitant de la première occasion qui se présentait pour les tuer. Toutefois, est-ce que ça justifiait de balayer du revers de la main, y compris la garde du petit roi et de rejeter cela sur la personne de Cléophas d’Angleroy, celui qui avait rempli son mandat fidèlement et qui aurait certainement eu plus d’une occasion de tuer l’enfant s’il en avait eu réellement le désir. Ce n’était pas étonnant que toute cette histoire ait soulevé l’ire de la cour royale qui voyait là un acte de trahison pure et simple. Tibéria ne pouvait pas le nier. D’ailleurs, le principal visé dans cette histoire venait d’apparaître, sortant de nulle part malgré la chasse à la sorcière qui venait de débuter dans le palais suite aux accusations lancées par Arichis. Il avait déjoué sa garde et se tenait là, défendant avec éloquence son innocence et en rappelant avec des mots criants de vérité : il n’avait pas le pouvoir de le traduire en justice ici. Évidemment, elle fut également rappelée à l’ordre. Personne ne croyait son histoire et elle n’en était pas vraiment étonnée. Tibéria accepta donc la critique en silence tout en sachant très bien que de s’énerver maintenant n’aiderait personne. Elle n’était pas du genre à contredire juste par obstination quelqu’un qui avait raison. Il faut savoir s’incliner dans la vie.

Il y avait beaucoup de choses dans le discours de Cléophas, mais une phrase retint particulièrement son attention : « Parce qu’il lui fallait ce mariage avec Tibéria pour justifier l’invasion de Soltariel par ses troupes, lui qui pare la capitale du Royaume de ses couleurs en ôtant celles du Roy… » Cela ramena Tibéria au tout début de cette histoire, alors qu’elle était encore à Thaar à essayer de trouver un sens à sa vie bouleversée. Elle se souvenait d’avoir vu sa tante dans sa chambre entourée d’esclaves à ordonner que l’on emballe ses affaires avant de déclarer triomphalement qu’elle lui avait trouvé un époux en la personne d’Arichis d’Anoszia. C’était un mariage qui devait arranger tout le monde : restaurer le nom de sa famille, mais également mettre quelqu’un sur le trône ducal de Soltariel. Tibéria avait accepté avec joie, voyant une opportunité inespérée de réparer les bêtises de sa sœur, mais aussi de faire le bien autour d’elle. Elle voulait être la voix de ceux que personne n’écoute. Arichis avait entraperçu la possibilité d’une phénoménale ascension dans l’échelle politique de la Péninsule en elle. Tibéria n’était réduite à un simple outil, rien de plus. Il l’avait toujours bien traité. La jeune femme ne pouvait pas lui reprocher d’avoir usé de violence sur sa personne. Il n’avait jamais été agressif ou abusif. En fait, il s’était révélé être un homme extrêmement charmant au point que Tibéria avait accepté de le suivre aveuglément. Néanmoins, les choses avaient changé en arrivant dans la capitale. Tibéria voulait croire que ce n’était qu’à cause de la situation. Ils étaient tous les deux soumis à un intense stress, mais les décisions parlaient d’elles-mêmes. Tibéria n’avait pas réellement été consultée sur tout. Arichis agissait, puis en avertissait la jeune femme qui se retrouvait obligée d’accepter. En fait, elle lui avait fait confiance comme on pouvait s’attendre d’une jeune épouse sans expérience et tout le monde ici l’avait compris. Tibéria aussi le réalisait et cette constatation lui faisait l’effet d’un bloc de glace qu’elle aurait avalé. Un poids lourd et glacial venait de se former dans son ventre.

Toujours plongée dans un profond mutisme, Tibéria écoutait, analysait et digérait tous les propos échangés. Il lui apparaissait de plus en plus clairement que la situation était sans issues. Arichis était allé trop loin dans ses actes et dans ses accusations. On ne se dresse pas contre la cour du roi sans une bonne raison et sans en subir les conséquences s’il y a abus. Dehors, les Vrai-Soltari allaient sans doute profiter de l’occasion pour définitivement les renverser. Son rêve n’aurait duré que l’instant de quelques jours et le goût de la défaite était amer sur sa langue. Elle ferma les yeux, essayant de faire taire les bourdonnements de conversations dans la salle. Une voix masculine s’insinua alors dans son esprit, pas plus haute qu’un murmure : « Il y aura maintes tempêtes et embuches sur ta route, mais tu ne dois pas avoir peur. Ton cœur est noble et juste. Défends tes idéaux avec bonté en acceptant la défaite non pas comme une fin, mais comme une leçon que la vie t’apporte. À la fin de ta vie, tu pourras alors regarder la mort dans les yeux sans avoir de regrets. Ne t’inquiète pas Tibéria, peu importe ce qui arrivera, tout ira bien… » Était-ce un rêve? Une tentative de son esprit délirant de lui donner un peu de courage. Elle ne se souvenait pas très bien de la voix de son père, mais ces quelques mots, même si elle était certaine de les avoir inventés elle-même en y collant une voix masculine, lui donnèrent beaucoup de réconfort. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, tous les regards étaient tournés vers elle dans l’attente d’une décision. En étant duchesse, Tibéria devait accepter la responsabilité de faire des choix même s’ils s’avéraient les plus terribles qui soient. Pourtant, en cet instant, elle était convaincue de sa décision et était étonnement paisible à l’idée de la prononcer.

Très lentement, Tibéria se leva de son fauteuil en intimant silencieusement à ses jambes de ne pas lâcher maintenant. Elle regarda tout le monde, tous les visages tournés vers elle en sachant très bien qu’ils ne voulaient entendre qu’une seule chose. Elle acquiesça d’un petit signe de la tête, puis déglutit pour faire passer la sensation d’avoir un truc de coincé dans la gorge.

— Je crois que je ne vais pas vous étonner en disant que je ne pensais pas me retrouver dans une position aussi délicate dès le début. Cette situation est infiniment malheureuse et mon cœur de femme s’émeut à l’idée qu’un jeune enfant, notre roi, se soit trouvé dans un grave péril. Il m’est clair maintenant que des abus ont été perpétrés et que d’essayer de les justifier ne ferait qu’aggraver la situation. Je déclare donc devant cette assemblée mon appui inébranlable pour sa Majesté Bohémond et, du même coup, désavoue les actes de mon époux qui a agi sans mon consentement ou en m’en parlant après que lesdits actes reprochés aient été perpétrés. Je vous fais confiance pour que la lumière soit faite sur ses évènements et soyez assuré que vous avez mon entière collaboration.

Tibéria était convaincue que c’était là les dernières paroles qu’elle prononçait en tant que duchesse. D’ici quelques secondes elle serait peut-être morte dans les débordements que provoqueront sans aucun doute ses propos, mais elle était en paix avec cette éventualité. Elle suivait ses convictions. Pour la première fois depuis son avènement, Tibéria exprimait clairement son allégeance plutôt que de se cacher derrière son époux en assumant ainsi ses actes. Non, elle ne pouvait plus faire cela. Évidemment, son cœur était brisé et elle n’éprouvait aucune joie dans ce qu’elle venait de faire comme le trahissaient ses yeux brillants de larmes bien que rien ne coulait sur ses joues pâles. Ce n’était pas le conte de fées qu’elle avait espéré, mais elle devait aller au-delà de ses intérêts pour celui de la majorité. Elle voulait protéger la paix, protéger le roi, du moins, elle tentait de le faire.
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeDim 4 Sep 2016 - 16:07

MP de Arichis concernant la réaction de son personnage:


La décision de la cour n'eut pas l'air de satisfaire l'Archonte en déroute... Pas plus que la déclaration de sa femme, et c'était tout a fait compréhensible. Cependant, là ou tous auraient attendus le minimum d'honneur d'un noble face à la justice du roi, il en appela à sa garde. Aussitôt, les gardes fidèles à l'Ydrilotes se précipitèrent vers lui pour le protéger tandis que la garde ducale se ruait plus vite encore de peur que quelqu'un s'en prenne à Tibéria. Des épées par dizaines furent dégainées par des mains gantées de cuir ou de mailles. Les femmes de l'assistance reculaient précipitamment, certaines avec de petits cris effrayés, d'autres avec toute la dignité à laquelle leur rang devait sacrifier… Et une grande partie des nobles suivit le même chemin.

Les gardes Ydrilotes baissèrent leurs lances et leurs boucliers sur ordre de leur archonte et commencèrent à avancer dans la foule. Dans le chaos, plusieurs hommes d'arme tombèrent. Les portes fermées restèrent closes jusqu'à ce que leurs gardes soient à terre. Dans le processus, plusieurs nobles furent blessés plus ou moins gravement, et lorsque finalement, la tortue de garde se retrouva à l'extérieur de la salle, des ordres bien précis fusèrent. En moins d'une heure, une volée de pigeons s'éclipsèrent du colombier.

C'est ainsi qu'Arichis d'Anoszia quitta le Palais en fugitif. La garde ducale et les soldats mervalois laissèrent passer son escorte armée pour ne pas déclencher de bain de sang, tout comme les gardes de la ville qui avaient été mis en poste pour leur fidélité. Absolument personne ne lui barra la route jusqu'à ce que les portes de la grande ville de Soltariel apparaissent devant celui qui en avait reçu les clefs à peine quelques jours auparavant.

Les gardes portes laissèrent approcher le convoie… Et refermèrent les portes. Alors que les gardes menaçaient leur ancien frères d'arme d'ouvrir eux-même la herse, la foule se massait étrangement dans les rues adjacentes.

"SOLTARIEL AUX SOLTARIS!!!"

La foule se rua en avant… mais contrairement à ce que les soldats avaient prévu, ce n'étaient pas de simples habitants. Ils se battaient en ordre, et bientôt la vérité apparue. L'homme qui avait pousser le cri de ralliement n'était autre que l'ancien capitaine du guet, ses suivants avaient été pour la plupart, dans la garde et le guet. Les gardes en factions sur les rempares alentours ne savaient sur qui tirer ou contre qui se battre… Et cela fini de dégénérer lorsque les gardes de la caserne la plus proche arrivèrent au pas de charge.

