Chasse à courre (solo)

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Début deuxième ennéade de Verimios de l'an 17 du XIe cycle
Auberge le Pharembourgeois.

Une auberge modeste mais acceptable. Mais ils ne sont là ni pour le confort ni le panorama. Elle est propre et c'est tout ce qu'ils demandent. De toute façon, ils ne seront pas là assez longtemps pour se plaindre du manque d'eau chaude. Au moins ont ils une cheminée.

Il y en a un debout, en train de trier les notes en les lisant dans leur tête. Le second les colle sur le mur de leur demeure provisoire avec un peu de gomme de pin que Dante traine dans sa cassette d'herboriste. Dans la mécanique bien huilée de leur être, les deux individus ne sont concentrés que sur une seule chose. La chasse à venir. Au milieu de tout ce chaos, une carte de Miradelphia.

C'est juste dommage qu'on ait pas à les buter.

Clame la Bête avant que Dante ne se tourne pour relire un document sur le mur, le comparant avec celui qu'il a dans les mains.

On est pas payés pour ca jte rappelle… Je me demande pourquoi c'est le père du mari qui les cherche à défaut de son père à elle. Pourquoi l'Hespéris nous a pas envoyé à son padre?

-On est pas payés pour penser, mais pour trouver.
-Mais pour trouver, il faut penser. Il y a pas de demande de rançon. Elles ont disparues pendant le mariage…
-J'ai Faim…

Dante ignore la Bête, la laisse à son ronchonnage et sa lecture, attendant qu'elle ait finit avant de placer la nouvelle donnée. Il essaye de comprendre l'intérêt d'enlever deux gamines en plein mariage. Il connait un peu les lubies des nobles. El lui a dit qu'ils rechignaient à se marier à des bourges. Donc, ca serait un seigneur désargenté.

-Moi aussi j'ai Faim… Mais on va manger plus tard. J'ai hâte de me pousser de ce bled. On trouvera bien quelqu'un à bouffer en route... et note ça. Vérifier les crédits du papa De Termer et celui de l'Arrrrsiiiiinoéééé… Voir c'est qui qui va payer finalement.

-Le petit sketch au dîner t'a fait dresser l'oreille toi aussi? Demande la Bête, dubitative… Elle a le goût du sang sur la canine… Et à vrai dire, Dante aussi. Il se tient tranquille, mais il commence à avoir envie de tuer… La traque lui fait toujours cet effet ceci dit. Leur cerveau carbure à toute vitesse. Pour traquer, il faut penser comme la proie.

-Le petit numéro dit et ne dit pas beaucoup de chose. On nous cache des trucs… Qu'est ce que tu lis la toi? Demande il à son colocataire, l'interrompant dans sa lecture.

-C'est un témoignage de la soirée... Tiens? Il manquait un canasson…  

-Lis plus fort… Et en ordre, sinon je lirai moi même.

Bon prince, Zhak'Bar coopère. C'est qu'il a hâte de partir.

-La dernière personne à avoir vu les gamines c'est le père. Il a certifié qu'il est venu voir sa fille et qu'il s'est fait assommer par une personne inconnue. Quand il s'est réveillé, il était seul. C'était pendant la fête.

Zhak'Bar ferme les yeux, il s'imagine la scène…

-Pourquoi ce trou du cul est allé voir les gamines à cet instant précis? Qui attendait? Il s'est passé quoi?

-Pourquoi ca te turlupine tant Dantechou? susurre la Bête, hilare.

-Je sais pas… Relis du début s'il te plait. Concentre toi.

… Les ravisseurs ont agi pendant la fête suivant les vœux de mariage. Pas de trace d’effraction, pas de porte forcée, sauf une à l’intérieur, mais on a conclu que l’un d’eux l’avait enfoncée après le rapt pour s’enfuir plus vite… Il ont aussi frappé le sieur Adonis d’un coup de bassine à l’arrière de la tête. Comme c’était en plein mariage, personne n’a vraiment remarqué la chose… de plus, c’était durant un gros orage. Les bruits de lutte et de fuite auront sans doute été assourdis par le tonnerre.

Songeur, Dante recule, contemplant le mur pendant que l'autre continue sa lecture… Pourquoi ca le turlupine à ce point? C'est facile. Un kidnappeur ne pensera pas comme une proie. Quand il emmène quelqu'un, ce n'est pas ce que la cible ferait. Des gamine de leur âge, aussi malignes soient t'elles, n'iront pas s'embêter. Si elles avait été kidnappées, une demande de rançon aurait été faite. Ou elles auraient pris le bateau vers l'Itrii'Vaan pour finir dans un bordel quelconque.

