Ratissage [Salfaryl]

« Et heureusement que son prix culmine bien haut, ajouta le nain dans la pièce, ou les pavés  des ruelles seraient tapissées de chiasse. »

Et voila qui complétait le signal que c'était échangé leurs supérieurs.
Kandalur se boyauta bruyamment faisant s'échapper multiples fumerolles de son gosier embrumé. Selon lui, le Maître avait trouvé la bonne rhétorique, le bon complément et par tout les Dieux, la bonne comparaison avec leur actuel mission !
Car c'était la ce qu'il faisait depuis des jours maintenant : arpenter et racler les venelles en espérant dégoter la moindre trace de merde pouvant être rattaché à cette satané Corporation d'Argent.

Et autant dire que pour Kandalur, Thaar avait depuis quelques jours,  l'aspect d'un vieux calecif tacheté de traces de freinage. On trouvait des résidus de ce remarquable rassemblement de poinçonneurs de métal à la con aux coins de tout les boulevards des quartiers d’artisans.
Ils étaient devenus tellement puissant, avaient au fils des siècles pris tant d'importance, qu'ils ne cherchaient plus réellement à ce cacher.  Et pourquoi le ferait t'il au fond ?

Il était aisé pour lui de passer inaperçu, du moins le pensait t'il. Car aujourd'hui à Thaar, qui se souciait réellement d'un gratte-souverains nain au teint halé ? Une vie entière à ramper dans les artères de la cité pour donner le change et être les yeux et les oreilles des Mille-Cave. Pour sûr qu'il puirait la merde lui aussi, pour sûr qu'il n'avait pas les mises et les reliures des pomponnés de caveau qui lui servait de chef, mais qu'importe. Il était un rouage de la machinerie, irremplaçable, nécessaire et surtout, savait se contenter de sa -très importante rente mensuel.

Saisissant le brûle-gueule mit à la disposition de son hôte de l'instant qui l'avait délaissé, il en tira une grande bouffée avant de s'exprimer.

« Alors, vîl sarcleur de graviers, comment c'est passé ton bêchage ennéadien ? Point trop d'aiguillions et d'épines dans les haies et futaies de ton verger ?»

S'esclaffant devant son propre trait d'esprit et trouvant se comparatif on ne peut plus juste à nouveau, Kalandur reprit une bouffée de la pipe qu'il tenait en main.
Décidément, il avait encore plus de points communs avec le Maître qu'il ne le pensait.
Mais trêve de baliverne, il n'était venu ni pour bavasser sans but, ni pour fumer jusqu'à s'en embrumer la caboche. Jardiner n'était pas un travail de tout repos.

Lui, il l'aimait bien.
Cette longue-guibe avait les manières d'un bon vieux serviteur de maisons, un brin endimanché et efféminé à son goût, mais Kalandur le savait : on ne choisissait pas toujours ses relations dans se métier. On ne choisissait même jamais en réalité. Que ce soit les cibles à observer ou les jacqueteur de bidet dans son genre à interférer dans son quotidien, il n'avait de pouvoir sur rien ; les Dieux étaient les seuls à choisir sa route. Et par les trois poils-du-trouffion, les divins se foutaient bien souvent de sa trogne. Ça devait se plier sévère la en bas, tandis que dans leur divine gangue, ils se raclaient le glissoir à bière en lui reluquant les baluches.
Mais tout de même, lui, il l'aimait bien.
Il en avait connut bien d'autres des «partenaires» et pas toujours les plus vifs de la caboche, même parmi ceux de sa race. Tout les nains n'étaient pas des lumières, la majorité même étaient plus du genre graviers grinçant loger au fond de la botte. Le genre qui vous courrez bien sur le frontard, pas assez énervant pour faire mal, pas assez fin pour ne pas être gênant.
Bref, il l'aimait bien lui.

Kalandur saisit alors le manuel de lorgnette appliqué qu'il lui tendait  et commença à en feuilleté les pages, d'abord doucement, puis plus rapidement. Bordel qu'est ce qu'il avait donc à crayonner autant de phallus celui la maintenant ?! C'était à ce demander s'il n'avait pas passé ses journées à reluquer les pieutards des éphèbes du quartier des joufflus plutôt qu'à suivre les bonnes personnes.

Un sourcil arqué de façon pyramidale, l'autre complètement plat, la surprise se lisait aisément sur la figure de l'espion des Mille-Caves qui continuait à pipauter comme une cheminée.