Une fois de plus, le chaos fut suffisant pour permettre à l'Anoszia de faire ouvrir la porte assez pour se glisser de l'autre côté avec quelques membres de sa garde. Isolé et sans monture, ils s'éloignèrent a grands pas, laissant derrière eux une ville bien trop occupée à se mettre elle-même a feu et à sang pour se soucier de lui. Il avait été convenu que des montures seraient trouvé dans le prochain village. La direction la plus sûre ? Celle d'Ydril.






Virgile avait beau être domestique au palais et ne prêter presque aucune attention à la politique si ce n'était pour savoir si la main qui tenait le fouet était de fer ou de soie, cette fois, il se trouvait dans une posture qu'il n'enviait pas... mais alors pas du tout. Bon... sa situation n'était particulièrement enthousiasmante de base, mais là... Être celui qui annoncerait ça à la duchesse... non... là... Il détestait l'idée.

Penaud, le regard baissé, il se présenta à la porte des appartements qu'on avait attribués à la duchesse sous le regard de sa garde ducale. Les portes et les alentours étaient gardées à toute heure du jour et de la nuit pour être sûr que personne n'essaierait d'attenter à sa vie. Et il savait que même lui, le vieux Virgile, serait escorté à l'intérieur par une armoire de métal... Si on le laissait entrer.

Par chance, la duchesse était là. Il osait à peine redresser son dos tordu pour lui jeter un humble regard par en-dessous. Elle était jeune et belle... ah... Ce qu'il aurait pu la désirer autrefois... Mais hélas, maintenant, même ses lombaires lui interdisaient de rêver. Plié en deux, il attendit que la jeune femme l'invite à parler... et même lorsque ce fut le cas, il resta près du sol par habitude.

« Votre Altesse, je suis envoyé par le Grand Sénéchal. Il m'a dit que ceci devait vous être remis dans les plus bref délais et que cela avait déjà été porté à la vue du Conseil de Régence... Et il s'en excuse. »


D'une main tremblante, il tendit un un petit coffret à cette maîtresse qu'il ne voulait surtout pas fâcher.

« Le Grand Sénéchal a dit que ceci a été trouvé dans le bureau de votre époux durant la fouille. »

Pourquoi avait-il fallu qu'il jette un coup d’œil là-dedans... Il ne pouvait plus s'ôter de l'esprit l'image et la texture de ce dessous au combien affriolant...





-Sire ! Sire !
-Que se passe-t-il ?!
-Un message de Pasi! Il dit que lui et ses hommes étaient en route pour rencontrer la duchesse dans le but de parlementer lorsqu'ils ont croisés le convoie d'Arichis d'Anoszia. Qu'il parte précipitamment de la cité leur paraissait de mauvais augure pour la sécurité de la rencontre avec la duchesse. Ils l'ont mis au arrêt messire ! Ils le ramènent à Soltariel ! Ils seront ici d'ici quelques heures.
-Néera…





L'homme, malgré les différents qu'il avait avec la jeune dame qui lui faisait face, se fendit d'une révérence toute galante.

« Dame Berontii, j'ai été désolé d'apprendre ce qui était advenu avant notre arrivé et je me félicite d'avoir put jouer un rôle dans le retour de l'Anoszia sous le giron de la justice du roi… Et d'avoir put aider à calmer les émeutes… Même si j'avoue que d'une certaine façon, je ne peux m'empêcher de voir dans ce malheur une façon de rétablir les légitimes pouvoirs des Soltaris sur nos terres. »

Debout, il devait dépasser Tibéria d'une tête, bien fait de sa personne, pas un accent dans sa voix ne trahissait le moindre mépris.

« Vous avez sûrement fort à faire, aussi je n'irai pas par quatre chemins. En l'état, notre discussion pourrait être des plus courtes en réalité. Faites appelle aux Hauts-Prêtres pour rompre les liens de votre mariage. Les seigneurs acquis à notre cause n'ont que bien peu de chose à vous reprocher en dehors de votre mari et nous pourrons vous aider à raisonner les plus véhéments de vos opposants… si toute fois vous consentez à épouser un soltari… »






Dans la salle d'audience du palais de Soltariel, l'agitation régnait de nouveau... avec quelque chose de plus grave et calme. Cette fois, tous savaient pourquoi ils étaient là. Debout, encadré par des gardes Soltaris, Scylléens et Mervalois, Arichis d'Anoszia se tenait dans le coin opposé aux trois membres du conseil de régence qui présidaient à cette assemblée au côté du petit Roy.

Sire Athénagore le Nélénite, Sire Diradour de la Garnaad et Sire Cléophas d'Angleroy de Merval, respectivement Grand Amiral, Grand Sénéchal et Grand Chancelier du Royaume, attendaient que les derniers êtres à pouvoir se glisser dans la salle le fasse avant que les portes ne soient fermées. Tous les curieux n'avaient, une fois de plus, pas put se trouver une place, mais le procès serait clos avec les témoins présents qui, vu leur état d'entassement, étaient déjà bien assez nombreux.

Cela faisait deux jours que l'accusé était sous bonne garde dans son donjon. Les missives qui avaient été envoyées aux quatre coins du royaumes avaient rapidement porté leurs fruits tout comme l'arrivé de Pasi et de son escorte. Les troupes supplémentaires amenés il y avait peu dans la cité avaient été dispersées sans trop de perte grâce au concours de ceux qui avaient été dépossédés de leur poste dans la garde dans le même laps de temps et des Partisans des Vrai-Soltaris qui y avaient vu une formidable occasion de rendre un peu de leur cité à ceux qu'ils considéraient comme ses habitants légitimes tout en ayant la loi de leur côté. A partir de là, les troupes ducales, loyales envers leur duchesse, avaient gardé les ydrilotes en respect avec les gardes royaux. Pour ce dernier détail, cela s'était fait à bas bruit... Mais personne ne se risquerait à affirmé qu'il n'y avait pas eut de pertes.

Mais ce n'était pas cela que tous venaient entendre.

Athénagore s'avança le premier.

« Sires, Dames et Demoiselles, je vous remercie d'être là pour prendre acte et témoigner du jugement que nous rendrons aujourd'hui à l'issue de l'enquête de ces derniers jours. L'accusation qui nous occupe porte sur la personne d'Arichis d'Anoszias, Grand Argentier de sa Majesté Bohémond Ier, Archonte d'Ydril et Régent d'Aléandra de Systolie, Vicomte de Calozi et Seigneur de Velmonè. Cet homme est accusé de trahison, de conspiration, de sédition et de crime de lèse-majesté.

Les appartements ainsi que les bureaux de l'accusé ont été fouillé par des unités composés de gardes venant de plusieurs fiefs vassaux de sa Majesté. Ses proches ont été interrogés avec le respect du à leur rang en présence de témoins appartenant à la cour royale. »


Il dit quelques mots de plus sur les dits témoins. Notamment la nourrisse et les précepteurs en charge de l'enfant qui avaient été au cœur des attentions le premier jour. La duchesse fut pudiquement épargnée, bien que citée. Des noms furent encore ajoutés à la liste officielle pendant que d'autres croupiraient à jamais dans l'ombre de l'histoire, invisible architecte d'un jugement royal.

« Aujourd'hui et devant vous, pour avoir refusé de défendre les terres royales contre son fils puis pour avoir offert à ce même fils la paix du roy et ainsi usurpé les prérogatives royales, le Conseil de Régence déclare Arichis d'Anoszia coupable de trahison et de conspiration. Pour avoir donner les ordres menant à la mort de plusieurs gardes royaux, au passage à tabacs de la nourrisse de sa Majesté, le Conseil de Régence déclare Arichis d'Anoszia coupable de conspiration et de sédition. Pour avoir enlever sa Majesté Bohémond à ses gardiens légitimes en faisant couler le sang sous les yeux de sa Majesté, en l'emportant malgré ses protestations et ainsi, en ayant porté atteinte à son intégrité morale ainsi que menacer son intégrité physique, le Conseil de Régence déclare Arichis d'Anoszia coupable du crime de lèse-majesté. Pour avoir refusé la demande de la cour royale consistant à rendre sa Majesté à ses gardiens légitimes, le Conseil de Régence déclare Arichis d'Anoszia coupable de trahison. Pour avoir proférées en toute conscience des accusations calomnieuses portant atteinte à l'honneur du Grand Chancelier Cléophas d'Angleroy, le Conseil de Régence déclare Arichis d'Anoszia non coupable. En voulant contrecarrer par sa seule capacité une conspiration menaçant la vie de sa Majesté Bohémond et en ne la dénonçant pas publiquement, Arichis d'Anoszia s'est également rende une seconde fois coupable du crime de lèse-majesté.

En conséquence de quoi, le Conseil de régence déclare qu'à partir d'aujourd'hui, Arichis d'Anoszias perd le titre de Grand Argentier ainsi que toutes ses prérogatives à la cour royale. Toutes les personnes lui ayant prêté serment en sont aujourd'hui délivré. Le titre de Régent d'Ydril lui est également retiré. La Comtesse  Aléandra de Systolie ayant quinze ans révolus, elle pourra dorénavant jouir seule de tous les droits et devoirs associés à son titre mais disposera, si elle le souhaite, d'un conseiller dépêché par la cour royale.

Il n'est pas en le pouvoir des hommes de défaire les serments faits devant les dieux. Par conséquent, Arichis d'Anoszias et Tibéria de Soltariel restent unis par la liens sacrés du mariage. Cependant Arichis d'Anoszia ne dispose plus d'aucun droit sur le duché, ses enfants de précédents mariages ne pourront y avoir aucune prétention et si des enfants devaient naître de la présente union, ils appartiendront à la famille de leur mère.

La famille Anoszia est dès a présent dépossédée de tout bien et titre au profit directe de la couronne. Les terres appartenant aux Anoszia, notamment la Seigneurie de Velmonè et le Vicomté de Calozi, sont dès à présent des terres royales.

Enfin, la personne d'Arichis d'Anoszia, après avoir été marqué à l'épaule du sceau de l'infamie et escortée hors du Soltaar, sera banni du royaume jusqu'à sa mort. Tout homme ou femme le voyant sur les terres du royaume du Soltaar aura légitimement le droit de le tuer et le devoir de prévenir la garde ou la milice la plus proche. Tout homme ou femme lui prêtant assistance sur les terres du Soltaar pourra être accusé de trahison. »


Il fit une légère pause dans la déclamation de la sentence. Un silence de mort flottait sur l'assemblée, concentrée qu'elle était pour retenir le flot d'information qu'on lui jetait au visage. Dans les coins les plus discrets, plusieurs scribes prenaient acte de la déclaration publique... Et purent pour la première fois depuis le début du discours, relever la tête un petit instant. Puis le Grand Sénéchal reprit, plus lentement.

