En début de règne, pas grand monde... mais ça va venir!

Milieu de la huitième ennéade de Karfias - été.
Dix-septième année du onzième Cycle.

Griffon chevauchait à la tête d’une suite somme toute modeste pour sa nouvelle position ; toutefois parmi cette suite se trouvait le bâtard récemment légitimité de Guilhem de Tall. Davantage de gens l’avait accompagné pour son départ mais une part non négligeable de ceux-là étaient resté à Diantra une fois que le nouveau marquis eut juré fidélité au roi. Le marquis serait bien resté davantage à la capitale, ne serait-ce que pour se mêler un peu à la cour qu’il allait devoir côtoyer un jour ou l’autre, mais il avait des affaires bien plus pressantes chez lui et s’il restait plus que de raison auprès de sa majesté ça pourrait être mal interprété par ses nouveaux vassaux, ce qu’il préférait éviter. Et puis il avait ordonné la préparation, avant de partir, de la cérémonie d’hommage qui devant avoir lieux à son retour. Plus vite les seigneurs langecins et lui-même seraient liés par des serments réciproque et mieux ce serait. Il avait décidé que la cérémonie ne serait pas adressée qu’à la noblesse, en effet il n’était plus le seigneur de Sorrault et tout le monde devait le savoir, de la prostituée à Alcion d’Amderran, bien que ces deux-là ne soient pas si différents, en passant par la bourgeoisie ; et pour ce faire il décida d’organiser un banquet public. Un banquet qui sera alimenté par quelques jours de chasse à laquelle la noblesse était évidemment invité, et encouragée, à participer.

Ainsi c’est après ces quelques jours passés dans les forêts seigneuriales autour de Langehack que Griffon put lancer ce fameux banquet, usant l’argent que le conseil de régence n’avait pas dilapidé, il s’assura que tout le monde puisse participer audit banquet et que, surtout, personne ne manque de rien, roturier comme noble. Durant ce fameux banquet, Griffon chercha Gaël du regard, certain que ce dernier serait présent, bien qu’il ne soit sans doute pas venu seul. C’est donc avec une coupe de vin langecin, qui était donc bien meilleur que celui que ses gens cultivaient dans les marais, il fallait bien l’admettre, que le marquis s’en alla vers le régent de Missède, il avala une gorgée avant de finalement adresser la parole au jeune homme.

« Messire. » Griffon salua son convive d’un hochement de tête avant de poursuivre. « Je suis content de vous voir ici car j’avais justement quelque chose à vous proposer. » Le marquis avala une autre gorgée de vin avant puis regarda une seconde son interlocuteur. « Il me semble que votre neveu est désormais en l’âge de devenir page, voir écuyer, et il serait digne de son rang de me servir en cette qualité . »

Maël avait écarquillé les yeux quand son oncle avait parlé de "débuts". Pour vrai ?! Une fierté immense lui avait gonflé le cœur et c'est avec la plus grande ferveur qu'il avait pousser un éclatant :

- Oui mon oncle ! " avec un sourire d'une rare intensité.

Fait encore plus rare, il n'avait put s'empêcher de sautiller sur place et voyant l'inquiétude sur le visage de sa tante, il s'était précipité pour enrouler ses bras maigres autour de sa taille pour la serrer de toutes ses forces, enfouissant son visage heureux dans le tissus de sa robe bleutée. Il allait à Langehack ! Il allait y aller avec son oncle ! Il aurait aimé pouvoir être grand et impassible, mais il en avait le cœur si gonflé qu'il ne savait qu'en faire.

Pendant le voyage, il avait écouter toutes les descriptions, toutes les histoires, tous les détails les plus infimes que lui contait Gaël. Il en demandait toujours plus. Le soir en s'endormant, il s'imaginait son faste et ses gens important. Il imaginait le nouveau duc donc il connaissait si peu. Il faudrait qu'il soit impeccable. Qu'il présente bien. L'angoisse et l'excitation se mêlaient, lui serrant la gorge sans qu'il n'en laisse rien paraitre. Les yeux grands ouverts dans l'ombre nocturne, il imaginait le banquet, encore et encore, tout en repassant les leçons d'étiquette de tante Linaëlle. Sa famille serait fière de lui. Tout Missède serait fière de lui. Parce que c'était ce que devait faire un futur baron.

Puis arriva l'instant fatidique. Le moment incroyable.