« Mh, intéressant, mentit t'il d'abod honnêtement.
Très intéressant. »

Puis, tandis qu'il continuait de lire, un nom se détacha entre les anus et les phallus , retint son attention et lui fit claquer la langue. Sans réfléchir plus, il sortit à son tour son calepin à couverture de cuir et en parcourut les lignes comme possédé.
Lâchant toute une série d'onomatopées plus rocailleux les uns que les autres, il finit par relever de la trogne en pointant sur les deux carnets, le patronyme qui revenait.
Il n'avait pas officié dans les mêmes endroits que lui
Cela sous entendrait donc, que ce pointu la était une pointure parmi les pointus.
Ce n'était pas le premier qu'ils repéraient à vrai dire, mais cela était toujours plaisant.

« En voila encore un l'ami, grogna Kalandur, son doigt ayant glissé sur un chibre veineux mal crayonné. Pour sûr que s'en est un gros, un bon gros, des vas et vient dans tout les trous à bouses de ces ferronniers de bas étages, regarde. Dit à ton patron que nous serons prêt,  encore une dizaine de noms comme celui la et nous aurons de quoi effectuer une bien belle taille automnale !»

Il éructa un rire gras, pâteux, caverneux, lui soulevant un glaire qu'il envoya fissa voler sur un coin du tapis de fanfreluche qui jonchait la pièce.

«  Encore d'autres détails comme celui la le longuet ?! »

Oui, Kalandur semblerait heureux. Très heureux.

« Wik, maugréa t'il entre deux bouffées, roulant lentement ce patronyme on ne peut plus court entre ses dents. Voila un bien beau un grimpe-vieille comme on n'en a plus vu depuis longtemps. Je crois point avoir lorgné un asservi avec le cuir aussi lustré que ce pieutard la, on dit qu'en plus de lui racler régulièrement le fourneau, il serait l'héritier direct de tout son commerce, si c'est pas avoir le joufflu remplit de pépites ça. Tu crois ça toi ?! Pire encore, j'ai même entendu qu'il était du genre à vouloir la larder de la bonne vieille façon, du genre avec son métron d'acier, mais qu'elle passait l'éponge ! Tu crois ça toi ?! Par les diamants du Gardien, si je m'avisais d'enfourner le Maître de cette façon toute les fins du mois, ça fait bien longtemps que j'aurai finit enterré dans les sous sols des Mille-Cave pour servir de moellons. C'est peut être encore une coutume noirelfe à la con, du genre fourre moi j'te fuis, plante moi j'te suis. Tu crois ça toi ?! Par les bal...»

Trop adsorbé par sa propre haine, sa tirade mourut comme flammèche sur mèche de suif pendant une tempête de sable, quand son homologue lorgneur de venelles lui tendit un soit disant plan du Palais d'Argent. Pour sûr que c'était la point du grand art à vous décrochez la mâchoire, à vrai dire Kalandur avait déjà vu des pisses-laits crayonnés mieux que ça, les yeux fermés et dans le noir. Mais pouvait t'il vraiment blâmer son acolyte de fumoir ?
Kalandur était presque convaincu qu'aucuns maîtres bâtisseur ou architectes en ce bas monde, ne disposaient du talent d'Oblianos pour dessiner des phallus; alors pourquoi donc devrait t'il disposer du leurs pour concevoir des plans ? De plus, l'important n'était pas la, car ces trois ou quatre coups de charbons sur vélin se révélaient être aussi précieux que le trésor entier d'un foutu dragon.

« En effet, en effet, répondit t'il toujours absorbé par les détails du plan qu'il cherchait à mémoriser au plus vite. Rien d'impossible quand tant de clinquantes se mettent à sonner à l'unisson. »

Machinalement, il crayonna sur son propre carnet à mains levés, ce que de ces yeux il mirait.
Cette information, bien que difficilement acquise par son confrère aux longues jambes, lui vaudrait sûrement une belle prime de la part du Maître des Caves. L'Ancien n'avait pas à savoir qui en était l'auteur au fond et il n'existait point de petits profits après tout.

S'enfonçant en suite bien tendrement dans les édredons, un quenottant crasseux chevillé à la trogne, l'espion nain savait que le temps pressait maintenant et qu'il devrait bientôt rejoindre les ruelles. Mais avant, il restait une information à partager.

« Bien que j'apprécierai fortement, croit moi sur parole, continuer à fumiger la pièce en ta compagnie, le devoir m'appel. Mais mon Maître m'a chargé d'une nouvelle à transmettre au tient, ouvre bien tes esgourdes, les répétailles c'est point mon domaine : Le Sombre à arroser les bonnes fleurs du guet. Disons que quand le moment sera venu, ils regarderont ailleurs, trop occupés qu'ils seront à renifler les nénuphars des suces-queutards lubrifiées au saindoux qu'ils auront pu se payer grâce à l'or des nains. Comme je les envies. Bien noté ? »

A vrai dire, c'était aussi son prochain plan. Kalandur souhaitait entreprendre encore une ou deux bavettes avant que les choses sérieuse ne commence. Qui serait dire en suite la suite des événements ?
Sûrement pas lui.