« Selon des traditions anciennes, pour avoir menacer le roi et dissimuler une conspiration à son encontre, le nom d'Anoszia devrait être rayé des registres de noblesse, dépossédant ainsi la famille entière du statut que méritent les nobles sangs. Cependant, en tant qu'ancienne famille qui a servi son roi avec loyauté et courage pendant de nombreuses générations, nous avons longuement hésité avant de prononcer cette sentence irrémédiable. De même, nous avons songé à la possibilité de transmettre à la prochaine génération le titre de Seigneur de Velmonè sous certaines conditions... »

Avec un hochement de tête en direction de Cléophas, il invita le Grand Chancelier à prendre la parole. La décision avait été prise en petit comité, ce n'était là que la formalité de l'annonce, mais il voulait laisser le dernier mot face à l'assemblée. Il était celui qui avait porté à leur vue un grand nombre de fautes commises par l'accusé, alors il n'était que justice qu'il mette lui-même le point final de son procès.

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Cléophas d'Angleroy
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeMer 7 Sep 2016 - 1:29

Deux jours. C’est ce qu’il aura fallu pour mettre un terme à ce pantomime livré par l’Anozsia. Deux jours. C’est ce qu’il aura fallu pour mettre à bas une conspiration peu judicieusement échafaudée. Deux jours. C’est ce qu’il aura fallu pour que la cour se fasse une réelle idée de la justice, une réelle idée de l’Anozsia ; une réelle idée de ces deux forces contraires qui se battaient quant à savoir qui siégerait sur le trône de la Péninsule. Deux jours…c’était déjà deux jours de trop. Deux jours qu’il leur a fallu pour se rendre compte que cet homme barbu nourrissait ses ambitions avec son égo démesuré, quitte à voir périr l’entière péninsule –après tout, ce n’était qu’un faible prix à payer pour porter une Couronne. Et quelle Couronne ? Un morceau de métal arraché au front d’un bambin ! Lorsque vint la nouvelle, tu ne le crus pas. Tu ne portais certes pas l’archonte en grande estime mais au point de le croire capable de cela…non. Un autre que lui avait dû se saisir de ses armes, agir en son nom – un de ces vrais soltaris, fanatiques suderons qui n’hésitaient pas à prendre les armes au nom du sang trop dilué de leurs ducs légitimes- mais s’attaquer avec une telle violence, au milieu d’un palais grouillant de témoins, au Roy lui-même…certes l’homme était impulsif, certes il était ambitieux, certes il était égotiste et encombré de mille vices mais tu le pensais au moins plus fin que cela, trop fier pour cela.

Rends-toi à l’évidence, Cléophas : l’homme n’a jamais été cette coquille tapissée de nacre, ce squelette animé par le souffle vivifiant de la charité et de la compassion. Ces mots-là, Cléophas, sont absents des palais – ils se terrent dans les prairies et les campagnes, se faufilent entre deux voisins de geôles condamnés à mort, entre le bourreau et sa victime sur l’échafaud pas ici, pas entre ces nobles suderons dont la salive est elle-même un poison ; ces seigneurs endimanchés, ces faces de carême toujours souriantes et policées devant qui les vipères mêmes s’enfuient. Pris dans le chaos diantrais, les narines encore saturées de l’odeur de la suie et de la chair brûlée, tu ne le vis point et pourtant, Cléophas, tu aurais dû t’en douter en arrivant, en posant tes yeux sur cette peste de Kahina, enfant terrible que l’Estrévent avait vomi, trouvant en Soltariel un refuge où laisser cours à ses passions dominatrices. Le seul homme juste de ces terres, Maciste d’Irùn, abandonna sa vie aux vautours et toi, tu faillis leur abandonner la tienne. Lorsqu’Arichis refusa ta proposition de devenir Grand Chancelier, naïvement tu crus qu’il le fit par humilité – l’homme vantait tes mérites à cet office, ne s’en sentant ni digne ni capable ce qu’il n’était sans doute pas il est vrai- or, ce que tu aurais dû y voir Cléophas ce n’est pas l’humilité mais l’humiliation, ou plutôt son refus. Trop imbu de lui-même, l’Anozsia ne pouvait supporter d’être le second. Son désir était clair : la Couronne, ou la mort et il te le fit bien comprendre…

Ta surprise fut de taille lorsque tu te rendis compte de sa culpabilité. L’homme qui s’était accaparé le Roy –manquant la Couronne au passage- avait les mêmes traits, la même démarche, la même suffisance, le même mépris dans le regard. Pis, maintenant entré en possession de Bohémond il se permettait de pavaner dans le Palais, d’en retirer gardes ou palefreniers, remplaçant la maisonnée par la sienne au prétendu motif que par son alliance fort heureuse il fallait désormais qu’on l’appelât : Son Altesse Ducale. L’idée passa mal à la garde ducale, plus mal encore aux vrais soltaris qui se déguisaient en pages et en cuisiniers. Au lieu que d’inspirer le respect, le vil homme ne suscitait que mépris et l’enlèvement du Roy qu’il commandita ne fit qu’empirer la situation. En voyant les corps de ces gardes, leurs visages de cire, leurs iris décolorés et ces gorges où le sang avait coagulé la réalité te frappa en pleine face. Il n’était plus question de déshonneur, de lâcheté, de bassesse : il était question de cruauté. Tu hésitas entre la réaction ou l’attente…l’expérience te prouva qu’à attendre tu gagnerais beaucoup plus, mais combien plus réellement ? Tu ne pouvais t’empêcher de croire que cet enlèvement n’était que le début – et le sort te donna raison. Les jours s’enchainèrent dans la Chancellerie où défilaient des nobliaux endeuillés, d’autres embarrassés de leur bonne entente avec toi, tous prêts s’il le fallait à plier bagage et fuir ailleurs, sans savoir où. Oh, tu pouvais bien compter des soutiens dans ce Palais mais de là à les appeler tes amis…d’ailleurs, en avais-tu seulement Cléophas ?

Tu connaissais leurs visages, tu connaissais leurs noms, leurs histoires particulières, le récit de leur chute, de comment le Boucher s’accapara leurs terres, de combien ils t’étaient redevables de cette place à la cour, de cette rente tirée d’un trésor qu’ils croyaient inépuisable et à mesure que montait la tension, leurs discours se faisaient moins mielleux, leurs yeux moins brillants. Certains hésitaient encore à courber l’échine devant toi, jugeant ton cas désespéré et de fait, pouvais-tu leur affirmer le contraire ? Ta parole valait certes plus que celle de l’Anozsia mais le rustre n’aurait pas enlevé le Roy sans avoir une autre idée derrière la tête, plus vicieuse celle-ci. Agir. Réagir. Tes conseillers te vissaient ces mots au crâne, le reste du Conseil qui ne portait pas Arichis dans son cœur te pressait de faire quelque chose et de mettre un terme à la folie qui s’était emparée de lui et de toute cette cité. Car il ne fallait pas s’y méprendre : le chaos soltari trouvait son épicentre en cet homme. Ce patriarche moribond, source des plaies du Soltaar, par le biais d’alliances et de paroles fumeuses parvint à s’en faire le Duc. Evidemment, donc, que l’heure était grave. Si ce coup réussissait, qui sait s’il ne se revendiquerait pas le Régent, lui qui luttait pour conserver l’unité de sa famille. Retranché derrière tes cloîtres, tu observais en silence le Palais se refermer autour de toi, ses murs devenant de plus en plus hauts, ses tours angoissantes, ses poternes menaçantes. Dans l’un des cloîtres, les frumentaires s’entraînaient, la bave aux lèvres, dans un autre on faisait brûler les correspondances délicates, dans un autre encore Théophylacte tentait de rassurer le chapelet de vicomtes, de baronnets et de châtelains de la Couronne que ce n’était qu’une passade et que tu négociais en ce moment même avec l’Anoszia. Voyait-il tout cela du haut de son donjon ? Tu voyais le sommet de cette tour, coiffée de lances ydrilotes et tu ne pouvais t’empêcher d’imaginer l’homme jubiler de te savoir retranché derrière tes murs décrépits. La chancellerie ne passait pas pour une forteresse. Elle n’en serait pas une en dépit des soldats qui se massaient à ses portes. Une heure au plus, c’est ce qu’il faudrait pour te déterrer et t’exposer à nu, aux yeux du monde.

Que serait-il, ce Soltaar dominé par les Anozsia ?

Tu te vis les mains accrochées à des barreaux donnant sur l’Eris incontrôlable, t’entortillant pour respirer une bouffée d’air marin. Un regard sur la ville suffit à t’arracher des larmes amères…au sommet des tours flotterait, au lieu du Cerf Royal, le Dragon maudit des Anozsia. Partout où le regard pouvait se poser, tu le voyais, funeste effigie annonciatrice de ta mort prochaine. Dans les rues pavées de la cité ce n’était plus des haies, des puits et des étals colorés mais des patrouilles armées jusqu’aux dents, cuistres reluisants scandant sans cesse la gloire de leur maître, tels des dogues parfaitement dressés. Sur les places l’on dressait des pals et des gibets, les corps grisâtres des prisonniers remplaçant dans le vent le mouvement des jambons qu’on exposait aux badauds. Bientôt ce serait toi à leur place, ton corps nu traversé par un poteau de bois souple, priant en silence pour que les rapaces ne s’attaquent pas trop tôt à ta chair ainsi exhibée. Tu versais des larmes amères car, alors que tu te voyais monter vers le lieu de ton supplice, tu ne pouvais ignorer ce qu’un tel spectacle d’autorité cherchait à dissimuler : les osts de l’ennemi massés aux portes du Royaume.