Certains adultes s'étonnèrent peut-être devoir un aussi petit bout d'homme marcher aussi paisiblement au côté de son oncle. Il se tenait aussi soigneusement à l'écart des enfants qui pouvaient chahutés de-ci de-là, préférant forcer son oncle à entretenir une conversation sur la façon dont se déroulait une chasse à cours. Sa veste vert tendre et son pantalon brun ne portaient nulle tache, il y veillait avec soin, et ses grands yeux bleus passaient de table en convive sans empressement. Comme d'habitude, la réalité était un poil en dessous des idées qu'il avait eu... si ce n'étaient les robes. Ça, il n'avait pu les imaginer avec autant de détail de dentelle et de couleur.

Distrait par le giron d'une femme plantureuse dont le col était agrémenté d'étranges plumes vertes sur lesquelles se découpaient un étrange œil bleuté, le garçon vit arriver devant lui une assiette de viande fumante. ça sentait si bon !

- Qu'est-ce que c'est, mon oncle ? " demanda-t-il, les narines palpitantes... Sans réponse. Mais cela s'explique rapidement avec l'homme qui vient d'interpeler le dit Oncle.

La chevelure rousse du gamin se tourne vers le langecien inconnu, une mèche rebiquant curieusement dans la brise nocturne. Ses grands yeux bleus tombèrent sur un visage adulte et mâle comme ceux des chevaliers de la Bibliothèque ! Suivant l'exemple de son tuteur, il se lève de toute sa taille - plutôt haute pour un enfant de son âge - avant d’exécuter le salut le plus respectueux que lui a apprit Linaëlle. Bon... Il n'est pas sûr de la fin et il manque peut-être quelque chose, mais il le fait avec application. Le sérieux du petit bonhomme est palpable et fort de son respect et de ce que lui a dit sa tante, il n'interrompt pas les adultes. Il se contente de se tenir là en comprenant que la discussion parle en partie de lui.

Et quelle discussion !

Cet homme est bel et bien le seigneur de son oncle... enfin le sien. De ce qu'il a compris en tout cas, il devrait être les deux. Mais voilà que son cher oncle se tourne vers lui ? Pour lui demander son avis ?!

Intimidé, le garçon tente tant bien que mal de cacher son trouble. Inattendu ? Il n'était pas sûr du sens de ce mot. Mais puisque Gaël avait dit que c'était un honneur, il savait ce qu'il devait faire !

- Je pense que c'est un honneur ! " Puis se rendant compte qu'il avait peut-être été un peu trop enthousiaste, il ajouta d'un ton plus semblable à son calme habituel " Je suis fier de faire ce qui est bien pour Missède, Messire. "

Son attention était tant focalisée sur Gaël que Griffon n’avait pas fait attention au garçon qui se tenait juste à côté de son oncle, il ne s’en rendit compte que lorsque l’oncle en question se tourna vers l’enfant. Ainsi le marquis tourna également son regard sur Maël et écouta avec attention sa réponse et hocha la tête, satisfait par l’enthousiasme du garçon.

« Et tu as raison de l’être, c’est tout à ton honneur, de plus je ne doute pas que tu dirigeras Missède aussi bien que ton oncle l’a fait jusqu’à présent. »

Il ponctua sa phrase d’une gorgée de vin, c’est fou ce que boire autre chose que celui de Sorrault pouvait le pousser à boire. Derrière lui, le suivant comme son ombre depuis que Griffon l’avait adoubé, Fossoyeur, fit un pas en avant, sortant de la foule pour se placer à la droite de son seigneur et avec le manque d’expression faciale qui lui valut son surnom se mit à réciter :

« Maël de Missède, baron de Missède par la grâce de Néera, je vous officialise donc, par les droits qui me sont donnés par ladite DameDieu au nom de de son excellence Griffon de Langehack, marquis de Langehack par la grâce de Néera, page de son excellence ici présente. Puissiez-vous le servir au mieux de vos capacités, avec distinction et honneur. »

Il fit ensuite un pas en arrière pour retourner dans l’ombre de son seigneur, regardant dans les alentours comme s’il y risquait d’y voir une dague au hasard du replis d’un vêtement ; avec une main tenant sur son ceinturon d’arme et l’autre posée nonchalamment sur la poignée de son épée, dans son harnois resplendissant réhaussé d’un manteau bleu sombre, bien qu’usé par le temps, Fossoyeur avait de quoi intimider, surtout en considérant ses cicatrices. Il contrastait d’autant plus avec les seigneurs et dames alentours qu’il était aisé de lire ses origines nordiennes sur son visage. Quiconque le connaissait suffisamment pour détecter les trop rares tics faciaux du chevalier pouvait deviner qu’il n’était pas à l’aise ici.