Aussi les femmes Péninsulaires puissent t'elles être en demande, l'idée que un marchand d'esclave enlève deux nobles en plein mariage pour les déflorer et les vendre comme esclaves de plaisir est risible.

Il ferme l'oeil, laissant à son alter ego le plaisir relatif de continuer la lecture. Il réfléchis… Il s'imagine…

Le père assommé, il lui semble que sur le rapport de police il avait été poignardé et avait emporté l'arme. C'est un détail qu'il case dans un coin de sa tête, pour plus tard… Les gamines… Aurait il des complices? Non. Plusieurs durant une fête, ca aurait paru. A moins que les invités ne soient tous de mèche? Les filles auraient t'elles été tuées? Non. Sûrement pas, il n'aurait pas donné suite au contrat.

L'orage et les éclairs, des invités invisibles, intangibles… Absents. Seuls. Il savait qu'elles seraient seules. Le père? Une donnée insignifiante dans le tableau. Une tache d'encre au milieu d'une oeuvre de maître. Une zone d'ombre qui gâche la vue d'ensemble. Un homme ou une femme? Une femme aurait recouru à des artifices pour pallier les jupes encombrantes et les muscles déficients … Une odeur de femme… Une odeur de peur… Un corridor avec une porte au bout… Une porte forcée, une seule porte forcée. Une proie… Vive et jeune, fraîche et à la viande tendre… Le sang  monte à la gueule de Dante.

…    Les laquais étaient mobilisés pour la fête. Il y avait bien la servante des petites, à l’étage, mais elle affirme être partie avant les faits…

Seules. La servante est partie. Pourquoi une servante laisserait des gosses seules dans une maison inconnue en plein mariage? Silencieux, il écoute d'une oreille distraite la lecture faite.

Il manquait un cheval à l'écurie…

Un?

Dante ouvre les yeux, fixant d'un air sauvage la carte du monde. L'odeur de la peur… La chair fraîche… L'unique porte fracturée de l'intérieur… Le cheval manquant. UN cheval manquant…

… Nos proies n'ont pas été kidnappées… Elles ont fuit … Le père y est pour quelque chose je pense. Sinon elles seraient revenues le retrouver plus tard dans la soirée… Un gamin retourne toujours là où il se sait en sécurité. Elles seraient revenues.

mi deuxième ennéade de Verimios An 17 du XIe cycle
Diantra, place publique
15 heures

Il fait froid, mais beau, maigre consolation pour les yeux dépareillés qui ne sont pas habitués à autant de blanc partout. Il y en a sur les toits, sur le sol. Sans compter les glacons qui lui renvoie leur chatoyants reflets de façon fort cruelle.

Ca fait deux jours qu'ils sont arrivés. Il y a bien quelque témoignages glanés ici et là. sur l'arrivé d'une guerrière… Prêtresse d'Othar apprend t'il entre deux visites. Les rumeurs sont encore fraîches dans les tavernes et les lieux publics. La piste se réchauffe sensiblement.

Tous s'accordent pour diriger le voyageur vers le temple de Néera... Duquel il sort un bon moment plus tard avec un semblant d'information. Avoir rencontré une autre personne, il aurait pu avoir des informations différentes et sensiblement écourté sa traque. Mais celles qu'il interrogent se sont plus rappelés d'une prêtresse d'Othar ayant quitté les lieux pour rentrer chez elle, à Oësgard.

Personne n'est capable de lui dire si elle était accompagnée ou non de deux gamines.
Personne ne semble non plus faire le lien entre la description d'Amaryllis et Myosotis qui sont là depuis un moment déjà, un peu plus loin, à faire leur corvées de la journée. Pourquoi l'auraient t'elles fait? Dejà leur arrivée sombre peu à peu dans l'oubli.

Personne ne peut savoir que celles qu'il cherche passent derrière lui  alors qu'il se dirige vers la sortie de la cathédrale, puis vers son auberge  pour reprendre sa traque sur la piste qu'il a dénichée, celui de la prêtresse d'Othar nommée Helena.  

Personne ne peut savoir comment il est passé près du but. Mais ce n'est que partie remise.