Tout au long de ta marche glaçante, tu croisais dans le regard des citoyens la peur d’être un jour à ta place : personne ne t’insultait ce jour-là, point de crachats, d’excréments ni de jets de pierres. L’assemblée de marbre faisait mine de ne rien voir, de ne rien savoir de ce qui se passait derrière ces murailles qu’on couvrait du nom du tyran pour cacher leurs faiblesses. Savaient-ils, les pauvres, que leur seigneur les enverrait en martyrs au devant des soldats de l’ennemi venu du Nord tandis qu’il s’en irait encore comme il l’avait toujours fait ? Savaient-ils que les larmes que tu versais étaient pour eux et non pour toi ? Pour ce Roy innocent assassiné par l’Anozsia, réalité connue de tous mais que personne n’osait plus affirmer. L’homme pourtant fit tenir des funérailles solennelles auxquelles participa tout son clan, il s’afficha en habits de deuil et sa mine affectée donna le change aux courtisans peu futés qui formaient la majorité de son Palais tu le vis car il t’autorisa à y assister, entravé de lourdes chaînes de métal, caché derrière un paravent afin que nul ne puisse te voir. Ses gardes en effet ne faisaient pas taire la gronde des royalistes qui te restèrent fidèles après ton incarcération, manquant par deux fois de te tirer hors des geôles. Il consentit à exhiber ainsi pour montrer à ses détracteurs quel grand était son pouvoir – lui, le Soleil-Dragon humiliait publiquement l’ancien Chancelier et Régent, le Prince déchu du pays de Merval, pays dépecé par son clan, par ses fils et leurs femelles peintes. Ce jour, rien ne t’importait plus qu’être auprès du Roy. Après cette cérémonie, tu ne connus plus rien du monde. Ta nourriture se fit plus maigre, plus immonde, les traitements qu’on t’infligeait plus ingrats. Tu sentais venir l’heure…seul, dans cette cellule, tes mains accrochées aux barreaux, ta tête se faufilant dans l’air pour respirer une dernière fois la mer…

Cette vision te figea. Ce ne pouvait être. Si l’Anozsia parvenait à contrôler le Roy et à causer ta défaite, c’est la Péninsule entière qui en pâtirait. Rien ne la protégerait, l’empêchant de devenir l’instrument des lubies de cet être vicieux qui se voyait déjà Roy. Agir, oui…mais tu ne savais comment. Eternel spectateur des révolutions que vivait la Péninsule, témoin oculaire de trahisons, de meurtres et de conspirations sans mot dire, trempant ta plume dans autant d’encre que de sang tu n’avais pourtant jamais été résolu à agir de toi-même, par toi-même. Un coup d’œil autour de toi suffisait pour comprendre combien plus nombreux étaient les sicaires à la solde de l’ydrilote, faisant mourir dans l’œuf toute idée de confrontation armée. La diplomatie, alors ? Avait-elle seulement servi à quelque chose cette diplomatie ? Assurément elle te permit de devenir Grand Chancelier et de trouver refuge à Soltariel –cadeaux empoisonnés- mais à part cela, à part les suites interminables de pages, de contrepages, d’archipages et de protopages ; à part le luxe des cours princières, leurs appartements vastes comme des châteaux et leurs écuries parfumées ; qu’avait-elle servi, la diplomatie ? Semence de tribulations pour qui la laisse germer, voilà ce qu’elle était. Elle servait à ceux qui ne tiraient aucun intérêt à sacrifier des soldats, aux économes, aux princes trop amoureux de leurs terres pour les livrer entièrement à la merci d’une guerre terrible – mais l’Anozsia ne se plaçait pas parmi ces princes. S’il fallait tuer sa famille entière au nom de sa gloriole, il le ferait. Face à de tels êtres, la diplomatie n’a pas de prise. Si l’esbroufe ne répond pas à l’esbroufe, la perfidie, elle, répond à la perfidie. Le suderon avait tiré ses armes le premier. Tu l’y suivrais.

Nul doute que sa provocation serait suivie d’une annonce officielle. Son but était clair : te destituer. En t’ôtant le Roy, il pensait t’avoir ôté ton autorité – erreur de jeune fol. Tu te mis en tête de trouver toute preuve pouvant l’incriminer de quelque crime que ce soit, pourvu qu’il le mette en état de nuire. La Chancellerie en effervescence parcourait des kilomètres de parchemins, de rapports reçus des frumentaires déployés de part et d’autre du Royaume, allant recueillir tous les ouï-dire auprès des commères, des courtisanes, des marchands encore présents dans la ville. La cour entière fut mise à contribution tandis que tu te creusais pour trouver la faille par laquelle tu ferais tomber son édifice de mensonges. Il devait forcément y en avoir une. Arichis n’était pas connu pour sa finesse d’esprit. Pour son audace oui, ses vices oui, sa redoutable persuasion et son art de la duplicité mais pas pour sa finesse. Ses ouvrages avaient tous une patte primitive, efficace, apparemment solide – mais ils manquaient d’art, de précision, de fondations. Ce n’étaient que des statues de glace, des sculptures de sel, structures éphémères tenant en équilibre, prêtes à s’écrouler si tant est que l’on faisait pression au bon endroit. Il était lui-même la clef de voûte de ses édifices, son ambition en étant les fondations. C’est là que se trouverait son erreur.

Et c’est là que tu cherchas, sans arrêt, épluchant, écoutant, relisant le lot d’informations qu’on te faisait parvenir…en vain. L’Anozsia laissait peu de traces. Certes on te faisait écho de telle ou telle parole peu amène, de tel geste déplacé, de telle attitude suspecte mais ce n’était pas suffisant pour étayer quelconque théorie…et pendant ce temps il mettait sur pied la sienne, fournissant sans doute quantité d’arguments fallacieux suffisamment choquants pour qu’un auditoire peu finaud te juge coupable de n’importe quel crime. Qui sait s’il ne faisait pas bouger ses armées ? Qui sait si le Roy n’était déjà pas mort, son crâne fracassé contre un mur, son corps, son petit corps roué de coups, tordu, empoisonné…Cela faisait deux nuits maintenant que durait cette agonie, deux nuits et deux jours passés à donner le change devant donner à la cour la sérénité qu’elle avait perdue et qu’elle cherchait en toi, tentant de cacher la fatigue qui ternissait ton sang, ta peau, ta voix, ton âme. Le voile pesant sur tes yeux rampait vers ton esprit et aucun de ces foutus papiers, de ces foutus rapports ne servait. Rien, rien, rien. Rien. Rien…rien…

Théophylacte apparut ce matin, plus exténué que toi. Sous ses ongles tu pouvais voir la cire des sceaux qu’il avait déchirés, sur ses doigts l’encre des parchemins qu’il avait examinés. L’homme sentait la sueur et la suie, ses muscles tendus ressemblaient à des os sous ses vêtements. Il vint dans ta chambre alors que tu regardais les cours du Palais et la silhouette rectiligne du donjon, ton crâne prêt à exploser sous l’effet d’une horrible migraine qui durait depuis des heures et t’empêchait de voir clair, de penser clair, de respirer clair. Le Protasecrétis vint à toi, le souffle court et te lança, résigné :

- Alors ? Qu’allons-nous faire ?


La question se voulait simple mais tu ne sus répondre. Les yeux rivés sur les arcades éclairées de cette tour maudite, les mots ne te venaient pas. Pour la première fois Cléophas, tu ne savais que dire. D’ordinaire une telle question aurait fait surgir en toi un torrent d’émotions, d’interjections, d’adjectifs, de discours – ton esprit aurait déjà imaginé plusieurs réponses, l’une provoquant la colère de Théophylacte, l’autre pour l’encourager, l’autre encore pour le rassurer. Tu n’aurais eu qu’à desserrer les lèvres pour que ton esprit fasse son travail et déroule, telle une bobine de fil, une de ces diatribes qui te caractérisaient tant. Où était passée ta vigueur ? Ta verve ? Où étaient passés ton verbe et ton ardeur ? Ton esprit, vide, n’entendait que les battements de ton cœur et le soulèvement de ton diaphragme. Le reste se perdait dans un brouillard indéfinissable, la périphérie des mélancoliques où tout se confond. Tu te retournas, l’œil pendant, les bras ballants vers cet homme qui tendait tout entier vers toi, espérant tout de toi. Tu n’eus rien d’autre à lui dire que :

- Je ne sais pas.


La phrase tambourina dans ton crâne, résonnant comme les cris d’une horde de barbares, comme les râles des âmes livrées aux tourments des limbes. Tu ne pouvais t’empêcher de la répéter, mantra douloureux t’arrachant les côtes et les poumons chaque fois que tu le prononçais, formant une boule au creux de ta gorge à mesure que tu cherchais à l’expulser, faisant monter la rage et la détresse en ton cœur et ton âme, tirant larmes de peur et de haine – peur de l’impuissance, haine de ce dont tu as peur.

- Je ne sais pas…je…je…ne sais pas…je ne sais pas. Je…ne…sais…pas. Je ne sais pas. Je. Ne. Sais. Pas. Je ne sais pas ! Je ne sais pas ! Je ne sais pas ! Je ne sais pas ! JE NE SAIS PAS ! JE NE SAIS PAS ! PAS ! PAS ! PAS ! JE NE SAIS PAS ! Tu le comprends ça ! Je ne sais pas ! Je ne sais pas, je ne sais pas ! Je ne sais pas ! JE NE SAIS PAS ! JE NE SAIS FOUTREMENT PAS ! JE NE SAIS FOUTREMENT BORDEL DE PAS ! JE NE SAIS P –


Du sang se mit à sortir de ta bouche. Ton corps s’évanouissait sous toi et Théophylacte, pétrifié, se précipitait pour te retenir. Les ténèbres t’entourèrent et à travers elles tu percevais le souffle discret de tes ancêtres et des esprits spoliés, humiliés par ceux dont Arichis se faisait l’héritier. Cette rangée évanescente de visages torturés, de coupables injustement crucifiés, de marins impunément noyés et parmi ceux-là, les faces suppliantes des gardes endormis dans la mort. Théophylacte jeta un coup d’œil à tes yeux, sentit les sueurs froides le long de ton front et le sang couler sur ton menton et tâcher ton pourpoint. Tu sentis étrangement, comme pour toi-même, son cœur battre de plus en plus vite et la tension lui monter. D’un geste de la main tu le calmas le réassurant par quelques balbutiements qui pour toi avaient un relent de cuivre chaud. Tu le congédias affectueusement quand entra, presque par enchantement, l’être le plus mystérieux de Merval, si ce n’est de l’entière péninsule…Lévantique. Il te surprit alors que tu crachais le sang qu’il te restait dans la bouche. Croisant ton regard, il ne feignit ni la surprise, ni la compassion : il savait très bien ce qui t’arrivait et ne semblait pas en ressentir des remords.

