Renifler les bonnes affaires [Diolando]

8ème ennéade de Vérimios – Premier mois de l’Hiver.
17ème année du XIème cycle.
Quelque part dans l’Est de Thaar…

Je devais bien me l’avouer à moi-même, ce projet d’ouvrir un commerce d’alcool et de liqueur, ainsi que deux établissements de jeux de hasard, où auront lieux maints jeux d’écus et de souverains, et où certains perdront jusqu’à leur héritage, et celui de leurs enfants, m’enivre en tout point. Je m’étais acharné à réaliser les calculs les plus précieux et les statistiques les plus probantes, et les perceptions des futurs chiffres d’affaire étaient réjouissantes. Mon clan bénéficiait déjà des largesses du commerce des Mille-Caves, grâce au Comptoir Caravanier Central d’Ambreroc, mais l’ajout de ces trois autres affaires serait un plus, que dis-je, un joyau trônant sur ma couronne.

Beaucoup des obligations de telles investissements étaient déjà réglées, ou en voie de l’être. J’avais fait un appel d’offre à large échelle, j’avais fait les démarches auprès des instances législatives de Thaar afin que me soient accordés permis et autorisations. Il ne me restait plus qu’à trouver les établissements, et les réseaux qui alimentaient ces possessions luxueuses.

Aussi m’étais-je entouré de quelques gros bras, et déambulais-je dans les rues de l’Est de Thaar. Je cherchais avec aplomb et envie, un bâtiment qui puisse convenir à mon cahier des charges. J’avais ouïe dire qu’un ancien bâtiment appartenant à une riche femme, serait sans aucun doute à vendre, à condition d’y mettre le prix. Je n’avais pas toutes les informations nécessaires, aussi décidais-je d’y aller par moi-même, et d’inspecter ledit bâtiment. J’avais tout préparé sur moi : vélin, encrier, plume, même un scribe, au cas où j’obtenais trop d’information et que quelqu’un devais les prendre pour moi.

Mais Thaar était une cité luxuriante en tout point : complots et méfaits y étaient fomentés, ce n’était pas qu’une légende urbaine. Ma garde rapprochée saurait y pourvoir. En revanche, qui sait quel étrange individu, ou quel riche marchand pouvait se trouver au prochain coin de rue ? Parfois, une rencontre fortuite peut être le prémisse d’une aubaine… Productive.

Oui, plusieurs bâtiments seraient intéressants pour mes projets commerciaux. Mais tous avaient des défauts majeurs, qui demanderaient de grands travaux de rénovation, d’aménagement et de mises aux normes décidées dans mon cahier des charges. J’avais, évidemment, prévu une facture épaissie par le luxe des matériaux qui seront placés et construits dans cette entreprise, mais mes fonds, bien qu’aussi grands qu’une montagne, n’étaient pas un puit sans fin. Il faudrait des ennéades de travaux, de mises aux normes, puis engager une armée de serviteurs, et d’employés, investir dans une communication efficace, un outil de presque-propagande… Et seulement, compter les premiers bénéfices. Et l’amende infligée par le conseil après les Semailles, avait amputé une partie des finances des Mille-Caves, et donc, par voie de conséquence, été répercutée sur les taxes et impôts levés par le sombre, et sur les obligations pécuniaires et financières des Nains de la communauté.

Mon clan, le clan Ambreroc, n’avait pas été épargné. Emissaire ou non, porte-parole du Sombre lui-même, ou non, l’or des Ambreroc avait été en partie réquisitionné par les Mille-Caves afin d’assurer une couverture financière des Mille-Caves. Cet argent, nous étions sensés le revoir tôt ou tard, mais mieux valait être force de proposition, et de construction, plutôt que d’attendre encore et encore. Et moi-même, je ne voulais plus être seulement héritier. Je voulais construire.