« Maël, bientôt tu deviendra mon écuyer, mon écuyer-banneret qui plus est, et ensuite, lorsque tu auras accomplis ton premier fait d’arme je présiderait la cérémonie qui t’adoubera. » Griffon termina ensuite sa coupe avant de la tendre à l’enfant. « Mais en attendant est-ce que tu peux aller remplir ma coupe ? » Le marquis ne regarda pas l’enfant s’éloigner avec la coupe en question, à la place il regarda Gaël. « Maintenant que ceci est réglé, puis-je vous inviter un jour pour une chasse, j'admet que j'aurai vous voir parmi nous quelques jours plus tôt. » Puis il s’arrêta enfin de parler pour que l’intéresser puisse enfin en placer une.

« Vous avez raison, nous pouvons enfin laisser les divisions du conseil derrière nous. » Maël rapporta la coupe de Griffon et ce dernier la brandit triomphalement. « Pour le Langecin et le royaume ! »

Il leva haut la voix pour afin que tous puissent l’entendre, après tout c’était une déclaration derrière tous pouvaient se rallier ainsi le toast initié par le régent de Missède se répercuta dans toute la salle décorée des bannières des de Langehack et les festivités repartirent de plus belle. Quant au marquis il se contenta d’hocher la tête, l’idée était intéressante, prometteuse même.

« J’ai également un projet dont j’aimerai vous faire part : je compte lancer des travaux pour rénover, embellir et agrandir le temple de la DameDieu qui s’occupa si bien de votre cher et tendre. De bons et loyaux services devraient être récompensés, vous ne pensez pas ? »

Les conversations se poursuivirent ensuite la journée durant puis, tard dans la nuit, le dernier des convives alla se coucher car demain la cérémonie d’hommage aurait lieu, elle se ferait devant tous et impliquerait tout le monde ainsi les plus récalcitrants à aller se coucher n’étaient pas des seigneurs titrés mais, pour la plupart, des chevaliers qui ne possédaient, pour les plus chanceux, qu’une maison forte non loin d’un château ; ce n’était pas bien grave, ce n’était pas de ceux-là que Griffon allait recevoir l’hommage mais de leurs seigneurs et tant que ces derniers s’étaient accordés une bonne nuit de sommeil tout irait bien. Le lendemain fut passé en prières puis le banquet se termina et enfin la cérémonie débuta en début d’après-midi.

Griffon fut le dernier à entrer dans la salle du trône occupée par toute la noblesse langecine. Les ecclésiastes commencèrent une prière commune en l’honneur de la DameDieu et enfin le premier seigneur put s’avancer, monter les marches qui montaient jusqu’au trône et s’agenouiller devant le nouveau marquis. Ce dernier ayant décidé qu’il s’agirait du baron de Merval, Griffon prit entre ses mains celles du noble et celui-ci jura fidélité sur le livre saint de Néera tenu par un prêtre qui se tenait à côté du trône puis Griffon fit de même, ils échangèrent ensuite un baiser puis le marquis confirma qu’il était bel et bien baron de Merval par la grâce des dieux et que ses descendants jouiraient de son fief tout comme lui.

Puis les seigneurs se succédèrent et enfin le dernier ploya le genou devant Griffon. Enfin le dernier en question n’était pas seul étant donné qu’il s’agissait de Maël de Missède son oncle l’accompagna et lui souffla ce qu’il devait dire s’il ne s’en souvenait pas puis le régent confirma l’hommage. Ils purent ensuite retourner prendre leur place juste devant les marches qui menaient au trône comme il seyait à leurs rangs. Après quelques secondes de silence Griffon se leva enfin dudit trône et fit un pas en avant pour s’en détacher complétement.

« Mes amis je suis fier de vous annoncer que les divisions du passé n’ont plus de raison d’être et j’ai décidé de partir en voyage pour faire le tour de ce magnifique pays qui est le nôtre. Ainsi je commencerais par Missède car, comme vous le savez peut-être déjà, j’ai pris son baron, Maël de Missède, comme mon page et comme les barons de Missède ont toujours été de nobles et loyaux serviteurs de Langehack, il me semble naturel qu’ils soient les premiers à recevoir cet honneur. Mais rassurez-vous, je n’ai oublié personne et tout le monde recevra ce qu’il mérite en accordance avec les enseignements de la Bienveillante. »

Les yeux d’émeraude du marquis avait parcouru l’assemblée durant son discours et pour sa dernière phrase son regard s’arrêta une seconde de plus que pour les autres sur Alcion avant de reprendre son ballet.

« Mais je ne suis pas encore partie et c’est une journée qui se doit d’être célébré alors je vous invite de ce pas à me rejoindre au banquet final ! »

Ainsi il donna l’exemple et descendit des marches pour sortir de la salle du trône et aller dans le hall du château où des serviteurs avaient organisé le banquet final en question durant la longue cérémonie.