Julas de la 4e ennéade de Karfias
17e année du Onzième Cycle
Matin
Ce matin il n’avait pas été question de rituels quotidiens. Pas l’envie, pas le temps, pas la patience. Ce matin était celui que vous attendiez depuis trop longtemps déjà. Alors dès le réveil tu t’étais baigné, préparé, et penché –
une fois de plus, une fois de trop – sur l’état de vos bagages. Et pour ce que tu savais de ce que tes camarades masculins et toi aviez emmené, il ne manquait rien. Ni armes, ni vêtements –
à un pantalon et une manche près – ni bijoux, ni instruments, ni textes, ni denrées… et réalité, vous repartiez même avec plus de choses que vous n’en aviez apportées.
Ne serait-ce que ton bagage est déjà plus lourd d’un vieux grimoire Moyen-Oliyan d’anatomie comparée, de bocaux d’huiles et de masques offertes par Galamdir et surtout… de Vìrin. Parce qu’il était hors de question que Vìrin voyage sans vous cette fois. Elle avait risqué sa vie et sa liberté à l’aller, et tu refusais catégoriquement qu’elle fasse de même au retour. Tu ne valais pas qu’elle s’inflige une chose pareille, et tu serais incapable de te le pardonner si à cause de
tes craintes, elle se retrouvait mise en danger. Elle prendrait le bateau avec vous. C’était un moindre mal. Après tout, Thaar t’avait déjà vu accompagné d’elle.
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De votre côté vous êtes prêtes ? tu lances, portant ta voix de la porte ouverte d’un dortoir d’ellon à la porte ouverte d’un dortoir d’ellyn Il ne vous manque rien ?-
Tout est bon ! une voix quelque part entre le soulagement et l’excitation te répond Vivement qu’on y soit. Je n’en peux plus de l’odeur des épices mal appariées.Tu t’autorises un éclat de rire que tes deux sœurs d’armes te rendent bien volontiers, alors que terminant de lacer tes poulaines blanches, puis vérifiant que ton chignon soit assez bien noué pour tenir le voyage, tu quittes tes camarades en direction des écuries de la Dame Blanche, une grosse part de ton bagage à l’épaule, et ce que tu avais de plus fragile à la ceinture.
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On se rejoint à l’entrée ! tu ordonnes dans ton dos Je vais chercher Vìrin.Comme chaque fois que tu venais la trouver dans cet espace qui malgré sa fantasque immensité était bien trop petit pour elle, Vìrin s’était vite excitée. Dans son agitation la grande fauve avait d’ailleurs manqué de te renverser… sauf que là où habituellement tu te laissais faire, aujourd’hui tu lui avais intimé de se contenir. Aujourd’hui tu portais des choses fragiles… et quitte à être là, elle devrait porter sa part des bagages ! C’est finalement le moment de passer ses sangles à ta partenaire qui servit de jeu, et ce n’était pas plus mal ! Parce que c’était un jeu que tu ne pouvais que gagner.
La main sur le flanc de l’animal, tu l’accompagnais pour la dernière fois –
de vos vies tu l’espères – en direction de l’entrée du Palais qui vous a logé pendant deux longues ennéades.
Il était temps de rentrer à la maison.