Mes pensées furent anéanties, s’effondrant comme le ferait un nuage soufflé par une bourrasque violente, par l’arrivée de Diolando Vega. Diolando, de la famille Vega, Prince-Marchand de Qiryah, conseiller siégeant au conseil de Thaar. Exubérant, volubile, prompt aux machinations, il était, depuis longtemps, placé sous la surveillance de la loge d’Onyx. Plusieurs espions suivaient ses affaires et alimentaient nos ressources de renseignements. Toutefois, je dois dire que je ne connais pas suffisamment de choses sur lui pour espérer me sentir en sécurité face à lui. Avoir un coup d’avance est un confort inexistant pour le moment, mais peut-être que cela changerait dans le futur.

A sa première prise de parole, je ne réagis point. Il se présente toute de même ensuite. Posant doucement le stylet sur le vélin, lui-même posé sur un support d’argile creusé de sorte à pouvoir porter un petit encrier sans le faire tomber, je remis le bouchon dudit encrier, afin de me mouvoir sans risquer d’éclabousser tout le monde. Je me tourne ensuite vers le conseiller, dans un mouvement purement mécanique. Seules mes chevilles s’animent, le reste de mon corps restant droit comme un « i » tel un roc, un marbre froid. Mes prunelles brunes se posent sur le conseiller, soigneusement tenu à distance par la présence d’une garde de gros bras.

- Marzaban Ambreroc, émissaire des Mille-Caves. De par son statut, résolument au-dessus du mien, et de par ma fonction, je ne peux décemment rester de marbre, au risque d’entamer dès le début, une relation avec le conseiller qui, déjà, doit être bien bancale. Oui, conseiller. Je recherche quelques bâtiments pour un investissement. Et vous, que faites-vous ici ?

Le spectacle des Semailles Pourpres… Oui, évidemment que j’en ai entendu parler. Comment ne pas en entendre parler, quand, dans les rues, les badauds, les ignares et les comploteurs, parlent d’un spectacle qui mettra en lumière les tenants et aboutissants de ces tragiques soirées ? Evidemment, les Mille-Caves suivront cette affaire avec attention, car, lorsqu’il sera joué, le spectacle sera cerné par différents espions qui nous rapporteront toutes les paroles et tous les dires, et tous les actes, de cette farce mal inspirée.

Le regard et l’esprit de Diolando se reportent alors sur le bâtiment que j’inspecte, et sur l’objet de ma visite : l’idée d’investir. Et sa question me ferait arquer un sourcil, si j’étais doué d’émotions. A l’inverse, je restais de marbre, mes prunelles ancrées dans les siennes, les yeux mi-clos, masquant mon ennui.

- Nul besoin de partenaire sur cette affaire, il s’agit uniquement de l’investissement de mon clan. Toutefois, peut-être pourrions nous entendre, à l’avenir. Je ne veux pas trop en dévoiler pour l’instant, mais son insistance me fait poindre une idée : Diolando étant un « artiste », il pourrait avoir besoin d’une scène. Et quoi de mieux qu’une scène placée au centre d’un bâtiment de jeux de hasards ? Cela ferait venir des clients, des consommateurs, et lui pourrait obtenir de grands bénéfices. Par contre, son invitation… Les fosses ? Vous voudriez discuter, en m’invitant dans une structure qui nous appartient déjà ? Les fosses Gilgamek sont une possession des Mille-Caves, vous le savez j’espère ? Toutefois, j’en ai terminé. Allons-y.

Trop de mots tuent la discussion. Tout est affaire de calculs. Nous nous rendons donc en direction des fosses de Gilgamek, à plusieurs pas de là. L'endroit n'était pas des plus incroyables. Aucun luxe, sauf pour les quelques loges princières, des loges construites aux meilleures places, occupées par des Princes-Marchands, de hauts dignitaires ou de richissimes commerçants. Nous prenons donc place dans une de ces loges. Elles sont spartiates, mais confortable, et surtout elles sont isolées. Les seuls allés et venus sont réalisés par des serviteurs qui vont et viennent pour nos commandes et notre confort.

- Alors, de quoi voudriez-vous discuter, maintenant que vous êtes chez nous ?