- Je n’ai pas voulu écouter aux portes, Messire, mais –
- Ne m’abreuvez pas de bêtises, voulez-vous ? Qu’est-ce que vous fichez ici ? Je vous vois si peu dernièrement, c’est à croire que vous vous êtes trouvé un nouveau cobaye.
- Messire, je ne vous ai jamais considéré comme un cobaye, je –
- Alors expliquez-moi cela, Lévantique !


Tu relevas ton pourpoint pour lui dévoiler la chair blanchie de ton bras aussi rugueuse et froide qu’un bloc de granite. Il n’eut pour seule réaction qu’un pincement de lèvres avant de s’approcher de toi comme on le ferait d’un animal inconnu, ce qui ne fit que monter en toi une colère déjà prête d’exploser.

- Messire, je…je n’ai jamais voulu cela.
- Arrêtez avec vos conneries, Lévantique ! Vous saviez très bien que cela allait arriver !
- Encore une fois Messire, je n’ai jamais voulu –
- Je me fiche de savoir ce que vous avez voulu ou non, Lévantique ! Je vous demande si vous saviez que j’en arriverais à cela !
- C’est à dire que…


Pour la première fois tu pouvais voir Lévantique trembler. En dépit de ses mystères, de son âge, de ses dons surnaturels, de ses visions et des sortilèges qu’il exsudait, le mystique ne savait plus où se mettre, tel un enfant qu’on aurait pris à recoller un vase cassé.

- Répondez-moi, Lévantique. Est-ce que vous saviez, oui ou non, que cela arriverait ?
- Je savais que cela pouvait arriver…oui…
- Et vous ne m’avez rien dit !
- C’est ce que je fais, Messire ! C’est ce que j’ai toujours fait ! Vous saviez très bien en employant mes services quels étaient les « soins » que je vous prodiguerais !
- Ah ! Et dire que je vous ai fait confiance sur l’honneur de mon père...
- Vous m’aviez demandé de vous guérir après l’incendie, c’est ce que je fis !
- De me guérir ! Pas de m’envoyer plus vite dans la tombe !
- Je vous ai guéri, votre bras n’a plus aucune séquelle de la brûlure n’est-ce pas ?
- Evidemment que non puisqu’il est à deux doigts de s’effriter comme un morceau de craie ! Si vous saviez que cela arriverait, vous auriez dû me le dire, Lévantique.
- Et puis quoi, Messire ? Vous vouliez du temps, je vous ai accordé du temps. Sans mes soins vous seriez déjà mort depuis longtemps – personne ne résiste à une brûlure pareille. Si je n’avais pas été là, vous n’auriez jamais été ni Prince, ni Régent ni –
- Ici, à lutter contre cette cabale que l’on déchaîne contre moi, non ! Et à y réfléchir, il eut mieux valu pour moi que je mourusse dans cet incendie…


Un lourd silence s’installa. Tu recouvris ton bras dans un élan de pudeur habituel et t’assit sur le bord de ton lit. Lévantique, debout, te toisant de toute sa hauteur, son visage transfiguré par la compassion te dit, à voix douce :
- A vous dire le vrai, Messire, je ne pensais pas que cela arriverait…
- Votre don de clairvoyance était en travaux le jour où vous avez décidé de me soigner ?
- Ce n’est pas si facile que cela, Messire. Les énergies avec lesquelles je travaille sont imprévisibles. Rarement contrôlables.
- Et vous prétendez être le meilleur à ce que vous faites ?
- Je ne le prétends pas, Messire, c’est un fait avéré que je suis parmi les plus grands de ma discipline.
- Venons-en justement…quelle est-elle cette discipline ?


Lévantique abandonna son masque compatissant pour redevenir celui que tu avais toujours connu, cet être énigmatique, sans âge ni expressivité, abritant ses pensées derrière l’esquisse d’un sourire trompeur. D’une voix suave, plus froide qu’à l’accoutumée, il t’asséna sa réponse avec langueur, comme s’il venait de trancher ta gorge.

- Oh, Messire…vous ne voulez pas le deviner.


Ce n’était pas explicite mais cela avait le mérite d’être clair. Ce qu’il tenait caché devrait le demeurer bien que ta curiosité fût piquée au vif par ces quelques bribes de son « art » qu’il venait de dévoiler. Pour être si mort d’âme et de corps, Lévantique devait avoir côtoyé un grand nombre de cadavres néanmoins, ses pratiques repoussaient certainement les limites de la nigromancie traditionnelle pour la porter à un niveau plus profond, plus secret, plus périlleux. Quels furent les serments qu’il passa dans les solitudes les plus obscures du monde ? Et quelles furent les âmes prêtes à les recueillir dans leurs mains ? Quels esprits s’attachaient à lui pour qu’il paraisse si sombre, même lorsque le soleil brillait à son zénith ? A combien d’êtres, combien de noms, combien de trépassés, d’oubliés, de damnés avait-il prêté ses mains, ses yeux, sa bouche pour qu’il ait l’air si retiré hors de lui-même ? Et qu’avait-il déjà fait qu’il pourrait faire encore ? La question t’apparut en temps d’éclair…après tout, il te fallait une réponse, un indice quant à la marche à suivre. En de pareils instants, d’autres hommes auraient cherché conseil auprès de leur patriarche, de leurs Dieux, de leurs suzerains – tu n’avais plus de père, tu ne voyais plus les Dieux, on t’avait enlevé ton suzerain. Tu lui posas alors la question qui prit l’allure d’un défi.

- Pouvez-vous faire parler les morts, Lévantique ?
- Pardon, Messire ?
- Vous m’avez bien entendu, ne me forcez pas à le redire…


Il parut gêné.

- Oui, je le peux. Pourquoi, Messire ?
- Parce qu’il faut que je parle à quelqu’un, urgemment.
- Ah mais, Messire, ce n’est pas si facile. Je ne suis pas un prestidigitateur ou un mage de spectacle. Mes…mes sortilèges ne consistent pas à faire sortir des boules de feu de dessous mes jambes. Je suis versé dans une autre forme de magie…une magie qui nécessite du temps, du matériel –
- Nous n’avons pas de temps, quant au matériel vous êtes au milieu du Palais royal, il y aura bien de quoi vous sustenter.
- Non, Messire, il n’y aura pas. Qui plus est je ne peux pas faire ça n’importe où et n’importe comment…
- C’est donc à cela qu’est rendu le meilleur nigromant de Miradelphia ? A faire des onguents dans sa cave ?
- Ne m’insultez pas, Messire. Vous voulez parler à un cadavre ? Soit, mais dans ce cas il me faudra au moins le cadavre, sans quoi rien ne sera possible.
- Il n’y en a pas, Lévantique.
- Si je n’ai ni son cadavre ni son sang Messire, il me sera difficile de faire quoi que ce soit. Je ne peux conjurer n’importe quel esprit par la simple force de la pensée.
- Le sang je l’ai. Le mien.
- Pardon ?
- Nous partageons le même sang. Je veux m’entretenir avec mon père. Je ne suis pas aussi versé que vous dans cet art, manifestement, mais je sais que les esprits peuvent parler à travers vous. C’est ce que je veux. Maintenant.
- Mais…Messire –
- Qu’y-a-t-il encore ?
- Rien Messire…il n’y a rien.


Il resta stoïque, absorbé par ses pensées. Son expression généralement si arrogante se métamorphosa en une grimace trahissant son souci. Quand enfin il eut bien réfléchi, pondéré, marmonné, respiré et soupiré, il revint vers toi en te disant :

- Si vous tenez vraiment à le faire, il me faudra du sel.
- Très bien, et quoi d’autre ?
- Cachez tous les miroirs. Faites brûler une livre d’oliban, une de benjoin et une demi livre de myrrhe.
- C’est tout ?
- Il me faudra aussi une craie, quelques chandelles d’une cire qui soit la plus claire possible –pas en suif, en cire- et aussi une grande vasque d’eau claire.


Tu envoyas un page chercher le tout. En attendant son retour, tu vis Lévantique à l’œuvre, déplaçant les meubles et les tapis, retournant les miroirs contre les murs, regardant où était le soleil. Quand vint le page, tu vis Lévantique tracer à la craie sur le sol une série de glyphes circonscrite dans un cercle. Il recouvrit le tout de sel, plaça les bougies sur le cercle formant un triangle, plaçant la vasque d’eau entre lui et toi, faisant brûler l’encens tout autour du cercle, puis dans le cercle. Il verrouilla les portes et les fenêtres. Seules brûlaient les bougies dans la pièce. Il fondit vers toi, découvrant d’entre les plis de son habit un athamé brillant comme la lune et te demanda ta main. Tu lui demandas alors :

- Est-ce vraiment nécessaire, tout cela ? Nous n’avons pas beaucoup de temps Lévantique.
- Il faudrait être fou ou absolument sot pour conjurer quelque esprit sans chercher à s’en protéger, Messire. Si ce n’est pour vous, je le fais au moins pour moi.
- Se protéger de quoi ? C’est à mon père que je désire parler.
- Rien ne nous dit qu’il sera coopératif. Je vous laisse libre dans vos manigances, Messire, laissez-moi l’être dans les miennes.