Une chose m’échappe. Et cela est suffisamment rare pour que ce soit notifié. Diolando est connu, dans la sphère d’influence Thaarie, comme étant un être aussi volatile qu’imprévisible, aux motivations aussi difficiles à cerner que mes émotions – c’est-à-dire impossible. Serait-ce l’or ? Sans doute un petit peu, sinon, comment serait-il devenu suffisamment puissant pour être Prince-Marchand. Serait-ce le pouvoir ? Même réponse. On ne peut décemment point devenir celui qu’il est, sans avoir statistiquement des cadavres dans le placard, et du sang sur au moins quelques doigts. Mais à part ces déductions, qui sont plus de la logique pure qu’un véritable travail de recherche et d’espionnage… Je dois avouer que, pour une fois, je suis face à un néant.

Alors que nous étions assis, un serviteur arriva à ma hauteur, et je commandais, en langue Khazalide, un whisky vieillit en fût de bois de palissandre, fumé au feu d’un bois couvant pendant deux mois. Ce whisky n’était pas le plus rare, mais il était coûteux, très coûteux. Et, alors que j’écoutais Diolando, mon verre arriva. Par réflexe, je fis tournoyer le précieux liquide ambrer aux reflets magnifiques, dans un épais verre fait de cristal. Mais le verre avait quelque chose d’unique : le cristal avait été gravé de runes de froids, délivrant un pouvoir passif, celui de glacer le contenant et de maintenir le contenu à une température idéale. Ce genre de verres n’était pas présent en grande quantité chez les Durgazdawi, étant donné le très, très faible nombre de runistes présents au sein de la communauté. S’il arrive que des guerriers quittent les frontières du Zagazorn pour suivre la voie du mercenariat, et s’il arrive plus souvent encore de voir des commerçants, des négociants et de riches marchands de quitter lesdites frontières, il est extrêmement, que dis-je, autrement, sublimement plus difficile et rarissime de voir un runiste sortir de son antre, et ce, même pour rejoindre une autre communauté Naine digne de son rang. Ainsi, il ne devait y avoir que quelques scriberunes, dont moi, à peine deux ou trois graverunes… Et forgerunes.

Aussi, disais-je, ces verres sont très peu nombreux. Quelques exemplaires existent dans les différentes possessions Naines et des Mille-Caves, et sont réservés aux dignitaires de la communauté, et aux invités d’exception. Toutefois, je pouvais me targuer de posséder plusieurs de ces verres runés dans ma collection personnelle, dans plusieurs matériaux différents. Mais je savourais toujours autant ce délicieux breuvage, dans un verre glacé.

Toutefois, si la première gorgée fut délicieuse, la second eut un goût plus amer. Il me tutoie. Je dois dire que cela ne me plaît pas réellement. J’avale ma gorgée, et affiche un regard neutre, les yeux mi-clos, les lèvres fermées.

- « Veux-tu » ? Demandais-je, sans tourner mon visage vers lui. Conseiller Diolando, il est évident que votre rang, et le mien, ne sont pas identiques, et que vos responsabilités et votre statu vous octrois certaines possibilités et certains droits qui, statistiquement, ne peuvent ni vous êtres reprochés ni vous êtres discutés. Toutefois, je suis l’émissaire du Sombre, le Maître des Caves. Et en cette qualité, je suis son bras droit, et vous devez me respecter. Je ne vous tutoie pas, faites-en de même s’il vous plait. Bien. Je reprends deux grandes gorgées de cet élixir qui satisfait à tous mes vices. Vous parliez donc de votre chorégraphie ? Je suis tout ouïe. Hun Gorogaraz uf orruduzi, Girdunazul. Haf ! Kronkulundi !

Par ces quelques mots, j’ordonnais à un serviteur de nous resservir nos boissons, et leur meilleur venaison cuite avec brio et assaisonnée ave maîtrise. Et, à côté, j’indiquais à l’un de mes gardes du corps – qui en réalité était un espion de la Loge d’Onyx – de tout retenir de ce que Diolando allait nous dire, dès à présent.

Je remarque le sourcil arqué de Diolando, ce qui me fait tourner la tête d’un angle de de 52 degrés. Il parle, sans gêne, mais avec un argumentaire qui fait écho en mon esprit, puisque, effectivement, le tutoiement est souvent usité pour établir une forme de confiance. De plus, chez nous, les Nains, le vouvoiement n’existe pratiquement pas. Entre deux Nains qui ne se connaissent pas, le vouvoiement peut avoir lieu, mais durant un bref instant seulement. Une fois qu’un Nain en connait un autre, le tutoiement est de mise. Ainsi, tout le monde tutoie le Roi, car tout le monde le connait. Et le Roi tutoie tout le monde, bien qu’il ne connaisse point l’entièreté des gens de son peuple.