L’homme, peu rassuré, répandit dans l’eau et sur les braises de l’encens les gouttes de ton sang et se lança alors dans une série d’incantations récitées dans une langue que tu ne pouvais connaître. Sa voix changea au fur et à mesure qu’il scandait les mots, sa peau blanchit, son corps se crispa, se contorsionna, fut pris de convulsions alors qu’il expulsait plusieurs râles de douleur qui ne semblaient pas venir de lui. Il se mit à tousser bruyamment, puis ouvrant ses yeux tu vis ses yeux entièrement blancs. Sa mâchoire décrochée cherchait à articuler quelques mots que coupèrent des spasmes violents. Après avoir été traversé par une vive douleur, son corps se dressa d’un coup, hiératique et lorsqu’il ouvrit les yeux…je pus enfin te voir, mon enfant. Par ses sens, je pouvais goûter à ta présence. Si seulement tu avais pu me voir comme je te voyais…comme je n’ai jamais cessé de te voir, mon enfant. Tu m’appelas alors et je retrouvai en ta bouche le miel de ce mot :

- Père ?
- Cléophas…


Je me rendis compte à quel point il était difficile d’articuler un mot dans la bouche d’un vivant. Ma voix avait changé, ma vigueur disparu mais je te voyais encore, je t’entendais, te sentais, je t’espérais, mon enfant…

- Je ne sais plus où aller…
- Ka…ka…hi…na.
- Kahina ? Qu’y a-t-il avec elle ? Faut-elle que je la retrouve ?
- O…sch…sch…schid..e.
- Kahina, Oschide…je ne comprends pas, Père. Lévantique, que se passe-t-il ?
- Dian…tra…
- Lévantique, que se passe-t-il !


Comme j’aurais voulu t’aider, mon fils, à te voir ainsi te débattre. Tout était clair pour moi qui ne connaissais les limites du temps ni de l’espace. Je ne connaissais pas les pensées mais je voyais les plans, les actions, les mouvements. Si seulement il m’avait été permis de te parler avec autant d’aisance que maintenant, chair de ma chair, plutôt que de te voir ainsi souffrir de ne me pas comprendre.

- Kahina, Oschide, Diantra…je ne comprends pas, Père. Que s’est-il passé à Diantra ? Je ne comprends pas…je…
- Ka…hi…
- Kahina, Oschide, Diantra. Kahina, Oschide, Diantra. Kahina, Oschide, Diantra…je ne vois pas Père, je ne vois pas ! Je ne vois pas ce qu’ils ont en commun, Père, je ne le vois pas…je ne vois pas…
- A…a…A…


Lévantique ne supporta pas la douleur. Je pouvais le sentir lutter contre moi avec ardeur…car j’aurais tant aimé m’extirper de ce corps, m’extraire de ce rivage de sel pour te saisir, t’embrasser et t’enlever à la folie de ce monde que tu pensais être celui de la vie, Cléophas. Lévantique le sentit et lutta. S’il n’avait pas tant lutté, sans doute aurais-je été plus compréhensible…mais il m’empêcha de sortir et de tout te dévoiler. L’homme était devenu plus coriace que lorsque je le connus…lui qui fit fructifier nos comptoirs, qui gonfla les voiles de mes vaisseaux perdus en pleine mer. Lui qui, le temps venu, me donna l’audace et la force de passer les brumes du sud de l’Olienne pour découvrir le continent perdu de Nisétis et ses rivages inexplorés. Il te fallait prendre du recul Cléophas et quitter ce temps et cet espace pour découvrir la réponse à toutes tes questions car elle était là, elle était claire et elle t’épiait depuis son donjon…Lévantique m’expulsa de son être à grands frais, s’effondrant comme toi auparavant tandis que tu fonças pour le rattraper. Tu le vis inconscient, lui assénas quelques coups, arrosant d’eau son visage, priant pour qu’il se réveille et te réponde – ce qu’il finit par faire. Tu lui posas la même question qu’à moi, lui racontas notre brève conversation, mes balbutiements, son hésitation…il se contenta de te répondre en pharétan :

- Les murs ont des oreilles.


De là, vous devisâtes en cette langue inconnue de tous sauf de quelques érudits. Il t’expliquas ma tentative de sortie, comme il partageait toutes mes pensées et moi les siennes, mêlées comme l’eau douce et l’eau salée se mêlent dans l’estuaire. Il n’eut pas besoin d’aller plus loin : tu compris. Tout te revint, les liens invisibles se formèrent dans le noir…ce ne pouvait être que lui. Tout ne pouvait être que lui. Le pont entre Oschide, Diantra et Kahina – la clef de l’histoire du Soltaar, c’était lui. Ou c’est au moins ce qu’il fallait croire et professer pour l’éviter de saboter tout ce que tu essayais de construire. Dans la foulée apparut un homme, un garde, essoufflé comme tous les autres – on venait te chercher. Tu entendis une voix te murmurer à l’oreille. Elle te disait de porter la tunique de tes ancêtres, celle que nulle flamme n’avait pu ronger. Lévantique se hâta de trouver la poterne la plus proche pendant que la cour grondait dans l’étroitesse des cloîtres de la Chancellerie…Tout était clair ! En plus d’être la fin, Arichis était la cause. Tel était le lot de ceux qui comme lui s’émeuvent de leur propre personne au point de l’ériger au sommet de leur joie. Pour l’Anozsia, celui qui s’identifiait à la fois au Soleil et au Dragon –car un seul ne serait pas suffisant- tout ne pouvait partir que de lui pour aboutir en lui. Le monde, construit autour de son être, ne serait que l’instrument, le cadre mettant sa gloire en valeur…Elle était là, la réponse que tu attendais. Et tu t’empressas de la délivrer aux hommes de la cour.

Dans la salle, Arichis perdait sa superbe alors que ta diatribe avançait. Il tenta bien de lancer ses gardes contre toi – en vain. Le Sire Athénodore, vaillant personnage, plus fidèle au Roy qu’à sa propre personne, prit ta défense en cette heure et dans les jours qui suivirent. L’humiliation fut si terrible pour le seigneur ydrilote qu’il en prit la fuite –discipline dans laquelle il excellait apparemment. Son épouse, la duchesse de jure, fut confinée dans ses appartements le temps du procès. Quant à toi, entouré de tes deux compères, tu devisas quant à l’avenir du bougre, rappelant aux seigneurs Amiral et Sénéchal quelles étaient les lois du Royaume concernant les crimes dont il s’était rendu coupable. Si le Sire Diradour se montrait aussi inflexible que toi, Athénodore penchait pour une via media, plus douce, plus clémente. C’est de lui que vint l’idée de l’exil, quand Diradour réclamait la mort et toi l’emprisonnement à vie. Tu ne compris pas pourquoi il vous fallut deux jours de délibérations pour en parvenir à la conclusion que le triste sire était coupable de ces tristes actes. Sans doute les seigneurs du Conseil attendaient-ils que l’archonte d’Ydril leur fût retourné – ce qui arriva en temps voulu. L’affaire, portée au-delà de l’enceinte du Palais, fit du remous dans les tavernes. Les gardes ducaux qu’Arichis voulut déboulonner se montrèrent loyaux à leur seul seigneur : le Roy. Quant au Palais, il retrouva son calme, ses visages et ses intrigants habituels. Librement, tu arpentais les couloirs comme aux premiers jours, goûtant une paix encore fébrile…tant que l’Anozsia serait en liberté, le Royaume entier courrait un grave danger. Il fallait convoquer la cour et mettre fin à cette tyrannie imposée au Sud depuis trop longtemps, à ce népotisme décadent qui minait la vie entière de la pointe ydrilote. La cour fut à nouveau convoquée, solennellement. Le Roy pris place sur son trône, disparaissant sous sa cape d’apparat. L’infâme ydrilote se tenait face vous, conseillers du Roy, restés fidèles à la Couronne, toujours gonflé d’arrogance. Le sire Athénodore prononça la sentence entendue devant une salle affichant des sourires grinçants et un silence effrayant. Le Nélénite se tourna enfin vers toi. Il fallait encore parler. Comme si tout ce qui avait été dit ne suffisait pas…Tu t’avanças près de l’assemblée mais ce ne fut pas tant pour elle que pour lui que tu le fis. Lui qui dans sa tentative de t’étouffer conserva son mutisme, tentant d’éviter ton regard, n’adressant aucune réponse à ta harangue sinon un de ses regards méprisants, de ceux que Kahina affichait souvent à l’égard du monde entier.

- Savez-vous pourquoi la gourmandise est un péché capital, sire d’Ydril ? Parce qu’elle entraîne tous les autres dans son sillon de mort…la hâte, la frénésie, la passion…et l’orgueil…Vous auriez pu devenir le deuxième homme le plus important de la Péninsule et maintenant on en oubliera jusque votre nom. Car je vous le dis, Arichis, il n’y aura plus dans le Royaume mention de ce nom maudit qui est le vôtre et qui aura failli plonger la Péninsule à feu et à sang. Nulle part entendra-t-on, verra-t-on, se souviendra-t-on du nom d’Anozsia, de funeste mémoire, pour ce qu’il sera banni autant que vous. Il sera rayé des annales, des registres, des correspondances, des statues, des généalogies – jamais plus un homme ne pourra s’inspirer de vous ou de vos actes, jamais plus aucun enfant ne se prénommera Arichis. Jamais plus prononcera-t-on ce nom sinon à vouloir offenser. Quant à ceux qui se souviendront encore de vous, ils se rappelleront comment leur seigneur a enlevé le Roy, comment il a conspiré contre lui, comment il les a abandonnés à une ruine certaine dans son entreprise hasardeuse.

J’éradiquerai toute mémoire de votre passage sur cette Péninsule afin que le monde ne puisse plus se souvenir des bassesses auxquelles l’homme a pu s’abaisser – je ne cherche point à éveiller les mémoires quant à la lâche cruauté dont vous avez fait preuve, je cherche à les ouvrir sur des horizons plus heureux et faire en sorte qu’elles s’attachent à des êtres qui en vaillent la peine. On parlera de vous comme du Déshérité, de l’Infortuné ; on rayera vos portraits des tableaux, des bas-reliefs, des pièces de monnaie et des sculptures – j’y veillerai. Je ferai passer aux hommes l’envie de s’élever contre leur Roy en vous ôtant ce qui fait encore de vous un être qui nous soit semblable, en vous détachant de ce nom, cadeau reçu des Dieux et que vous avez ingratement souillé et que nul ne portera après vous. Vos enfants perdront leur nom, vos fils vous rejoindront dans l’exil – car Oschide nous a bien prouvé à tous que le fruit tombe rarement loin de l’arbre. Quant à vos terres, le fruit de votre travail, celles qui vous ont vu naître, je les ôterai de votre famille dispersée pour les rendre à ce Roy que votre famille a volé. Velmonè et vos autres patelins seront bien maigres compensations contre Edelys et Diantra. Et puisque vous avez arraché le Roy de sa nourrice alors qu’il ne portait qu’une tunicelle sur le dos, vous serez arraché de votre terre-mère avec seulement votre pourpoint et vos braies. Le Roy, dans sa largesse a tenu à vous accorder trente deniers d’argent pour que vous puissiez vous assurer une place dans un des bouges de Thaar, de Lante ou de Naelis.