- Mais je ne suis pas un Homme, je suis un Dawi. Et chez nous, le vouvoiement est de mise lorsque deux individus ne se connaissent point. Il tendra toutefois à rapidement disparaître. Patience, conseiller Diolando. Il continue ensuite son argumentaire, après avoir goutté à un breuvage qu’il semble apprécier.

Les Semailles pourpres ? Je dois avouer que le nom me fit réagir dans ma barbe. Rien de visible à l’extérieur, encore une fois, mais à l’intérieur, mon esprit était en pleine ébullition. Utiliser un dérivé du nom « officiel », semblait une bonne idée pour quiconque aurait une âme artistique, mais n’était point agréable, ni bien venu pour nous. L’amende avait eu un violent impact dans les caisses des Mille-Caves… Nous avions réussi à éviter de petites révoltes, ou de petites punitions imposées par diverses personnes – comme par exemple des clients Thaaries qui ne passent plus par les Caves avec l’idée de nous « punir ». Toutefois, la suite des propos de Diolando était… Inattendue.

- Une charmante attention, j’en conviens. Une justice, tout à fait. Je peux sans soucis aucun, vous transmettre les remerciements des Mille-Caves toutes entières. Cependant, et ne vous offusquez pas, j’imagine qu’un tel acte demande une chose de notre part, en retour ? Qu’est-ce donc ?

Je lui en dois une ? Est-il réellement fou ? Ou serait-il si sûr de lui, de sa puissance, de son invulnérabilité, qu’il se permet en tout légitimité d’imposer une redevance aux Mille-Caves ? Puisque, par « vous », il devait sous-entendre les Mille-Caves, et non ma propre personne. Parfois, certains coups de surins se perdent…

- Une dette donc, contractée sans que nous en ayons conscience. Vous ne doutez de rien. Et dire qu’il suffirait d’un signe, un simple signe discret, pour lui faire trancher la gorge là, dans la sécurité et l’écart de cette loge. Disons que nous avons du travail, et que nous nous y attelons corps et braises-vies. Cette réponse devrait vous suffire, je crois. Et vous, que souhaitez-vous dire en cet instant ?

Certes, il n’avait rien à cacher. Mais je soupçonne que son esprit n’ait rien de véritable dessiné, ni planifier. Rester proche d’un individu aussi versatile, n’est sans doute pas des plus sécurisant, ni pour ses ennemis, ni pour ses amis.

Ne voir aucun calcul, lorsqu’il est fait mention d’une dette… Ainsi, le conseiller Diolando n’est pas seulement un trublion, il est aussi un esprit illusionné par sa propre mégalomanie. Comment ne peut-il pas se rendre compte de son propre illogisme ? Une dette est un retour sur un investissement résolument excédent par rapport à un apport déficitaire. Son action, est donc calculée comme ayant plus de valeur, plus d’importance, et qui nécessitera donc un remboursement différé. C’est du calcul. Un idiot s’en rendrait compte. Je ne lui réponds d’ailleurs qu’un signe de tête, avant de terminer mon verre, et d’en recommander un autre.

Puis, les minutes s’égrènent. Le conseiller semble las, avachis sur son assise. Le combat qui se déroule devant nous, n’est pas d’une grande qualité. Ou alors, je ne suis pas le mieux placé pour l’apprécier. Il faut dire que j’apprécie un autre type de combat. Celui que je ne vois pas, mais dont je mesure les conséquences. J’aime tout programmer. Je n’aime pas les effusions de sang, mais j’aime à les planifier. A par un élixir savoureux, rien ne me fera plus plaisir que d’apprendre dans les rumeurs de la cité, les meurtres qui ne seront jamais résolus.