Vous vous éloignerez de ces rives, Arichis, et le monde retrouvera sa paix, son silence et sa joie, celle que vous lui auriez volé si les Dieux et la cour ne m’avaient pas donné de parler contre vous. Ydril évitera une guerre sanglante, Soltariel évitera un siège et le Roy évitera la mort – voilà ce que retiendra l’histoire. Mais vous, Arichis, le monde vous oubliera. Vous serez un de ces nombreux parias tombés dans l’oblivion des chroniques et des pamphlets. Peut-être les trouvères et les saltimbanques écriront-ils des farces à votre sujet mais c’est le tout de notoriété que vous et votre famille indigne et ingrate pourrez espérer.


Tu remontas de quelques marches vers le Roy et le Conseil, puis, t’adressant à la cour entière, tu repris.

- Quant au sort des enfants Anozsia, il n’est pas de mon ressort en tant que Grand Chancelier de décider de leur devenir. Il incombait à leur père de les protéger et de leur assurer un avenir décent, ceci ne relève pas de ma juridiction. En tant que Grand Chancelier, mon rôle n’est pas de décider des lois mais de les appliquer et de m’assurer qu’elles le soient sur tout le Royaume. Ce n’est pas à moi de les amender et je n’irai certainement pas violer le serment que j’ai prêté au Roy en m’arrogeant des pouvoirs qui ne sont pas les miens. Après tout, c’est ce pourquoi Arichis en est arrivé là.


Tu laissas passer quelques secondes. Tu fis quelques pas puis t’arrêtas avant de poursuivre :

- Néanmoins, en tant que Régent du Royaume au nom de Sa Majesté, il est de mon droit de gracier, d’amender, de justifier, de glorifier. Aussi, considérant que les filles du malheureux Arichis, que l’on nomme Cécyllie et Cornélie, ne se sont pas rendues complices des crimes de leur père et de leur frère et que leur appartenance au clan d’indigne mémoire ne peut constituer une menace pour l’intégrité du Royaume, je déclare qu’elles pourront bénéficier d’une place à la cour royale si elles le désirent ainsi que d’une rente ponctionnée sur le trésor de leur famille. Elles auront le droit de circuler librement dans le Royaume, selon leur bon désir – toutefois, si elles devaient reprendre contact avec un membre de leur famille, elles s’exposeraient aux mêmes sanctions que leur malheureux père. Que tous ici présents continuent de leur manifester le respect qui leur est dû ainsi que la même affection, sans tenir compte des agissements du reste de leur famille. Quant au Roy, sire Athénodore, il ne vous appartient pas, malgré votre bonne volonté, de décider de qui sera son tuteur ou non, ceci n’étant pas l’objet du procès. Néanmoins, tant que la situation à Soltariel ne sera pas apaisée et que Diantra sera toujours un tas de ruines fumantes, il est de mon devoir de Régent, de Chancelier et de tuteur de déplacer Sa Majesté en son fief de Scylla jusqu’à ce qu’il puisse retrouver son trône.


Pendant toute la déclaration, Théophylacte s’était empressé d’écrire le tout sur un vélin, faisant office de bulle à l’adresse de tout le Royaume. La fatigue te saisissant, tu t’adressas une dernière fois aux dignitaires présents en leur disant :

- Mes seigneurs, mes frères. Qu’il soit connu par cette bulle et dans tout le Royaume que l’homme Arichis a violé la confiance du Roy et de ses pairs. Qu’il soit connu dans tout le Royaume quelle grande ont été sa rouerie et sa trahison. Qu’il soit connu dans tout le Royaume quelle honte et quel déshonneur il a attiré sur son nom et sa descendance. Qu’il soit connu dans tout le Royaume que cet homme dont le nom sera tu à jamais a failli dans sa tentative de coup d’état. Qu’il soit connu dans le Royaume et jusqu’aux confins de la terre que les œuvres humaines ne suffisent pas à renverser les œuvres que nous tenons des Dieux, celles-ci que nous nommons justice et vérité ! Qu’il soit connu que la Couronne, éternelle, ne s’émeut pas et ne tremble pas devant l’ambition de ses crânes sujets. Qu’il soit connu qu’en ce jour justice et vérité se sont embrassées devant l’assemblée des nobles et des justes. Qu’il soit connu que la tyrannie d’un homme n’est rien devant la volonté des Dieux et que nul homme ne peut se déclarer digne d’être Roy par lui-même.

J’en appelle à vous mes frères, qui avez été témoins de cette victoire mais aussi témoins d’une telle fourberie. Que votre mémoire vous évite un pareil sort, que votre amour pour notre Roy, notre Couronne et notre terre, vous évite d’avoir recours à de tels procédés. Vous tous qui connaissez la terreur de la guerre, ses massacres sanglants, ses sièges interminables, ses victimes entassées dans des fosses, ses disettes et ses maladies : rappelez-vous qu’en ce jour l’ambition belliqueuse de cet homme s’est échouée contre les rochers inamovibles de la vérité. Soyez de fidèles témoins de cette vérité qu’incarne notre Roy. Soyez-le, pour la gloire de notre Roy, le salut de nos frères et la paix de notre Royaume.


Un tonnerre de vivats éclata dans l’assemblée. Les gardes mervalois, tenant l’Anozsia sous bonne garde, souriaient en te regardant. Théophylacte s’approcha tenant en main le Grand Sceau Royal et la chrysobulle. Le sceau doré y était déjà apposé, ne manquaient plus que le contreseing et le sceau des grands officiers du Roy. Les sires Athénodore et Diradour apposèrent les leur à la gauche du Grand Sceau Royal, tu apposas le tien à sa droite. Théophylacte fit couler le dernier pain de cire écarlate et allant y apposer le sceau tu te retins. Tu vis Arichis, face à toi, plus rogue que jamais. La cire avait beau commencer à sécher, tu ne pus t’empêcher de lui adresser quelques mots, les derniers que tu lui adresserais jamais :

- Vous avez voulu jouer avec le feu Arichis…seulement vous avez oublié que je brûle d’un feu qui ne s’éteint pas, d’un feu si chaud qu’il mange à travers la chair, les os et la pierre. « Brille et brûle », Arichis. Vous avez brillé. Maintenant vous brûlerez.


Et le sceau de tomber sur la cire.



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Tibéria de Soltariel
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MessageSujet: Re: [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse.   L av�nement - [MdO2017]L'avènement d'une nouvelle duchesse. I_icon_minitimeVen 9 Sep 2016 - 0:46


Les mots à peine prononcés, la foule se souleva dans le chaos le plus complet. Arichis en appela à ses soldats pour se protéger alors que la garde ducale se précipitait sur Tibéria aussi vite que possible. Son regard s’écarquilla d’horreur devant ces hommes cuirassés de fer foncer sur elle. Ça ne pouvait être que la fin pour elle aussi. Pourtant, les hommes l’encerclèrent non pas pour la tuer, mais pour la protéger de ce soulèvement. Elle fut poussée et bousculée sans ménagement hors de la salle. Impuissante, Tibéria suivait tant bien que mal le mouvement, totalement sous le choc de ce qui venait de se produire.

— Non, non, non, non… répétait-elle comme une litanie que personne ne pouvait entendre dans tout ce bruit. Elle avait retenu jusque-là ses larmes courageusement, mais cette fois c’était bien au-delà de tout ce qu’elle pouvait supporter.

Elle fut conduite jusqu’à une chambre où on l’enferma pour sa propre sécurité. Là-bas, Tibéria pleura et pleura encore jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de larmes à verser. Ensuite, elle plongea dans une sorte de torpeur qui donnait l’impression qu’elle était déterminée à simplement se laisser dépérir après que son monde se soit écroulé. Néanmoins, c’était mal connaître Tibéria. Dans cette solitude, elle eut le temps nécessaire pour réfléchir. Lentement, mais surement, elle analysait et digérait ce qui venait de se passer. Une partie d’elle regrettait d’avoir pris position contre lui, mais si elle ne l’avait pas fait, la situation n’aurait pas été différente et tous les deux seraient en fuite et face à un avenir plus qu’incertain. Arichis avait trahi le roi et l’avait du même coup trahi. Elle avait le cœur brisé. Pas plus tard que la veille des évènements, la jeune femme avait même prévu une petite surprise pour lui afin de détendre l’atmosphère particulièrement tendue depuis leur arrivée à Soltariel. Tibéria n’était pas certaine de la nature exacte de ses sentiments pour lui, mais elle ressentait maintenant un grand vide en elle sans savoir comment elle pourrait le combler.




Tibéria quittait que très rarement la chambre qu’on lui avait attribuée pour sa sécurité. Si elle le faisait, ce n’était jamais sans être accompagné par la garde qui la suivait partout où elle allait. Tibéria dut même se fâcher lorsqu’ils voulurent la suivre alors qu’elle se rendait au bain en prétextant qu’on pourrait l’attaquer dans un moment où elle serait très vulnérable. Elle avait alors rétorqué qu’elle prenait le risque en toute connaissance de cause et qu’il était hors de question de se laver devant témoin. Tout cela pour dire que Virgile la trouva effectivement dans sa chambre alors qu’elle tentait de passer le temps dans une lecture qui ne l’intéressait qu’à moitié. Elle n’arrivait pas à se concentrer, même sur quelque chose qui la passionnait normalement. Tibéria aurait aimé sortir et faire une balade à cheval, mais on lui avait fait comprendre qu’il s’agissait là d’une très mauvaise idée.

Elle vit entrer le vieux domestique, le dos courbé autant par souci de bienséance que par les effets du temps sur lui. Tibéria se leva pour aller le rejoindre.

— Oui?

L’homme lui expliqua avoir été envoyé par le Sénéchal afin de lui remettre quelque chose. L’objet en question était un petit coffret que Tibéria ouvrit. À l’intérieur, elle reconnut immédiatement ce qui semblait être des dessous féminins.

— Je suppose qu’il y a une lettre ou un mot mentionnant la provenance de cette… chose.

Tibéria parlait très calmement. Après tout, il aurait pu s’agir d’un cadeau que comptait lui faire Arichis. Néanmoins, ils devaient avoir la preuve que ce n’était pas le cas, car ils n’auraient eu aucun intérêt à lui montrer.




La cavale d’Arichis d’Anoszia aura été de courte durée. Il avait à peine quitté la ville qu'il fut intercepté par de Pasi qui passait justement par là. Il fut aussitôt arrêté et ramené au palais dans l’attente de son jugement. Une trêve temporaire s’était donc installée avec les Vrais-Soltari dont Pasi était le chef. Tibéria regarda l’homme devant elle avec une certaine curiosité. Malgré la véhémence des propos qu’il défendait, il semblait être un homme assez raisonnable. Évidemment, il voyait dans les évènements des derniers jours une occasion qu’il ne pouvait pas rater. Tibéria n’avait pas la tête à négocier, mais elle n’était pas insensible à ses arguments

— Je vous remercie sincèrement pour votre collaboration. Votre intervention va nous permettre d’éviter de nombreux désagréments supplémentaires dans une situation déjà malencontreuse. Pour ce qui est du reste… Un élément nouveau a été découvert et qui devrait faciliter les démarches pour le divorce. Néanmoins, je ne vais pas vous mentir en disant que je suis un peu dégoûtée et effrayée à l’idée de me remarier aussi rapidement. Je ne suis pas insensible à votre argument, mais je ne suis pas vraiment en état de passer en revue tous les célibataires de Soltariel. En outre, je suppose que vous deviez déjà avoir un candidat en tête, je me trompe? Je propose que nous en reparlions lorsque le procès sera terminé. Vous serez libre de présenter toutes vos conditions et je serais moi-même dans de meilleures dispositions. Est-ce que ça vous va?




Deux jours après la capture d’Arichis eut lieu le procès tant attendu. Incapable de manger tellement le stress lui nouait le ventre, la jeune femme faisait les cent pas dans ses appartements. C’était le pire moment à passer. Lorsque ce sera terminé, Tibéria pourra mettre tout cela derrière elle et se tourner vers l’avenir. Heureusement, les Vrais Soltari se faisaient discrets alors que les émeutes populaires s’apaisaient ce qui confirmait à Tibéria qu’elle leur avait peut-être donné, sans le vouloir, ce qu’ils attendaient depuis le début. Elle aurait tellement voulu qu’Arichis soit à ses côtés. Pourquo avait-il... Ah non, elle devait arrêter avec cela. Il avait fait une erreur. C’était fait, c’était le passé et personne ne pouvait le changer. Elle attendit donc dans sa chambre d’avoir un compte rendu du jugement.

— Mais laissez-moi passer! S’exclama une voix féminine derrière la porte. Je suis sa tante! Je veux voir ma nièce!

— Octavia!?

Tibéria se jeta sur la porte et l’ouvrit à la volée.

— C’est bien ma tante. Laissez là passer!

— Duchesse, pour votre protection, nous avons eu comme instruction de ne laisser entrer personne sauf ceux ayant reçu une autorisation de le faire.

— C’est ma tante! Ma seule famille au palais!

La duchesse ne leur laissa même pas le temps de réagir qu’elle attrapa sa tante par le poignet et la tira à l’intérieur avant de refermer aussitôt la porte.

— Quel accueil. Dis-moi, ils veulent vraiment te protéger ou cherchent-ils à te garder enfermée?

— Probablement toutes ces options. Souffla Tibéria en regardant Octavia piteusement.

— Oh, Tibéria… je suis venu aussi vite que j’ai pu. Quelle décision stupide aussi!

Le visage de Tibéria se plissa laissant croire qu’elle était sur le point d’éclater en sanglot.

— Non, je ne parle pas de la décision que tu as prise. S’empressa de dire Octavia qui n’avait pas envie d’essuyer une crise de larmes. Au contraire, tu as été brillante. Personne n’aurait voulu être à ta place, mais tu as agi en vraie duchesse. Crois-moi, je crois que plusieurs personnes ont été impressionnées par le courage dont tu as fait preuve.

— Et plusieurs ont été déçus…

— Arichis devait avoir un plan en tête, mais les plans ne fonctionnent pas toujours comme on le voudrait. Dans le cas qui nous intéresse, l’échec a été cuisant…

Tibéria soupira, courbant l’échine comme si le poids du monde reposait sur ses épaules.

— Tu ne dois pas te laisser abattre, Tibéria. Ton père, avant toi, a connu son lot de difficultés, mais il a toujours gardé la tête haute. Rappelle-toi qui tu es. Tu ne serais pas ici si on ne te croyait pas capable d’affronter ce qui reste à venir.

— Je commence à comprendre pourquoi Margot est devenue… ce qu’elle est devenue.

Octavia ricana.

— Attention, ne le dit pas trop fort. Ce n’est pas un nom que l’on aime entendre ici, mais je comprends ce que tu veux dire.

Elle se dirigea vers la porte de la chambre qu’elle ouvrit avant de crier dans le couloir.

— Mais qu’est-ce que vous attendez pour apporter le vin? Nous en avons désespérément besoin ici!

Octavia tourna la tête en direction de Tibéria.

— Je vais rester avec toi quelques jours. Toutefois, tu devrais revoir l’hospitalité du palais. Ça laisse à désirer…

— Encore… Tu as raté l’incendie des cuisines…

— Ah?




La nuit était très avancée et Tibéria ne dormait toujours pas. Pendant des heures, elle était restée étendue dans son lit à fixer le plafond en espérant que le sommeil finisse par la rattraper, mais il y avait beaucoup trop de choses qui se bousculaient dans sa tête. Elle était en compagnie de sa tante lorsqu’on était venu lui annoncer la sentence. Elle s’était attendue à ce que ce soit sévère, mais pas à ce point. Sous l’effet du choc, elle avait tourné de l’œil en reversant au passage une carafe de vin et un plateau de nourriture qu’on leur avait apportée. En revenant à elle, on lui avait confirmé que la sentence s’appliquait également aux fils de la famille, mais que les filles avaient été épargnées. Néanmoins, le nom Anoszia avait été rayé de la carte et nulle ne devait plus le prononcer sur les terres du Soltaar. Tous les titres et toutes leurs possessions leur avaient été retirés. Ils n’avaient plus rien. La culpabilité l’envahit tel un serpent glacé se faufilant dans ses entrailles. Tout ça était de sa faute. La punition d’Arichis était juste, mais elle appréciait moins le fait que les enfants aient été également emportés par la vague. Être condamné à l’exil alors que l’on est innocent, Tibéria savait ce que ça faisait, car elle l’avait vécu. Elle comprenait le sentiment d’impuissance que l’on ressentait au moment où on était arraché à tout ce que l’on a toujours connu.

Tibéria se leva de son lit pour aller à son bureau. Elle ne savait pas exactement quelle heure il était, mais ça n’avait pas d’importance. Elle alluma quelques bougies puis s’installa pour écrire. Elle ne savait pas quel impact aurait cette lettre, mais elle se devait de l’écrire. C’était son devoir de le faire.

À Cleophas d'Angleroy, Grand Chancelier du Royaume, Prince de Merval & Vicomte de Corvall

Si je prends la décision de vous écrire plutôt que de vous parler de vive voix, c’est parce que l’émotion est encore trop vive et qu’il est plus facile pour moi de coucher sur le papier ce que je souhaite vous dire. Je vous écris à propos de la décision qui a été rendue. Tout d’abord, comprenez bien ici que je ne suis nullement en désaccord avec la décision qui a été rendue bien qu’un violent sentiment de regret m’anime. Le regret, car je n’ai pas su trouver la force de l’arrêter avant. Le regret, car par mon manque de volonté, le roi s’est retrouvé en grand danger de mort. Et je me prétends être une duchesse… Toutefois, ce n’est pas de cela qu’il est question présentement.

Dans votre jugement, vous avez également condamné les fils d’Arichis tout en épargnant ses filles. La décision a éveillé en moi de douloureux souvenirs qui ne sont pas si lointains. En conséquence des agissements de ma sœur Margueritte de Soltariel, mes jeunes sœurs et moi nous avons été exilées alors que nous étions innocentes. Nous avons été arrachés à notre maison pour une terre qui nous était inconnue et c’est probablement ce qui a tué notre mère. L’avenir nous apparaît alors bien sombre. J’ai vu la colère et la haine consumer ma sœur jusqu’à ce qu’il ne reste rien de celle qui a grandi à mes côtés. Je ne sais pas si mes mots vont vous toucher. Je respecterais votre décision, peu importe ce qu’elle sera. J’écris surtout par devoir, car ils ont été mes beaux-enfants et j’ai déjà juré de leur venir en aide si le besoin se faisant sentir. Je ne les ai connus que très brièvement, mais ils me sont apparus comme de beaux jeunes gens pleins d’ambitions et de rêves devant un avenir qui s’annonçait plus que brillant. Aujourd’hui, leur colère envers moi doit être terrible et je la comprends, mais j’espère qu’ils comprennent également l’ignominie de l’acte posé par leur père. Ce n’est pas parce qu’ils sont ses enfants qu’ils le cautionnent nécessairement.

Encore une fois, je ne remets pas en question la sagesse de votre jugement. Je vous demande simplement de laisser aux garçons la même chance qu’aux filles pour qu’ils puissent rebâtir leur vie et entrevoir l’avenir avec espoir.

J’espère que cette lettre trouvera un regard attentif.

Humblement.

Tibéria Soltari-Beronti, duchesse de Soltariel


Tibéria laissa sa plume en suspens. Elle avait écrit cette lettre avec son cœur, le souvenir de ce qu’elle avait elle-même vécut encore très vif à sa mémoire. En levant les yeux, elle vit par la fenêtre le ciel pâlir à l’horizon. L’aube était proche et elle n’avait toujours pas fermé l’œil. Elle apposa un sceau de cire sur la lettre et la confia à un serviteur encore somnolent pour qu'elle soit remise au Grand Chancelier. Elle ne savait pas si cette lettre allait changer quelque chose, mais sa conscience durement malmenée était apaisée…

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