Et voilà que le conseiller revient. Mais cette fois, il semble bien plus sombre, bien moins vindicatif, bien moins provinciaux. Son intonation change, tout comme son message. Et celui-ci, pour être honnête, trouve enfin un résonnement en mon esprit. Car je pense exactement comme lui, ou peu s’en faut.

Oui, Thaar est faible. Elle peut survivre à un long siège, grâce à ses provisions, et grâce à une population richissime, mais elle ne peut se défendre bien longtemps. Pourquoi ? Parce que tout, en Ithri’Vaan, est sujet à la division. Chaque Prince-Marchand cherche à supplanter l’autre. Chacun veut plus d’or, plus d’armes, plus d’influence, plus de moyens, plus de mercenaires, plus de puissance, que son voisin proche ou éloigné. De ce fait, jamais, ô grand jamais, les princes et princesses-marchandes accepteront de faire front commun. Nous sommes trop fourbes, trop méfiants. Pour une armée de métier, une force commune, centrale, il faut un pouvoir central. Et un pouvoir central ne peut être obtenu que par un seul individu, qui rendrait compte à un conseil. Mais les Vaanies pourraient-il élire un Roi ? Une Reine ? Un Empereur ? Une Impératrice ? Jamais, non.

- Vos paroles ne tombent pas dans des oreilles sourdes. Je pense moi aussi, que Thaar mériterait une force de métier, une force franche, forte et disciplinée, qui exécuterait des ordres précis. Mais pour cela, il faut un pouvoir plus fort encore. Et vous le savez mieux que moi : notre pouvoir est divisé en autant de sièges derrière ce conseil. Mais jamais le conseil ne cèdera sa place à un souverain. Quelle légitimité aurait-il, de toute manière. Les projets sont beaux, les idées aussi. C’est ce qui se cache derrière qui l’est nettement moins.

Si son discours n’est dénué d’un certain sens, peut-être pas éthique, mais au moins intellectuel, et d’une dose permettant de gonfler mon orgueil, il semble, encore une fois, beaucoup trop hâtif, et peu réfléchit. Ou du moins, mal réfléchit. Je le laisse, toutefois, terminer sa réflexion. Cette fois-ci, je comprends que le conseiller et Prince-Marchand, n’est point calculateur. Comme il me l’a dit tout à l’heure, il n’est véritablement point mu par le calcul, l’accumulation quelconque, ni par la fourberie. Oh, je ne lui fais point encore confiance. La « confiance » sera là, lorsque j’aurais suffisamment de secrets sur lui pour pouvoir prédire le moindre de ses mouvements, connaître ses moindres secrets, avoir toujours un levier contre lui. Car son imprévisibilité, et sa manière d’être, trahissent un individu incontrôlable, sans habitude, sans routine. Il est dangereux, à sa manière.

- Vous oubliez que je ne suis qu’émissaire. Je sers le Sombre, et les Mille-Caves. Et ici, mes paroles n’engagent que moi. Je crains que vous ne vous emportiez, conseiller Diolando. Cette discussion restera au stade larvaire, aussi longtemps que vous et moi ne serons point égaux. Et croyez en ma complète et sincère fidélité quant à la cause des Mille-Caves, et à Salfaryl le Sombre. Mais peut-être reprendrons nous cette discussion en d’autres temps, en d’autres lieux. Et en d’autres termes.

Bien. Les choses étaient donc en suspens. D’après l’attitude de Diolando, il attend vraisemblablement quelque chose. Dois-je poser des questions ? Espère-t-il des révélations ? Souhaite-t-il quelque chose en particulier ? Ou se délecte-t-il seulement de ce nectar, et de sa position de celui qui croit avoir tout saisi, tout compris, tout maîtriser. Toutefois, il est temps pour moi d’en terminer avec cette entrevue qui était imprévue.

- Je suis attendu ailleurs, je dois vous quitter. Vous pouvez profiter de cette loge, et ne vous inquiétez pas pour vos consommations : elles vous sont offertes. Jusqu’ici tout du moins. Passez une bonne journée.

Puis, d’un claquement de doigt, nous partons. Seul un serviteur reste, pour servir le conseiller s’il souhaitait commander d’autres choses, qui seront, cette fois, à sa charge.